4. Services de restauration

Les services de restauration constituent une part essentielle du tourisme culinaire, défini comme l'exploration de la nourriture comme objectif du tourisme (Long, 2004[1]).1 La World Food Travel Association (Association mondiale de voyage culinaire) estime que les dépenses en nourriture et en boissons représentent 15 à 35 % de toutes les dépenses touristiques et 25 % des avantages économiques supplémentaires pour une destination (WFTA, 2020[2]). Selon le CST tunisien, les dépenses de restauration représentaient 24 % de toutes les dépenses touristiques en 2019. Il existe quatre principaux types de prestataires de services de restauration dans le pays : les restaurants touristiques, les restaurants standard, la restauration rapide traditionnelle et la restauration de rue. L'ONTT réglemente les restaurants touristiques au niveau national puisqu'ils sont considérés comme des « investissements touristiques », tandis que les autres formes de restauration sont réglementées au niveau municipal. Tous les fournisseurs de nourriture sont soumis à des réglementations sanitaires au niveau municipal. Ce chapitre analyse les principales restrictions affectant les restaurants et propose des changements de politique et des réformes réglementaires pour atténuer les préjudices et améliorer la compétitivité et la concurrence dans le secteur. D'autres services tels que les établissements touristiques d’animation musicale (ex. bars et boîtes de nuit) sont analysés en détail dans un tableur publié sous forme de document séparé sur notre site Web dédié, https://oe.cd/ca-tunisie.

Les horaires d'ouverture des restaurants autorisés à vendre de l’alcool sont plus courts (12h-05h) que pour les restaurants touristiques (12h-minuit)2. La législation distingue quatre catégories de restaurants touristiques. Ces restaurants sont « classés selon leurs caractéristiques physiques, leurs installations et la qualité de leurs services » :

  • Catégorie une fourchette ;

  • Catégorie deux fourchettes ;

  • Catégorie trois fourchettes ;

  • Catégorie trois fourchettes de luxe3.

En 2019, l'ONTT a recensé un total de 374 restaurants touristiques en Tunisie. La plupart des restaurants touristiques sont concentrés dans les principales zones touristiques (Graphique 4.1). Par exemple, un tiers des restaurants touristiques étaient situés à Tunis-Nord (125). D'autres zones avec un nombre relativement élevé de restaurants touristiques comprennent Nabeul-Hammamet (77), Sousse (57) et Djerba (28). En termes de classification, 147 restaurants appartenaient à la catégorie une fourchette, 185 restaurants à la catégorie deux fourchettes, 38 restaurants à la catégorie trois fourchettes et 4 restaurants touristiques à la catégorie trois fourchettes de luxe.4

Selon le rapport annuel 2020 de l’ONTT, 25 accords préalables et 12 accords définitifs ont été accordés pour des restaurants touristiques (ONTT, 2020[5]). Un accord préalable est une pré-autorisation. L'accord final est l'autorisation d'exploitation définitive. L’ONTT intervient également dans le classement des restaurants touristiques. En outre, les inspecteurs de l’ONTT aux niveaux central et régional procèdent à des inspections des restaurants touristiques, afin de s’assurer du respect de la législation. En 2020, l’ONTT a réalisé 626 inspections de restaurants (ONTT, 2020[5]).

Procédure de classement. Selon le Décret n° 89-432 du 31 mars 1989, « sont considérés comme des établissements de tourisme les restaurants qui reçoivent une clientèle touristique et lui fournissent des prestations de nourritures et de boissons, accompagnées ou non par des programmes de loisirs »5. Les demandes de classement des restaurants touristiques doivent être rédigées sur le formulaire prévu à cet effet et adressées au Directeur général de l’Office national du tourisme tunisien (ONTT), avant le commencement de l’exploitation. L’OCDE comprend que le demandeur, en tant qu’établissement de tourisme, reçoit une autorisation provisoire, qui vaut accord de principe et lui permettra d’exploiter. Il recevra l’accord définitif à l’issue de la première année d’exploitation (voir section 3.2.2). Le même processus s'applique aux établissements de divertissement tels que les bars et les boîtes de nuit.

Selon les autorités, le système de classement existe afin d'inciter les restaurants touristiques à fournir des prestations de qualité (et les inciter à atteindre une note de 2 fourchettes ou plus). S'ils sont en mesure d'obtenir une classification plus élevée, ils peuvent facturer des prix plus élevés.

