6. Répartition des bénéfices
6.1.1. La formule pour déterminer la fraction du Montant A
496. Le calcul et la répartition du Montant A reposeront sur une formule qui ne relève pas du principe de pleine concurrence. Cette formule s’appliquera à la base d’imposition d’un groupe (ou d’un segment, le cas échéant) et comportera trois composantes distinctes représentées dans les étapes ci-dessous :
Étape 1 : Un seuil de rentabilité visant à isoler le bénéfice résiduel devant potentiellement être réattribué, et à limiter les éventuelles interactions entre le Montant A et la rémunération d’activités standard au titre des règles conventionnelles de prix de transfert. Afin d’éviter des règles complexes, ce seuil serait basé sur une méthode de simplification, qui sera un ratio entre le bénéfice avant impôt et le chiffre d’affaires.
Étape 2 : Un pourcentage de bénéfice à réattribuer, visant à identifier une part appropriée du bénéfice résiduel qui peut être attribuée aux juridictions du marché relevant du Montant A (ci-après, la « base d’imposition à répartir »). Cela permettra de veiller à ce que d’autres facteurs, comme les actifs incorporels de commercialisation, le capital et le risque, continuent d’être rémunérés et de se voir attribuer du bénéfice résiduel. Afin d’éviter des règles complexes, cette base d’imposition à répartir sera déterminée par une méthode de simplification, qui sera un pourcentage fixe.
Étape 3 : Une clé de répartition visant à répartir la base d’imposition entre les juridictions du marché éligibles (à savoir celles pour lesquelles un lien a été établi au titre du Montant A). Elle reposera sur le chiffre d’affaires couvert de source locale déterminé en appliquant les règles relatives au champ d’application, au lien et à la source du chiffre d’affaires (voir le chapitre 4).
497. Cette formule en trois temps pour déterminer la fraction du Montant A pourrait être appliquée selon deux approches : l’une fondée sur le bénéfice et l’autre sur la marge bénéficiaire. Dans le cadre de l’approche fondée sur le bénéfice, le calcul partirait de la base d’imposition du Montant A exprimée en tant que montant du bénéfice (par exemple un bénéfice en valeur absolue de 10 millions EUR), alors qu’avec l’approche fondée sur la marge bénéficiaire, le calcul partirait de la base d’imposition du Montant A exprimée en tant que marge bénéficiaire (par exemple un ratio bénéfice avant impôt / chiffre d’affaires de 15 %). Les deux approches appliqueraient de la même façon la formule de répartition en trois étapes et attribueraient par conséquent à chacune des juridictions du marché la même fraction du Montant A imposable. L’administration de chaque approche peut toutefois présenter certaines variantes (par exemple, les changements de devises) ; ces différences concrètes éclaireront le choix de l’approche la plus appropriée pour calculer et répartir le Montant A. Ces deux approches sont examinées plus en détail à l’Annexe B.
Mécanismes de différenciation potentiels
498. Dans le cadre de l’accord global qu’il reste à trouver, il sera nécessaire de décider si la formule devrait intégrer un mécanisme de « différenciation ». La question est de savoir s’il convient d’appliquer les différentes composantes de cette formule de façon similaire en toutes circonstances, ou si des variantes (par exemple, le seuil de rentabilité de l’étape 1 et/ou le pourcentage de bénéfice à réattribuer de l’étape 2) devraient s’appliquer parfois pour augmenter (ou diminuer) la fraction du bénéfice réattribuée aux juridictions du marché pour certaines activités commerciales. Aucun accord n’a encore été conclu tant sur le bien-fondé politique de ces variantes que sur leur faisabilité du point de vue de leur conception technique. Il s’agira aussi de résoudre quelques problèmes subsistants concernant les questions de segmentation par région et par juridiction.
La question du double comptage
499. Le document « Contours de l’architecture » a fait ressortir la question importante du risque que, dans certaines circonstances, les interactions entre le Montant A et les droits d’imposition existants des juridictions de marché permettent à une juridiction de marché d’imposer à deux reprises le bénéfice résiduel d’un groupe d’EMN : une fois au titre des droits d’imposition et une autre fois par le truchement du Montant A (le problème du « double comptage »). La question du double comptage devrait être résolue, du moins en partie, par le mécanisme visant à éliminer la double imposition (voir le chapitre 7). En effet, lorsque dans une juridiction de marché, en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, un bénéfice résiduel significatif est attribué à une entité, celle-ci peut être identifiée comme une « entité payeuse » au sein du groupe aux fins de l’élimination de la double imposition, qui serait amenée à supporter une partie de l’impôt dû au titre du Montant A (aboutissant à un effet de « compensation »). Toutefois, certains membres du Cadre inclusif suggèrent que :
Cette solution peut sembler incompatible avec la logique globale du Pilier Un (et du Montant A plus précisément), qui a toujours été d’adapter le système d’impôt sur les bénéfices lorsqu’une entreprise participe de façon active et soutenue à une juridiction de marché, mais que les règles actuelles de répartition des bénéfices ne confèrent pas à cette juridiction des droits d’imposition sur les bénéfices résiduels générés sur ce marché. Par conséquent, si le Montant A s’appliquait à des activités réalisant déjà un bénéfice résiduel sur le marché, il semble que le problème que le Pilier Un tente de résoudre soit inexistant.
Il sera complexe d’appliquer le mécanisme visant à éliminer la double imposition aux entreprises qui réalisent des bénéfices résiduels dans un grand nombre d’entités et de juridictions. Plus précisément, il sera délicat de calibrer ce système pour identifier un distributeur de plein exercice (auquel le bénéfice résiduel est déjà attribué) en tant qu’entité payeuse pour le Montant A attribué au pays dans lequel il est résident. C’est pourquoi il peut être préférable de concevoir un mécanisme alternatif propre à réduire la pression sur le mécanisme d’élimination, pour que celui-ci puisse se concentrer sur les entreprises plus centralisées pour lesquelles il sera relativement facile d’identifier les entités payeuses .
500. Le régime de protection des bénéfices générés par des activités de commercialisation et de distribution décrit ci-après relève d’une approche qui vise à résoudre ces problèmes de double comptage, en même temps que plusieurs autres mis en avant par les membres du Cadre inclusif et des parties prenantes. Il s’agirait d’ajouter une étape supplémentaire à la formule du Montant A pour ajuster la fraction du Montant A attribuée aux juridictions du marché éligibles dans des circonstances particulières. D’autres approches sont également à l’étude pour régler (ou atténuer) le problème du double comptage au-delà du mécanisme d’élimination de la double imposition, notamment celle de l’exception en faveur des entreprises nationales.
Régime de protection des bénéfices issus d’activités de commercialisation et de distribution
501. Le « régime de protection des bénéfices issus d’activités de commercialisation et de distribution » repose sur le postulat suivant : le Montant A devrait être attribué à une juridiction de marché à laquelle des bénéfices résiduels ne sont pas attribués en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, mais il ne devrait pas l’être à une juridiction de marché dès lors qu’un groupe d’EMN laisse déjà suffisamment de bénéfices résiduels sur ce marché (pour ses activités couvertes). Il ne s’agirait pas d’un régime de protection conventionnel, mais plutôt de « plafonner » la répartition du Montant A aux juridictions de marché qui détiennent déjà des droits d’imposition sur les bénéfices d’un groupe en vertu des règles fiscales existantes. Sur le plan conceptuel, il appréhenderait les impôts sur les bénéfices à payer dans la juridiction du marché au titre à la fois des droits d’imposition existants et du Montant A, et il ajusterait la fraction du Montant A imposable dans une juridiction de marché, de manière à la plafonner lorsque le bénéfice résiduel du groupe d’EMN est déjà imposé dans cette juridiction en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices. Lorsqu’un groupe d’EMN remplit les conditions prévues par le régime de protection dans les juridictions du marché où il exerce ses activités, il serait certes tenu de calculer le Montant A, mais pour le reste il demeurerait soumis aux règles actuelles, y compris sur les prix de transfert et l’élimination de la double imposition.
