7. L’inclusion et la participation des groupes sous-représentés en Tunisie

La prise en compte des groupes sous-représentés et marginalisés revêt un caractère essentiel dans la mise en place d’un espace civique promu et protégé, indispensable à une participation citoyenne inclusive et à un gouvernement ouvert. La disposition 9 de la Recommandation de l’OCDE pour un gouvernement ouvert appelle ainsi les États adhérents à « consentir un effort particulier pour toucher les groupes sociaux les plus concernés, vulnérables, sous-représentés ou marginalisés » (OCDE, 2017[1]). Cependant, en 2019, le Partenariat pour un Gouvernement Ouvert (PGO) indiquait que seuls 2 % des engagements pris par ses membres au niveau national et local comprenaient des dispositions spécifiques aux femmes ou au genre (Partenariat pour un gouvernement ouvert, s.d.[2]).

La question de l’inclusion des groupes sous-représentés dans la vie publique et de la possible discrimination envers eux est profondément transversale et affecte chacun des quatre piliers de l’espace civique identifiés par l’OCDE (OCDE, 2020[3]). En effet, si certains segments de la société sont victimes de discrimination, cela peut limiter l’exercice de leurs droits et libertés publics, leur participation à la vie publique, ainsi que leur capacité à fonder des associations et à accéder aux médias de manière égale aux autres citoyens.

Ce chapitre se propose donc d’analyser brièvement le cadre légal et les pratiques favorisant ou compromettant l’inclusion de certains groupes, et notamment les femmes, les minorités religieuses, sexuelles, raciales et ethniques, ainsi que les personnes handicapées.

De manière générale, il convient de rappeler que la Constitution de 2014 prévoit à l’article 21 que tous les citoyens ont les mêmes droits et sont égaux devant la loi sans discrimination, sans pour autant préciser sur quoi cette discrimination pourrait être fondée (République tunisienne, 2014[4]). En outre, bien qu’il existe des textes légaux relatifs à la protection de certains groupes, la Tunisie gagnerait à mettre en place une législation globale contre la discrimination couvrant toutes les formes et tous les secteurs. Des données désagrégées font également parfois défaut, compliquant les analyses.

Bien qu’il ne s’agisse pas d’une minorité d’un point de vue numérique, les femmes ont traditionnellement, en Tunisie comme partout dans le monde, plus de difficultés par rapport aux hommes à participer à la vie publique, à la prise de décision et à faire entendre leur voix.

La condition des femmes en Tunisie a fait l’objet de nombreux débats et analyses (Chekir, 2016[5] ; Manaï, 2020[6]). Cela est en partie dû au fait que le pays est depuis longtemps considéré comme le plus avancé de la région MENA en matière d’égalité des sexes, ayant mené « un long processus d’élimination de la discrimination à l’égard des femmes » (Conseil des droits de l'homme, 2013[7]). Ce processus remonte à la promulgation, par le président Habib Bourguiba, du Code du statut personnel en 1956, peu après l’indépendance, qui a aboli de nombreuses pratiques discriminatoires à l’égard des femmes – telles que la polygamie et la répudiation –, a institué le mariage civil avec le consentement explicite des deux époux, et a donné aux hommes et aux femmes un accès égal au divorce devant les tribunaux (République tunisienne, 1956[8]).

Cette démarche, qui faisait partie intégrante de la vision de Bourguiba d’un pays « moderne », a été suivie par d’autres initiatives historiques, telles que l’octroi aux femmes du droit de voter et de se porter candidates aux élections, ou encore de celui d’ouvrir un compte en banque et de créer une entreprise sans l’autorisation de l’époux, le lancement du planning familial dans les années 60 ou encore la légalisation de l’avortement en 1973. Le président Ben Ali a poursuivi cette politique que certains experts ont qualifiée de « féminisme d’État » (Jomier, 2021[9]), notamment en créant un ministère des Affaires de la femme et de la famille en 1993, en harmonisant l’âge minimum légal du mariage à 18 ans pour les hommes et les femmes, et en permettant aux femmes de transmettre leur nationalité à leurs enfants.

Plus récemment, les femmes ont joué un rôle important dans les mouvements ayant provoqué la chute du régime de Ben Ali. Quant à la Constitution de 2014, elle « garantit l’égalité des chances entre l’homme et la femme pour l’accès aux diverses responsabilités et dans tous les domaines », engageant l’État à « consacrer la parité entre la femme et l’homme dans les assemblées élues » et à prendre « les mesures nécessaires en vue d’éliminer la violence contre la femme » (article 46) (République tunisienne, 2014[4]).L’abolition, en 2017, de l’interdiction pour les femmes musulmanes d’épouser un homme d’une autre religion compte parmi les avancées plus récentes en matière d’égalité de genre.

Ce cadre légal et ces politiques publiques ont permis des améliorations indéniables pour la condition des femmes en Tunisie, comme le confirment les entretiens menés pour ce scan.1 Cependant, certaines militantes soulignent aujourd’hui l’ambiguïté et les limites de cette émancipation féminine dirigée par le haut et dans un contexte politique longtemps autoritaire.

Si une analyse approfondie de la situation actuelle des femmes en Tunisie outrepasserait le cadre de ce scan, quelques données peuvent aider à comprendre le contexte. Selon le rapport Global Gender Gap 2021 du Forum économique mondial, la Tunisie se classe au 126e rang sur 156 pays (World Economic Forum, 2021[10]). Les sous-indicateurs montrent que le pays est proche d’avoir éliminé les différences entre hommes et femmes dans les domaines de la santé et de l’éducation, ayant par exemple plus de filles que de garçons inscrits aux écoles primaires et secondaires, ainsi que dans l’enseignement supérieur (voir Graphique ‎7.1). En revanche, des différences importantes existent dans les domaines économiques et politiques, avec seulement 28.1 % de femmes employées, d’importantes inégalités de revenus et moins de 30 % de femmes dans les institutions du pouvoir public, selon le même rapport (World Economic Forum, 2021[10]).

En particulier, l’ARP comporte seulement 26 % de députées femmes à la suite des élections de 2019 (IPU Parline, 2021[11]). Lors des élections législatives de 2019, seuls 14 % des listes avaient à leur tête une femme (ATFD, 2020[12]). Quant aux ministres femmes, leur nombre évolue à chaque remaniement, mais elles représentent 38 % du nombre total des ministres au moment de la publication de ce rapport, dont une femme cheffe du gouvernement, pour la première fois en Tunisie et dans le monde arabe. Cependant, le remaniement précédent de janvier 2021 (jamais mis en œuvre à cause de la crise institutionnelle entre le Parlement et le président de la République) avait abouti au limogeage de quatre des huit femmes présentes au sein du gouvernement (entre ministres et secrétaires d’État), les remplaçant par quatre hommes et réduisant ainsi la proportion de ministres femmes à 29 %, la plupart d’entre elles occupant des positions généralement considérées comme moins importantes (Lakani, 2021[13]). En revanche, le Code électoral adopté en 2014 (République tunisienne, 2014[14]), qui prévoit la parité tant verticale (une alternance homme-femme sur les listes électorales) qu’horizontale (au niveau des têtes de liste) aux élections municipales et régionales, a permis une avancée certaine de la représentation des femmes aux élections municipales de mai 2018.2 Les femmes ont alors obtenu 47 % des sièges au sein des conseils municipaux (ONU Femmes, 2018[15]).

