Chapitre 5. Développement du capital humain entrepreneurial

Ce chapitre examine les initiatives de développement du capital humain relatives à l’entreprenariat et à l’internationalisation des PME dans les économies MED. Il se concentre sur trois domaines : l’apprentissage entrepreneurial dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire (général et professionnel) ; la formation pour l’entreprenariat féminin ; et le développement des compétences pour l’internationalisation des PME. L’analyse montre que bien que les économies MED aient amélioré leurs cadres politiques dans ce domaine, des défis persistent, y compris la mise en œuvre des politiques par des partenariats et la collecte de données et l’analyse relatives à la formation dispensée et à son évaluation.

Les recommandations clés sont les suivantes :

1. Les gouvernements devraient établir des partenariats multipartites et interministériels pour assurer une mise en œuvre efficace des plans d’action pour l’apprentissage entrepreneurial pouvant relever de différentes stratégies nationales (éducation, formation professionnelle, emploi, développement économique, exportations). Cela pourrait inclure la promotion de l’entrepreneuriat comme compétence clé, ainsi que des compétences commerciales. Les économies MED pourraient s’appuyer sur des initiatives fondées sur des projets pour élaborer une approche systémique insérant l’apprentissage entrepreneurial dans les programmes scolaires nationaux à tous les niveaux du système éducatif.

2. Les économies MED pourraient passer de mesures politiques et d’actions individuelles de soutien à l’entrepreneuriat féminin à des approches globales. Ces approches globales pourraient combiner la formation avec le mentorat, le coaching et la mise en place de réseaux. Les gouvernements pourraient également poursuivre leurs efforts pour produire et collecter des données ventilées par sexe afin de concevoir des politiques ciblées sur les besoins des femmes entrepreneurs.

3. Des données plus détaillées sur la formation des PME, en particulier en termes de potentiel d’exportation, sont nécessaires dans tous les pays. Une institution principale dans le pays devrait coordonner la collecte des données et des analyses (par exemple, sur les bonnes pratiques) pour aider le gouvernement à établir ses priorités politiques et l’allocation des ressources.

    

Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.

L’un des objectifs de cette évaluation intermédiaire est d’aider les économies MED à développer un capital humain plus entrepreneurial en vue d’accroître l’employabilité et de renforcer la compétitivité dans leurs pays respectifs. Trois cibles ont été identifiées en relation avec le potentiel de la région, sa structure démographique et ses principaux défis : 1) les jeunes, qui constituent une part importante de la population globale allant de 36,8 % dans l’AP1 à 20,9 % en Tunisie ; 2) les femmes, compte tenu de leur taux d’activité particulièrement faible dans la région arabe (qui va de 16,6 % en Algérie à 26,6 % en Tunisie) ; et 3) les PME ayant un potentiel d’internationalisation.

Renforcer l’entreprenariat comme compétence clé est le prochain défi pour les décideurs et les établissements scolaires.

L’employabilité des jeunes demeure une priorité absolue pour la région. Améliorer l’employabilité des jeunes et promouvoir l’entreprenariat par le biais de l’éducation est l’une des solutions possibles pour lutter contre le chômage élevé des jeunes (entre 25 et 40 %) et contre la hausse du nombre de jeunes qui ont quitté l’école, sont sans emploi ou ne suivent pas de formation (NEET). Des données récentes montrent que les NEET représentent environ 30 % des jeunes âgés de 15 à 24 ans au Maroc, en Égypte, en AP et en Tunisie et 20 % au Liban et en Algérie. Ces taux élevés de NEET et l’inactivité précoce ont un impact négatif sur l’employabilité, les revenus futurs et l’accès à des emplois de qualité. L’éducation et la formation ont un rôle clé à jouer dans le développement d’une culture entrepreneuriale chez les jeunes pour leur permettre de trouver plus facilement un emploi et pour contribuer à la croissance économique et à la compétitivité des pays.

