4. Examen du leadership et des aptitudes de la fonction publique brésilienne

Le Brésil prend d’importantes mesures pour moderniser et rénover une fonction publique professionnelle et solide, constituée d’agents qualifiés et dévoués (Encadré ‎4.1). À titre d’exemple, le pays a amélioré les services numériques et les systèmes de gestion des ressources humaines, créé davantage de possibilités de mobilité professionnelle et de renforcement des compétences des équipes d’encadrement et aidé les ministères à mieux planifier les effectifs. Il est toutefois possible de faire mieux, notamment de regrouper des mesures et initiatives isolées pour en améliorer l’impact et de simplifier certains des aspects juridiques et structurels du système de carrière qui sont une source de complexité. Bon nombre des problématiques examinées ici portent sur la manière de réduire la rigidité du système d’emploi public afin qu’il devienne plus flexible et soit plus à même de faire face aux évolutions complexes auxquelles la fonction publique brésilienne est confrontée.

Cet examen du leadership et des aptitudes de la fonction publique du Brésil réalisé par l’OCDE est le premier de ce type – il s’agit d’une nouvelle approche des examens par les pairs, organisée autour des 14 principes de la Recommandation PSLC de l’OCDE (Graphique ‎4.3). Il a commencé par un examen général des pratiques de gestion des ressources humaines à l'aune de ces 14 principes, réalisée à l'automne 2022. Cette première étape a été suivie d'une analyse plus approfondie de trois axes de réforme prioritaires : la transformation du système de carrière pour créer un secteur public moderne et agile, le renforcement de la flexibilité grâce à une meilleure gestion des contrats temporaires et la conception d’un système de gestion des performances solide. L’examen a bénéficié de l’apport de représentants de la France et du Portugal, qui ont fait part de leur expérience en matière de formulation et de mise en œuvre de réformes de la fonction publique portant sur ces trois aspects prioritaires.

S'agissant du premier thème autour duquel s’articule la Recommandation – une culture et un leadership guidé par des valeurs –, l’examen général montre que le Brésil a pris quelques mesures pour renforcer la haute fonction publique en assainissant le système pour qu'il soit plus facile de distinguer les rôles d’encadrement à tous les niveaux de la hiérarchie et en introduisant des critères minimums pour la nomination des membres de la haute fonction publique. L’École nationale de l'administration publique (ENAP) a coopéré avec les entités pour créer un vivier de membres de la haute fonction publique et former les futurs hauts responsables. Par ailleurs, LA-BORA!gov (un laboratoire d'apprentissage et d'innovation intégré au ministère de la Gestion et de l’Innovation publiques) et l’ENAP ont apporté une contribution précieuse à la recherche de solutions innovantes. L’Examen recommande néanmoins au pays de déployer plus largement ces initiatives dans l’ensemble de la fonction publique et de les inscrire dans le cadre d'une vision plus large de la haute fonction publique brésilienne. Il montre également qu’il reste d’importants progrès à accomplir dans le domaine de la diversité et de l’inclusion et qu'il faudrait à cet égard aller au-delà de l’imposition de quotas et collecter des données de meilleure qualité.

Pour ce qui est du deuxième thème autour duquel s’articule la Recommandation – une fonction publique fiable et capable –, l’Examen recommande au Brésil de procéder à un recensement systématique des compétences nécessaires, qui évoluent, et de veiller à l'articulation entre le renforcement de ces compétences et l’offre de formation. Actuellement le système de carrière impose des limites parce qu’il n’est pas suffisamment souple pour permettre de recruter et d’évaluer des candidats présentant de nouveaux profils de compétences. Les procédures de recrutement sont certes très transparentes, mais il serait possible de moderniser les méthodes d'évaluation des compétences des candidats. Des méthodes plus adaptées pourraient être trouvées et le rôle des organismes privés dans la conduite des évaluations pourrait être clarifié. Le Secrétariat de la gestion des ressources humaines (Secretaria de Gestão de Desempenho de Pessoal, SGP) pourrait utiliser sa délégation de pouvoir en matière d'ouverture de nouveaux concours de recrutement de façon plus stratégique de manière à mettre en lumière le besoin de compétences stratégiques orientées vers l’avenir.

Enfin, le troisième thème qui sous-tend la Recommandation est que la fonction publique doit être réactive et adaptable. Au sein de la fonction publique brésilienne, le SGP jouit d'une grande latitude en ce qui concerne la définition de normes opérationnelles. La progression de la transformation numérique de la fonction publique serait l’occasion de déléguer davantage de tâches stratégiques en matière de gestion des ressources humaines aux services chargés des ressources humaines, étant donné qu’un plus grand nombre de tâches opérationnelles sont automatisées. Il faudrait cependant que cette évolution s'accompagne de mesures permettant de renforcer les capacités de ces services à prendre en charge les aspects plus stratégiques de la gestion des ressources humaines. Il devrait en résulter une approche stratégique de la fonction publique qui aille dans le sens des efforts déjà déployés pour parvenir à une planification des effectifs de nature à édifier une fonction publique davantage tournée vers l’avenir. Enfin, il serait judicieux que les premières initiatives prises pour mesurer et améliorer l’engagement du personnel soient suivies d'actions ambitieuses visant à instaurer une culture de la fonction publique accordant plus de place à l’ouverture et à la motivation.

La solution à bon nombre des problèmes à surmonter dans le cadre de ces trois thèmes passe par une simplification du système de carrière, qui constitue la base juridique et structurelle de la fonction publique brésilienne. Le SGP a certes entrepris de réduire le nombre de carrières et d’harmoniser le système, mais une réforme plus vaste est nécessaire pour gagner en efficience.

Réformer radicalement le système est sans doute une entreprise de longue haleine qui exige un large soutien politique, mais diverses mesures peuvent être prises à court et moyen terme pour remédier à la fragmentation, à la rigidité et à l’iniquité du système. Les recommandations à suivre sont notamment les suivantes :

  • Simplifier le système de carrière en imaginant un système idéal fondé sur des fonctions et sur des compétences transversales et en œuvrant pour que cette représentation idéale devienne réalité en limitant le chevauchement des carrières, en fusionnant celles qui comportent les mêmes fonctions, en harmonisant les conditions d’emploi et en élaborant des fiches de poste communes comprenant des compétences transversales et d’avenir.

  • Garantir l’équité salariale en passant en revue les fonctions comparables dans les différentes carrières de manière à fixer des salaires de base identiques pour les nouvelles carrières.

  • Définir des critères d'avancement communs tenant compte du développement et des performances professionnels et tenter de mettre au point un système de progression de carrière dans lequel le niveau de responsabilité et de compétence augmente à mesure que les agents gravissent les échelons.

  • Accroître la flexibilité des ressources humaines à travers une amélioration de la mobilité en définissant des cadres communs mettant en valeur les compétences et aptitudes transversales ; en réduisant les obstacles qui empêchent les agents publics de passer d’une carrière à l'autre alors que ce serait justifié ; en s'appuyant sur les programmes de mobilité existants et en les faisant davantage connaître ; en tenant compte de la mobilité dans les promotions et l’évaluation des performances. Comme recommandé dans l’examen du centre de gouvernement du Brésil réalisé par l’OCDE (OCDE, 2022[4]), cette évolution pourrait aussi être un moyen d'améliorer la coordination entre les entités qui composent le centre de gouvernement.

Un recours plus stratégique aux contrats temporaires pourrait être un autre moyen d’accroître la flexibilité, et pourrait permettre de pourvoir aux besoins immédiats et à court terme et de recruter des agents dotés de compétences particulièrement recherchées. Pour y parvenir, le Brésil pourrait :

  • Actualiser les conditions auxquelles est soumis le recrutement de personnel temporaire. Il faudrait que les acteurs concernés s’engagent dans une large réflexion sur les conditions d’emploi du personnel temporaire de manière à ne pas créer un système à deux vitesses. Une procédure de recrutement simplifiée pourrait aussi être envisagée.

  • Examiner les mesures susceptibles de permettre de mieux répondre à une augmentation soudaine de la charge de travail ou à des besoins ponctuels, par exemple l’amélioration de la mobilité.

  • Atténuer le risque de recours abusif à l’emploi temporaire en limitant la durée pendant laquelle il est possible de recruter un agent temporaire et de renouveler son contrat, en veillant à ce que des mesures de lutte contre les conflits d’intérêts soient en place et soient respectées et en garantissant que toutes les procédures de recrutement satisfassent à des critères identiques et exigeants en ce qui concerne le principe du mérite et la transparence.

