Résumé

La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a mis à mal le fort rebond économique enregistré par les Pays-Bas après la pandémie de COVID-19. Le coût de la vie a augmenté sous l’effet de la hausse rapide des prix de l’énergie. Les pouvoirs publics sont rapidement intervenus pour soutenir les ménages et les entreprises, mais les mesures prises en contexte de crise devraient à présent être abandonnées progressivement au profit de considérations de durabilité à plus long terme.

Le PIB avait dépassé son niveau d’avant la crise à la mi-2021, soit plus tôt que dans la plupart des économies de l’OCDE (Graphique ). En 2022, la croissance du PIB, à 4.5 %, est restée vigoureuse malgré un ralentissement à partir du deuxième semestre attribuable à la hausse des prix de l’énergie, au recul de la confiance des producteurs et au ralentissement des échanges mondiaux. Au premier trimestre de 2023, le PIB s’est contracté, sur fond de baisse des exportations et de diminution des stocks de gaz.

Les pénuries d’approvisionnement ont entraîné une hausse de l’inflation à partir de la mi-2021, comme dans la plupart des pays de l’OCDE, et celle-ci a été ensuite accentuée par la flambée des prix de l’énergie consécutive à l’invasion de l’Ukraine par la Russie au début de 2022. Les prix élevés de l’énergie constituent le principal déterminant de l’inflation en 2022, mais les prix d’autres biens et services ont également augmenté. Les prix de l’énergie ont depuis reculé, mais l’inflation sous-jacente reste forte.

La croissance sera soutenue par la consommation privée, mais devrait se modérer avec la baisse de l’investissement privé (Tableau ). L’inflation devrait rester supérieure à l’objectif de 2 % retenu pour la zone euro, mais elle refluera progressivement sous l’effet du plafonnement des prix nationaux de l’énergie et du durcissement des conditions monétaires, même si la suppression du plafonnement des prix pourrait accentuer les tensions inflationnistes au début de 2024. Des risques pèsent toutefois sur les perspectives, sachant que la hausse rapide des taux d’intérêt pourrait accroître les vulnérabilités financières.

Le secteur financier n’a donné jusqu’à présent que peu de signes de tensions, mais une hausse des taux d’intérêt pourrait entraîner une augmentation des pertes sur prêts. En moyenne, la dette hypothécaire des ménages néerlandais est élevée. Bien qu’environ 75 % des prêts soient accordés pour une durée supérieure à cinq ans et assortis d’un taux fixe, les ménages pourraient tout de même avoir du mal à assurer le service de leur dette hypothécaire si la forte inflation continue d’éroder les revenus réels. Les primo-accédants récents ont emprunté des montants importants en proportion de leur revenu du fait de la forte augmentation des prix des logements au cours des dernières années. La quotité de financement (ratio prêt/valeur du bien), fixée à 100 %, reste élevée en comparaison internationale.

La solidité de la situation budgétaire a permis aux pouvoirs publics d’apporter un soutien considérable aux ménages et aux entreprises (Graphique 2). Les autorités ont mis en place un train de mesures en faveur du pouvoir d’achat combinant d’une part des versements forfaitaires ciblés et temporaires destinés à aider à faire face à la hausse des coûts de l’énergie, et d’autre part des mesures structurelles telles que relèvement du salaire minimum et prestations sociales ; les ménages et autres petits consommateurs bénéficieront également d’un plafonnement des prix de l’énergie en 2023. Ce soutien exceptionnel dépasse les plafonds de dépenses annuels définis dans le cadre de politique budgétaire tendancielle des Pays-Bas. Compte tenu des tensions budgétaires liées au vieillissement démographique et de la hausse des taux d’intérêt, les autorités budgétaires doivent s’attacher à rendre le système fiscal plus efficient et hiérarchiser les besoins de dépenses afin de favoriser la viabilité de la dette à long terme.

Le vieillissement de la population, l’atonie de la croissance de la productivité et la faiblesse de l’investissement entament le potentiel de croissance du pays. S’établissant à environ un quart de la moyenne de l’OCDE, la croissance annuelle moyenne de la productivité a été faible au cours de la dernière décennie. Le système fiscal, complexe, incite à l’endettement, favorise les investissements non liquides et les formes d’emploi atypiques, pesant de ce fait sur la productivité, et accentue les inégalités de patrimoine. Pour renforcer la croissance durable, les Pays-Bas doivent en outre accroître leur indépendance à l’égard des combustibles fossiles et promouvoir la transition écologique.

Le système fiscal est complexe et fausse la prise de décisions en matière d’investissement et d’emploi. Les logements occupés par leurs propriétaires bénéficient d’un traitement fiscal plus favorable que les logements locatifs et autres investissements. Les taux réduits d’imposition du revenu et de cotisations sociales des travailleurs indépendants incitent les employeurs à recourir à des formes d’emploi atypiques. La complexité des régimes de prestations liées au revenu dissuade les individus d’entrer sur le marché du travail et de travailler davantage, par crainte de perdre leurs droits aux prestations. Les effets d’interaction entre l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu du capital des personnes physiques qui détiennent au moins 5 % des actions d’une société ne favorisent pas la distribution des bénéfices, ceux-ci étant imposables uniquement au niveau de l’entreprise et pouvant bénéficier d’un taux réduit à concurrence de 200 000 EUR. Un tel système d’IS entrave le développement des entreprises et les incite plutôt à se scinder en unités plus petites, ce qui pèse sur la productivité globale.