Conditions de classement. Les restaurants peuvent demander leur classement une fois reçue l’autorisation provisoire. Les restaurants touristiques sont classés « selon leurs caractéristiques physiques, leurs équipements et la qualité de leurs prestations » d’une à trois fourchettes de luxe. L’Arrêté du ministre du Tourisme du 31 mars 1989 dispose que les restaurants touristiques doivent respecter une liste de conditions communes, notamment des « conditions d’hygiène et de sécurité ». Ils doivent en outre offrir des prestations conformes à leurs catégories et i) « prendre soin de la propreté des locaux, du mobilier, des diverses installations et de tout le matériel d’exploitation ; ii) de l’entretien et de la maintenance de tous les équipements ; iii) de la présentation adéquate de chaque plat ; iv) du respect des recettes de préparation et des normes quantitatives (portioning) selon les règles et les usages admis dans la profession ; v) de la bonne tenue du personnel ; et vi) du traitement aimable et courtois de la clientèle. » Ces conditions ne sont pas plus amplement expliquées.

Les restaurants touristiques doivent fournir leurs menus en arabe, en français et en allemand ou en anglais. L’arrêté du Ministre fixe des conditions très détaillées et cumulatives pour chaque catégorie de classement. Pour obtenir « une fourchette », par exemple, le restaurant touristique doit se conformer à une série de normes minimales dimensionnelles, fonctionnelles et de gestion. À titre d’exemple : la cuisine doit contenir certains équipements (matériels de cuisson et ustensiles de cuisine) ; et respecter certaines conditions de sécurité (carrelage antidérapant et ventilation et aération suffisantes). L’arrêté fixe des normes minimales de gestion pour la cuisine (afin d’assurer la sécurité alimentaire) et pour la brigade de cuisine (un chef de cuisine, deux cuisiniers, un commis de cuisine et un plongeur).

Selon les autorités, ces conditions permettent de maintenir un certain niveau de qualité, d’hygiène et de sécurité. Elles visent à protéger le consommateur et à promouvoir l’image de marque des restaurants tunisiens. Les normes prescriptives applicables à chaque catégorie aident également les investisseurs qui souhaitent ouvrir un restaurant touristique, puisqu’ils savent exactement comment le créer. Selon les autorités, les critères sont plus indicatifs que prescriptifs ; par exemple, il suffira que le restaurant satisfasse à 90 % des critères pour pouvoir commencer son activité.

Commission de classement. La décision de classement est prise par le Directeur général de l’ONTT à la lumière d’un rapport présenté par les services de l’ONTT et après avis de la « Commission de classement ». La Commission de classement des restaurants touristiques est présidée par le Directeur général de l’ONTT ou son représentant et comprend un représentant de l’ONTT, un représentant de la FTH, un représentant de la FTAV et un représentant des restaurateurs. La Fédération tunisienne des restaurants touristiques fait partie à titre informel de la Commission de classement, mais n’a pas le droit de vote. Cette commission est également chargée de classer les établissements touristiques de divertissement ou musicaux6.

Un restaurant touristique qui souhaite être classé dans une catégorie différente doit en faire la demande selon la même procédure et en présentant une nouvelle demande.

En 2020, la Commission de classement s’est réunie à trois reprises et a étudié 14 demandes. Elle a confirmé le classement de 3 restaurants, réaffirmé le classement de 6 restaurants, attribué un classement provisoire à 1 restaurant, prolongé la durée du classement provisoire de 3 restaurants et refusé de rétablir le classement d’un restaurant (ONTT, 2020[5]).

Selon les autorités, la « commission de classement » des restaurants touristiques comprend un représentant de trois associations (la FTRT, la FTH et la FTAV) car, à leur avis, ces associations ont une bonne connaissance des restaurants qui existent en Tunisie et du secteur en général, et sont donc bien placées pour voter sur le classement de nouveaux restaurants. La Fédération tunisienne des restaurants touristiques participe à la commission de classement pour défendre les intérêts de ses membres. Au sein de la commission, les associations participent à l'étude des dossiers des établissements demandeurs de classement touristique et leur conformité aux règles et conditions requises à cet effet. Les autorités précisent que le décret n’inclut pas la Fédération tunisienne des restaurants touristiques en tant que membre de la commission étant donné que la fédération n’existait pas au moment de son adoption.