Enfin, améliorer le système de gestion des performances est un moyen de motiver les agents publics. À cette fin, il est recommandé :

  • D'harmoniser les processus et modalités d’évaluation des performances entre les carrières pour établir une norme connue de tous les agents, ce qui implique de confier la responsabilité de l’évaluation à l’entité d'accueil quelle que soit la carrière.

  • De simplifier l’échelle de notation des performances de telle manière qu’elle ne comporte que trois points et de fixer la note par défaut au milieu (2) pour tous les agents.

  • De lutter contre l’insuffisance des performances en mettant au point un mécanisme qui y remédie au moyen du perfectionnement professionnel et en encadrant la possibilité de recourir en dernier ressort à un licenciement pour insuffisance professionnelle.

  • D'assurer la cohérence entre les objectifs institutionnels et les objectifs individuels en renforçant ImpactaGOV, organisme de formation stratégique, et de continuer d’articuler le Plan de développement des ressources humaines (Plano de Desenvolvimento de Pessoas) avec les objectifs individuels.

  • De renforcer les compétences du personnel d’encadrement en lui fournissant des conseils, une formation et un soutien de meilleure qualité concernant l’évaluation des performances et l’attitude à tenir face à des résultats insuffisants.

L’OCDE s’est appuyée sur cet éclairage et ces recommandations pour élaborer, en coopération avec le SGP, des lignes directrices pour la création ou la fusion de carrières dans la fonction publique brésilienne. Ces lignes directrices plaident pour une vision commune de l’architecture des carrières, reposant sur une simplification du système, encourageant la création de carrières transversales, communes à plusieurs entités, et favorisant la mobilité. Une simplification de la structure de la rémunération pourrait faciliter la gestion des dépenses de personnel. La prise en compte des performances professionnelles dans l'avancement et les possibilités de formation pourraient encourager les agents publics à se perfectionner en permanence.

Les parties qui suivent analysent de manière plus approfondie chacun des axes décrits plus haut.

Au Brésil, le « système de carrière » constitue la colonne vertébrale de la fonction publique, ce qui signifie qu'il est difficile de mettre sur pied une fonction publique adaptée aux missions qui sont les siennes sans repérer au préalable les difficultés induites par ce système et y remédier.

Le système est composé de 117 carrières (carreiras) et 43 groupes d’emplois (Plano de cargos), et 87 % des agents publics brésiliens relèvent d'une de ces carrières. Ces carrières et groupes d’emplois correspondent à des catégories professionnelles définies de manière étroite et souvent attachées à un organisme spécifique. Beaucoup de carrières correspondent à des fonctions et types d’emplois identiques, à ceci près qu’ils sont attachés à des entités différentes. Nombre d’entre elles présentent des doublons et se chevauchent, et certaines ne répondent plus aux besoins du service public. Elles ne peuvent cependant pas être supprimées (« frappées d’extinction ») tant que des agents en relèvent encore. Il en résulte un niveau élevé de rigidité, de fragmentation et d’inégalité.

Ces dernières décennies, beaucoup de pays de l’OCDE ont analysé leur administration publique et restructuré les catégories d’emplois et parcours professionnels pour qu’ils répondent mieux aux besoins d'une fonction publique moderne. De manière générale, les administrations restructurent les systèmes de classification des emplois de sorte à réduire les coûts de transaction en traitant (dans la mesure du possible) avec des collectifs plutôt qu’avec des individus, ce qui signifie qu’elles répartissent en principe leurs ressources humaines entre plusieurs catégories distinctes. Cette démarche peut reposer sur la constitution de catégories d’emplois, c’est-à-dire de groupes constitués sur la base de l’emploi occupé, ou de corps professionnels (sur la base de la profession à laquelle un agent appartient). Pour qu’elle soit efficace, il faut veiller à utiliser des catégories communes au plus grand nombre d’organismes possible. La gestion des gros effectifs s’en trouve simplifiée parce que les mêmes conditions et modalités d’emploi s'appliquent à un maximum d'agents.

Dans les pays de l’OCDE, les efforts déployés pour accroître la flexibilité ont conduit à créer des groupes d’emplois plus larges et à les appliquer de manière transversale au plus grand nombre d’organismes publics possible. En conséquence, les aptitudes et compétences sont définies de manière à permettre aux agents d'évoluer d'un groupe d’emplois à l'autre et d'un organisme à l'autre, d'où une flexibilité accrue. Les pays qui ont réformé les grilles salariales et systèmes d'échelons et de grades ont par exemple remplacé les échelles de salaire progressives par des tranches de salaire larges, ont restructuré les grilles en fonction des familles d’emplois et rationalisé les systèmes de classification des emplois.

Au Brésil, il n’existe ni normes de classification des emplois ni cadre de compétences général pour la fonction publique. Les conditions d’emploi, notamment le montant et la structure de la rémunération, sont très variables, chaque carrière négociant, souvent directement avec le Congrès, les changements à apporter à la loi dont elle relève. Il en résulte une grande fragmentation et une concurrence interne entre carrières concernant les conditions d’emploi.

Chaque carrière est définie dans sa propre loi, ce qui signifie que la rigidité est accentuée par le fait que toute création d'une carrière ou modification d'une carrière existante doit être adoptée par le Congrès. Dès lors, préparer la fonction publique à affronter l’avenir en la dotant des nouvelles compétences et aptitudes nécessaires est un processus complexe et long, tout comme la modification de carrières existantes. Dans ce contexte, le SGP a demandé aux entités d’accompagner toute demande de création d'une nouvelle carrière d’une évaluation de la cohérence de la carrière en question avec le programme de numérisation de la fonction publique. Cette démarche est un premier pas vers l'intégration de nouvelles compétences, même si elle ne contribue pas à réduire le nombre total de carrières.

Le SGP s’est mobilisé pour mieux contrôler la création de nouvelles carrières en vérifiant régulièrement si les demandes de création ne pourraient pas être l’occasion de fusionner des carrières existantes ou de créer des carrières plus transversales (autrement dit existant dans de multiples organismes, ce qui permettrait une uniformisation des conditions d’emploi). C’est pourquoi aucune nouvelle carrière n'a été introduite ces dernières années. À titre d’exemple, lors de la fondation de l’Autorité nationale pour la sûreté nucléaire, en 2021, plutôt que de créer une carrière spécifique pour cette autorité, une carrière existante a été transposée.

Transformer en profondeur le système de carrière implique d'engager d'importantes réformes juridiques et constitutionnelles, ce qui est difficilement réalisable à brève ou moyenne échéance étant donné qu'un consensus politique serait nécessaire. Il serait toutefois possible d'adopter d'autres mesures de court et moyen terme n’impliquant pas de réformer la loi.

Ainsi, pour rationaliser la création de nouvelles carrières, le SGP pourrait s'appuyer sur les lignes directrices proposées en la matière. Ces lignes directrices pourraient être utilisées pour parvenir à une vision commune des efforts à déployer pour réduire la fragmentation et la rigidité du système de carrière. Former le personnel des services de gestion des ressources humaines sur la base de ces lignes directrices, examiner les critères proposés ou vérifier que les critères sont remplis avant le dépôt d'une demande de création de carrière auprès du SGP sont autant d'initiatives qui faciliteraient la tâche du SGP.

Le SGP pourrait sur cette base élaborer une stratégie pour regrouper et organiser les fonctions au sein de la fonction publique, y compris préciser la méthode à utiliser pour repérer les catégories d’emplois et de postes communes au sein d’une même fonction et établir une classification afin d’éviter les doublons et de réduire le nombre total de carrières. Il existe un risque que des postes soient dissociés de la fonction dont ils dépendent, ce problème s'étant déjà produit. Il faudra donc faire preuve de vigilance. Parce qu’elle implique une analyse des carrières et des compétences et aptitudes qui sont nécessaires ou le seront à l'avenir, la mise au point d'un cadre de compétences est un moyen de favoriser l'acquisition de ces compétences. Cette démarche pourrait également comporter une réflexion sur les compétences transversales de façon à favoriser la mobilité de la main-d’œuvre.

Promouvoir la mobilité peut aussi être un moyen de professionnaliser le personnel et de renforcer sa résilience. Au Brésil, seules quelques carrières sont conçues pour être transversales – à savoir qu’elles comprennent des postes que l'on retrouve dans de nombreux ministères et organismes, comme la carrière de spécialiste des politiques publiques et de la gestion de l’administration (EPPGG). Le seul moyen d’accéder à une carrière consiste à passer un concours qui est spécifique à la carrière en question et aboutit à un recrutement à l’échelon le plus bas. Le système est donc relativement rigide et n’est pas suffisamment souple pour anticiper les besoins à court terme et y répondre étant donné qu'un agent public ne peut pas être affecté, que ce soit définitivement ou temporairement, à une autre carrière que la sienne. La mobilité est limitée puisqu’elle n’est envisageable qu’au sein d'une même carrière et suppose que les membres de la haute fonction publique en offrent la possibilité.

