Chapitre 1. Renforcer l'intégrité du secteur public au Maroc

Ce chapitre évalue les éléments fondamentaux du système d'intégrité du secteur public au Maroc. Le chapitre étudie l'élaboration et à la mise en œuvre de la Stratégie nationale de lutte contre la corruption du Maroc par rapport aux acteurs institutionnels concernés, tout en abordant les questions liées à la coordination entre ces acteurs. Le paysage juridique actuel en matière d'éthique et d'intégrité sera couvert avant d'évaluer les mécanismes de surveillance qui sont en place pour protéger l'intégrité dans le secteur public marocain.

    

1.1. Rôle de solides systèmes d'intégrité du secteur public dans la promotion de l'intégrité et la lutte contre la corruption

L'intégrité est au cœur d’une gouvernance publique efficace. Maintenir des normes d'éthique et veiller à ce que les fonctionnaires agissent avec intégrité crée des institutions réactives et renforce la confiance du public. Pour y parvenir, un système d'intégrité solide et efficace doit être mis en place dans le secteur public.

La promotion d'une culture d'intégrité exige des efforts cohérents de la part d'un éventail d'acteurs institutionnels. À cette fin, il est essentiel que des mécanismes de coordination efficaces existent pour assurer une coopération entre les entités du secteur public. Le système d'intégrité doit inclure des normes d’éthique clairement définies que les fonctionnaires peuvent mettre en œuvre, fournir des conseils et des incitations et instaurer des mécanismes de surveillance pour veiller à ce que les processus soient entrepris de manière éthique.

Un système d'intégrité doit être en mesure de s'adapter à la nature changeante des risques de corruption afin de conserver la confiance du public. En effet, une récente enquête a révélé que la corruption est désignée comme la première préoccupation des citoyens (Baromètre de confiance Edelman 2017), soulignant le caractère inadapté des seules approches traditionnelles basées sur la conformité dans la prévention de la corruption pour faire face au manque considérable de confiance dans les institutions publiques. C’est pour cette raison que l'introduction de la Recommandation du Conseil sur l'intégrité publique (OCDE, 2017) est particulièrement opportune. Cette recommandation donne un aperçu complet de tous les éléments nécessaires à un système efficace d'intégrité dans le secteur public (Encadré ‎1.1). En particulier, la recommandation souligne la nécessité d'une approche englobant toute la société pour renforcer l’intégrité, et d’intégrer les mécanismes de prévention de la corruption dans les processus quotidiens au lieu de les considérer comme module complémentaire aux services du gouvernement. Plus important encore, la recommandation préconise de promouvoir une culture d'intégrité en combinant une approche fondée sur les valeurs et une approche basée sur la conformité.

Fondamentalement, les gouvernements doivent veiller à respecter les conditions suivantes :

  • Environnement favorable - Les dirigeants politiques doivent démontrer des normes élevées de conduite éthique, incarner l’exemple pour les fonctionnaires. Un engagement de haut niveau en faveur de valeurs éthiques restaure également la confiance du public ;

  • Normes d'intégrité - Les agents publics doivent avoir connaissance des valeurs fondamentales de la fonction publique qui sous-tendent leurs fonctions. En plus, ils doivent appliquer ces principes dans leurs activités quotidiennes ;

  • Cartographie des risques - L’identification des risques de corruption et de violations de l'intégrité dans les activités gouvernementales est un élément clé des politiques de prévention de la corruption. Il devrait y avoir une intégration efficace des pratiques de gestion des risques dans toutes les organisations du secteur public ;

  • Mesures de contrôle - Des mécanismes de contrôle interne doivent être en place pour renforcer le système de gestion des risques et doivent se coordonner avec les mécanismes de contrôle externes ;

  • Transparence et ouverture - Les organisations de la société civile, les médias et le grand public devraient avoir la capacité de contrôler efficacement les actions du gouvernement. Les gouvernements démontrent ainsi leur engagement envers la transparence et le renfort des mécanismes de responsabilisation.

Ce chapitre évalue le système d'intégrité du secteur public au Maroc. Des questions telles que les codes d'éthique, le cadre législatif pour les conflits d'intérêts, la déclaration de patrimoine et l'environnement de contrôle interne et de gestion des risques dans le secteur public marocain sont discutés par rapport aux normes de l'OCDE et internationales.