En plus des limites à la participation politique des femmes évoquées plus haut, la violence à l’égard des femmes, dans l’espace public comme dans l’espace privé, représente, en Tunisie comme dans de nombreux pays, un défi important à leur accès à l’espace civique. Ainsi, une enquête sur la violence fondée sur le genre dans l’espace public en Tunisie, menée en 2016 par le Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (Credif), indique que 53.5 % des femmes ont été victimes de violences, en particulier 78.1 % ont rapporté des violences psychologiques, 75.4 % des violences sexuelles et 41.2 % des violences physiques (Credif, 2016[16]). Dans ce domaine, la Tunisie s’est dotée de la loi n° 2017-58 du 11 août 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, entrée en vigueur en février 2018, année au cours de laquelle a également été créé l’Observatoire national de lutte contre la violence à l’égard des femmes (République tunisienne, 2017[17]). Cette loi inclut des éléments fortement innovateurs pour la Tunisie car, entre autres, elle permet aux victimes l’obtention d’une ordonnance d’éloignement en cas de violences conjugales (chapitre IV), elle inclut les violences économiques et politiques (article 3), élimine la possibilité pour le violeur d’échapper aux poursuites s’il épouse sa victime (article 15, qui abroge l’article 227 du Code pénal), reconnaît le viol non seulement sur les femmes mais aussi sur les hommes (article 15, qui insère un nouvel article 227 dans le Code pénal) et élargit la notion de harcèlement sexuel (article 15, qui ajoute un nouvel article 226 ter dans le Code pénal) (République tunisienne, 2017[17]). Le ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Personnes âgées a par ailleurs mis en place un site Internet (www.contre-violences-femmes-tunisie.com) dédié à la question, et visant à sensibiliser le public à la problématique de l’égalité entre les genres et aux violences faites aux femmes, notamment à travers la définition de concepts et du cadre légal sous forme de courtes vidéos, ainsi que par la présentation de données statistiques (Ministère de la Femme, de la Famille, de l'Enfance et des Seniors, s.d.[18]). Ce site Internet renvoie également à plusieurs autres plateformes et applications permettant de signaler des faits de violence, ainsi qu’à des supports et guides éducatifs sur la manière de lutter contre la violence à l’égard des femmes.

Les entretiens ainsi qu’une étude menée en 2021 par l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) portant sur l’accès à la justice des femmes victimes de violences ont cependant mis en avant que les dispositions légales de la loi n° 2017-58 pourraient être mieux appliquées au sein des tribunaux, en dépit notamment de la persistance d’une certaine culture et de stéréotypes parmi certains juges (ATFD, 2021[19]). La question du droit successoral, qui demeure discriminatoire à l’égard des femmes en Tunisie, fait également l’objet de plusieurs débats et polémiques. Le Code du statut personnel reprend le principe selon lequel l’héritier de sexe masculin obtient une part double de celle attribuée à un héritier de sexe féminin,3 en ligne avec le droit musulman traditionnel. Ces dispositions n’ont pas encore pu être réformées malgré des propositions dans ce sens, y compris de l’ancien président Béji Caïd Essebsi (Business News, 2017[20] ; Belkaïd, 2019[21]).

Ce contexte général, dans lequel des textes légaux égalitaires et des avancées majeures coexistent avec des défis importants, a un impact sur la manière dont les femmes se rapportent aux quatre piliers de l’espace civique. Concernant la participation, l’enquête du Credif citée précédemment a montré que 56.3 % des femmes demandent l’autorisation à leur famille, et 59 % des femmes mariées à leur mari, pour avoir accès à l’espace public (c’est-à-dire pour sortir de leur maison) (Credif, 2016[16]). Selon la même étude, « la vie politique et associative demeure une affaire d’hommes » car seuls 4.5 % et 2.5 % des femmes interrogées dans le cadre de l’enquête sont actives dans la société civile et dans les partis politiques respectivement, et seuls 9 % ont déclaré avoir participé à des manifestations.

Il existe pourtant en Tunisie de nombreuses associations féministes, certaines « historiques » et d’autres plus récentes. Selon les données officielles du Centre Ifeda citées dans le chapitre 5, section 5.2, il existe 211 associations féminines. Bien que la question des OSC réellement actives demeure, plusieurs d’entre elles sont bien connues, ont des activités importantes, une réputation solide de militantisme et jouent un rôle visible de plaidoyer, parmi lesquelles on peut citer l’ATFD et Aswat Nissa. Un certain nombre d’entre elles ont également conclu des accords de partenariat avec le ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Personnes âgées, à l’instar de l’Association des femmes tunisiennes pour la recherche sur le développement (AFTURD).

Parallèlement, ces mêmes associations de femmes, ainsi que des militantes pour l’égalité de genre, rapportent des cas de violences lors des manifestations. Elles se sentent également souvent moins impliquées par rapport à d’autres associations, ou bien impliquées exclusivement sur des sujets relatifs aux femmes et moins sur des sujets d’intérêt général.4

Malgré cette participation limitée, il n’est pas rare que des femmes occupent des postes à responsabilités en Tunisie. Ainsi, des postes importants, tels que Cheffe du gouvernement, ministre de la Justice, secrétaire générale du gouvernement, maire de la capitale – Tunis –, cheffe de cabinet du président de la République, leader d’un parti politique et bien d’autres sont occupés ou ont été occupés par des femmes. Il semble donc émerger un certain décalage entre une « élite » de femmes émancipées, actives dans la société civile ou dans les institutions, qui arrivent à faire entendre leur voix et à participer activement, et une majorité de femmes qui restent confinées à des rôles plus traditionnels et ayant du mal à s’engager sur des questions publiques : le même rapport du Credif évoque ainsi un « écart socioculturel entre une classe minoritaire et élitiste… et une majorité qui vit à la marge de cette vie publique » (Credif, 2016[16]).

Concernant la liberté d’expression et l’accès aux médias et aux réseaux sociaux en ligne, la présence des femmes a augmenté et évolué. En 2015, le taux de femmes exerçant dans le secteur des médias a dépassé celui des hommes dans les médias traditionnels. De plus, la loi organique n° 2017-58 oblige les médias publics et privés à sensibiliser à la violence à l’égard des femmes. La HAICA a ainsi pris des mesures dans ce sens, y compris avec l’élaboration d’une charte destinée à mieux traiter l’image des femmes à l’écran, en collaboration avec des OSC (ATFD, 2020[12]). La présence des femmes aux postes de direction au sein des médias reste cependant limitée et il est encore fréquent de voir des femmes représentées à l’écran dans des rôles traditionnels.5

En outre, les entretiens menés6 ont mis en avant le problème du discours de haine et du harcèlement en ligne, qui vise particulièrement les femmes activistes et militantes. Plusieurs des personnes interrogées ont ainsi évoqué des femmes activistes ayant fait l’objet de menaces et d’intimidations, y compris parfois par des membres des syndicats des forces de sécurité. La plateforme de sensibilisation www.contre-violences-femmes-tunisie.com, citée précédemment, évoque quant à elle le chiffre de quatre femmes sur cinq victimes de violences sur les réseaux sociaux en 2020 (Ministère de la Femme, de la Famille, de l'Enfance et des Seniors, s.d.[18]). Ces femmes préfèrent souvent ne pas porter plainte car elles craignent que cela n’aboutisse à rien et que leurs harceleurs restent impunis.7 Dans le même temps, les associations féministes interrogées dans le cadre de ce scan n’ont cependant cité aucun obstacle particulier auquel elles seraient confrontées dans l’exercice de leurs activités, et bien que certaines craignent un contexte de moins en moins favorable au monde associatif dans sa globalité, il ne semble pas qu’elles soient ciblées en tant qu’associations de femmes.

Cette brève analyse montre que le « féminisme » d’État, qui a permis de grandes avancées, a aussi des limites. La faible présence des femmes au Parlement en est un bon exemple, malgré le principe de parité inscrit dans la Constitution et le Code électoral de 2014. Il est ainsi nécessaire de continuer le travail de sensibilisation et de remise en cause des héritages culturels, qui tendent à assigner aux femmes un rôle essentiellement dans la sphère familiale.

Il n’existe pas de statistiques officielles sur le nombre de Tunisiens noirs, mais la plupart des estimations évoquent des chiffres proches de 10 à 15 % de la population, concentrés en particulier dans les régions du sud (Mazzei, 2015[22]). L’histoire des communautés noires en Afrique du Nord trouve ses racines dans le commerce des esclaves, et bien que l’esclavage en Tunisie ait été aboli en 1846 (premier pays arabe à le bannir, bien avant d’autres pays du monde, y compris les États-Unis d’Amérique), les Tunisiens noirs continuent à être victimes de discrimination, la situation ne s’étant que partiellement améliorée après 2011 (Quattrini, 2018[23]).

Plusieurs d’entre eux se disent victimes de formes plus ou moins ouvertes de racisme – par le verbe, mais aussi dans le milieu professionnel, scolaire ou dans les médias – et se trouvent souvent dans des situations de pauvreté et de précarité socioéconomique (Quattrini, 2018[23]). Les activistes interrogés dans le cadre de ce scan font également état de la faible représentation des personnes noires dans le monde académique, parmi les professions libérales, les imams et bien d’autres catégories clés, avec la possible exception du milieu artistique.8

Une étude réalisée par la HAICA sur une période de deux semaines évoque en outre le discours raciste dans les médias audiovisuels : du 31 janvier au 8 février 2015, correspondant à l’élimination de la Tunisie de la Coupe d’Afrique des nations, et du 25 décembre 2016 au 2 janvier 2017, faisant suite à l’agression de trois étudiants originaires d’Afrique subsaharienne dans le centre-ville de Tunis. Dans le cadre de cette enquête portant sur dix chaînes de télévision publiques et privées ainsi que sur onze chaînes de radio, la HAICA a recensé 83 discours racistes, dont les auteurs étaient dans 82.19 % des cas des professionnels des médias (Hammami, 2018[24]).

