copy the linklink copied!Conclusion et recommandations

Avec sa nouvelle constitution et les efforts de décentralisation, la Tunisie est en train de changer sa stratégie en matière de politique économique. Au cours des dernières décennies, la plupart des politiques et stratégies de développement se sont concentrées sur la capitale, Tunis et les autres grandes villes côtières. Cette approche a certes été motivée par un regroupement de ressources et par l’exploitation des atouts de l’économie dans les régions les plus développées du pays, mais elle a conduit à un creusement des disparités économiques régionales. Il est nécessaire de stimuler la croissance et le développement économique dans toutes les régions du pays.

Afin de soutenir une approche de développement régional basée sur le territoire, la Tunisie a besoin d'un système de statistiques territoriales avec des données infranationales précises et fiables. Une approche ciblée et axée sur les territoires, est largement répandue dans les pays de l’OCDE, car elle permet d’adopter des politiques adaptées qui tiennent compte des atouts, des forces et des faiblesses de chaque région.

Pour ce rapport, l’OCDE a donc procédé à une analyse approfondie du système de statistiques territoriales existant en Tunisie, en réalisant une évaluation à la fois de sa gouvernance et de son utilisation pour la conception des politiques de développement régional. Bien que la Tunisie ait de jure un système bien établi qui délègue la production de statistiques territoriales à diverses entités nationales et infranationales, celui-ci manque de facto de mécanismes de coordination efficaces. Près de 50 institutions participent à la collecte de données et à la production de statistiques, ce qui nécessite une coordination efficace et soutenue. Il convient, en particulier, de renforcer les mécanismes de coordination entre l’INS, qui possède un mandat technique, et le Conseil national de la statistique, chargé, pour sa part, des aspects liés à la coordination globale.

L’élaboration des politiques de développement régionale en Tunisie n’a pas encore donné lieu à une classification claire du territoire national. Ce rapport présente et applique la typologie régionale de l'OCDE et le degré d'urbanisation respectivement aux régions et municipalités tunisiennes. Cette classification ouvre une perspective comparative internationale sur les régions tunisiennes, ce qui devrait permettre à la Tunisie de concevoir et de mettre en œuvre des politiques de développement régional qui pourraient également bénéficier d'expériences d'apprentissage entre les pairs. Les méthodologies appliquées classent le territoire tunisien en fonction de points communs en termes de densité de population, ce qui peut aider à renseigner la conception des politiques. Dans les pays de l'OCDE, la classification régionale est devenue un outil standard pour les politiques de développement régional et le degré d'urbanisation est utilisé pour informer les politiques publiques.

Sur la base d'une collecte de données approfondie et de comparaisons internationales, l'OCDE a analysé le développement régional en Tunisie et illustré la manière dont les statistiques territoriales peuvent informer et structurer les politiques de développement régional. L'analyse présentée dans ce rapport met en évidence un certain nombre de défis pour le développement régional en Tunisie. Tout d'abord, il existe de grandes disparités économiques entre les régions côtières et intérieures du pays, et le manque d'activité économique dans les régions de l’intérieur freine leur développement économique. Les disparités régionales en termes économiques et socioéconomiques sont élevées en Tunisie par rapport aux pays de l’OCDE.

Quatre domaines revêtent une importance vitale pour renforcer la croissance régionale inclusive en Tunisie. Premièrement, les politiques de développement devraient améliorer l’accessibilité des régions reculées et faciliter la connexion avec les centres économiques du pays situés sur la côte. L’amélioration de la fourniture des services publics et l’extension de l’accès au haut débit peuvent contribuer à l’amélioration du niveau de vie dans les régions intérieures de la Tunisie et à l’amélioration de leur connectivité. Deuxièmement, la plupart des régions tunisiennes, et en particulier les régions de l'intérieur du pays, souffrent économiquement d'un manque d'opportunités pour les jeunes adultes, aggravé par l'inadéquation des compétences entre l'offre du système éducatif et les besoins du secteur privé. Troisièmement, les politiques visant à encourager la création d’entreprises et d’emploi dans le secteur privé et à accroître l’investissement apparaissent comme des facteurs essentiels pour stimuler la croissance dans les régions tunisiennes. Enfin, la forte concentration de la population tunisienne dans les municipalités urbaines peut être mise à profit pour générer de la croissance.