Encadré ‎1.1. Recommandation du Conseil sur l'intégrité publique (OCDE, 2017)

I. Construire un système d’intégrité publique cohérent et complet

  1. 1. Faire preuve d'engagement au plus haut niveau politique et de gestion dans le secteur public afin d'améliorer l'intégrité publique et réduire la corruption

  2. 2. Clarifier les responsabilités institutionnelles dans le secteur public pour renforcer l'efficacité du système d'intégrité publique

  3. 3. Mettre au point une approche stratégique pour le secteur public qui repose sur des preuves et vise à atténuer les risques pour l'intégrité publique

  4. 4. Établir des normes de conduite strictes pour les agents publics

II. Cultiver une culture d'intégrité publique

  1. 5. Promouvoir une culture d'intégrité publique à l’échelle de toute la société, en partenariat avec le secteur privé, la société civile et les individus

  2. 6. Investir dans l’autorité morale en matière d'intégrité afin de démontrer l'engagement d'une organisation du secteur public envers l'intégrité

  3. 7. Promouvoir un secteur public professionnel, basé sur le mérite et dédié aux valeurs du service public et à la bonne gouvernance

  4. 8. Fournir suffisamment d'informations, une formation, une orientation et des conseils en temps opportun pour permettre aux agents publics d'appliquer les normes d'intégrité publique au travail

  5. 9. Soutenir une culture organisationnelle de la transparence dans le secteur public pour réagir aux problèmes d'intégrité

III. Favoriser une responsabilisation efficace

  1. 10. Appliquer un cadre de contrôle et de gestion des risques pour protéger l'intégrité dans les organisations du secteur public

  2. 11. Veiller à ce que les mécanismes d'application fournissent des réponses appropriées à toutes les violations présumées des normes d'intégrité publique par des agents publics et d’autres personnes impliquées dans de telles violations

  3. 12. Renforcer le rôle de la surveillance et du contrôle externes au sein du système d'intégrité publique

  4. 13. Encourager la transparence et l'engagement des parties prenantes à tous les stades du processus politique et du cycle des politiques pour promouvoir la responsabilité et l'intérêt public

Source : OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur l'intégrité publique.

1.2. Situation actuelle et analyse critique

1.2.1. Dispositifs institutionnels pour l'intégrité

Un système d'intégrité du secteur public doit veiller à la mise en place de politiques et de règlements clairs pour guider les fonctionnaires et les institutions dans leur conduite éthique. Ces politiques devraient définir quelles sont les responsabilités éthiques des individus, et souligner comment ils peuvent agir avec intégrité dans leurs fonctions respectives. Les dispositions stipulées doivent prendre en compte les mesures d'intégrité horizontale et verticale ; les dispositifs institutionnels du pays doivent faire en sorte que les mesures d'intégrité soient efficacement coordonnées et mises en œuvre dans tout le gouvernement.

En mai 2016, le Maroc a lancé la Stratégie Nationale de Lutte Contre la Corruption (SNLCC) qui s’échelonnera jusqu'en 2025. Ses objectifs plus vastes sont de renforcer la confiance envers les institutions publiques, d'accroître la transparence dans le secteur public et d'améliorer l'intégrité dans le milieu des affaires au Maroc. La mise en œuvre et la coordination de la SNLCC a surtout été chapeautée par le ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative. Il est essentiel que le système d'intégrité public d'un pays soit abordé du point de vue du fonctionnaire ; le ministère est bien équipé pour superviser la stratégie à cet égard. Toutefois, comme on le verra plus loin dans ce chapitre, il n'existe pas de code de conduite ou d'éthique pour les fonctionnaires au Maroc. Il est donc difficile pour le ministère ou d'autres acteurs institutionnels de fournir une approche cohérente à l'éthique et à l'intégrité des employés du gouvernement, car les codes sont souvent considérés comme une base pour les systèmes d'intégrité. De plus, la Stratégie définit des indicateurs pour mesurer ses résultats, tous sont externes. Il s’agit notamment de l’indice de perception de la corruption (IPC) de Transparency International, de l’indicateur Doing Business de la Banque mondiale, et de l’Open Government Index du World Justice Project. Bien que l'utilisation d’indicateurs externes puisse aider le Maroc à se conformer aux normes internationales, un ensemble d'indicateurs doit permettre de mesurer le succès de la mise en œuvre de la stratégie. Par exemple, des indicateurs et des mesures politiques au niveau institutionnel sur les normes d’éthique et d’intégrité fourniraient une image plus détaillée du paysage de l'intégrité dans le secteur public et mettraient en évidence les améliorations supplémentaires à apporter.

