2. Évolution des politiques et du soutien agricoles

Ces dernières années, les politiques agricoles ont été façonnées par de multiples crises. Tout d'abord, les décideurs publics ont dû faire face à la pandémie de coronavirus SARS-CoV-2 (ci-après désignée « pandémie de COVID-19 »), qui a dans un premier temps perturbé la production puis désorganisé les chaînes d’approvisionnement. Alors que les effets de la pandémie s’estompaient, l’invasion illégale et injustifiée de l’Ukraine par la Russie1 en février 2022 a bouleversé les marchés de certains intrants et produits agricoles.

Outre ces conséquences graves de la guerre et de la pandémie, le changement climatique s’est manifesté dans un grand nombre de pays couverts par ce rapport par une fréquence accrue des catastrophes naturelles comme les inondations, les sécheresses et les tempêtes. La peste porcine africaine et la grippe aviaire, deux menaces récurrentes dans le domaine de la biosécurité, ont également eu d’importantes répercussions sur les marchés mondiaux en 2022.

Dans cette conjoncture, la stabilité et la résilience du secteur, la prévisibilité des échanges, la sécurité alimentaire et la stabilité des marchés sont devenues des questions prioritaires pour les pouvoirs publics. Elles sont venues s’ajouter (et faire concurrence) aux priorités existantes, à savoir l’amélioration de la durabilité des systèmes alimentaires et l’atténuation de leurs effets sur le changement climatique. Comme le montrera ce chapitre, les décideurs publics ont adopté des mesures pour tenter d’aider le secteur à absorber ces chocs sur le court terme et à s’en relever, et pris des dispositions pour faire face aux répercussions des chocs futurs. Des mesures comme l’interdiction temporaire des exportations ou la baisse (ou l’augmentation) des droits de douane ont été instaurées pour garantir l’approvisionnement alimentaire intérieur et gérer les perturbations sur les marchés. Dans l’ensemble, ces mesures et d’autres prises par les décideurs publics ont fait augmenter le soutien total aux producteurs.

La politique agricole mise en place en 2022 s’inscrit en outre dans le contexte d'une économie mondiale subissant les effets des bouleversements de la chaîne de valeur et du niveau élevé des prix de l’énergie. La croissance du PIB, à la fois au niveau mondial et dans la zone OCDE, s’est ralentie de presque la moitié en 2022, de même que le commerce mondial en termes réels. Cela reste supérieur aux taux observés avant la pandémie, mais inférieur aux chiffres qui étaient attendus après les baisses de 2020. De surcroît, l’inflation dans la zone OCDE s’est hissée en moyenne à plus de 9 %.

Ce chapitre présente tout d’abord le contexte général – économique et commercial – dans lequel les politiques agricoles ont évolué au cours de l’année 2022. Il donne ensuite, dans une deuxième section, une vue d’ensemble des mesures prises en réponse à la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine et à ses conséquences sur les marchés des intrants et produits agricoles. Ceci est complété par un tour d’horizon des autres événements survenus dans le domaine des politiques agricoles en 2022 et début 2023, tandis que la quatrième section présente et analyse l’évolution des mesures de soutien à l’agriculture. Le chapitre se termine par une évaluation globale de l’utilisation du soutien au regard des principaux objectifs stratégiques du secteur agricole.

La situation des marchés agricoles est fortement influencée par les facteurs macroéconomiques comme la croissance économique (mesurée à l’aide du produit intérieur brut, ou PIB), qui oriente la demande des produits agricoles et alimentaires, ainsi que par les prix du pétrole brut, du gaz naturel et d'autres sources d’énergie dont sont tributaires un grand nombre d'intrants agricoles (notamment le carburant, les produits chimiques et les engrais). Les prix de l’énergie ont également une incidence sur la demande de céréales, de plantes sucrières et d'oléagineux, qui interviennent dans la fabrication des biocarburants.

Le PIB mondial, qui avait commencé à se relever après une baisse de 3 % suite à la pandémie de COVID-19 et qui avait augmenté de presque 6 % en 2021, n’a progressé que d'un peu plus de 3 % seulement en 2022 (Tableau 2.1). Au sein de la zone OCDE, le ralentissement a été particulièrement marqué dans les économies à croissance rapide comme le Chili (2.5 %, contre 11.9 % en 2021), l’Estonie (-1.7 % contre +8 %) et la Türkiye (5.6 %, contre 11.4 %). Dans la zone euro, la croissance est restée relativement robuste, à 3.5 %, quoique en baisse par rapport aux 5.2 % de 2021. Bien qu'il ait dépassé les niveaux enregistrés avant la pandémie dans la plupart des pays, le PIB s’est maintenu en dessous des niveaux de 2019 en Espagne, au Japon, au Mexique et au Royaume-Uni.

Les marchés de l’emploi ont apporté une contribution positive au contexte économique général. Les taux de chômage, qui avaient battu des records en 2020, sont retombés en 2021 et 2022 pour atteindre une moyenne de 5 % dans les pays de l’OCDE, soit le plus bas niveau depuis plus de 40 ans. En revanche, le manque de travailleurs qualifiés a parfois sapé la croissance économique.

S’agissant des prix, leur hausse a été forte au cours de la même période et l’inflation s’est élevée en moyenne à 9.3 % en 2022, un niveau sans précédent depuis plus de 30 ans. Cette poussée inflationniste a été alimentée dans une large mesure par les prix de l’énergie et de l’alimentation (voir plus avant).

Les économies émergentes ont également été touchées. La croissance dans les pays faisant l'objet du présent rapport a fortement baissé par rapport à son rebond de 2021 mais est restée, dans la plupart des cas, conforme ou supérieure aux taux moyens enregistrés avant la pandémie. L’exception notoire et évidente est l’Ukraine, où la guerre a entraîné une chute de près de 30 % de la production économique.

Le commerce mondial s’est accru de 5 % en glissement annuel, soit moins que les 10 % de 2021 mais légèrement plus que les niveaux moyens ayant précédé la pandémie.

L’inflation a été tirée notamment par les prix de l’énergie et de l’alimentation. Ceux de l’énergie, qui avaient déjà doublé en 2021 par rapport à leurs niveaux relativement bas en 2020, se sont encore accrus de 64 % en glissement annuel en 2022 et n'ont amorcé une baisse qu’au dernier trimestre de cette même année (graphique 2.1). Les sanctions prises à l’encontre de la Russie suite au déclenchement de la guerre contre l’Ukraine, la décision russe de suspendre les livraisons de gaz aux États membres de l’UE, et la poursuite d'une croissance économique relativement robuste ont contribué à une baisse de l’offre et à une hausse de la demande en ressources d'énergie primaire. Le prix moyen du gaz naturel a de nouveau doublé en 2022, après avoir grimpé de 253 % en 2021. Celui du pétrole brut a également augmenté de presque 50 % en glissement annuel. Le prix de ces deux ressources énergétiques a reflué début 2023, approchant les niveaux antérieurs à la pandémie.

Le prix des engrais, qui avait quasiment doublé en 2021, est reparti à la hausse après l’invasion de l’Ukraine par la Russie – avec une moyenne de +74 % entre 2021 et 2022 –, n’atteignant un niveau record qu’en novembre 2022, avant de reculer lentement. La flambée du prix des engrais était due non seulement à l’augmentation du prix de l’énergie, mais aussi au niveau élevé des exportations de la Russie, du Bélarus et de l’Ukraine avant la guerre. La potasse a vu son prix exploser de 166 % en glissement annuel, plus d’un tiers de ses exportations mondiales étant assurées en 2018-20 par la Russie et le Bélarus.

Le prix de l’alimentation était en hausse dès avant la guerre, sous l’effet de l’augmentation de la demande due à la reprise des activités économiques après la pandémie de COVID-19, aux mauvaises récoltes dans certains grands pays producteurs, et au prix élevé des intrants. Les produits alimentaires ont enregistré un renchérissement moyen de 14 % en 2022, après que le recul des exportations de l’Ukraine et de la Russie ait entraîné une diminution de l’offre et un accroissement des incertitudes sur les marchés, déjà frappés par la hausse des prix de l’énergie et des engrais. Cette hausse, bien qu'importante, demeure plus faible que celle observée en 2021 et beaucoup moins forte que celle des prix de l’énergie ou des engrais, même si son ampleur varie selon les produits (FAO, 2022[1]).

L’augmentation de la production de viande a connu un ralentissement, passant de plus de 4 % en 2021 à 1 % en 2022. La production accrue de viande porcine en République populaire de Chine (ci-après la « Chine ») a tiré la dynamique par le haut, le secteur continuant à se relever de l’épidémie de peste porcine africaine. Les niveaux de production en Amérique du Nord et du Sud sont restés relativement stables, alors qu'ils ont régressé en Europe et en Océanie. La hausse du coût des intrants, les multiples épizooties et les mauvaises conditions météorologiques ont provoqué la baisse des marges des producteurs ainsi qu'un bouleversement de la production de viande dans diverses régions du monde. Dans ce contexte, combiné à une augmentation de la demande d'importations, le prix de la viande s’est accru en moyenne de plus de 10 % en 2022 ; un reflux a toutefois été amorcé au second semestre sous l’effet du ralentissement de la demande d'importations, et en décembre les prix n’étaient que légèrement supérieurs à leur niveau un an plus tôt.

La production mondiale de lait a progressé de seulement 0.6 % en 2022. Elle s’est accrue sensiblement en Inde, au Pakistan et en Chine, mais a diminué en Ukraine – à cause de la guerre en cours – ainsi que dans plusieurs autres pays en raison des événements météorologiques extrêmes, de la pénurie de main-d’œuvre et du coût plus élevé des intrants. Les prix des produits laitiers sur les marchés mondiaux ont poursuivi leur progression jusqu’en juin 2022, avant de refluer du fait de la baisse de la demande d'importations. Ils étaient en moyenne presque 20 % plus élevés en 2022 qu’en 2021.

Les hausses de la demande en huiles végétales, et en tourteaux oléagineux pour l’alimentation animale, notamment en Chine, ont été satisfaites grâce à une progression de 7 % de la production de graines oléagineuses en 2022/23 par rapport à la saison précédente.2 La production mondiale de soja a atteint des records (principalement du fait de la forte hausse au Brésil), tandis que celle de colza s’est accrue sous l’effet de plusieurs facteurs, dont une bonne récolte au Canada (après une très mauvaise campagne l’année précédente) et une hausse de la production en Australie et dans l’Union européenne. À l'opposé, la production mondiale de graines de tournesol a reculé, principalement à cause de l’interruption de la production en Ukraine. Les prix des oléagineux sur les marchés mondiaux, déjà élevés en 2021, se sont fortement accrus début 2022 pour atteindre des niveaux record en mars, avant de chuter de plus de 40 % vers la fin de l’année. Ils ont progressé en moyenne de 13 % entre 2021 et 2022, les ratios stocks/consommation restant faibles par rapport aux niveaux passés. Les prix des huiles végétales et des tourteaux se sont légèrement plus appréciés, respectivement de 14 % et 15 %.

La production mondiale de céréales a fléchi de presque 2 % en 2022/23, la baisse en céréales secondaires et de riz contrebalançant largement la légère progression pour le blé. La diminution des quantités de céréales secondaires est due principalement à la baisse des récoltes de maïs dans l’Union européenne, en Ukraine et aux États-Unis, ainsi qu'au recul de la production de sorgho dans ce même pays. Ces baisses ont plus que dépassé la hausse de la production mondiale d’orge. En ce qui concerne le riz, la production dans l’Union européenne et aux États-Unis a également baissé, mais le reflux au niveau mondial s’explique surtout par les conditions météorologiques en Asie du Sud, alors que la production a progressé dans d'autres parties de l’Asie et en Afrique. La chute de la production de blé de 40 % en Ukraine et sa baisse dans plusieurs autres pays ont été plus que compensées, entre autres, par sa forte augmentation au Canada par rapport à l’année précédente et par une deuxième récolte record consécutive en Australie. De manière générale, les prix des céréales ont grimpé de 18 % en glissement annuel, ceux de l’orge, du maïs et du blé enregistrant une hausse particulièrement forte, tandis que le prix du riz est resté en moyenne inchangé. Les prix se sont quelque peu tassés suite à l'instauration de l’Initiative céréalière de la mer Noire3, qui a permis d’exporter de grandes quantités de céréales à partir de trois grands ports ukrainiens.

La production de sucre s’est accrue suite à son important redémarrage au Brésil – qui est le plus gros producteur et exportateur mondial de ce produit – et à sa hausse notamment en Australie, en Chine et en Thaïlande, alors que des baisses ont été enregistrées dans l’Union européenne, en Inde et au Pakistan. Globalement, la production mondiale de sucre a progressé de plus de 4 % en 2022/23, surpassant légèrement la demande tirée entre autres par la croissance démographique et l’urbanisation en Afrique, ainsi que par l’industrie de la transformation en Asie, mais limitée par la faiblesse de la croissance économique. Les prix mondiaux du sucre ont connu une envolée en avril, puis ont diminué avant de reprendre de la vigueur depuis octobre 2022. La hausse entre 2021 et 2022 était en moyenne de 5 %, soit beaucoup moins forte que pour d'autres produits alimentaires en raison de l’offre excédentaire mondiale.

De manière générale, les recettes agricoles moyennes (dont les transferts budgétaires aux producteurs agricoles), qui ne cessent d'augmenter depuis 2016, ont progressé d’environ 5 %4 par rapport à 2021 dans les 54 pays faisant l'objet de l’étude, principalement en raison de la hausse des prix des produits à l’échelle mondiale. Cette progression est légèrement supérieure à la croissance moyenne enregistrée pendant les dix ans qui ont précédé la pandémie de COVID-19, mais inférieure à celle observée pendant les deux ans qu’a duré la pandémie. Elle montre que dans l’ensemble, les recettes agricoles ont affiché une relative résilience, non seulement dans le contexte de la pandémie de COVID-19 mais aussi au regard des répercussions de la guerre en Ukraine. Cela dit, les producteurs agricoles ont dû faire face à de fortes augmentations des prix des principaux intrants (comme les engrais et les carburants), ce qui signifie que les marges de production et les revenus ont sans doute moins progressé que les recettes.

Tandis que les chaînes d’approvisionnement commençaient à se remettre des effets de la pandémie de COVID-19, les pressions inflationnistes et le déclenchement de la guerre ont eu en 2022 de profondes répercussions sur les systèmes agroalimentaires du monde entier. Les prix des céréales et des oléagineux sur les marchés mondiaux se sont mis à augmenter à mesure que les tensions s’intensifiaient, puis ont monté en flèche après le déclenchement de la guerre (OCDE/FAO, 2023[2]). Ces augmentations ont été particulièrement fortes pour des produits comme le blé, l’orge, le maïs et l'huile de tournesol, pour lesquels l’Ukraine est l’un des plus gros exportateurs mondiaux (l’importance de ce pays sur les marchés agricoles mondiaux est décrite en détail dans l’encadré 2.1). Le coût des intrants tels que les engrais et l’énergie s’est lui aussi accru du fait de la baisse de l’offre mondiale. Les exportations de gaz naturel russe ont diminué après le déclenchement de la guerre et la crainte de manquer d’engrais a poussé certains pays producteurs à limiter leurs exportations pour garantir leur propre approvisionnement.

