Résumé

Durant les premiers mois de la pandémie de COVID-19, l’enseignement à distance a permis d’assurer la continuité pédagogique pour de nombreux élèves. Mais les cours en ligne sont loin d’avoir été la panacée pour tous. En effet, si les différences d’accès à Internet et aux outils numériques se sont réduites dans les pays et territoires de l’OCDE, l’enquête PISA 2018 met toutefois en évidence la persistance d’un écart entre des élèves défavorisés aux compétences numériques plus faibles et des élèves favorisés plus à l’aise avec Internet. Ces disparités ont ainsi contribué à pénaliser davantage les élèves vulnérables dans leurs apprentissages durant la pandémie. Lorsque viendra l’heure du retour à la normale dans nos sociétés et nos écoles, nous aurons alors besoin de nos meilleurs enseignants et ressources numériques pour aider les élèves à retrouver leurs marques. Mais qu’entend-on, au fond, par « bon » enseignement ? Et les enseignants chevronnés travaillent-ils vraiment dans les établissements qui en ont le plus besoin ?

Le chapitre 1 de ce rapport pose la problématique en termes concrets : dans quelle mesure les élèves défavorisés ont-ils accès à un enseignement efficace, ainsi qu’aux équipements et infrastructures numériques susceptibles de les aider à surmonter les difficultés sur lesquelles ils n'ont aucune prise et qui, pourtant, peuvent les handicaper ?

Ce premier chapitre examine en outre les modalités de répartition des enseignants entre les différents types d’établissement (favorisés ou défavorisés sur le plan socio-économique ; publics ou privés ; en zone rurale ou urbaine) selon certaines caractéristiques, comme l’expérience et le sentiment d’efficacité personnelle, ou certaines pratiques, comme l’activation cognitive. Les indices de dissimilarité mesurent, à cet égard, le degré de concentration.

Mais qu’est-ce qui caractérise exactement un bon enseignant et un bon enseignement ? C’est à cette question que se propose de répondre le chapitre 2, en examinant les caractéristiques et pratiques des bons enseignants. Les données de l’enquête TALIS 2018 mettent en évidence la grande inégalité de leur répartition ; dans près d’un tiers des pays et territoires ayant participé à l’enquête TALIS, la prévalence des enseignants expérimentés est ainsi plus forte dans les établissements favorisés sur le plan socio-économique. Or, cette tendance n’est pas sans conséquences, en particulier sur les compétences en compréhension de l’écrit des élèves défavorisés : celles-ci sont en général plus élevées dans les systèmes éducatifs où la répartition des enseignants expérimentés est plus uniforme entre les établissements.

Ce deuxième chapitre montre par ailleurs que les enseignants tirant le meilleur parti de leur temps d’enseignement proprement dit en classe travaillent en général – une fois encore – dans des établissements favorisés sur le plan socio-économique, et ce dans plus d’un tiers des pays et territoires ayant participé à l’enquête TALIS. Pour autant, cela ne veut pas forcément dire que les enseignants qui savent maximiser leur temps d’enseignement sont plus nombreux dans les établissements favorisés. Il se peut en effet aussi que les enseignants des établissements dont les élèves sont, pour la plupart, moins bien lotis, ne soient pas en mesure de maximiser leur temps d’enseignement car leurs cours sont souvent perturbés par des problèmes de discipline.

Le chapitre 3 se consacre ensuite aux questions numériques et à l’équité. Il examine la connectivité à Internet et l’infrastructure et les équipements numériques des établissements, mais aussi les compétences numériques des enseignants, leur formation et leur sentiment d’efficacité personnelle dans ce domaine, ainsi que leur utilisation de ces outils dans le cadre de leur enseignement. Sans grande surprise, les établissements dont les ressources numériques sont si insuffisantes qu’elles entravent l’offre d’un enseignement de qualité sont plus souvent des établissements publics que privés, et des zones rurales qu’urbaines. Leur effectif d’élèves est en outre majoritairement défavorisé. Cependant, le simple accès aux technologies de l’information et de la communication (TIC) ne suffit pas, à lui seul, pour permettre aux élèves de développer des compétences numériques telles que le repérage des informations biaisées sur Internet. Les élèves ont besoin d’être guidés par des enseignants bien formés, à l’aise avec les technologies, et qui en font un usage régulier. Les données de l’enquête TALIS 2018 montrent que les enseignants ayant une bonne maîtrise du numérique sont plus susceptibles d’enseigner dans des établissements privés dans près d’un quart des pays et territoires participant à l’enquête TALIS. Toutefois, comme le rappelle le chapitre 3, il ne suffit pas d’améliorer l’infrastructure TIC des établissements et de rééquilibrer la répartition des enseignants pour permettre à tous les élèves d’être sur un pied d’égalité en matière d’apprentissage numérique. Mais quelle est alors la clé ? La collaboration entre enseignants. Les données TALIS montrent en effet que lorsque les enseignants travaillent ensemble sur des projets, ils utilisent davantage les technologies numériques en classe, en moyenne, dans les pays et territoires de l’OCDE.