Dans ce contexte, les Tunisiens noirs semblent avoir du mal à participer à la vie publique, aussi bien au niveau individuel que par le biais d’associations. Une étude de 2017 de M’nemty, une importante association antiraciste en Tunisie qui lutte contre les discriminations, a confirmé que ces citoyens sont réticents à participer à la vie civique, politique et culturelle : 68 % des enquêtés n’ont jamais participé à la vie politique, 58 % n’ont jamais participé à une manifestation et 80 % n’ont jamais contacté une radio ou une télévision, alors que 92 % déclaraient ne pas avoir d’information concernant les élections municipales prévues pour l’année suivante (M'nemty, 2017[25]). D’ailleurs, aucun maire ni gouverneur n’est noir, et c’était le cas d’une seule députée élue en 2019 sur 217 (Rouine et King, 2021[26]).

Pour pallier cette situation, et répondant à l’appel de la société civile, la Tunisie a adopté la loi organique n° 2018-50 du 23 octobre 2018, relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (République tunisienne, 2018[27]). Cette loi, la première dans le monde arabe pénalisant la discrimination raciale, peut aussi être considérée comme une réponse aux problèmes générés par la construction de la « tunisianité » par le régime postcolonial d’Habib Bourguiba qui, imposant une « identité arabo-musulmane sunnite construite par l’État », rejetait toute autre identité, qu'elle soit raciale ou religieuse, et donc toute possibilité de débats autour de ces problématiques (Fassatoui, 2021[28]).

Ce texte pionnier définit la discrimination raciale de manière claire et complète (article 2), prévoit des peines pour les auteurs (doublées dans des cas aggravants, par exemple si la victime est en état de vulnérabilité, ou en cas d’incitation à la haine – chapitre IV) et une procédure à la disposition des victimes pour porter plainte auprès de la justice (article 6) (République tunisienne, 2018[27]). La loi impose également à l’État de mettre en place des politiques et des initiatives pour prévenir la discrimination et diffuser la culture de l’égalité (articles 3 et 4). Cette loi répond ainsi à un vide juridique, qui ne permettait auparavant pas aux victimes de porter plainte pour discrimination, injure ou agression à caractère raciste, et représente en cela une avancée importante vers la reconnaissance de ces crimes.

La loi organique prévoit également la mise en place d’une Commission nationale de lutte contre la discrimination raciale (article 11), ayant pour mission la collecte et le suivi des différentes données, ainsi que la conception et la proposition de stratégies et de politiques publiques à même d’éliminer toutes les formes de discrimination raciale. Le décret n° 2021-203 instituant cette commission a été adopté le 7 avril 2021, soit près de deux ans et demi après l’adoption de la loi (Présidence du gouvernement, 2021[29]). Parmi les 26 membres – dont des représentants de différents ministères et instances indépendantes –, la commission doit comprendre 5 représentants de la société civile. Si la présence d’OSC, sélectionnées en fonction de leur activisme sur la question de la discrimination raciale, est une disposition positive, les entretiens9 ont mis en avant, comme pour d’autres instances et commissions indépendantes, la surreprésentation des différents ministères au sein de cette commission.

Le bilan concernant la mise en œuvre et l’efficacité de cette loi novatrice fait l’objet de débats. Quelques victimes de discrimination raciale ont pu saisir la justice et obtenir des jugements de réparation, et en octobre 2020, le tribunal de première instance de la ville de Médenine a rendu un jugement historique autorisant la suppression de la mention discriminante « atig » (« libéré », qui renvoyait à un statut hérité d’esclave affranchi) du nom d’un citoyen tunisien (Fassatoui, 2021[28]).

Des défis demeurent néanmoins, notamment concernant les dispositions de la loi relatives à la prévention de la discrimination – telles que la mise en place de stratégies nationales, de programmes de sensibilisation et de formation contre toutes les formes de discrimination raciale dans les établissements publics –, qui doivent encore voir le jour. Certains militants de la première heure, entendus dans le cadre de cette étude, ont émis des critiques quant à la mise en œuvre de cette loi, évoquant notamment le fait que davantage d’outils devraient être mis en place à cet effet. Ils indiquent également que les registres prévus par la loi et sur lesquels doivent être inscrites les plaintes devraient être créés, et que certains jugements ne satisfont pas les victimes. Ils craignent également que les membres de la Commission nationale ne soient choisis par le gouvernement sans consultation. La tenue, en septembre 2021, des premières formations des juges et magistrats autour de la loi 50, mise en place par le ministère de la Justice en coopération avec l’association M’nemty, est cependant une avancée positive.10* La Tunisie pourrait par ailleurs s’inspirer d’une bonne pratique de la Roumanie pour l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie d’inclusion des communautés marginalisées (voir Encadré ‎7.1).

Concernant le droit à la liberté d’association, l’association M’nemty existe légalement et peut opérer librement, bien qu’elle souffre de moyens limités, se sente parfois ignorée par les autorités publiques et indique que son processus d’enregistrement en 2013 avait pris sept mois.11 Un autre collectif, ANBAR, qui se définit comme un mouvement de femmes noires tunisiennes, a été lancé en 2020 et aborde la question du racisme du point de vue du genre (Ksiksi, 2021[31]). Les militants font cependant état de la faible présence de noirs dans les autres associations, OSC et syndicats.

Quant à l’accès aux médias, les Tunisiens noirs pourraient être plus représentés dans les séries télévisées ou dans le monde journalistique, et le sujet de la discrimination raciale pourrait davantage être pris en considération, ce qui pousse certains membres de la communauté à dire que les médias parlent des noirs seulement quand ils sont victimes d’un événement tragique de discrimination.12

Pour ce qui est des migrants d’Afrique subsaharienne, en plus de faire face au racisme au même titre que les Tunisiens noirs, ils sont vulnérables à d’autres formes de discrimination et à des difficultés liées à leur nationalité, leur langue, leur culture et aux formalités administratives. L’Enquête nationale sur la migration internationale réalisée en 2021 par l’Institut National de la Statistique (INS), en collaboration avec l’Observatoire National de la Migration (ONM), fait état de 21 466 résidents étrangers originaires d’Afrique subsaharienne (Institut National de la Statistique, 2021[32]). Selon le rapport d’activité d’une association d’accueil et d’accompagnement des migrants, 93 % des migrants accompagnés en 2019 – dont 71 % ne disposaient pas de titre de séjour – étaient d’origine subsaharienne, ce qui témoigne de la précarité de leur situation (Terre d'Asile Tunisie, 2019[33]). En outre, en 2017, les migrants subsahariens ne représentaient que 4 % du nombre total de travailleurs étrangers ayant obtenu un permis de travail dans le pays (Ben Sedrine, 2018[34]).

Les Subsahariens sont souvent labélisés sous le terme générique d’« Africains », sans spécification de leur pays d’origine et, implicitement, en niant que la Tunisie est aussi un pays africain (FTDES, 2020[35]). Dans le cadre d’une étude menée en 2020 par le FTDES, plus de la moitié des personnes interrogées ont déclaré avoir été victimes d’attaques racistes, presque toutes dans l’espace public. Si environ 10 % d’entre elles ont porté plainte, aucune n’a reçu de suite (FTDES, 2020[35]).

D’un côté plus positif, il existe plusieurs associations actives de migrants subsahariens, notamment formées par des étudiants13 ou des ressortissants d’un même pays. Elles sont libres d’opérer et d’organiser un large éventail d’activités, y compris parfois des manifestations publiques visant à alerter l’opinion publique tunisienne, les médias et les responsables politiques sur la condition des migrants subsahariens en Tunisie et certains des abus dont ils sont victimes (Geisser, 2019[36]).

