6. Gestion des vérifications et de la discipline fiscale

La fonction de contrôle, de vérification et d’enquête évalue l’exactitude et l’exhaustivité des informations déclarées par le contribuable. Elle mobilise en moyenne trente pour cent des effectifs de l’administration fiscale et vérifie que les obligations fiscales ont été respectées. Bien qu’elle consiste généralement à mener des vérifications fiscales sur place ou sur pièces, le recours aux contrôles, validations et croisements automatisés des informations des contribuables est de plus en plus fréquent. L’exécution et la visibilité de ces mesures et des autres activités liées à la discipline fiscale sont essentielles pour favoriser le respect volontaire des obligations fiscales, notamment grâce à leurs effets sur la perception de l’équité du système fiscal et à leur caractère dissuasif. Ce chapitre examine donc :

  • Comment les administrations fiscales gèrent les risques d’indiscipline fiscale, notamment l’utilisation d’ensembles de données à la fois vastes et intégrés ;

  • Les activités liées à la discipline fiscale entreprises par les administrations fiscales, notamment pour basculer leurs vérifications sur place vers un environnement virtuel ; et

  • Les travaux sur la fiscalité et la délinquance.

Le rapport de l’OCDE The Changing Tax Compliance Environment and the Role of Audit (OCDE, 2017[1]) analyse les changements successifs intervenus au sein des administrations fiscales qui, pris dans leur ensemble, ont changé la nature de l’environnement de respect des obligations, et ont ainsi permis une gestion plus ciblée de la discipline fiscale.

Ils reposent en grande partie sur l’amélioration de la disponibilité des données. Avec la montée en puissance continue du numérique, les données fiscales des contribuables et de tiers seront encore plus accessibles (données de facturation électronique, des caisses enregistreuses en ligne et informations sur les états financiers), ce qui contribuera à mieux comprendre les déficits fiscaux. La plupart des administrations fiscales appliquent désormais des techniques fondées sur la science des données et utilisent des outils analytiques pour leurs procédures visant à améliorer la discipline fiscale (voir le tableau 6.1) ; cette question est abordée de façon plus approfondie plus loin dans ce chapitre. L’encadré 6.1 contient également des exemples des diverses techniques d’exploration de données employées par les administrations fiscales.

On observe également une tendance croissante à associer l’analyse et l’étude comportementale afin d’avoir une compréhension plus globale des risques, des modèles de comportement et des activités propices à la discipline fiscale. Le graphique 6.1 ci-après indique le pourcentage d’administrations fiscales qui utilisent ces approches comportementales pour leurs travaux.

Face au nombre croissant de données stocké par voie électronique et au recours à de nouveaux processus et techniques pour faciliter le transfert, le stockage et l'intégration des données, la quantité de données dont disposent les administrations fiscales pour faire respecter les obligations a considérablement augmenté. Les sources de données comprennent :

  • Les données provenant de dispositifs : Les données peuvent être recueillies auprès de dispositifs qui enregistrent les transactions comme les caisses enregistreuses en ligne et les ordinateurs de bord des taxis et poids lourds ainsi que les enregistrements des barrières et ponts-bascules.

  • Les données des banques, commerçants ou services de paiement intermédiaires et prestataires de services : Elles permettent de vérifier directement les revenus ou actifs déclarés par le contribuable. Certains pays reçoivent déjà régulièrement les détails ou les totaux des transactions des contribuables.

  • Les données des fournisseurs : La collecte de données auprès des fournisseurs, directement ou par l’intermédiaire du contribuable, permet de dresser un tableau plus complet des activités et revenus du contribuable. Cela est rendu possible grâce à l’utilisation accrue de systèmes de facturation électronique qui, ainsi que le souligne le chapitre 4, permettent à certaines administrations fiscales de préremplir les déclarations.

  • Les données des clients : Cette démarche est plus facile dans les circonstances où le nombre de clients est limité et connu, mais des mécanismes pour stimuler la discipline fiscale des clients sont de plus en plus souvent utilisés, notamment pour la vérification des recettes en espèces.