La plupart des pays examinés dans ce rapport ont pris des mesures en 2022 en réaction à ces défis mondiaux. Cela incluait notamment un soutien direct aux producteurs, consommateurs et entreprises de transformation, des dispositions concernant l'offre et le prix des engrais, ainsi que des mesures visant à faciliter les importations et restreindre les exportations de produits essentiels. Des actions ont également été engagées par les pays pour améliorer les perspectives du secteur agricole ukrainien.

La hausse des coûts des intrants était un sujet d'inquiétude pour les exploitants agricoles du monde entier, et les décideurs publics ont réagi en instaurant différents types d'aides. Dans certains pays, le soutien visait un intrant en particulier ; c’est le cas des Philippines, qui ont remis à leurs producteurs des bons de réduction sur le carburant. Dans d'autres, le soutien ciblait certains secteurs. La Chine a par exemple versé à trois reprises des subventions directes aux producteurs de céréales entre mars et août 2022. Certaines de ses provinces ont en outre accordé des paiements supplémentaires à l’hectare et/ou à la production pour encourager à produire plus de soja et à intercaler cette culture avec celle de maïs. De son côté, le Japon a versé des aides aux éleveurs pour compenser l'augmentation du coût de l’alimentation animale.

Face à la hausse des coûts des intrants, certains pays ont adopté des formes de soutien à caractère plus général. Ainsi, le Canada a relevé le plafond des prêts sans intérêt consentis dans le cadre de son programme de paiement anticipé pour 2022 et 2023, en en faisant bénéficier les exploitants agricoles participants. La Colombie a accordé aux petits exploitants un remboursement de 20 % du montant de leurs achats d'intrants agricoles. L’Islande a accru les paiements existants et en a introduit de nouveaux pour compenser l’augmentation des coûts de production. La Norvège a elle aussi augmenté substantiellement le montant de son plan de soutien annuel aux exploitants agricoles, avec notamment des aides exceptionnelles ponctuelles qui sont versées pour faire face à l'augmentation des coûts des intrants. La Corée a accordé aux producteurs des allègements d'impôts et des aides directes compensant la hausse des prix des engrais et des aliments pour animaux. Au Royaume-Uni, les autorités d’Irlande du Nord ont accéléré le versement d’aides directes de manière à fournir aux producteurs de la trésorerie.

L’Union européenne a adopté un cadre permettant à chacun de ses États membres de mettre en œuvre : un soutien direct aux exploitants et régions agricoles ; des mesures commerciales exceptionnelles ; des actions visant à accroître la résilience globale du secteur ; des aménagements temporaires concernant l'utilisation des aides de la PAC. De leur côté, les membres de l’UE ont instauré leur propre ensemble de mesures de soutien telles que des avantages fiscaux, des aides à l’investissement et des allocations aux consommateurs et aux ménages agricoles pour aider les exploitants et les entreprises agroalimentaires à faire face aux impacts financiers.

L'approvisionnement en engrais a été un sujet de préoccupation particulier pour de nombreux pays, qui ont été amenés à prendre des mesures pour tenter de réduire soit les coûts assumés par les producteurs pour l’achat d’engrais, soit leur dépendance à ces produits. À titre d’exemple, dans le cadre de son programme Siembra por Chile (Semer pour le Chili), le Chili a à la fois fourni des engrais et versé des paiements à l’hectare pour compenser l’augmentation des coûts des intrants variables. L’Inde a accru deux fois en 2022 ses subventions pour l'achat d’engrais, tandis que le Mexique a multiplié la sienne par 16 entre 2022 et 2023. Les Philippines ont mis en place des bons de réduction pour l’achat d’engrais dans le cadre de la deuxième partie de leur programme Plant, Plant, Plant. En 2021, la Suisse a mis à disposition 20 % de ses réserves stratégiques d’engrais – soit presque un tiers de ses besoins annuels pour sa production végétale – pour faire face aux premières difficultés d’approvisionnement observées à l’échelle internationale et a maintenu cette mesure tout au long de l’année 2022 pour atténuer les conséquences de la guerre d’agression menée par la Russie sur les marchés. Le Japon a versé des subventions pour aider les fabricants d’engrais à financer leurs coûts de transport et de stockage pour compenser les coûts associés au changement de fournisseur. Les États-Unis ont annoncé le lancement du nouveau programme d’extension sur la production d’engrais (Fertiliser Production Expansion Program) afin d’accroître la disponibilité des engrais sur le territoire national.

Au niveau international, un groupe de pays a lancé en 2022 le Global Fertiliser Challenge, ou « défi mondial des engrais ». Le but est à la fois d’accroître la sécurité alimentaire et de réduire les émissions de l’agriculture en améliorant l’efficience des engrais et leurs alternatives dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. L’espoir est que ce défi sera relevé grâce à l’innovation et au partage de connaissances sur les pratiques agricoles permettant une utilisation rationnelle des engrais. Les responsables des États-Unis et des pays européens ont annoncé lors de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de 2022 (COP27) que 135 millions USD avaient été levés pour financer cette initiative.

Plusieurs pays ont pris la décision de reporter la mise en œuvre des exigences de durabilité pour faire face aux problèmes de sécurité alimentaire liés à la guerre en Ukraine. L’Union européenne a ainsi pris des mesures de flexibilité exceptionnelles en autorisant la production agricole sur les terres en jachère, tout en maintenant les paiements de soutien au revenu à taux plein. Plusieurs de ses pays membres ont utilisé cet assouplissement, dont l’Allemagne (en partie), l’Autriche, la Belgique (Wallonie), la France, l’Italie, la Lettonie, le Luxembourg, la Pologne et la République tchèque. La Suisse a elle aussi reporté d'un an les mesures de mise en jachère des terres cultivées, destinées à promouvoir la biodiversité.

L'inflation et l’augmentation du coût de la vie ont été un problème dans de nombreux pays en 2022. Certains ont pris des mesures pour venir spécifiquement en aide aux consommateurs de produits agricoles. La Chine, par exemple, a commencé à mettre en circulation ses réserves stratégiques de viande porcine dans le but de stabiliser les prix. Aux Philippines, les pouvoirs publics ont imposé un plafonnement des prix des produits de base tels que le lait et la viande bovine, porcine et de volaille afin d’enrayer la flambée des prix de l'alimentation. Aux États-Unis, une aide alimentaire supplémentaire a été prévue dans la loi de finances (Consolidated Appropriations Act) pour les enfants des familles répondant aux conditions requises. De nombreux autres pays ont adopté des mesures en faveur de l’augmentation des revenus des consommateurs, qui ne concernaient pas spécifiquement l’agriculture. Parmi elles figuraient par exemple la réduction de divers impôts, l’augmentation du salaire minimum et des prestations sociales pour les plus défavorisés, le plafonnement des prix de l’énergie et des versements exceptionnels en espèces.

D’autres pays ont mis en place des dispositifs pour aider les entreprises de transformation qui utilisent des produits agricoles comme intrants. Ainsi, le Japon a versé des subventions pour couvrir les frais de développement, de fabrication et d'approvisionnement de telles entreprises. La Belgique a introduit en urgence une dérogation à la réglementation en matière d'étiquetage, en autorisant les entreprises agroalimentaires à changer plus facilement la composition de leurs produits tout en respectant les exigences en matière d'information.

Plusieurs pays ont cherché à faciliter les importations d'intrants et de produits alimentaires pour éviter les pénuries au niveau intérieur. Le Brésil a temporairement suspendu certains droits de douane applicables aux produits agricoles provenant de pays non membres du Mercosur, notamment le maïs, le soja ainsi que le tourteau et l’huile fabriqués à partir de cette culture. La Chine a signé, dans le cadre de sa stratégie de diversification de ses sources d'importation de produits de base, un protocole autorisant les importations de maïs en provenance du Brésil. La Colombie a supprimé les droits de douane sur tous les intrants agricoles et 163 produits de consommation de base. Le Mexique a lui aussi exempté de droits de douane les importations de 5 produits agricoles stratégiques et de 21 biens de consommation de base. La Suisse a instauré à partir du 15 mars 2022 une réduction des droits de douane appliqués aux importations d'aliments pour animaux. Certains États membres de l’UE ont profité de la souplesse autorisée par la législation européenne existante pour faciliter les importations d'aliments pour animaux ; l’Espagne a par exemple assoupli la mise en œuvre des limites maximales de résidus de pesticides pour le maïs. La Corée a supprimé les droits de douane sur les importations de blé et de farine sous contingent afin de faire baisser les prix, et élevé le contingent tarifaire appliqué à l’orge non décortiqué, au blé entier et aux légumes à racines dans le but de garantir son approvisionnement en aliments pour animaux.

Les pays ont en outre pris de mesures de facilitation des échanges dans le but d'apporter un soutien économique à l’Ukraine. L’Australie, le Canada, les États-Unis, l’Islande, le Royaume-Uni et l’Union européenne ont tous instauré des exonérations temporaires de droits de douane sur les produits agricoles importés d’Ukraine.

L’Inde a mis en place des interdictions, droits ou permis d’exportation sur le riz, le blé, le sucre et les produits connexes. La Chine a interdit – d’octobre 2021 à juin 2022 – aux entreprises d’État fabriquant du phosphate de l’exporter, et instauré une nouvelle obligation de détention d'un certificat d’inspection pour pouvoir exporter des engrais. Par ailleurs, un quota limitant les exportations totales de phosphate à 3.16 millions de tonnes a été décidé pour le second semestre 2022. Le Mexique a imposé un droit de douane de 50 % sur les exportations de maïs blanc destiné à l'alimentation humaine.

Outre les mesures adoptées sur le plan intérieur pour gérer les répercussions de la guerre, de nombreux pays ont pris des dispositions pour apporter leur soutien à l’Ukraine. Comme indiqué dans l’encadré 2.1, l’Ukraine était un important exportateur de céréales et d'oléagineux avant la guerre, mais les combats ont porté un sérieux coup de frein à ses exportations. Face à ces difficultés, l’Initiative céréalière de la mer Noire a été signée sous l’égide de la Türkiye et des Nations Unies dans le but de permettre à l’Ukraine de recommencer à exporter ses céréales en transitant par la mer Noire. Un Centre commun de coordination, composé de représentants de la Türkiye, de la Russie, de l’Ukraine et des Nations Unies a été mis en place à Istanbul pour superviser les expéditions de céréales depuis trois ports ukrainiens en mer Noire. De son côté, l’Union européenne a aidé à la création des « corridors de solidarité » pour garantir que l’Ukraine puisse exporter des céréales et importer des biens essentiels comme des aliments pour animaux, des engrais et de l’aide humanitaire. Entre mai et fin octobre 2022, ces corridors plus l'initiative susmentionnée ont permis l’exportation de quelque 25 millions de tonnes de céréales, d’oléagineux et de produits connexes en provenance d’Ukraine (CE, 2022[14]). Cependant, les coûts logistiques et les goulets d'étranglement ont entraîné la commercialisation dans les pays voisins d'une quantité de céréales ukrainiennes supérieure à la normale. En avril 2023, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie et la République slovaque ont donc pris des mesures pour interdire les importations de toute une série de produits agricoles ukrainiens. Suite à l’intervention de la Commission européenne, un accord a été rapidement trouvé : les interdictions d'importation subsistent, mais les céréales ukrainiennes sont autorisées à transiter par ces pays pour être exportées ailleurs. La Roumanie a adhéré à cet accord dans le courant du mois d'avril.

Les administrations publiques ont travaillé en collaboration avec des entreprises privées et des organisations internationales pour aider l’Ukraine à investir dans les semences et les infrastructures. En février 2023, les États-Unis (par l’intermédiaire de l’USAID, l’agence des États-Unis pour le développement international) et la compagnie de biotechnologie Bayer ont offert conjointement 13.5 tonnes de semences de légumes de grande qualité aux producteurs ukrainiens en prévision de la campagne de semis. L’USAID s’est également associée avec les entreprises agro-industrielles Grain Alliance, Kernel et Nibulon pour investir 44 millions USD dans l’extension des infrastructures et des capacités de stockage, afin de permettre à l’Ukraine d’exporter davantage de céréales. Le Japon a travaillé en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l’agriculture (FAO) pour fournir aux producteurs agricoles – notamment des petits exploitants – des semences de maïs et de tournesol pour la campagne printemps-été 2023. Les Pays-Bas ont inclus dans leur plan de soutien 2023 pour la défense et la relance une enveloppe de 40 millions EUR (42 millions USD) destinée à l’achat de semences et d'équipements.

Afin de relever les défis liés à la contamination à grande échelle des terres agricoles ukrainiennes par des mines et autres explosifs (Encadré 2.1), les Pays-Bas ont affecté 10 millions EUR (11 millions USD) aux tâches de déminage dans le cadre de leur plan de soutien 2023 à l’Ukraine. La Suisse a également inclus dans son Plan d'action de la lutte antimines 2023-2026 une enveloppe de 7.5 millions CHF (8 millions USD) qui servira à financer des opérations de déminage en Ukraine au cours des prochaines années.

Les ministères de l’agriculture des États-Unis et de l’Ukraine ont conclu un protocole d’accord en vue de coopérer dans les domaines de l’échange de données sur la productivité, du partage d’expertises et de la fourniture de conseils sur les nouvelles technologies, des échanges bilatéraux et du renforcement des capacités à l’issue de la guerre. À ce jour, une aide technique et d'autres initiatives ont été mises en place dans les domaines suivants : santé animale, biosécurité, renforcement des capacités sanitaires et phytosanitaires, politique agricole et commerciale, lutte contre les incendies, gestion de l’eau et prévention de la déforestation illégale.

L’Union européenne a activé la Directive relative à la protection temporaire, afin que l’accès au marché du travail, au logement, à l’éducation et à l’assistance médicale soit accordé dans n'importe quel pays de l’UE aux plus de 4 millions de personnes ayant fui la guerre. La Pologne a prolongé la durée de séjour autorisée pour les ressortissants ukrainiens participant aux récoltes. La République tchèque a favorisé l'intégration de scientifiques et d'étudiants ukrainiens dans ses équipes de chercheurs, notamment en allouant 6 millions CZK (269 224 USD) pour financer une partie des salaires des Ukrainiens participant à des projets sur l’agriculture, la foresterie, les pêches et l’aquaculture.

De son côté, l’OCDE a lancé un programme-pays pour l’Ukraine afin de soutenir le plan de réforme, de relance et de reconstruction du pays, notamment dans le domaine de l’agriculture (Encadré 2.2).

Si les politiques mises en œuvre dans les domaines agricole et alimentaire ont été fortement influencées par la guerre en Ukraine, toutes les mesures adoptées en 2022 n’étaient pas liées à ce conflit. Cette section donne un aperçu de quelques autres grandes tendances en ce qui concerne l'action publique ayant trait au secteur agricole. Une présentation plus détaillée de chacune des mesures prises est disponible dans les différents chapitres par pays.