502. En vertu du régime de protection, lorsqu’un groupe d’EMN a une présence imposable dans une juridiction de marché en y exerçant des activités de commercialisation et de distribution liées à un chiffre d’affaires couvert de source locale (s’agissant soit d’une entité résidente, soit d’un établissement stable), le groupe serait tenu de déterminer le bénéfice attribué à la juridiction de marché en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices pour l’exercice de ces activités de commercialisation et de distribution (« l’actuel bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution »)1. Le groupe d’EMN le comparerait alors à la « rémunération relevant du régime de protection » qui serait la somme de deux composantes :
Le Montant A, tel que calculé selon la formule y afférente ; et
Une rémunération fixe pour les activités standard de commercialisation et de distribution dans le pays, qui pourrait inclure une majoration régionale et sectorielle.
503. La rémunération relevant du régime de protection représente le plafonnement, qui servirait de référence pour ajuster la fraction du Montant A attribuée à une juridiction de marché. Ce plafonnement serait appliqué par un groupe d’EMN séparément à chaque juridiction de marché dans laquelle il opère et donnerait lieu à trois résultats possibles :
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est inférieur à la rémunération fixe, le groupe d’EMN ne pourra pas bénéficier du régime de protection ;
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est supérieur à la rémunération fixe, mais inférieur à la rémunération relevant du régime de protection, la fraction du Montant A attribuée à la juridiction en question serait ramenée à la différence entre la rémunération relevant du régime de protection et le bénéfice déjà attribué à la présence locale ; et
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est supérieur à la rémunération relevant du régime de protection, aucun Montant A ne serait attribué à cette juridiction.
504. Les groupes d’EMN couverts qui, pour des raisons commerciales (compte tenu de leur modèle économique particulier), opèrent sans présence imposable existante dans une juridiction de marché ou n’attribuent qu’une rémunération relativement limitée (par exemple sur une base de coûts majorés) aux activités locales de commercialisation et de distribution, ne relèveraient pas de la règle du régime de protection et par conséquent, ils s’acquitteraient du Montant A dans la majorité des juridictions de marché dans lesquelles ils opèrent. En revanche, les entreprises plus conventionnelles en relation étroite avec les consommateurs, surtout celles dont le modèle d’activité est décentralisé et dont les distributeurs supportent la totalité des risques, peuvent déjà attribuer des bénéfices aux juridictions du marché dès lors qu’ils sont supérieurs à la rémunération relevant du régime de protection. Par conséquent, même si ces entreprises étaient tenues de calculer le Montant A (pour déterminer qu’elles satisfont aux conditions du régime de protection), en définitive beaucoup d’entre elles n’auraient pas à payer le Montant A ou à en appliquer le mécanisme pour éliminer la double imposition.
Exception relative aux entreprises nationales.
505. Ce mécanisme exclurait du champ d’application du Montant A les bénéfices découlant d’activités en relation étroite avec les consommateurs ou de services numériques automatisés dans une juridiction de marché qui peuvent être considérées comme autonomes du reste du groupe, à savoir la vente de biens ou de services qui sont développés, fabriqués et vendus dans une seule et même juridiction. Étant donné que dans ce cas de figure le bénéfice résiduel est généralement déjà attribué au marché, cette exception éviterait alors le risque de double comptage.
506. De plus amples travaux seront nécessaires pour évaluer l’efficacité, l’efficience et la faisabilité des différentes options pour empêcher le double comptage, en étroite coordination avec les travaux consacrés au mécanisme d’élimination de la double imposition et à la lumière de l’objectif politique du Montant A (voir le chapitre 7). Il s’agira également de réfléchir aux interactions entre le Montant A et certaines retenues à la source d’impôt prélevées par les juridictions du marché.
6.2.1. Étape 1 - Le seuil de rentabilité
507. Le Montant A représente une variable de substitution simplifiée de la partie du bénéfice résiduel d’une entreprise qui peut raisonnablement être associée à la participation soutenue et importante de cette entreprise dans l’économie d’une juridiction de marché. Pour isoler le bénéfice résiduel d’une entreprise (d’un groupe ou d’un segment, le cas échéant) devant potentiellement être réattribué au titre du Montant A, la formule prévoit un seuil de rentabilité. Ce seuil repose sur une convention simplifiée (c’est-à-dire un pourcentage fixe) et s’appliquera à la base d’imposition du Montant A, déduction faite des éventuelles pertes disponibles reportées (voir la section 5.4).
508. L’une des raisons à l’introduction et à l’utilisation d’un seuil fixe, au lieu d’un pourcentage variable basé sur une analyse des faits et des circonstances ou sur une analyse connexe des prix de transfert, est d’atténuer la complexité. Le seuil de rentabilité réduira sensiblement l’ampleur des interactions du Montant A avec les règles de prix de transfert conventionnelles (par exemple, la rémunération d’activités standard), et donc la complexité que ces interactions induisent en vue d’éliminer la double imposition (et le double comptage, voir ci-dessous la section 6.4). Ce seuil ne modifiera pas la répartition du bénéfice provenant d’activités standard en application des règles de prix de transfert existantes (dans la mesure où le Montant A vient s’ajouter aux règles actuelles de répartition des bénéfices), mais il simplifiera l’identification et le calcul du bénéfice résiduel soumis au nouveau droit d’imposition.
509. Afin d’obtenir de tels résultats, le seuil de rentabilité sera déterminé selon une méthode de simplification (à savoir, une variable de substitution). Conformément à la logique adoptée pour déterminer la base d’imposition, et afin de faciliter l’administration et la conformité, il est prévu que la rentabilité d’un groupe d’EMN (ou d’un segment) soit évaluée moyennant le calcul du ratio bénéfice avant impôt/chiffre d’affaires au titre du Montant A, autrement dit par un pourcentage2. Le calcul de ce chiffre ne reposera nullement sur une évaluation économique spécifique au groupe d’EMN, pas plus qu’il ne correspondra nécessairement à d’éventuels accords de prix de transfert sous-jacents. L’impact des différents seuils de rentabilité est illustré dans le Tableau 6.1 ci-après.
510. Des données et analyses complémentaires sont disponibles dans l’évaluation de l’impact économique3. En s’aidant de ces estimations, les membres du Cadre inclusif pourront prendre une décision avisée pour établir le seuil. La décision quant au niveau du seuil de rentabilité cherchera à concilier plusieurs objectifs, à savoir s’assurer que le montant du bénéfice à réattribuer est modeste mais significatif, proportionnel aux coûts de conformité et à la charge administrative, et que le nombre de groupes concernés reste à un niveau gérable. À titre d’illustration, on constate que, sur la base d’un seuil de 10 % de bénéfice avant impôt rapporté au chiffre d’affaires, les estimations du Tableau 2.1 laissent à penser qu’environ 780 groupes d’EMN relevant potentiellement du champ du Montant A auraient des bénéfices résiduels. Cela représenterait approximativement 35 % des groupes d’EMN assujettis à l’obligation de déclarations pays par pays dont l’activité principale relève des secteurs ADS et CFB. En outre, le bénéfice résiduel combiné de ces groupes d’EMN serait de 510 milliards USD.
6.2.2. Étape 2 - Le pourcentage de bénéfice à réattribuer
511. Au titre du Pilier Un, seule une partie du bénéfice résiduel d’un groupe (ou d’un segment, le cas échéant) est attribuable au Montant A. Cela s’explique par le fait que les groupes d’EMN se livrent à toute une variété d’activités non liées au Montant A qui génèrent un bénéfice résiduel, d’où la nécessité qu’une part importante du bénéfice résiduel continue d’être attribuée en vertu des règles actuelles à des facteurs tels que les actifs incorporels de commercialisation, le capital et le risque, etc.