Quel est le lien entre l’inégalité d’accès à des enseignants chevronnés et les disparités d’apprentissage entre élèves favorisés et défavorisés ? Le chapitre 4 approfondit cette question en notant, par exemple, que les pays et territoires où la répartition des enseignants expérimentés est inégale ont aussi obtenu des scores en moyenne inférieurs à l’évaluation PISA 2018 de la compréhension de l’écrit. Le même constat vaut pour les systèmes éducatifs où les enseignants ayant une formation solide, ainsi que ceux qui savent optimiser leur temps de classe, sont répartis de manière inégale, et dans ces trois cas, surtout au détriment des élèves défavorisés. Pour ce qui est des compétences numériques des élèves, c’est l’accès à des enseignants ayant un sentiment d’efficacité personnelle élevé dans ce domaine qui apparaît essentiel. Les élèves défavorisés ont ainsi la possibilité d’acquérir des compétences numériques égales, voire supérieures, à celles de leurs pairs favorisés lorsque la répartition des enseignants confiants dans l’utilisation des TIC est plus uniforme.

Le chapitre 4 examine également les possibilités dont disposent les systèmes éducatifs pour inciter davantage de bons enseignants à travailler dans les établissements défavorisés qui en ont le plus besoin. L'autonomie des établissements semble prometteuse à cet égard, même si d’autres facteurs entrent souvent en jeu. Dans les systèmes accordant aux établissements une plus grande marge de manœuvre pour recruter et licencier les enseignants et fixer leurs salaires, la répartition des meilleurs enseignants semble plus équitable. Les facteurs, tels que l’expérience, qui jouent un rôle prépondérant dans la répartition des enseignants dans les systèmes éducatifs centralisés ont moins d’importance dans les systèmes plus décentralisés, faisant ainsi de l’expérience de l’enseignant un atout, certes, mais au même titre que tout un ensemble d’autres critères. Les établissements parviennent souvent mieux que les systèmes éducatifs à cerner certains points forts des enseignants qui, à la différence des années d’ancienneté, sont difficiles à identifier. En outre, plus les chefs d’établissement ont d’autonomie pour adapter la rémunération des enseignants à la difficulté des tâches qu’ils assument, plus les établissements sont en mesure d’attirer les enseignants les plus chevronnés dans les classes les plus difficiles.

L’octroi d’une plus grande autonomie aux établissements concernant les décisions relatives à leur personnel ne va toutefois pas sans réserve. Le renforcement de l’autonomie nécessite ainsi la mise en place de mesures de responsabilisation plus strictes et de mécanismes permettant aux établissements défavorisés de faire jeu égal avec les établissements favorisés pour attirer les enseignants talentueux. Les modèles de financement progressif des établissements, comme ceux adoptés en Suède, permettent aux établissements défavorisés de verser des salaires plus élevés. Souvent, ce ne sont toutefois pas les incitations financières qui attirent les meilleurs enseignants dans les établissements défavorisés, mais la possibilité de progresser plus rapidement dans leur carrière : c’est l’une des caractéristiques des mesures systémiques, comme celles appliquées par Shanghai (Chine). Enfin, les modèles de choix contrôlé, comme ceux adoptés par la Communauté flamande de Belgique, sont un autre exemple de moyens de parvenir à une répartition plus équitable des enseignants efficaces : en accordant aux parents la liberté de choisir l’établissement de leur enfant tout en impliquant les établissements dans le recrutement des enseignants, on incite les établissements à rechercher des enseignants dont les caractéristiques spécifiques répondront réellement aux besoins existants. Dans ce modèle, la liberté laissée aux établissements dans le recrutement de leur personnel s’accompagne de mesures de responsabilisation supplémentaires ainsi que d’un financement basé sur les besoins.

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