Un certain nombre de pays ont actualisé au cours de l’année leurs cadres stratégiques relatifs à l’agriculture. La politique agricole commune (PAC) de l’UE pour 2023-27 est entrée en vigueur en janvier 2023. Cette nouvelle PAC s'articule autour de dix objectifs bien précis : assurer un revenu équitable aux agriculteurs ; renforcer la compétitivité ; améliorer la position des agriculteurs dans la chaîne alimentaire ; agir contre le changement climatique ; protéger l’environnement ; préserver les paysages et la biodiversité ; soutenir le renouvellement des générations ; dynamiser les zones rurales ; garantir la qualité des denrées alimentaires et la santé ; enfin, encourager les connaissances et l’innovation. Dans le cadre de cette nouvelle PAC, les États membres jouent un rôle clé en concevant et mettant en œuvre un plan stratégique national qui vise à atteindre les objectifs fixés au niveau de l’UE. Le Canada a adopté son nouveau cadre stratégique 2023-28 pour l’agriculture, baptisé Partenariat canadien pour une agriculture durable. Ce cadre compte cinq priorités : contrer les changements climatiques et protéger l’environnement ; développer les marchés et le commerce ; renforcer la capacité, la croissance et la compétitivité du secteur ; améliorer la confiance du public et la résilience ; enfin, faire avancer la science, la recherche et l’innovation.

En Colombie, la nouvelle administration a adopté le plan de développement baptisé Hacia Una Agricultura Para La Vida (Vers une agriculture en faveur de la vie) pour 2022-26. Ce plan privilégie cinq grands axes pour mener une réforme agraire approfondie : gestion des inégalités dont sont victimes les populations autochtones, les minorités noires, les femmes et les jeunes dans le secteur agricole ; protection de l’environnement et durabilité ; inclusion dans les chaînes de valeur de l’agriculture ; adoption d'une approche territoriale. Au Royaume-Uni, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord ont adopté de nouveaux documents-cadres stratégiques. Le projet de loi sur l’agriculture proposé par le Parlement gallois définit le cadre général du soutien futur à l’agriculture, en mettant particulièrement l’accent sur la gestion durable des terres. En Irlande du Nord, le ministère a publié un rapport sur les décisions stratégiques relatives à l’avenir de l’agriculture (Future Agricultural Policy Decisions), ainsi que 54 décisions concernant l’avenir du soutien au secteur. Les Philippines ont publié un plan national de modernisation de l’agriculture et des pêches qui fournit des orientations pour le secteur agricole sur les dix ans à venir.

En Argentine, le plan GanAr a pour but de contribuer au développement durable de l’élevage dans le pays. L’Australie a établi une stratégie nationale de traçabilité de l’agriculture (National Agricultural Traceability Strategy) pour 2023-28 et son plan de mise en œuvre sur cinq ans. Le but est de développer des systèmes de traçabilité de qualité supérieure qui soient connectés, coordonnés, interopérables et utilisés le long des chaînes d'approvisionnement pour accélérer les exportations australiennes de produits haut de gamme, ainsi que pour améliorer la biosécurité et la sécurité alimentaire. Les États-Unis ont quant à eux adopté une nouvelle règle (Requirements for Additional Traceability Records for Certain Foods), en vertu de laquelle les acteurs intervenant sur les chaînes d'approvisionnement de certains produits sont tenus d’assurer leur traçabilité, de manière à ce que des produits potentiellement contaminés puissent être rapidement repérés et retirés du marché.

Le Costa Rica a réduit son soutien des prix du marché et libéralisé les échanges de riz paddy et de riz usiné en 2022, dans le cadre de sa stratégie « La route du riz ». En 2023, l’État a annoncé le déploiement d’une nouvelle politique publique concernant l’agriculture pour 2023-32, dans le but de mettre davantage en avant les produits costaricains sur les marchés internationaux, de créer des emplois décents et d'améliorer les conditions de vie. Israël a également entrepris d'importantes réformes dans le domaine de la production d’œufs, de produits laitiers et de viande bovine, et réduit les droits de douane sur certains produits. Les quotas de production sur les œufs et les prix indicatifs appliqués aux produits laitiers seront progressivement abandonnés ; les droits de douane sur la viande bovine réfrigérée ont été supprimés et remplacés par des paiements compensatoires directs et des investissements dans le marketing. Les droits de douane ont également été supprimés sur une sélection de fruits et légumes et sur les intrants agricoles.

Les pays ont annoncé de nouvelles mesures concernant le changement climatique. Le chapitre 1 de cette publication examine en détail les nombreux dispositifs d'adaptation mis en œuvre par les pays. Certains sont allés plus loin en essayant d’atténuer la contribution de leurs secteurs agricoles au changement climatique. En Australie, des fonds supplémentaires ont été investis dans la recherche de solutions technologiques pour réduire les émissions de l’agriculture, et des initiatives de transfert de connaissances ont été mises sur pied pour encourager les exploitants à participer aux marchés du carbone et à utiliser des technologies à faible émission dans leurs activités. Le Canada a présenté en mars 2022 son Plan de réduction des émissions pour 2030, qui décrit les efforts entrepris dans tous les secteurs pour atteindre en 2030 les objectifs fixés en matière d'émissions, et pose les bases nécessaires à l’accomplissement de la neutralité carbone d’ici 2050. La Nouvelle-Zélande a rendu public son premier plan de réduction des émissions en mai 2022. Ce plan comprend plusieurs actions clés comme la mise en place d’ici 2025 d'un mécanisme de tarification des émissions liées à l’agriculture. Les États-Unis ont lancé en 2022 l’initiative Partnerships for Climate-Smart Commodities, dont le budget de 3.1 milliards USD permet de financer 141 projets pilotes visant à développer les marchés des produits climato-compatibles.

Plusieurs pays se sont en outre engagés à revoir à la hausse leurs objectifs en matière d'atténuation du changement climatique. L’Australie, l’Inde, la Norvège et le Viet Nam ont ainsi modifié leurs objectifs de réduction des émissions ; l’Australie, l’Autriche, la République slovaque, la République tchèque et le Royaume-Uni ont rejoint en 2022 l’Engagement mondial sur le méthane. Parmi les 54 pays examinés dans le présent rapport, 19 ont fixé des objectifs d’atténuation s'appliquant spécifiquement au secteur agricole. Le Tableau 2.2 ci-après récapitule les objectifs de réduction des émissions fixés par l’ensemble de ces 54 pays.

Plusieurs pays ayant subi des catastrophes naturelles ont déployé un soutien direct aux acteurs du secteur agricole qui ont été touchés. L’Argentine a pris en 2022 et 2023 des mesures exceptionnelles pour compenser les effets des sécheresses, incendies et gelées survenus sur son territoire. Au Canada, les gouvernements provinciaux ont mis en œuvre en octobre 2022 des programmes destinés à fournir une aide supplémentaire aux exploitants agricoles ayant été durement frappés par l’ouragan Fiona. La Chine a débloqué des fonds de secours pour venir en aide à 13 provinces touchées par des inondations et des sécheresses. Plusieurs États membres de l’UE tels que la Croatie, la France, la Pologne, la République slovaque, la République tchèque et la Roumanie ont versé des aides suite aux divers événements météorologiques survenus en 2022 tels que sécheresses, inondations, gelées, grêle, pluies torrentielles, ouragans, glissements de terrain et avalanches. La Nouvelle-Zélande a été le théâtre d'un nombre record de phénomènes climatiques graves (dont des inondations, des sécheresses et des cyclones) et a réagi en fournissant un soutien psychosocial et en finançant les opérations de gestion des dommages et la relance. Les États-Unis ont lancé en 2022 deux programmes d’urgence visant à compenser les pertes subies les années précédentes, l'un s'adressant aux exploitants agricoles en général (« Emergency Relief Program ») et l’autre aux éleveurs (« Emergency Livestock Relief Program »).

L’Australie a expérimenté plusieurs nouvelles mesures s’inspirant des approches basées sur le marché pour inciter les propriétaires fonciers à améliorer la biodiversité, conformément à son plan de protection de la biodiversité dans l’agriculture (Agriculture Biodiversity Stewardship Package). Cela inclut un projet pilote sur les émissions carbone et la biodiversité (Carbon + Biodiversity Pilot), ainsi qu'un autre sur la protection de la végétation subsistante (Enhancing Remnant Vegetation Pilot). Une plateforme nationale (National Stewardship Trading Platform) a également été créée pour permettre aux propriétaires fonciers de planifier et d'évaluer des projets relatifs aux émissions de carbone et à la biodiversité, et différentes possibilités sont examinées pour mettre en œuvre le dispositif de certification de gestion de la biodiversité (Australian Farm Biodiversity Certification Scheme) dans les entreprises agricoles. Au 30 avril 2023, l’Union européenne avait mené à bien 47 actions sur la centaine inscrite dans la stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité, qui vise à stopper et inverser la perte de biodiversité avant 2030. Plusieurs États membres de l’UE ont également adopté de nouvelles dispositions réglementaires pour réduire les impacts sur l’environnement des intrants agricoles, dont l’Autriche, la Croatie, l’Espagne, la France, la Pologne, la République tchèque et la Roumanie. La PAC 2023-27 de l’UE instaure une nouvelle « architecture verte » avec des ambitions environnementales accrues, dont des exigences de base plus strictes en ce qui concerne la conditionnalité. Le budget des paiements directs est affecté pour 25 % aux éco-régimes, un nouveau dispositif visant à inciter à l’adoption de pratiques agricoles produisant davantage d’effets bénéfiques sur l’environnement. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’un engagement pris de longue date, en vertu duquel la PAC doit aider les agriculteurs à procéder aux transitions écologiques nécessaires.

Le Japon a ajouté neuf indicateurs de performance clés dans son plan MIDORI 2030, comme la neutralité des émissions de CO2 imputables à l’utilisation de combustibles fossiles dans les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture et de la pêche, la réduction de l’utilisation pondérée de pesticides et d’engrais chimiques en fonction des risques et la montée en puissance de l’agriculture biologique. Au Royaume-Uni, l’Angleterre a lancé un programme visant l’instauration de pratiques durables pour les terres cultivables et horticoles, ainsi que l’amélioration des pâturages et des landes. De nombreux projets de préservation ont été mis en place pour restaurer plus de 40 000 hectares de terres en vue de protéger les habitats des espèces sauvages, conformément au dispositif de restauration des paysages (Landscape Recovery). Les États-Unis ont accru d’environ 20 milliards USD sur dix ans leur financement de divers programmes de conservation, dans le cadre de la loi sur la réduction de l'inflation (Inflation Reduction Act). De nouvelles initiatives ont également été lancées en 2022 pour aider les entreprises dans leur transition vers l’agriculture biologique. En 2022, le Viet Nam a approuvé le Plan d'action national pour une croissance verte 2021-2030, qui prévoit la mise en place d'un secteur agricole durable, produisant peu d’émissions et capable de s’adapter face au changement climatique.

Afin d’améliorer l’équité et l’inclusion, les États-Unis ont engagé plusieurs actions en faveur des exploitants agricoles issus des minorités. Il s'agit notamment de nouveaux investissements dans les Equity in Conservation Outreach Cooperative Agreements (ou accords de coopération pour la sensibilisation à l’équité au regard des programmes de conservation), du financement de divers programmes d’assistance et d'information, et de la diffusion du plan d’action sur l’équité du ministère de l’Agriculture. Le Canada a prolongé le programme Agri-diversité, qui vise à réduire les obstacles à la participation des peuples autochtones et à accroître le développement économique au travers d'activités de renforcement des capacités. Les États membres de l’UE ont, pour la plupart, proposé un soutien accru à l’investissement pour les jeunes exploitants, et la grande majorité d’entre eux prévoient dans leurs plans stratégiques un soutien au revenu supplémentaire et une aide à l’installation pour les intéressés. Certains États, comme l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, l’Irlande et l’Italie ont inclus dans leurs plans stratégiques pour la PAC 2023-27 des mesures spécialement axées sur le soutien aux femmes en milieu rural. L’Espagne a notamment introduit des paiements directs pour les jeunes agricultrices propriétaires ou copropriétaires de leur exploitation.

Les pays ont lancé un certain nombre d’initiatives nouvelles pour favoriser la création de connaissances dans l’agriculture. Au sein de l’UE, la Commission européenne a présenté quatre nouveaux projets de partenariats s’inscrivant dans son programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon Europe ». Leur but est de réunir la Commission européenne et un ensemble de partenaires composé d’organismes de financement de la recherche et d’autorités publiques, afin de relever certains des défis les plus pressants auxquels se heurte l’Union européenne dans le domaine de l’agriculture, en stimulant l’investissement public et privé dans les activités de recherche.

La Corée a annoncé de nouvelles mesures en faveur de l’innovation afin de développer une agriculture intelligente, l’objectif étant de transformer 30 % des élevages et des exploitations horticoles en structures intelligentes. Les Philippines ont approuvé le plan Coconut Farmer and Industry Development Plan, qui vise à moderniser le secteur de la noix de coco ainsi qu’à accroître les revenus et la compétitivité des producteurs. L’Inde a mis en place une nouvelle aide pour encourager l’utilisation de drones dans le domaine agricole en vue de moderniser l’enregistrement de données concernant les terres et de vérifier l’état des cultures ainsi que l’application de pesticides et d’engrais.

D'autres pays se sont employés à moderniser la mise en œuvre des programmes. La Türkiye a augmenté ses efforts pour la transformation numérique, notamment en déployant l’application mobile Tarim Cebimde et le nouveau système Farmer Registration System, qui facilite à la fois l’enregistrement des demandes et la réception d'informations sur les produits. L’application Tarim Cebimde permet également aux éleveurs de suivre l'évolution de leur cheptel. Le Kazakhstan a mis en place un système public unifié d’information sur les subventions qui simplifie la demande de subventions et évite aux exploitants agricoles d’avoir à payer un abonnement pour le faire.

Un certain nombre de maladies – nouvelles ou existantes – ont obligé les pays à durcir les réglementations sur la biosécurité. L’Australie a adopté un projet d'amendement sur la biosécurité – Biosecurity Amendment (Strengthening Biosecurity) Act 2022 – afin d'améliorer la capacité à gérer les nouveaux risques en matière de biosécurité et à y faire face. Le Canada a débloqué des fonds supplémentaires pour améliorer la protection du pays contre la peste porcine africaine et se préparer à une éventuelle poussée épidémique. L'épidémie de grippe aviaire a conduit plusieurs États membres de l’UE à adopter des mesures comme l’interdiction d'élever les volailles en extérieur (République tchèque), l’instauration de programmes de vaccination (France) et le versement d’indemnités aux éleveurs concernés (France, Pologne). En 2022, l’Indonésie a signalé une épidémie de fièvre aphteuse – pour la première fois en plus de 30 ans – et a pris des mesures de contrôle (décontamination, vaccination à grande échelle et surveillance renforcée des zones ayant des cas avérés).