Cette section examine comment l’apprentissage entrepreneurial est encouragé dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire, aussi bien dans l’enseignement général que dans l’enseignement et la formation professionnels (EFP). Une attention particulière est accordée à l’entreprenariat considéré comme une compétence clé de plus en plus recherchée par les employeurs dans ce monde en évolution rapide. Cette section décrit également où les pays se situent en termes de dialogue sur les politiques publiques et de partenariat dans ce domaine, ainsi qu’en ce qui concerne la mise en œuvre de l’apprentissage entrepreneurial dans les écoles, y compris la coopération école-entreprise.

Progrès réalisés depuis 2014

L’apprentissage entrepreneurial est encore trop axé sur le développement de compétences commerciales, comme l’éducation financière et la maîtrise des plans d’affaires. Une plus grande sensibilisation des directeurs d’école, des enseignants, des associations d’étudiants, des associations de parents et des décideurs politiques est nécessaire pour avoir une compréhension complète du développement de l’entreprenariat « comme compétence clé ». Cela consiste à cultiver une attitude entrepreneuriale caractérisée par un sens de l’initiative et de l’action, par la proactivité, une attitude tournée vers l’avenir, le courage et la persévérance dans la réalisation de projets (Commission européenne, 2018). Les recherches effectuées montrent qu’en développant ce type d’attitudes, les jeunes auront plus de chances de réussir leur participation à la société en tant que citoyens actifs et qu’ils gèreront mieux leur vie dans un monde de plus en plus complexe (Commission européenne, 2017).

Depuis 2014, toutes les économies ont intégré l’apprentissage entrepreneurial dans différents documents de politique socio-économique :

  • La Tunisie a une stratégie d’apprentissage entrepreneuriale distincte tandis que dans les autres pays, l’apprentissage entrepreneurial est réparti entre différentes stratégies, par exemple les plans de développement nationaux (Algérie), les stratégies relatives à l’éducation ou à la jeunesse (AP, Liban et Maroc), ou encore les stratégies économiques (Égypte, Israël et Jordanie).

Parce que l’apprentissage entrepreneurial ne relève pas d’une seule et unique politique, il est important de construire des partenariats structurés pour s’assurer de l’harmonisation des différents domaines politiques. Ces partenariats font malheureusement défaut dans la plupart des économies MED. Les partenariats nationaux devraient inclure des représentants des ministères de l’Éducation, de l’Emploi et de l’Économie, de la société civile, des partenaires sociaux, des organisations patronales, des enseignants et des organisations de jeunesse, des entrepreneurs et des bailleurs pour stimuler les actions d’apprentissage entrepreneurial et en assurer le suivi et l’évaluation. À cet égard, des plans d’action concrétisant comment intégrer l’apprentissage entrepreneurial dans l’éducation et la formation aussi bien formelles que non formelles, doivent être établis.

  • Le Liban travaille actuellement en partenariat à l’élaboration d’un plan d’action pluriannuel visant à intégrer l’apprentissage entrepreneurial dans le système éducatif national. Ce plan comprend notamment une estimation budgétaire et la répartition des rôles et des responsabilités entre les différents partenaires impliqués.

Pratiquement toutes les économies ont progressé dans la promotion de l’apprentissage entrepreneurial dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire depuis 2014. Toutefois, l’entreprenariat comme compétence clé n’est pas encore intégré dans les programmes nationaux de l’enseignement secondaire (général et professionnel) dans l’ensemble des économies MED. Le Cadre européen des compétences clés en entrepreneuriat, plus connu sous le nom d’EntreComp (Commission européenne, 2018), est un outil utile pour aider à comprendre et à développer l’entreprenariat comme compétence.

  • En Égypte, le projet pilote IMKAN dans le gouvernorat de Louxor a emprunté le cadre pour réformer ses programmes d’enseignement et pour formuler des acquis de l’apprentissage entrepreneurial pour les établissements d’enseignement et de formation professionnels.

  • En AP, l’Université polytechnique palestinienne, lauréate du prix 2017 des bonnes pratiques de l’ETF pour la promotion des compétences clés en entreprenariat dans la formation professionnelle, sensibilise l’ensemble de la communauté de l’enseignement supérieur en se servant comme base du cadre des compétences clés de l’entreprenariat (EntreComp).