Un élément clé dans la prévention de la corruption du secteur public est la mise en place d'une institution spécialisée de lutte contre la corruption. En effet, l'article 6 de la Convention des Nations Unies contre la corruption exige des États qu’ils veillent à l'existence d'un organe de prévention de la corruption qui joue un rôle actif dans la coordination, la mise en œuvre et la surveillance des politiques préventives de lutte contre la corruption. Ces responsabilités nécessitent l'implication d'un éventail d'institutions, et en tant que tel, il est essentiel qu'un organe de lutte contre la corruption ait l'indépendance et l'autonomie d'entreprendre son mandat sans ingérence politique indue. Pour ce faire, un cadre juridique solide doit être mis en place en vue de régir l'institution et ses activités.

L’Instance Centrale de Prévention de la Corruption (ICPC) a été créée en mars 2007 par le décret n° 2-05-1228, mais a commencé ses activités en janvier 2009. Le mandat initial de l’ICPC était le suivant : recueillir des renseignements sur les questions liées à la corruption et produire des examens thématiques à verser dans une base de données gérée par l'ICPC ; renforcer les capacités et l'expertise au sein des institutions publiques du Maroc en échangeant des expériences avec les partenaires internationaux ; produire des campagnes de sensibilisation pour le public ; coordonner, superviser et évaluer les politiques nationales de lutte contre la corruption ; et recevoir les plaintes ou les signalements d'actes répréhensibles. En outre, l’Article 36 de la nouvelle Constitution prévoit la création de l'Instance Nationale de Probité et de Lutte Contre la Corruption (INPLCC) qui remplacerait l’ICPC. En 2015, le dahir 1-15-65 du 21 chaâbane 1436 (9 juin 2015) portant promulgation de la loi 113-12 relative à l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPLCC) a été adopté. Cependant, l'INPLCC n'est pas encore opérationnelle : elle devra notamment être dirigée par un Président, qui n’est pas encore nommé. Cela a empêché l’INPLCC de devenir la nouvelle instance. En l’état, la loi prévoit un rôle réduit pour l’ICPC, fixe un seuil plus élevé que prévu pour la recevabilité des plaintes, et réduit son autonomie sur le plan de la désignation de ses membres (OCDE, 2016).

Malgré ces difficultés, l’ICPC a entrepris des initiatives de sensibilisation efficaces ciblant le public. Citons par exemple une bande dessinée sur le thème de la corruption, qui a été produite par l’instance et distribuée aux écoliers. L'accent mis sur l'éducation scolaire en ce qui concerne les questions de corruption et d'intégrité présente une approche globale de la société pour la prévention de la corruption. L’instance a également organisé des ateliers à Marrakech et Tanger pour sensibiliser le public à la corruption et donner des conseils sur la façon de signaler des actes répréhensibles. L’ICPC a, depuis son installation, animé plusieurs sessions de formation et de sensibilisation destinées à plusieurs catégories de cadres et hauts responsables publics marocains notamment dans le secteur de la sureté nationale, la gendarmerie royale et les collectivités territoriales. Dans le même sens, plusieurs ateliers de formation thématiques ont été organisés en collaboration avec certains départements ministériels notamment sur le thème de l’intégrité dans les marchés publics, l’éthique et la bonne gouvernance. Cependant, en ce qui concerne les activités de sensibilisation dans le secteur public, le ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative devrait être responsable de la formation des fonctionnaires. Un programme cohérent de formation pourrait être développé pour les services gouvernementaux par le biais d'un processus de consultation avec l'ICPC, ou bien l’INPLCC quand elle deviendra opérationnelle.