512. Le calcul basé sur une formule du Montant A nécessite donc une étape supplémentaire : le pourcentage de bénéfice à réattribuer. Pour des raisons de simplicité, la part du bénéfice résiduel attribuable à la juridiction de marché sera déterminée par une méthode de simplification (à savoir une variable de substitution) sans rapport avec les circonstances particulières du groupe d’EMN et qui ne repose pas sur le principe de pleine concurrence. Cette méthode de simplification pourrait aussi consister à multiplier le bénéfice résiduel par un pourcentage fixe. En reprenant les estimations visées dans le Tableau 6.1, le Tableau 6.2 ci-après présente des estimations de l’impact de différents pourcentages de bénéfice à réattribuer (associés à différents seuils de rentabilité possibles) sur le montant du bénéfice résiduel mondial à attribuer aux juridictions de marché.
513. Des données et analyses plus complètes sont disponibles dans l’évaluation de l’impact économique4. Forts de ces estimations, les membres du Cadre inclusif pourront prendre une décision éclairée sur le pourcentage de bénéfice à réattribuer. Cette décision visera à satisfaire plusieurs objectifs à la fois, notamment de continuer à imposer les activités et les facteurs générant un bénéfice résiduel non lié au Montant A en vertu du système existant de répartition des bénéfices basé sur le principe de pleine concurrence. À titre d’illustration, on constate que, sur la base d’un seuil de rentabilité de 10 % et d’un pourcentage de bénéfice à réattribuer de 20 %, les estimations du Tableau 6.2 suggèrent que, en utilisant les données financières de 2016, 98 milliards USD seraient attribués aux juridictions du marché. Selon cette approche, 80 % du bénéfice résiduel d’un groupe d’EMN (ou d’un segment, le cas échéant) calculé aux fins du Montant A continuerait donc d’être imposé conformément au système existant de répartition des bénéfices fondé sur le principe de pleine concurrence, les 20 % restants constituant ainsi la base d’imposition à répartir aux fins du Montant A.
6.2.3. Étape 3 - La clé de répartition
514. Une fois calculée la base d’imposition à répartir au titre du Montant A, ce bénéfice doit être attribué aux différentes juridictions du marché éligibles d’après une clé de répartition. Cette répartition repose sur le chiffre d’affaires couvert réalisé dans chaque juridiction de marché éligible (pour les règles relatives à la source du chiffre d’affaires, voir le chapitre 4.2).
515. L’application de cette clé de répartition nécessitera de définir clairement ce qu’on entend par chiffre d’affaires. En vertu des normes comptables, le chiffre d’affaires est généralement comptabilisé sur une base brute, ou nette de certains types d’impôts et de taxes (y compris sur les ventes, la consommation, la valeur ajoutée, ainsi que certains droits d’accise). De plus amples travaux seront nécessaires pour déterminer si les définitions existantes du chiffre d’affaires fournies par les normes comptables et figurant dans les états financiers (qui sont reprises pour les déclarations pays par pays) pourraient être utilisées pour définir le chiffre d’affaires aux fins de l’application de la formule du Montant A (en plus de l’application des critères du seuil pour déterminer le champ d’application, voir la section 2.3).
516. L’application de la clé de répartition basée sur le chiffre d’affaires variera selon que la formule adopte une approche fondée sur le bénéfice ou sur la marge bénéficiaire (voir la section 6.2.4). Dans le cadre d’une approche fondée sur le bénéfice, la base d’imposition à répartir (un montant du bénéfice, c’est-à-dire le bénéfice avant impôt) pourrait être multipliée par le ratio entre le chiffre d’affaires couvert de source locale et le chiffre d’affaires total d’un groupe d’EMN (ou d’un segment, le cas échéant) qui est utilisé pour le calcul de la base d’imposition, incluant le chiffre d’affaires provenant de juridictions de marché non éligibles (pour lesquelles aucun lien ne serait établi aux fins du Montant A) et éventuellement le chiffre d’affaires non couvert. Dans le cadre d’une approche fondée sur la marge bénéficiaire, la base d’imposition à répartir (un ratio de bénéfice, c’est-à-dire bénéfice avant impôt/chiffre d’affaires) pourrait être multipliée par le chiffre d’affaires couvert de source locale.
517. Ces deux approches permettraient de s’assurer que les bénéfices correspondant au Montant A imputables à un chiffre d’affaires généré dans des juridictions du marché non éligibles ne sont pas attribués à d’autres juridictions du marché éligibles, et qu’au lieu de cela, ils continuent d’être imposés en vertu de l’actuel système de répartition des bénéfices (mécanisme dit de « renvoi »). Concrètement, étant donné le niveau probable des seuils de chiffre d’affaires déclenchant un lien (voir la section 3.2.1), le bénéfice correspondant au Montant A imputable à des juridictions de marché non éligibles est susceptible d’être faible. Ces deux approches permettraient également de s’assurer que, lorsque le calcul de la base d’imposition du Montant A (au niveau d’un groupe ou d’un segment) inclut le bénéfice provenant d’un chiffre d’affaires non couvert, la partie de la base d’imposition du Montant A qui se rapporte au chiffre d’affaires non couvert ne sera pas réattribuée aux juridictions du marché5.
518. Une autre approche possible serait de répartir l’intégralité de la base d’imposition à répartir (telle que déterminée aux étapes 1 et 2) entre les juridictions du marché éligibles, et d’attribuer aux juridictions du marché éligibles les bénéfices correspondant au Montant A imputables au chiffre d’affaires généré dans des juridictions du marché non éligibles (mécanisme dit « d’intégration »). L’application de la clé de répartition fondée sur le chiffre d’affaires décrite plus haut au paragraphe 111 s’en trouverait modifiée, ce qui nécessiterait de déterminer la source de l’intégralité du chiffre d’affaires couvert (y compris du chiffre d’affaires provenant de juridictions de marché non éligibles)6.
6.2.4. Approches de mise en œuvre de la formule
519. En résumé, une approche en trois étapes devra être suivie pour calculer la fraction du Montant A imposable dans chacune des juridictions du marché éligibles. Sa mise en œuvre pourrait se faire en décidant soit d’utiliser les montants de bénéfices exprimés en valeur absolue (à savoir « l’approche fondée sur le bénéfice »), soit d’appliquer des ratios de bénéfices (en l’occurrence, « l’approche fondée sur la marge bénéficiaire » ). Dans le cadre de l’approche fondée sur le bénéfice, le calcul partirait de la base d’imposition du Montant A exprimée en tant que montant du bénéfice (par exemple un bénéfice en valeur absolue de 10 millions EUR), alors qu’avec l’approche fondée sur la marge bénéficiaire, le calcul partirait de la base d’imposition du Montant A exprimée en tant que marge bénéficiaire (par exemple un ratio du bénéfice avant impôt rapporté au chiffre d’affaires de 15 %). Les étapes décrites plus haut seraient appliquées sans changement ni variation dans ces deux approches, qui attribueraient par conséquent à chacune des juridictions du marché la même fraction du Montant A imposable. À titre d’étape suivante, le Cadre inclusif décidera de l’approche à retenir pour mettre en œuvre la formule du Montant A. L’approche fondée sur le bénéfice et l’approche fondée sur la marge bénéficiaire sont étudiées plus en détail à l’Annexe B.
520. Les travaux techniques ont étudié si les différents éléments de cette formule visés plus haut doivent être appliqués de la même façon quelles que soient les circonstances, ou si certaines variantes doivent être prévues pour pouvoir augmenter (ou diminuer) la fraction de bénéfice réattribuée dans certains cas aux juridictions du marché (ci-après les « mécanismes de différenciation »). Ces variantes pourraient avoir un impact significatif sur l’application générale des règles du Montant A.
521. Conformément aux propositions formulées par certains membres du Cadre inclusif, un mécanisme de différenciation pourrait éventuellement être adopté dans les buts suivants :
Tenir compte des différents degrés de numérisation entre les activités commerciales couvertes (par exemple sur la base de la définition des services numériques automatisés utilisée pour le champ d’application) et accroître la fraction des bénéfices réattribués pour certains types d’activités commerciales (ci-après, la « différenciation numérique »). Il s’agirait de viser les entreprises aux coûts marginaux moindres qui sont perçues comme tirant de plus grands avantages d’une échelle sans masse.
