7. Canada

Depuis la fin des années 80, le Canada a considérablement réduit le soutien à l’agriculture. Exprimé en pourcentage des recettes agricoles brutes, le soutien aux producteurs a baissé de moitié entre 1986-88 et 2000-02, ce qu’il doit notamment à l’arrêt du soutien aux prix de marché (SPM) accordé à l’industrie céréalière en 1995. Il a une nouvelle fois été divisé par deux au début des années 2010 et représentait en moyenne quelque 10 % des recettes agricoles brutes en 2019-21, tout juste au-dessus de la moyenne de l’OCDE.

Malgré les réductions passées, le SPM constitue toujours l’essentiel du soutien aux producteurs (même si seuls sont concernés les secteurs du lait, de la volaille et des œufs, où l’offre reste régulée) et a pour effet de hisser les prix intérieurs au-dessus des cours mondiaux par le jeu des droits de douane, des quotas de production et des mécanismes de fixation des prix. Dans la filière laitière, les transferts au titre d’un seul produit sont élevés et représentent 37 % des recettes agricoles brutes. En moyenne, les prix perçus par les agriculteurs en 2019-21 excédaient de 5 % ceux du marché mondial, tandis que les prix des produits de base dont l’offre n’était pas régulée coïncidaient avec les niveaux mondiaux. Les paiements fondés sur l’utilisation sans contraintes d’intrants variables, notamment l’énergie, font aussi partie de ceux qui peuvent créer les distorsions les plus marquées. Avec le soutien des prix du marché, ils représentaient 55 % du total des transferts bruts aux producteurs en 2019-21, soit 5 % des recettes agricoles brutes. Pour le reste, le soutien budgétaire apporté aux producteurs à titre individuel a essentiellement porté sur la gestion des risques. Des conditions météorologiques particulièrement défavorables ont accru le rôle des instruments de gestion des risques en 2021, comme en témoigne l’augmentation de près de 2.9 milliards CAD (2.3 milliards USD) des versements effectués au titre de l’assurance récolte par rapport à l’année précédente.

Rapporté à la taille du secteur, le soutien aux services d’intérêt général (ESSG) a diminué, signe que la croissance des dépenses n’a pas suivi celle du secteur. Les débours ont représenté 3 % de la valeur de la production agricole en 2019-21, contre 6 % au début des années 2000 ; ils atteignent ainsi une proportion légèrement inférieure à la moyenne de l’OCDE. En termes de composition, les deux priorités majeures du Canada sont invariablement le volet des connaissances et de l’innovation agricoles et celui des systèmes d’inspection et de contrôle, chacun représentant, ces dernières années, environ 40 % des dépenses comptabilisées dans l’ESSG. Cependant, alors que la part des connaissances et de l’innovation agricoles dans l’ESSG est restée relativement stable depuis la fin des années 80, celle des systèmes d’inspection et de contrôle a augmenté de 17 points de pourcentage au cours de la même période.

Dans l’ensemble, le coût du soutien total au secteur agricole a diminué. L’estimation du soutien total représentait 0.4 % du PIB du Canada en 2019-21, contre 1.6 % en 1986-88 et 0.7 % en 2000-02, soit bien moins que la moyenne de l’OCDE. Au cours des trois dernières années, les trois quarts en ont été versés aux agriculteurs individuellement et le reliquat a été consacré aux services d’intérêt général.

Les ministres de l’Agriculture des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont publié conjointement l’Énoncé de Guelph le 10 novembre 2021. Ils y définissent les orientations pour l’avenir du secteur et le prochain cadre stratégique pour l’agriculture du Canada, qui doit être présenté en avril 2023. Le renforcement de l’agriculture durable est au cœur de l’Énoncé, qui fixe plusieurs priorités comme la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement ; l’investissement dans la science, la recherche et l’innovation ; la création de conditions permettant aux entreprises canadiennes de relever des défis en constante évolution ; le renforcement des capacités et la croissance du secteur, ainsi que l’amélioration de la résilience dans le but de prévoir et d’atténuer les risques et d’y répondre.

Les mesures prises récemment au Canada visent à alléger les pressions financières sur les éleveurs, qui ont dû faire face à des surcoûts exceptionnels en raison de la sécheresse et des incendies. Les températures record et le déficit de précipitations qui ont marqué l’année 2021 ont frappé la production agricole dans les provinces de l’Ouest. Le gouvernement fédéral a débloqué 100 millions CAD (80 millions USD) par l’entremise du cadre Agri-relance pour répondre aux besoins immédiats. Un éventail de mesures ont été prises à l’échelon provincial dans le même but.