  • Les données non structurées relatives au contribuable : On observe sur Internet et sur les réseaux sociaux un nombre croissant de traces électroniques relatives à des activités et transactions d’entreprises. L’analyse des données non structurées dans les courriers électroniques permet également d’améliorer les temps de réponse et l’exactitude comme indiqué dans l’exemple de Singapour à l’encadré 6.1.

  • Les données d’autres organismes publics : Les données détenues par d’autres organismes publics, notamment pour l’octroi de permis, à des fins réglementaires ou de sécurité sociale peuvent être utiles pour vérifier les déclarations fiscales ou évaluer les risques. C’est ainsi que l’administration fiscale française utilise les informations des plans cadastraux locaux, le registre des propriétés immobilières et les photographies aériennes disponibles sur Internet pour repérer les biens immobiliers qui, en raison de leur usage et de leur valeur, sont assujettis à un impôt spécial (voir l’encadré 6.2).

  • Les données des partenaires internationaux : Les nouveaux échanges internationaux de données, entamés dans le cadre de la Norme commune de déclaration (NCD) et des déclarations pays par pays, augmentent considérablement la quantité de données disponibles sur les activités internationales, procurent des informations utiles pour les processus de sélection des dossiers et de vérification et, dans certains cas, pour pré-remplir les déclarations.

L’accès à de vastes ensembles de données s’accompagne cependant de quelques risques nouveaux. Il est notamment de plus en plus probable que des données intéressant l’administration fiscale d’une juridiction soient détenues sur le territoire d’une autre juridiction. Dans ces circonstances, il est parfois difficile de se procurer automatiquement les données auprès de leur détenteur situé dans une autre juridiction. Cela complique parfois l’évaluation des risques, ainsi que le préremplissage des déclarations ou l’élaboration plus poussée de processus mettant la discipline fiscale au cœur du système.

Prenons, par exemple, la croissance de l’économie du partage et à la demande que facilitent les plateformes en ligne dont le fonctionnement dépasse les frontières. Ce risque peut croître parallèlement au développement de l’économie en ligne, en particulier s’il va de pair avec le remplacement de l’emploi salarié (et de la déclaration des revenus par les employeurs) par le travail indépendant. Le rapport de l’OCDE The Sharing and Gig Economy : Effective Taxation of Platform Sellers (OCDE, 2019[2]) se penche sur cette question. Il examine un certain nombre de stratégies adoptées actuellement par les administrations fiscales ainsi que leurs limites et recommande de définir un cadre normalisé de déclaration pour faciliter à l’avenir les éventuels échanges automatiques de renseignements entre les administrations fiscales. Il s’est également concrétisé par l’élaboration des documents suivants :

  • Un ensemble de règles types qui, une fois transposées dans le droit, imposent aux plateformes numériques de recueillir des informations sur les revenus perçus par ceux qui utilisent ces plateformes pour proposer des services personnels, d’hébergement et de transport, et de communiquer ces informations aux administrations fiscales (OCDE, 2020[3]).

  • Un code de conduite pour faciliter l’adoption d’une approche standard de la coopération entre les administrations et les plateformes en vue de fournir des informations aux vendeurs en ligne et de leur procurer un soutien pour les aider à se conformer à leurs obligations fiscales tout en minimisant la charge liée à la discipline fiscale (OCDE, 2020[4]).

Un autre risque relevé a trait aux actifs financiers numériques comme les cryptomonnaies. Il peut être très difficile de retrouver les propriétaires d’actifs numériques même s’ils ont un lien avec la création d’un portefeuille numérique spécifique (sensiblement similaire à un compte en banque). Retrouver les personnes ou les entités qui se cachent derrière certaines adresses de portefeuilles numériques est difficile, voire impossible et mobilise des ressources importantes.

Bien qu’il ne s’agisse pas d’un risque en tant que tel, il convient de noter que les règles de protection des données pourraient limiter les circonstances dans lesquelles il est possible de conserver, traiter ou partager des données. Les administrations doivent tenir compte de cet aspect crucial lorsqu’elles conçoivent des systèmes qui reposent sur de vastes ensembles de données et sur la conservation des données.

Ces dernières années, l’application de l’analyse avancée à la gestion des risques s’est beaucoup développée et le ciblage des risques est de plus en plus utilisé.