Mettre en valeur les compétences transversales pourrait être en moyen de doter la fonction publique d’un personnel plus flexible, susceptible de répondre aux besoins à court terme. La mobilité peut favoriser l’apprentissage et l’échange d'informations, de même que la coordination concernant des priorités transverses, aspect qui a été jugé problématique dans le rapport publié par l’OCDE à l’issue de l’examen du centre de gouvernement du Brésil (OCDE, 2022[4]). Or, au Brésil, les descriptifs de compétences et qualifications correspondant aux différentes carrières ne valorisent pas les compétences transversales parce que les carrières sont généralement rattachées à un organisme spécifique.

Pour promouvoir une fonction publique plus flexible et accordant une large place à la transversalité, il pourrait être judicieux de privilégier de nouvelles carrières organisées autour de fonctions, de ne pas attacher une carrière à un seul organisme et de définir des compétences et qualités transversales. Il faudrait aussi explorer la possibilité d’imposer des critères moins sélectifs aux agents publics qui souhaitent changer de carrière et leur permettre d'accéder à une autre carrière à un échelon plus élevé. Le programme de mobilité mis sur pied par le SGP conformément à l’ordonnance no 282 du 24 juillet 2020 pourrait être amélioré. En effet, s’il constitue un pas encourageant vers plus de mobilité, il pourrait être promu et déployé dans l’ensemble de la fonction publique pour que d'autres organismes en profitent. La banque des talents qui est déjà en place pourrait permettre de disposer d’une plateforme pour trouver des compétences dans des domaines spécifiques ou des compétences recherchées pour peu qu'une recherche ciblée sur ces compétences (ex. : innovation) soit possible. Enfin, un accompagnement pourrait être proposé aux agents, aux équipes d’encadrement et aux organismes. Outre des conseils généraux, cet accompagnement pourrait revêtir la forme de listes de points à vérifier pour la planification de la relève et pour les mutations, d’ateliers sur l’accueil des nouvelles recrues, de conseils pour l’évaluation des risques (de conflits d'intérêts) et d’orientations sur la gestion des performances.

Pour ce qui est de l’avancement, dans la fonction publique brésilienne, la seule forme de progression possible dans la plupart des carrières est l'évolution le long de la grille salariale sur la base de l’ancienneté ou de critères tenant compte à la fois de l’ancienneté et des performances. Selon la carrière, le haut de l’échelle salariale peut être atteint relativement vite. Les agents des services fiscaux par exemple peuvent atteindre le haut de la grille en 11 ans. À titre de comparaison, il faut parfois 20 ans à un agent du groupe d’emplois spécial, qui dépend du ministère des Finances (devenu ministère de l’Économie), pour parvenir à ce niveau. De plus, au Brésil, il est rare que le passage à un échelon supérieur soit synonyme de plus d’exigences en termes de compétences techniques ou managériales.

Le Brésil pourrait envisager de réformer le système de progression de carrière. Premièrement, pour les nouvelles carrières qui seront créées, les critères à satisfaire pour progresser pourraient ne pas se limiter à l'ancienneté et pourraient prendre en compte d'autres aspects, par exemple les performances. Le pays pourrait commencer par une carrière à trois niveaux – junior, confirmé, senior. Les postes « junior » pourraient constituer le point de départ habituel et être axés sur l'apprentissage. La catégorie « confirmé » serait la plus importante numériquement, tandis que les postes « senior » seraient réservés aux personnes qui ont acquis une compétence hautement spécialisée ou assument des fonctions d’encadrement. Dans ce type d’architecture, il faudrait apporter la preuve de ses compétences et de son efficacité pour progresser – à titre d’exemple, la promotion pourrait être soumise à un processus de sélection, ce qui serait plus incitatif. À long terme, le Brésil pourrait aussi envisager d'ouvrir une réflexion sur les moyens de permettre aux agents publics d'accéder à une autre carrière à un échelon plus élevé, ce qui leur permettrait de progresser.

Dans la fonction publique fédérale, la structure de la rémunération est complexe, chaque carrière ayant sa propre grille salariale et ses propres avantages accessoires au salaire, si bien que l’on dénombre plus de 700 grilles salariales. Le salaire de base représente environ 40 % à 60 % du traitement des agents publics, tandis que la fraction restante est faite d’une multitude prestations différenciées (OCDE, 2010[5]). Étant donné la fragmentation des carrières, des fonctions similaires donnent lieu à des salaires de base très différents.

Enfin, le Brésil pourrait être contraint de revoir la structure des salaires pour qu’elle soit adaptée aux besoins de demain plutôt qu’à ceux d’hier. Cette restructuration pourrait passer par une uniformisation et un regroupement des diverses composantes de la rémunération (salaire de base, primes, etc.) dans le but d’améliorer la transparence et de faciliter la gestion. Il pourrait s'agir là d'une entreprise complexe et de longue haleine compte tenu des intérêts en présence. Le SGP pourrait cependant prendre des mesures pour atténuer les inégalités de salaire entre fonctions comparables. Pour garantir une équité salariale, il pourrait définir un salaire de base moyen pour chaque fonction en s'appuyant sur un examen de la rémunération de tous les emplois correspondant à des tâches similaires dans les différentes carrières. Ce salaire de base par fonction pourrait être considéré comme la référence à retenir pour toute nouvelle carrière créée. La désignation d’une commission indépendante ou d'un service indépendant pourrait contribuer à se concentrer sur les caractéristiques réelles de chaque carrière, ce qui atténuerait le risque de politisation de la fixation des salaires.

Le recrutement temporaire dans la fonction publique peut être un moyen de répondre à des besoins immédiats et de courte durée, et de recruter des personnes dotées de compétences particulièrement recherchées. En toutes circonstances mais en particulier en cas de crise, la fonction publique doit agir rapidement et a besoin d'agents susceptibles de faire face à une surcharge de travail inattendue, de remplacer des agents malades ou en congé et des agents qui ont quitté leur poste. Parallèlement, ces agents temporaires ont besoin d’être formés et intégrés, alors même que les connaissances et compétences qu’ils auront acquises seront perdues à la fin de leur contrat.

Au Brésil, le recrutement de personnel temporaire est encadré par des conditions restrictives et doit être justifié par un motif d'intérêt général exceptionnel. Toutes les situations spéciales pouvant justifier le recours à l’emploi temporaire sont énumérées dans une liste prescriptive contenue dans la loi no 8 745 de 1993. En font par exemple partie le besoin d’assistance en cas d'état d’urgence ou d’enquêteurs pour recueillir des données pour les besoins de l’Institut brésilien de géographie et de statistique. Ces restrictions privent la fonction publique brésilienne de la souplesse nécessaire pour réagir à des besoins immédiats. Elles signifient aussi que tout recrutement ou presque a des conséquences budgétaires considérables parce qu’il implique un engagement à long terme. En conséquence, le personnel temporaire représente un pourcentage relativement faible des effectifs de la fonction publique du pays. En juillet 2022, 5 % des effectifs de la fonction publique fédérale relevaient du régime de l’emploi temporaire, alors de 87 % relevaient de l’emploi permanent.

Recourir davantage à l’emploi temporaire supposerait de réformer la loi pour modifier les conditions qui encadrent le recrutement temporaire. Il faudrait au préalable ouvrir un large débat avec les acteurs concernés pour déterminer qui a besoin de la protection de la fonction publique et quelles sont les activités qui relèvent de la mission fondamentale de l’État et ne peuvent être exécutées que par le personnel permanent de la fonction publique et pour réfléchir aux conditions qui devraient encadrer le recours au travail temporaire. Le Brésil pourrait aussi explorer des mesures qui permettraient de constituer une capacité d'appoint, par exemple en créant une réserve d'agents publics mobilisables très rapidement et en augmentant les possibilités de mobilité temporaire.

Il existe un risque que les mécanismes de recrutement temporaire soient utilisés afin de pourvoir à des besoins à long terme. Il importe d'éviter la création d’un système à deux vitesses au sein duquel coexisteraient des agents permanents et des agents temporaires employés de façon prolongée et effectuant les mêmes tâches. Pour éviter que les règles relatives au recours à l’emploi temporaire ne soient contournées, il faut que les responsables de service soient accompagnés par les services des ressources humaines et que le recours à des salariés temporaires fasse l’objet d’un contrôle accru. À défaut, l’égalité d'accès, le principe du mérite et la transparence risquent d’en pâtir.

