2. L’environnement favorable au gouvernement ouvert

Le développement d’un environnement propice représente un prérequis nécessaire à la mise en œuvre des réformes ambitieuses en faveur du gouvernement ouvert. Cet environnement s’articule autour de stratégies et de politiques publiques qui insufflent une direction à ces réformes, et s’appuie sur des cadres légaux, règlementaires et institutionnels pour donner corps aux initiatives entreprises (OCDE, 2020[1]).

Le Cameroun intègre depuis un certain temps des initiatives favorisant la mise en place d’un gouvernement ouvert, à la fois dans ses politiques publiques, son cadre légal et dans les missions qui sont dévolues à certaines institutions. À titre d’exemple, le document d’orientation politique « Cameroun Vision 2035 » institue la « consolidation du processus démocratique et le renforcement de l’unité nationale » comme objectif général (République du Cameroun, 2009[2]), et la « Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 » (SND30) mentionne explicitement le concept de gouvernement ouvert et détaille les initiatives prioritaires en termes de transparence, de redevabilité, et de participation citoyenne pour créer cet environnement favorable (République du Cameroun, 2020[3]). Du point de vue légal, le Cameroun s’appuie largement sur le processus de décentralisation initié depuis plusieurs années pour renforcer la participation citoyenne dans la gouvernance locale.

À travers la Vision 2035, qui a pour objectif de « garantir l’existence des espaces d’expression et de libertés, la stabilité des institutions, l’existence de contre-pouvoirs et d’organes de régulation opérationnels et crédibles » et dont la légitimité s’appuie sur « la recherche d’une large participation et d'une représentativité de tous les segments de la société » (République du Cameroun, 2009[2]), les autorités camerounaises ont un objectif politique explicite vis-à-vis duquel elles peuvent valoriser les initiatives déjà engagées et poser les fondements d’une approche plus holistique et cohérente. Si peu de pays disposent actuellement d’une approche entièrement intégrée du gouvernement ouvert, celle-ci doit constituer un horizon de réformes pour insuffler un véritable changement dans la culture de gouvernance dans les institutions du pays tout en s’appuyant sur un cadre réglementaire et légal favorable au fait de replacer les citoyens et leurs attentes au centre de la gouvernance publique (OCDE, 2020[4]).

D’après la Feuille de route pour l’évaluation de l’impact des réformes de gouvernement ouvert (OCDE, 2020[1]), les trois cadres permettant la mise en œuvre d’un environnement favorable au gouvernement ouvert se comprennent comme tels :

  • Un cadre légal et réglementaire qui définit les préconditions permettant de mettre en pratique les principes du gouvernement ouvert. Ce cadre établit les règles générales et détermine les droits et obligations des citoyens, des parties prenantes et du gouvernement. Les instruments juridiques sanctionnant ces règles, droits et obligations varient en fonction de la tradition et de l’ordonnance juridiques de chaque pays. Généralement, le cadre légal est constitué de lois contenant des dispositions relatives aux différentes politiques publiques du gouvernement ouvert (par exemple, la participation, la redevabilité, l’accès à l’information) ainsi que des références aux droits fondamentaux des démocraties modernes (par exemple, les libertés d’expression, de réunion et d’association). La durabilité d'une culture de gouvernement ouvert tient à l’inscription de tous les engagements dans la loi et les règlements. 

  • Un cadre de politiques publiques pour le gouvernement ouvert qui offre au gouvernement des orientations à moyen ou à long terme. Il établit une « feuille de route » pour les réformes du gouvernement ouvert qui définit le « quoi » et le « comment » des efforts de réformes et consiste généralement en un ensemble de documents politiques (stratégies, plans d’action etc.) détaillant des engagements, projets et initiatives visant à favoriser les principes du gouvernement ouvert. Les données empiriques suggèrent qu’une approche intégrée du gouvernement ouvert peut être favorisée par l’adoption d’une stratégie du gouvernement ouvert pour l’ensemble du gouvernement.

  • Un cadre institutionnel pour le gouvernement ouvert qui inclut toutes les institutions publiques dont les responsabilités sont en lien avec la coordination, la promotion, la surveillance et la mise en œuvre des politiques du gouvernement.

Ce premier chapitre examinera l’environnement du gouvernement ouvert à travers les cadres de politiques publiques et légaux, conformément aux dispositions 1 et 2 de la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (OCDE, 2017[5]). Dans un premier temps, il abordera l’enjeu de la définition du gouvernement ouvert au Cameroun. Dans un second temps, il analysera l’importance de l’engagement politique de haut niveau pour le développement d’un environnement favorable au gouvernement ouvert, avant dans un troisième temps, d’analyser les stratégies et politiques publiques en faveur du gouvernement ouvert. La dernière partie de ce chapitre passe en revue les principales dispositions du cadre légal et règlementaire lié au gouvernement ouvert.

Le gouvernement camerounais n’a pas adopté de définition officielle du gouvernement ouvert (GO). Le Programme National de Gouvernance (PNG), en charge de la coordination des réformes en faveur du gouvernement ouvert, utilise la définition de l’OCDE comme définition de travail. L’OCDE définit le gouvernement ouvert comme suit :

Une culture de gouvernance qui promeut les principes de transparence, d’intégrité, de redevabilité et de participation des parties prenantes, au service de la démocratie et de la croissance inclusive (OCDE, 2017[5]).

Il ressort des entretiens menés dans le cadre de ce scan avec les différents acteurs étatiques impliqués sur le gouvernement ouvert que cette définition ne semble pas être largement connue, et la clarification de ce que représente le gouvernement ouvert et les concepts-clés qui y sont associés au Cameroun ne fait pas l’objet d’une diffusion uniforme. La promotion du concept se limite principalement aux acteurs spécifiquement en charge de la promotion du gouvernement ouvert au Cameroun comme le PNG ou le Comité de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). La définition gagnerait ainsi à être davantage diffusée auprès d’une grande partie de l’administration non spécialisée.

L’adoption d’une définition du gouvernement ouvert claire, unique, et cocréée avec les principales parties prenantes représente pourtant une étape fondatrice – et essentielle – pour initier cette dynamique et assurer les bases d’un environnement favorable. La définition adoptée par un gouvernement représente par ailleurs un point de départ déterminant dans l’élaboration de ses politiques publiques ainsi que des cadres légaux et institutionnels du gouvernement ouvert, et sa conception doit refléter les ambitions et priorités d’un pays. Ses avantages ont été soulignés dans le Rapport mondial de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (voir Encadré ‎2.1) (OCDE, 2017[6]).

De nombreux pays, et de nombreuses organisations publiques proposent et utilisent des définitions différentes, ou parfois contradictoires. L’adoption d’une définition du gouvernement ouvert, pour être réellement efficace, doit donc répondre à un impératif de clarté, doit s’appuyer sur des concepts-clés eux-mêmes clairement définis et doit s’ancrer dans des définitions partagées (OCDE, 2020[4]). Par ailleurs, l’adoption d’une définition du gouvernement ouvert développée en collaboration avec les parties prenantes non étatiques (y compris le secteur privé, la société civile, les citoyens et les médias) à travers des consultations ouvertes favorise l’engagement de tous dans les réformes du gouvernement ouvert.

Selon l’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert (2020), seuls 6 des 42 pays interrogés ne disposaient pas de définition de travail ou officielle du gouvernement ouvert. 10 avaient adopté une ou plusieurs définitions officielles, tandis que 30 avaient adopté une ou plusieurs définitions de travail (OCDE, 2021[7]). Les définitions des pays interrogés s’appuient souvent sur la définition de l’OCDE (19 pays sur 35) et / ou sur la définition du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) (23 pays). Les concepts-clés les plus souvent associés au gouvernement ouvert sont la transparence (20 pays sur 23), la redevabilité (16 pays) et la participation (16 pays) (OCDE, 2020[8]). L’Encadré ‎2.2 présente plusieurs définitions officielles adoptées par des pays membres et non membres de l’OCDE.