Les Pays-Bas ne seront sans doute pas en mesure d’atteindre leur objectif national de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030. Pour parvenir à réduire les émissions de 55 % par rapport à leur niveau de 1990, les pouvoirs publics néerlandais s’attachent à accroître la diminution des émissions dans l’ensemble des secteurs, en particulier dans ceux de l’électricité et de l’industrie (Graphique 3), en augmentant le recours aux énergies renouvelables. Malgré des améliorations, les Pays-Bas restent fortement tributaires des combustibles fossiles ; ceux-ci bénéficient d’exonérations fiscales et de taux préférentiels, ce qui leur confère un avantage en matière de prix par rapport aux technologies bas carbone. Les financements publics ne sont pas explicitement dirigés vers la recherche fondamentale visant la mise au point d’innovations vertes. Ne disposant pas de stratégie d’action globale à plus long terme au-delà de 2030, les Pays-Bas risquent de devoir opérer un arbitrage entre gains à court terme (jusqu’en 2030) et efficience à long terme.

Le marché du travail est vigoureux, mais les pénuries de main-d’œuvre pèsent sur les perspectives de croissance. La rapidité sans précédent de la reprise après la pandémie a créé des tensions d’un niveau inédit sur le marché du travail (Graphique ), accentuant une contraction de la population d’âge actif due au vieillissement démographique que les innovations génératrices d’économies de main-d’œuvre ne suffiront pas à compenser.

L’évolution rapide de la demande de compétences, le faible nombre d’heures travaillées et la segmentation du marché du travail sont autant de facteurs qui accentuent les tensions. Quelque 28 000 emplois techniques doivent être créés et pourvus pour qu’il soit possible d’atteindre les objectifs climatiques du pays à l’horizon 2030, soit plus que le nombre total actuel d’emplois recensés dans le secteur de l’énergie. L’incidence du travail à temps partiel est la plus élevée de l’OCDE, sachant que trois femmes sur quatre et un homme sur quatre travaillent moins de 35 heures par semaine. Les 1.7 million de travailleurs sous contrat flexible ayant des perspectives de carrière limitées ne sont guère incités à travailler davantage.

Les besoins de formation étant considérables, il convient d’instaurer une culture favorisant davantage l’apprentissage tout au long de la vie. Les dépenses publiques annuelles totales consacrées à la formation sont inférieures de 1.5 à 1.75 milliard EUR aux besoins estimés. Les dépenses d’activation sont élevées, mais la part consacrée à la formation est faible (Graphique ). Le budget alloué au programme de comptes de formation individuels mis en place en 2021 (STAP, Stimulans ArbeidsmarktPositie) est trop modeste, ne donne pas la priorité aux domaines dans lesquels il existe des pénuries de compétences et n’incite pas les employeurs à co-financer les formations.

L’accès aux services de garde d’enfants est insuffisant, alors que s’occuper d’un enfant est la principale raison du recours au temps partiel. L’insuffisance de l’offre et la faible accessibilité financière de ces services expliquent pour beaucoup la répartition inégale du travail à temps partiel et les inégalités de genre qui en découlent. Bien qu’urgente, la mise en œuvre de la réforme visant à rendre les services de garde d’enfants gratuits pour tous les parents qui travaillent est délicate, dans la mesure elle entraînera probablement une forte augmentation de la demande et une aggravation des pénuries de personnel à court terme. La suppression du lien entre le montant de l’allocation de garde d’enfants et le nombre d’heures travaillées affaiblit les incitations au travail.

L’intégration et le système d’immigration n’ont que peu permis de répondre aux besoins nouveaux du marché du travail. Sur le marché du travail, la situation des personnes nées à l’étranger est moins bonne que celle des personnes nées aux Pays-Bas. Aucun dispositif migratoire ne cible spécifiquement les travailleurs moyennement qualifiés, malgré l’importance de leur rôle dans la transition écologique. L’embauche d’immigrés originaires de pays non membres de l’UE est soumise au principe d’opposabilité de la situation de l’emploi, même pour les métiers dits « en tension ».

L’enseignement professionnel n’attire pas les étudiants, alors même qu’il est susceptible de les doter de compétences très demandées. Les filières préprofessionnelles font face à une baisse des inscriptions et à un problème d’image. Aucune mesure financière n’incite les établissements scolaires à proposer des programmes transfilières ou à promouvoir la mobilité entre les filières. L’existence d’un trop grand nombre de filières préprofessionnelles complique les choix des élèves et de leurs parents.

Les villes et les établissements scolaires défavorisés sont en proie à de graves pénuries d’enseignants, et les inégalités en matière d’éducation sont marquées. La proportion d’élèves obtenant des résultats médiocres est passée de 14 % à 24 % en dix ans. Alors qu’un tiers des élèves néerlandais fréquentent des établissements en manque d’enseignants, l’enseignement dans les écoles où les pénuries sont importantes n’est pas récompensé par des incitations supplémentaires.

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