Il faudrait que des règles claires soient introduites pour encadrer le recrutement d'agents temporaires dans l’ensemble de la fonction publique afin de garantir la transparence et une application uniforme. Ces règles pourraient notamment être les suivantes :

  • Type de fonctions/de postes et de circonstances : définir le type de fonctions pouvant être assumées par des agents temporaires – et celles qui relèvent des missions fondamentales de l’État et doivent être réservées à des agents permanents. Des exceptions pourraient être prévues si certaines conditions sont réunies – par exemple pour des activités temporaires par nature. Il conviendrait notamment de déterminer si les missions figurant dans la loi en vigueur actuellement sont les bonnes ou si des modifications sont nécessaires.

  • Recrutement : une procédure simplifiée, prévoyant un calendrier plus court, pourrait être introduite.

  • Rémunération : la rémunération devrait être globalement semblable à celle perçue par le personnel permanent pour une fonction similaire, mais une certaine souplesse doit être ménagée pour attirer des personnes dotées de compétences très recherchées.

  • Durée : il importe de fixer des limites claires, notamment des critères précis et des limites concernant le renouvellement des contrats pour éviter que le recrutement temporaire ne devienne un moyen de contourner le régime de la fonction publique en recrutant des agents temporaires pour une longue durée. À cet égard, il faudrait notamment examiner si les durées actuellement prévues sont adaptées et effectivement respectées ou s'il convient de les modifier.

  • Délai d'attente : définir une période au terme de laquelle un agent temporaire peut de nouveau être recruté dans la fonction publique. Ce délai est actuellement fixé à 24 mois. Il conviendrait d’examiner si cette durée est appropriée ou devrait être modifiée.

  • Conditions de travail et déontologie : elles devraient être en grande partie semblables à celles des agents publics permanents.

  • Évaluation des performances : elle devrait être semblable à l’évaluation des performances des agents permanents qui assument des fonctions comparables et être prise en compte lorsqu'un renouvellement du contrat est possible.

Le recrutement temporaire permet souvent de recourir à des procédures de recrutement simplifiées, ce qui est un moyen d'éviter des procédures longues et de recruter plus rapidement et avec plus de flexibilité. Au Brésil, il faut en moyenne un an pour recruter un agent public permanent et environ 255 jours pour recruter du personnel temporaire parce que les mêmes formalités doivent être accomplies tout au long de la procédure que pour recruter un agent permanent. Il n’est possible de raccourcir ce délai qu’en cas d’urgence, en renonçant à une étape de la sélection. Autrement dit, la possibilité de faire appel à des agents temporaires n'améliore pas la flexibilité.

Dans le cadre de la réflexion sur une éventuelle réforme juridique, l’introduction d’une procédure de recrutement simplifiée pourrait être envisagée. Pour plus de flexibilité, il faudrait raccourcir considérablement la durée de la procédure, même si cette accélération ne doit pas se faire au détriment de la transparence, de l’équité et du principe du mérite. Il faudrait également prévoir des mécanismes pour gérer les conflits d’intérêts durant la procédure de recrutement et des mesures pour éviter toute influence politique. Le recrutement pourrait être décentralisé et confié directement aux organismes. Une procédure simplifiée, ne reposant que sur un entretien d’embauche, pourrait être prévue. De même, il serait bon d’analyser les procédures administratives pour en raccourcir la durée, par exemple en réduisant le délai de réponse aux demandes d'autorisation de recrutement temporaire. Toutefois, s’agissant de la simplification du recrutement, il faudra veiller à ce que les limites imposées au recours au travail temporaire soient à la fois appropriées et respectées pour que le régime temporaire ne soit pas utilisé insidieusement pour pourvoir des postes relevant des missions fondamentales de l’État.

Dans un environnement de plus en plus contraint, les administrations publiques s’efforcent d’optimiser les processus, de gagner en efficience et d'atteindre leurs objectifs, ce qui suppose d'accorder de l’importance à la performance institutionnelle comme individuelle. Dans ce contexte, les systèmes de gestion des performances peuvent établir un lien entre les performances et les décisions en matière de gestion des ressources humaines et permettre ainsi d'assurer un suivi et une évaluation des performances des administrations publiques et de leurs agents. Dans la zone OCDE, les systèmes de gestion des performances ont pour marque de fabrique des mécanismes de suivi sophistiqués, des objectifs explicites, des indicateurs et objectifs chiffrés. Ils sont utilisés comme des outils de développement qui peuvent améliorer les compétences, rapprocher les objectifs individuels et les objectifs institutionnels et apporter des réponses à l’insuffisance des performances.

Les systèmes d'évaluation des performances utilisés par l’administration fédérale brésilienne poursuivent un grand nombre de ces objectifs, mais auraient sans doute plus d'impact s’ils étaient simplifiés, réorganisés et plus cohérents. L’évaluation se traduit par une note attribuée à l’agent par son responsable hiérarchique direct. La note moyenne, calculée pour l’ensemble de la fonction publique fédérale brésilienne, s’établit à 98/100, ce qui est très élevé et conduit à s'interroger sur la signification et la valeur du système actuel.

Le système de carrière en place au Brésil influe aussi sur l’évaluation des performances en ce sens qu’il revient à la carrière d’origine et à l’organisme auquel elle est rattachée de concevoir dans le détail les méthodes de gestion des performances sur la base des lignes directrices du SGP.

Il est difficile de repérer les situations de bonnes ou de mauvaises performances au sein de l’administration fédérale brésilienne parce que les notes élevées qui sont attribuées ne reflètent pas fidèlement le travail des agents. Dans ce contexte, les bonnes notes ne produisent pas les effets attendus sur la motivation parce qu’elles sont perçues comme des récompenses automatiques, accordées par défaut. Il n’est donc pas possible de remédier aux mauvaises performances, quels que soient les mécanismes incitatifs mis en place pour y parvenir.

Le Brésil devrait envisager d'introduire un système de notation comportant trois notes, dans lequel tous les agents recevraient par défaut la note de 2. Le 3 serait réservé à un petit nombre d'agents qui s'illustrent par des performances exceptionnelles, tandis que le 1 serait attribué à ceux qui ont à l’évidence des insuffisances qu’il faut éliminer. Dans un premier temps, il pourrait être prudent de fixer un pourcentage maximum d'agents pour l’attribution de la note élevée.

Pour un maximum d’efficacité, il faudrait aussi que les systèmes d’évaluation soient harmonisés entre les différentes carrières, de telle manière que les responsables hiérarchiques travaillent avec un même système pour l’ensemble de leurs agents. Il pourrait à cette fin être envisagé d’uniformiser le calendrier et la méthode utilisée entre les carrières et/ou de confier la responsabilité de concevoir le système d’évaluation à chaque organisme plutôt qu’à chaque carrière.

Au Brésil, de bonnes performances permettent surtout d’obtenir une prime de résultat, et la rémunération liée aux performances représente une part de la rémunération totale qui varie d’une carrière à l'autre et qui peut dans certains cas en représenter entre 50 % et 70 %. Ce pourcentage élevé pourrait être incitatif si le système permettait de repérer les bonnes performances et de les récompenser correctement, mais au Brésil, il aboutit à créer un système qui permet aux agents publics de recevoir quasi systématiquement l’intégralité de leur prime de performances, qu’ils conçoivent comme une partie de leur salaire fixe. Étant donné leur importance, ces primes élevées dissuadent les responsables hiérarchiques d'attribuer des notes plus faibles, susceptibles de remettre en cause la rémunération de leurs agents, ce qui est sans doute l’une des raisons expliquant le niveau élevé des notes attribuées. Parallèlement à la simplification du système d'évaluation pour le transformer en une échelle sur trois points comme suggéré plus haut, il pourrait être envisagé d’intégrer la prime de performances actuelle au salaire de base (ou de la maintenir pour les agents qui obtiennent la note de 2) et de n’accorder une prime – plus faible – et/ou une gratification non financière qu’à ceux qui obtiennent 3, ce qui associerait les gratifications à une performance réellement exceptionnelle.

Un système efficace de gestion des performances peut aider à repérer les insuffisances et à concevoir des solutions pour y remédier – accompagnement informel, avertissement oral ou obligation de formation voire licenciement.

L'insuffisance professionnelle est rarement traitée au Brésil. Bien que l’article 247 de la Constitution fédérale dispose qu’elle peut conduire à un licenciement, aucun mécanisme adapté n’est en place. Le Brésil pourrait encadrer le licenciement pour insuffisance professionnelle, qui ne serait qu’une solution de dernier recours. Il faudrait toutefois instituer en parallèle un système fonctionnant par paliers, prévoyant en cas de performances insuffisantes : 1) un accompagnement et un soutien ; 2) une offre de formation ; 3) l’affectation à un nouveau poste ; 4) le licenciement.