Le Cameroun pourrait donc envisager d’élaborer et d’adopter une définition officielle du gouvernement ouvert qui lui serait propre. Le processus d’élaboration pourrait prévoir la collaboration des parties prenantes non publiques afin d’assurer l’adhésion la plus large. Il semble par ailleurs important de s’assurer que la définition choisie corresponde aux spécificités nationales et prenne en compte le contexte politique, culturel et socio-économique du pays. À ce titre, le cadrage d’un certain nombre d’initiatives en faveur de la transparence, la participation, la redevabilité et l’ouverture des données dans les documents d’orientation générale du pays (et notamment la SND30) facilitera la tâche aux autorités camerounaises dans la mesure où une réflexion sur les contours de ce concept semble déjà avoir été amorcée (voir section ‎2.3).

Cet exercice de définition semble d’autant plus important que le Cameroun a fait part de son intérêt pour une potentielle adhésion au PGO lors des entretiens avec les représentants du PNG. Afin de guider les gouvernements dans l’élaboration d’une définition, l’OCDE identifie un certain nombre de critères de qualité (voir Encadré ‎2.3).

Enfin, alors qu’une telle définition gagnerait à être élaborée avec les parties prenantes, il conviendra aussi, lorsqu’elle sera adoptée, d’en faire une communication la plus large possible afin d’en faciliter l’appropriation à la fois par des parties prenantes étatiques, mais aussi par les citoyens, la société civile et les médias dans leur ensemble. Une large diffusion permettra notamment un meilleur alignement des différentes initiatives liées à des thèmes associés au gouvernement ouvert, et de les agréger autour d’un référentiel conceptuel commun. La question de la communication sera étudiée plus en détails dans le chapitre 3 relatif aux processus favorisant une culture du gouvernement ouvert.

L’assurance d’un engagement politique de long-terme et pangouvernemental représente une condition préalable centrale à la mise en œuvre de réformes impliquant une forte coordination et une plus grande collaboration entre les agences et ministères impliqués dans le gouvernement ouvert (OCDE, 2020[1]). L’existence d’un engagement politique sincère et d’un fort leadership impliquant les autorités du plus haut niveau de l’État (président, ministres, élus et législateurs) représente le point de départ à partir duquel une vision peut se décliner en politiques publiques et cadres stratégiques, en plan d’action national (PAN), avant d’être transposée en cadres légaux et règlementaires qui structureront un environnement institutionnel.

Le Cameroun démontre depuis plusieurs années un engagement politique croissant en faveur des principes du gouvernent ouvert. Comme le détaille la section suivante, la SND30 et la Vision 2035 constituent des documents d’orientation politique comprenant des dispositions ambitieuses en faveur des principes du gouvernement ouvert que sont la transparence, la redevabilité, l’intégrité et la participation citoyenne. À titre d’exemple, le 18 octobre 2021, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement du Cameroun, M. René-Emmanuel Sadi, déclarait à l’occasion de la journée internationale de l’accès universel à l’information, dévoilant le projet de développement d’une loi générale d’accès à l’information :

« De même, nous envisageons la préparation d’une loi spéciale sur l’accès du citoyen à l’information sur la gestion des affaires publiques, dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de développement 2020-2030, qui viendra consolider les grands axes ouverts par la loi-cadre, relative à la liberté de communication sociale » (Ngoumou, 2021[9]).

L’élaboration de documents d’orientation centrés sur les principes du gouvernement ouvert, la constitution d’un groupe de travail sur le gouvernement ouvert au sein du PNG et le projet d’adhésion du gouvernement camerounais au PGO sont autant d’expressions d’un intérêt politique manifeste.

Les responsables politiques camerounais pourraient cependant fixer un cap plus clair et préciser un agenda des initiatives d’ouverture du gouvernement. Le gouvernement pourrait aussi envisager une communication de haut niveau plus volontaire et plus claire, à la fois en interne mais aussi vis-à-vis du grand public sur son engagement politique en faveur du gouvernement ouvert et de ses principes. En l’occurrence, alors que certains des principes comme la transparence et la redevabilité sont déjà portés par des prises de positions publiques, notamment sur la lutte contre la corruption, le leadership camerounais devrait apporter son soutien explicite à l’adoption d’une définition et d’une stratégie consacrant spécifiquement le concept de « gouvernement ouvert », et porter un projet clairement structuré dans le temps pour décliner la vision stratégique du gouvernement dans des objectifs concrets, et notamment l’adhésion au PGO.

L’environnement favorable au gouvernement ouvert est d’abord explicité à travers une volonté politique qui se décline en une feuille de route établissant un « pourquoi » et un « comment ». Il est donc tout d’abord défini par une politique publique ou une stratégie (ou un corpus de plusieurs documents stratégiques) qui exprime clairement les objectifs, les priorités et les étapes intermédiaires pour atteindre ces objectifs. L’objectif de l’élaboration d’un tel document de politique générale est aussi d’assurer une cohérence dans l’approche conçue par les autorités nationales, avant qu’elle ne soit déclinée au niveau local ou à travers des plans d’action plus détaillés. L’OCDE, à travers la première disposition de sa Recommandation sur le gouvernement ouvert propose notamment aux pays de :

« Prendre des mesures, au sein de toutes les branches du pouvoir et à tous les niveaux de gouvernement, pour élaborer et mettre en œuvre des stratégies et initiatives en matière de gouvernement ouvert, en collaboration avec les parties prenantes, ainsi que pour inciter les responsables politiques, les parlementaires, les hauts fonctionnaires et les autres agents publics à s’engager en ce sens, afin d’assurer la bonne mise en œuvre de ces stratégies et initiatives et afin de prévenir ou de surmonter les obstacles liés à la résistance au changement » (OCDE, 2017[5]).

Cette recommandation mentionne plusieurs concepts liés au gouvernement ouvert qu’il convient de clarifier, tant dans leur définition que dans leurs interactions : principes, stratégies et initiatives. Les principes du gouvernement ouvert, selon la définition de l’OCDE, sont la transparence, l’intégrité, la redevabilité et la participation. Une stratégie (stratégie de gouvernement ouvert – SGO – lorsqu’elle est dédiée à la mise en œuvre d’une politique de gouvernement ouvert) est un document d’orientation politique à moyen/long terme qui définit une vision, un agenda et une méthode pour les institutions publiques au niveau national ou infranational. Les stratégies définissent les grandes orientations en termes d’initiatives à prioriser pour remplir les objectifs sur les thématiques qu’elles abordent. Ces stratégies sont déclinées en initiatives, qui représentent la somme des actions prises par les pouvoirs publics pour atteindre les objectifs fixés dans le domaine du gouvernement ouvert. Ces initiatives s’articulent en cohérence grâce au cadre défini par les stratégies au niveau national (OCDE, 2020[1]).

L’éparpillement des initiatives de gouvernement ouvert et le besoin d’une meilleure mise en cohérence est un défi rencontré par de nombreux pays engagés dans des processus d’ouverture du gouvernement (OCDE, 2020[4]). Le plus souvent, les pays s’appuient sur plusieurs documents-clés pour assurer la mise en cohérence des initiatives en faveur du gouvernement ouvert, bien que certains aient décidé d’élaborer une stratégie unique. L’Enquête de 2020 de l’OCDE sur le gouvernement ouvert auprès de 52 pays membres et non membres de l’OCDE a déterminé que la plupart s’appuie sur une grande variété de documents stratégiques pour promouvoir les pratiques et politiques publiques en faveur du gouvernement ouvert. En moyenne, les pays ont rapporté disposer de 3,31 documents qu’ils considèrent comme les principaux documents de stratégie. Les plans d’action du PGO représentent le type de document le plus cité (70 % des répondants), suivi par les stratégies de gouvernance numérique (44 %), les programmes nationaux de développement ou de gouvernance (38 %), comme représenté dans le Graphique ‎2.1 (OCDE, 2021[7]).

Les sous-sections suivantes s’attacheront à étudier la prise en compte du gouvernement ouvert dans les cadres stratégiques du pays et les processus d’élaboration et d’évaluation de ces documents généraux d’orientation.