Des mesures ont également été prises pour améliorer le bien-être animal. La Nouvelle-Zélande a adopté en 2022 une loi interdisant l’exportation de bétail par voie maritime à compter d’avril 2023, quoique en prévoyant une période d’ajustement pour les entreprises concernées. Une interdiction de l’élevage en batterie des poules pondeuses est également entrée en vigueur dans le pays au 1er janvier 2023, cela dit après une période d'ajustement puisque cette disposition avait été votée en 2012. Au Royaume-Uni, la loi Animals (Penalty Notices) Act 2022 accorde aux ministres le pouvoir d'infliger des sanctions pécuniaires pour un large éventail d'atteintes à la santé et au bien-être des animaux en Angleterre et au Pays de Galles. Dans l’Union européenne, l’Autriche et la France ont mis fin à l’abattage des mâles dans les élevages de poules pondeuses à compter du 1er janvier 2023, soit un an après l’Allemagne, pionnière en la matière. L’Autriche, l’Allemagne et l’Espagne ont instauré de nouvelles règles pour le transport du bétail.

De manière générale, les pays ont réduit une partie des aides qui ont été versées ces dernières années pendant la pandémie de COVID-19. En juin 2022, l’Australie a mis fin au soutien d’urgence affecté au fret qui avait été instauré suite à l’arrêt des transports internationaux de marchandises par voie aérienne pendant la pandémie. Au sein de l’UE, les règles permettant aux États membres de mettre en place des aides pour les secteurs touchés par le COVID-19 ont été invalidées le 30 juin 2022.

En Nouvelle-Zélande, le plafond annuel du nombre d’étrangers pouvant être recrutés pour résoudre les pénuries de travailleurs saisonniers pendant la pandémie – qui s'inscrit dans le dispositif Recognised Seasonal Employee Scheme – a été élevé de 16 000 à 19 000. La Chine a instauré en septembre 2022 de nouvelles exigences de désinfection pour les biens importés non réfrigérés. Ces exigences ainsi que les obligations de dépistage par un test PCR ont ensuite été supprimées en décembre 2022.

En 2022 et début 2023, des avancées ont eu lieu sur plusieurs accords multilatéraux. Le Partenariat économique régional global (RCEP) est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Il a été signé par 15 pays de la région Asie-Pacifique, dont l’Australie, la Chine, la Corée, l’Indonésie, le Japon, la Nouvelle-Zélande, les Philippines et le Viet Nam. Cet accord prévoit une baisse moyenne des droits de douane de 12.8 points de pourcentage sur 8.4 % des produits. Avec l’application du RCEP, près de 83 % des lignes tarifaires agricoles font l’objet d'une baisse des droits de douane, certaines étant déjà égales à zéro (CNUCED, 2021[15]). L’accord fournit également un cadre permettant de simplifier les règles d’origine et les démarches aux frontières applicables aux biens périssables, ainsi que de renforcer la coopération en ce qui concerne les normes, les réglementations techniques et les procédures d'évaluation de la conformité.

En 2022 et 2023, le Chili, la Malaisie et Brunei sont devenus les trois derniers signataires à ratifier l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), qui élimine 98 % des droits de douane au sein de la zone de libre-échange ainsi créée, et contient un certain nombre de dispositions sur l'agriculture. Ces dispositions sont notamment : la réduction des droits de douane sur la viande bovine japonaise ; l’ouverture d'un nouvel accès aux marchés du Japon, du Canada et du Mexique pour les produits laitiers ; la suppression de l’ensemble des droits de douane sur la viande ovine, le coton, la laine et les produits manufacturés ; l’élimination partielle des droits de douane sur les fruits de mer, les produits horticoles et le vin. Les négociations d’adhésion du Royaume-Uni au PTPGP se sont achevées en 2023, sous réserve de son approbation par les 11 signataires de l’accord. L’Afrique du Sud a ratifié quant à elle l’Accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine.

Plusieurs accords de libre-échange (ALE) bilatéraux ont été finalisés ou sont entrés en vigueur en 2022, contribuant à faciliter les échanges de produits agricoles, comme par exemple : l’ALE Australie-Royaume-Uni, l’accord de coopération économique et commerciale Australie-Inde, l’ALE Israël-Corée, l’ALE Cambodge-Corée, l’ALE Indonésie-Corée et l’ALE Nouvelle-Zélande-Royaume-Uni. De nombreux autres ALE sont en attente de ratification, dont l’ALE UE-Chili, l’accord UE-Mercosur, l’ALE UE-Nouvelle-Zélande et l’ALE Corée-Philippines. L’accès au marché ainsi que la réduction ou l’élimination progressive des droits de douane appliqués aux produits agricoles font partie de la plupart des accords commerciaux qui ont été conclus. Il n’en reste pas moins que les produits occupant une place importante au niveau intérieur continuent d’être exclus des accords ; c’est le cas par exemple du riz pour la Corée, ou du blé, du riz et du maïs pour l’Inde. Les accords conclus par l’Union européenne se distinguent car ils contiennent pour la première fois des chapitres sur les systèmes alimentaires durables, en établissant une coopération sur des sujets comme le bien-être animal, les déchets alimentaires, les pesticides et les engrais.

Cette section donne un aperçu de l’évolution du soutien public à l’agriculture, en s'appuyant sur les indicateurs du soutien à l’agriculture de l’OCDE qui permettent une comparaison entre les pays et dans le temps. Ces indicateurs, qui se focalisent sur des aspects différents, montrent la diversité des dispositifs mis en œuvre dans les pays. Les définitions des indicateurs utilisés dans ce rapport sont présentées à l’annexe 2.A, tandis que le graphique 2.4 représente les liens entre les différents indicateurs et leurs composants.

L’estimation du soutien total (EST) est le plus large des indicateurs de l’OCDE. Il combine trois éléments différents : a) les transferts versés aux exploitants agricoles individuellement ; b) les dépenses publiques en faveur du secteur agricole primaire collectivement ; et c) le soutien budgétaire aux consommateurs de produits agricoles. Incluant à la fois des éléments positifs et négatifs, l’EST est un indicateur des transferts nets.

L’estimation du soutien aux producteurs (ESP) mesure l’ensemble des transferts destinés aux exploitants agricoles à titre individuel. L’ESP comprend deux grands types de transferts : le soutien des prix du marché (SPM) représente les transferts des contribuables et des consommateurs aux exploitants agricoles par l’application de prix intérieurs supérieurs aux prix de référence sur les marchés internationaux en raison des politiques intérieures et commerciales pratiquées. Le SPM peut également être négatif lorsqu’il représente les transferts des producteurs aux consommateurs par l'application de prix intérieurs inférieurs aux prix de référence. Les transferts budgétaires sont financés par les contribuables uniquement et se subdivisent en plusieurs catégories qui se distinguent par la mise en œuvre différente des politiques qui les sous-tendent. Incluant à la fois des éléments positifs et négatifs, l’ESP est un indicateur des transferts nets.

L’estimation du soutien aux services d'intérêt général (ESSG) mesure les dépenses publiques qui bénéficient au secteur agricole primaire dans son ensemble plutôt que directement aux producteurs à titre individuel. L’ESSG inclut plusieurs catégories correspondant à différents types de dépenses.

À l’instar de l’ESP, l’estimation du soutien aux consommateurs (ESC) mesure le soutien aux consommateurs de produits agricoles, en distinguant les transferts au titre du marché (qui sont le pendant du SPM) et les transferts budgétaires. Afin d'éviter un double comptage, seule la composante budgétaire de l’ESC est incluse dans l’EST.

Le soutien total au secteur agricole dans les 54 pays examinés s’est élevé au total à 851 milliards USD par an en moyenne sur la période 2020-22 (graphique 2.5). Cela représente une hausse considérable par rapport aux 696 milliards USD qui ont été versés en moyenne pendant les trois années précédentes (2017-19), en grande partie en réaction à la pandémie de COVID-19, aux pressions inflationnistes et aux répercussions de la guerre en Ukraine. Le soutien aux producteurs s’est accru de 20 % et les transferts budgétaires aux consommateurs de produits agricoles ont presque doublé en 2020-22 par rapport à 2017-19. Bien qu'ayant reculé en 2022 en raison de la baisse du soutien des prix du marché, le soutien aux producteurs reste plus élevé qu’avant la pandémie.

Sur le soutien total versé en 2020-22, 630 milliards USD (soit 74 %) ont bénéficié aux producteurs à titre individuel, que ce soit directement via les transferts budgétaires publics ou implicitement via le soutien des prix du marché (SPM). Le reste était réparti presque également entre le soutien aux services d'intérêt général (106 milliards USD, 12.5 %) et les transferts budgétaires aux consommateurs de produits agricoles (115 milliards USD, 13.5 %). À la même période, certaines économies émergentes ont taxé implicitement leurs producteurs à l’aide de mesures comme des taxes sur les exportations et d’autres actions de minoration des prix intérieurs. Cette taxation implicite a été évaluée à 179 milliards USD par an en moyenne en 2020-22.

Le soutien à l’agriculture dans les pays faisant l'objet du présent rapport n’a cessé d'augmenter au cours des 20 dernières années en valeur nominale (graphique 2.6). Cette hausse provient en grande partie des économies émergentes, où le soutien a progressé fortement, de 68 milliards USD par an en moyenne en 2000-02 à 497 milliards USD par an en 2020-22. Parmi ces économies émergentes, la Chine et l’Inde arrivent largement en tête, avec un soutien évalué à respectivement 310 milliards USD et 124 milliards USD. Dans les pays de l’OCDE, le soutien à l’agriculture s’est accru à un rythme plus modéré, de 278 milliards USD par an en moyenne en 2000-02 à 349 milliards USD en 2020-22. Les États-Unis et l’Union européenne en représentent la plus grosse part, avec respectivement 122 milliards USD et 107 milliards USD en 2020-22.

Malgré sa hausse en valeur nominale dans la zone OCDE, le soutien total enregistre une baisse régulière par rapport au PIB. Dans les pays émergents couverts par le présent rapport, le soutien à l’agriculture fait généralement peser une charge plus lourde sur l’économie. Cela reflète la place relative plus importante qu'occupe le secteur agricole dans l’économie de ces pays ainsi que les choix stratégiques qu'ils opèrent.

Le fait d’exprimer le soutien en pourcentage de la valeur de la production est important car cela place les données dans un contexte. Pour les 54 pays étudiés dans ce rapport, le soutien positif total a représenté en 2020-22 l’équivalent de 20 % de la valeur de la production du secteur. Cela représente une baisse par rapport aux 29 % enregistrés en 2000-02. Dans la zone OCDE, le soutien est passé de 41 % de la valeur de la production en 2000-02 à 25 % en 2020-22. En revanche, au cours de la même période, il a évolué de 13 % à 17 % dans les 11 économies émergentes. Toutefois, en incluant les effets du SPM négatif (c’est-à-dire la taxation implicite du secteur par les pouvoirs publics), ce pourcentage est passé de 9 % à 11 %.

La situation est très variable selon les pays5. Ainsi, en 2020-22, le soutien en pourcentage de la valeur de la production se situait entre 72 % et 83 % en Norvège, en Suisse et en Islande ; en revanche, il était de moins de 5 % au Brésil, en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Ukraine, et négatif en Inde, au Viet Nam et en Argentine (graphique 2.7). Les pays fournissant le plus haut niveau de soutien par rapport à la taille du secteur ne sont pas toujours ceux qui supportent le fardeau économique le plus élevé. Cela est dû aux différences qui existent entre les pays concernant l’ampleur du soutien, le niveau de développement économique et la taille du secteur agricole. À titre d’exemple, la Norvège, la Suisse et l’Islande sont les pays qui enregistrent le plus haut niveau de soutien en pourcentage de la valeur de la production, mais parce que l’agriculture y représente une part relativement faible de leur PIB, la charge économique du soutien y est plus faible que pour des pays comme les Philippines, la Chine et la Türkiye. Ces trois derniers pays obtiennent le plus haut niveau de soutien par rapport au PIB, de respectivement 2.3 %, 1.8 % et 1.6 %. En Australie, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande et Ukraine, le soutien est égal ou inférieur à 0.25 % du PIB. La Chine et l’Inde, qui sont les deux pays les plus peuplés de la planète, sont les plus gros fournisseurs de soutien positif à l’agriculture (respectivement 310 milliards USD et 124 milliards USD par an en 2020-22), mais le soutien y prend une forme différente. En Chine, le soutien positif des prix du marché représente la quasi-totalité de l’aide au secteur alors qu’en Inde, les paiements aux producteurs au titre de l’utilisation d’intrants variables et les transferts budgétaires aux consommateurs atteignent un niveau élevé. Bien que le soutien de l’Inde à l’agriculture atteigne des sommes élevées en valeur brute, les mesures prises par le pays pour contenir les prix intérieurs aboutissent à un soutien négatif en valeur nette.

Selon les premières estimations réalisées pour 2022 sur les 54 pays étudiés, c’est la deuxième année que le niveau du soutien aux producteurs à titre individuel diminue lorsqu'il est mesuré par rapport aux recettes agricoles brutes (on parle alors d’ESP en %). Ce recul s’explique en grande partie par une baisse estimée du soutien positif des prix du marché (et une augmentation du SPM négatif) due davantage à la hausse des prix mondiaux qu’à de véritables réformes de l’action publique. Calculé sur trois ans, l’ESP en % dans les 54 pays examinés s'élevait en moyenne à 10 % des recettes agricoles brutes en 2020-22, soit à peu près autant qu’en 2010-12, mais en baisse par rapport aux 18 % de 2000-02.

Le soutien aux producteurs ne cesse de diminuer depuis un certain temps dans les pays de l’OCDE, quoique plus lentement depuis le début des années 2010 (graphique 2.8). Il représentait en moyenne 15 % des recettes agricoles brutes en 2020-22, contre 18 % en 2010-12 et 28 % en 2000-02. Dans les 11 économies émergentes de l’étude, le soutien aux producteurs a considérablement augmenté à partir des années 2010, avant de se stabiliser à environ la moitié de la moyenne de l’OCDE. Dans ces économies, l’ESP en % atteignait en moyenne 7.1 % en 2020-22, contre 4.5 % en 2010-12 et 3.9 % en 2000-02. Ces pourcentages moyens incluent cependant les effets d'un SPM négatif. Des pays comme l’Argentine, l’Inde et le Viet Nam ont mis en place des mesures comme des taxes sur les exportations ou d’autres dispositifs qui taxent implicitement les producteurs en contenant les prix intérieurs. En excluant le soutien négatif des prix du marché, l’ESP en % dans les économies émergentes était de 13.0 % en 2020-22, soit proche de la moyenne de l’OCDE quoique toujours en deçà ; en comparaison, le soutien positif aux producteurs dans l’ensemble des 54 pays examinés équivalait à 13.7 % des recettes agricoles brutes.

Quatre économies – la Chine, les États-Unis, le Japon et l’Union européenne – totalisent à elles seules quelque 70 % de l’ensemble du soutien positif aux producteurs de ces 20 dernières années. Néanmoins, la part relative de chacune de ces économies a considérablement évolué au fil du temps (graphique 2.9). En 2000-02, l’Union européenne6 représentait la plus grosse part (30 %) du soutien positif aux producteurs, suivie par le Japon (17 %), les États-Unis (17 %) et la Chine (7 %). En 2020-22, la Chine représente un peu moins de 44 % de ce soutien, suivie par l’Union européenne7 (15 %), les États-Unis (7 %) et le Japon (5 %). L’Inde absorbe quant à elle la plus grosse part – croissante – de toutes les formes de taxation implicite adoptées par les pays, de 61 % de l’ensemble du soutien négatif en 2000-02 à 76 % en 2020-22.