Retrait de classement. Le Directeur général de l’ONTT peut d’office retirer la catégorie de classement d’un restaurant touristique ou rétrograder un restaurant dans une catégorie inférieure s’il considère que l’état des locaux ou des équipements ou la qualité des prestations qu’il fournit font qu’il ne correspond plus à la catégorie dans laquelle il a été classé. Le retrait de classement est effectué suite à la constatation de la part des inspecteurs du non-respect de l'établissement des règles auxquelles il est assujetti. La décision de retrait et les conditions d'inspection sont réglementées par le Décret-loi n° 73-3 du 3 octobre 1973. En 2020, l’ONTT a annulé le classement de 3 restaurants touristiques (ONTT, 2020[5]). Concrètement, cette annulation entraîne la fermeture instantanée du restaurant.

Selon les autorités, cette disposition permet à l’ONTT de veiller à ce que les restaurants continuent de respecter les normes requises (notamment en termes d’hygiène, de sécurité et de qualité) et ne réduisent pas le respect de ces normes une fois leur classement obtenu. L’ONTT explique qu’un classement peut être retiré à un restaurant à la suite d’un rapport des inspecteurs d’hôtels du ministère du Tourisme. Dans la pratique, le restaurant reçoit d’abord un avertissement, mais s’il ne prend pas les mesures nécessaires pour sa remise aux normes de sa catégorie, les inspecteurs adresseront alors un rapport à l’ONTT et le restaurant perdra son classement. Selon l’ONTT, 400 inspections ont été faites en 2016, qui ont conduit à retirer leur classement à 90 restaurants, et ont donc abouti à leur fermeture.

Licence de vente de boissons alcoolisées. La Loi n° 59-147 du 7 novembre 1959 dispose que les restaurants doivent obtenir une autorisation préalable pour pouvoir servir des boissons alcoolisées. La même règle s'applique aux hôtels et établissements de divertissement. La législation prévoit que ces licences sont délivrées par le ministère de l’Intérieur après avis de l'autorité municipale et du gouverneur territorialement compétent. La demande officielle doit être faite au commissariat de police local 7. Il apparaît toutefois, à la lecture du rapport annuel 2020 de l’ONTT, qu’il existe une commission spéciale chargée de contrôler les dossiers pour la vente de boissons alcoolisées dans des établissements touristiques. Cette commission comprend 5 membres représentant différents ministères (le ministère de l’Intérieur, le ministère du Tourisme, le ministère de la Santé Publique et le ministère des Affaires Sociales). Selon le rapport annuel 2020 de l’ONTT, cette commission a effectué 65 visites sur le terrain, couvrant la plupart des régions du pays, qui ont abouti à l’octroi d’une licence de vente de boissons alcoolisées pour 32 établissements et à la régularisation de cette licence pour 33 établissements (ONTT, 2020[5]). Plusieurs parties prenantes se sont plaintes du fait que la procédure d’obtention d’une licence de vente de boissons alcoolisées est trop longue et que les conditions à remplir à cet effet ne sont pas claires.

Conformément à la Loi n° 2004-75 du 2 août 2004, portant suppression d’autorisations et révision d’exigences administratives relatives à certaines activités commerciales, touristiques et de loisirs, les hôtels de la catégorie quatre étoiles et plus, et les restaurants de la catégorie trois fourchettes et plus, ne sont pas tenus d’obtenir une licence supplémentaire pour la vente de boissons alcoolisées, telle que prévue par la Loi n° 59-147 du 7 novembre 1959. L’OCDE comprend, d’après les dires de certaines parties prenantes, que tous les restaurants sont tenus d’obtenir la licence supplémentaire de vente de boissons alcoolisées, dès lors que le restaurant a obtenu le droit d’exploiter en vertu de son classement provisoire par l’ONTT. D’autres parties prenantes soutiennent en revanche que cette licence n’est pas exigée pour les restaurants de la catégorie trois fourchettes de luxe, conformément à la législation.

Cette licence est exigée afin de contrôler la vente de boissons alcoolisées dans les hôtels et les restaurants, à la fois pour des raisons sanitaires et pour veiller à ce que les établissements concernés ne créent pas des troubles à l’ordre public. L'OCDE comprend que les hôtels de la catégorie quatre étoiles et plus, et les restaurants de la catégorie trois fourchettes et plus sont exemptés de la licence de vente d'alcool en raison de la nature et de l'importance de l'investissement.

