Résumé

Le Viet Nam a connu une reprise rapide après la récession causée par la pandémie, grâce à la prompte réaction des pouvoirs publics. La pandémie de COVID-19 est venue interrompre trois décennies de croissance économique vigoureuse. Toutefois, grâce à des mesures sanitaires rapides et adaptées, le Viet Nam n'a pas connu de vague de contaminations à grande échelle jusqu’à la mi-2021. Ensuite, la campagne de vaccination a été prestement menée. Pendant toute la pandémie, la croissance y a été supérieure à celle observée dans la plupart des autres économies d'Asie du Sud-Est, offrant ainsi une base solide pour la poursuite des progrès économiques. Le Viet Nam est une économie de marché à orientation socialiste. Avec la Stratégie de développement socio-économique pour 2021-2030, les autorités se sont engagées à poursuivre des réformes économiques audacieuses pour parvenir au statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure.

Néanmoins, des facteurs extérieurs menacent la reprise. Sa participation active aux échanges mondiaux constitue l’une des sources de la prospérité du Viet Nam (Graphique 1), mais du coup, le pays se trouve exposé à toute variation brutale des conditions extérieures. Les incertitudes géopolitiques pèsent sur ses perspectives économiques à court terme.

La croissance devrait être robuste, mais il existe d'importants risques de révision à la baisse des prévisions (Tableau 1). La demande intérieure devrait poursuivre son redressement à mesure que les restrictions sanitaires vont être levées. La croissance du PIB réel devrait s’établir à 6.5 % en 2023 et, poursuivre sur le même rythme, à 6.6 % en 2024. Les perturbations des chaînes d'approvisionnement pourraient continuer d’entraver les échanges mondiaux. Parmi les risques de dégradation par rapport aux prévisions, on peut citer une inflation qui atteindrait des niveaux inattendus, avec un durcissement rapide de la politique monétaire en réponse aux tensions inflationnistes ou à des pressions à la baisse sur le taux de change. En revanche, les investisseurs pourraient aussi en venir à apprécier de plus en plus la stabilité du climat d'investissement au Viet Nam dans un contexte d'accroissement des incertitudes mondiales.

L’inflation grimpe en raison de l’augmentation des prix de l’énergie et des matières premières. La normalisation de la politique monétaire dans les économies avancées a eu pour effet de creuser les écarts de taux d’intérêt, alimentant encore l'inflation au Viet Nam en exerçant des pressions à la baisse sur le taux de change. Cette évolution a pour effet d'éroder le pouvoir d’achat des ménages, contrant ainsi la reprise naissante de la consommation privée et faisant augmenter les risques de pauvreté pour les ménages vulnérables.

La politique monétaire devra être resserrée plus rapidement si l'inflation accélère plus vite qu’on ne l’anticipe. Malgré l’incertitude très forte qui entoure les perspectives de l’inflation, l’objectif principal devrait être le maintien de la stabilité des prix. Repousser le moment de mettre fin progressivement à l’orientation très accommodante de la politique risquerait de conforter une hausse des anticipations d’inflation.

La marge de manœuvre budgétaire pourrait être utilisée pour fournir des aides supplémentaires afin d’atténuer l’impact de la hausse du coût de la vie sur les catégories vulnérables. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les taxes sur les combustibles fossiles ont déjà été temporairement abaissées. Des aides supplémentaires mais mieux ciblées pourraient être nécessaires si les risques de dégradation par rapport aux prévisions devaient se concrétiser. Les investissements publics annoncés dans le dernier train de mesures de relance du début de 2022 devraient être réalisés comme prévu. Une simplification des procédures et de la réglementation des investissements publics permettrait d'accélérer les décaissements correspondants.

Avec le vieillissement rapide de la population du Viet Nam, il devient de plus en plus indispensable de renforcer la protection sociale. D’ici 2050, le taux de dépendance des personnes âgées passera de son niveau actuel de 11 % à 33 %, devenant ainsi l’un des plus élevés de toute l’Asie du Sud-Est. Les aides publiques en direction des seniors devraient donc être encore renforcées.

Le rôle de la protection sociale devrait être renforcé. Le pays a fait évoluer son système de protection sociale généralisée. L’assurance maladie couvre désormais quasiment 90 % de la population. Pendant la pandémie, l'assurance chômage a fait office de stabilisateur automatique. Cependant, le régime de retraite public ne concerne qu’un tiers de la population active (Graphique 2), et les insuffisances de couverture sont largement liées au statut d’emploi. Il est indispensable de s’attaquer à l’emploi informel pour résoudre le problème de la participation limitée des petites entreprises aux cotisations de sécurité sociale. Par ailleurs, il faut renforcer la viabilité du régime public de retraite. C’est pourquoi il est tout à fait impératif de restreindre les retraits anticipés. Les filets de protection sociale vieillesse destinés aux travailleurs indépendants, qui représentent la moitié du total de l’emploi mais ne sont pas couverts par le régime public de retraite obligatoire, devraient aussi être améliorés en élargissant l’actuel système de pensions sociales financé par des recettes fiscales.

Il faut augmenter les recettes budgétaires pour pouvoir financer la hausse des dépenses. En plus du vieillissement de la population, les dépenses publiques vont aussi continuer de croître du fait d'autres besoins, notamment s’agissant d’investissements dans les transports, le numérique et les infrastructures vertes. Un plan budgétaire concret à moyen terme sera nécessaire. Il faudrait abaisser les déductions et exonérations au titre des impôts sur les sociétés et sur le revenu des personnes physiques, et définir plus étroitement l'assiette du taux réduit de TVA. De plus, la taxe sur les terres non agricoles devrait être remplacée par un impôt récurrent sur les terrains et le bâti.