Tenir compte des écarts substantiels de rentabilité entre différentes juridictions de marché et accroître la fraction des bénéfices réattribués aux juridictions de marché où la rentabilité est nettement supérieure à la rentabilité moyenne du segment (ci-après, « différenciation par juridiction »). Une telle différenciation pourrait être une solution de rechange simplifiée à la segmentation par juridiction envisagée dans le contexte de la détermination de la base d’imposition qui, dans de nombreux cas, soulève des questions de faisabilité et d’administration (voir la section 5.3).
522. Plusieurs mécanismes permettent d’opérer ces types de différenciation, notamment : (i) des variantes dans le calcul de la base d’imposition à répartir, par exemple en augmentant le pourcentage de bénéfice à réattribuer (étape 2) dans des circonstances particulières ; (ii) des variantes quant à la clé de répartition utilisée pour répartir la base d’imposition entre les juridictions du marché (étape 3), par exemple en pondérant le montant du chiffre d’affaires provenant des juridictions du marché ; et (iii) d’autres variantes, telles que l’ajout d’une « rémunération standard » spécifique pour certaines activités numériques (par exemple les services numériques automatisés) qui peuvent être exercées sans aucune présence physique dans les juridictions du marché.
523. Il s’agira de résoudre les actuelles divergences entre les membres du Cadre inclusif sur cette question politique dans le cadre des discussions portant sur la fraction du Montant A.
6.3.1. Mécanismes de différenciation numérique et autre
524. Dans les discussions qui ont eu lieu jusqu’à présent, les membres du Cadre inclusif ont exprimé des points de vue différents quant à la nécessité d’ajouter une forme de « différenciation numérique » à la conception de la formule du Montant A. Il s’ensuit que plusieurs options sont à l’étude, notamment :
Absence de toute différenciation : la formule du Montant A s’appliquerait à toutes les activités commerciales couvertes, à l’identique et en toutes circonstances.
Différenciation numérique par des ajustements au Montant A : un seuil de rentabilité moindre au titre de l’étape 1 de la formule ou un pourcentage accru de bénéfice à réattribuer au titre de l’étape 2 s’appliquerait aux groupes d’EMN (ou aux segments le cas échéant) fournissant principalement des services numériques automatisés. Quoiqu’intuitivement simple, cette approche de différenciation exigerait également d’en étudier la faisabilité technique et conceptuelle en tenant compte des questions liées à la segmentation par branche d’activité et des implications sur les règles de champ d’application respectives.
Différenciation du Montant A par le biais d’un mécanisme d’indexation sur le bénéfice : un pourcentage progressif de bénéfice à réattribuer au titre de l’étape 2 serait introduit en fonction de la seule rentabilité du groupe (ou du segment le cas échéant). Ce mécanisme ne chercherait pas à rendre compte directement des différents degrés de numérisation entre les entreprises couvertes, mais serait fondé sur le postulat que des rendements plus élevés reflètent à un moment donné une plus grande contribution du marché à la rentabilité du groupe d’EMN (par exemple des rentes de monopole). La base d’imposition à répartir serait par conséquent déterminée en référence à une ou plusieurs fourchettes de bénéfice (par exemple X % pour une marge bénéficiaire comprise entre a-b %, X+Y % pour une marge bénéficiaire comprise entre b-c %, X+Y+Z % pour une marge bénéficiaire supérieure à c %), mais sans faire la moindre distinction quant à la nature sous-jacente de l’activité couverte fournie.
525. De plus, certains membres estiment que, quand des entreprises ADS ou CFB réalisent des ventes à distance dans une juridiction en utilisant des moyens numériques pour communiquer avec les clients, cette juridiction devrait elle aussi recevoir une attribution de bénéfices standard pour l’exercice à distance d’activités de commercialisation et de distribution. D’après eux, une fois qu’est atteint le nouveau seuil déclenchant un lien au titre du Montant A, il est injuste de refuser aux juridictions du marché des droits d’imposition sur des entreprises qui, grâce à la numérisation, peuvent participer à distance à la vie économique de leur juridiction (c’est-à-dire réaliser des ventes, commercialiser et distribuer leurs produits, recouvrer les paiements et traiter les réclamations des clients). Ces membres considèrent qu’en plus du Montant A, pour les entreprises qui opèrent sur un marché à distance, certaines activités de commercialisation et de distribution devraient être considérées comme ayant lieu dans la juridiction du marché et que, dans de telles circonstances, les bénéfices devraient être attribués à cette juridiction du marché. Ces bénéfices réaffectés pourraient être déterminés sous forme d’un pourcentage convenu (par exemple 30 %) de la marge de bénéfice standard présumée ou de la marge bénéficiaire réelle du groupe d’EMN (ou du segment, le cas échéant), la valeur la plus faible étant retenue, sous réserve d’un rendement minimal (par exemple x % des ventes) pour les activités de commercialisation et de distribution standard présumées. Les membres qui privilégient cette approche reconnaissent qu’une telle répartition de la rémunération standard présumée pour les activités de commercialisation et de distribution à distance soulève la question de la double imposition. Ils sont toutefois d’avis que cette double imposition peut être éliminée en vertu des règles actuelles. En outre, ils estiment qu’il est important de réduire les incitations offertes aux groupes d’EMN à exercer des activités de commercialisation et de distribution à distance à partir d’une juridiction à fiscalité plus faible et de parvenir à la neutralité entre les activités de commercialisation et de distribution exercées physiquement dans une juridiction de marché et des activités similaires exercées à distance grâce aux technologies numériques. D’autres membres sont d’avis que rien ne pourrait justifier la réattribution à la fois du bénéfice standard d’activités de distribution et du bénéfice résiduel.
6.3.2. Différenciation par juridiction
526. Le document « Contours de l’architecture » soulignait la nécessité d’étudier la logique et la faisabilité technique de la segmentation par juridiction ou par région comme moyen de tenir compte des écarts de rentabilité entre les régions. Pour les entreprises qui n’opèrent pas sur une base régionale, la segmentation par région poserait des difficultés techniques car, comme pour la segmentation entre les activités en relation étroite avec les consommateurs, celles de services numériques automatisés et celles non couvertes, il faudrait que des parts potentiellement importantes des coûts centraux soient réparties entre les différentes régions à l’aide de clés de répartition. Il est également admis que la segmentation par juridiction ou par région est principalement une question qui concerne les entreprises ayant des activités en relation étroite avec les consommateurs, non pas celles qui fournissent des services numériques automatisés7. Même si cette question fera l’objet de plus amples travaux, ceux réalisés jusqu’à présent laissent à penser que la segmentation par région pourrait ne pas suffire pour tenir compte des écarts importants de rentabilité entre les juridictions (qui sont particulièrement prononcés dans le secteur des activités CFB). Il a été envisagé, à titre de solution, de pondérer la formule du Montant A pour attribuer davantage de bénéfices aux marchés plus rentables. Or, une fois de plus, en raison des difficultés pour calculer les bénéfices attribuables à un marché, il peut être difficile d’identifier avec précision des marchés plus ou moins rentables.
527. Sur le plan conceptuel, il est particulièrement difficile d’intégrer la différenciation par juridiction dans le modèle du Montant A en raison de son incompatibilité avec l’approche globale, qui consiste à calculer les bénéfices à attribuer à une juridiction de marché sur une base de groupe ou de segment. Pour autant, plusieurs caractéristiques du Montant A veilleront à ce que son introduction n’entraîne pas la réattribution de bénéfices provenant de juridictions de marché plus rentables à des juridictions de marché qui le sont moins :
Mécanisme d’élimination de la double imposition. Le mécanisme pour éliminer la double imposition (voir le chapitre 7) pourrait comporter un test des activités et un test du lien le plus étroit avec le marché. Ces deux critères réduiraient considérablement le risque de réattribution à d’autres marchés des bénéfices de distributeurs sur le marché à la suite de l’introduction du Montant A.
