Résumé exécutif

À l’heure où de nombreux pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA) cherchent à accélérer leur croissance économique et à construire des sociétés plus stables et plus ouvertes, l’une des clés du succès réside dans l’autonomisation économique des femmes. Si les femmes étaient aussi impliquées que les hommes dans la vie économique, la région MENA pourrait voir son produit intérieur brut (PIB) augmenter de 47 %. Ce rapport révèle que des changements sont en cours dans toute la région. Il présente 24 études de cas détaillées sur les réformes législatives, politiques et institutionnelles récentes en soutien à l’autonomisation économique des femmes en Égypte, en Jordanie, au Maroc et en Tunisie. Le rapport met en évidence certains des facteurs communs qui expliquent le succès de ces réformes et de leur mise en œuvre. Malgré les défis auxquels sont confrontés certains pays, dont certains sont exacerbés par la crise actuelle du COVID-19, le rapport affirme que les progrès peuvent être renforcés par des actions politiques ciblées, inclusives et coordonnées.

  • Éducation. En Égypte, en Jordanie, au Maroc et en Tunisie, les femmes sont plus instruites que jamais. Les écarts entre les hommes et les femmes en matière d’éducation sont presque comblés, en particulier au niveau de l’enseignement supérieur, où les femmes de certains pays rattrapent les hommes dans des disciplines à prédominance masculine telles que les sciences, la technologie et les mathématiques. Ces progrès en matière d’éducation ne se traduisent cependant pas par une amélioration au même niveau de leur accès aux opportunités économiques.

  • Égalité dans le travail. Les quatre pays ont entrepris des réformes législatives et mené de nombreuses initiatives pour faciliter la participation des femmes à la vie économique et renforcer leurs droits au travail. Il s’agit notamment de mesures visant à promouvoir l’égalité de rémunération, mettre en place des aménagements du temps de travail, encourager l’équilibre hommes-femmes dans la direction des entreprises et lutter contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Le secteur privé prend de plus en plus d’initiatives en matière d’égalité entre les sexes pour encourager la participation des femmes à la vie économique.

  • Équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Les pays ont fait des efforts pour réformer leurs systèmes de protection sociale afin d’aider les femmes à mieux équilibrer vie professionnelle et vie privée et alléger la charge du travail domestique non rémunéré qui pèse sur elles. L’introduction du congé de paternité et l’amélioration des options de garde des enfants sont des exemples de la manière dont les pays facilitent la participation des femmes au marché du travail et tentent d’encourager les hommes à s’engager davantage dans le travail domestique non rémunéré.

  • Entrepreneuriat féminin. Les pays s’efforcent de stimuler l’entrepreneuriat chez les femmes et de formaliser les entreprises. Ces mesures consistent notamment à faciliter l’accès des femmes entrepreneurs à l’information, aux services financiers, aux marchés, aux possibilités d’investissement, aux terres et aux biens.

  • Femmes dirigeantes. Le processus de réforme devient également plus inclusif, grâce à un certain nombre d’initiatives visant à renforcer l’adhésion des femmes et leur accès à des fonctions de direction dans les ministères du travail et de l’emploi ainsi que dans les organisations syndicales et patronales. Ces réformes pourraient produire des résultats positifs en matière d’égalité hommes-femmes dans le dialogue social et les négociations collectives. Ces progrès se sont fait sentir lors de la crise du COVID-19 dans les efforts des gouvernements pour intégrer les institutions nationales dédiées à l’égalité hommes-femmes dans les organes chargés d’élaborer la réponse des pays à la crise.

  • Femmes vulnérables. Une attention particulière a été accordée à l’amélioration de la situation des travailleuses vulnérables, telles que les travailleuses domestiques, les femmes rurales et les réfugiées. Des efforts sont également en cours pour lutter contre les taux élevés de violence à l’égard des femmes et des filles dans la sphère privée, dans l’espace public et sur le lieu de travail. L’ampleur des réformes varie toutefois considérablement d’un pays à l’autre et leur niveau de mise en œuvre reste à établir.