  • La part de l’agriculture dans les émissions de gaz à effet de serre (GES) du Canada (8 %) reste inférieure à la moyenne de l’OCDE, et les niveaux d’émission du secteur en volume absolu sont restés largement stables au cours des 15 dernières années. Les objectifs ambitieux de réduction des émissions de GES à l’échelle de l’économie ne ciblent pas précisément le secteur agricole, qui pourrait dès lors rester à la traîne. L’objectif national de réduction des émissions dues aux engrais est un pas en avant dans la lutte contre les émissions de protoxyde d’azote (N2O), lesquelles ont augmenté au cours des 15 dernières années, contrairement aux émissions de méthane (CH4).

  • Le Canada affiche l’un des systèmes de tarification du carbone les plus stricts au monde. Le secteur agricole en reste toutefois largement exclu. En effet, les émissions agricoles non liées à l’énergie n’y sont pas prises en compte et l’essence et le gazole à usage agricole bénéficient de dérogations et de réductions. Le système de tarification du carbone n’incite donc que timidement à réduire une faible proportion des émissions agricoles. Il est recommandé de fixer des objectifs spécifiques aux émissions imputables à l’agriculture et à l’affectation des terres en fonction de leurs coûts marginaux, afin de soutenir les efforts déployés dans les autres secteurs de l’économie pour lutter contre les émissions de GES. Étendre le déployment de mécanismes de crédits carbone propres à l’agriculture pourrait en outre encourager une évolution des pratiques vers une moindre émission de GES et le stockage du carbone dans les sols.

  • Le plan Un environnement sain et une économie saine engage le Canada vers une réduction des externalités environnementales négatives associées à l’agriculture et une meilleure durabilité du secteur grâce au développement et à l’adaptation de technologies et de processus propres. Il est toutefois essentiel de fixer des objectifs clairs et concrets ainsi que de suivre la mise en œuvre du plan et d’évaluer ses effets pour que ses ambitions aboutissent.

  • L’accord-cadre Partenariat canadien pour l’agriculture (2018-23) continue de mettre l’accent sur le soutien aux services d’intérêt général utiles au secteur à travers des programmes visant la recherche-développement pilotée par le secteur privé, l’adoption des innovations et les systèmes d’inspection et de contrôle. Le prochain cadre stratégique devrait accentuer cette tendance afin d’améliorer la compétitivité et la durabilité à long terme du secteur.

  • Le cadre stratégique pour l’agriculture 2018-23 met à la disposition des agriculteurs un ensemble d’outils de gestion des risques. L’approche canadienne en la matière a évolué au fil du temps pour réduire la dépendance aux interventions ponctuelles des pouvoirs publics et s’orienter vers un cadre d’action plus axé sur la prévention. En menant une évaluation globale des leviers d’action en faveur de la gestion des risques et en déployant de nouveaux programmes d’amélioration de la résilience, il serait toutefois possible de favoriser l’adoption à plus grande échelle des dispositifs les plus efficaces, de stimuler l’élaboration d’instruments fondés sur le marché et d’encourager les agriculteurs à chercher de meilleurs moyens de gérer les risques au niveau de leur exploitation. Par ailleurs, les liens et les arbitrages qui se jouent entre les programmes de gestion des risques commerciaux et les résultats environnementaux pourraient être propices à une amélioration de la résilience à long terme du secteur (OCDE, 2020[1]).

  • Bien que le soutien aux producteurs, en proportion des recettes agricoles brutes, ait été inférieur à la moyenne de l’OCDE ces dernières années, les transferts susceptibles d’entraîner les plus fortes distorsions en demeurent la principale composante, en particulier ceux qui découlent du soutien des prix du marché dans le secteur laitier. Les prix intérieurs de la plupart des produits de base correspondent aux cours mondiaux, mais les filières lait, volaille et œufs restent protégées de la concurrence internationale par le jeu d’un soutien des prix de marché, ce qui fausse la production et les échanges. Pour abandonner progressivement la gestion de l’offre de ces produits, il conviendrait d’accroître les quotas et de réduire le soutien des prix dans les filières en question. Cela encouragerait une plus grande réactivité aux conditions du marché, favoriserait l’innovation (afin de gagner en efficience et de diversifier la production avec des produits à plus forte valeur ajoutée), et diminuerait la rente des quotas.

Référence

[1] OCDE (2020), « Resilience to natural disasters in Canada », dans Strengthening Agricultural Resilience in the Face of Multiple Risks, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/d1b84788-en.

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