Classification des restaurants touristiques : La classification gouvernementale obligatoire des restaurants touristiques (que ce soit en général ou pour pouvoir accéder aux licences d'alcool) ne semble pas être une pratique internationale standard et peut limiter la concurrence sur le marché. Le système de classification segmente le marché de manière artificielle et risque également de limiter la concurrence entre les différentes catégories. La réglementation tente d’indiquer une qualité élevée ou faible et de protéger les consommateurs, mais l’indication peut ne pas correspondre à la réalité, car la note attribuée dans le passé peut ne pas refléter la qualité actuelle du restaurant. La segmentation artificielle du marché peut également avoir une incidence sur les prix, puisque les restaurants les mieux notés pratiqueront des prix plus élevés, même si le service est identique. Sans le système de classification, il peut y avoir une substitution limitée entre les restaurants de qualité légèrement inférieure et supérieure (par exemple entre une fourchette et trois fourchettes). Avec le système de classification, il peut cependant y avoir une certaine concurrence à la marge entre les classes adjacentes.

La concurrence peut être davantage limitée par les exigences excessives et le processus de classification, comme indiqué ci-dessous.

Conditions de classement. Bien que certaines normes semblent raisonnables pour des raisons d’hygiène et de sécurité, d’autres, par exemple en matière de qualité, peuvent être fixées à un niveau supérieur à ce qui est nécessaire pour remédier aux défaillances du marché résultant d’une information asymétrique entre l'offre et la demande. Il est très peu probable que les touristes et les consommateurs en général soient familiarisés avec les exigences imposées par le système de fourchette. Cependant, ils sont plus susceptibles de se référer à des applications de classement de restaurants en ligne telles que TripAdvisor ou le Guide du Routard. Un coup d'œil sur certaines de ces plateformes montre que le système de classement par fourchettes n'a aucun impact sur la façon dont les clients perçoivent le service puisque certains restaurants standards sont mieux notés que les restaurants à deux et trois fourchettes. En outre, les normes régissant les recettes, par exemple, réduisent l'incitation à innover et à répondre aux goûts différents et changeants des consommateurs.

Ces exigences trop détaillées pourraient augmenter le coût d’entrée pour un fournisseur, décourager de nouveaux entrants potentiels et, dès lors, réduire le nombre d’acteurs du marché au fil du temps. Ces normes peuvent également conférer un avantage indu à certains fournisseurs (opérateurs en exercice ou de grande taille) par rapport à d’autres (par exemple, des opérateurs disposant de moins de ressources). Le bien-être des consommateurs peut être réduit par les normes qui sont fixées au-dessus du niveau que certains consommateurs avertis choisiraient, étant donné que les consommateurs sont empêchés d’acheter des produits moins chers et de qualité inférieure qu’ils pourraient préférer, même s’ils sont pleinement informés des risques associés.

Outre les normes prescriptives, les normes ambiguës (c’est-à-dire le respect des « conditions d’hygiène et de sécurité ») non assorties de critères objectifs (c’est-à-dire sans référence à un document juridique pertinent définissant ces conditions) peuvent décourager de nouveaux entrants en raison de cette incertitude juridique. En général, des conditions ambiguës sont susceptibles d’être appliquées différemment entre les demandeurs pour des raisons subjectives et peuvent donc être une barrière à la concurrence.

Commission de classement. La procédure de classement peut nuire à la concurrence, étant donné que des opérateurs en place, représentés par les fédérations, participent à la procédure de classement des nouveaux restaurants et de reclassement des restaurants existants. L’implication de ces trois fédérations peut conduire à une exclusion de la concurrence et à des conflits d’intérêts (un grand nombre d’hôtels, par exemple, ont des restaurants touristiques) et être discriminatoire à l’égard des nouveaux entrants et des acteurs du marché qui ne sont pas associés aux fédérations. Cette procédure peut également entraver la remontée d’informations auprès des clients et fournir des moyens potentiels de coordination entre des restaurants déjà établis. Une autre conséquence négative pourrait être la mise en place de barrières administratives inutiles dues à une tendance à uniformiser les intérêts et les actions dans les cas où les membres des fédérations peuvent influencer l'attitude des pouvoirs publics et la législation en leur faveur.

Retrait de classement. Des dispositions ambiguës qui ne sont pas assorties de critères objectifs sont plus susceptibles d’être appliqués différemment entre les demandeurs pour des raisons subjectives et peuvent donc constituer une barrière à la concurrence. Les pratiques actuelles conduisant à des décisions de retrait de classement sont source d'insécurité juridique et accordent un pouvoir discrétionnaire considérable aux fonctionnaires et aux inspecteurs et sont donc préjudiciables à la concurrence.