Le Cameroun, bien qu’il ne dispose pas de stratégie de gouvernement ouvert dédiée, intègre des éléments liés à la promotion d’un gouvernement ouvert dans des documents d’orientation nationale du pays. Dans ses réponses à l’Enquête sur le gouvernement ouvert de l’OCDE en 2020, le Cameroun mentionne la stratégie Cameroun Vision 2035, la SND30, la Stratégie nationale de lutte contre la corruption et la feuille de route du Comité ITIE comme les quatre principaux documents d’orientation qui structurent les initiatives étatiques en faveur du gouvernement ouvert (voir Tableau ‎2.1). Le Plan Stratégique Cameroun Numérique 2020, dans une moindre mesure, intègre des éléments pertinents pour le gouvernement ouvert (République du Cameroun, 2016[10]). Ces cinq documents cadres représentent une base solide pour l’avancement des concepts-clés du gouvernement ouvert. Par ailleurs, leur séquençage dans le temps, et notamment l’évolution de la prise en compte du gouvernement ouvert entre la Vision 2035 et la SND30 témoigne d’une plus grande précision dans la définition et d’une meilleure articulation entre les différents concepts-clés.

La vision développée par l’État camerounais sur la thématique du gouvernement ouvert est reflétée dans la politique générale Cameroun Vision 2035, élaborée en 2009 et qui a pour objectif d’établir un horizon et une stratégie pour placer le Cameroun dans les pays émergents à économie intermédiaire d’ici 2035 (République du Cameroun, 2009[2]). Au-delà de l’aspect économique, ce document de politique générale place l’amélioration et l’augmentation de l’efficacité de la gouvernance publique, ainsi que la participation et la transparence, comme des éléments clés du développement socio-économique du Cameroun à moyen et long terme. La Vision 2035 vise en effet à faire du Cameroun « un pays émergent, démocratique et uni dans sa diversité », vision qui s’articule autour de quatre objectifs généraux :

  • Réduire la pauvreté à un niveau socialement acceptable.

  • Atteindre le stade de pays à revenus intermédiaires.

  • Devenir un Nouveau Pays Industrialisé (NPI).

  • Consolider le processus démocratique et renforcer l’unité nationale.

Ce dernier objectif, qui correspond à une des principales hypothèses de succès de la Vision 2035, constitue le véhicule amenant à une réforme et une amélioration de la gouvernance publique en ligne avec les quatre piliers du gouvernement ouvert. Même si le concept de gouvernement ouvert n’y est pas explicitement mentionné, la vision fait explicitement référence à des principes du gouvernement ouvert : l'existence d'espaces d'expression et de libertés, de contre-pouvoirs et d'organes de régulation efficaces et crédibles, et la recherche d'une large participation et d'une représentativité de tous les segments de la société comme des objectifs de développement de l'État camerounais dans la consolidation des processus démocratiques (p.18), tandis que le « renforcement de la lutte contre la corruption, l'amélioration du système judiciaire, et la culture démocratique » constituent des bases de la stratégie pour la gouvernance de la Vision (p.45) (République du Cameroun, 2009[2]).

La mise en œuvre de la Vision 2035 s’échelonne en trois étapes distinctes organisées autour de quatre axes. La seconde phase a commencé en 2020 et s’achèvera en 2027. Du point de vue de la gouvernance (axe 3), cette phase vise principalement à (i) consolider la gouvernance et le climat des affaires dans la continuité des améliorations prévues et mises en œuvre dans la phase 1 (2009-19) et, (ii) intensifier la lutte contre le changement climatique. L’axe 4, « approfondissement de l’intégration nationale et consolidation du processus démocratique », comprend un certain nombre d’indicateurs de suivi en ligne avec la promotion des principes du gouvernement ouvert et de l’espace civique. C’est notamment le cas des indicateurs 4.2 :

  • Renforcer la transparence dans les processus électoraux et la crédibilité des institutions.

  • Garantir et renforcer le respect des libertés individuelles et associatives.

  • Promouvoir le développement et l’épanouissement de la société civile.

  • Promouvoir la participation la plus large aux processus électoraux.

  • Renforcer l’autorité de l’État et la crédibilité du système judiciaire.

  • Promouvoir la parité homme/femme dans les mandats électoraux.

Onze ans après le début de la mise en œuvre de la Vision 2035 et alors que la deuxième phase de mise en œuvre a commencé au début de l’année 2020, le Cameroun a conduit une évaluation de cette première phase et a souligné un certain nombre de progrès sur ces indicateurs, notamment à travers la décentralisation (avec l’adoption du Code général des collectivités territoriales décentralisées en 2019) et sur la promotion de la parité homme/femme dans les mandats électoraux, la réforme du code électoral de 2012 ayant permis une augmentation significative du nombre de femmes élues aux niveaux national et local (République du Cameroun, 2020[3]). Cependant, aucun objectif chiffré n’est prévu pour le suivi de ces thématiques. L’équipe chargée de la rédaction du présent scan n’a pas pu obtenir de rapport d’évaluation ou des données pour attester de l’avancement de certains des objectifs de gouvernance prévus dans la première phase (intensification de la lutte contre la corruption, amélioration du fonctionnement du secteur judiciaire, renforcement de la sécurité des personnes et des biens sur le territoire). La question du suivi et de l’évaluation des politiques publiques et initiatives en faveur du gouvernement ouvert sera étudiée plus en détails dans la section 3.3.2 du Chapitre 3 de ce scan. La Vision 2035 institutionnalise un certain nombre de principes importants du gouvernement ouvert et amorce, dès 2009, un tournant stratégique soulignant la volonté politique de favoriser le gouvernement ouvert. Les entretiens conduits auprès des parties prenantes du gouvernement camerounais suggèrent que de nombreux travaux de réforme en cours au Cameroun s’appuient effectivement sur l’esprit et les priorités de la Vision 2035 dans la promotion des principes du gouvernement ouvert. Les réflexions actuelles sur le développement d’une loi générale d’accès à l’information, ou l’adoption du code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques de 2018, s’insèrent directement dans ce cadre.

La Stratégie nationale de développement 2020-2030 (SND30) adoptée en 2020, représente la continuité de la Vision 2035 élaborée et adoptée en 2009 et, en ce sens, s’intègre dans le même objectif, celui de faire du Cameroun « un pays émergent, démocratique et uni dans sa diversité à horizon 2035 ». La SND30 fait suite au Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi 2010-2020 (DSCE) (République du Cameroun, 2009[11]), qui constituait le cadre de référence pour le pays jusqu’en 2019, et l’actualise en accord avec la Vision 2035 (République du Cameroun, 2020[3]). La SND30 s’articule autour de quatre piliers dont le dernier, « consolider le processus démocratique et renforcer l’unité nationale dans la diversité », constitue la colonne vertébrale de la réforme en faveur de concepts-clés liés au gouvernement ouvert. Alors que « la situation en matière de gouvernance semble n’avoir pas évolué positivement » (République du Cameroun, 2020[3]) sous l’impulsion du DSCE, la stratégie annonce que l’amélioration de la gouvernance représentera un « enjeu crucial pour l’émergence du Cameroun à l’horizon 2035 ». Les réformes envisagées par la stratégie portent sur six dimensions :

  • La décentralisation et le développement local.

  • Le renforcement de l’État de droit et la sécurité des personnes et des biens.

  • L’amélioration du service public de l’État.

  • La gouvernance économique et financière.

  • L’aménagement du territoire.

  • La promotion du bilinguisme, du multiculturalisme et de la citoyenneté.

Il s’agit du seul document d’orientation stratégique du pays faisant mention explicite du gouvernement ouvert, dans son paragraphe 378, qui consacre le principe en même temps qu’il ébauche un début de définition de ce que peut être le gouvernement ouvert au Cameroun.

La participation effective et efficace de toutes les populations, et surtout des groupes vulnérables et marginaux, sera enfin un défi majeur. Elle devra faire partie des bonnes pratiques consacrées, conformément à la Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local. Enfin, un accent sera mis sur la digitalisation accrue de la participation citoyenne dans le cadre de l’« open government » (République du Cameroun, 2020[3]).

