L’avenir de l’éducation face aux grandes tendances mondiales
Quel impact le changement climatique aura-t-il sur nos établissements d'enseignement au cours de la prochaine décennie ? Nos systèmes de recherche et d’innovation sont-ils prêts pour une ère placée sous le signe d’une science mondiale, ouverte et à forte composante numérique ? Quelles sont les implications de la diversité et de l’individualisme croissants de nos sociétés pour l’école ?
La publication Les grandes mutations qui transforment l’éducation est conçue pour accompagner la réflexion stratégique à long terme dans le domaine de l’éducation. Elle se propose de donner un aperçu des grandes tendances économiques, sociales, démographiques et technologiques, et d’examiner leur impact sur l’éducation.
L’examen de l’avenir de l’éducation à la lumière des grandes tendances actuelles sert deux objectifs principaux. Tout d’abord, il est nécessaire de mieux préparer l’éducation aux transformations en cours dans les sphères économique, sociale et technologique. Elle doit en effet évoluer pour continuer à accomplir sa mission : accompagner chacun sur la voie de son épanouissement personnel, civique et professionnel. Une meilleure compréhension des grandes mutations à l’œuvre dans notre monde constitue dès lors un premier pas essentiel dans cette direction.
Ensuite, l’observation des tendances actuelles nous aide à réfléchir à la façon dont l’éducation peut contribuer à les faire évoluer. En dotant chacun des compétences nécessaires pour naviguer dans le monde moderne, l’éducation a ainsi le potentiel d’influer sur l’existence des plus défavorisés. Elle peut contribuer à lutter contre la fragmentation croissante de nos sociétés et donner à chacun les moyens de devenir acteur de changement au sein de sa communauté.
La première édition de la série Les grandes mutations qui transforment l’éducation est parue en 2008, suivie de nouvelles publications en 2010, 2013, 2016 et 2019. Cette édition 2022 présente 25 grandes tendances, chacune illustrée de deux graphiques, au fil de cinq chapitres : croissance ; vie professionnelle et privée ; connaissance et pouvoir ; identité et appartenance ; et notre nature changeante.
Bien que toutes les tendances présentées ici soient pertinentes au regard de l’éducation, cet ouvrage ne peut toutefois pas réunir l’ensemble des tendances influant sur ce domaine. Le critère de sélection se fonde donc sur la disponibilité de données comparables au niveau international et accessibles au fil du temps, provenant de l’OCDE et d’autres sources fiables. L’accent est avant tout mis sur la zone OCDE, même si des données mondiales plus larges sont également incluses chaque fois que disponibles. Si l’on s’est attaché à présenter en priorité des tendances de long terme, elles portent cependant parfois sur des périodes plus courtes, notamment dans le cas des évolutions rapides de la technologie.
Cet ouvrage n’a pas vocation à donner des réponses définitives : il ne s'agit ni d’un rapport analytique, ni d’un recueil statistique, et encore moins de recommandations de l’OCDE sur ces différentes évolutions. Si les tendances sont bien réelles, les questions soulevées ici ne sont, elles, suggérées qu’à titre indicatif.
La série Les grandes mutations qui transforment l’éducation s’adresse aux décideurs publics, chercheurs, responsables de l’éducation, administrateurs scolaires et enseignants. Elle ne manquera pas non plus d’intéresser les élèves et le grand public, dont les parents. Nous invitons le lecteur à poursuivre l’exercice, en ajoutant à cette première réflexion des exemples de tendances de son propre pays ou de sa région. Enfin, n’oublions surtout pas que l’avenir est en perpétuel devenir. Il s’agira donc pour le lecteur de considérer l’ensemble des tendances présentées ici, mais aussi les différentes façons dont elles pourraient être amenées à évoluer demain.
Les avis divergent sur les évolutions historiques et, même lorsque consensus il y a, l’avenir est rarement la simple continuation des tendances du passé. On ne peut par ailleurs pas prévoir quelles tendances se poursuivront et lesquelles changeront de cap, ni dans quel contexte. Parfois, nous devons simplement accepter que nous pouvons nous tromper.
« La télévision ne fera qu’un temps. Les gens vont vite se lasser de regarder une boîte en contreplaqué tous les soirs ».- Darryl Zanuck, producteur de films, 1946
Dans le même ordre d’idée, il n’est pas certain que les tendances importantes par le passé, ou qui semblent l’être aujourd’hui, resteront influentes ; de nouvelles tendances, à peine perceptibles pour le moment, pourraient devenir cruciales à l’avenir.
« Le télé-achat, même s’il est tout à fait réalisable, fera un flop ».- Time Magazine, 1966
En l’absence de données ou de faits concrets sur l’avenir, la seule façon de le comprendre est de dialoguer. Le futur ne se prête pas à une simple observation passive. Il faut en parler activement afin d’en tirer des enseignements, qui pourront alors servir à convenir de mesures à mettre en place dès à présent.
Pertinence, rythme et impact
La série Les grandes mutations qui transforment l’éducation vise à alimenter de façon créative la réflexion stratégique sur l’avenir de l’éducation. Des ministères, organisations internationales, associations professionnelles, fédérations d’élèves/étudiants et autres organisations de la société civile s’en servent dans le cadre de leurs exercices de planification stratégique. Elle figure au programme de la formation de futurs enseignants, est utilisée en classe et sert de référence aux conseils scolaires et parents désireux de mener une réflexion sur l’avenir.
La meilleure façon de tirer parti de cet ouvrage est de s’en servir comme d’un outil, à adapter au contexte spécifique de chaque lecteur. Dans cette optique, certaines questions clés sont à poser :
Quelle est la pertinence de ces tendances dans mon contexte ?