Licence de vente de boissons alcoolisées. Il peut en découler une augmentation des coûts pour les acteurs du marché, étant donné qu’ils sont d’abord tenus de satisfaire aux exigences d’investissement réglementées par l’ONTT. Ils sont ensuite tenus de solliciter leur classement en tant que restaurant touristique. À l’issue de cette procédure, ils peuvent solliciter une licence pour servir de l’alcool. Il y a un manque de transparence concernant les facteurs pris en compte lors de la prise de décision sur une demande de licence de vente d'alcool. Ce système est donc risqué pour les entreprises, étant donné qu’elles n’ont aucune garantie d’obtenir cette licence et que la vente d’alcool peut être essentielle pour leur modèle économique (notamment pour les restaurants car elle est considérée comme une activité extrêmement rentable). La procédure actuelle de délivrance des licences pourrait donc dissuader des restaurants et des hôtels d’entrer sur le marché, et, dès lors, affaiblir la concurrence sur le marché. Elle peut également augmenter les coûts pour les acteurs opérant déjà sur le marché, en raison du nombre de procédures obligatoires.

À la lumière des atteintes à la concurrence décrites ci-dessus, l'OCDE recommande de :

  • Supprimer le système obligatoire de classement par fourchettes.

  • S’agissant des conditions de classement des « restaurants touristiques » et établissements de divertissement, l'OCDE recommande de :

    • Supprimer les exigences qui ne relèvent pas de l’hygiène, de la sécurité et de la protection du consommateur. Examiner ces exigences pour s'assurer qu'elles ne sont pas plus complexes que nécessaire afin d’atteindre l'objectif politique sous-jacent.

    • Envisager le transfert d'exigences spécifiques en matière de surface, d'agencement et d'équipement dans un guide de l'investisseur si l'objectif est d'aider les investisseurs à se conformer aux normes.

  • Écarter les opérateurs historiques (fédérations) de la procédure de classement des restaurants touristiques. À titre d’alternative, l'OCDE recommande de mettre en place d'un code de conduite éthique avec un ensemble complet, clair et accessible de règles de conflit à suivre par les fédérations impliquées dans les décisions prises par le comité (voir section 3.2.).

  • Envisager de réviser le cadre d'inspection et d'application de la réglementation en place. La Boîte à outils de l'OCDE sur le contrôle et la mise en œuvre de la réglementation fournit des conseils utiles à cet égard (OCDE, 2019[7]).

  • Publier des règles claires et publiquement disponibles sur le retrait de classement des restaurants touristiques. Il conviendrait d’instituer une gradation ascendante claire des mesures de sanction (c’est-à-dire des amendes et avertissements), le retrait étant la mesure finale. Il faudrait également introduire des procédures de recours.

  • S’agissant la licence de vente de boissons alcoolisées, l'OCDE recommande de :

    • Supprimer l’obligation d’obtenir une licence séparée de vente de boissons alcoolisées et incorporer cette obligation dans la procédure de classement des hôtels, restaurants et autres établissements de restauration et de boissons.

    • Fixer des règles claires pour l’obtention de la licence de vente de boissons alcoolisées et numériser les procédures afin que les demandeurs puissent faire cette demande en ligne sans devoir se rendre dans le commissariat de police local.

À la différence des établissements touristiques, les restaurants traditionnels, les établissements de restauration rapide traditionnelle et la restauration de rue sont réglementés au niveau municipal. Les établissements de restauration rapide traditionnelle incluent ceux qui fournissent différents types de sandwich, kafteji, brick, lablabi et fatayer. La description qui suit se fonde sur les exigences de la commune de Tunis8, qui sont soumises à l’Arrêté du ministère de l’Intérieur et du Développement local du 17 août 2004, approuvant le cahier des charges pour la détermination des conditions générales de conformité des locaux commerciaux. Dans la commune de Tunis, les restaurants traditionnels et les établissements de restauration rapide traditionnelle sont soumis à un cahier des charges détaillant les exigences sanitaires.