Le cas des Amazighs, population autochtone d’Afrique du Nord – aussi connus comme les Berbères – est en partie différent. Ils ont été « assimilés » depuis des siècles et il est moins évident de les identifier ou de s’identifier comme tels. Les estimations du nombre de personnes parlant le tamazight – ou berbère – en Tunisie varient entre 10 %, selon l’OSC Congrès mondial amazigh, et 2 %, selon d’autres sources (Attia, 2018[37]). La plupart des Tunisiens partageant des origines amazighes ne connaissent pas ou ne revendiquent cependant pas ces origines (Congrès Mondial Amazigh, 2021[38] ; Attia, 2018[37]). L’UNESCO évoque quant à elle environ 10 000 locuteurs (Minority Rights Group International, 2021[39]).

Les personnes s’identifiant comme Amazighs, ethniquement et culturellement, sont confrontées au fait que leur langue n’est pas reconnue comme langue officielle – et n’est donc ni enseignée à l’école ni promue – et à la marginalisation de leur culture. La loi n° 2018-50 relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale a cependant pu aboutir à la circulaire n° 13 du 15 juillet 2020 du ministère des Affaires locales, abolissant la circulaire de 1965 qui obligeait à inscrire seulement des noms arabes dans les registres de l’état civil, et donnant ainsi la possibilité aux parents amazighs d’enregistrer leurs enfants avec des noms traditionnels autochtones (La Presse, 2020[40]).

En termes de participation publique, un mouvement politique amazigh a été lancé en 2018. Il n’a cependant pu ni s’enregistrer ni présenter de candidat aux élections (Tunisie Amazigh, 2019[41]). La cause amazighe a néanmoins pu trouver de la visibilité au sein de la société civile. La révolution de 2011 a ainsi permis de considérablement élargir l’espace disponible pour la communauté amazighe, permettant aux militants et activistes de s’exprimer librement et publiquement sur les problématiques touchant la communauté. Selon l’organisation Minority Rights, il existe à présent près de 13 associations amazighes, toutes créées après la révolution, à l’instar de l’Association tunisienne de la culture amazighe (ATCA), créée en 2011 (Minority Rights Group International, 2021[39]).

Les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transsexuelles et intersexuelles (LGBTI) sont extrêmement vulnérables aux discriminations. Parmi les 651 cas de discrimination documentés par les Points anti-discrimination (PAD) et l’Observatoire pour la défense du droit à la différence (O3DT) entre janvier et décembre 2020, près de la moitié des cas (326) ont ciblé les personnes LGBTI et étaient fondés sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et les caractéristiques sexuelles (Bouhafs, 2021[42]). D’après le rapport annuel d’Amnesty International publié en avril 2021, l’association tunisienne DAMJ a rapporté que 15 hommes et une femme ont été condamnés entre janvier et octobre 2020 pour homosexualité au titre de l’article 230 du Code pénal (Amnesty International, 2021[43]). En 2018, le Collectif civil pour les libertés individuelles a dénombré 120 procès pour homosexualité (Collectif civil pour les libertés individuelles, 2019[44]).

Une des principales raisons de la vulnérabilité des personnes LGBTI en Tunisie réside dans la pénalisation des relations sexuelles entre individus consentants du même sexe, au titre de l’article 230 du Code pénal (République tunisienne, 1913[45]). Cet article, dans sa version française, stipule que « la sodomie, si elle ne rentre dans aucun des cas prévus aux articles précédents, est punie de l’emprisonnement pendant trois ans », alors que la version arabe parle d’« homosexualité féminine et masculine » (République tunisienne, 1913[45]). Puisque c’est le texte arabe qui fait foi devant la loi, il en découle que la loi tunisienne criminalise les deux types d’homosexualité.14 Selon l’OCDE, parmi les lois qui favorisent l’intégration des personnes LGBTI, figure en premier lieu la dépénalisation des rapports homosexuels consentis ; tous les pays de l’OCDE ont dépénalisé les rapports sexuels entre personnes de même sexe consentantes (OCDE, 2020[46]). En outre, les articles 226 et 226 bis du même Code pénal tunisien, qui punissent « l’outrage à la pudeur » et « l’atteinte aux bonnes mœurs ou à la morale publique » (République tunisienne, 1913[45]), seraient utilisés par certains agents des forces de l’ordre pour arrêter ou intimider les personnes non hétérosexuelles et n’ayant pas une identité de genre traditionnelle, parfois uniquement en fonction de leur apparence (Minority Rights Group International, 2020[47]).

Les OSC de défense des droits des personnes LGBTI témoignent de cas de discrimination en milieu scolaire, sur le lieu de travail, au sein de la famille et dans les médias ; elles ont aussi documenté des cas de violences policières et la persistance des tests anaux, une pratique qui, d’après l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, est « en violation des textes internationaux relatifs à la prévention de la torture et en complète inadéquation avec les données scientifiques sur la valeur probante de ce test et l’impact négatif sur les personnes qui y sont soumises » (Minority Rights Group International, 2020[47] ; Madrigal-Borloz, 2021[48]).15 Certains cas ont été largement relayés dans les médias, comme celui de l’activiste Rania H., mais les associations LGBTI en connaîtraient de nombreux autres (Tunisie numérique, 2021[49] ; Inkyfada, 2021[50]).

Cette situation de vulnérabilité extrême se traduit par une difficulté à jouir des possibilités et des droits offerts par l’espace civique. Concernant la liberté d’expression et l’accès aux médias, les militants LGBTI, et parfois de simples citoyens non hétérosexuels, feraient l’objet d’insultes allant jusqu’aux menaces de mort, tant dans la rue que – en particulier – sur les réseaux sociaux. Les associations militantes indiquent que l’État pourrait davantage les protéger et aussi qu’il y aurait parfois, parmi les auteurs de ces actes, des agents des forces de sécurité, qui devraient au contraire protéger tout citoyen.16 Les militants pointent notamment du doigt certains syndicats de police, sans vouloir pour autant généraliser. À titre d’exemple, au cours des protestations au début de l’année 2021, l’association DAMJ a recensé quelque 120 publications incitant à la haine envers les personnes de la communauté LGBTI sur les pages Facebook des syndicats de police : ces derniers auraient divulgué l’identité des personnes en publiant leur photo ou leur adresse, ce à quoi s’ajouteraient des cas d’« outing » forcé par des policiers se rendant directement au domicile des personnes visées pour révéler, à leur insu, leur orientation sexuelle à leur famille (Inkyfada, 2021[50]). Des activistes consultés dans le cadre de ce scan soulignent cependant qu’il s’agit d’après eux de l’initiative de certains policiers et pas nécessairement d’ordres formels provenant de la Direction de la police.17

La question des associations LGBTI est particulièrement intéressante. En premier lieu, il en existe plusieurs, elles sont régulièrement enregistrées, et elles peuvent opérer au grand jour et organiser des activités publiques, ce qui est loin d’être le cas dans les autres pays de la région MENA et dans bien d’autres.

Avant 2011, la question des droits des personnes LGBTI était abordée de manière indirecte et sous plusieurs angles, notamment celui des droits reproductifs et sexuels – une cause portée courageusement par des associations féministes –, mais aussi de la santé sexuelle et de la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles (Limam, 2017[51]). Bien que l’activisme sur ces thématiques ne soit pas né en 2011, la fin du régime de Ben Ali a aidé ces militants à exercer leurs activités de manière plus ouverte, grâce au cadre légal propice à la création d’associations et au contexte plus large de transition démocratique.

Trois de ces associations – Mawjoudine, Chouf et Shams – ont été créées dans le cadre du décret-loi n° 2011-88 (analysé dans le chapitre 5), alors qu’une autre OSC bien connue – DAMJ – a été créée le 19 août 2011 dans le cadre de la loi n° 59-164 du 7 novembre 1959, ensuite abrogée par ce décret-loi (Limam, 2017[51]). Bien que l’engagement pour la défense des droits humains des personnes LGBTI soit la raison d’être de ces associations, la plupart n’affichent pas explicitement dans leurs statuts l’identité LGBTI, mettant plutôt en avant des concepts universels, tels que la protection des droits humains, la promotion de l’égalité et la non-discrimination : selon certains représentants de ces associations, les autorités leur auraient fait comprendre que cela faciliterait le processus d’enregistrement.