  • Le graphique 6.2 indique que 80 % des administrations fiscales déclarent utiliser les données massives dans le cadre de leurs activités et que celles qui les utilisent le font la plupart du temps pour améliorer leurs activités liées à la discipline fiscale.

  • Sur les 58 administrations fiscales couvertes par ce rapport, 52 déclarent utiliser la science des données/des outils analytiques, tandis que les administrations restantes se préparent actuellement à les utiliser à l’avenir (voir le tableau A.51).

  • De même, la plupart des administrations couvertes par cette publication ont déjà adopté l’intelligence artificielle, notamment l’apprentissage automatique pour l’évaluation des risques ou la détection des fraudes, ou sont en train de le faire (voir le tableau 6.1 et le graphique 6.3).

Le recours à des techniques analytiques de plus en plus sophistiquées pour développer les ensembles de données permet une gestion plus ciblée des risques et l’élaboration de mesures d’intervention, y compris par des processus automatisés. L’encadré 6.3 présente quelques exemples. Par ailleurs, le rapport de l’OCDE Advanced Analytics for Tax Administration : Putting data to work (OCDE, 2016[5]) donne des orientations pratiques sur la manière dont les administrations fiscales peuvent utiliser l’analyse pour favoriser la discipline fiscale et la prestation de services publics.

Une autre approche de la gestion ciblée des risques consiste à créer des unités chargées d’examiner les dossiers fiscaux de certains segments de contribuables. Les deux domaines dans lesquels l’administration fiscale a jugé utile de gérer certains groupes de contribuables de manière segmentée sont les grandes entreprises et les contribuables fortunés. La concentration des ressources de l’administration sur la gestion de ces catégories s’explique par les raisons suivantes :

  • Importance des risques d’indiscipline fiscale : en raison de la nature et du type de transactions, des activités à l’étranger, des possibilités et stratégies visant à réduire les créances fiscales et, dans le cas des grandes entreprises, des différences entre les bénéfices comptables et les bénéfices calculés à des fins fiscales.

  • Complexité des transactions et de la fiscalité : compte tenu, en particulier, de l’importance des intérêts en jeu et, dans le cas des contribuables fortunés, de la combinaison entre leurs affaires publiques et privées.

  • Intégrité du système fiscal : importance de pouvoir donner aux parties prenantes des garanties sur les activités entreprises à l’égard de ces groupes de contribuables.

En outre, en ce qui concerne les gros contribuables, un petit nombre d’entre eux sont généralement redevables d’une part disproportionnée des recettes fiscales recouvrées. Selon les données collectées dans le cadre de l’enquête ISORA 2021, entre 30 % et 60 % des recettes totales nettes collectées par la plupart des juridictions, y compris les retenues à la source sur les revenus des employés, proviennent de contribuables concernés par les programmes dédiés aux gros contribuables (voir le graphique 6.4). En moyenne, 2.3 % environ des entreprises concernées par ces programmes représentent 43 % des recettes totales recouvrées (voir le tableau 6.2).

Si la gestion de ces groupes de contribuables est souvent prise en charge dans le cadre d’un programme, bon nombre de juridictions les intègrent dans une structure, qui nécessite un bureau dédié aux gros contribuables ou une unité responsable des contribuables très fortunés. Le périmètre d’activité de ces unités varie considérablement et va des activités traditionnelles de contrôle aux approches multiservices (voir le graphique 6.5). Cependant, en moyenne, les deux tiers des membres du personnel de l’administration fiscale employé dans les bureaux ou par les programmes dédiés aux gros contribuables effectuent des travaux de contrôle, d’enquête et d’autres missions de vérification (voir le Tableau 6.2).

S’il est essentiel que les administrations fiscales soient conscientes des risques actuels d’indiscipline fiscale et préparent des stratégies de réponse appropriées, il est également important qu’elles comprennent quels peuvent être les risques futurs et qu’elles les préviennent. L’accès accru aux données et les capacités dont disposent les administrations fiscales pour les traiter et les analyser leur permettent d’évaluer les risques future avec plus de fiabilité. Le graphique 6.2 montre qu’un grand nombre d’administrations fiscales se livrent à des prévisions, ce qui leur permet d’évaluer où de nouveaux risques d’indiscipline fiscale peuvent se poser et d'élaborer en temps utile les stratégies requises pour les atténuer.