Il existe plusieurs bonnes pratiques de mise en œuvre de l’apprentissage entrepreneurial dans les établissements d’enseignement secondaire général et professionnel. Le défi est maintenant de passer à une approche systémique grâce à l’insertion de l’apprentissage entrepreneurial dans les programmes nationaux à tous les niveaux du système éducatif. De bons exemples de promotion de l’apprentissage entrepreneurial incluent:

  • En Jordanie, My Entrepreneurial Project (MEP) encourage la créativité, le travail d’équipe et la prise d’initiative chez les jeunes pour les encourager à s’orienter vers l’entreprenariat et le travail indépendant comme choix de carrière. INJAZ est un partenaire actif dans la région qui offre aux élèves du secondaire des opportunités en créant des expériences professionnelles concrètes.

  • La Tunisie a lancé un projet dans ce sens dans l’ensemble de son système d’enseignement et de formation professionnels. Cela inclut la production d’une Charte nationale de l’apprentissage entrepreneurial pour définir ce domaine politique comme une priorité. Dans le cadre d’une approche intégrée, la Tunisie met également en place un programme de développement des programmes scolaires et de formation initiale et continue des enseignants – y compris l’intégration de l’entreprenariat en tant que compétence clé.

  • Israël a élaboré des lignes directrices destinées aux enseignants sur la façon d’améliorer l’apprentissage entrepreneurial dans les salles de classe.

Bien que les politiques nationales soulignent l’importance de la coopération école-entreprise dans tous les pays, il existe peu de données sur le nombre d’établissements d’enseignement secondaire (deuxième cycle) (y compris l’EFP) qui ont établi des partenariats structurés avec des entreprises. La collecte de données sur la coopération école-entreprise est essentielle pour adapter les politiques publiques, fixer des objectifs et motiver les entreprises et les écoles à mettre en place des projets communs. L’évaluation montre qu’en général, la coopération école-entreprise est plus présente dans l’EFP. Le défi consiste à inclure des expériences entrepreneuriales dans les tâches des étudiants de l’EFP qui font un apprentissage en entreprise.

Pour aller plus loin

Les économies MED doivent établir des partenariats nationaux pour promouvoir l’apprentissage entrepreneurial. Ces partenariats, qui pourraient s’appuyer sur des plans d’action concrets, devraient inclure des représentants des ministères de l’Éducation, de l’Emploi et de l’Économie, de la société civile, des partenaires sociaux, des organisations patronales, des organisations d’enseignants, des organisations de la jeunesse, des entrepreneurs et des bailleurs. Les pays doivent continuer à faire des efforts pour passer des initiatives fondées sur des projets à une approche systémique en insérant l’apprentissage entrepreneurial dans les programmes scolaires à tous les niveaux du système éducatif. Faire de l’entreprenariat comme compétence clé une priorité stratégique est le prochain défi pour l’ensemble des systèmes d’éducation et de formation et les apprentissages devraient inclure des possibilités pour les jeunes de développer leurs compétences entrepreneuriales, par exemple en travaillant au sein de l’administration de l’entreprise.

L’entreprenariat féminin connaît un essor et nécessite une réponse politique globale.

Le Small Business Act pour l’Europe (SBA) souligne l’impact de l’écart hommes-femmes sur le faible nombre de femmes entrepreneurs (Commission européenne, 2008). La pensée politique moderne reconnaît maintenant la complexité des facteurs sous-jacents derrière le faible nombre de femmes entrepreneurs et les barrières sociétales qui limitent l’accès des femmes aux richesses et au pouvoir. Le cadre européen du SBA fixe des objectifs visant à accroître la part des femmes entrepreneurs et leur participation aux activités commerciales dans tous les secteurs de l’économie.