Au niveau institutionnel, les accords de performance permettent de disposer d’un cadre de mesure des résultats et objectifs. Les organismes devraient pouvoir définir et fixer quelques objectifs, sur la base desquels les performances peuvent être mesurées et améliorées. Ces objectifs devraient ensuite être déclinés au niveau des différents services et unités, les chefs de service traduisant les objectifs collectifs en objectifs individuels.

Au Brésil, chaque organisme élabore un Plan de développement des ressources humaines (Plano de Desenvolvimento de Pessoas, PDP) pour mettre en cohérence sa stratégie et les besoins de développement des ressources humaines à travers des objectifs institutionnels clairs. Concrètement, le PDP porte sur les compétences recherchées et sur les moyens de les développer. Soucieux d'accompagner les organismes, le SGP met actuellement au point une initiative dénommée ImpactaGOV pour les aider à élaborer leur PDP.

En continuant de les soutenir pour définir des objectifs de performance institutionnels, il pourrait les aider à définir des objectifs individuels en lien avec le PDP, ce qui impliquerait, entre autres, de renforcer la capacité des responsables de service à le faire et à structurer des objectifs au niveau des organismes, services et individus.

Enfin, étant donné le rôle des membres de la haute fonction publique et la position spéciale qu'ils occupent, leurs performances sont souvent évaluées différemment. Plus des deux tiers des pays de l’OCDE sont dotés d'un régime d’évaluation spécifiquement applicable à la haute fonction publique, reposant le plus souvent sur les résultats et les réalisations, sur des indicateurs de gestion institutionnelle et sur une rémunération à la performance. Au Brésil, les membres de la haute fonction publique n'ont pas l’obligation de se soumettre à une évaluation formelle, ce qui peut nuire à la légitimité des systèmes d'évaluation aux yeux des agents publics et engendre un problème de redevabilité aux yeux des citoyens. À mesure que de nouvelles carrières seront créées dans la haute fonction publique et lorsqu’un cadre de compétences spécifique à la haute fonction publique aura été défini, il pourrait être judicieux de mettre au point des mécanismes d’évaluation des performances efficients pour cette catégorie d’agents.

Alors que la première section portait sur les axes prioritaires, les parties qui suivent comparent le système d’emploi et de gestion publics du Brésil et les principes de la Recommandation PSLC qui n’ont pas été évoqués dans la partie sur les axes prioritaires.

Au sein des administrations publiques, des valeurs communes forment la base d'une vision commune de ce qui est souhaitable, non seulement en termes de résultat (bien-être et progrès de la société) mais aussi en termes de manière d’obtenir ce résultat (équité, transparence, redevabilité, etc.). Des valeurs publiques communes jettent les bases d'une culture de la confiance qui permet elle-même plus de flexibilité et d'innovation au niveau institutionnel et individuel tout en garantissant respect des règles et intégrité. Pour instaurer une culture de la confiance dans la fonction publique, il faut bien appréhender ces valeurs communes et la manière dont elles peuvent être transmises par un leadership guidé par des valeurs.

Les valeurs des institutions publiques brésiliennes sont énoncées dans divers textes de la législation primaire et secondaire, qui définissent des normes ou des codes de conduite à respecter par les agents publics. En 2021, le Bureau du contrôleur général de l’Union (Controladoria-Geral da União, CGU) a défini un ensemble de valeurs publiques fondamentales en coopération avec l’OCDE à l’issue d'une vaste consultation. Parmi ces valeurs figurent notamment l’engagement, l’intégrité, l’impartialité, la gentillesse, la justice, le professionnalisme et la vocation (Controladoria-Geral da União, s.d.[6]).

Le SGP pourrait faire plus pour faire connaître et diffuser ces valeurs communes. Il pourrait les intégrer à toutes les politiques relatives à l’emploi public. Le ministère de l’Économie devrait veiller à incarner des valeurs publiques telles que le mérite, la transparence, la gestion par la performance (redevabilité) et l'orientation usager, en particulier dans le cadre des processus de recrutement, de promotion et d'évaluation des agents publics.

Les administrations publiques ont besoin de dirigeants capables pour rester en phase avec un monde de plus en plus complexe, instable et incertain. C’est aux membres de la haute fonction publique qu’il revient de transformer les politiques en action. Toutefois, pour y parvenir, ils doivent à la fois être dotés des compétences nécessaires et bénéficier d’un soutien institutionnel.

Le Brésil a récemment engagé des réformes pour clarifier et assainir la haute fonction publique en introduisant le régime CCE/FCE. Ce nouveau dispositif applique certaines exigences récentes, issues d’un décret de 2019, concernant la définition de critères minimum pour la sélection/la nomination. Souhaitant créer un vivier de dirigeants, le SGP et l’ENAP ont élaboré ensemble un programme dénommé LIDERAGOV, dont ils ont récemment lancé la phase pilote. Des membres de la haute fonction publique ont été sélectionnés pour participer à un programme de formation des dirigeants, à la suite duquel ils ont été proposés pour des postes accessibles dans le cadre du régime CCE/FCE.

Malgré ces initiatives, le Brésil a encore un long chemin à parcourir pour se doter d’une haute fonction publique cohérente, pouvant s'appuyer sur une stratégie plus large et un soutien institutionnel suffisant. La sélection sur concours demeure l’exception plutôt que la règle. Certaines mesures doivent encore être prises pour renforcer le régime de la haute fonction publique : il faut notamment introduire des critères d'évaluation des performances, des dispositifs de formation et des possibilités de promotion transparentes et ouvertes. L'indicateur composite pilote de l’OCDE sur la gestion de la haute fonction publique en témoigne.

Le Brésil devrait continuer de renforcer le cadre juridique de la haute fonction publique et le soutien institutionnel dont elle a besoin en s'appuyant sur les constatations du rapport sur les compétences nécessaires pour innover et le leadership publié en 2019 par l’OCDE (OCDE, 2019[7]), qui recommande, entre autres, de définir des critères de recrutement minimum plus précis et de développer le recrutement par concours. Il pourrait également être envisagé de créer une équipe ou une unité spécialement chargée de la gestion de la haute fonction publique, de veiller au respect des lignes directrices et d’élaborer une stratégie de formation et de développement cohérente. Cette unité contribuerait à la mise en œuvre de nouvelles mesures, fournirait des conseils et un soutien aux ministères, faciliterait la mobilité stratégique des responsables hiérarchiques et dirigeants entre services et assurerait un suivi des progrès accomplis au fil du temps.

L'inclusivité et la représentativité de la fonction publique sont non seulement un gage de justice et d’équité, mais elles améliorent aussi l’efficience et les capacités en élargissant l’éventail des compétences et de l’expérience des ressources humaines, ce qui favorise l'innovation.

Au Brésil, la diversité de la fonction publique n’est pas une priorité, en particulier s'agissant des postes d’encadrement, où les hommes sont fortement surreprésentés comparativement à la population générale. En 2018, les femmes constituaient 44.8 % des effectifs du secteur public brésilien (Fundação Escola Nacional de Administração Pública, 2018[8]), mais seulement 16.8 % de l’encadrement supérieur dans le secteur public et 35.1 % de l’encadrement intermédiaire, soit un niveau nettement inférieur à la moyenne de l’OCDE, qui s’établit à 37.1 % pour l’encadrement supérieur et à 48.2 % pour l’encadrement intermédiaire (OCDE, 2021[2]). À cela s'ajoute que la fonction publique brésilienne est principalement blanche. Les blancs représentent 64 % de l’ensemble des agents publics et 75 % de l’encadrement, contre 43 % de la population générale (IBGE, 2018[9]).

Hormis les quotas, peu de mesures sont prises pour accroître la diversité. Les individus qui s’estiment victimes de discrimination ont peu de voies de recours à leur disposition, et les mécanismes de recours qui existent sont apparemment mal connus et ne sont pas activement promus. Qui plus est, il n’existe souvent pas de données sur cette question. Si des informations sont recueillies sur le genre et l’origine ethnique, il est rare que des données sur d'autres formes d'inclusion le soient. À cela s'ajoute que les données qui existent sont peu utilisées à des fins de mesure ou de suivi.

Pour favoriser la diversité et l’inclusion, il faudrait adopter des mesures plus ambitieuses, notamment recueillir des données pour effectuer un suivi et des mesures. Le Brésil pourrait aussi conduire une analyse des barrières pour s’attaquer à ce qui empêche les groupes sous-représentés d'accéder à la fonction publique. L’évaluation des attitudes à l’égard de la diversité au sein de l'administration pourrait aider à repérer les domaines où il faut agir. Enfin, la création de mécanismes et procédures de recours, de surveillance ou de réclamation aiderait les agents à engager des actions pour discrimination.