Tous les prestataires de services de restauration (y compris les opérateurs qui souhaitent fournir des services de restauration de rue) doivent obtenir une approbation sanitaire de la municipalité dans laquelle ils souhaitent opérer et se conformer au règlement sanitaire général applicable aux prestataires de services de restauration. La ville de Tunis a également des règlements sanitaires spécifiques pour les locaux traitant des types particuliers de denrées alimentaires (par exemple, volailles, viandes, poissons et produits alimentaires généraux) et pour des types particuliers de locaux (par exemple, les cafés, boulangeries et pâtisseries) non examinés dans ce rapport.9

La restauration de rue n’est pas réglementée par un cahier des charges spécifique, et ne nécessite aucune autorisation ou licence spécifique, autre que le respect du règlement sanitaire, mais, selon des parties prenantes, les postulants sont tenus d’obtenir une autorisation pour le placement (c’est-à-dire le placement de leur caravane ou de leur camion).

Surfaces minimales. L’article 133 du règlement sanitaire municipal général de la ville de Tunis10 dispose que les locaux du restaurant doivent être organisés d’une certaine manière et précise les surfaces minimales devant être affectées à différents services et fonctions. Par exemple, 50 % de la surface totale doit être réservée aux clients ; 25 % à la préparation de la nourriture et à la cuisine ; 10 % au stockage des denrées ; 5 % au vestiaire des employés et 10 % au service sanitaire des clients (c’est-à-dire les toilettes).

Ces exigences de surfaces minimales sont probablement en place pour garantir la qualité des prestataires de services de restauration et promouvoir l’image de marque de l’industrie.

Normes minimales. Le règlement sanitaire (articles 69-83) détaille les normes sanitaires générales applicables à tous les types d’établissements traitant des denrées alimentaires. Il exige par exemple une hauteur sous plafond minimale (2.8 m) et un raccordement aux réseaux publics d’eau et d’égouts.

Le règlement fixe également différentes normes minimales d’équipement des restaurants. Par exemple :

  • L’article 134 du règlement détaille les équipements exigés pour l’espace réservé aux ventes. Ils comprennent notamment un comptoir pour préparer les sandwiches, une vitrine réfrigérée (4 degrés au maximum) pour les denrées périssables, des tables ou comptoirs pour la consommation des clients et des poubelles).

  • L’article 135 détaille les équipements exigés au minimum pour la cuisine et l’espace de préparation des aliments. Par exemple, le prestataire de services de restauration doit avoir 3 bacs permettant de laver les ustensiles à l’eau chaude, 3 bacs permettant de laver les produits alimentaires, un plan de travail en marbre ou en acier inoxydable et une hotte, « dont la hauteur dont dépasser de trois mètres au moins le toit des plus hautes constructions dans un rayon de 25 mètres ».

  • L’article 136 définit les équipements exigés pour l’économat. Par exemple, le prestataire de services de restauration doit conserver séparément les légumes et les autres denrées alimentaires et avoir une chambre froide dont la température ne doit pas excéder 4 degrés pour les denrées périssables.

L’OCDE comprend que ces normes minimales maintiennent un certain niveau de qualité, d’hygiène et de sécurité. Elles visent à garantir la protection du consommateur et la santé publique et à promouvoir l’image de marque des prestataires de services de restauration tunisiens. Ces normes détaillées peuvent également aider les nouveaux entrants dans la création de leur entreprise. Les normes de hauteur minimale visent probablement à garantir le respect des réglementations.

Autorisation de placement pour les vendeurs de restauration de rue. Selon les parties prenantes, les vendeurs de restauration de rue sont tenus d’obtenir de la municipalité la même autorisation d’occupation du domaine privé local que celle qui est exigée pour les vendeurs de journaux ou de fleurs (c’est-à-dire pour les « kiosques ») comme stipulé par l’article 74 de la Loi n° 2018-29 relative au Code des collectivités locales. Autrement dit, ils sont tenus de stationner leur caravane ou leur food truck dans un seul endroit désigné. L’OCDE comprend qu’il n’existe aucune réglementation applicable aux autres stands de restauration de rue et que tous les stands actuellement en activité comme ceux communément connus sous les noms de « Ayari ou Mraweb », opèrent de manière informelle.

Les autorités exigent probablement des vendeurs utilisant des caravanes ou des camions d’obtenir cette autorisation en raison de l’absence d’autorisations spécifiques pour ces prestataires de services. Cette autorisation de placement est probablement requise pour protéger l’ordre public et l’hygiène (par exemple, afin d’éviter de perturber la circulation et de veiller à une bonne élimination des déchets).