Si la Chine arrive en tête pour la valeur nominale du soutien fourni, ce sont les pays de l’OCDE qui enregistrent le plus haut niveau de soutien en pourcentage des recettes agricoles brutes (graphique 2.10). En Norvège, en Islande, en Suisse, en Corée et au Japon, les transferts budgétaires directs et le soutien implicite procuré par des mesures comme les droits de douane sur les importations représentent entre 35 % et 55 % des revenus perçus par les exploitants agricoles. En revanche, le soutien représente environ 15 % des recettes agricoles en Chine et moins de 5 % en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud, au Chili, au Brésil, au Costa Rica, en Australie et au Kazakhstan (en incluant les effets néfastes de la taxation implicite dans ce pays).

Les pouvoirs publics déploient toutes sortes de mesures pour atteindre leurs objectifs et apporter un soutien aux exploitants agricoles, et chaque pays met éventuellement l’accent sur des types de mesures différents. Par exemple :

  • Le soutien des prix du marché (SPM) est le résultat de politiques internes ou commerciales qui font monter ou baisser les prix intérieurs (par exemple les droits de douane, les taxes à l’exportation et l’établissement de prix plafonds ou planchers). En excluant les mesures qui font baisser les prix, le SPM représente la plus grosse partie du soutien positif fourni aux producteurs dans l’ensemble des économies examinées, à la fois au niveau global et dans une majorité de pays pris séparément (l’Union européenne comptant collectivement comme une économie).

  • Les paiements au titre de la production sont des transferts aux exploitants par unité produite, souvent versés par des fonds de stabilisation stratégique ou sous forme d'indemnités compensatrices. Ces paiements représentaient entre 10 % et 25 % du soutien en Islande et en Norvège pendant la période 2020-22.

  • Les paiements au titre de l’utilisation d'intrants variables sont par exemple des subventions aux engrais, à l’électricité, aux aliments pour animaux ou au crédit. En 2020-2022, cette catégorie de paiements représentait entre 20 % et 40 % du soutien positif en Afrique du Sud, au Viet Nam et en Australie, et 70 % en Inde.

  • Les paiements au titre de la superficie cultivée ou du nombre d'animaux, ou pour compléter les recettes ou les revenus des producteurs. Ces paiements ont été la forme de soutien aux producteurs majoritaire dans la zone OCDE en 2020-22, comme l’atteste sa prédominance dans les plans de relance mis en place par des économies comme l’Union européenne, le Royaume-Uni, le Canada et les États-Unis.

  • Les paiements visant à encourager la formation de capital fixe comme l’achat de matériel agricole, de terres ou d’animaux reproducteurs. Cette catégorie de paiements représentait plus de 30 % dans le soutien positif fourni aux producteurs en Australie, au Chili et au Kazakhstan.

  • Les paiements aux producteurs à titre individuel pour réduire le coût des services sur l’exploitation, par exemple les aides dans le domaine technique, comptable, commercial, sanitaire, phytosanitaire ou de la formation. Ce type de soutien pesait entre 10 % et 25 % dans le total des transferts aux producteurs en Nouvelle-Zélande, au Chili et aux États-Unis.

  • Les paiements au titre de l’utilisation d'intrants variables, mais avec des contraintes, des limites ou des restrictions. Le Brésil a été le seul pays à utiliser cette forme de soutien pour plus de 10 % de ses transferts aux producteurs.

  • Les paiements selon des critères non liés à des produits de base, qui incluent les paiements pour le retrait de ressources à long terme ou pour la production de produits particuliers autres que des produits de base (comme la réduction de l'utilisation de pesticides ou d’engrais), ou les paiements liés directement à la fourniture de biens publics environnementaux. Ce type de soutien équivalait à 10-20 % des transferts aux producteurs au Mexique et en Suisse.

Les différentes formes de soutien n’ont pas les mêmes effets sur les comportements des producteurs : ces derniers réagissent en effet aux incitations résultant des mesures de soutien et ajustent leurs décisions de production en conséquence. Cela a une incidence sur le niveau global de la production agricole, l'éventail des produits, les revenus des exploitants ainsi que la situation sociale et environnementale.

En 2020-22, les deux tiers du soutien positif aux producteurs dans les 54 pays du présent rapport – soit 411 milliards USD sur 630 milliards USD – étaient des mesures considérées comme pouvant générer le plus de distorsions sur la production et les échanges (9 % des recettes agricoles brutes). Au sein de l’OCDE, ce soutien s’est élevé à 103 milliards USD tandis que dans les 11 économies émergentes, les transferts aux producteurs se sont montés à 308 milliards USD par an. Le SPM négatif s’est en outre traduit par 179 milliards USD de taxation implicite en 2020-22, ce qui a également eu un effet de distorsion. L’OCDE a constamment recommandé d’abandonner progressivement les mesures pouvant générer le plus de distorsions. Des travaux menés récemment montrent que ces mesures peuvent également avoir des effets particulièrement préjudiciables pour l’environnement (Henderson et Lankoski, 2019[16]).8

D'après les travaux de l’OCDE – passés et en cours –, les formes de soutien considérées comme pouvant avoir le plus d’effets de distorsion sont le soutien des prix du marché, les paiements au titre de la production et les paiements au titre de l’utilisation d’intrants variables non assortie de contraintes. Ces formes de soutien sont par ailleurs connues pour être à la fois inefficaces et inadaptées pour venir en aide aux ménages défavorisés. Elles donnent en effet lieu à une importante déperdition des transferts à travers une plus grande utilisation d’intrants ou une hausse du prix de ces derniers, ou encore par le biais de leur capitalisation dans la valeur des terres. En moyenne, ces types de mesures sont beaucoup plus courantes dans les économies émergentes que dans les pays de l’OCDE. Dans les 11 économies émergentes, les mesures susceptibles de créer le plus de distorsions se sont traduites en 2020-22 par un soutien positif aux producteurs et une taxation implicite équivalant respectivement à 10 % et 6 % des recettes agricoles brutes. Dans les pays de l’OCDE, ces mesures se sont manifestées pendant la même période par un soutien positif équivalant à 7 % des recettes agricoles brutes, mais pas par une taxation implicite des producteurs (graphique 2.11).

D'après les premières estimations, le SPM net a diminué en 2022, et ce pour la deuxième année. Le SPM positif a régressé d’environ 22 milliards USD tandis que le SPM négatif s’est accru de 24 milliards USD. Cela signifie que les exploitants agricoles bénéficiant d'un SPM positif et ceux qui sont déjà taxés implicitement ont subi une baisse du soutien équivalant à 0.5 % de leurs recettes de 2021. Ce recul est dû en grande partie à la flambée exceptionnelle des prix des produits agricoles au cours de la période récente (graphique 2.1). Lorsque les prix mondiaux augmentent subitement et que le soutien des prix intérieurs n’est pas modifié en conséquence, le SPM peut chuter ou devenir de plus en plus négatif. La raison à cela est que les prix intérieurs bénéficiant d'un soutien perdent une partie de leur majoration, et que les prix intérieurs minorés deviennent de plus en plus défavorables par rapport aux prix à la frontière. Ce phénomène de baisse du SPM net a également été observé en 2008 et 2011 lorsque les prix des produits agricoles ont augmenté subitement et rapidement (graphique 2.12). Le SPM était ensuite reparti à la hausse lorsque les prix se sont arrêtés de grimper et que les mesures d’urgence ont été allégées ; c’est ce qui pourrait arriver également en 2023 selon l'évolution des prix mondiaux et les dispositions prises en conséquence par les pays.

En 2020-22, le SPM positif aux producteurs s'est élevé à 333 milliards USD par an en moyenne dans toutes les économies étudiées. C’était l’équivalent de 7 % des recettes agricoles brutes perçues annuellement au cours de la même période. Le SPM négatif résultant des mesures qui réduisent les prix intérieurs a atteint au cours de la même période 179 milliards USD ou 4 % des recettes agricoles brutes. Les droits de douane et les contingents tarifaires sur les importations sont les mesures les plus fréquemment appliquées donnant lieu à un SPM positif ; à l’opposé, les restrictions, quotas, interdictions ou taxes imposés sur les exportations sont les dispositifs les plus utilisés générant un SPM négatif.

La plus forte diminution du SPM en 2022 a été enregistrée en Chine, où la plupart des produits inclus dans les données examinées font l’objet d'un soutien des prix du marché qui, dans la plupart des cas, était en baisse, en particulier pour le coton, le maïs, les arachides et le lait. Cette baisse a largement contrebalancé la forte hausse du SPM pour la viande porcine, qui découle des mesures adoptées pour encourager la reconstitution des effectifs porcins suite aux récentes flambées épidémiques de peste porcine africaine. Les producteurs japonais ont eux aussi été confrontés à une importante diminution du SPM. Au Japon, la valeur du SPM a régressé de plus de 50 % pour le riz et de plus de 25 % pour la viande porcine. Cela est dû à un resserrement de l’écart entre les prix intérieurs et les prix à la frontière, et à une dépréciation du yen japonais.

Les changements survenus en Inde ont entraîné des fluctuations du SPM négatif estimé en 2022. Le pays a en effet mis en place des interdictions, droits ou permis d’exportation sur plusieurs produits dans le but de stabiliser les prix suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. Bien que ces mesures aient empêché les prix intérieurs de grimper aussi vite que les prix à la frontière, elles ont aussi eu pour conséquences que les recettes des producteurs ont été inférieures à ce qu’elles auraient été sinon. L’effet de ces nouvelles mesures – ainsi que d’autres préexistantes – a été particulièrement marqué sur le SPM du blé indien, entraînant une augmentation de la taxation implicite de près de 10 milliards USD. Les transferts au titre d’un seul produit qui ont été versés aux producteurs de blé indien sont passés de -48 % à -74 % des recettes associées à cette céréale en 2022.9

L'ampleur du SPM est très variable selon les pays. En Norvège, en Suisse, aux Philippines, en Islande, au Japon et en Corée, le SPM représente entre 20 % et 40 % des recettes agricoles brutes. Dans 16 autres pays, il équivaut à moins de 5 %. En Argentine, en Inde, au Kazakhstan, en Ukraine et au Viet Nam, les producteurs sont taxés implicitement et le SPM négatif se situe entre -1 % et -26 %.

Les niveaux de soutien varient en outre d'un produit à l’autre au sein d'un même pays. Certains pays peuvent avoir un faible taux moyen de SPM masquant le fait que certains produits bénéficient d'un soutien plus élevé que d'autres, ou que certains produits sont implicitement taxés. En Indonésie, par exemple, le SPM représentait en 2020-22 2.6 % des recettes agricoles brutes. Or, ce soutien équivalait à 55 % des recettes liées à la viande bovine et à -52 % de celles associées à la production d’ huile de palm. Les recettes agricoles brutes par produit incluent la valeur de la production du produit en question plus les transferts éventuels découlant des mesures prises le concernant.

En Corée, au Japon, en Islande et en Suisse, le SPM du produit bénéficiant du soutien le plus élevé se situe entre 68 % et 80 % des recettes agricoles brutes de ce produit. En revanche, dans des pays comme l’Inde, le Kazakhstan et le Viet Nam, le SPM du produit le plus taxé implicitement est compris entre -91 % et -138 % des recettes agricoles brutes de ce produit (graphique 2.13 - voir l’encadré 2.3 pour des explications).

L'écart entre les prix intérieurs et les prix mondiaux s’est globalement rétréci au cours des 20 dernières années dans la zone OCDE (graphique 2.14). Pour le mesurer, l’OCDE utilise le coefficient nominal de protection (CNP), qui correspond au rapport entre les prix effectifs moyens payés aux producteurs et les prix à la frontière. Le prix effectif payé au producteur est le prix perçu par le producteur, auquel s'ajoutent d’éventuels paiements par unité produite. La baisse de l’écart des prix, mesuré par le CNP, signifie que le prix perçu par les producteurs est plus proche du prix mondial.

Sur l’ensemble de la zone OCDE, le CNP moyen était de 1.07 pendant la période 2020-22. Cela signifie que les prix effectifs perçus par les producteurs étaient en moyenne 7 % supérieurs aux prix mondiaux, soit un recul de 19 points de pourcentage par rapport à l’écart de 26 % en moyenne sur la période 2000-02. L'écart entre les prix a diminué dans presque tous les pays entre 2000-02 et 2020-22. La baisse a été particulièrement forte dans des pays comme la Suisse, la Norvège, le Japon et l’Islande, où elle était comprise entre 55 et 110 points de pourcentage.

La Chine est le seul pays où le CNP a augmenté au cours des 20 dernières années, l’écart passant de 1.03 à 1.15. Cela s’explique par la mise en place de plusieurs mesures ayant entraîné la hausse des prix intérieurs, par exemple l'instauration d'un prix minimum d'achat pour le riz et le blé. En Inde et en Argentine, l'écart des prix est de plus en plus négatif. Le CNP y a diminué respectivement de 0.91 à 0.78 et de 0.89 à 0.86, ce qui signifie que les prix intérieurs y sont aujourd'hui inférieurs de respectivement 22 % et 14 % aux prix mondiaux.

Les paiements reposant sur les facteurs de production (superficie, nombre d'animaux, recettes ou revenu) ou selon des critères non liés à des produits de base ont diminué en pourcentage des recettes agricoles brutes dans les 54 pays, de 4.6 % en 2000-02 à 3.8 % in 2020-22. Cette évolution est due à la volonté de certains pays d’abandonner ou de réorienter les dispositifs qui utilisent les valeurs courantes de la superficie, du nombre d'animaux, des recettes ou du revenu agricoles comme critères d’attribution des paiements et d'établissement de leur montant. Au cours des 20 dernières années, les paiements de cette catégorie ont reculé de 3.2 % à 1.9 % des recettes agricoles brutes. Il s’agit d'une évolution positive car les paiements reposant sur les facteurs de production courants constituent une incitation directe à la production et peuvent avoir un effet de distorsion, même si ce dernier est généralement moins important que ce que l’on observe dans le cadre du SPM et des autres mesures examinées ci-dessus.

Les paiements reposant sur les facteurs de production courants ont dans de nombreux cas été remplacés par d'autres basés sur les facteurs de production antérieurs (avec production requise ou facultative), qui sont passés de 1.1 % à 1.7 %. Lesdits paiements sont généralement considérés comme « découplés » de la production car ils n’ont pas de lien direct avec les décisions de production actuelles, bien qu’ils tendent à freiner les changements structurels et à empêcher la réaffectation des terres agricoles à d’autres utilisations. Environ 96 % des paiements reposant sur les facteurs de production antérieurs ne requièrent pas de production sur la période en cours.