Plusieurs points ressortent de ce paragraphe. Premièrement, la mise en œuvre d’une « participation effective et efficace de la population et des groupes vulnérables » semble représenter une ébauche de ce que pourrait être le gouvernement ouvert au Cameroun en mettant l’accent sur la dimension inclusive de la gouvernance et sur la dimension de la participation citoyenne. Deuxièmement, le gouvernement camerounais reconnait le défi que représentera cette transition. Troisièmement, le concept de gouvernement ouvert se réfère pleinement à l’idée centrale de participation citoyenne mais en l'abordant sous l'angle de la numérisation. Enfin, il semble que, dans son approche, le gouvernement camerounais s’appuie sur la Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local, ce qui fait notamment écho à la forte démarche décentralisatrice du gouvernement camerounais, et en particulier au rôle crucial que joue le Code général des collectivités territoriales décentralisées de 2019 dans la réorganisation de la participation citoyenne dans la gouvernance décentralisée (voir la section ‎2.5.3). Ce document intègre de nombreuses autres dispositions qui portent sur des enjeux de gouvernance se rapportant à des principes du gouvernement ouvert comme la transparence, la redevabilité, la participation citoyenne, l’ouverture des données et le développement d’une culture de gouvernance plus proche des citoyens et de leurs attentes. Cependant, celles-ci ne sont jamais directement reliées au concept de gouvernement ouvert évoqué ci-dessus. Le Tableau ‎2.2 présente les principales dispositions de la SND30 liées au gouvernement ouvert.

Bien que le concept de gouvernement ouvert ne soit pas développé dans la SND30, la somme des dispositions se rattachant aux concepts clés du gouvernement ouvert témoigne d’un engagement plus profond (en comparaison avec la Vision 2035) pour le gouvernement ouvert, en même temps qu’une vision plus précise et détaillée de ce que peut représenter la transparence, la redevabilité, la participation citoyenne, le partage des données et une gouvernance plus inclusive dans le contexte de la société camerounaise.

Cet inventaire, s’il augure d’un engagement croissant du gouvernement camerounais dans le gouvernement ouvert, met aussi en lumière le défi d’assurer la cohérence de ces mesures et l’intérêt que pourrait représenter la conception d’un cadre conceptuel qui structure ces initiatives éparses, comme recommandé par l’OCDE (OCDE, 2017[5]).

L’absence, au stade de l’élaboration de cette stratégie, d’une définition officielle du gouvernement ouvert peut expliquer dans une certaine mesure l’utilisation limitée du concept, et l’insuffisance de dispositions liées au gouvernement ouvert. À ce stade, l’élaboration d’une définition officielle semble donc importante pour assurer la mise en cohérence des initiatives détaillées.

La lutte contre la corruption revêt une importance toute particulière au Cameroun, qui en fait une priorité nationale dans la SND30 et dans la Vision 2035. Dans le cadre de ces efforts, le gouvernement camerounais s’est doté en 2010 d’une Stratégie nationale de lutte contre la corruption (SNLC) qui constitue depuis la pierre angulaire de l’agenda du gouvernement camerounais en termes de lutte contre la corruption et représente, de facto, un document d’orientation majeur dans la promotion de la redevabilité et de la transparence dans le pays (République du Cameroun, 2010[12] ; République du Cameroun, 2016[13]). Au-delà de la Vision 2035, cette stratégie est adossée à la Convention des Nations Unies contre la Corruption (UNCAC) et s’articule avec les objectifs du Document de stratégie pour la croissance et l’emploi du Cameroun (République du Cameroun, 2016[13]). L’objectif général de la stratégie est de :

« Soutenir le processus de transformation sociale du Cameroun afin de renforcer l'État de droit, la démocratie et la participation effective à la gestion des affaires publiques, la transparence et surtout la lutte contre la corruption. Pour atteindre cet objectif, la SNLC entend créer une masse critique d'acteurs positifs mobilisés contre la corruption. »1 (République du Cameroun, 2016[13]).

La SNLC incorpore par ailleurs trois objectifs spécifiques : (i) la lutte contre la corruption, (ii) le renforcement de l’intégrité, et (iii) la coordination du suivi-évaluation des objectifs de la SNLC. De fait, la SNLC articule la vision de l’État camerounais sur dix piliers, inspirés du Système national d’intégrité de l’organisation Transparency International et adopté au Cameroun en 2010 (République du Cameroun, 2016[13]) :

  • Pouvoir exécutif ;

  • Pouvoir législatif ;

  • Pouvoir judiciaire et institutions de lutte contre la corruption ;

  • Partenaires techniques et financiers (PTF) ;

  • Médias ;

  • Société civile ;

  • Autorités traditionnelles ;

  • Autorités religieuses ;

  • Partis politiques ;

  • Forces de l’ordre.

La stratégie, qui se décline aussi en plan d’action, propose pour l’intégralité des secteurs d’intérêt de l’objectif de lutte contre la corruption, ainsi que pour les dix piliers du système national d’intégrité, l’identification d’actions à entreprendre, désignant pour chacune un objectif, un indicateur de mesure, une organisation en charge ainsi que les acteurs impliqués. Ces actions s’articulent pour chaque secteur et piliers autour d’une analyse des causes et manifestation de la corruption, de difficultés potentielles et de facteurs facilitants pour la lutte contre la corruption.

La stratégie se développe dans une approche holistique des enjeux de corruption et propose des mesures favorisant la transparence, la redevabilité, mais aussi la participation citoyenne et l’ouverture des données, articulées autour du document de « Vision » de la SNLC et en ligne avec les principes du gouvernement ouvert. En outre, un certain nombre de dispositions intègrent la société civile et le secteur privé comme acteurs pertinents dans la mise en œuvre de ces initiatives.

Adoptée en 2017 pour la période 2017-19, la feuille de route sur les données ouvertes du Comité ITIE (Initiative en faveur de la transparence dans les industries extractives) constitue le quatrième document de politique clé du Cameroun au regard des principes du gouvernement ouvert (Comité ITIE, 2017[14]).

L’ITIE est la norme mondiale pour la bonne gestion des ressources pétrolières, gazières et minières afin notamment de promouvoir une gestion ouverte et responsable des ressources extractives. Les standards ITIE s’insèrent dans les principes de transparence, de redevabilité et de participation du gouvernement ouvert. Le Cameroun a rejoint l’ITIE en 2007 et la Feuille de route sur les données ouvertes institue la manière dont le Cameroun met en œuvre sa politique de données ouvertes de l’ITIE, adoptée en 2017. Celle-ci est elle-même adossée à la norme ITIE sur les données ouvertes les plus récentes, mise à jour en 2016. Au-delà de cette feuille de route spécifique, le pays a adopté une stratégie nationale de communication et un plan de communication du Comité ITIE en février 2020, afin de renforcer la transparence et la redevabilité de ses activités et de répondre aux exigences de la norme ITIE 2019 (Comité ITIE, 2020[15]).

Bien que cette feuille de route, par définition, ne s’applique qu’aux données liées aux industries extractives, elle représente, de l’avis des représentants des administrations interrogés, un document central dans la promotion des données ouvertes au Cameroun et une expérience positive en termes de pilotage et de coordination d’initiatives en faveur de la transparence, de la participation et de l’ouverture des données.2 Les différents entretiens conduits dans le cadre de ce scan avec certains membres du Comité ITIE et les instituions impliquées dans le renforcement du gouvernement ouvert telles que le PNG ont permis de constater que la mise en œuvre de cette feuille de route est aussi observée comme laboratoire d’avant-garde pour les administrations camerounaises, notamment sur la question de l’ouverture des données.