Surfaces minimales. Les limitations applicables à l’aménagement de l’établissement de restauration peuvent être un frein à l’innovation et à l’utilisation optimale des ressources. Certains fournisseurs de services d’alimentation peuvent vendre divers produits. Là où l'espace disponible pour stocker les aliments est limité, les modèles commerciaux sont également limités.

Normes minimales d’équipement. Certaines normes semblent raisonnables pour des raisons d’hygiène et de sécurité, mais d’autres normes, par exemple en matière de qualité (notamment à propos de la manière dont le prestataire de services de restauration agence son établissement) peuvent limiter le choix, la capacité d’innovation et la flexibilité. Ces normes peuvent augmenter le coût d’entrée pour un prestataire, décourager les nouveaux entrants potentiels et, dès lors, réduire le nombre d’acteurs du marché au fil du temps, entraînant des conséquences potentielles sur le choix des produits. Elles peuvent également conférer un avantage indu à certains prestataires (opérateurs déjà en place ou de grande taille) par rapport à d’autres (par exemple, des opérateurs disposant de ressources plus limitées).

Autorisation de placement pour les vendeurs de restauration de rue. Comme pour la quasi-totalité des autorisations en Tunisie, la procédure d'obtention d'une autorisation de placement auprès de la municipalité est longue et fastidieuse. Une fois l’autorisation de placement obtenue, la caravane ou le food truck doit opérer dans la zone spécifique désignée dans cette autorisation. Ce système traite le food truck de la même manière que s’il exploitait un établissement de restauration permanent dans un lieu unique. Il l’empêche de se déplacer dans différents endroits, à moins de pouvoir obtenir plusieurs autorisations de placement, ce qui augmenterait sensiblement les coûts pour les exploitants. Il peut réduire la capacité des prestataires de services à réagir aux changements de la demande en se déplaçant dans des lieux différents, ce qui fait pourtant partie du concept même de food truck.

En France, les food trucks doivent obtenir une carte de commerçant ambulant, qui est renouvelée tous les quatre ans. L’exploitant doit ensuite obtenir une autorisation d’occupation temporaire du domaine public. Il existe trois types d’occupation temporaire, en fonction de l’emplacement (permis de stationnement, permis de voirie et droit de place). L’exploitant doit contacter des personnes ou autorités différentes en fonction du type d’autorisation sollicité (ainsi, il doit contacter le propriétaire pour occuper un emplacement sur une voie ou une propriété privée, la mairie ou l’organisateur du marché pour occuper un emplacement sur un marché, ou la mairie pour occuper un emplacement sans emprise au sol sur le domaine public).11 Comme en Tunisie, les food trucks exploités en France sont soumis aux mêmes règles d’hygiène que les restaurants et autres prestataires de services de restauration12.

En ce qui concerne d’autres stands de restauration de rue, l’absence de réglementation signifie que les exploitants fournissent leurs services à titre informel. Cette situation crée un obstacle majeur à la promotion de cette activité, en décourageant les entrepreneurs d’investir et d’améliorer la qualité de leurs services et, dès lors, de contribuer à la promotion de la cuisine traditionnelle locale. Dans plusieurs pays du monde, des marchés de restauration de rue ou des marchés de nuit très populaires sont référencés par des applications touristiques bien connues et sont devenus de véritables attractions touristiques13. En 2020, la « culture des hawkers » ou marchands ambulants de Singapour a été inscrite sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO (Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité).14

Compte tenu des restrictions mentionnées ci-dessus et de leurs effets néfastes sur la concurrence, l'OCDE recommande de :

  • Supprimer du règlement sanitaire les exigences qui ne relèvent pas de l’hygiène, de la sécurité et de la protection du consommateur. Ces exigences devraient être examinées pour s'assurer qu'elles ne sont pas plus lourdes que nécessaire afin d’atteindre l'objectif politique sous-jacent.

S’agissant de l'alimentation de rue, l'OCDE recommande :

  • Envisager d’autres options de réglementation des prestataires de services de restauration de rue qui souhaitent vendre dans des food trucks et non dans des boutiques permanentes, par exemple en adaptant une zone ou une rue spécifique à cet effet dans les villes et en accordant des autorisations d’occupation temporaire.

  • D'adopter des règlementations claires et transparentes en matière d'octroi de licences et d'application de la réglementation.

Références

[9] Agence alimentaire de Singapour (2023), Safety Assurance for Food Establishment (SAFE) Framework, https://www.sfa.gov.sg/food-retail/SAFE-framework/safety-assurance-for-food-establishments-(safe)-framework (consulté le 19 février 2023).