Le secteur public doit affronter des défis de plus en plus complexes et changeants, exigeant innovation et esprit d’anticipation. Les initiatives prises pour accroître l’innovation dans ce secteur ont souvent pour origine la volonté et l’enthousiasme d’agents engagés, œuvrant pour transformer une culture institutionnelle qui privilégie la stabilité et l'immobilisme.

Le Brésil a cherché à favoriser l'innovation à travers plusieurs initiatives visant multiplier les processus et systèmes innovants et à développer les compétences nécessaires à l'innovation. Parmi ces initiatives figurent la création de LA-BORA!gov, un laboratoire qui se consacre à l’innovation dans la gestion des ressources humaines, et le lancement de programmes de formation pilotes au sein du SGP. L’ENAP joue aussi le rôle de plateforme et d’incubateur de projets liés à l’innovation.

Il reste néanmoins possible d'aller plus loin pour faire de l'innovation une valeur ou une compétence fondamentale et la développer. L’innovation suscite souvent une forte méfiance en raison des répercussions que peut avoir un échec. L’administration aurait intérêt à se doter d'un cadre pour repérer et promouvoir les qualifications et compétences innovantes dont elle a besoin.

Pour encourager l’innovation, le Brésil devrait se fonder sur les recommandations qui figurent dans le rapport sur l’innovation dans la fonction publique brésilienne (The Innovation System of the Public Service of Brazil) (OCDE, 2019[10]). Les cadres de compétences nouvellement élaborés pourraient inclure des compétences nécessaires à l'innovation et les intégrer aux stratégies relatives à la gestion des ressources humaines, à l’évolution de carrière, au recrutement et à la mobilité. Les systèmes d’évaluation des performances pourraient être utilisés pour modifier les mécanismes incitatifs de telle manière qu'ils favorisent l’innovation. Enfin, les réseaux d’innovateurs qui créent des liens entre les individus travaillant dans des domaines innovants pourraient être renforcés et encouragés, de façon à favoriser la naissance de nouvelles idées et à créer une culture de l’innovation.

Parce que les problèmes qu'ils ont à affronter sont à la fois complexes et liés les uns aux autres, les pouvoirs publics doivent pouvoir attirer, recruter et développer de nombreux types d'aptitudes et de compétences. Les administrations doivent donc acquérir une connaissance fine de la nature et de l’éventail des compétences dont elles ont besoin aujourd'hui et auront besoin à l'avenir.

Le Brésil a beaucoup investi dans la numérisation des services les plus importants. Toutefois, les organismes éprouvent des difficultés à repérer et à renforcer les compétences dont ils ont besoin à l’appui de cette transition numérique. Ils peuvent pour y parvenir s'appuyer sur l’établissement du PDP, qui est obligatoire. À partir de ces évaluations, le SGP prévoit en coopération avec l’ENAP des programmes de formation concrets permettant de renforcer les capacités dans l’ensemble de la fonction publique.

L’ENAP a également élaboré une grille de compétences transversales, ce qui constitue un grand pas en avant pour le repérage des compétences et aptitudes dont à besoin la fonction publique brésilienne. Ce cadre constitue une première étape vers l'établissement d'un cadre de compétences commun mais souple.

Pour aller plus loin, le SGP pourrait accompagner davantage les organismes pour qu'ils soient plus en mesure d’identifier les compétences numériques et transversales qu’exige la transition numérique de la fonction publique. Cette démarche pourrait également concerner les compétences en matière de planification, de coordination et de hiérarchisation des priorités de manière à améliorer l’efficacité du centre de gouvernement, comme recommandé dans l’examen du centre de gouvernement réalisé par l’OCDE (OCDE, 2022[4]). Le SGP pourrait aussi faciliter les discussions sur l'évolution des compétences exigées entre les organismes et les prestataires de formation tels que l’ENAP. Enfin, il faudrait intégrer les compétences repérées dans les processus de gestion des ressources humaines, en particulier le recrutement et la formation et le développement.

La fonction publique a de plus en plus besoin d’un large éventail de compétences et de profils professionnels pour relever les défis complexes auxquels est confrontée l’action publique. Elle doit donc pouvoir attirer des personnes dotées d'un éventail de compétences nouvelles et émergentes ou de compétences rares (dans le domaine numérique par exemple) recherchées par le secteur privé.

De manière générale, le secteur public brésilien est perçu comme un bon employeur, mais il a des difficultés à attirer des candidats dotés de certaines compétences, ce qui est dû, entre autres, aux limites imposées par le système de carrière. Parallèlement, les restrictions visant le recrutement limitent la capacité de l’administration fédérale à séduire de nouveaux talents. À cela s'ajoute que les distorsions du système de rémunération décrites plus haut peuvent entraîner un décalage entre l’offre et la demande.

Le SGP pourrait chercher à en savoir davantage sur les dimensions de l’attractivité d'un emploi qui séduisent tel ou tel groupe ou les personnes dotées de telles ou telles compétences recherchées. Il pourrait aussi mettre au point des méthodes de recrutement plus volontaristes pour compenser la rareté relative des nouvelles offres et assurer une meilleure adéquation entre les candidats et les emplois proposés. Il pourrait par exemple établir et systématiser des partenariats avec des universités pour présenter aux étudiants des carrières possibles dans les domaines particulièrement intéressants pour la fonction publique, communiquer de façon plus efficace sur les offres d’emploi dans le secteur public (par l’intermédiaire des réseaux sociaux par exemple) ou aider les agents déjà en poste à dialoguer avec des groupes ou personnes venant d’horizons plus divers.

Les processus de recrutement et de promotion devraient être conçus pour garantir un traitement juste et équitable. La transparence est au centre des processus de recrutement dans la fonction publique fédérale brésilienne. Les concours sont annoncés publiquement et la liste des candidats retenus est publiée. Cette transparence est certes bienvenue, mais il faut aussi que les procédures permettent de s’assurer que les candidats possèdent les connaissances et compétences requises. Il est possible de trouver des moyens de mieux évaluer les compétences et de le faire de façon systématique (OCDE, 2019[7]). Il faudrait s'assurer que les épreuves de sélection testent, au moyen de méthodes modernes, les compétences appropriées compte tenu des objectifs de performances du poste et des objectifs institutionnels à long terme.

Actuellement, la plupart des étapes du recrutement sont confiées à des prestataires privés par l’organisme recruteur. L’externalisation de certains volets de la procédure de recrutement et de sélection peut permettre aux organismes d'accéder à des méthodes d'évaluation plus sophistiquées que celles disponibles en interne. Toutefois, l'ampleur de l’externalisation peut aussi être le signe que l’organisme ne dispose pas des compétences et moyens nécessaires en matière de gestion des ressources humaines, ce qui doit être exploré plus avant.

Le Brésil pourrait analyser dans quelle mesure le recours à de nouvelles méthodes de recrutement faciliterait l’embauche de candidats dotés de compétences d’avenir et assurer une plus grande cohérence entre les autorisations d'ouverture de concours et les besoins en matière de planification stratégique des effectifs dans la fonction publique fédérale Il faudrait également évaluer la place des prestataires privés dans la conception et l’organisation des épreuves de sélection et des évaluations des candidats à des postes dans la fonction publique et adopter une approche stratégique concernant le recours à ces prestataires.

L'apprentissage et le développement sont des composantes essentielles des capacités de la fonction publique. L'apprentissage n’est pas seulement un outil ou un produit fourni par les services des ressources humaines : c’est une compétence essentielle que les agents publics doivent acquérir au cours de leur carrière.

La fonction publique brésilienne offre certes des possibilités de formation, mais il reste beaucoup à faire pour qu’une culture plus homogène s’instaure dans ce domaine. L’ENAP s’est efforcée d’impulser une culture de l'apprentissage permanent en restructurant son offre de formation pour qu’elle réponde aux besoins, mais il existe un décalage entre les résultats du PDP établi au niveau de l’organisme et les formats et contenus des formations qu’elle propose.

Au Brésil, les organismes publics ont des difficultés à offrir des possibilités d'apprentissage et de formation en phase avec les objectifs institutionnels à long terme. À titre d’exemple, les personnes qui suivent certains modules proposés par l’ENAP reçoivent un certificat, mais ce certificat a peu de poids dans les décisions de recrutement et de promotion. C’est principalement aux chefs de service qu'il revient d’encourager l’apprentissage et d’entretenir la motivation des salariés.