Exception en faveur des entreprises nationales. Comme expliqué plus en détail ci-après, une « exception en faveur des entreprises nationales » pourrait être établie afin d’exclure de la base d’imposition du Montant A les bénéfices provenant de la vente de biens ou de services qui sont développés, fabriqués et vendus dans une seule et même juridiction. Toutefois, en exigeant d’exclure de la base d’imposition du Montant A les bénéfices des entreprises nationales, cette exception compliquerait d’autant plus la détermination de la base d’imposition du Montant A.
528. Le Montant A viendrait se superposer à l’actuel système de l’impôt sur les bénéfices. D’où le caractère inévitable des interactions entre le Montant A et le système existant de l’impôt sur les bénéfices8. Les interactions entre le Montant A et les droits d’imposition existants des juridictions de marché sur les bénéfices des entreprises, y compris des retenues d’impôt, présentent des difficultés conceptuelles et donnent matière à des divergences de vue parmi les membres. Comme le relèvent le document « Contours de l’architecture », il est important de déterminer si certaines de ces interactions (c'est-à-dire entre le Montant A et les règles existantes de répartition des bénéfices fondées sur le principe de pleine concurrence) pourraient avoir pour effet d’imposer à deux reprises le même bénéfice d’un groupe d’EMN dans une juridiction de marché donnée, ce qui pourrait être contraire à l’intention politique du Pilier Un (problématique du « double comptage »)9. Tout le problème tient à la possibilité que la juridiction du marché impose par deux fois le même élément de bénéfice résiduel : une première via une présence imposable existante en vertu des règles de prix de transfert, et une autre via le Montant A. La question du double comptage devrait être résolue, du moins en partie, par le mécanisme d’élimination de la double imposition (voir le chapitre 7). En effet, lorsque dans une juridiction de marché, en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, un bénéfice résiduel significatif est attribué à une entité, celle-ci peut être identifiée comme une « entité payeuse » au sein du groupe aux fins de l’élimination de la double imposition, qui serait amenée à supporter une partie de l’impôt dû au titre du Montant A (aboutissant à un effet de « compensation »). Toutefois, certains membres du Cadre inclusif suggèrent que cette approche en soi présente plusieurs inconvénients :
Elle peut sembler contre-intuitive. Comme on le verra plus loin, le mécanisme pour éliminer la double imposition aurait beau résoudre ce problème par un effet de « compensation », il n’en reste pas moins que fondamentalement, le Montant A serait malgré tout attribué à une juridiction de marché qui a déjà des droits d’imposition sur les bénéfices résiduels d’un groupe d’EMN.
Elle pourrait être incompatible avec la logique globale du Pilier Un (et du Montant A plus précisément), qui a toujours été d’adapter le système d’impôt sur les bénéfices lorsqu’une entreprise ADS ou CFB participe de façon active et soutenue à une juridiction de marché, mais que les règles actuelles de répartition des bénéfices ne confèrent pas à cette juridiction des droits d’imposition sur les bénéfices résiduels générés sur ce marché. Par conséquent, si le Montant A s’appliquait à des activités réalisant déjà un bénéfice résiduel sur le marché, il semble que le problème que le Pilier Un tente de résoudre soit inexistant.
Il sera complexe d’appliquer le mécanisme visant à éliminer la double imposition (voir le chapitre 7) aux entreprises décentralisées qui réalisent des bénéfices résiduels dans un grand nombre d’entités et de juridictions. Plus précisément, il sera délicat de calibrer ce système pour identifier un distributeur de plein exercice (auquel le bénéfice résiduel est déjà attribué) en tant qu’entité payeuse pour le Montant A attribué au pays dans lequel il est résident. C’est pourquoi il peut être préférable de concevoir un mécanisme alternatif propre à réduire la pression sur le mécanisme d’élimination, pour que celui-ci puisse se concentrer sur les entreprises plus centralisées pour lesquelles il sera relativement facile d’identifier les entités payeuses.
529. Tous ces inconvénients sont autant de variations sur le même thème. Il est aisé de rationaliser le Montant A quand il s’applique à des activités – tant en relation étroite avec les consommateurs que de services numériques automatisés – qui dégagent un bénéfice résiduel dans un petit nombre de pays, mais il est plus délicat de le rationaliser, et donc de le concevoir, s’il s’applique à des entreprises appliquant un modèle économique moins centralisé qui réalisent déjà des bénéfices résiduels sur le marché. Il est également vrai que les entreprises ont constamment souligné qu’il serait plus simple pour elles, et qu’elles sont donc très désireuses, de recourir aux systèmes sur lesquels elles s’appuient déjà pour leurs activités de distribution dans un pays. Pour autant, la question du double comptage continue de faire débat, y compris sur le point de savoir si l’attribution du bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution à une juridiction du marché en vertu du principe de pleine concurrence au-delà d’une rémunération fixe pourrait être considérée comme faisant double emploi avec le bénéfice correspondant au Montant A. Il s’agira pour cela d’évaluer les implications de la prise en compte des impôts sur les bénéfices payables dans la juridiction du marché tant en vertu des droits d’imposition existants qu’au titre du Montant A.
530. Par conséquent, plusieurs options sont actuellement à l’étude pour résoudre les problèmes de la double comptage qui vont au-delà du mécanisme d’élimination de la double imposition, comme le régime de protection des bénéfices issus d’activités de commercialisation et de distribution et l’exception en faveur des entreprises nationales.
6.4.1. L’impact du mécanisme d’élimination de la double imposition
531. Le processus d’élimination de la double imposition est un élément important pour résoudre, ou du moins réduire sensiblement, tout problème éventuel de double comptage dans la juridiction du marché. En effet, lorsque dans une juridiction de marché, en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, un bénéfice résiduel significatif est attribué à une entité, celle-ci peut être identifiée comme une « entité payeuse » au sein du groupe aux fins de l’élimination de la double imposition (voir plus loin la section 7.2). Le fait d’identifier cette entité comme « entité payeuse » aux fins du Montant A entraînera, à son tour, un effet de « compensation » : la méthode utilisée pour alléger la double imposition découlant du Montant A (y compris du Montant A attribué à d’autres juridictions du marché) aura pour effet de réduire le bénéfice résiduel attribué à la juridiction du marché en vertu des règles actuelles. Reste à savoir si ce cadre est capable de produire systématiquement cet effet de compensation, et donc s’il doit être l’unique solution retenue pour traiter les problèmes de double comptage.
532. Comme l’illustre l’Annexe C (voir l’Encadré C.3.), il est facile de repérer l’effet de compensation lorsqu’il est appliqué à un groupe d’EMN dont le modèle économique est centralisé (activités ADS et CFB), qui attribue le bénéfice résiduel à un nombre limité de juridictions. En revanche, il est plus difficile à évaluer lorsqu’il est appliqué à un groupe dont le modèle économique est décentralisé, qui laisse un bénéfice résiduel dans plusieurs juridictions de marché (voir l’Annexe C, Encadré C.4.). Par exemple, le mécanisme proposé pour éliminer la double imposition peut ne pas identifier comme entité payeuse un distributeur de plein exercice sur le marché ayant droit au bénéfice résiduel en vertu des règles actuelles (ou lui attribuer l’entière responsabilité d’alléger la double imposition) s’il ne satisfait pas au critère de rentabilité énoncé à la section 7.2.3, alors que d’autres entités du groupe (dans des juridictions différentes) satisferaient, elles, à ce critère. Les points de vue divergent quant au résultat approprié dans ce cas de figure. Il convient donc de vérifier l’efficacité de cette approche en l’appliquant à diverses situations et de la comparer à d’autres qui pourraient être élaborées en combinaison avec ce processus d’élimination de la double imposition afin de remédier plus efficacement aux problèmes de double comptage.