Cet aspect est particulièrement important alors que les juridictions sortent de la pandémie de COVID-19. Selon les administrations fiscales, la pandémie a influé sur la discipline fiscale des contribuables, car les confinements et autres mesures prises par les pouvoirs publics ont eu des répercussions sur les sources de revenus de nombreux contribuables, entraînant une baisse des bénéfices, voire des pertes. La plupart des administrations ayant réduit ou suspendu les activités liées à la discipline fiscale, cela a également eu des répercussions sur les données disponibles pour évaluer correctement les risques. Les compétences spécialisées dans le domaine de la modélisation et de l’analyse que les administrations fiscales ont acquises avant la pandémie ont permis de réagir à ces défis et de tenir compte des changements de comportement des contribuables.

Il est intéressant de noter une évolution au sein de l’administration fiscale : la reconnaissance que la fonction d’analyse des données doit être décentralisée et répartie plus largement au sein de l’organisation. Les administrations fiscales peuvent ainsi se préparer à repérer plus rapidement les risques émergents et à définir les actions précoces possibles. Elles réfléchissent donc désormais à la manière d’intégrer l’intelligence artificielle dans les procédures visant à améliorer la discipline fiscale et cette démarche devrait être au centre de la transformation numérique dans le domaine de la gestion future de la discipline fiscale et des risques. L’encadré 6.4 présente des exemples de cette démarche.

La nature des « activités liées à la discipline fiscale » entreprises par les administrations fiscales pour déterminer si les contribuables ont correctement déclaré l’impôt dû évolue. Comme on l’a vu plus haut, l’accès accru aux données et l’adoption de modèles analytiques sophistiqués permettent aux administrations fiscales de mieux repérer les déclarations, demandes ou transactions qui peuvent nécessiter un examen plus approfondi ou être frauduleuses. En outre, ces modèles, dont bon nombre peuvent fonctionner en temps réel, permettent aux administrations d’effectuer des vérifications électroniques automatisées de toutes les déclarations ou de certaines transactions.

Si les vérifications traditionnelles (notamment les vérifications complètes, d’un point précis ou sur pièces) représentent toujours les principales activités de vérification, le recours aux vérifications électroniques automatisées à partir d’approches fondées sur des règles pour traiter certains risques définis (comme le rejet automatique d’une demande, l’émission d’une lettre ou l’appariement d’une transaction) dote les administrations de moyens plus efficaces et efficients pour effectuer certaines activités de vérification. L’encadré 6.5 présente des exemples de travaux réalisés dans ce domaine.

Néanmoins, dans le cadre de ces approches, il y a lieu de se demander comment tenir compte de ces vérifications électroniques automatisées dans les informations sur les performances communiquées par les administrations dans l’enquête ISORA. La prise en compte de l’ensemble des vérifications est susceptible d’entraîner une distorsion des taux de couverture, de redressement et de rendement. Toutefois, lorsqu’elles remplacent les vérifications manuelles effectuées autrefois, il semblerait approprié de tenir compte de ce que font les administrations dans ce domaine.

À cet égard, dans sa version de 2021, l'Enquête ISORA invite les administrations fiscales participantes à ventiler le montant total des redressements supplémentaires résultant des activités liées au contrôle et à la vérification en (i) vérifications et (ii) vérifications électroniques du respect des obligations (au sens des vérifications électroniques, de la validation et de l’appariement des informations sur le contribuable).

Seules quelques administrations ont été en mesure de communiquer des informations sur les vérifications électroniques du respect des obligations. Toutefois, pour certaines d’entre elles, les vérifications électroniques du respect des obligations représentent une part importante des redressements supplémentaires effectués dans le cadre de l’ensemble des activités de contrôle et de vérification. (Voir le tableau A.34)

Alors que les enquêtes ISORA précédentes établissaient une distinction entre les taux d’ajustement des vérifications par type de vérification, un changement est intervenu lors de l’enquête ISORA de 2020. Les administrations fiscales sont désormais invitées à communiquer des informations relatives à l’ensemble des vérifications réunies. Seule une comparaison avec les données des enquêtes de 2018 à 2020 est donc possible.