En ce qui concerne la base de données en ligne que l'ICPC a été chargée de créer et de maintenir, il n'en existe pas qui soit accessible au public. Le site Web de l'ICPC contient des rapports et des études thématiques, par exemple, des études sur les partenariats public-privé, sur la corruption et les droits de l'homme et sur les conflits d'intérêts. Cependant, l'étude la plus récente de ce genre mise en ligne sur le site date de décembre 2014. L’ICPC prétend également produire un rapport annuel de ses activités et évaluations de la SNLCC qui doit être mis en ligne sur le site ; ces rapports ne semblent pas être publiés chaque année, et le plus récent date de décembre 2015.

En juin 2017, le Maroc a publié un décret (n ° 2-17-264) relatif à la création d'un nouvel organe de lutte contre la corruption, la Commission nationale de lutte contre la corruption (CNAC). La Commission, dirigée par le Premier ministre Saadeddine Othmani et composée de 23 membres, a été créée pour superviser et coordonner la mise en œuvre de la SNLCC, de ses projets pertinents et de ses programmes sectoriels. La CNAC a commencé ses activités en avril 2018.

Recommandation de réforme

Le Maroc pourrait envisager d'élaborer des indicateurs internes dans la SNLCC pour évaluer les mesures d'intégrité dans le secteur public. Cela peut impliquer l’introduction d'indicateurs et de mesures politiques en matière d'éthique au niveau institutionnel. Cela renforcera les normes d'éthique et d'intégrité dans les entités du secteur public.

Le Maroc pourrait envisager d'adopter une approche plus cohérente et constante pour renforcer ses activités de sensibilisation. Cela peut inclure d’évaluer les efforts de sensibilisation de l’ICPC pour déterminer quels programmes ont porté leurs fruits, et d'utiliser ces évaluations pour développer des initiatives plus régulières.

Le Maroc pourrait envisager de mettre en œuvre le nouveau mandat pour l’INPLCC et sa loi pour qu’elle puisse assumer ses nouvelles fonctions. La nouvelle Instance devrait développer un plan stratégique pour cibler ses activités.

1.2.2. Prévention globale pour l'intégrité

Code d'éthique

L'établissement de normes de conduite éthique assure que les fonctionnaires agissent avec intégrité et c’est un élément essentiel de la prévention de la corruption dans le secteur public. Formaliser les valeurs fondamentales guide la conduite des agents publics dans leurs activités quotidiennes et assure qu'ils agissent avec impartialité, objectivité et transparence (Gilman, 2005). En effet, la Recommandation du Conseil sur l'intégrité publique (OCDE, 2017) reconnaît l'importance d’établir des normes de conduite élevées et donne des indications sur la manière de procéder ; y compris les normes d'intégrité dans le cadre juridique, décrivant clairement les attentes en termes de comportement, et la communication des valeurs de service public sont autant de moyens efficaces pour les gouvernements d'établir des normes d'intégrité.

Une grande majorité des pays de l'OCDE ont établi par écrit des codes officiels sur les normes de comportement. Ceux-ci peuvent décrire dans les grandes lignes les principes fondamentaux qui définissent le rôle professionnel des fonctionnaires, comme par exemple, agir avec honnêteté et intégrité, ou exécuter leurs fonctions en toute transparence. Des codes plus spécifiques peuvent aborder certaines questions susceptibles de causer des problèmes d’éthique, par exemple les situations de conflit d'intérêt, l’emploi à l'extérieur de la fonction publique ou l'utilisation des ressources publiques. Quelle que soit la forme, l'objectif principal est de donner aux fonctionnaires un instrument cohérent et flexible qui énonce les principes communs de la fonction publique et guide leur comportement.

Le code des valeurs et de l’éthique pour la fonction publique du Canada est un document complet qui décrit les valeurs éthiques, professionnelles et démocratiques qui orientent les actions des fonctionnaires (Encadré ‎1.2). Le Code aborde également des mesures autour des conflits d'intérêts et de l'après-emploi, fournissant des directives claires sur les mesures que les fonctionnaires doivent prendre s’ils sont confrontés à une situation contraire aux valeurs énoncées dans le Code. Cette approche établit des normes d'intégrité élevées, le code servant de point de référence global pour les fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions.