La substitution des facteurs de production courants par les facteurs de production antérieurs a été particulièrement notable dans l’Union européenne. En 2000-02, les paiements reposant sur les facteurs de production courants représentaient 11.6 % des recettes agricoles brutes et il n’existait pas de paiement au titre des facteurs de production non courants. Suite à la réforme Fischler en 2003, une grande partie du soutien versé dans l’Union européenne était découplé de la production et en 2020-22, les paiements au titre des facteurs de production courants ne représentaient que 4.1 % du total, et ceux au titre des facteurs de production non courants 6.8 %. Une évolution similaire de découplage a eu lieu à un degré moindre en Corée et en Norvège (graphique 2.15).

Outre la structure du soutien aux producteurs, un autre aspect important à observer est le type de produit (ou le groupe de produits) bénéficiant d'un soutien. Les dispositifs sont souvent conçus pour générer des effets positifs ou négatifs sur un produit en particulier. Ainsi, l’application de droits de douane sur les importations de blé se traduit par un soutien des prix du marché qui avantage les producteurs intérieurs de blé et non ceux d'autres produits. De par leur conception, les mesures aboutissant à un SPM et à des paiements au titre de la production sont axées sur un produit en particulier, alors que ce n’est pas forcément le cas pour les autres transferts budgétaires. À titre d’exemple, les paiements au titre de l’utilisation d’intrants ou d’autres facteurs de production sont souvent formulés de façon à privilégier un produit en particulier (comme une subvention accordée uniquement pour la production de maïs, ou un paiement versé par tête de bétail). La valeur totale de ces paiements, SPM inclus, est regroupée par produit sous la rubrique des transferts au titre d’un seul produit (TSP).

Dans l’ensemble des pays couverts par ce rapport, les TSP ont atteint en moyenne 4.4 % des recettes agricoles brutes en 2020-22, soit environ la moitié des 9.8 % enregistrés en 2000-02. Les premières estimations pour 2022 font apparaître une baisse pour la deuxième année consécutive. Le SPM représentant la principale forme de soutien au titre de produits spécifiques, les TSP ont donc suivi la même évolution que celle décrite plus haut pour le SPM.

Les TSP sont particulièrement élevés pour le sucre, le maïs et le riz, avec plus de 15 % des recettes agricoles brutes enregistrées pour chacun de ces produits en 2020-22 (graphique 2.16). Il existe toutefois une importante variation du niveau de soutien par produit selon les pays examinés. Le soutien atteint une moyenne de 8.7 % des recettes associées à la production d’œufs, mais cette moyenne masque un large soutien des prix dans certains pays et une importante taxation implicite dans d'autres. Dans les pays qui subventionnaient cette production à l’aide d'un soutien positif des prix intérieurs et d’autres mesures, le soutien a atteint en moyenne 36 % des recettes. En revanche, dans les pays qui sanctionnaient cette production par l’application de prix plus faibles, la taxation implicite représentait 27 % des recettes. La production d'œufs a subi les conséquences de la grippe aviaire, qui a décimé les effectifs de volaille ces dernières années. L’écart entre les prix intérieurs et les prix à la frontière a donc été fluctuant, comme le montre la valeur variable du SPM.

Le soutien au titre de produits spécifiques peut influencer les choix de production en modifiant le rendement relatif de certains produits ou groupes de produits. Ainsi, le versement d'un paiement par balle de coton produite peut conduire à l’extension de la surface des plantations de coton au détriment d'autres produits. C’est pourquoi le soutien axé sur quelques produits en particulier peut avoir plus d’effets de distorsion sur la production qu'un niveau de soutien équivalent réparti de façon égale entre plusieurs produits ou ne visant pas spécifiquement un seul produit. De plus, lorsque les produits visés par les TSP entraînent une utilisation plus intensive de ressources naturelles ou plus de pollution que ceux qui ne bénéficient pas de cette aide, le soutien au titre de produits spécifiques peut aussi induire une pression accrue sur l’environnement.

Malgré le recul des niveaux du soutien aux producteurs en 2022, les recettes agricoles brutes sont estimées en hausse pour la sixième année consécutive. L'augmentation en 2022 des prix mondiaux des produits agricoles a entraîné une forte hausse de la valeur de la production agricole, qui compense largement la baisse du soutien des prix du marché et des transferts budgétaires aux producteurs. De manière générale, les recettes agricoles brutes en 2020-22 dépassaient de 20 % celles de 2017-19, avant la pandémie de COVID-19.

La politique agricole peut entraîner une hausse du prix des produits alimentaires payé par les consommateurs – comme dans le cas d'un SPM positif – ou réduire les coûts de l’alimentation lorsque des programmes d'aide alimentaire sont en place (généralement à destination des consommateurs défavorisés). Le système de distribution publique ciblée mis en place en Inde et le programme d’assistance supplémentaire à l’alimentation (Supplemental Nutrition Assistance Program, SNAP) aux États-Unis en sont deux exemples. Le soutien aux consommateurs concerne à la fois les consommateurs finaux de produits agricoles et les industries clientes qui transforment ces produits. L’Inde, l’Argentine, le Viet Nam et le Kazakhstan fournissent également un soutien aux consommateurs en minorant le prix des produits.

Les transferts budgétaires aux consommateurs ont considérablement augmenté suite à l’apparition de la pandémie de COVID-19. En 2020, les pouvoirs publiques ont ainsi versé 131 milliards USD aux consommateurs de produits agricoles, soit près de deux fois plus que l’année précédente (65 milliards USD). En 2022, ces transferts ont été ramenés à quelque 112 milliards USD, ce qui est encore supérieur aux niveaux précédant la pandémie. En Inde, les subventions alimentaires représentaient une grande partie de cette augmentation, des mesures temporaires prises en 2020 ayant multiplié par cinq les transferts budgétaires aux consommateurs, à hauteur de 74 milliards USD.

Si la pandémie a donné lieu à des augmentations temporaires du soutien aux consommateurs, ces derniers paient généralement les produits alimentaires plus cher que leurs prix mondiaux. En 2020-22, le soutien des pouvoirs publics aux consommateurs (ou ESC en %) représentait -3.7 % des dépenses brutes, mesurées par le prix au départ de l’exploitation (graphique 2.17). Cela signifie que les consommateurs étaient taxés implicitement à l’achat de produits agricoles. Dans la plupart des pays, l’ESC en % reflète le niveau du SPM fourni aux producteurs. En Corée, en Islande, au Japon, en Suisse, en Norvège et aux Philippines, l’ESC en % est d’au moins -20 % par rapport aux dépenses brutes, ce qui témoigne du niveau élevé du SPM dont bénéficient les producteurs. La Norvège et l’Indonésie compensent partiellement les effets négatifs de ce soutien par des transferts budgétaires aux consommateurs.

La baisse du SPM a amoindri au fil du temps l’effet des mesures agricoles sur les consommateurs. Dans les 54 pays examinés, l’ESC en % est passé d'une moyenne de -10.3 % en 2000-02 à -3.7 % en 2020-22. Le changement est particulièrement notable dans les pays de l’OCDE, où l’ESC en % a progressé de -18.3 % au début des années 2000 à -3 % dans les données récentes. Dans les économies émergentes, en revanche, la situation s’est dégradée pour les consommateurs, l’ESC en % régressant de presque zéro il y a 20 ans à -4.1 % en moyenne en 2020-22. Cela est dû en grande partie à l’augmentation du SPM en Chine, qui a amené l’ESC en % à une moyenne de -12.7 % en 2020-22.

En 2020-22, les pays ont versé en moyenne au secteur agricole 106 milliards USD de soutien aux services d'intérêt général. Bien que ce montant représente une progression en valeur nominale par rapport à 20 ans plus tôt, sa part relative dans le soutien total a diminué : située entre 15 % et 17 % depuis 2000, elle a fortement baissé après 2018 et se situait en moyenne à 12.5 % en 2020-22. Le soutien aux services d'intérêt général a également reculé par rapport à la taille du secteur, passant d'une moyenne de 4.6 % de la valeur de la production agricole en 2000-02 à 2.5 % en 2020-22. Cette tendance s’observe à la fois dans les pays de l’OCDE et les économies émergentes. En 2020-22, le soutien aux services d'intérêt général représentait 3.4 % de la valeur de la production dans les premiers et 2 % dans les secondes.

Le soutien aux services d'intérêt général découle de mesures visant à bénéficier au secteur agricole en général, et non aux producteurs ou aux consommateurs à titre individuel. Les investissements dans les services d’intérêt général peuvent aider le secteur agricole à devenir plus productif, plus durable et plus résilient. Ainsi, le développement et l’entretien des infrastructures peuvent inclure la construction d’actifs hydrologiques rendant l’irrigation plus accessible, ou d'autres infrastructures physiques (comme une ligne ferroviaire ou un entrepôt portuaire) qui facilitent le transport et la commercialisation des produits et réduisent le gaspillage. L’infrastructure institutionnelle peut aussi être concernée, avec par exemple le soutien aux organisations paysannes ou des paiements pour la transformation structurelle du secteur (comme le financement des nouveaux entrants, des sorties ou des stratégies de diversification). Dans les données les plus récentes (2020-22), les dépenses d’infrastructure représentaient presque la moitié du soutien aux services d’intérêt général (46 %) et concernaient en majeure partie des projets dans le domaine de l’irrigation. Les systèmes d’innovation agricole – qui recouvrent à la fois la création et le transfert de connaissances – ainsi que les services d'inspection et de contrôle jouent également un rôle important pour la croissance de la productivité, et représentaient respectivement 23 % et 8 % du soutien. Ces trois types d'investissement seront essentiels pour préparer l’agriculture à son adaptation au changement climatique, mais tous ont vu leur montant diminuer par rapport à la taille du secteur agricole, pour s’établir à moins de 10 % du soutien total.

Les autres formes de soutien aux services d’intérêt général peuvent avoir un effet de distorsion sur les marchés, mais leur part est généralement faible et en baisse. La commercialisation et la promotion représentaient 8 % de ce type de soutien, et le coût du stockage public10 13 %.

En 2020-22, les mesures de soutien à l’agriculture ont généré 851 milliards USD de transferts annuels au secteur dans les 54 pays couverts par l’étude. Ces transferts, 2.5 fois supérieurs à leur montant global pendant la période 2000-02, ont atteint le niveau le plus élevé jamais relevé, bien qu’ils accusent une baisse en pourcentage de la valeur de la production agricole. Les trois quarts ou presque de ces transferts – soit 626 milliards USD – ont bénéficié aux producteurs à titre individuel grâce à des prix et des transferts budgétaires plus élevés. Certains pays continuent néanmoins de taxer implicitement leurs producteurs en mettant en place des mesures qui contiennent les prix intérieurs, générant des transferts au détriment de ces producteurs d'un montant de 179 milliards USD par an.

Globalement, le soutien total net au secteur (EST) représente 0.6 % du PIB dans les 54 pays examinés, contre 1.0 % au début des années 2000. L’EST équivalait à 16 % de la valeur de la production agricole en 2020-22, contre 27 % en 2000-02.

Au cours des 20 dernières années, le soutien net aux producteurs a diminué dans les 54 pays examinés en pourcentage des recettes agricoles brutes (ESP en %), passant de 18 % en 2000-02 à 10 % en 2020-22. Cette évolution reflète la baisse du soutien aux producteurs dans les pays de l’OCDE : de 28 % des recettes agricoles brutes au début des années 2000 à 15 % en 2020-22. Ce soutien s’est en revanche accru dans les économies émergentes, où il est passé de 4 % à 7 % entre 2000-02 et 2020-22.

Dans la zone OCDE, la baisse a eu lieu en grande partie dans les années 2000, sous l’effet de la diminution du soutien des prix du marché. Elle a été plus lente ces dernières années, coïncidant avec une augmentation des paiements au titre des facteurs de production courants, qui contraste avec les appels récurrents en faveur d’une réduction notable des formes de soutien pouvant générer le plus de distorsions. Dans les économies émergentes, la hausse du soutien est surtout le résultat d'une forte progression de la Chine en tant que producteur agricole et de son vaste soutien des prix du marché bénéficiant aux producteurs. Ce pays représente aujourd'hui quelque 44 % (276 milliards USD) de l’ensemble du soutien aux producteurs qui est versé dans les 54 pays du présent rapport, contre seulement 7 % en 2000-02.

Le soutien des prix du marché (SPM) reste la principale forme de soutien aux producteurs. En 2020-22, le SPM a représenté 333 milliards USD, soit plus ou moins la moitié du soutien positif à l’agriculture. Il a toutefois accusé une baisse en pourcentage des recettes agricoles brutes, passant de 11.5 % au début du siècle à 7.3 % aujourd'hui. Parallèlement, plusieurs pays ont déployé des mesures ayant généré un soutien négatif des prix du marché d'un montant de 179 milliards USD. Cette taxe implicite équivalait à 3.9 % des recettes agricoles brutes en 2020-22, contre 1.8 % 20 ans plus tôt. Cela signifie que dans les 54 pays examinés, le soutien positif aux producteurs représentait 13.7 % des recettes agricoles brutes en 2020-22.

Les autres formes de soutien aux producteurs ont été notamment des paiements au titre de la production (11 milliards USD) et d'autres au titre de l’utilisation d’intrants non assortie de contraintes (67 milliards USD). À l’instar du SPM, ces paiements ont tendance à créer des distorsions au niveau de la production. Cela veut dire que 411 milliards USD des transferts aux producteurs se présentent sous des formes susceptibles de créer le plus de distorsions, qui représentent les deux tiers environ du soutien positif aux producteurs. Les 219 milliards USD restants étaient des paiements moins couplés aux décisions de production. Il s'agissait notamment de 77 milliards USD de paiements découplés reposant sur des facteurs de production antérieurs (superficie, nombre d'animaux, recettes ou revenu). Bien que les paiements découplés soient généralement moins néfastes que les paiements couplés, ils peuvent ralentir le changement structurel et empêcher la réaffectation des terres agricoles à d’autres utilisations.

Hormis le soutien aux producteurs à titre individuel, les pouvoirs publics ont versé 106 milliards USD en 2020-22 pour aider le secteur dans son ensemble en fournissant des services d’intérêt général. Cette aide représente quelque 12.5 % du soutien positif à l'agriculture, en baisse par rapport aux 16.0 % d’il y a 20 ans. Le soutien aux services d'intérêt général a également reculé par rapport à la taille du secteur, passant de 4.6 % de la valeur de la production en 2000-02 à 2.5 % en 2020-22. Les investissements dans le système de connaissances et d'innovation agricoles, dans les services d’inspection et de contrôle, ainsi que dans le développement et l’entretien des infrastructures – qui sont des services d'intérêt général particulièrement à même de favoriser la croissance durable de la productivité et la résilience – se sont élevés au total à 82 milliards USD, soit environ les trois quarts du soutien aux services d'intérêt général. Les dépenses consacrées à ces services ont reculé, passant de 3.1 % de la valeur totale de la production en 2000-02, à 1.9 % en 2020-22.