Dans la région MENA, il existe des écarts importants dans la participation des femmes au marché du travail, au travail indépendant et à l’entreprenariat, ainsi que de grandes différences entre les sexes pour l’accès à des emplois mieux rémunérés, des postes de direction et, plus généralement, aux opportunités d’emploi. La participation des femmes à la population active ne s’élève qu’à 25,33 % (OIT, 2017) ; au cours des dernières années, seulement 8,38 % des entreprises comptaient un cadre supérieur féminin, contre 18,6 % en moyenne dans le monde (IFC et Banque mondiale, 2017). Les femmes de la région bénéficient d’un soutien limité, essentiellement familial ou provenant de certains programmes d’appui aux entreprises (Union européenne, 2017).

Alors que ces inégalités sont principalement dues à des facteurs juridiques, culturels et socio-économiques externes, les aptitudes et les compétences des femmes devraient être essentielles pour améliorer les capacités qu’elles possèdent au même titre que les hommes. Les aptitudes et compétences entrepreneuriales permettent aux femmes de sortir des places sociales et économiques qu’elles occupent traditionnellement, de parvenir à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et de créer des emplois et des revenus pour elles-mêmes et pour les autres.

Cette section résume les conclusions sur le développement de l’entreprenariat féminin concernant : 1) les politiques et plans d’action gouvernementaux, 2) l’élaboration, le suivi et l’évaluation de politiques fondées sur des faits, y compris la collecte de données et le développement de partenariats, 3) les mesures visant à développer les compétences des PME. Dans l’ensemble, l’évaluation actuelle identifie une dynamique positive dans tous les pays et beaucoup de progrès réalisés en termes de soutien politique à l’entreprenariat féminin depuis le dernier rapport.

Progrès réalisés depuis 2014

En 2014, la plupart des pays – à l’exception de l’Algérie et de l’Égypte – avaient des interventions ad hoc. Depuis, les gouvernements et leurs partenaires ont uni leurs forces, tant au niveau politique que par le biais d’actions de soutien ciblées en Israël, en Jordanie, au Liban et en Tunisie :

  • En Algérie, le plan gouvernemental (2017) met fortement l’accent sur le développement de l’entrepreneuriat féminin dans les zones rurales.

  • En Jordanie, le Plan de croissance économique (2018-2022) et le Plan stratégique pour l’autonomisation des femmes (2013-2017) fixent des objectifs bénéfiques à ce domaine politique.

  • L’entreprenariat féminin fait désormais partie des objectifs de l’investissement public au Liban, promu dans le cadre de Stratégie nationale pour les femmes au Liban (2011-2021) et dans celui de la Stratégie pour les PME (2015-2020).

  • Au Maroc, le soutien à l’entreprenariat féminin fait partie du Plan pour l’égalité du gouvernement (ICRAM 2012-2016).

  • Les pays ont également mis en place des groupes multipartites et des plateformes de coopération dans le domaine de l’entreprenariat féminin, par exemple une task force dirigée par Business Women Forum en AP.

La qualité et la portée de l’analyse des politiques se sont améliorées au cours des dernières années, renforçant l’efficacité des politiques fondées sur les faits et la capacité de suivi et d’évaluation des gouvernements nationaux :

  • Des organisations internationales telles que le GIZ et l’ONUDI ont développé des recherches sur l’entreprenariat féminin dans la région MENA (GIZ, 2017 et UNIDO, 2017).

  • Les gouvernements des différents pays MED ont également entrepris des études sur le sujet : par ex. l’étude de faisabilité réalisée par l’Agence israélienne des petites et moyennes entreprises (2017) sur les facteurs et les écarts entre les entrepreneurs hommes et femmes empêchant les femmes de s’engager dans des secteurs à forte valeur ajoutée, ou encore l’étude « Femmes entrepreneurs en Jordanie : l’autonomisation économique des femmes » conduite par la Jordan Enterprise Development Corporation (2017).

En ce qui concerne la fourniture de formation et de soutien à l’entreprenariat féminin, les gouvernements et leurs partenaires de l’appui aux entreprises promeuvent les qualifications et compétences entrepreneuriales des femmes dans la région MED :

  • En Égypte, grâce à la Stratégie pour les femmes (2030), l’employabilité et les compétences numériques sont au centre du soutien à l’entrepreneuriat féminin.

  • En Tunisie, l’offre abondante de programmes de formation est le résultat d’un partenariat entre le gouvernement et les réseaux et associations d’entreprenariat féminin qui promeuvent les femmes entrepreneurs.