6.4.2. Le régime de protection des bénéfices de commercialisation et de distribution
533. Le « régime de protection des bénéfices de commercialisation et de distribution » partirait du postulat selon lequel le Montant A devrait être attribué à une juridiction de marché à laquelle des bénéfices résiduels n’ont pas été attribués en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, mais lorsqu’un groupe attribue déjà, et réalise dans les faits, un bénéfice résiduel sur le marché à partir du chiffre d’affaires couvert, alors aucune répartition du Montant A n’aurait lieu d’être. Cela signifierait qu’un groupe d’EMN serait tenu de calculer le Montant A en vertu des règles ci-dessus, mais ne l’attribuerait pas à une juridiction de marché dans la mesure où il attribue et réalise déjà un bénéfice résiduel dans cette juridiction. C’est cet objectif que le régime de protection des bénéfices de commercialisation et de distribution a vocation à accomplir. Il ne s’agirait pas d’un régime de protection conventionnel, mais plutôt de « plafonner » la répartition du Montant A aux juridictions de marché qui détiennent déjà des droits d’imposition sur les bénéfices d’un groupe en vertu des règles fiscales existantes. Sur le plan conceptuel, il appréhenderait les impôts sur les bénéfices à payer dans la juridiction du marché au titre à la fois des droits d’imposition existants et du Montant A, et il ajusterait la fraction du Montant A imposable dans une juridiction de marché, de manière à la plafonner lorsque le bénéfice résiduel du groupe d’EMN est déjà imposé dans cette juridiction en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices. Lorsqu’un groupe d’EMN remplit les conditions prévues par le régime de protection dans les juridictions du marché où il exerce ses activités, il serait certes tenu de calculer le Montant A, mais pour le reste il demeurerait soumis aux règles actuelles, y compris sur les prix de transfert et l’élimination de la double imposition.
534. L’adoption de cette approche permettrait de conserver la logique de base du Montant A et la formule elle-même resterait inchangée. Une rémunération relevant du régime de protection serait calculée par l’ajout du bénéfice résiduel qu’un groupe d’EMN devrait attribuer à une juridiction de marché et d’une rémunération fixe supplémentaire pour indemniser la présence locale d’activités de commercialisation et de distribution (détaillée plus loin). Le régime de protection reconnaîtrait qu’il existe deux façons d’attribuer aux juridictions du marché les bénéfices résiduels relatifs au Montant A. Tous les groupes d’EMN calculeraient le Montant A et soit ils bénéficieraient du régime de protection, soit ils s’acquitteraient du Montant A par l’application du nouveau système du Montant A.
Comment ce régime de protection fonctionnerait-il concrètement ?
535. Lorsqu’un groupe a une présence imposable dans une juridiction de marché en y exerçant des activités de commercialisation et de distribution liées à un chiffre d’affaires couvert de source locale (s’agissant soit d’une entité résidente, soit d’un établissement stable), le groupe déterminerait les bénéfices attribués à la juridiction de marché en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices pour l’exercice de ces activités de commercialisation et de distribution (« l’actuel bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution »)10. Le groupe d’EMN comparerait ensuite le bénéfice issus d’activités de commercialisation et de distribution à la « rémunération relevant du régime de protection » qui serait la somme de deux composantes :
Le Montant A, tel que calculé selon la formule y afférente ; et
Une rémunération fixe pour les activités standard de commercialisation et de distribution dans le pays, qui pourrait inclure une majoration régionale et sectorielle.
536. La rémunération relevant du régime de protection représente le plafonnement, qui servirait de référence pour ajuster la fraction du Montant A réparti à une juridiction de marché. Ce plafonnement serait appliqué par un groupe d’EMN séparément en fonction de chaque marché et déboucherait sur trois résultats possibles :
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est inférieur à la rémunération fixe, le groupe d’EMN ne pourra pas bénéficier du régime de protection ;
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est supérieur à la rémunération fixe, mais inférieur à la rémunération relevant du régime de protection, la fraction du Montant A attribuée à la juridiction en question serait ramenée à la différence entre la rémunération relevant du régime de protection et le bénéfice déjà attribué à la présence locale ; et
Lorsque le bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution est supérieur à la rémunération relevant du régime de protection, aucun Montant A ne serait attribué à cette juridiction.
537. Dans les cas où un groupe d’EMN est éligible au régime de protection dans une juridiction de marché (les deuxième et troisième cas de figure ci-dessus), notons qu’il est possible qu’une entité résidente de cette juridiction soit toujours identifiée comme étant une entité payeuse pour le Montant A attribué à d’autres juridictions en vertu du mécanisme d’élimination de la double imposition si sont satisfaites les autres règles et exigences énoncées à la section 7.2, y compris potentiellement le critère du lien étroit avec le marché.
538. En outre, les groupes d’EMN couverts qui, pour des raisons commerciales (compte tenu de leur modèle économique particulier), opèrent sans présence imposable existante dans une juridiction de marché ou n’attribuent qu’une rémunération relativement limitée (par exemple sur une base de coûts majorés) aux activités locales de commercialisation et de distribution, ne relèveraient pas de la règle du régime de protection et, par conséquent, ils s’acquitteraient du Montant A dans la majorité des juridictions de marché dans lesquelles ils opèrent. En revanche, les entreprises plus conventionnelles en relation étroite avec les consommateurs, surtout celles dont le modèle d’activité est décentralisé et comptant des distributeurs de plein exercice, peuvent attribuer déjà des bénéfices aux juridictions du marché qui dépassent la rémunération relevant du régime de protection. Par conséquent, même si ces entreprises seraient tenues de calculer le Montant A (pour déterminer qu’elles satisfont aux conditions du régime de protection), en définitive beaucoup d’entre elles n’auraient pas à payer le Montant A ou à appliquer le mécanisme d’élimination de la double imposition. Un exemple de son application est présenté à l’Annexe C (voir l’Encadré C.2).
539. Le régime de protection peut être particulièrement pertinent pour les entreprises décentralisées qui réalisent des bénéfices résiduels dans un grand nombre d’entités et de juridictions, pour lesquelles il est difficile sur le plan conceptuel d’identifier la ou les entités au sein du groupe qui devraient supporter l’impôt dû au titre du Montant A. Dans certains cas, il est possible que l’adoption du régime de protection réduise la pression du mécanisme d’élimination de la double imposition découlant du Montant A et puisse permettre d’élaborer un tel mécanisme en visant plus particulièrement les entreprises dont le modèle économique est plus centralisé et moins susceptible d’être touché par le régime de protection.
540. Dans le même temps, le régime de protection maintiendrait la nécessité de calculer le Montant A, tout en introduisant de nouvelles règles pour mettre en œuvre et administrer le mécanisme de plafonnement. De plus, l’application du régime de protection nécessiterait de tenir compte de tout ajustement ultérieur des prix de transfert qui a modifié les bénéfices de commercialisation et de distribution attribués à une juridiction de marché en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices fondées sur le principe de pleine concurrence. Par exemple, si une juridiction de marché a procédé à un ajustement à la hausse des bénéfices qui lui ont été attribués au titre d’activités de commercialisation et de distribution, il lui faudrait refaire le calcul pour déterminer si un groupe d’EMN serait éligible au régime de protection, toute taxe supplémentaire due en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices venant compenser l’impôt qui cesserait d’être exigible au titre du Montant A.
Détermination de la rémunération fixe pour le régime de protection
541. En vertu du régime de protection des bénéfices de commercialisation et de distribution, la formule de calcul du Montant A resterait inchangée. Il serait toutefois nécessaire de déterminer une rémunération fixe pour les activités standard de commercialisation et de distribution dans le pays. Cela soulèvera plusieurs difficultés techniques et de conception qui devront être résolues dans le contexte du régime de protection.