Les consommateurs ont également bénéficié d'un soutien sous la forme de transferts budgétaires directs d'un montant de 115 milliards USD par an en moyenne en 2020-22. Ces transferts étaient majoritairement des programmes d'aide d’alimentaire. Toutefois, dans l’ensemble, les consommateurs ont été implicitement taxés sur leurs achats de produits agricoles au travers de soutiens des prix de marché avantageant les producteurs. Ces taxes implicites ont été supérieures à l’aide budgétaire directe des pouvoirs publics.

Le niveau du soutien a été très variable selon les pays. Sur la période 2020-22, le soutien aux producteurs représentait entre 5 % au plus de la valeur de la production agricole au Brésil, en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Ukraine, et plus de 70 % en Norvège, en Suisse et en Islande. Le soutien net était négatif en Argentine, au Viet Nam et en Inde.

Les prix des produits agricoles et des intrants ont fortement augmenté après le déclenchement de la guerre en raison de la prédominance de l’Ukraine et de la Russie sur les marchés mondiaux des produits en question. Ces hausses ont eu lieu alors que les chaînes de valeur mondiales avaient déjà été mises à l’épreuve par la pandémie de COVID-19 pendant les deux années précédentes. Les pouvoirs publics ont réagi à ces nouveaux défis mondiaux en adoptant un large éventail de mesures visant à aider les producteurs et les consommateurs, à garantir l’approvisionnement en produits essentiels et à venir en aide à l’Ukraine.

Les chocs auxquels ils ont été confrontés ont conduit certains États à repenser leur approche de sécurisation des approvisionnements stratégiques. Un grand nombre de pays ont réduit leurs droits de douane sur les importations d’aliments pour animaux et de produits agricoles dans le but de maîtriser la hausse des coûts des intrants et des prix à la consommation. D'autres ont imposé des restrictions sur les exportations de produits destinés à l’alimentation humaine et d’engrais afin de protéger les réserves intérieures. Les pays ont également pris des mesures pour aider l’Ukraine et son secteur agricole. Il s'agit notamment d’initiatives pour relancer les exportations ukrainiennes via la mer Noire ainsi que par voie terrestre ou ferroviaire à travers l’Europe, de l’allègement des restrictions des échanges avec l’Ukraine, ainsi que des possibilités d’emplois offertes aux réfugiés ukrainiens dans le secteur de l’agriculture. Les pays s’efforcent également aujourd'hui de préparer le secteur agricole ukrainien à être en mesure de rebondir rapidement une fois la guerre terminée. Cela inclut par exemple une collaboration bilatérale ou multilatérale entre les États, des partenariats public-privé et des initiatives internationales comme le Programme-pays pour l’Ukraine de l’OCDE qui a été lancé récemment.

S’agissant de l’avenir, les pays devraient tirer les leçons des années qui viennent de s’écouler et chercher à accroître leur résilience face aux risques futurs. Ils devraient également mettre en œuvre des mesures et des investissements qui améliorent la capacité du secteur agricole à absorber les chocs futurs, à s'y adapter et à se transformer en conséquence. Il pourrait notamment s’agir de mesures « sans regret » qui procurent ces avantages dans un large éventail de scénarios futurs, tout en contribuant à la productivité et à la durabilité de l’agriculture. Les mesures temporaires s’avèrent souvent difficiles à supprimer, et un équilibre doit être trouvé entre objectifs à long terme et réponses à court terme. Les politiques de gestion des risques devraient être élaborées avec les parties prenantes pour veiller à une compréhension commune de la situation globale des risques, et des responsabilités assumées par chacun pour leur gestion.

D'après les premières estimations, le SPM a diminué en 2022. Cette baisse s’explique en grande partie par la récente période de flambée exceptionnelle des prix des produits agricoles, qui a placé de nombreux produits soutenus sur les marchés intérieurs à des niveaux de prix inférieurs à ceux des cours mondiaux. Le même phénomène était survenu lors de la montée en flèche des prix en 2008 et 2011. Le soutien des prix du marché va sans doute repartir à la hausse en 2023 selon les actions engagées par les pays mettant en œuvre ce type de mesure, et l’évolution des prix mondiaux.

Deux pays, le Costa Rica et Israël, ont entrepris en 2022 de réduire le SPM afin de libéraliser certaines activités agricoles, conformément aux recommandations de l’OCDE. Ce sont là des dispositions importantes pour limiter les distorsions de la production et des échanges dans les activités agricoles concernées. Cela dit, le SPM continue dans de nombreux pays d'occuper une grande place dans les diverses formes de soutien à l’agriculture, et il conviendrait d’aller plus loin dans les réformes.

Dans la zone OCDE, les réformes ont peu progressé au cours des dix dernières années et le niveau ou la composition du soutien a peu changé au cours de cette période. En 2022, les signataires de la Déclaration ministérielle de l’OCDE11 se sont engagés à « intensifier les efforts nécessaires à la réforme et à la réorientation des politiques agricoles, et en particulier à traiter la question des mesures de soutien préjudiciables pour l’environnement, afin de progresser vers des systèmes agricoles et alimentaires plus durables ». Parallèlement, dans les grandes économies émergentes, le soutien s’est maintenu à un niveau élevé au cours de la décennie écoulée après avoir fortement augmenté par le passé. Dans les 54 pays étudiés, les deux tiers du soutien continuent de prendre la forme d’interventions sur les prix et d’autres formes génératrices de distorsions, connues pour leurs conséquences néfastes dans le domaine de la sécurité alimentaire et de l’environnement, et réputées pour être à la fois inefficaces et inadaptés pour venir en aide aux ménages défavorisés. Les pays devraient entreprendre de réformer leur politique intérieure en réduisant l’utilisation de telles mesures. Dans le même temps, des règles multilatérales plus strictes pourraient être nécessaires pour faciliter ces réformes.

L'agriculture a été confrontée ces dernières années à d'importants défis, qu'il s'agisse de la pandémie de COVID-19 et aujourd’hui des répercussions de la guerre en Ukraine. Les États ont globalement réussi à gérer efficacement ces crises et à absorber rapidement les chocs. Il ne faudrait cependant pas qu’ils perdent de vue les défis actuels et futurs que représente le changement climatique.

Certains pays ont en 2022 revu à la hausse leurs objectifs à l'égard du climat. D'autres, comme la Nouvelle-Zélande, ont lancé de nouvelles initiatives – positives – de tarification du carbone. Ce sont là des démarches bienvenues qui aideront les pays à respecter les engagements pris au titre de l’Accord de Paris. Cependant, le niveau des ambitions pourrait encore être accru. Seuls 19 pays sur les 54 examinés dans ce rapport ont défini un objectif d'atténuation spécifique pour leur secteur agricole, tandis que trois n'ont fixé pour leurs économies aucun objectif visant à atteindre la neutralité carbone ou à s’en rapprocher.

Une grande partie des mesures de soutien à l’agriculture sont en contradiction avec les actions requises pour atténuer le changement climatique et s’adapter à ses effets. Les formes de soutien susceptibles de créer le plus de distorsion – à savoir le soutien des prix du marché ainsi que les paiements au titre de la production ou de l’utilisation d'intrants non assortie de contraintes – s’élèvent à 411 milliards USD. Ces mesures peuvent encourager la surproduction et favoriser des émissions de GES lorsqu’elles induisent l’utilisation excessive d'intrants polluants, la dégradation des sols et la multiplication des opérations de défrichage. Elles peuvent également exercer une pression accrue sur les ressources, la biodiversité et l’environnement, qui sont déjà mis à mal par le changement climatique. Nombre de ces mesures peuvent par ailleurs entraver l’adaptation au changement climatique en incitant les agriculteurs à conserver les systèmes de production actuels et en les empêchant de se détourner de la production de produits subventionnés pour faire face à l’évolution des conditions climatiques. Une collaboration entre pays pourrait s’avérer nécessaire pour éviter les effets de fuite environnementale par le biais des marchés internationaux et d'autres problèmes susceptibles de découler d'asymétries des politiques entre les pays.

Le soutien aux activités d’élevage est à cet égard particulièrement problématique. Le bétail est responsable de la majorité des émissions de GES liées au secteur de l’agriculture, et contribue fortement aux émissions mondiales de méthane. Or l’élevage bénéficie d'un haut niveau de soutien, généralement sous forme de SPM. Le soutien au secteur de la viande (volaille, bovine et porcine) représente environ 10 % des recettes brutes associées à chacun de ces produits. Globalement, le soutien des prix du marché dont ont bénéficié ces trois produits s’est élevé à 71 milliards USD, soit 11 % de l’ensemble du soutien positif aux producteurs. La production de riz contribue elle aussi de façon importante aux émissions en raison du méthane qui se dégage des rizières. Or le soutien à cette céréale a atteint 54 milliards USD en 2020-22. Ces formes de soutien à des produits responsables de fortes émissions devraient, dans la mesure du possible, être réduites et réformées en tenant compte du contexte national et de la conception des mesures.

Références

[14] CE (2022), Déclaration conjointe - 1 milliard d’euros mobilisés en faveur des corridors de solidarité, https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/statement_22_6825 (consulté le 19 avril 2023).

[15] CNUCED (2021), An Assessment of the Regional Comprehensive Economic Partnership (RCEP) Tariff Concessions, Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), https://unctad.org/system/files/official-document/ser-rp-2021d16_en.pdf.

[12] d’Istria, T. (2023), En Ukraine, après les combats, le temps du déminage, https://www.lemonde.fr/international/article/2023/03/08/en-ukraine-apres-les-combats-le-temps-du-deminage_6164557_3210.html.

[6] FAO (2023), Série de données de la base FAOSTAT sur la production des cultures et produits animaux, https://www.fao.org/faostat/fr/#data/QCL.

[7] FAO (2023), Série de données de la base FAOSTAT sur le commerce des cultures et produits animaux, https://www.fao.org/faostat/fr/#data/TCL.

[1] FAO (2022), Food Outlook – Biannual Report on Global Food Markets, https://doi.org/10.4060/cc2864en.

[11] GLOBSEC (2023), Walking on Fire: Demining in Ukraine, https://www.globsec.org/sites/default/files/2023-04/Demining%20in%20Ukraine%20report%20ver5%20web.pdf.

[16] Henderson, B. et J. Lankoski (2019), « Evaluating the environmental impact of agricultural policies », Documents de l’OCDE sur l’alimentation, l’agriculture et les pêcheries, n° 130, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/add0f27c-en.

[3] Kyiv School of Economics (2023), The total amount of damage caused to Ukraine’s infrastructure due to the war has increased to almost $138 billion, https://kse.ua/about-the-school/news/the-total-amount-of-damage-caused-to-ukraine-s-infrastructure-due-to-the-war-has-increased-to-almost-138-billion/.

[5] Kyiv School of Economics (2022), Agricultural War Losses Review Ukraine - Rapid Losses Assessment Issue 2, https://kse.ua/wp-content/uploads/2022/11/Losses_report_issue2-1.pdf.

[4] Kyiv School of Economics (2022), Assessment of damages in Ukraine due to Russia’s military aggression as of September 1, 2022, https://kse.ua/wp-content/uploads/2022/10/ENG-Sep22_Working_Sep1_Damages-Report.docx.pdf.

[13] Martyshev, P., O. Nivievskyi et M. Bogonos (2023), Regional war, global consequences: Mounting damages to Ukraine’s agriculture and growing challenges for global food security, https://www.ifpri.org/blog/regional-war-global-consequences-mounting-damages-ukraines-agriculture-and-growing-challenges#:~:text=The%20total%20agricultural%20losses%20associated,output%20the%20previous%20agricultural%20year.

[19] OCDE (2022), Déclaration sur des solutions transformatrices pour des systèmes agricoles et alimentaires durables, OECD/LEGAL/0483, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0483.

[18] OCDE (2020), Politiques agricoles : suivi et évaluation 2020 (version abrégée), Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/10578a8d-fr.

[17] OCDE (2016), OECD’S Producer Support Estimate and Related Indicators of Agricultural Support - Concepts, Calculations, Interpretation and Use (The PSE Manual), https://www.oecd.org/agriculture/topics/agricultural-policy-monitoring-and-evaluation/documents/producer-support-estimates-manual.pdf.

[8] OCDE/FAO (2023), Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2023-2032, Éditions OCDE, Paris.

[2] OCDE/FAO (2023), Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2023-2032, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/a187ca6c-fr.

[10] OCHA (2023), Ukraine Humanitarian Response 2023 Situation Report 29 May 2023, https://reports.unocha.org/en/country/ukraine/card/vxxNhuJBA5/ (consulté le 19/06/2023).

[9] USDA (2023), Grain and Feed Annual Ukraine, https://apps.fas.usda.gov/newgainapi/api/Report/DownloadReportByFileName?fileName=Grain%20and%20Feed%20Annual_Kyiv_Ukraine_UP2023-0012.pdf.

Estimation du soutien aux producteurs (ESP) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts des consommateurs et des contribuables au titre du soutien aux producteurs agricoles, au départ de l’exploitation, découlant des mesures de soutien à l’agriculture, quels que soient leur nature, leurs objectifs ou leurs incidences sur la production ou le revenu agricoles. Elle comprend le soutien des prix du marché, les paiements budgétaires et les recettes budgétaires perdues, c’est-à-dire les transferts bruts des contribuables aux producteurs agricoles résultant des mesures fondées sur : le niveau effectif de la production, l’utilisation d’intrants, la superficie cultivée/le nombre d’animaux/les recettes/le revenu (en fonction ou indépendamment de leur niveau effectif), et des critères relatifs aux produits autres que les produits de base. Les catégories entrant dans l’ESP sont définies dans l’encadré 2 A.1.

Soutien des prix du marché (SPM) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts des consommateurs et des contribuables aux producteurs agricoles, qui découlent des mesures créant un écart entre les prix intérieurs et les prix à la frontière d’un produit agricole donné, mesurés au départ de l’exploitation. Le SPM est calculé par produit et les totaux des composantes négatives et positives sont présentés séparément s’il y a lieu en accompagnement du SPM total.

Transferts aux producteurs au titre d’un seul produit (TSP aux producteurs) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts des consommateurs et des contribuables aux producteurs agricoles, mesurés au départ de l’exploitation, découlant des mesures liées à la production d’un produit particulier et subordonnant le versement du paiement au producteur à la production du produit désigné. Cette catégorie comprend des mesures à caractère plus général où les paiements sont définis par rapport à tel ou tel produit. Les TSP aux producteurs sont également calculés par produit.

Transferts au titre d’un groupe de produits (TGP) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts découlant des mesures octroyant des paiements sous réserve de la production d’un ou de plusieurs des produits figurant sur une liste donnée. Autrement dit, un producteur peut choisir parmi un éventail de produits et percevoir un transfert qui ne variera pas en fonction de sa décision.

Transferts au titre de tous les produits (TTP) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts découlant des mesures n’imposant aucune restriction sur le produit agricole produit, mais exigeant du bénéficiaire la production d’un produit de base de son choix.

Autres transferts aux producteurs (ATP) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts effectués dans le cadre de mesures non assorties d’une quelconque obligation de production de produits de base.

Transferts aux consommateurs au titre d’un seul produit (TSP aux consommateurs) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts des (aux) consommateurs de produits agricoles, mesurés au départ de l’exploitation, découlant des mesures liées à la production d’un produit particulier. Les TSP aux consommateurs sont également calculés par produit.