  • En Israël, le gouvernement étend progressivement la portée de ses programmes d’entreprenariat féminin pour les faire passer de groupes cibles individuels à des mesures de soutien fondées sur une vision globale du rôle et des besoins des femmes dans l’entreprenariat.

  • Le gouvernement marocain met l’accent sur l’accès des femmes entrepreneurs aux technologies.

  • Dans l’AP, l’initiative « Start-up Palestine » fournit un bon exemple de la façon dont l’accès au financement et à la formation pourrait être adapté pour bénéficier aux femmes entrepreneurs.

Pour aller plus loin

L’attention portée à l’entrepreneuriat féminin dans les politiques publiques devrait être davantage structurée et consolidée, avec des instruments intégrés de partenariat politique, guidés par la vision globale commune des défis et objectifs spécifiques dans tous les domaines politiques ayant un impact sur l’état et la diffusion de l’entrepreneuriat féminin. Les gouvernements devraient allouer leurs ressources aux besoins spécifiques rencontrés par les femmes pour démarrer et développer leurs entreprises, tout en poursuivant des programmes d’appui à l’entrepreneuriat indifférents au genre, accompagnés d’efforts systématiques d’évaluation axés sur leur pertinence, qualité, efficacité et accessibilité pour différents groupes de populations.

La collecte systématique de données pour la formulation, le suivi et l’évaluation des politiques d’entreprenariat des femmes, ainsi que pour l’amélioration des politiques reste un objectif pour les années à venir et doit devenir un élément de la stratégie nationale et des processus de planification budgétaire. Elle devrait être étayée par la disponibilité de données ventilées par sexe dans chaque pays et par l’engagement des partenaires politiques à effectuer un suivi et une évaluation systématiques des programmes publics et privés qui profitent aux hommes et aux femmes entrepreneurs.

Il est important de veiller à ce que l’appui à l’amélioration des qualifications et des compétences pour stimuler l’entreprenariat féminin ne se limite pas aux cours de formation générale pour PME, et cible les besoins spécifiques des femmes pour renforcer leur efficacité, leur ambition et créer un écosystème de développement de l'entreprenariat sensible au genre. Le mentorat, le coaching et le soutien à l’établissement d’entreprises dirigées par des femmes sont très appréciés par les femmes entrepreneurs, en raison de leurs effets positifs sur la survie des start-up et sur le développement de la confiance chez les femmes entrepreneurs (Bekh, 2014).

Faire progresser les PME dans le commerce international – l’argument en faveur d’une meilleure formation.

Les PME actives sur les marchés internationaux sont plus innovantes, plus compétitives et génèrent plus d’emplois (Love & Ganotakis, 2013 ; Commission européenne, 2010) mais la mauvaise gestion et la médiocrité des compétences professionnelles constituent un obstacle au commerce international et à l’engagement des PME dans les chaînes de valeur mondiales (Banque mondiale, 2016). Malgré des dispositifs de renforcement du commerce plus développés fournis par une variété d’accords commerciaux bilatéraux, régionaux (accords d’Agadir, par exemple2) et multilatéraux (accords d’association euro-méditerranéens, par exemple3), les PME des économies MED restent des acteurs faibles dans les échanges commerciaux (OCDE et al., 2014). L’écart commercial entre l’UE et les pays du voisinage méridional est particulièrement prononcé. Les exportations de l’UE vers la région ont augmenté d’un peu plus de 50 % entre 2006 et 2016, contre 25 % pour la même période entre la région et l’UE (Commission européenne, 2018)4.

Cette section traite de la formation à l’internationalisation des PME, en particulier en termes d’exportation (commerce extérieur de biens et de services). La formation est entendue ici dans son sens le plus large et comprend le transfert de connaissances et l’apprentissage en ligne pour soutenir le potentiel d’exportation des PME dans les trois domaines suivants : 1) les exigences administratives (par exemple, les obligations techniques et juridiques pour l’exportation) ; 2) la formation professionnelle (les compétences pour adapter les produits et services aux demandes de qualité des marchés étrangers) ; et 3) l’amélioration de la gestion (par exemple, les compétences en affaires, la maîtrise d’une langue étrangère).