542. La rémunération fixe ne chercherait pas nécessairement à reproduire une rémunération de pleine concurrence, ni à limiter les bénéfices à attribuer à des activités de commercialisation et de distribution. Les juridictions qui, au titre du principe de pleine concurrence, ont droit à une rémunération plus élevée pour l’exécution d’activités de commercialisation et de distribution, continueraient d’y avoir droit. Au lieu de cela, cette rémunération fixe (qui ne serait pertinente que pour les grands groupes d’EMN couverts) servirait à identifier les situations dans lesquelles l’attribution du Montant A à une juridiction de marché donnerait lieu à un double comptage.
543. Par exemple, si la rémunération fixe correspond à une marge sur les ventes de 4 %, cela signifie que les bénéfices attribués à une juridiction de marché au-delà de cette rémunération seraient réputés faire double emploi avec la rémunération attribuée à une juridiction de marché au titre du Montant A. Ainsi, si une juridiction de marché se voit attribuer une rémunération de 3 % en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, elle recevrait la pleine attribution du Montant A. En revanche, si elle se voit attribuer une rémunération de 5 %, sa part du Montant A serait réduite de 1 % (soit la différence entre la rémunération qu’elle recevrait en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices et la rémunération fixe). Si une rémunération fixe plus basse est convenue, le régime de protection s’appliquerait pour plafonner la répartition du Montant A plus fréquemment que si une rémunération plus élevée est retenue.
544. La rémunération fixe pourrait être calculée de différentes façons, mais la méthode la plus simple serait peut-être de convenir d’une marge sur les ventes fixe unique qui serait appliquée au chiffre d’affaires couvert de source locale (calculé en vertu des règles de détermination de la source du chiffre d’affaires). Cette approche s’inspirerait d’une composante existante de la formule du Montant A et éviterait donc quelques-unes des embûches que poserait une approche différente, en particulier dans la définition de la base (par exemple, les ventes ou les coûts) à laquelle une marge ou une majoration devrait être appliquée.
545. Sans chercher à être compatible avec le principe de pleine concurrence, il pourrait être convenu que la rémunération fixe pourrait varier en fonction de la région ou du secteur (mais sans doute pas selon les fonctions). Par exemple, on pourrait prétendre qu’au titre du principe de pleine concurrence, une rémunération plus élevée étant généralement attribuée aux distributeurs pharmaceutiques, la rémunération fixe pour les entreprises pharmaceutiques pourrait elle aussi être plus élevée en vertu du régime de protection. Cela signifierait qu’en vertu des règles actuelles de répartition des bénéfices, pour bénéficier du régime de protection, une entreprise pharmaceutique devrait attribuer une plus forte part de ses bénéfices à une juridiction du marché qu’une entreprise comparable dans un autre secteur. Toutefois, pour des raisons de simplicité, il pourrait également être convenu qu’un taux fixe unique serait applicable à toutes les régions et à tous les secteurs11.
546. D’où la nécessité de soumettre ce régime de protection à un examen plus approfondi, plusieurs difficultés devant faire l’objet de travaux supplémentaires, notamment pour définir la rémunération fixe pour les activités standard de commercialisation et de distribution.
6.4.3. L’exception en faveur des entreprises nationales
547. L’élaboration d’une « exception en faveur des entreprises nationales » visant à réduire les cas de « double comptage » est également envisagée, parallèlement au mécanisme d’élimination de la double imposition et au régime de protection. Il existe deux types potentiels d’exceptions en faveur des entreprises nationales. La première et la plus simple exclurait du champ d’application du Montant A les grandes entreprises concentrant leurs activités sur le marché national et réalisant un niveau minimum de bénéfices à l’étranger. Elle serait mise en œuvre par l’exemption des groupes dont le chiffre d’affaires couvert de source étrangère est inférieur à un seuil convenu pour relever du champ d’application du Montant A (voir plus haut la section 2.3.2).
548. La deuxième exception, plus complexe, chercherait à exclure du Montant A la partie des activités d’un groupe qui sont principalement ou uniquement exercées dans une seule juridiction. Cela peut se produire, par exemple, lorsqu’un groupe acquiert une entreprise opérant dans une autre juridiction et que ce groupe n’intègre pas ultérieurement dans ses opérations globales. Dans ce cas-là, il peut être difficile de justifier l’application du Montant A à cette partie de l’activité du groupe, car elle pourrait avoir pour effet d’attribuer à d’autres juridictions les bénéfices résiduels issus de cette entreprise, qui sont manifestement issus d’une seule juridiction. Cela pourrait aussi avoir pour effet d’attribuer des bénéfices résiduels générés par d’autres parties de l’entreprise à la juridiction en question, bien que cette dernière détienne déjà des droits d’imposition sur les bénéfices résiduels (le cas échéant) associés aux ventes concernées. Un autre point de vue possible est qu’il s’agit là simplement d’une conséquence logique de l’application reposant sur une formule du Montant A au groupe dans son ensemble.
549. « L’exception en faveur des entreprises nationales » permettrait de remédier à certains cas de double comptage, en excluant du Montant A les bénéfices résultant de la vente de biens ou de services qui sont développés, fabriqués et vendus dans une seule juridiction.
550. Deux difficultés seraient à surmonter pour pouvoir élaborer cette exception en faveur des entreprises nationales. Premièrement, il faudrait que le contribuable isole et segmente les bénéfices de cette entreprise nationale autonome des autres activités du groupe. Il faudrait pour cela réorganiser le cadre de segmentation, ce qui augmenterait la complexité, ainsi que les coûts de conformité et la charge administrative associés. Ceci dit, en supposant que l’entreprise est exploitée de façon autonome, cette segmentation supplémentaire peut être relativement facile à effectuer pour le contribuable.
551. Deuxièmement, il est peu probable qu’il existe de nombreux exemples de groupes d’EMN possédant des entreprises nationales entièrement autonomes. En effet, dans la plupart des cas, ces entreprises seront intégrées dans une certaine mesure dans l’activité plus large du groupe, que ce soit par le biais du développement partagé de la propriété intellectuelle, des activités de financement intragroupe ou d’autres services centraux. Pour les grandes entreprises en relation étroite avec les consommateurs en particulier, les paiements de redevances portant sur la propriété intellectuelle peuvent représenter une charge importante dans de nombreuses juridictions de marché. Même lorsque des groupes fabriquent et vendent des biens dans une seule juridiction en utilisant la propriété intellectuelle locale, ces biens peuvent inclure des intrants achetés auprès d’une partie liée dans une autre juridiction ou ils peuvent être produits à l’aide d’un savoir-faire de fabrication soumis à des frais de licence.
552. Pour cette raison, si l’exception ne s’appliquait qu’à la fraction des activités d’un groupe menées sur un seul territoire, en l’absence de toute transaction avec des parties liées dans d’autres juridictions, peu de groupes d’EMN, voire aucun, pourraient s’en prévaloir. Par conséquent, il serait probablement nécessaire d’établir un seuil quantitatif pour identifier les « entreprises nationales » ayant droit à cette exception, comme celles ayant conservé un pourcentage donné (par exemple 90 %) du total des bénéfices provenant d’un marché, ou sinon celles dont le chiffre d’affaires provient exclusivement du marché national et qui n’ont que des transactions limitées, voire aucune, avec des parties liées dans d’autres juridictions. Une telle solution s’accompagnerait de ses propres difficultés. Il serait difficile de parvenir à un accord sur le pourcentage des bénéfices qui devraient être conservés sur le marché pour que s’applique « l’exception en faveur des entreprises nationales ». Convenir d’un seuil unique créerait un « effet de falaise », où une entreprise juste au-dessus du seuil serait exclue du Montant A, alors qu’une autre se trouvant juste en dessous ne le serait pas. Si ce seuil était appliqué sur une base annuelle, l’entreprise nationale pourrait alterner en étant par moments couverte par l’exception et à d’autres pas, ce qui ne ferait qu’ajouter de la complexité supplémentaire. Le simple fait de calculer si le seuil a été atteint serait en soi difficile, dans la mesure où pour déterminer les bénéfices générés par un marché, il faudrait aussi identifier l’intégralité des coûts engagés en rapport à ce marché, dans la mesure où certains pourraient l’être dans d’autres juridictions. Cette complexité risque de donner lieu à des différends quant à la répartition des coûts partagés, comme les dépenses de gestion ou les campagnes publicitaires mondiales. Face à tous ces problèmes, force est de constater que même si « l’exception en faveur des entreprises nationales » est attrayante du point de vue conceptuel, elle peut être très difficile à concevoir dans la pratique.