Il serait bon qu’ils soient aidés à instaurer et favoriser une culture de l’apprentissage, par exemple dans le cadre de la gestion des performances. Les organismes pourraient recevoir des orientations sur la marche à suivre pour établir un lien entre le PDP et l’offre de formation de l’ENAP et pour intégrer les résultats des formations au niveau institutionnel.

Au sein du système d’emploi public, diverses institutions et entités ont des attributions dans la gestion des ressources humaines. Pour que ce système fonctionne efficacement, il est indispensable de définir des responsabilités institutionnelles pour la conception, le pilotage et la mise en œuvre des divers volets de la gestion des ressources humaines.

Au Brésil, les responsabilités, le mandat et les capacités des institutions et de leurs acteurs gagneraient à être mieux articulés. Actuellement, le SGP fixe des normes opérationnelles et s’appuie sur des règles descendantes, alors qu’il n’intervient pas au niveau opérationnel. De leur côté, les divisions chargées des ressources humaines sont souvent surchargées de tâches administratives et ne disposent pas de ressources et capacités suffisantes pour assurer une gestion plus stratégique du personnel.

Conscient de ce problème, le SGP œuvre pour une plus grande automatisation des tâches administratives grâce à la création de la plateforme électronique « Sou.gov ». Les agents publics peuvent accéder à leur dossier et exécuter des démarches administratives, y compris rechercher des offres d’emploi, par l’intermédiaire de la plateforme, ce qui allège le travail du personnel des services de gestion des ressources humaines et lui permet de prendre en charge des tâches plus stratégiques.

Pour encourager une gestion plus stratégique des ressources humaines dans les différents organismes, le SGP pourrait coopérer avec leurs services des ressources humaines afin de déterminer quelles normes et règles font obstacle à la flexibilité et d’évaluer quels pouvoirs pourraient être délégués à ces services pour favoriser l’adoption de pratiques plus innovantes. Cette délégation de pouvoirs devra s'accompagner d’une hausse équivalente des moyens dont disposent ces services. Enfin, le rôle des professionnels des ressources humaines évoluant, il pourrait être envisagé d'élaborer un parcours professionnel spécifique sur la base de la formation certifiante sur la « paie » et la « planification des effectifs » proposée en 2022.

L'adoption d'une approche stratégique et à long terme de la gestion des ressources humaines de la fonction publique est un moyen d’affecter les bonnes personnes au bon emploi ou poste au bon moment. Évaluer quelles compétences sont nécessaires et disponibles compte tenu des priorités et exigences stratégiques aide à préparer le personnel en prévision des besoins futurs.

Au Brésil, la gestion stratégique des ressources humaines est peu développée et les outils sont peu nombreux en raison de la rigidité du système de carrière. L’accent est mis sur le respect des normes et des règles, sur l’encadrement de la taille des organismes, sur la limitation du nombre de nouvelles carrières créées et sur la dotation en personnel des domaines prioritaires de l’action publique. Il serait bon de travailler davantage pour élaborer une vision commune de la gestion publique afin de faire émerger une conception commune de ce que doit être la fonction publique.

Il faudrait à cette fin recenser les objectifs définis en matière d’emploi public dans la Stratégie de développement fédérale et les décliner en éléments opérationnels, en précisant ce qu'ils signifient en pratique pour l’emploi et la gestion publics. Il faudrait aussi mesurer les progrès accomplis par rapport aux objectifs fixés.

La mise en pratique de la vision stratégique de la fonction publique dépend du personnel et des moyens et compétences dont il dispose pour fournir les services à la population. Il est donc indispensable de planifier l’évolution des ressources humaines. Le SGP a une bonne idée d’ensemble des effectifs totaux et des dépenses de personnel et il est en mesure de prévoir l’évolution des ressources humaines, mais il pourrait faire une utilisation plus stratégique de ces statistiques. Actuellement, il se contente dans une large mesure de réagir aux informations fournies par les organismes concernant leurs futurs besoins de recrutement à mesure que de nouvelles priorités publiques sont définies. Le SGP en est conscient et ces dernières années, il a fait quelques progrès dans le sens d’une planification stratégique des effectifs. Il a ainsi établi, en coopération avec la Fondation de l’Université de Brasilia, le Projet de dimensionnement des ressources humaines. L’objectif est de créer et d'appliquer un modèle devant servir de référence à la définition de l’effectif idéal de chaque organisme et devant permettre d'établir les besoins en personnel et d'anticiper les changements.

Ce projet constitue certes une première étape vers la planification stratégique des effectifs et vers la mise en place d’une vision commune, mais il est très ambitieux et sa mise en œuvre risque d’être très lourde pour ceux qui en sont chargés. Il faut donc impérativement en hiérarchiser les objectifs et définir une approche par paliers à partir des progrès accomplis. Outre cette approche au niveau de chaque organisme, le SGP pourrait essayer d'exploiter les informations fournies par le Projet de dimensionnement des effectifs pour analyser les compétences disponibles et celles qui seront nécessaires à l’avenir à l’échelle de l’ensemble de la fonction publique.

In fine, l’efficacité de la fonction publique dépend des agents qui fournissent les services publics. Leur degré d’engagement joue donc un rôle essentiel. Le fait de permettre la représentation des agents et d'établir avec eux un dialogue social constructif est un moyen de les associer aux problématiques liées à la gestion de la fonction publique et de les impliquer dans l’amélioration du service public.

Le SGP a cherché à ouvrir des possibilités de dialogue en créant un mécanisme institutionnel permanent de dialogue avec les syndicats par l’intermédiaire du Département des relations de travail dans la fonction publique. Même si ce mécanisme permet un dialogue constructif avec les syndicats, les débats portent souvent sur des sujets relativement éloignés des priorités définies au sein du SGP ou sur des problèmes qui se posent au niveau d’un organisme et qui sont généralement soulevés par les syndicats et non l’inverse. De plus, il ne semble pas y avoir d’accord formel sur la suite à donner aux problématiques évoquées. Le droit de grève dans la fonction publique n’est pas formellement encadré.

Le SGP pourrait utiliser davantage la voie institutionnelle pour établir un dialogue constructif et volontariste avec les syndicats sur les évolutions et réformes. Le Brésil pourrait aussi envisager d’adopter des règles pour encadrer le droit des agents de la fonction publique à la négociation collective afin de permettre une réelle représentation du personnel.

Outre l’établissement d'un dialogue formel par la voie syndicale, d'autres outils peuvent renforcer l’implication des salariés dans les organismes. Premièrement, il faudrait mesurer leur implication et leurs perceptions au moyen d’enquêtes régulières (annuelles par exemple) menées à l'échelle de l’administration. Le SGP a pris plusieurs initiatives dans ce sens : il a par exemple utilisé le module pilote de l’OCDE sur l’engagement du personnel et a conduit dans l’ensemble du secteur public une enquête en partenariat avec « Great Place To Work », l’ENAP et l’institut República. Même si ces démarches représentent un premier pas vers l'établissement d’indicateurs de référence sur l’engagement du personnel, elles n’ont pour l’heure été suivies d'aucune autre action.

Le SGP devrait mettre au point une enquête pour mesurer l’engagement des agents vis-à-vis de leur emploi et en comprendre les leviers, puis administrer cette enquête à intervalle régulier afin de suivre les évolutions dans le temps. Il pourrait ainsi aider les équipes dirigeantes des organismes à prendre des mesures en fonction des résultats de l’enquête afin d'améliorer l’engagement et de remédier aux faiblesses mises en lumière.

Enfin, les voies de recours que les salariés peuvent utiliser pour faire part de doléances ou signaler des infractions aux règles d’intégrité sans craindre les représailles peuvent être un bon moyen de découvrir des irrégularités, des problèmes de mauvaise gestion ou de corruption. Au Brésil, les agents publics ont à leur disposition divers mécanismes pour se plaindre ou signaler des atteintes à l’intégrité. Toutefois, l’existence de ces mécanismes n’est qu’une première étape. Pour qu'ils fonctionnent réellement, il faut que la fonction publique instaure un climat permettant que le personnel soit convaincu qu’il peut signaler des problèmes de comportement sans avoir peur de subir des représailles.

Le Brésil pourrait mettre au point des campagnes d'information à l’échelle de l'administration sur les mécanismes existants afin de créer un climat de confiance et de montrer que l’encadrement adhère à ces mécanismes. Le SGP pourrait également former les équipes d’encadrement pour les aider à créer une culture institutionnelle ouverte et à recevoir et gérer les signalements de comportements répréhensibles en coordination avec Bureau du contrôleur général de l’Union (CGU).

D'après les constatations et recommandations de l’Examen du leadership et des aptitudes de la fonction publique du Brésil, l’OCDE a formulé, en concertation avec le SGP, des lignes directrices présentant des critères pour la création de nouvelles carrières et la fusion de carrières existantes dans la fonction publique brésilienne.