Estimation du soutien aux consommateurs (ESC) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts, au départ de l’exploitation, des (aux) consommateurs de produits agricoles découlant des mesures de soutien à l’agriculture, indépendamment de leur nature, de leurs objectifs ou de leurs incidences sur la consommation de produits agricoles. Lorsque l’ESC est négative, elle mesure la charge pour les consommateurs (taxe implicite) imputable au soutien des prix du marché (majoration des prix), dont les effets compensent et au-delà ceux des subventions à la consommation, lesquelles font baisser les prix acquittés par les consommateurs.

Estimation du soutien aux services d’intérêt général (ESSG) : valeur monétaire annuelle des transferts bruts découlant des mesures qui créent des conditions propices au secteur agricole primaire, grâce au développement de services, institutions et infrastructures, privés ou publics, quels que soient leurs objectifs et leurs incidences sur la production et le revenu agricoles, ou sur la consommation de produits agricoles. L’ESSG inclut les mesures dont le secteur agricole primaire est le principal bénéficiaire, mais elle ne prend en compte aucun des paiements versés aux producteurs à titre individuel. Les transferts relevant de l’ESSG ne modifient pas directement les recettes perçues ou les coûts supportés par les producteurs, ni leurs dépenses de consommation. Les catégories entrant dans l’ESSG sont définies ci-dessous.

Estimation du soutien total (EST) : valeur monétaire annuelle de tous les transferts bruts des contribuables et des consommateurs découlant des mesures de soutien au secteur agricole, déduction faite des recettes budgétaires associées, quels que soient leurs objectifs et leurs incidences sur la production et le revenu agricoles, ou sur la consommation de produits agricoles.

Estimation du soutien budgétaire total (ESBT) : valeur monétaire annuelle de tous les transferts budgétaires bruts des contribuables découlant des mesures de soutien au secteur agricole, quels que soient leurs objectifs et leurs incidences sur la production et le revenu agricoles, ou sur la consommation de produits agricoles.

Recettes agricoles brutes (RAB) : Valeur monétaire annuelle de la production, augmentée des transferts budgétaires versés aux producteurs individuellement (autrement dit, VP + ESP – SPM).

Recettes brutes par produit : Valeur monétaire annuelle de la production d’un produit donné, augmentée des transferts budgétaires versés aux producteurs de ce produit (autrement dit, VP + TSP aux producteurs – SPM).

ESP en pourcentage (ESP en %) : transferts pris en compte dans l’ESP en proportion de la valeur des recettes agricoles brutes (le soutien étant inclus dans le dénominateur).

TSP en pourcentage (TSP en %) : transferts au titre d’un seul produit exprimés en proportion de la valeur des recettes agricoles brutes pour le produit considéré (le soutien étant inclus dans le dénominateur).

Part des TSP dans l’ESP totale (%) : part des transferts au titre d’un seul produit dans l’ESP totale. Cet indicateur est également calculé par produit.

Coefficient nominal de protection des producteurs (CNP des producteurs) : rapport entre le prix moyen perçu par les producteurs (au départ de l’exploitation), y compris les paiements par tonne effectivement produite, et le prix à la frontière (mesuré au départ de l’exploitation). Le CNP des producteurs est également calculé par produit.

Coefficient nominal de soutien aux producteurs (CNS aux producteurs) : rapport entre la valeur des recettes agricoles brutes, y compris le soutien et les recettes agricoles brutes (au départ de l’exploitation) évalués aux prix à la frontière (mesurés au départ de l’exploitation).

ESC en pourcentage (ESC en %) : transferts pris en compte dans l’ESC en proportion de la valeur des dépenses consacrées à la consommation de produits agricoles (aux prix au départ de l’exploitation), nets des transferts des contribuables aux consommateurs. L’ESC en % mesure la taxe implicite (ou subvention si l’ESC est positive) à laquelle les consommateurs sont soumis par les politiques des prix agricoles.

Coefficient nominal de protection des consommateurs (CNP des consommateurs) : rapport entre le prix moyen acquitté par les consommateurs (au départ de l’exploitation) et le prix à la frontière (mesuré au départ de l’exploitation). Le CNP des consommateurs est également calculé par produit.

Coefficient nominal de soutien aux consommateurs (CNS aux consommateurs) : rapport entre la valeur des dépenses consacrées à la consommation de produits agricoles (au départ de l’exploitation) et leur valeur aux prix à la frontière.

EST en pourcentage (EST en %) : transferts pris en compte dans l’EST, exprimés en pourcentage du PIB.

ESBT en pourcentage (ESBT en %) : transferts pris en compte dans l’ESBT, exprimés en pourcentage du PIB.

ESSG en pourcentage (ESSG en %) : part des dépenses affectées aux services d’intérêt général dans l’estimation du soutien total (EST).

Part des transferts pouvant créer le plus de distorsions dans l’ensemble des transferts bruts aux producteurs (%) : somme du SPM positif, de la valeur absolue du SPM négatif, des paiements au titre de la production et des paiements au titre de l’utilisation d’intrants sans contraintes sur ces derniers, rapportée à la somme du SPM positif, de la valeur absolue du SPM négatif et du total des paiements budgétaires aux producteurs.

Variation de l’ESP en pourcentage : variation en pourcentage de la valeur nominale de l’ESP exprimée en monnaie nationale. La variation en pourcentage est calculée sur les deux dernières années de la série.

Contribution du SPM aux variations de l’ESP : variation en pourcentage de l’ESP nominale, toutes les autres variables étant par ailleurs maintenues constantes.

Contribution de l’écart de prix aux variations de l’ESP : variation en pourcentage de l’ESP nominale, les variables, autres que l’écart entre prix intérieurs et prix à la frontière, étant par ailleurs maintenues constantes.

Contribution de la quantité produite aux variations en pourcentage de l’ESP : variation en pourcentage de l’ESP nominale, toutes les variables, autres que la quantité produite, étant par ailleurs maintenues constantes.

Contribution des paiements budgétaires (PB) aux variations en pourcentage de l’ESP : variation en pourcentage de l’ESP nominale, toutes les variables, autres que les PB, étant maintenues constantes.

Contribution des éléments constitutifs des PB aux variations en pourcentage de l’ESP : variation en pourcentage de l’ESP nominale, toutes les variables autres qu’un élément donné des PB, étant maintenues par ailleurs constantes. Les éléments des PB comprennent les paiements au titre de la production, les paiements au titre de l’utilisation d’intrants, les paiements au titre des S/Na/Rec/Rev courants, production requise, les paiements au titre des S/Na/Rec/Rev non courants, production requise, les paiements au titre des S/Na/Rec/Rev non courants, production facultative, les paiements selon des critères non liés à des produits de base et les paiements divers.

Variation en pourcentage du prix à la production : variation en pourcentage du prix à la production, mesuré au départ de l’exploitation, exprimé en monnaie nationale. La variation en pourcentage est calculée sur les deux dernières années de la série.

Variation en pourcentage du prix à la frontière : variation en pourcentage du prix à la frontière, mesuré au départ de l’exploitation, exprimé en monnaie nationale. La variation en pourcentage est calculée sur les deux dernières années de la série.

Contribution du taux de change à la variation en pourcentage du prix à la frontière : variation en pourcentage du prix à la frontière (mesuré à la sortie de l’exploitation), exprimé en monnaie nationale, toutes les variables, autres que le taux de change entre la monnaie nationale et l’USD, étant par ailleurs maintenues constantes.

Contribution du prix à la frontière exprimé en USD aux variations en pourcentage du prix à la frontière : variation en pourcentage du prix à la frontière, mesuré à la sortie de l’exploitation, exprimé en monnaie nationale, toutes les variables, autres que le prix à la frontière, mesuré à la sortie de l’exploitation et exprimé en USD, étant par ailleurs maintenues constantes.

Note : la variation de l’estimation du soutien aux producteurs (ESP) ne fait l’objet d’aucune décomposition lorsque l’ESP de l’année en cours et/ou précédente est négatif. La variation du prix à la production et la variation du prix à la frontière ne sont pas calculées lorsqu’un soutien des prix du marché (SPM) négatif et positif se produit au niveau des produits de base pour l'année précédente. Il convient de souligner que les estimations du SPM des produits de l’élevage peuvent être négatives en raison d’un SPM positif pour les aliments pour animaux.

  • Création de connaissances agricoles : dépenses budgétaires au titre des activités de recherche et développement (R-D) liées à l’agriculture, et de la diffusion des données correspondantes, indépendamment du cadre institutionnel (organisme privé ou public, ministère, université, centre de recherche ou groupe de producteurs) dans lequel elles se déroulent, et quelle que soit la nature de la recherche (scientifique, institutionnelle, etc.) ou sa finalité.

  • Transfert de connaissances agricoles : dépenses budgétaires au titre des établissements agricoles professionnels et des programmes agronomiques dans l’enseignement supérieur, des activités générales de formation et de conseil à l’intention des exploitants (règles de comptabilité, application de pesticides, etc.), excluant les cas individuels, et des réseaux constitués pour rassembler des données et diffuser des informations concernant la production et la commercialisation agricoles.

  • Sécurité et inspection des produits agricoles : dépenses budgétaires au titre d’activités qui se rapportent à la sécurité et à l’inspection des produits agricoles. Seules sont visées les dépenses concernant l’inspection des produits obtenus dans le pays au premier niveau de transformation et l’inspection à la frontière des produits exportés.

  • Lutte contre les parasites et les maladies : dépenses budgétaires au titre de la lutte contre les parasites et les maladies concernant les intrants et les produits agricoles (contrôle au niveau du secteur agricole primaire), et financement public des services vétérinaires et phytosanitaires (concernant les exploitations).

  • Contrôle des intrants : dépenses budgétaires au titre des organismes qui exercent des activités de contrôle et de certification concernant les intrants industriels utilisés en agriculture (machines, engrais industriels, pesticides, etc.), ainsi que les intrants biologiques (certification et contrôle des semences, par exemple).

  • Infrastructures hydrauliques : dépenses budgétaires au titre des investissements publics dans les infrastructures hydrauliques (réseaux d’irrigation et de drainage).

  • Stockage, commercialisation et autres infrastructures physiques : dépenses budgétaires au titre des investissements liés au stockage hors exploitation et de divers équipements et infrastructures de marché liés à la manutention et à la commercialisation des produits agricoles primaires (silos, installations portuaires telles que les quais et entrepôts ; marchés de gros, marchés à terme), et autres infrastructures physiques touchant à l’agriculture, dont ce secteur est le principal bénéficiaire.

  • Infrastructure institutionnelle : dépenses budgétaires au titre des investissements liés à la mise en place et à la gestion de l’infrastructure institutionnelle touchant au secteur agricole (cadastres ; groupes d’utilisateurs de machines, registres de semences et d’espèces ; constitution de réseaux de financement rural ; soutien aux organisations agricoles, etc.).

  • Restructuration des exploitations agricoles : paiements budgétaires touchant à la réforme des structures agricoles, au titre des stratégies d’entrée, de sortie ou de diversification (en dehors de l’agriculture).

  • Programmes collectifs de transformation et commercialisation : dépenses budgétaires au titre des investissements consacrés à des dispositifs et équipements collectifs de transformation, principalement au premier niveau, et de commercialisation, en vue d’améliorer les conditions de développement des marchés pour l’agriculture.

  • Promotion des produits agricoles : dépenses budgétaires concernant l’assistance à la promotion collective des produits agroalimentaires (campagnes de promotion et participation à des foires internationales, entre autres exemples).

  • Stockage public : dépenses budgétaires couvrant les coûts d’entreposage, de dépréciation et d’écoulement des stocks publics de produits agricoles.

  • Divers : dépenses budgétaires au titre d’autres services d’intérêt général qu’il n’est pas possible de ventiler et d’affecter à l’une des catégories ci-dessus, souvent parce que les informations font défaut.

Des informations plus détaillées sur la conception, le calcul, l’interprétation et l’utilisation des indicateurs se rapportant à l’estimation du soutien aux producteurs sont données dans le manuel de l’ESP consultable sur le site web public de l’OCDE (http://www.oecd.org/agriculture/topics/agricultural-policy-monitoring-and-evaluation/documents/producer-support-estimates-manual.pdf).

Notes

← 1. Ce rapport ne contient pas de chapitre par pays sur la Fédération de Russie, laquelle n’apparaît pas non plus dans les tableaux des indicateurs de soutien présentés dans l’annexe statistique. En revanche, les données agrégées relatives aux 11 économies émergentes et à l’ensemble des 54 pays examinés dans ce rapport continuent d'inclure celles de la Russie.

← 2. Les évolutions des productions végétales sont exprimées sur la base des campagnes culturales.

← 3. L’Initiative sur le transport sécurisé de céréales et de denrées alimentaires à partir des ports ukrainiens, également appelée Initiative céréalière de la mer Noire, est un accord conclu entre la Russie et l’Ukraine, sous l’égide de la Türkiye et des Nations Unies, qui met en place des procédures pour exporter en toute sécurité des céréales depuis certains ports ukrainiens, après que la Russie ait bloqué ces exportations suite à son invasion de l’Ukraine. L'accord a été signé à l’origine en juillet 2022 pour une période de 120 jours, puis renouvelé plusieurs fois. Il n’a cependant pas été reconduit lorsqu’il est arrivé à expiration le 17 juillet 2023, à l’issue de son troisième renouvellement.

← 4. Il s'agit du montant total des recettes agricoles brutes, exprimé en USD courants.

← 5. Les différences observées au niveau des niveaux de soutien accordés dans les États membres de l’UE ne figurent pas dans la base de données de l’OCDE (2023), « Estimations du soutien aux producteurs et aux consommateurs », Statistiques agricoles de l’OCDE https://doi.org/10.1787/agr-pcse-data-en.

← 6. Inclut 15 pays.

← 7. Inclut les 27 membres actuels de l’UE pour l’ensemble de la période (trois ans). Le Royaume-Uni y est inclus pour 2020 seulement.

← 8. Une analyse complémentaire doit être menée à propos des conséquences du SPM pour l’environnement lorsqu’il existe des limitations de la production.

← 9. Les transferts aux producteurs au titre d’un seul produit (TSP aux producteurs) correspondent à la valeur monétaire annuelle des transferts bruts des consommateurs et des contribuables aux producteurs agricoles découlant des mesures liées à la production d’un produit particulier et subordonnant le versement du paiement au producteur à la production du produit désigné. Dans cet exemple, les transferts correspondent à la valeur monétaire des transferts bruts des producteurs indiens de blé aux consommateurs et aux contribuables découlant des mesures prises concernant la production de blé. Les TSP aux producteurs sont mesurés au départ de l’exploitation.

← 10. Le coût du stockage public correspond aux dépenses de stockage ou d'écoulement des produits agricoles, ainsi qu’aux coûts liés à leur dépréciation.

← 11. OCDE (2022[19]), Déclaration sur des solutions transformatrices pour des systèmes agricoles et alimentaires durables, OECD/LEGAL/0483, https://legalinstruments.oecd.org/en/instruments/OECD-LEGAL-0483.

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