Les associations LGBTI en Tunisie représentent « un activisme jeune, instruit, innovant, pragmatique et peu enclin à la hiérarchie » (Limam, 2017[51]). Elles sont concentrées essentiellement dans la capitale et d’autres villes principales, mais avec une certaine diffusion territoriale grâce aux réseaux sociaux, et une structure qui repose beaucoup sur les volontaires. Leurs activités principales relèvent de la sensibilisation et du plaidoyer, d’un côté, et sont focalisées sur l’assistance aux victimes de harcèlement et violences, de l’autre (Limam, 2017[51]).18 Malgré les nombreux défis demeurant pour la pleine consécration des droits des personnes de la communauté LGBTI, les entretiens menés19 ont mis en avant certaines avancées importantes grâce à ce travail de plaidoyer, notamment la diffusion croissante auprès des médias, des acteurs politiques et du public en général des terminologies utilisées par les personnes LGBTI pour se désigner, en lieu et place des expressions insultantes et dégradantes longtemps en usage.

Ces associations jouissent d’une liberté « légale » d’opérer et aussi d’une relative liberté dans les faits. Certaines associations ont des relations avec les autorités publiques et sont par exemple consultées par le ministère des Affaires étrangères dans le cadre des rapports périodiques sur les droits humains. Pourtant, les témoignages collectés pour ce scan semblent confirmer que ces OSC rencontrent encore des difficultés, comme des longueurs lors du processus d’enregistrement (voir le cas de l’association Shams, Encadré 5.2 du chapitre 5) et parfois un manque de réactivité face à certaines de leurs déclarations de manifestations ou de réunions publiques. Plus généralement, leurs représentants font savoir que l’activisme LGBTI reste une activité risquée en Tunisie, car il expose les militants à des stigmatisations, des insultes, du harcèlement, des menaces et parfois de la violence, tant dans la rue que sur les réseaux sociaux. En octobre 2021, le président de l’association DAMJ a par exemple été victime d’une violente agression imputée à des agents des forces de l’ordre, un incident qui a suscité l’indignation d’une grande partie des organisations de défense des droits humains et a donné lieu à une saisine de plusieurs des procédures spéciales des Nations Unies (L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme et DAMJ, 2021[52]).20

Il ressort ainsi de ces différents éléments que cet activisme serait plus toléré que promu et défendu par l’État, sans pour autant nier que, dans sa globalité, le contexte est moins hostile aujourd’hui qu’il ne l’était avant 2011. Cela concerne aussi bien la question de la sensibilisation et de la prise de conscience des problématiques des citoyens LGBTI, que la possibilité de porter plainte contre les harceleurs, y compris des agents des forces de sécurité, qui est un outil important pour lutter progressivement contre l’impunité. Afin de renforcer son engagement dans la lutte contre les discriminations et la protection des minorités et groupes vulnérables, le gouvernement tunisien pourrait s’inspirer d’une initiative mise en place par l’Italie (voir Encadré ‎7.2).

Sans vouloir entrer dans des détails qui dépasseraient l’objet de ce scan, il est pertinent de relever que la Tunisie a une histoire de reconnaissance d’égalité de tous les citoyens, sans distinction de religion, confirmée par la Constitution de 2014. Non seulement cette dernière reconnaît la liberté de religion, mais elle va plus loin, en affirmant « la neutralité des mosquées et des lieux de culte » et en engageant l’État à « diffuser les valeurs de modération et de tolérance », ainsi qu’à empêcher les accusations d’apostasie et l’incitation à la haine (article 6) (République tunisienne, 2014[4]).

Dans le même temps, l’article 1er définit la Tunisie comme un État libre, indépendant et souverain, dont l’islam est la religion (République tunisienne, 2014[4]). Si cette formulation peut être interprétée comme l’islam étant la religion du peuple tunisien et non de l’État, et que dans les faits la religion n’est jamais citée comme légitimation du pouvoir, il reste vrai que la Tunisie est généralement considérée comme « un pays musulman », avec des estimations de 98 % à 99 % de musulmans (US Department of State, 2020[53]).

La conversion n’est pas criminalisée dans le cadre légal, mais reste un sujet tabou et, selon plusieurs témoignages, les convertis préféreraient rester discrets (Minority Rights Group International, 2020[47] ; Sihem Hassaini, 2017[54]). Une circulaire qui interdisait aux femmes musulmanes d’épouser des hommes non musulmans a été abolie en 2017, marquant un progrès important vers la non-discrimination, malgré le fait que quelques fonctionnaires rechigneraient à appliquer ce nouveau cadre (Kapitalis, 2018[55] ; Webdo, 2020[56]).

Alors que le droit à la liberté de religion ou de conviction est garanti par l’article 6 de la Constitution de 2014 (République tunisienne, 2014[4]), dans la pratique, ce sont essentiellement les communautés chrétiennes et juives qui sont reconnues. En particulier pour ce qui est de la communauté juive, ses membres étaient estimés à environ 100 000 avant la Seconde Guerre mondiale, pour diminuer par la suite et atteindre environ 1 500 à 2 000 personnes aujourd’hui, essentiellement sur l’île de Djerba et dans la capitale (Minority Rights Group International, 2021[57]). Si cette communauté est globalement à l’abri de toute persécution, certains de ses membres mettent en avant des cas de discrimination indirecte (Minority Rights Group International, 2021[57]), sans compter quelques attaques, telles que l’attaque à la synagogue de Djerba en 2002, une île pourtant réputée pour sa tradition de coexistence pacifique des religions au cours des siècles. En novembre 2018, la nomination d’un ministre juif, René Trabelsi, a fait la une de l’actualité, cet événement représentant un signe important pour la communauté juive tunisienne, s’agissant seulement du troisième ministre juif depuis l’indépendance.

Quant aux chrétiens, leur présence est essentiellement liée soit aux descendants européens soit aux migrants de l’Afrique subsaharienne. Le ministère des Affaires religieuses estime à environ 30 000 le nombre de chrétiens en Tunisie, dont 7 000 seraient de nationalité tunisienne selon les estimations de la communauté chrétienne (US Department of State, 2020[53]). En tant que minorité religieuse, leur condition est relativement bonne. C’est ce que démontre par exemple la reprise récente de la tenue de la procession annuelle de la « Madone de Trapani » à La Goulette, village de la banlieue de la capitale caractérisé par la présence traditionnelle d’une communauté italienne, et spécifiquement sicilienne, de religion catholique (La Presse, 2019[58]). L’Église catholique a même obtenu une reconnaissance officielle à travers un concordat (modus vivendi) de 1964 (US Department of State, 2020[53]). Si les migrants subsahariens sont en revanche souvent victimes de discrimination, et parfois de cas de violences, c’est davantage lié à leur origine nationale, ethnique et raciale qu’à leur religion (voir Section ‎7.2).

Il existe par exemple une minorité religieuse autre que les juifs et les chrétiens, donc non reconnue dans la pratique par l’État tunisien. Il s’agit de la communauté baha’i, une foi introduite en Tunisie il y a tout juste un siècle, en 1921. Après 2011, cette communauté, pour laquelle il n’existe pas d’estimations fiables quant au nombre de ses membres, a vu une relative amélioration de sa situation. Ses membres sont globalement bien intégrés dans la société, ses représentants ayant même participé à plusieurs échanges sur la Constitution de 2014.21

La communauté n’a pourtant pas encore obtenu une reconnaissance officielle en tant que communauté religieuse ou association. Certains de ses représentants ont en effet déposé un dossier de création d’association en 2013, mais la constitution de l’association n’a pas été publiée au JORT. Ils ont porté plainte en justice et gagné en première instance en 2020, la justice reconnaissant leur droit de se constituer en association et se plaçant ainsi comme garante de la liberté d’association reconnue dans la Constitution de 2014. La Présidence du gouvernement a cependant interjeté appel, avançant notamment l’aspect « discriminatoire » d’une association fondée sur la religion (Business News, 2021[59]). Dans le dossier d’appel, les représentants de la communauté auraient lu des considérations qui ne reposeraient pas sur les dispositions du cadre légal pour l’enregistrement des associations (le décret-loi n° 2011-88, analysé dans le chapitre 5), mais qui auraient plutôt un caractère religieux, notamment un avis du mufti de Tunis et une fatwa de l’Académie internationale du Fiqh islamique – des institutions qui ne jouent aucun rôle dans l’établissement d’une association selon le décret-loi n° 2011-88 –, ou encore des accusations d’apostasie (interdites par l’article 6 de la Constitution). Les représentants baha’is ont donc déposé une plainte auprès du tribunal de première instance de Tunis contre le gouvernement pour ces propos (Business News, 2021[59]).