Élaboré en 2016 par le ministère des Postes et Télécommunications, le plan stratégique Cameroun numérique 2020 vise à opérationnaliser les processus de numérisation et la digitalisation compris dans la Vision 2035, et notamment dans son article 378 qui institue la digitalisation comme outil de la participation (République du Cameroun, 2016[10]). Le plan est articulé autour de huit axes et dont les objectifs se structurent largement autour du concept d’« économie numérique ». Ambitieux dans ses objectifs, le plan prend acte, entre autres aspects pertinents pour le gouvernement ouvert, du manque d’adaptation du cadre réglementaire et institutionnel aux enjeux de l’ouverture des données (République du Cameroun, 2016[10]). Le plan n’intègre pas de mesures directement en faveur du gouvernement ouvert mais consolide la gouvernance numérique du pays, qui peut favoriser le développement du gouvernement ouvert : une gouvernance efficace des outils numériques facilite l’ouverture des données, renforce la capacité des parties prenantes non étatiques à questionner les politiques publiques et peut permettre le développement de services publics plus efficaces (OECD/UN ESCWA, 2021[16]). Le Tableau ‎2.3 énumère les mesures les plus pertinentes dans une perspective de gouvernement ouvert.

La digitalisation de l’administration comme de la société et le déploiement d’outils numériques de gouvernance représentent des moyens centraux pour moderniser et améliorer la gouvernance de l’État, en (i) assurant une plus grande transparence, ouverture et inclusion des processus de gouvernance, (ii) en encourageant la participation des parties prenantes privées et de la société civile dans la définition des politiques publiques et (iii) en créant une culture de l’utilisation des données dans l’Administration (OCDE, 2017[5]).

En l’état, et comme énuméré dans le tableau ci-dessus, le Plan stratégique Cameroun numérique 2020 intègre des initiatives qui font écho aux principes du gouvernement ouvert que sont la transparence, l’intégrité et la participation citoyenne. Tout particulièrement, les dispositions visant à améliorer les formations et les activités de sensibilisation à la fois en faveur de l’administration mais aussi des citoyens reflètent une approche holistique et promouvant un changement de culture, à laquelle le concept de gouvernement ouvert est particulièrement sensible. Implicitement, ce plan crée les préconditions pour encadrer et renforcer l’espace numérique comme espace civique et de participation.

L’initiative de l’axe 8 du plan d’action, portée par le ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative (MINFOPRA) et le ministère des Postes et Télécommunications (MINPOSTEL) visant à « élaborer une loi sur l’accès en ligne aux documents administratifs des institutions publiques  semble particulièrement pertinente puisqu’elle pourrait s’inscrire dans le processus en cours d’élaboration d’une loi générale d’accès à l’information au Cameroun (République du Cameroun, 2016[10]).

Cependant, les principes de gouvernement ouvert ne sont pas abordés en tant que tels, et l’intégralité du plan, s’il intègre des éléments importants du gouvernement ouvert, se conçoit dans une perspective de développement économique, desquels les dispositions en faveur de la participation se dessinent à la marge.

Le manque de liens formels et explicites entre des politiques publiques promouvant les principes de l’ouverture avec le concept du gouvernement ouvert ainsi qu’entre elles est une problématique commune à la plupart des pays adhérents à la Recommandation du Conseil sur le gouvernement ouvert (OCDE, 2020[4]). Deux options s’offrent alors aux gouvernements : développer un plan d’action ou une stratégie de gouvernement ouvert pour harmoniser et créer des synergies entre ces initiatives importantes mais éparses, ou rapprocher les entités en charge de les piloter. Le Cameroun pourrait ainsi envisager le développement d’un plan d’action national (PAN) pour assurer une articulation complète entre d’une part ces documents de politiques sectorielles ayant un lien explicite avec l’ouverture du gouvernement, et d’autre part l’approche du Cameroun en matière de participation, de transparence, de redevabilité, et d’intégrité. Ce PAN permettra d’articuler clairement les principes du gouvernement ouvert dans une vision camerounaise et facilitera l’élaboration des politiques sectorielles et de plans de travail y afférant (voir section ‎2.4.3).

Les processus de consultation et la communication autour d’un cadre politique sont des étapes fondamentales de son élaboration. En effet, ils déterminent notamment le niveau d’adhésion des différentes parties prenantes en assurant leur consultation et jouent un rôle important dans le succès de ces cadres politiques.

L'enquête de l'OCDE menée en 2017 a révélé que 96 % des pays interrogés avaient adopté une approche inclusive et participative dans l’élaboration d’une stratégie ou d’un plan en matière de gouvernement ouvert, impliquant notamment les institutions étatiques concernées, mais aussi les organisations de la société civile (OSC), les citoyens et les universités (Graphique ‎2.2) (OCDE, 2017[6]).

Parmi les quatre principaux documents d’orientation politique présentés ci-dessus, la Vision 2035 et la SND30 mentionnent clairement les contours des processus participatifs sur lesquels leur élaboration s’est appuyée (République du Cameroun, 2020[3] ; République du Cameroun, 2009[2]).

Il ressort des entretiens menés dans le cadre de ce scan et des données collectées auprès du gouvernement camerounais que les processus d’élaboration et de validation de la vision 2035, de la SND30, et de la stratégie nationale de lutte contre la corruption ont impliqué des représentants du gouvernement, du secteur privé, de la société civile, des syndicats, du monde universitaire et les partenaires internationaux au développement du pays, en accord avec les principes de consultation et de participation du gouvernement ouvert. Élaborée sous la tutelle du ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT), la vision 2035 a notamment bénéficié des contributions des représentants de la société civile et des corps intermédiaires au cours de sa phase de validation, qui a fait l’objet d’une consultation nationale. Néanmoins, aucun rapport de capitalisation ni aucune information sur ces processus de consultation n’a pu être partagé avec l’OCDE à ce propos (plus de détails dans la section 3.3.2 du Chapitre 3 sur le suivi-évaluation).

Développée par le ministère du Développement urbain et de l’Habitat, la politique nationale de l’habitat et du développement urbain de 2019, sans représenter en soi un outil du gouvernement ouvert, a fait l’objet d’un processus consultatif dans son élaboration, impliquant la société civile et le monde universitaire en plus des parties prenantes gouvernementales. De même, dans le cadre de la crise de COVID-19 au Cameroun, la stratégie nationale de riposte portée par les services du Premier ministre a fait l’objet de consultations nationales en juin 2020.

Au Cameroun, de nombreux documents comprennent des initiatives visant à favoriser les principes du gouvernement ouvert. La SND30 représente à ce titre le document le plus abouti. Néanmoins le pays ne dispose pas de cadre cohérent lui permettant de déployer ses initiatives auprès de toutes les administrations. Si l’existence du PNG en charge de la coordination des initiatives en faveur du gouvernement ouvert favorise la coordination et la mise en cohérence des différentes initiatives, l’absence d’un plan d’action opérationnel prive l’administration du cadre qui permettrait la création de synergies et une coordination pleine, efficace et ordonnée entre les acteurs qui travaillent de manière transversale sur le gouvernement ouvert et donnerait sa pleine mesure au PNG. L’exemple du Plan national Cameroun Numérique 2020, présenté dans la section précédente, illustre bien ce besoin. Bien que la numérisation de la fonction publique et de la gouvernance représente un préalable technique important à certains aspects de l’ouverture des données et notamment leur diffusion numérique la plus large, l’absence de certaines dispositions plaide en faveur d’un PAN qui permettrait au gouvernement d’assurer une meilleure prise en compte des principes du gouvernement ouvert dans les différents secteurs de la gouvernance, y compris la gouvernance numérique.

Un PAN du gouvernement ouvert est une feuille de route tournée vers la mise en œuvre d’initiatives concrètes pour la promotion de l’ouverture et qui s’articule avec la vision stratégique portée par les documents de politique générale du pays. Son principal objectif est de définir des objectifs de travail concrets, séquencés et coordonnés en faveur du gouvernement ouvert. Les plans d’actions visent à généraliser les principes du gouvernement ouvert de manière holistique, à créer des synergies et renforcer la collaboration des parties prenantes étatiques et non étatiques dans la gouvernance et à communiquer sur les réformes entreprises tant sur la scène nationale qu’internationale (OCDE, 2020[4]). Les PAN sont devenus l’un des cadres d’orientation les plus utilisés pour promouvoir l’ouverture, dans une approche tournée vers la mise en œuvre d’initiatives concrètes (OCDE, 2020[4]). 70 % des pays ayant répondu à l’enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert de 2020 ont évoqué les plans d’action du PGO comme un des quatre principaux documents d’orientation générale sur le gouvernement ouvert (OCDE, 2020[8]).