Progrès réalisés depuis 2014

Le niveau d’information sur la formation pour l’internationalisation des PME reste faible dans la région :

  • Des données plus élaborées sont disponibles en Israël par l’intermédiaire de toute la gamme d’institutions de soutien (par exemple, administration du commerce extérieur, institut d’exportation).

Les instruments politiques servant à faciliter la formation pour l’internationalisation des PME sont généralement bien développés dans tous les pays :

  • Cela va des plans de développement nationaux (Égypte, Jordanie et AP) aux stratégies de développement des PME et du commerce (Algérie, Égypte, Liban, Maroc) en passant par des activités de promotion du commerce (Israël).

  • Si l’accent est mis sur la formation aux obligations légales (administratives et techniques) pour les PME exportatrices, ainsi que sur la formation à la gestion (marketing international), l’évaluation met en évidence relativement peu d’éléments dans la région prouvant les implications de la formation professionnelle pour les PME exportatrices.

  • Il existe peu d’interface entre les politiques d’internationalisation des PME et les politiques plus générales d’éducation et de formation. La stratégie d’exportation de l’AP met en évidence les exigences à la fois en matière de gestion et de compétences professionnelles dans un certain nombre de stratégies d’exportation sectorielles. En Tunisie, quelques projets sectoriels aident les PME dans leurs efforts pour accroître leurs exportations. Cependant, comme dans tous les pays, l’écosystème de la formation professionnelle ne correspond que vaguement aux intérêts d’exportation des différents secteurs.

Une large offre de formation sur les exigences administratives ou réglementaires est fournie par les associations sectorielles, les chambres de commerce et les autorités chargées du développement des exportations. Cependant, peu d’efforts sont faits pour innover dans le processus d’apprentissage. Il existe des exemples d’approches intéressantes de la formation des PME :

  • En AP, la formation en groupe de managers de PME, sur des domaines tels que la cartographie des marchés et le commerce électronique, qui permet l’échange de savoir-faire entre PME de divers secteurs, constitue une bonne pratique.

  • Le commerce électronique, en particulier, ouvre aux PME de la région des opportunités d’exportation et nécessitera un débat politique et un soutien à la formation dans tous les pays. À cet égard, le Comité interinstitutionnel sur le commerce électronique de la Jordanie est une référence importante.

L’évaluation met en évidence les bons efforts dans les applications d’apprentissage des TIC, bien que davantage puisse être fait :

  • En Égypte, le Centre d’enseignement à distance du Centre de formation au commerce extérieur offre des cours en ligne sur l’exportation.

  • L’Institut israélien d’exportation et de coopération internationale propose des webinaires, des cours et d’autres services aux petits exportateurs, qui forment et préparent les mentors à aider les entreprises exportatrices.

  • Au Maroc, des webinaires pour l’harmonisation des normes sont proposés.

Pour aller plus loin

Des efforts supplémentaires sont nécessaires dans tous les pays pour coordonner et regrouper les données disponibles afin d’aider les décideurs politiques dans l’établissement des priorités et l’allocation des ressources. Cela devrait inclure des renseignements sur les exigences administratives de la formation professionnelle et la formation en gestion pour les exportations des PME. Tous les pays ayant déjà pris des engagements en matière de formation dans des secteurs économiques clés, les organisations sectorielles auront un rôle particulier à jouer dans la constitution et le suivi de ces renseignements.

Compte tenu des exigences des marchés étrangers en termes de qualité des biens et des services, la formation professionnelle doit être plus explicitement intégrée aux politiques plus larges concernant les PME dans tous les pays, en particulier pour les domaines favorisant l’internationalisation des PME.

Avec la disponibilité généralisée de l’infrastructure TIC, une formation en ligne plus développée devrait être envisagée aux niveaux national et régional pour élargir l’accès des PME à la formation et, en particulier, à la formation administrative et réglementaire liée aux exportations qui se prête bien aux options d’apprentissage en ligne.