Il est fondamental d'accroître la productivité du travail pour asseoir durablement une croissance économique forte. Entre 1990 et 2019, l’économie a constamment affiché un niveau de croissance annuelle moyenne relativement élevé, à 7 %, grâce à une accumulation rapide du capital et à une ample offre de main-d’œuvre en provenance des régions rurales. Ce modèle de croissance va se révéler difficile à maintenir sur la durée une fois la transition d'une économie agraire à une économie industrielle pleinement achevée, et sur fond de ralentissement de l’augmentation de la main-d’œuvre. Les sources de croissance devraient donc être trouvées dans les technologies avancées et dans l’amélioration de l’efficience économique. Pour y parvenir, il est indispensable de rétablir la dynamique de marché en continuant de simplifier les procédures administratives.

Assurer des règles du jeu équitables est aussi essentiel à l'amélioration du climat des affaires. Grâce aux réformes de grande ampleur mises en œuvre au cours des dernières décennies, le Viet Nam est l’un des marchés les plus ouverts de l’Asie du Sud-Est, et a su attirer un montant considérable d'investissement étranger. Les restrictions à la concurrence sont plus faibles que dans d'autres économies de marché émergentes, mais des marges d'amélioration existent (Graphique 3). En particulier, la participation de l'État reste importante dans certains secteurs où les entreprises publiques dominent, notamment l’énergie, le transport et les télécommunications. En plus de la réduction des obstacles à l’entrée, il est urgent de redoubler d’efforts pour améliorer la gouvernance des entreprises publiques. Par ailleurs, il faudrait donner à l’autorité de la concurrence davantage de pouvoir pour offrir à tous les participants du marché, entreprises publiques comprises, des règles du jeu équitables. Il est en outre essentiel de poursuivre les efforts destinés à lutter contre la corruption pour améliorer encore le climat général des affaires.

Le Viet Nam est l’un des champions de la transformation numérique en Asie du Sud-Est. Les outils numériques se sont rapidement généralisés, et l’adoption des technologies numériques comme le commerce électronique, la télémédecine ou le télétravail s’est accélérée pendant la pandémie. Le Viet Nam est un vivier de start-ups du numérique, et compte trois licornes dans ce secteur (start-ups privées valorisées à plus de 1 milliard USD). Néanmoins, il existe encore une marge d’amélioration.

Les infrastructures numériques y sont certes plus développées que dans d'autres pays d’Asie du Sud-Est, mais restent encore insuffisantes. Investir dans des infrastructures de haute qualité, comme la fibre optique, permettra d'accélérer l’adoption et la diffusion de technologies numériques avancées. En particulier, il est indispensable de libéraliser davantage le marché des télécommunications pour stimuler l’investissement.

Pour accélérer la transition numérique, le Viet Nam doit améliorer l’environnement propice à une telle évolution. Comme dans bien d'autres pays, la généralisation du numérique transforme toutes les facettes de l’économie. Les pouvoirs publics ont rapidement proposé des services en ligne, comme pour les douanes par exemple, et les paiements numériques et dématérialisés sont devenus plus courants. Pour favoriser encore la généralisation du numérique, il faut allouer davantage de ressources à l’enseignement et à la formation techniques et professionnels ainsi qu’à la formation sur le lieu de travail de façon à promouvoir les compétences et les talents numériques. Diverses réglementations, notamment celles qui concernent les flux de données transfrontières, devraient être assouplies, tandis que la protection de la vie privée et la cybersécurité devraient être renforcées. Ces réformes s'avèrent par ailleurs primordiales pour accroître la complexité de la production et renforcer ce faisant l'intégration du Viet Nam dans l'économie mondiale.

Les autorités se sont engagées à atteindre la neutralité en gaz à effet de serre d'ici à 2050. Cependant, la forte croissance économique passée s’appuyait sur une hausse de la consommation d’énergie, principalement issue de combustibles fossiles. Or, la part de l’hydroélectricité est actuellement en recul, si bien que le charbon reste la principale source d’électricité. De ce fait, les émissions de carbone augmentent rapidement. Il est indispensable de réduire la forte intensité en émissions de la production pour pouvoir à la fois atteindre la neutralité en gaz à effet de serre et assurer une forte croissance économique (Graphique 4).

Un vaste programme s’impose pour assurer la transition vers une économie bas carbone. Afin de placer tous les secteurs économiques sur une trajectoire bas carbone, il est nécessaire de préparer une stratégie climatique à long terme qui soit à la fois claire et prévisible. Une telle stratégie devra inclure une réforme du secteur de l’énergie, indispensable pour développer l’investissement dans les renouvelables. Tous les combustibles fossiles sont désormais assujettis à la taxe pour la protection de l’environnement, mais il s’avère difficile de prendre en compte l’intégralité des coûts sociaux du carbone. Il faudrait y remédier pour influencer plus explicitement les modes de consommation des ménages comme des entreprises. La mise en place prévue d'un marché du carbone devrait être accélérée pour encourager l’investissement dans les énergies renouvelables dans le secteur de l’électricité. L'adoption d'une taxonomie verte pourrait aussi contribuer à réorienter les ressources financières vers les investissements bas carbone.

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