Au Cameroun, la SND30 (qui n’adopte pas une approche intégrée) comprend déjà une vision et des objectifs stratégiques clairs sur les principes du gouvernement ouvert et l’élaboration d’un plan d’action pourrait s’appuyer directement sur cette stratégie. Les initiatives inclues dans le plan d’action pourraient par ailleurs être utilisées pour mettre en évidence certains aspects de cette stratégie, et représenter une base solide pour élaborer une approche holistique. L’élaboration d’un PAN du gouvernement ouvert permettra de renforcer la coordination de tous les acteurs impliqués sur le gouvernement ouvert et de déterminer un agenda holistique et clair des initiatives transversales à mettre en œuvre pour assurer la réforme du gouvernement ouvert dans le pays. Dans la perspective d’une potentielle adhésion au PGO, l’existence d’un PAN préalable du gouvernement ouvert au Cameroun représenterait une bonne pratique en même temps qu’un point de départ pour le développement d’un PAN spécifique au PGO.

Sur le plus long terme, et pour renforcer et rationaliser le cadre politique du Cameroun et permettre une approche holistique et intégrée du gouvernement ouvert, le gouvernement pourrait envisager l’adoption d’une stratégie du gouvernement ouvert (SGO). L’adoption d’un SGO représente une étape importante vers un État ouvert. Plusieurs pays membres (Canada, Colombie, Finlande, Italie) et non membres (Tunisie) de l’OCDE ont reconnu les avantages d’un SGO sur le moyen et le long terme et ont commencé à en élaborer une. D’autres pays, comme la Finlande et l’Argentine ont déjà adoptée une SGO.

La Recommandation du Conseil de l'OCDE sur le gouvernement ouvert définit une stratégie de gouvernement ouvert comme suit :

« Un document qui définit le programme de gouvernement ouvert du gouvernement central et/ou de l'un de ses niveaux infranationaux, ainsi que celui d'une seule institution publique ou d'un seul domaine thématique, et qui comprend des initiatives clés de gouvernement ouvert, ainsi que des objectifs et des indicateurs à court, moyen et long terme » (OCDE, 2017[5]).

Souvent élaborée avec un horizon temporel plus long (entre 5 et 15 ans) une SGO fournit un cadre d'orientation général permettant d'aligner tous les documents politiques liés à l'ouverture (par exemple, le plan d'action du PGO, la politique en matière de données ouvertes, la politique en matière d'administration numérique ou encore de lutte contre la corruption etc.).

Cette SGO devrait notamment suivre un certain nombre de principes pour en garantir la qualité. La SGO doit porter une vision claire, établie sur la base d’une évaluation approfondie de la situation du pays, afin de définir des priorités et objectifs concrets. L’inclusion des définitions des concepts-clés (notamment des principes du gouvernement ouvert) permet d’assurer une adhésion claire de la part des différentes parties prenantes tandis que le récit et les initiatives relient la SGO aux priorités stratégiques plus larges du pays. La prise en compte du contexte socio-économique du pays, ainsi que des traditions en termes de gouvernance propres à chaque pays est cruciale dans l’élaboration d’une SGO efficace et réaliste. Certains de ces éléments transparaissent déjà dans la SND30 (qui porte notamment une vision applicable au gouvernement ouvert, et porte un regard sans concession sur la situation de la gouvernance dans le pays). Le Graphique ‎2.3 illustre la complémentarité entre SGO et PAN.

Le cadre juridique d’un pays fixe les limites et précise les droits et les devoirs de toutes les parties prenantes à la gouvernance publique, qu’elles soient étatiques ou issues de la société civile, du secteur privé ou de simples citoyens. Le déploiement d’un cadre règlementaire et légal solide représente une précondition pour la mise en œuvre de réformes en faveur du gouvernement ouvert. La deuxième disposition de la Recommandation de l’OCDE conseille ainsi aux pays de :

« Veiller à l’existence et à la mise en œuvre du cadre juridique et réglementaire nécessaire au gouvernement ouvert, y compris en fournissant des documents de référence tels que des lignes directrices ou des manuels, tout en mettant en place des dispositifs de contrôle adéquats pour assurer le respect des règles » (OCDE, 2017[5]).

De la même manière que pour les cadres politiques évoqués dans la section précédente, l’adhésion du public et des parties prenantes non étatiques à ce cadre est un enjeu central et peut être atteint par la participation de ces acteurs à l’élaboration du cadre légal.

Chaque pays déploie des outils légaux, adaptés aux priorités et contextes qui leur sont propres. Un tel cadre juridique intègre généralement des textes comme des lois sur l’accès à l’information, sur la participation des citoyens, sur la lutte contre la corruption, sur la protection des données à caractère personnel, sur les archives, sur les données ouvertes etc. L’Encadré ‎2.4 présente les différentes approches prises en ce sens par des pays membres et partenaires de l’OCDE.

Au Cameroun, le cadre légal et règlementaire existant constitue une base solide bien que fragmentée pour la réforme du gouvernement ouvert, notamment grâce à la mise à jour récente d’un certain nombre de textes-clés. Ce cadre s’articule principalement autour de la Constitution du pays, du Code de transparence et de bonne gouvernance (loi 2018/011 du 11 juillet 2018) (République du Cameroun, 2018[17]) et du Code général des collectivités territoriales décentralisées (CTD) (loi 2019/024 du 24 décembre 2019) (République du Cameroun, 2019[18]). L’absence de loi générale sur l’accès à l’information, bien qu’il existe des dispositions importantes en faveur de la participation et de l’ouverture des données dans plusieurs autres lois, limite la capacité de l’État camerounais à garantir un cadre de réforme holistique. Dans les faits, la mise en œuvre de certains de ces textes est parfois variable.3

Au niveau le plus élevé des normes juridiques internes, la Constitution d’un pays représente le point de départ permettant d’institutionnaliser un certain nombre de principes au cœur du système de gouvernance du pays. De nombreux pays membres et partenaires de l’OCDE ont intégré des principes liés au gouvernement ouvert dans leurs constitutions (voir Encadré ‎2.5).

Le Cameroun ne fait pas exception et sa Constitution, telle que modifiée par la réforme de 2008 (loi 2008/001 du 14 avril 2008) (République du Cameroun, 2008[20]), intègre en son sein le principe de participation et consacre les libertés publiques. Précisément, le préambule garantit à tous les citoyens camerounais la liberté de communication, d’expression, la liberté de la presse, la liberté de réunion et la liberté d’association, qui s’exercent dans les conditions fixées par la loi. L’article 2 institue la souveraineté du peuple camerounais et légitime le référendum et le suffrage universel comme moyen d’expression de cette souveraineté. L’article 66 dispose que les responsables publics et les détenteurs des mandats électifs sont astreints à la déclaration de leurs biens et avoirs (République du Cameroun, 2008[21]).4

Cette base constitutionnelle représente le point de départ duquel découlent les lois intégrant des principes du gouvernement ouvert. Les principales politiques publiques d’orientation du gouvernement que sont la Vision 2035 et la SND30 se réfèrent par ailleurs à ces principes constitutionnels, et la précision de ces principes forts dans la Constitution confère à ces stratégies une légitimité légale non négligeable. La Constitution participe donc au Cameroun à la création d’un environnement propice à la mise en œuvre des réformes nécessaires.