Recommandations pour l’avenir

Globalement, les économies MED ont amélioré leurs cadres politiques du développement du capital humain entrepreneurial. Les principaux défis pour les trois sous-dimensions incluent la mise en œuvre de politiques, la coopération entre l’ensemble des partenaires, y compris les acteurs publics et privés pertinents, la collecte et l’analyse de données sur l’offre de formation et son évaluation.

Plus particulièrement, cette évaluation intermédiaire propose aux économies MED les actions suivantes :

  • En ce qui concerne la promotion de l’apprentissage de l’entreprenariat, les gouvernements devraient établir des partenariats multipartites et interministériels pour assurer une mise en œuvre efficace du ou des plan(s) d’action pouvant relever de différentes stratégies nationales. Une réflexion plus approfondie est nécessaire sur le développement de l’entreprenariat comme compétence clé. Dans un premier temps, il serait nécessaire de sensibiliser les décideurs, les enseignants, les directeurs d’école et les organisations d’étudiants et de parents, aux compétences clés en matière d’entreprenariat. Parallèlement, les pays doivent continuer à faire des efforts pour passer d’initiatives fondées sur des projets à une approche systémique en insérant l’apprentissage entrepreneurial dans les programmes nationaux à tous les niveaux du système éducatif et à (re)former les enseignants.

  • Les économies MED pourraient passer des mesures politiques et actions individuelles de soutien au développement de l’entreprenariat féminin à des approches globales fondées sur des preuves tangibles qui dépassent le simple programme de promotion de l’égalité sociale et de l’égalité des sexes et qui replacent les discussions politiques dans leur contexte économique. Les gouvernements pourraient également poursuivre leurs efforts pour produire et collecter des données ventilées par sexe afin de concevoir des politiques ciblées sur les besoins des femmes entrepreneurs, et tout d’abord des mesures pour développer les compétences et soutenir l’intention des femmes de s’engager dans l’entreprenariat. Les mesures de développement des qualifications et compétences devraient aller au-delà des cours de formation générale pour PME et inclure le mentorat, le coaching, le soutien réseau et la création de systèmes propices à l’entreprenariat féminin et qui favorisent la croissance et l’innovation des entreprises dirigées et détenues par des femmes. Le suivi et l’évaluation systématiques des programmes financés par le secteur public avec la participation des partenaires politiques permettraient de garantir l’efficacité et l’efficience des mesures politiques susmentionnées, de générer un stock solide de données et d’appuyer l’amélioration des politiques.

  • Des données plus détaillées sur la formation des PME, en particulier en termes de potentiel d’exportation, sont nécessaires dans tous les pays. Une institution principale dans le pays devrait coordonner les données et les informations plus générales (par exemple, les bonnes pratiques) pour aider le gouvernement à définir les priorités politiques et l’allocation des ressources. En outre, les politiques relatives au commerce et aux PME doivent être harmonisées pour que la formation corresponde aux besoins du commerce extérieur, afin de renforcer les liens avec l’environnement de la formation professionnelle, en particulier pour améliorer la qualité dans les secteurs présentant un meilleur potentiel d’exportation. L’innovation dans la conception et la prestation de la formation grâce à une meilleure utilisation des technologies TIC disponibles exigera un engagement plus développé de la communauté de la formation et du secteur privé axé sur l’exportation.

Bibliographie

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Notes

← 1. Pour l’OCDE, l’AP est une abréviation de l’Autorité palestinienne et définit soit les territoires de Cisjordanie et de Gaza sous l’administration de l’Autorité palestinienne, soit l’Autorité palestinienne elle-même, selon le contexte. Pour la Commission européenne et les institutions de l’UE qui contribuent au rapport, l’AP représente la Palestine et ses institutions. Cette désignation ne doit pas être interprétée comme une reconnaissance d’un État de Palestine et est sans préjudice des positions individuelles des États membres de l’UE sur cette question.

← 2. http://www.agadiragreement.org.

← 3. https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=LEGISSUM%3Ar14104.

← 4. Les données couvrent uniquement le commerce de biens.

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