553. Outre ces difficultés, il est important de souligner que « l’exception en faveur des entreprises nationales » ne ferait que réduire le problème du « double comptage ». Elle ne résoudrait pas les cas où une juridiction de marché détient des droits d’imposition sur les bénéfices résiduels découlant des activités d’un distributeur non éligible à « l’exception en faveur des entreprises nationales ». Par conséquent, cette « exception en faveur des entreprises nationales » ne pourrait être développée qu’en combinaison avec un autre mécanisme d’élimination de la double comptabilisation.
554. En s’appuyant sur les données et l’analyse préparées dans le cadre de l’évaluation d’impact de différents pourcentages pour le seuil de rentabilité (étape 1) et du pourcentage de bénéfice à réattribuer (étape 2), les membres du Cadre inclusif devront s’entendre sur la formule de calcul de la fraction du Montant A, y compris sur la nécessité d'y ajouter ou non un « mécanisme de différenciation ». Ces discussions devront porter notamment sur le montant du bénéfice résiduel à réattribuer (y compris la proportionnalité aux coûts de conformité et à la charge administrative), l’impact possible sur ce montant du bénéfice résiduel de la comptabilisation des manques à gagner (voir la section 5.4.6) et le nombre de groupes d’EMN touchés. Il s’agira aussi de résoudre les problèmes en suspens concernant la segmentation par région et par juridiction.
555. En outre, des travaux supplémentaires seront nécessaires pour évaluer les différentes options au problème du double comptage (et leurs combinaisons possibles), en étroite coordination avec les travaux sur le mécanisme d’élimination de la double imposition (voir le chapitre 7). Il s’agira également de réfléchir aux interactions entre le Montant A et certaines retenues d’impôt prélevées par les juridictions du marché. Quant au régime de protection, plusieurs points nécessiteront de plus amples travaux, à savoir :
Évaluer les implications de la prise en compte des impôts sur les bénéfices payables dans la juridiction de marché au titre à la fois des droits d’imposition existants et du Montant A (par exemple, si le bénéfice de commercialisation et de distribution attribué à une juridiction de marché en vertu du principe de pleine concurrence au-delà d’une rémunération fixe peut être considéré comme faisant double emploi avec le Montant A) ;
Définir la rémunération fixe pour les activités standard de commercialisation et de distribution, y compris déterminer si cette rémunération devrait varier en fonction du secteur et/ou de la région ;
Identifier et isoler les bénéfices des activités de commercialisation et de distribution dans la juridiction du marché qui sont couvertes par le régime de protection ; et
Élaborer un mécanisme pour traiter des ajustements des prix de transfert, des réclamations d’établissement stable à seuil décalé ou le refus de déduction de coûts partagés qui sont engagés après application du régime de protection dans la juridiction du marché.
Examiner la prévalence du problème du double comptage et déterminer si les difficultés pratiques et administratives induites par la conception du régime de protection sont à la mesure de ce problème ; et
Clarifier le traitement des retenues à la source perçues par la juridiction du marché.
Notes
← 1. Lorsque des bénéfices sont attribués à une juridiction de marché pour d’autres activités, par exemple des activités de production ou de commercialisation et de distribution liées à un chiffre d’affaires non couvert, ceux-ci ne seraient pas pris en compte aux fins du régime de protection.
← 2. Aux fins du calcul et de l’application du Montant A, de plus amples travaux seront nécessaires pour définir le terme « chiffre d’affaires » (voir le paragraphe 515).
← 3. Voir CTPA/CFA/WP2/NOE2(2020)10)
← 4. Voir CTPA/CFA/WP2/NOE2(2020)10)
← 5. Par exemple, si un segment réalisait un chiffre d’affaires couvert total de 80 (dont la source se trouve dans sa totalité dans des juridictions de marché éligibles en vertu de la règle du lien) et un chiffre d’affaires total de 100 (chiffre d’affaires non couvert inclus), l’application de la clé de répartition signifierait que seulement 80 % de la base d’imposition du Montant A serait attribuée aux juridictions du marché en vertu du Montant A. Les 20 % demeureraient non affectés parce qu’ils se rapportent à un chiffre d’affaires provenant d’activités non couvertes.
← 6. Le calcul du Montant A oblige déjà les groupes d’EMN à déterminer le chiffre d’affaires total utilisé pour calculer la base d’imposition du Montant A (et, le cas échéant, imputable à chaque segment). Par conséquent, en adoptant le mécanisme de renvoi, il suffirait de vérifier les données sur le chiffre d’affaires généré dans une seule juridiction éligible pour calculer l’impôt dû au titre du Montant A spécifique à un marché. En revanche, si le mécanisme d’intégration était adopté, le calcul nécessiterait de vérifier le chiffre d’affaires généré dans chacune des juridictions du marché.
← 7. Les modèles économiques pour les groupes d’EMN dans les secteurs ADS impliquent généralement un développement centralisé précoce et continu de la propriété intellectuelle et l’engagement d’autres coûts en vue de développer l’offre de services globale, pour pouvoir ensuite la déployer sur de nouveaux marchés à un coût marginal limité. Il en résulte que les coûts significatifs sont centralisés et que la variation des bénéfices entre les régions et les juridictions est sensiblement affectée par l’imputation de ces coûts aux entités qui opèrent dans les différentes juridictions du marché et sont bénéficiaires du développement initial et continu. On peut donc en déduire que la différenciation par région ou par juridiction sera moins pertinente pour les entreprises ADS.
← 8. Comme on l’a vu plus haut, le seuil de rentabilité de la formule du Montant A est conçu pour limiter les interactions entre le Montant A et les droits d’imposition existants des juridictions de marché en se fondant sur le principe de pleine concurrence.
← 9. On pourrait également faire valoir que les interactions entre le Montant A et certaines retenues à la source pourraient donner lieu à un double comptage, dans la mesure où une juridiction du marché imposerait à deux reprises le même élément de bénéfice si elles se voyaient attribuer le Montant A en plus de certains passifs existants de retenues à la source. Par exemple, supposons qu’une entité du groupe d’EMN située en dehors de la juridiction du marché reçoit un paiement de redevance d’une entité de la juridiction du marché pour l’utilisation de droits de marque ou de licence se rapportant aux ventes dans cette juridiction. Supposons que la redevance est soumise à une retenue à la source dans la juridiction du marché. Si la redevance contribue aux bénéfices résiduels, la juridiction du marché peut alors être considérée comme imposant déjà une part de ce bénéfice résiduel par le truchement de la retenue à la source. Il est important de souligner que les points de vue des membres divergent sur cette question : certains estiment que cette interaction pourrait donner lieu à un double comptage, d’autres non.
← 10. Lorsque des bénéfices sont attribués à une juridiction de marché pour d’autres activités, par exemple des activités de production ou de commercialisation et de distribution liées à un chiffre d’affaires non couvert, ceux-ci ne seraient pas pris en compte aux fins du régime de protection. D’autres règles pourraient s’avérer nécessaires pour déterminer l’actuel bénéfice issu d’activités de commercialisation et de distribution (par exemple des rapprochements entre données comptables et fiscales).
← 11. L’industrie pharmaceutique a généralement des rémunérations plus élevées que la plupart des autres secteurs et, par conséquent, même en adoptant une approche à rémunération fixe unique, la rémunération totale au titre du régime de protection (c'est-à-dire le Montant A plus la rémunération fixe) serait, par rapport à d’autres secteurs, encore relativement élevée pour la plupart des groupes pharmaceutiques.