Démence
La démence représente l’un des plus grands défis liés au vieillissement de la population. Le terme « démence » désigne un ensemble de troubles du cerveau, dont la maladie d’Alzheimer, qui entraînent des lésions cérébrales provoquant une détérioration progressive des capacités fonctionnelles et des relations sociales de l’individu. Malgré les milliards de dollars investis dans la recherche sur les troubles liés à la démence, il n’existe à ce jour aucun remède, et les traitements modifiant sensiblement l’évolution de la maladie commencent seulement à voir le jour.
On estime que plus de 21 millions de personnes souffrent de démence dans les pays de l’OCDE en 2021. Si les tendances actuelles se confirment, sa prévalence devrait doubler d’ici 2050, pour atteindre près de 42 millions d’individus dans l’OCDE. L’âge reste le premier facteur de risque de la démence : dans les 38 pays de l’OCDE, la prévalence de la démence est de 2.2 % chez les individus âgés de 65 à 69 ans, et atteint près de 42 % chez les plus de 90 ans. Cela signifie qu’avec le vieillissement des pays, le nombre de personnes souffrant de démence augmentera aussi – en particulier avec l’augmentation de la part des plus de 80 ans. Les pays dont les populations sont les plus âgées parmi les pays de l’OCDE (notamment le Japon, l’Italie et l’Allemagne) affichent déjà les plus forts de taux de prévalence de la démence. En moyenne dans l’OCDE, on estime que 15 personnes sur 1 000 souffrent de démence (Graphique 10.8). Dans huit pays, plus de 20 personnes sur 1 000 sont atteintes de démence. En 2050, dans tous les pays membres de l’OCDE sauf cinq (Hongrie, Israël, Mexique, République slovaque, et République tchèque) la prévalence de la démence dépassera 20 personnes sur 1 000, et dans cinq pays (Corée, Espagne, Grèce, Italie, Japon), plus d’une personne sur 25 souffrira de démence.
Malgré l’absence de traitement disponible dans la plupart des pays de l’OCDE, les systèmes de santé et de protection sociale peuvent contribuer à améliorer les soins et la qualité de vie des personnes atteintes de démence et de leur famille. Au moins 25 pays de l’OCDE ont récemment mis en place ou annoncé des stratégies ou des plans nationaux pour la prise en charge de la démence ; par ailleurs la lutte contre la stigmatisation liée à la maladie, et l’adaptation des collectivités et des centres de soins aux besoins des personnes atteintes de démence font l’objet d’une attention croissante (OCDE, 2018[1]).
Les neuroleptiques peuvent réduire les symptômes comportementaux et psychologiques dont souffrent de nombreuses personnes atteintes de démence, mais compte tenu de la disponibilité d’une gamme d’interventions non pharmacologiques efficaces – ainsi que des risques associés et des questions éthiques que pose leur prescription –, ils ne sont recommandés qu’en dernier ressort. Toutefois, l’utilisation inappropriée de ces médicaments reste répandue et la réduction de leur surconsommation est une priorité des pouvoirs publics dans de nombreux pays de l’OCDE. En 2019 dans 19 pays de l’OCDE, plus de 5 % des plus de 65 ans ont reçu une prescription de neuroleptiques. Ce chiffre masque de grandes disparités entre les pays : sans tenir compte de la Lettonie, les prescriptions de neuroleptiques peuvent varier de 1 à 6, allant de 16 prescriptions pour 1 000 habitants de 65 ans et plus en Suède, à 97 en Irlande. En outre, les taux standardisés suivant l’âge de prescription de neuroleptiques étaient plus élevés pour les femmes que pour les hommes dans tous les pays de l’OCDE. En moyenne dans 19 pays de l’OCDE, les femmes étaient 31 % plus susceptibles de se voir prescrire des neuroleptiques que les hommes (Graphique 10.9).
Les individus atteints de démence ont été fortement affectés par la pandémie de COVID-19. Les mesures prises pour contenir le virus, en particulier l’interdiction des visites dans les établissements de soins de longue durée, ou leur limitation, ont considérablement aggravé l’isolement social. Il est possible que les mesures de confinement mises en place pour lutter contre la pandémie aient, à plus long terme, des répercussions négatives sur le déclin cognitif et le bien-être de nombreuses personnes souffrant de démence.
Les estimations de la prévalence du Graphique 10.8 sont tirées du World Alzheimer Report 2015, qui inclut un examen systématique des études sur la prévalence de la démence à travers le monde. La prévalence par pays a été estimée en appliquant ces taux de prévalence par âge pour la région du monde concernée aux estimations démographiques de la révision 2019 des Perspectives de la population mondiale de l’Organisation des Nations Unies. Les différences entre les pays sont donc influencées par les structures démographiques : les pays ayant des populations plus âgées ont plus de personnes atteintes de démence. L’analyse du World Alzheimer Report 2015 comprend des études réalisées depuis 1980, et suppose que la prévalence par âge est constante dans le temps. Cette hypothèse a été conservée lors de la construction de cet indicateur, de sorte que les mêmes taux de prévalence spécifiques par groupe d’âge sont appliqués pour 2021 et 2050. Même si des taux de prévalence par sexe existaient pour certaines régions, ce sont les taux globaux qui ont été utilisés dans cette analyse. Les données du World Alzheimer Report 2015 ont été utilisées pour garantir l’uniformité de la méthodologie dans tous les pays de l’OCDE, même si des estimations plus récentes de la prévalence étaient disponibles dans certaines régions et certains pays.
Les neuroleptiques sont définis de manière identique dans tous les pays, en utilisant les codes de la classification Anatomique, Thérapeutique et Chimique (ATC). Le numérateur comprend tous les patients sur le registre des médicaments ayant une prescription pour un médicament du sous-groupe ATC N05A. Le dénominateur est le nombre total de personnes inscrites au registre. La plupart des pays ne sont pas en mesure de recenser les prescriptions qui concernent des personnes atteintes de démence, c’est pourquoi l’indicateur sur les neuroleptiques inclut toutes les personnes âgées de plus de 65 ans. Une certaine prudence s’impose au moment de tirer des conclusions sur la population atteinte de démence, car rien ne dit qu’un taux supérieur de prescription chez l’ensemble des plus de 65 ans se traduit par davantage de prescriptions destinées aux personnes atteintes de démence. Néanmoins, évaluer cet indicateur, comprendre les écarts de résultats et réduire la consommation inappropriée des neuroleptiques sont autant de stratégies qui permettront d’améliorer la qualité de la prise en charge de la démence.