Les baha’is ont été épaulés par des associations des droits de l’homme, ainsi que par des parlementaires et des fonctionnaires du gouvernement à titre individuel, mais n’ont pas encore pu obtenir leur reconnaissance en tant qu’association. Ils ne peuvent d’ailleurs pas non plus enregistrer officiellement de centre de prière ou de cimetière, et craignent que l’« élan » de l’après-révolution vers plus d’inclusion ne se soit progressivement éteint.22

Le cas de la communauté baha’i, bien que très spécifique, semble confirmer les tensions entre, d’un côté, un cadre légal souvent propice à l’espace civique (la Constitution de 2014 concernant la liberté religieuse et le décret-loi n° 2011-88 sur les associations), une grande liberté d’expression permettant un plaidoyer public, l’existence de mécanismes de recours et une justice à même de juger en faveur d’un groupe de citoyens contre le gouvernement ; et, d’un autre côté, la persistance d’approches, de valeurs et de réflexes (et parfois de textes, comme dans le cas de certains articles du Code pénal) qui ne sont pas en ligne avec l’esprit et la lettre de ce cadre légal progressiste.

Le nombre de personnes vivant avec un handicap en Tunisie n’est pas clairement établi. Si le recensement national de 2014 fait état de 2.3 % de la population, l’Organisation mondiale de la santé estime que 15 % de la population mondiale a une forme de handicap. Le ministère des Affaires sociales a quant à lui distribué environ 340 000 « cartes de handicap », tenant compte du fait que toutes les personnes y ayant droit n’en font pas forcément la demande (IFES, 2018[60] ; Arab Reform Initiative, 2018[61]).

L’article 48 de la Constitution de 2014 protège les personnes handicapées contre toute forme de discrimination et engage l’État à œuvrer pour leur pleine intégration (République tunisienne, 2014[4]). Votée avant la Constitution, la loi d’orientation n° 2005-83 fournit déjà un cadre légal assez large pour la protection des droits, la promotion et la défense de ces personnes, ainsi que de leurs associations (République tunisienne, 2005[62]).

Les PAD et l’O3DT ont enregistré 13 cas de discrimination liée au handicap de janvier à décembre 2020 (soit environ 2 % du total des cas de discrimination sur cette période) (Bouhafs, 2021[42]). Au-delà des cas de discrimination, des analyses relèvent que les personnes handicapées se sentent souvent exclues de la participation publique en raison, entre autres, des problèmes d’accès aux espaces publics, du manque de sensibilité des partis et leaders politiques à leurs besoins, et des difficultés d’accès aux informations publiques (IFES, 2018[60]).

Parmi les bonnes pratiques, il faut citer les efforts pour favoriser la participation aux élections des personnes handicapées. La loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014, relative aux élections et référendums, prévoit explicitement le droit de vote pour les personnes handicapées, ainsi que des mesures pour faciliter l’exercice de ce droit (articles 131-132) (République tunisienne, 2014[14]). Bien que leur portée soit limitée par l’obligation de présenter une carte de handicap le jour du scrutin, ces mesures restent une bonne pratique, de même que les efforts de l’ISIE pour sensibiliser les électeurs et disséminer les informations relatives aux élections en braille, en langue des signes et autres formats accessibles (IFES, 2018[60] ; Arab Reform Initiative, 2018[61] ; OTDDPH, 2017[63]). En outre, la loi électorale de 2014 impose d’inclure dans chaque liste candidate, pour les élections municipales et régionales, au moins un candidat porteur d’un handicap physique (République tunisienne, 2014[14]).23 Il existe aussi en Tunisie des associations promouvant les droits de ces citoyens, notamment l’Organisation tunisienne de défense des droits des personnes handicapées (OTDDPH), confirmant la vitalité et la diversité de la société civile tunisienne.

Pour aller plus loin dans la garantie d’un accès égal aux opportunités de participation à la vie de la société, la Tunisie pourrait s’inspirer d’une bonne pratique mise en place par le Canada, qui a élaboré en 2019 une loi sur l’accessibilité avec une approche participative afin d’appréhender au mieux les obstacles rencontrés par les personnes en situation de handicap et d’y apporter des solutions adéquates (voir Encadré ‎7.3).

Enfin, pour l’ensemble des groupes concernés par l’analyse proposée dans ce chapitre, l’élaboration de politiques publiques et de programme adaptés doit être fondée sur des données probantes, permettant ainsi de poser un diagnostic plus précis des réalités et défis rencontrés et d’y apporter des solutions adéquates. Dans cette optique, suite à la crise causée par la pandémie de COVID-19, le Canada a renforcé la production de statistiques et données désagrégées pour mieux appréhender l’impact de la crise sur les différentes catégories de populations (voir Encadré ‎7.4).

  • Compléter le cadre légal, comprenant déjà la loi n° 2018-50 relative à l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, en adoptant une législation complète interdisant toutes les formes de discrimination, y compris la discrimination fondée sur le sexe, l’origine ethnique, la religion, la langue, le statut autochtone, l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, conformément aux normes internationales. Mettre en place les outils et les moyens nécessaires pour sa mise en œuvre, y compris des mécanismes de suivi et d’évaluation.

  • Poursuivre les réflexions en vue de l’abrogation ou de la modification des articles 226, 226 bis, 230 et 231 du Code pénal, et réviser le Code pénal et le Code de procédures pénales, afin de les harmoniser avec les principes de la Constitution tunisienne et des conventions internationales relatives aux droits humains.

  • Appuyer l’opérationnalisation de la Commission nationale de lutte contre la discrimination raciale et étudier la possibilité d’une participation plus équilibrée entre le gouvernement, les institutions publiques et la société civile ; s’assurer que les membres sont sélectionnés de manière transparente et en consultation avec la société civile.

  • Favoriser la participation des femmes, des personnes LGBTI, des minorités raciales, ethniques et religieuses, et des personnes en situation de handicap à la vie publique par le biais d’associations, de partis politiques, de syndicats, etc.

  • Produire des données désagrégées afin de renforcer l’information et la visibilité sur la discrimination et la marginalisation de certains groupes, et mettre en place des programmes et politiques adaptés.

  • Mettre en place des programmes de sensibilisation et de formation des fonctionnaires publics sur les sujets de l’inclusion et de la discrimination, y compris sur les nouveaux cadres légaux protégeant les droits des minorités. En particulier, mettre en place des stratégies nationales, ainsi que des programmes de sensibilisation et de formation contre toutes les formes de discrimination raciale dans les établissements publics, tel que prévu par la loi organique n° 2018-50. Lancer des campagnes d’information pour le grand public sur les droits des minorités, les mécanismes de plainte et de recours, le soutien aux victimes de discrimination, et encourager les dénonciations et dépôts de plaintes.

  • Encourager la présence et la visibilité des femmes et des minorités dans les médias, dans le monde académique, parmi les professions libérales, parmi les imams et d’autres catégories clés.

  • Continuer les investigations et poursuites de tous les cas de discrimination, y compris les discours de haine, le harcèlement en ligne, et les menaces et intimidations, incluant les violations présumées commises par des éléments des forces de l’ordre ; encourager les victimes à porter plainte et assurer le suivi en justice pour que les enquêtes aboutissent, et ainsi réduire l’impunité.

  • Poursuivre les efforts de sensibilisation à l’adresse des juges et des forces de l’ordre sur l’application des dispositions légales de la loi n° 2017-58 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la loi organique n° 2018-50 et les autres textes légaux adoptés récemment dans le domaine de l’inclusion et de la lutte contre les discriminations.

  • Soutenir la mise en œuvre de mesures favorisant la parité hommes-femmes tant verticale qu’horizontale aux élections.

  • S’assurer que l’enregistrement de toutes les associations, indépendamment de leur champ d’action, est géré de manière impartiale et transparente, en ligne avec les dispositions du décret-loi n° 2011-88, et que les associations ont à leur disposition des mécanismes de recours en cas de retard ; poursuivre tout abus éventuel dans le processus d’enregistrement.

  • Renforcer l’appui aux groupes vulnérables et aux minorités, ainsi qu’aux associations les représentant, pour faciliter leur implication dans la vie publique. Les autorités pourraient mettre en place des mécanismes institutionnalisés de dialogue permanent avec les organisations défendant les minorités, afin de discuter des sujets sensibles, d’aborder les problèmes et de concevoir des solutions partagées. Le gouvernement pourrait prévoir des outils et mécanismes adaptés, tels que des locaux accessibles à tous pour faciliter l’accès à l’espace public des personnes handicapées et assouplir l’obligation de présenter une carte de handicap pour bénéficier de certaines mesures de soutien. Il est important que les associations défendant les groupes marginalisés et les minorités soient impliquées dans les consultations sur des sujets d’intérêt général en plus des sujets touchant spécifiquement les groupes qu’elles représentent.