Adoptée en 2018, la loi 2018/011 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques représente la pierre angulaire de la transparence budgétaire au Cameroun (République du Cameroun, 2018[22]). Il propose une réorganisation en profondeur dans la manière dont le gouvernement et les institutions publiques abordent la question de la planification budgétaire et de la reddition publique des comptes de l’État, dans un souci de transparence accrue et d’une participation plus large des parties prenantes étatiques et non étatiques. Élaborée à la suite de la loi n°2007/006 du 26 décembre 2007 portant régime financier de l’État (République du Cameroun, 2007[23]), qui consacre une gestion axée sur les résultats, le Code, au-delà des dispositions nouvelles en faveur de la transparence, de la participation et d’un État plus ouvert, réorganise profondément la gestion des finances publiques selon les principes d’efficacité alignés avec la vision 2035 et déclinés ensuite dans la SND30 (et notamment de la priorité de « modernisation de la gestion des finances publiques » du chapitre 6 – Gouvernance, décentralisation et gestion stratégique de l’État de la SND30) (République du Cameroun, 2020[3]). Cette loi transpose par ailleurs les recommandations portées par le Code de transparence et de bonne gouvernance de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) en droit camerounais. Le Tableau ‎2.4 énonce les dispositions les plus explicites en faveur du gouvernement ouvert.

Le processus de décentralisation au Cameroun constitue un des principaux véhicules de la transparence des finances publiques locales et de l’augmentation de la participation citoyenne dans la gouvernance publique. La loi n°2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées, adoptée à l’issue du Grand dialogue national d’octobre 2019, fixe le cadre de la décentralisation au Cameroun et, notamment, revoit le statut des élus locaux, les modes de désignation des maires et des représentants locaux, les règles de gestion et d’organisation des CTD, ainsi que leur régime fiscal et financier (République du Cameroun, 2019[24]). Ce code s’adosse à la Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation de la gouvernance locale et du développement local, ratifiée par le Cameroun en avril 2019 (Union Africaine, 2014[25]).

Dans une perspective de gouvernement ouvert, cette réforme introduit des éléments importants en faveur d’une plus grande participation citoyenne dans la gestion des CTD, notamment en introduisant d’une part l’obligation pour les CTD de publier leurs comptes, et d’autre part en instituant le rôle des citoyens et des OSC dans la validation des comptes. Le Tableau ‎2.5 souligne les principales provisions du code des CTD dans ce sens.

Le droit d’accès à l’information représente, pour de nombreux gouvernements, la pierre angulaire des réformes en faveur du gouvernement ouvert et est inscrit dans la plupart des définitions du gouvernement ouvert à travers le monde (OCDE, 2020[4]). Il permet aux citoyens de mieux comprendre les décisions prises en leur nom, de suivre, soutenir et questionner les directions prises par le gouvernement, d’informer leurs positions politiques et le choix de leurs représentants. Ce droit ouvre aussi, dans la pratique, les canaux de communication qui permettent aux institutions de comprendre les attentes des citoyens (OCDE, 2017[5]). Enfin, cette dynamique établit un processus vertueux par lequel l’État est poussé à la réflexion sur la gestion, la qualité, la collecte, l’agrégation, l’analyse et le partage des données qui sous-tendent son pilotage. Ce processus participe en dernier lieu au renforcement de l’efficacité gouvernementale.

Les lois sur l’accès à l’information visent, entre autres, à (i) garantir la plus grande transparence possible des actions gouvernementales ; (ii) encourager la réutilisation des informations ; et (iii) permettre aux particuliers et aux entreprises de générer une valeur économique. Elles contiennent en général les éléments suivants :

  • L’objectif ;

  • La portée ;

  • La publication proactive de l’information ;

  • La procédure de demande d’accès à l’information ;

  • Les exceptions ;

  • Les droits de recours ;

  • Les institutions garantissant l’accès à l’information ;

  • La promotion, le suivi et la mise en œuvre (OCDE, 2017[5]).

Le Cameroun ne dispose pas de loi générale sur l’accès à l’information. Les entretiens menés dans le cadre de ce scan suggèrent que le besoin d’une telle loi est reconnu. Du fait de l’importance d’une loi sur l’accès à l’information pour la mise en place d’un cadre propice à l’ouverture du gouvernement, il serait déterminant d’approfondir les efforts en direction de son adoption.

L’arsenal juridique et règlementaire camerounais n’est cependant pas démuni sur la question de l’accès à l’information et plusieurs lois récentes comportent des dispositions dans ce domaine. On constate depuis l’adoption de la Vision 2035 un effort dans ce sens, en particulier dans trois secteurs clés que sont les finances publiques, la décentralisation et les industries extractives :

  • Le Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques : institue le droit à l’information des citoyens sur les finances publiques, crée le budget citoyen et rend obligatoire la reddition publique de toutes les données sur les finances publiques de manière accessible (Pour plus de détails, voir la section ‎2.5.2 de ce chapitre).

  • Le Code général des collectivités territoriales décentralisées : institue la publication proactive des comptes des collectivités territoriales décentralisées et l’implication des administrés et de la société civile dans la gouvernance des CTD (Pour plus de détails, voir la section ‎2.5.3).

  • Enfin, les dispositions de la loi relative aux archives mettent en place la liberté d’accès aux archives sauf disposition règlementaire ou législative (République du Cameroun, 2000[26]).

Le Code de transparence ainsi que le Code général des CTD rendent obligatoire la publication proactive de l’information. La loi sur les archives accorde quant à elle aux citoyens camerounais la possibilité de déposer des demandes d’information auprès de leurs administrations à travers des procédures de divulgation réactive. Diverses dispositions permettent de saisir les différentes administrations par courriel, par courrier, ou en personne selon les administrations publiques. Alors que l’introduction d’une requête n’a généralement pas de coût, la reproduction et l’envoi d’informations couvertes par la loi sur les archives est à la charge du demandeur (art. 23 et 24) (République du Cameroun, 2000[26]). La loi sur les archives prévoit un certain nombre d’exceptions au partage d’informations (art. 14) : la sécurité nationale, les données à caractère privé, la santé et la sécurité publique, la vie privée et les informations relatives à l’application de la loi (République du Cameroun, 2000[26]). Enfin, le code pénal met également en place des exceptions pour l’investigation, la prévention et la poursuite des infractions, et les règles de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) prévoient des exceptions relatives à la confidentialité commerciale, les intérêts commerciaux et les autres intérêts économiques légitimes.

Le Code général des CTD, qui représente certainement le cadre le plus détaillé sur les modalités de saisine de l’administration pour la publication des données ouvertes, établit clairement les délais obligatoires de réponse de la part de l’administration, la nécessité pour l’autorité publique de motiver tout refus d’accès à l’information ainsi que les mécanismes de recours en cas de contestation de la réponse (art. 471) (République du Cameroun, 2019[18]).

La juxtaposition de ces dispositions en faveur de l’accès à l’information sur des thématiques spécifiques ne consacre cependant pas le principe par défaut d’accès à l’information dans tous les secteurs qui s’y prêtent. L’adoption d’une loi sur l’accès à l’information semble nécessaire pour initier une réforme en profondeur de l’administration camerounaise en faveur d’un partage proactif et réactif par défaut des informations aux parties prenantes étatiques et non étatiques, et l’établissement de règles claires et connues de tous dans ce domaine.

De plus, l’adoption d’une loi d’accès à l’information représente un critère central pour l’adhésion au PGO, qui accorde quatre points (sur quatre possibles si cette loi existe). Bien que le gouvernement camerounais dispose déjà de trois points sur quatre en ce qui concerne l’ouverture des données (voir section 4.2.1 du Chapitre 4) l’élaboration d’une loi sur l’accès à l’information devrait faire partie des priorités du gouvernement camerounais dans ses réformes en faveur du gouvernement ouvert.

Les principes liés au gouvernement ouvert apparaissent de manière plus ou moins marquée dans d’autres lois et textes règlementaires au Cameroun comme présenté dans le Tableau ‎2.6. D’un point de vue sectoriel, il est également à noter les efforts portés par le ministère de la Justice pour poursuivre une plus grande transparence, redevabilité et participation citoyenne à travers ses réformes récentes (voir Encadré ‎2.6).