Pour atténuer les disparités régionales, la Tunisie pourrait commencer par investir dans les villes – de taille moyenne ou petite – et dans les régions de l’intérieur susceptibles de produire des externalités positives sur les zones environnantes. Afin, d’orienter les actions politiques dans tous ces domaines, la Tunisie devrait améliorer son système de statistiques territoriales. À long terme, le système d’information au niveau des services statistiques régionaux ainsi que celui des municipalités devrait être renforcé. Les recommandations suivantes spécifient les actions permettant d’améliorer et de moderniser le système statistiques territoriales afin de garantir un développement régional plus inclusif en Tunisie:

  • Renforcer la production et l'utilisation d'indicateurs territoriaux pour soutenir l'action publique. La Tunisie pourrait envisager l'adoption d'une charte définissant les conditions de production et d'utilisation des indicateurs territoriaux, notamment en favorisant la coordination horizontale entre les ministères, les agences et le système statistique national. Une telle charte devrait inclure un cadre méthodologique clair et flexible qui s'adapte aux besoins et aux spécificités de chaque territoire. En outre, elle devrait tenir compte des meilleures pratiques en matière de pertinence politique et d'utilisation des statistiques territoriales d'autres pays, ainsi que des normes internationales régissant la production de statistiques territoriales de manière régulière, rapide et précise.

  • Améliorer la structure de gouvernance et favoriser une coordination plus étroite entre les acteurs impliqués dans la production de statistiques territoriales afin de renforcer les politiques d'investissement public. La collaboration entre l'Institut national de statistique et les autres agences et ministères impliqués dans la collecte de données infranationales doit être considérablement intensifiée et le partage d'informations devrait devenir automatique. Par exemple, l’organisation de réunions fréquentes et la création d’une commission hébergée par le CNS et l’INS dédiée à la production et à l’utilisation des statistiques territoriales, contribuerait à renforcer les liens de collaboration. De plus, la coordination verticale entre les directions régionales et le siège au sein du système statistique mérite d'autres améliorations. Une attention particulière devrait être portée au renforcement des capacités des directions régionales de l’INS.

  • Poursuivre la modernisation et accroître la responsabilité du système statistique. Prenant appui sur les exemples de nombreux pays membres et non membres de l'OCDE, le système statistique tunisien devrait explorer de nouvelles sources non conventionnelles de données qualitatives pouvant offrir des formes peu coûteuses de collecte de données et des solutions de remplacement lorsque les sources de données traditionnelles rencontrent des difficultés. L’amélioration de la capacité des systèmes d’information géographique (SIG) permettrait au personnel de l’INS de mesurer et d’analyser une série de problèmes spatiaux pour assurer le suivi de l’évolution des disparités et renseigner les politiques de développement régional. Encourager un agenda de données ouvertes via des sites internet et la diffusion électronique de données, établir un partenariat avec d'autres institutions publiques et privées et développer de nouveaux moyens de communication des statistiques, sont autant de pistes qui peuvent renforcer le système statistique et faciliter l'accès aux statistiques territoriales en Tunisie.

  • Tirer parti des classifications du territoire tunisien qui permettent une comparabilité internationale. Au niveau international, les classifications régionales et la délimitation des zones fonctionnelles urbaines (c’est-à-dire économiquement intégrées) se sont avérées utiles pour la conception des politiques publiques. L'application du concept de zones fonctionnelles urbaines générera une meilleure compréhension du rôle économique des villes de différentes tailles à travers le pays. L’adoption d’une classification régionale permettrait une approche plus nuancée des politiques régionales.

  • Lier la conception de la politique régionale aux données empiriques sur la base des statistiques territoriales. Les politiques de développement régional en Tunisie gagneraient à un alignement plus étroit sur des résultats mesurables. Les statistiques territoriales fournissent les informations nécessaires pour identifier les problèmes et les défis propres à une région ou à un territoire, pour suivre les dynamiques dans le temps et pour évaluer les résultats des politiques. La conception d'une politique régionale axée sur des indicateurs et des données factuelles sera plus efficace pour stimuler la croissance inclusive dans les régions tunisiennes.

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https://doi.org/10.1787/283fefef-fr

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