Références

[43] Amnesty International (2021), Amnesty International Rapport 2020/21: La situation des droits humains dans le monde.

[61] Arab Reform Initiative (2018), Handicap et citoyenneté dans la Tunisie post-révolutionnaire.

[19] ATFD (2021), L’accès à la justice des femmes victimes de violence : Entraves et défis.

[12] ATFD (2020), Rapport d’examen approfondi de la société civile tunisienne sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.

[37] Attia, S. (2018), « Tunisie : Les discriminations envers les Amazighs persistent », Jeune Afrique.

[21] Belkaïd, A. (2019), « Femmes et héritage en Tunisie, l’échec d’une réforme », Le Monde diplomatique n° 785, pp. 10-11.

[34] Ben Sedrine, S. (2018), Défis à relever pour un accueil décent de la migration subsaharienne en Tunisie.

[42] Bouhafs, I. (2021), Rapport d’analyse de données – Cas de discriminations collectés par les Points Anti-Discrimination et l’observatoire pour la défense du droit à la différence.

[59] Business News (2021), « L’Association bahá’íe en Tunisie dépose une plainte contre le gouvernement pour takfirisme ! », Business News, https://www.businessnews.com.tn/lassociation-bahaie-en-tunisie-depose-une-plainte-contre-le-gouvernement-pour-takfirisme,520,106740,3.

[20] Business News (2017), « Béji Caïd Essebsi : L’égalité concerne avant tout l’héritage ! », Business News, https://www.businessnews.com.tn/beji-caid-essebsi-legalite-concerne-avant-tout-lheritage,520,74190,3.

[65] Cazenave, E. et A. Bellantoni (2022), « Communication publique accessible et inclusive : Panorama de pratiques de pays de l’OCDE », n° 54, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/0f2386e1-fr.

[5] Chekir, H. (2016), « Les droits des femmes en Tunisie : Acquis ou enjeux politiques ? », Hérodote, vol. n° 160-161/1, pp. 365-380, https://doi.org/10.3917/her.160.0365.

[44] Collectif civil pour les libertés individuelles (2019), État des libertés individuelles en 2018 : Bas les masques.

[38] Congrès Mondial Amazigh (2021), Le Congrès mondial amazigh en bref, https://www.congres-mondial-amazigh.org/cma/ (consulté le 8 septembre 2021).

[7] Conseil des droits de l’homme (2013), Rapport du Groupe de travail sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes dans la législation et dans la pratique - Mission en Tunisie, https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G13/141/68/PDF/G1314168.pdf?OpenElement.

[16] Credif (2016), La violence fondée sur le genre dans l’espace public, Credif.

[28] Fassatoui, O. (2021), Une loi contre les discriminations raciales en Tunisie : Bilan en demi-teinte d’une loi pionnière, https://www.arab-reform.net/wp-content/uploads/pdf/Arab_Reform_Initiative_fr_une-loi-contre-les-discriminations-raciales-en-tunisie-bilan-en-demi-teinte-dune-loi-pionniere_16959.pdf?ver=7cc4ef6fb2e46b82e65cede6d98658f4.

[35] FTDES (2020), Entre sécuritarisation et racialisation : L’expérience subsaharienne en Tunisie, https://www.ftdes.net/rapports/racialisation.fr.pdf.

[36] Geisser, V. (2019), « Tunisie, des migrants subsahariens toujours exclus du rêve démocratique », Migrations Société, vol. n°177/3, p. 3, https://doi.org/10.3917/migra.177.0003.

[30] Gouvernement de Roumanie (2022), Stratégie du 28 avril 2022 du gouvernement de Roumanie pour l’inclusion des citoyens roumains appartenant à la minorité Rom pour la période 2022-2027, https://legislatie.just.ro/Public/DetaliiDocumentAfis/255081.

[66] Gouvernement du Canada (2022), Élaborer une loi fédérale sur l’accessibilité : ce que nous avons appris, https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/programmes/canada-accessible/rapports/consultations-ce-que-nous-avons-appris.html.

[24] Hammami, S. (2018), Guide pratique. Lutter contre le discours de haine dans les médias audiovisuels : Normes, jurisprudence, bonnes pratiques et études de cas, Organisation internationale de la francophonie, https://haica.tn/wp-content/uploads/2020/05/Guide_Discours-haine-medias.pdf.

[60] IFES (2018), Political Participation of Women and Men with Disabilities in Tunisia: An IFES Assessment.

[50] Inkyfada (2021), « « Une parmi deux mille ». L’arrestation de Rania Amdouni à l’intersection des luttes », Inkyfada, https://inkyfada.com/fr/2021/03/17/rania-amdouni-intersectionnalite-tunisie/.

[32] Institut National de la Statistique (2021), Enquête Nationale sur la Migration Internationale, http://www.migration.nat.tn/images/pdf/2021/rapport-enquete-nationale-migration-internationale-tunisia-hims.pdf.

[11] IPU Parline (2021), Monthly Ranking of Women in National Parliaments, https://data.ipu.org/women-ranking?month=6&year=2021 (consulté le 6 septembre 2021).

[9] Jomier, A. (2021), « Laïcité et féminisme d’État : Le trompe-l’œil tunisien », La vie des idées, https://laviedesidees.fr/Laicite-et-feminisme-d-Etat-le.html.

[55] Kapitalis (2018), « Qui sont les 300 maires refusant de marier une musulmane à un non-musulman ? », Kapitalis, http://kapitalis.com/tunisie/2018/10/31/qui-sont-les-300-maires-refusant-de-marier-une-musulmane-a-un-non-musulman/.

[31] Ksiksi, K. (2021), Faire face au racisme en Tunisie : Entretien avec Khawla Ksiksi, https://www.arab-reform.net/fr/publication/faire-face-au-racisme-en-tunisie-entretien-avec-khawla-ksiksi/.

[40] La Presse (2020), « Annulation des restrictions sur l’attribution des prénoms aux nouveaux-nés », La Presse, https://lapresse.tn/68371/annulation-des-restrictions-sur-lattribution-des-prenoms-aux-nouveaux-nes/ (consulté le 5 juillet 2021).

[58] La Presse (2019), « Demain, célébration de la procession de la “Madone de Trapani”: Tunisie, terre de paix et de dialogue », La Presse, https://lapresse.tn/19332/demain-celebration-de-la-procession-de-la-madone-de-trapani-tunisie-terre-de-paix-et-de-dialogue/.

[13] Lakani, B. (2021), « Remaniement ministériel : Mechichi fait fi de la parité homme-femme », L’Économiste maghrébin, https://www.leconomistemaghrebin.com/2021/01/18/remaniement-ministeriel-mechichi-fait-fi-parite-homme-femme/ (consulté le 7 septembre 2021).

[51] Limam, J. (2017), Les associations LGBTQI++ en Tunisie : Émergence d’un nouveau militantisme humain.

[52] L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’homme et DAMJ (2021), Communication aux procédures spéciales des Nations Unies, https://omct-tunisie.org/wp-content/uploads/2021/10/20211027_Saisine-des-RS-pour-Badr-Baabou.pdf.

[48] Madrigal-Borloz, V. (2021), Observations préliminaires sur la visite en Tunisie par l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, https://www.ohchr.org/FR/HRBodies/HRC/Pages/NewsDetail.aspx?NewsID=27174&LangID=F (consulté le 12 septembre 2021).

[6] Manaï, B. (2020), « Conditions sociales des femmes dans la Tunisie contemporaine : Entre symbolisme féministe et justice spatiale », Hérodote, vol. n° 180/1, pp. 115-130, https://doi.org/10.3917/her.180.0115.

[22] Mazzei, V. (2015), The Continued Discrimination Facing Black Tunisians, https://stories.minorityrights.org/afro-descendants/chapter/middle-east-and-north-africa/.

[18] Ministère de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des Seniors (s.d.), Toutes et tous uni.e.s contre les violences, https://www.contre-violences-femmes-tunisie.com/ (consulté le 5 août 2021).