L’existence d’un nombre particulièrement élevé de lois prenant en compte des principes liés au gouvernement ouvert témoigne des efforts importants menés par le Cameroun pour inscrire dans sa loi la transparence et la participation et porter ces principes dans plusieurs aspects de la vie publique. Le constat selon lequel les lois portant le plus loin ces principes sont aussi les plus récentes n’est pas anodin et atteste d’un cadre progressivement plus favorable au gouvernement ouvert au Cameroun.

Cette fragmentation, cependant, rend moins intelligible le cadre légal dans son ensemble et dans une perspective de gouvernement ouvert intégré. Certaines des dispositions légales les plus anciennes comme le Statut général de la fonction publique camerounaise, par exemple, datant de 1994, ne prend pas en compte le rôle central des fonctionnaires dans la promotion d’une culture de l’ouverture ou le droit d’accès à l’information et mériterait un approfondissement, au-delà des dispositions sur le devoir de réserve ou la neutralité politique.

Les dispositions prises en faveur de l’ouverture des données dans le cadre du Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques et par le Code général des CTD impliquent la production et la publication d’une quantité importante de données à destination d’un public large et varié. Sur des aspects aussi techniques que l’ouverture des données, des standards pourraient être établis au niveau national, notamment au travers de la loi régissant l’activité statistique, tout en s’inscrivant dans un cadre cohérent prenant en compte les principes centraux du gouvernement ouvert.

Enfin, dans certains cas, le manque de textes d’application ou de boites à outils permettant aux fonctionnaires impliqués de clarifier, interpréter et mettre en œuvre les dispositions légales représente un obstacle à une mise en œuvre efficace (voir Encadré ‎2.7).

Pour répondre à ce défi, le Cameroun pourrait envisager de réaliser la cartographie du cadre légal et règlementaire applicable au gouvernement ouvert pour pallier ces limites. Cet exercice constituerait une première étape dans le processus de mise en cohérence et de révision du cadre légal et pourrait s’articuler autour de deux objectifs :

  • En premier lieu, dans un souci de pédagogie et de communication, la cartographie permettrait aux fonctionnaires et citoyens camerounais d’accéder à une vue d’ensemble des mesures en faveur du gouvernement ouvert dans le pays, renforçant de ce fait la compréhension de ce cadre, favorisant la diffusion d’une culture de l’ouverture, et clarifiant les concepts et principes qui structurent l’approche camerounaise.

  • En second lieu, une lecture analytique de cette cartographie permettrait l’identification d’opportunités, de manquements et d’incohérence dans l’articulation de ces lois, qui constituerait un socle au développement d’une réforme renforçant cette cohérence (OCDE, à paraître[27]).

Références

[15] Comité ITIE (2020), Stratégie nationale de communication et Plan de communication du Comité ITIE.

[14] Comité ITIE (2017), Feuille de route 2017-2019 du Comité ITIE en matière de données ouvertes, https://archive.eiti.org/files/documents/feuille_de_route_donnees_ouvertes_26_06_17.pdf.

[19] Journal electoral (2013), « Constitution politique des États-Unis mexicains », Journal officiel.

[9] Ngoumou, E. (2021), Accès universel à l’information : de bons points pour le Cameroun, https://www.cameroon-tribune.cm/article.html/42876/fr.html/acces-universel-linformation-de-bons-points-pour-le-cameroun.

[7] OCDE (2021), OCDE Open Government Dashboard.

[1] OCDE (2020), A Roadmap for Assessing the Impact of Open Government Reform, GOV/PGC/OG(2020)5/REV1, Paris, OCDE.

[8] OCDE (2020), Enquête de l’OCDE sur le gouvernement ouvert.

[4] OCDE (2020), Taking an integrated approach to the promotion of transparency, integrity, accountability and stakeholders’ participation: Towards an Open Government Strategy, GOV/PGC/OG(2020)4/REV1.

[6] OCDE (2017), Gouvernement ouvert : Contexte mondial et perspectives, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264280984-fr.

[5] OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur le Gouvernement Ouvert, OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0438.

[27] OCDE (à paraître), Revue du gouvernement ouvert au Maroc.

[16] OECD/UN ESCWA (2021), The Economic and Social Impact of Open Government : Policy Recommendations for the Arab Countries, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/6b3e2469-en.

[3] République du Cameroun (2020), Stratégie nationale de développement 2020-2030.

[18] République du Cameroun (2019), « Loi n° 2019/024 du 24 décembre 2019 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées », https://www.prc.cm/fr/actualites/actes/lois/4050-loi-2019-024-du-24-decembre-2019-portant-code-general-des-collectivites-territoriales-decentralisees.

[24] République du Cameroun (2019), « Loi n° 2019/024 portant Code général des collectivités territoriales décentralisées ».

[22] République du Cameroun (2018), « Loi n° 2018/001 portant Code de la transparence et de la bonne gouvernance des finances publiques ».

[17] République du Cameroun (2018), « Loi n° 2018/011 du 11 juillet 2018 portant Code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun », https://www.prc.cm/fr/actualites/actes/lois/2970-loi-n-2018-011-du-11-juillet-2018-portant-code-de-transparence-et-de-bonne-gouvernance-dans-la-gestion-des-finances-publiques-au-cameroun.

[10] République du Cameroun (2016), Plan stratégique Cameroun numérique 2020.

[13] République du Cameroun (2016), Stratégie nationale de lutte contre la corruption 2016-2020, https://conac.cm/fr/telechargements/strategie-nationale-de-lutte-contre-la-corruption/.

[12] République du Cameroun (2010), Stratégie nationale de lutte contre la corruption 2010-2015, https://conac.cm/fr/wp-content/uploads/sites/3/2022/04/DOCUMENT-DE-SNLCC-2010-2015.pdf.

[2] République du Cameroun (2009), Cameroun Vision 2035, https://minepat.gov.cm/fr/vision-horizon-2035/.

[11] République du Cameroun (2009), Document Stratégique pour la Croissance et l’Emploi (DSCE), https://minepat.gov.cm/fr/dsce/#:~:text=Le%20Document%20de%20Strat%C3%A9gie%20pour,de%20f%C3%A9vrier%202008%20au%20Cameroun.

[20] République du Cameroun (2008), « Loi n° 2008/001 du 14 avril 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de la Loi 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 2 juin 1972. », Journal officiel, https://www.prc.cm/fr/multimedia/documents/6284-loi-n-2008-001-du-14-04-2008-modifian-constitution-1972-fr.

[21] République du Cameroun (2008), « Loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et complétée par la loi n°2008/001 ».

[23] République du Cameroun (2007), « Loi n° 2007/006 du 26 Décembre 2007 portant régime financier de l’État », Journal officiel, https://www.cvuc-uccc.com/minat/textes/2.pdf.

[26] République du Cameroun (2000), « Loi n° 2000/010 du 19 décembre 2000 régissant les archives », https://leapahead.cm/french/legislations/cameroon/archiving/Loi-2000-010_18_DEC_2000.pdf.

[25] Union Africaine (2014), Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local, https://au.int/sites/default/files/treaties/36387-treaty-0049_-_african_charter_on_the_values_and_principles_of_decentralisation_local_governance_and_local_development_f.pdf.

Notes

← 1. Traduction non-officielle par l’auteur de ce scan sur la base de la version anglaise de la SNLCC.

← 2. Entretien avec un représentant du Comité ITIE le 25 août 2021.

← 3. Entretiens avec plusieurs interlocuteurs du gouvernement et de la société civile camerounaise menés entre juillet et décembre 2021.

← 4. « Le Président de la République, le Premier Ministre, les membres du Gouvernement et assimilés, le Président et les membres du Bureau de l’Assemblée Nationale, le Président et les membres du Bureau du Sénat, les Députés, les Sénateurs, tout détenteur d’un mandat électif, les Secrétaires généraux des ministères et Assimilés, les Directeurs des administrations centrales, les directeurs généraux des entreprises publiques et para- publiques, les Magistrats, les personnels des administrations chargé de l’assiette, du recouvrement et du maniement des recettes publiques, tout gestionnaire de crédits et des biens publics […] ». (République du Cameroun, 2008[21]).

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