L’examen des données permet de formuler quelques observations générales :

  • En moyenne, les taux d’ajustement des vérifications sont restés stables sur la période de 2018 à 2020 (voir le tableau 6.3). Cependant, les taux varient sensiblement selon les administrations prises en compte dans ce rapport, et vont du taux minime de 10 % en Slovénie et en Norvège à des taux atteignant 95 % et plus au Brésil, en Bulgarie et au Maroc (voir le graphique 6.7). (Les taux d’ajustement élevés peuvent bien sûr résulter de vérifications très ciblées).

  • L’ampleur des vérifications ressort également de l’examen des redressements établis. En moyenne, les redressements établis à la suite de vérifications représentent plus de 5 % des recettes totales collectées. Ils sont demeurés relativement stables au cours des années 2018, 2019 et 2020 (voir le tableau 6.3). Si l’on examine les données au niveau de chaque juridiction, on constate des écarts significatifs entre les 51 administrations qui ont été en mesure de fournir des données pour 2020 (voir le graphique 6.8).

  • La ventilation par type d’impôt montre que le ratio entre les redressements établis et les impôts collectés est plus élevé dans le cas de l’impôt sur les sociétés (IS). En moyenne, les redressements de l’IS en pourcentage de l’IS collecté s’élèvent à 11.7 %, soit un pourcentage plus de deux fois supérieur au pourcentage de la taxe sur la valeur ajoutée (4.6 %) et plus de quatre fois supérieur à celui de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (2.5 %) (voir le graphique 6.9).

  • Dans un grand nombre de juridictions, les redressements établis par les bureaux/programmes dédiés aux plus gros contribuables représentent une part importante des redressements liés aux vérifications (voir le graphique 6.10). En moyenne, les bureaux / programmes dédiés aux gros contribuables représentent environ 30 % du total des recettes supplémentaires liées aux vérifications (voir le tableau 6.2).

Par tradition, les administrations emploient différents types de vérifications, notamment des vérifications complètes ou d’un point précis, l’examen de la comptabilité et des enquêtes approfondies en cas de suspicion de fraude fiscale. Ces vérifications obligent généralement l’administration fiscale à se rendre dans les locaux du contribuable (vérifications sur place).

Les progrès technologiques ont amené les administrations à envisager de nouvelles méthodes pour dialoguer avec le contribuable lors d’un processus de contrôle, notamment la communication par voie électronique des documents relatifs à la vérification. Cette tendance s’est accentuée depuis la crise du Covid-19, car la fermeture des centres des impôts et le passage au télétravail d’un grand nombre de fonctionnaires des services fiscaux ont modifié la façon dont les vérifications sont menées.

Dans son rapport de 2021 intitulé Administration fiscale : la résilience numérique dans le contexte du COVID-19 (OCDE, 2021[6]), l’OCDE indique que sur les 32 administrations fiscales prises en compte dans le rapport, près de quatre-vingt-dix pour cent ont opéré un basculement de certaines composantes de l’activité de vérification sur place vers un mode virtuel/numérique. En outre, 76 % de ces administrations envisagent de continuer de mener leurs activités de vérification sur place sur un mode virtuel/numérique à l’avenir. Cette évolution est favorisée par l’utilisation accrue de la technologie dans les vérifications, ce qui contribue à améliorer l’efficacité. L’encadré 6.6 met en lumière certaines bonnes pratiques, dont l’exemple de l’Estonie qui doit être souligné, car il permet de favoriser la discipline fiscale en amont.

L’expression « délinquance fiscale » désigne tout comportement constitutif d’une infraction au droit fiscal et susceptible de faire l’objet d’une enquête, de poursuites et de sanctions en vertu des procédures pénales prévues par le système de justice pénale. Il existe diverses démarches organisationnelles de la réalisation d’enquêtes sur les délits fiscaux et l’enquête ISORA 2021 s’est penchée sur la responsabilité de diriger et de mener ces enquêtes.

Les informations rassemblées dans le cadre de l’enquête ISORA 2021 montrent que 55 % des administrations fiscales prises en compte dans cette publication prennent part à la réalisation d’enquêtes sur des délits fiscaux (tableau A 36). La plupart de ces administrations fiscales ont la double responsabilité de mener et de diriger des enquêtes sur les délits fiscaux tandis que les autres ont la responsabilité exclusive de mener les enquêtes, mais sous la direction ou l’autorité d’une autre instance comme la police ou le ministère public (voir le graphique 6.11).