La multiplicité des groupes d’emplois, des carrières et des postes complique la gestion des effectifs, accroît les dépenses de personnel et engendre diverses asymétries. Elle crée une rigidité parce qu’elle limite les possibilités de restructuration et de redéploiement du personnel. Elle peut aussi nuire à l’attractivité de la fonction publique, qui offre peu de perspectives d’évolution de carrière, les possibilités de mobilité et la variété étant limitées. Réduire le nombre total de carrières et éviter les doublons tout en harmonisant les principales conditions d’exercice entre les carrières et groupes d’emplois pourrait contribuer à remédier à ces problèmes et à diversifier les activités qui peuvent être exercées.

Actuellement, le système de carrière est organisé selon la logique « à chaque entité sa carrière ». Pour simplifier ce système et introduire une certaine souplesse, il faudrait que les carrières soient organisées d'après la fonction qu’elles remplissent et non d'après l’entité ou l’organisme auquel elles sont liées. En d'autres termes, il faudrait que les fonctions communes à plusieurs organismes soient regroupées pour former une carrière possédant des composantes transversales susceptibles de fonctionner dans tous les organismes exerçant la fonction en question. La carrière peut ensuite être décomposée en familles d’emplois, mais il faut veiller à ce que la progression de carrière, les principales compétences exigées et la rémunération restent globalement comparables. Il est tout à fait possible de mettre en valeur et de prendre en compte les spécificités d’un organisme dans le cadre des processus de gestion des ressources humaines, par exemple de la sélection, de l'admission et du développement, sans qu’il soit nécessaire que l’organisme dispose d'une carrière qui lui est propre. 

L’existence de carrières composées de fonctions communes à plusieurs organismes présente plusieurs avantages pour le secteur public :

  • elle offre une flexibilité qui permet d'affecter les effectifs en fonction des besoins qui se révèlent prioritaires au fil du temps ;

  • elle incite les agents à se lancer de nouveaux défis professionnels ;

  • elle élargit les possibilités d’apprentissage et de développement pour les agents ;

  • elle introduit plus de cohérence entre les organismes et élimine les cloisonnements en favorisant l'apparition d'un réseau de relations plus large entre les agents, ce qui est susceptible de faciliter la mise en œuvre de nouveaux projets et programmes, notamment s'ils impliquent plusieurs organismes.

Un modèle transversal est aussi un moyen d'améliorer la qualité des politiques publiques et des services publics fournis aux citoyens. 

Pour introduire plus de flexibilité dans la fonction publique, il faut faire de la transférabilité des postes, des carrières et des groupes d’emplois un impératif. Il faut donc que les nouveaux postes, carrières et groupes d’emplois soient adaptés aux différents organismes et, éventuellement, regroupent plusieurs fonctions sur la base d'attributions larges et transversales. De cette façon, les postes, carrières et groupes d’emplois sont conçus pour pouvoir évoluer au fil du temps à mesure que les besoins des administrations publiques changent. 

La mobilité des agents est entravée voire empêchée par le fait que le contenu des postes et carrières est décrit de façon précise et étroite dans une loi spécifique. À cela s'ajoute que l’idée que les agents doivent rester dans l’entité de leur première affectation est ancrée dans la culture. Il existe des mécanismes juridiques qui facilitent la mobilité horizontale, verticale, fonctionnelle, interne, externe, temporaire ou permanente, notamment : la révocation, la réaffectation, le détachement, la réquisition et le changement d'activité pour des raisons liées à la composition du personnel.

Pour que ces mécanismes de mobilité soient utilisés avec efficacité et efficience, il faut que les groupes d’emplois et carrières nouveaux ou modifiés contiennent des critères qui favorisent leur application et contiennent des éléments de transversalité – par exemple des compétences et qualifications transversales – nécessaires pour disposer de la main-d’œuvre dynamique, agile, adaptable et souple dont a besoin le monde du travail contemporain. 

Le grand nombre de groupes d’emplois et de carrières a pour autre conséquence de gros écarts de rémunération entre des postes comportant les mêmes tâches, y compris au sein du pouvoir exécutif fédéral. Il serait bon de rechercher un modèle plus équitable tout en respectant les spécificités de certains domaines et certaines activités si nécessaire. Il est important que les agents perçoivent leur rémunération comme équitable lorsqu'ils analysent la grille des rémunérations dans l'administration publique, ce qui signifie que le principe « à travail égal, rémunération égale » doit être appliqué. 

Il existe actuellement une variété de primes, indemnités, avantages, salaires, aides, suppléments et autres éléments de rémunération. Cette situation empêche la bonne gestion des dépenses de personnel, entraîne des inégalités internes et dévoie l’objectif qui avait au départ motivé la création de ces composantes de la rémunération. Outre qu’elle facilite la gestion, la simplification de la structure de la rémunération est un gage de transparence pour les agents eux-mêmes et pour la société et encourage l'égalité juridique des politiques de rémunération. 

À l’heure actuelle, la plupart des agents publics parviennent au sommet de leur carrière après dix ou vingt ans d'ancienneté. Comme cette durée ne correspond pas à la durée de service à accomplir pour pouvoir partir en retraite, l'agent peut rester dans une « voie de garage » pendant plus de vingt ans entre le moment où il atteint le plus haut niveau de sa carrière et celui où il prend sa retraite. De surcroît, toutes les carrières ne permettent pas d'accéder aussi rapidement au sommet. Enfin, il est établi que l'avancement et la promotion sont actuellement des processus purement formels, qui ne reposent pas sur les résultats professionnels de l’agent.

Il faut que les groupes d’emplois et carrières nouveaux ou modifiés tendent vers une harmonisation dans l’ensemble de la fonction publique. Ils devraient offrir aux agents publics des possibilités de développer leurs aptitudes tout au long de leur vie active. Il faudrait également évaluer les règles d'avancement et de promotion et les outils de gestion des performances afin qu’ils favorisent le développement professionnel continu dans l’intérêt de la société. 

Le recrutement d’agents publics est un engagement (financier) à long terme pour l’administration publique parce qu’il est définitif. Comme l’action de l’État évolue au fil du temps, il faut concevoir les postes, les carrières et les groupes d’emplois de telle manière qu’en plus de répondre aux besoins du moment, ils soient suffisamment souples pour s'adapter à des besoins futurs. Parallèlement, certaines fonctions ponctuelles et temporaires gagneraient à être confiées à des personnes extérieures, ce qui signifie que la personne possédant la compétence requise peut être recrutée pour une période définie.

Dans ce contexte, la création de nouvelles carrières devrait concerner en priorité les missions fondamentales de l’État. Il faudrait concentrer les investissements sur les activités finales et recourir à la sous-traitance à chaque fois que cette modalité est plus adaptée pour garantir que la priorité est donnée à l’action directe de l'administration publique.

Références

[6] Controladoria-Geral da União (s.d.), Valores para Priorização, https://www.gov.br/cgu/pt-br/valores-do-servico-publico/priorizacao (consulté le 3 février 2022).

[8] Fundação Escola Nacional de Administração Pública (2018), Informe de Pessoal, https://repositorio.enap.gov.br/bitstream/1/3215/4/Informe%20de%20Pessoal%20-%20INFOGOV.pdf.

[9] IBGE (2018), Pesquisa Nacional por Amostra de Domicílios Contínua 2018, https://www.ibge.gov.br/en/statistics/social/population/26017-social-inequalities-due-to-color-or-race-in-brazil.html?=&t=resultados (consulté le 17 janvier 2022).

[4] OCDE (2022), Centre of Government Review of Brazil: Toward an Integrated and Structured Centre of Government, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/33d996b2-en.

[2] OCDE (2021), Panorama des administrations publiques 2021, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9556b25a-fr.

[1] OCDE (2020), Government at a Glance: Latin America and the Caribbean 2020, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/13130fbb-en.

[7] OCDE (2019), Innovation Skills and Leadership in Brazil’s Public Sector: Towards a Senior Civil Service System, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/ef660e75-en.

[3] OCDE (2019), Recommandation du Conseil sur le leadership et les aptitudes de la fonction publique, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/fr/gov/emploi-public/recommendation-on-public-service-leadership-and-capability.htm.

[10] OCDE (2019), The Innovation System of the Public Service of Brazil: An Exploration of its Past, Present and Future Journey, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/a1b203de-en.

[5] OCDE (2010), OECD Reviews of Human Resource Management in Government: Brazil 2010 : Federal Government, Examens de l’OCDE sur la gestion des ressources humaines dans l’administration publique, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264082229-en.

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