[1] Long, L. (2004), Culinary Tourism, p. 20, https://www.kentuckypress.com/9780813122922/culinary-tourism/.

[4] OCDE (2022), Tendances et politiques du tourisme de l’OCDE 2022, OECD Publishing,, https://doi.org/10.1787/d0aa9828-fr.

[3] OCDE (2020), Tendances et politiques du tourisme de l’OCDE 2020, OECD Publishing, https://doi.org/10.1787/fa567e9c-fr.

[7] OCDE (2019), Boîte à outils de l’OCDE sur le contrôle et la mise en œuvre de la réglementation, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/705e3dc1-fr.

[6] ONTT (2020), Le Tourisme tunisien en chiffres, https://www.ontt.tn/sites/default/files/inline-files/Extrait%20tourisme%20en%20chiffres%202020.pdf.

[5] ONTT (2020), Rapport Annuel, ONTT, https://www.ontt.tn/sites/default/files/inline-files/Rapport%20ONTT%202020.pdf.

[8] ONUAA (1991), Street foods in developing countries: lessons from Asia, Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, https://www.fao.org/3/u3550t/u3550t08.htm#TopOfPage.

[2] WFTA (2020), Food Travel Monitor, https://www.worldfoodtravel.org/what-is-food-tourism.

Notes

← 1. Le tourisme culinaire englobe de nombreuses activités telles que les cours de cuisine, les visites de restaurants ou de bars, les festivals de la gastronomie et des boissons, les repas spécialisés, les achats dans des magasins spécialisés et les visites de fermes, de marchés et de producteurs.

← 2. Article 1, Arrêté du ministre de l’Intérieur et du développement local du 15 août 2006, fixant les horaires d’ouverture des locaux destinés à l’exercice de certaines activités commerciales, touristiques et de loisirs. Modifié par l’Arrêté du 8 novembre 2016 et l’Arrêté du 16 novembre 2018. Si un établissement est situé dans un hôtel quatre ou cinq étoiles qui n'ouvre pas sur l'espace public ou est situé dans des villages de vacances fermés, il n'est soumis à aucune limite concernant les heures d'ouverture ou le service de boissons alcoolisées.

← 3. Décret n° 89-432 du 31 mars 1989 relatif au classement des restaurants de tourisme, article 2.

← 4. Voir, ONTT, Le Tourisme tunisien en chiffres 2019, page 81.

← 5. Décret n° 89-432 du 31 mars 1989 relatif au classement des restaurants de tourisme, article 1.

← 6. En Tunisie, il existe 4 types d’établissements touristiques musicaux : (i) le « cabaret, (ii) le « club de nuit », (iii) la « discothèque » et (iv) l’« établissement touristique d’animation musicale ». ll convient de mentionner que les bars et salons de plage sont actuellement classés comme restaurants touristiques.

← 7. Il s’agit de l’article 7 de la Loi n° 59-147 du 7 novembre 1959 portant réglementation des débits de boissons et établissements similaires - modifiée par -Loi n° 61-55 du 24 Novembre 1961, Décret-loi n° 74-23 du 2 Novembre 1974, Loi n° 93-18 du 22 Février 1993, Loi n° 27 de l'année 2001 (8 mars 2001), Loi n° 75 de l'année 2004 (2 août 2004)

← 8. Voir, commune-tunis.gov.tn بوابة مدينة تونس

← 9. Voir, http://www.commune-tunis.gov.tn/publish/content/article.asp?id=17202.

← 10. Règlement sanitaire de la ville de Tunis : http://www.commune-tunis.gov.tn/publish/images/citoyen/cahiers_charges/arrete_sanitaire.pdf

← 11. Voir, https://www.legalstart.fr/fiches-pratiques/metiers-restauration/reglementation-food-truck/

← 12. Voir, https://www.legalstart.fr/fiches-pratiques/metiers-restauration/reglementation-food-truck/

et https://www.legalstart.fr/fiches-pratiques/hotellerie-restauration/normes-hygiene-securite-sanitaire/

← 13. Voir, par exemple, https://gastronomerlifestyle.com/best-street-food-in-bangkok-2021/

← 14. Voir, https://ich.unesco.org/en/lists and https://www.nationalgeographic.com/travel/article/why-unesco-is-honoring-singapore-street-food

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