Le contexte joue un rôle déterminant. Le vieillissement peut, par exemple, constituer un défi plus important en milieu rural qu’en milieu urbain, ou concerner davantage certaines régions d’un pays ou quartiers d’une ville. L’impact de la plupart des tendances dépend ainsi du contexte géographique, historique, politique ou culturel dans lequel elles s’inscrivent.
Quels sont les effets et le rythme de ces tendances ?
Certaines tendances sont lentes (la température mondiale a augmenté d’environ 0.8˚C au cours des 100 dernières années), tandis que d’autres sont plus rapides (le nombre d’utilisateurs actifs de Facebook est passé de 0 à 1 milliard en 8 ans). Les tendances plus lentes laissent certes davantage de temps pour réfléchir à leurs effets et à la façon d’y faire face, mais peuvent aussi être plus difficiles à infléchir. Le changement climatique est par exemple un phénomène lent, mais ses effets potentiels sont tellement énormes qu’ils menacent la vie sur notre planète.
Pouvons-nous influer sur ces tendances ?
Même lorsque les tendances sont imprévisibles, il est souvent possible de les faire évoluer. De petits gestes entrepris individuellement par des pairs ou des parents d’élève peuvent par exemple contribuer à faire reculer le cyberharcèlement en milieu scolaire. À un échelon plus large, l’action coordonnée de différents acteurs, dont les conseils de direction des établissements d’enseignement et les pouvoirs publics, peut quant à elle entraîner une modification des politiques de lutte contre le cyberharcèlement et de la réglementation en la matière. Tous ces éléments peuvent, ensemble, jouer un rôle essentiel dans la réduction de la prévalence de cette tendance néfaste.
Comment réagir à ces tendances ?
Il est essentiel de cultiver la flexibilité indispensable pour réagir face à l’imprévu. Prenons l’exemple des dispositifs de crise destinés à la gestion des épisodes climatiques extrêmes en milieu urbain : ils prévoient tout un éventail de scénarios d’intervention, à appliquer ou non en cas de crise majeure. La clé est donc d’allier flexibilité et réactivité, même en cas d’événements imprévus.
D’autres tendances à prendre en considération ?
Sans aucun doute. Les tendances analysées dans cet ouvrage sont un simple instantané de notre monde en pleine mutation. Cet ouvrage se veut volontairement succinct, par souci de praticité, mais d’autres tendances sont certainement tout aussi importantes à prendre en considération. Les cinq éditions précédentes de cette série examinent d’ailleurs d’autres tendances restant d’actualité, et nous invitons nos lecteurs les plus assidus à s’y replonger. Petit conseil, optez pour l’édition 2019 si vous vous intéressez à la démocratie et au vieillissement, pour l’édition 2016 si ce sont les villes et les biotechnologies qui vous passionnent, et pour celle de 2013 pour une plongée au cœur des compétences et du bien-être.
L’avenir aime nous surprendre : de l’analyse des tendances à l’utilisation de scénarios
Notre réflexion sur l’avenir est en grande partie linéaire, fondée sur le prolongement des tendances actuelles. Mais toutes les tendances sont loin d’être égales. Certaines, notamment celles liées à la croissance démographique ou au changement climatique, se prêtent facilement aux exercices de planification à long terme. D’autres sont en revanche moins prévisibles, comme celles concernant la technologie ou la culture des jeunes. Les tendances connaissent des ralentissements, des accélérations, des fléchissements et des ruptures. Et comme nous le rappelle avec force la pandémie de COVID-19, des événements imprévus peuvent venir perturber même les tendances les plus installées.
Ce volume innove par rapport aux éditions précédentes en intégrant deux nouveaux éléments :
Dans chaque chapitre, il met en lumière, dans une section spécialement créée à cet effet, certaines des façons inattendues dont le COVID-19 a perturbé les tendances mondiales, et continue de le faire.
Il relie le thème de chaque chapitre à un exercice de mini-scénarios, invitant le lecteur à réfléchir à la manière dont l’avenir pourrait ne pas correspondre à nos attentes actuelles.
Établir un lien avec les scénarios de l’OCDE sur l’école de demain
Face à des tendances en constante évolution et à la survenue d’événements totalement inattendus, l’utilisation de scénarios nous permet d’explorer les implications de diverses hypothèses d’avenir. Les quatre scénarios de l’OCDE sur l’école de demain ont ainsi été pensés sur une période d’environ 15 à 20 ans : une durée suffisamment longue pour que des changements significatifs puissent se produire au-delà des cycles politiques immédiats, mais pas trop non plus pour qu’elle ne semble pas trop lointaine à tous ceux qui ne seraient pas des futuristes ou visionnaires aguerris.
Chacune de ces hypothèses d’avenir est développée dans les deux dernières pages de cette introduction, autour de quatre axes communs : i) objectifs et fonctions ; ii) organisation et structures ; iii) corps enseignant ; et iv) gouvernance et géopolitique. Le lecteur est ainsi invité à utiliser ces scénarios en accompagnement des exercices correspondants à la fin de chaque chapitre, afin d’explorer l’ensemble de ces hypothèses d’avenir de manière structurée.
Cette projection dans l’avenir est conçue pour encourager la réflexion et la discussion. Nous espérons avant tout susciter chez les différents utilisateurs de ce rapport les questionnements suivants : « Quelles pourraient être les implications de ces tendances pour mon travail ; sommes-nous préparés à l’éventualité de ces différents scénarios ? ». Ou mieux encore : « Comment ces tendances et scénarios, conjugués, redéfinissent-ils le contexte dans lequel je prends mes décisions ? ». Cet exercice de réflexion peut nous aider à évaluer notre degré de préparation à ces différentes hypothèses d’avenir, et à agir dès maintenant pour les appréhender sereinement.