Malgré ces progrès, les taux d’activité des femmes dans les quatre pays restent parmi les plus bas du monde. La région présente le plus grand écart entre les sexes en matière d’entrepreneuriat, les femmes de la région MENA étant nettement moins susceptibles de diriger leur propre entreprise que les hommes. En général, les femmes dirigent des entreprises avec moins de capital et dépendent davantage de l’autofinancement. Cela est particulièrement vrai pour les femmes de l’économie informelle, qui n’ont pas facilement accès au crédit. Sous l’effet de la crise du COVID-19, ces femmes sont donc plus susceptibles de devoir fermer leur entreprise pendant de longues périodes, entraînant ainsi une perte considérable, voire totale de revenus.

Comme dans d’autres régions du monde, les femmes de la région MENA assument la majeure partie des soins et du travail domestique non rémunérés, et la prévalence de normes sociales restrictives limite encore fortement leur participation à la vie économique. De plus, pendant la pandémie de COVID-19, les femmes de la région MENA ont vu le nombre d’heures consacrées aux soins non rémunérés augmenter en raison de la fermeture des écoles et des crèches, de la réduction des services publics pour les personnes handicapées et les personnes âgées, de la non-disponibilité des travailleurs domestiques et de la nécessité de s’occuper des membres de la famille atteints de COVID-19. Quant aux femmes de la région MENA qui travaillent, elles sont plus susceptibles d’être concentrées dans des secteurs à faible productivité et de travailler dans des conditions vulnérables avec une protection sociale insuffisante. Les écarts salariaux entre les hommes et les femmes persistent, même dans les emplois traditionnellement féminisés.

Les femmes ne peuvent apporter une contribution significative au marché du travail et à l’économie que si leur autonomisation économique est encouragée par leur famille et la société en général. Dans les quatre pays, des normes sociales restrictives continuent de freiner l’autonomisation économique des femmes et de tolérer la violence envers les femmes, toujours omniprésente dans la région et qui représente un coût social et économique important. Certaines de ces normes sont également inscrites dans la législation (sur le statut personnel). Les dispositions discriminatoires en matière de mariage et de divorce, de prise de décision familiale, de droits en matière d’héritage et de propriété, ainsi que de liberté de circulation sont contraires aux garanties constitutionnelles existantes en matière d’égalité des sexes et continuent de freiner l’autonomisation économique des femmes.

La réforme est une chose – veiller à ce que les réformes soient mises en œuvre, appliquées et aient réellement un impact positif sur la vie des femmes en est une autre, en particulier lorsque ces réformes nécessitent de modifier des attitudes et des mentalités bien ancrées. Il faut souvent des efforts considérables et toute une série de facteurs pour faire de ces réformes une réalité. En s’appuyant sur les expériences des quatre pays pour faire progresser l’autonomisation économique des femmes, ce rapport identifie dix « facteurs de réussite » :

  • Adhérer aux normes internationales/régionales, les mettre en œuvre et rendre compte des progrès réalisés, et participer aux mécanismes d’examen internationaux/régionaux pour mesurer les progrès de l’autonomisation économique des femmes.

  • Constituer une base de données solide pour défendre et mener à bien les réformes juridiques, politiques et institutionnelles

  • Échelonner les politiques d’autonomisation économique des femmes en vue d’une réforme juridique progressive.

  • Obtenir un engagement politique en faveur de la réforme au plus haut niveau.

  • Faire preuve de ténacité dans le plaidoyer et le lobbying pour faire pression sur les gouvernements afin qu’ils entreprennent des réformes.

  • Soutenir la participation et le leadership des femmes.

  • Adopter des approches multipartites et multisectorielles pour une réforme globale.

  • Renforcer les capacités et recourir à l’apprentissage par les pairs.

  • Lutter contre les normes sociales restrictives et les stéréotypes qui sous-tendent les législations discriminatoires et freinent l’autonomisation économique des femmes.

  • Garantir la mise en œuvre et le respect des réformes.

En plus de ces facteurs de réussite, le rapport formule une série de recommandations détaillées, énumérées ci-dessous à la rubrique « Conclusions et recommandations clés », et dans chaque chapitre du rapport.

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Initialement publié par l'OCDE en anglais sous le titre : Changing Laws and Breaking Barriers for Women’s Economic Empowerment in Egypt, Jordan, Morocco and Tunisia, © OCDE/OIT/CAWTAR 2020, Éditions de l'OCDE, Paris.

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