[57] Minority Rights Group International (2021), Tunisia: Jews, https://minorityrights.org/minorities/jews-10/ (consulté le 9 septembre 2021).

[39] Minority Rights Group International (2021), Tunisie : Amazighs, https://minorityrights.org/minorities/amazigh-fr/ (consulté le 8 septembre 2021).

[47] Minority Rights Group International (2020), Review of the 6th Periodic Report of Tunisia, in Partnership with Anti-Discrimination Points Network.

[25] M’nemty (2017), La participation de Tunisiens noirs à la vie publique.

[70] OCDE (2022), Open Government Review of Brazil  : Towards an Integrated Open Government Agenda, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/3f9009d4-en.

[3] OCDE (2020), Civic Space Scan Analytical Framework in the Area of Open Government, GOV/PGC/OG(2020)6, OCDE, Paris.

[46] OCDE (2020), Hors d’atteinte ? La route vers l’intégration des personnes LGBTI, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/a3f24097-fr.

[1] OCDE (2017), Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert, OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0438.

[15] ONU Femmes (2018), Tournant historique en Tunisie : 47 pour cent de femmes élues au sein des gouvernements locaux, https://www.unwomen.org/fr/news/stories/2018/8/feature-tunisian-women-in-local-elections (consulté le 7 septembre 2021).

[63] OTDDPH (2017), Comment rendre accessibles les campagnes électorales et le vote pour les personnes handicapées.

[64] Parlement du Canada (2019), Accessible Canada Act, https://parl.ca/DocumentViewer/en/42-1/bill/C-81/royal-assent.

[2] Partenariat pour un gouvernement ouvert (s.d.), Actions for a More Inclusive Open Government Parternship, https://www.opengovpartnership.org/actions-for-a-more-inclusive-open-government-partnership/ (consulté le 15 novembre 2021).

[29] Présidence du gouvernement (2021), « Décret gouvernemental n° 2021-203 du 7 avril 2021, fixant les modalités de création de la Commission nationale de lutte contre la discrimination raciale, ses attributions, son organisation, son mode de fonctionnement, ses mécanismes de travail », Journal officiel de la République tunisienne, vol. 33, pp. 793-795, https://legislation-securite.tn/fr/law/104982.

[23] Quattrini, S. (2018), Identity and Citizenship in Tunisia: The Situation of Minorities after the 2011 Revolution, Minority Rights Group Internation, https://minorityrights.org/wp-content/uploads/2018/11/MRG-Tunisia-briefing-Final-ENG-Nov-2018.pdf.

[27] République tunisienne (2018), « Loi organique n° 2018-50 relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale », Journal officiel de la République tunisienne, vol. 86, pp. 3582-3583.

[17] République tunisienne (2017), « Loi organique n° 2017-58 du 11 août 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes », Journal officiel de la République tunisienne, vol. 65, pp. 2586–2593, https://legislation-securite.tn/law/56326.

[4] République tunisienne (2014), Constitution de la République tunisienne, https://lib.ohchr.org/HRBodies/UPR/Documents/Session27/TN/6Annexe4Constitution_fr.pdf.

[14] République tunisienne (2014), « Loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014, relatives aux élections et référendums », Journal officiel de la République tunisienne, vol. 42, pp. 1310-1331, http://www.isie.tn/wp-content/uploads/2018/01/Loi-Organique-n%C2%B02014-16.pdf.

[62] République tunisienne (2005), « Loi d’orientation n° 2005-83 du 15 août 2005, relative à la promotion et à la protection des personnes handicapées », Journal officiel de la République tunisienne, vol. 66, http://www.droit-afrique.com/upload/doc/tunisie/Tunisie-Loi-2005-83-promotion-protection-handicapes.pdf.

[8] République tunisienne (1956), Code du statut personnel, Imprimerie officielle de la République tunisienne, http://jafbase.fr/docMaghreb/TunisieStatutpersonnel.PDF.

[45] République tunisienne (1913), Code pénal, Imprimerie officielle de la République tunisienne, https://legislation-securite.tn/fr/law/43760.

[26] Rouine, Z. et S. King (2021), Democracy and Progress towards Racial Equality in Tunisia: Interview with Zied Rouine, https://www.arab-reform.net/publication/democracy-and-progress-towards-racial-equality-in-tunisia-interview-with-zied-rouine/.

[54] Sihem Hassaini (2017), « Chrétiens en Tunisie : Quand les convertis se cachent pour prier », BBC, https://www.bbc.com/afrique/region-39626409.

[67] Statistiques Canada (2021), Statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion, https://www.statcan.gc.ca/fr/themes-debut/genre_diversite_et_inclusion (consulté le 9 novembre 2022).

[69] Statistiques Canada (2020), Portrait socioéconomique de la population noire au Canada, https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/200225/dq200225b-fra.htm (consulté le 2022 novembre 2022).

[68] Statistiques Canada (2020), Représentation des femmes au sein des conseils d’administration, 2017, https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/200128/dq200128b-fra.htm (consulté le 9 novembre 2022).

[33] Terre d’Asile Tunisie (2019), Rapport annuel 2019 de la permanence d’accueil juridique et sociale de Terre d’Asile Tunisie Grand Tunis et Sfax.

[41] Tunisie Amazigh (2019), Création du parti politique amazigh tunisien Akal, https://www.tunisie-amazigh.com/creation-du-parti-politique-amazigh-tunisien-akal (consulté le 8 septembre 2021).

[49] Tunisie numérique (2021), « Tunisie : Des associations et organisations revendiquent la libération de Rania Amdouni », Tunisie numérique, https://www.tunisienumerique.com/tunisie-des-associations-et-organisations-revendiquent-la-liberation-de-rania-amdouni/.

[53] US Department of State (2020), Tunisia 2020 International Religious Freedom Report.

[56] Webdo (2020), « Fathi Laayouni défie l’État et refuse le mariage entre Tunisiennes et non-musulmans », Webdo, https://www.webdo.tn/2020/07/08/fathi-laayouni-defie-letat-et-refuse-le-mariage-entre-tunisiennes-et-non-musulmans/#.YWg0yWJBw2x.

[10] World Economic Forum (2021), Global Gender Gap Report 2021, http://www3.weforum.org/docs/WEF_GGGR_2021.pdf.

Notes

← 1. Entretiens avec des OSC féministes, 5 et 20 mai 2021.

← 2. Il est à noter que le nouveau décret-loi électoral promulgué le 15 septembre 2022, qui institue un scrutin uninominal, n’implique pas une obligation de parité dans les candidats aux élections législatives.

← 3. Articles 103-3, 104-5, 105-3 et 106-4 du Code du statut personnel.

← 4. Entretiens avec des OSC féministes, 5 et 20 mai 2021, et séance de consultation de la société civile, Tunis, 26 février 2021.

← 5. Entretiens avec des OSC féministes, 5 et 20 mai 2021.

← 6. Table ronde avec des OSC, 26 mai 2021.

← 7. Entretiens avec des OSC féministes, 5 et 20 mai 2021.

← 8. Entretien avec trois représentants d’une association de défense des minorités raciales, 22 avril 2021.

← 9. Ibid.

← 10. Entretien avec le ministère de la Justice, 3 décembre 2021.

← 11. Entretien avec un membre de M’nemty, avril 2021.

← 12. Entretien avec trois représentants d’une association de défense des minorités raciales, 22 avril 2021.

← 13. Par exemple, l’Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie (Aesat).

← 14. Entretien avec le président de l’Association des droits et libertés individuelles, Inkyfada, 26 mai 2015.

← 15. Si les autorités précisent que les détenus ont le droit de refuser cet examen, des militants affirment que la plupart des hommes méconnaissent leurs droits et se sentent obligés d’accepter de subir le test ou acceptent après avoir été menacés.

← 16. Entretiens avec des représentants de deux associations de défense des personnes LGBTI, 6 mai et 28 mai 2021.

← 17. Ibid.

← 18. Ibid.

← 19. Ibid.

← 20. Les procédures saisies sont celles sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, l’indépendance des juges et des avocats, la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, la protection contre la violence et la discrimination en raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, et la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

← 21. Table ronde des OSC, 26 avril 2021 ; entretiens menés dans le cadre de ce scan, 20 et 28 mai 2021.

← 22. Entretien mené dans le cadre de ce scan, 28 mai 2021.

← 23. Article 49 undecies de la loi organique n° 2014-16 relative aux élections et aux référendums.

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