Dans les circonstances où les administrations fiscales n’ont pas la responsabilité de mener les enquêtes, elles sont confiées à une autre autorité, comme la police ou le ministère public. Il peut s’agir également d'un organisme fiscal spécialisé, établi en dehors de l’administration fiscale.

Le tableau 6.4. indique le nombre total de dossiers déférés pour poursuites durant l’année fiscale dans les 32 administrations qui ont la responsabilité de mener des enquêtes sur les délits fiscaux. Alors que le nombre de dossiers déférés pour poursuites était le même en 2018 et 2019, un recul significatif a été enregistré en 2020.

Cela ressort également des données par juridiction qui montrent que près des trois quarts des administrations qui ont la responsabilité de mener des enquêtes sur les délits fiscaux ont déféré moins de dossiers pour poursuites en 2020 (voir le tableau A 36).

Cette baisse peut s’expliquer par plusieurs raisons. Il peut s’agir notamment d’un recul véritable des dossiers, les administrations réduisant les effectifs dans ce domaine dans le cadre d’une réaffectation plus générale des ressources en raison de la pandémie ou bien la pandémie peut avoir imposé des restrictions à la capacité de déférer des dossiers pour poursuites. Les futures éditions de cette série permettront de déterminer si la baisse de cette année était un phénomène passager lié à la pandémie ou bien l’amorce d’une tendance de longue durée.

La recherche de meilleures solutions pour combattre la délinquance fiscale est une priorité absolue, car le blanchiment de capitaux, la corruption, le financement du terrorisme et d’autres délits à caractère financier menacent les intérêts stratégiques, politiques et économiques de tous les pays. Les administrations fiscales, en tant que « gardiennes » d’un système financier solide, jouent un rôle crucial dans la lutte contre ces activités et sont en possession d’informations qui peuvent être décisives pour mener à bien une enquête pénale en matière fiscale. Combattre la délinquance fiscale exige d’améliorer la transparence et de déployer des efforts supplémentaires pour mobiliser les capacités des différents organismes publics, y compris au-delà des frontières, afin de prévenir et de détecter collectivement ces crimes et de poursuivre leurs auteurs, par une approche à l’échelle de l’ensemble de l’administration et par la coopération internationale. L’encadré 6.8 en donne des exemples.

Bibliographie

[6] OCDE (2021), « Administration fiscale : la résilience numérique dans le contexte du COVID-19 », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/addaac0c-fr.

[8] OCDE (2021), En finir avec les montages financiers abusifs : Réprimer les intermédiaires qui favorisent les délits fiscaux et la criminalité en col blanc, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/tax/crime/ending-the-shell-game-cracking-down-on-the-professionals-who-enable-tax-and-white-collar-crimes.htm (consulté le 13 May 2022).

[7] OCDE (2021), Lutte contre la délinquance fiscale ‒ les dix principes mondiaux, deuxième édition, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/b64062dd-fr.

[4] OCDE (2020), Code of Conduct: Co-operation between tax administrations and sharing and gig economy platforms, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/publications-and-products/code-of-conduct-co-operation-between-tax-administrations-and-sharing-and-gig-economy-platforms.pdf (consulté le 13 May 2022).

[3] OCDE (2020), Règles types de déclaration à l’intention des vendeurs relevant de l’économie du partage et de l’économie à la demande, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/fr/fiscalite/echange-de-renseignements-fiscaux/regles-types-de-declaration-a-l-intention-des-vendeurs-relevant-de-l-economie-du-partage-et-de-l-economie-a-la-demande.htm (consulté le 13 May 2022).

[2] OCDE (2019), The Sharing and Gig Economy: Effective Taxation of Platform Sellers: Forum on Tax Administration, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/574b61f8-en.

[1] OCDE (2017), The Changing Tax Compliance Environment and the Role of Audit, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264282186-en.

[5] OCDE (2016), Advanced Analytics for Better Tax Administration: Putting Data to Work, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264256453-en.

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