En ce qui concerne les codes et directives spécifiquement dédiés aux fonctionnaires qui travaillent dans des secteurs sensibles, le Royaume-Uni a mis en place un code de conduite pour les conseillers spéciaux qui porte sur leur rôle et le comportement qui est attendu d’eux. Les conseillers spéciaux ajoutent une dimension politique aux conseils et à l'assistance dont bénéficient les ministres et illustrent dans quels domaines il serait inapproprié pour des fonctionnaires permanents de s’impliquer, mais de telles fonctions peuvent soulever des préoccupations d'ordre éthique. À ce titre, le Code stipule clairement ce que les conseillers spéciaux ont l’interdiction de faire, tout en offrant des conseils sur la façon dont ils peuvent agir dans le respect des valeurs fondamentales telles que la transparence et l'impartialité. En développant des codes pour un large éventail d'acteurs du secteur public, en particulier pour les postes considérés à risque en matière de corruption, les gouvernements renforcent leurs systèmes d'intégrité et veillent à ce que les employés connaissent les valeurs de service public qui sous-tendent leur rôle.

Encadré ‎1.2. Le code de valeurs et d’éthique pour la fonction publique du Canada

Le code des valeurs et de l'éthique du Canada est un outil complet destiné aux fonctionnaires pour guider leur conduite et un comportement éthique dans le cadre de leurs fonctions. Le code décrit les valeurs de service public en vigueur dans le secteur public canadien tout en fournissant des conseils sur la façon de traiter les conflits d'intérêts, et quelles mesures post-emploi doivent être entreprises pour réduire la probabilité de violations de l'intégrité. La finalité du Code est de guider les fonctionnaires dans leurs activités professionnelles et de maintenir la confiance du public en l'intégrité de la fonction publique.

En termes de valeurs de la fonction publique, le Code identifie quatre types de valeurs : Démocratiques, professionnelles, éthiques et humaines.

  • Valeurs démocratiques : les fonctionnaires doivent donner des conseils honnêtes et impartiaux, loyalement mettre en œuvre les décisions qui sont prises légalement et fournir au Parlement et aux citoyens des informations sur les résultats de leurs travaux ;

  • Valeurs professionnelles : les fonctionnaires doivent avoir conscience que dans la fonction publique, les moyens par lesquels une finalité est obtenue sont tout aussi importants que les réalisations. Ils doivent constamment s’efforcer d’améliorer la qualité du service public par l'innovation et l'efficacité tout en faisant preuve de transparence au sein du gouvernement ;

  • Valeurs éthiques : les fonctionnaires doivent exercer leurs fonctions dans le respect des valeurs d'impartialité, d'objectivité et d'intégrité. Ils doivent prendre des décisions dans l'intérêt public et se comporter d'une manière qui puisse résister à l'examen public le plus minutieux qui soit ; une obligation dont on ne saurait s’acquitter pleinement par simple respect de la loi ;

  • Valeurs humaines : les organisations de la fonction publique devraient être dirigées par la participation et l'ouverture, et tous les individus doivent être traités de manière égale, équitable et respectueuse. Les décisions de nomination dans la fonction publique doivent être fondées sur le mérite, tandis que les processus de recrutement, d'évaluation et de promotion doivent être sous-tendus par les valeurs fondamentales de la fonction publique.

En outre, le Code décrit les rôles des fonctionnaires responsables de l'intégrité dans le secteur public :

  • De hauts responsables des valeurs et de l'éthique dans la fonction publique soutiennent le directeur adjoint pour s’assurer que l'organisation illustre les valeurs de service public à tous les niveaux. Le haut responsable entend promouvoir la sensibilisation, la compréhension et la capacité d'appliquer le code parmi les employés et s’assure que des pratiques de management sont en place pour soutenir le leadership fondé sur les valeurs ;

  • Les agents du ministère chargés des mesures relatives aux conflits d'intérêts et à l’emploi d’après-mandat sont des spécialistes dans leurs organisations respectives qui ont été désignés pour conseiller les employés sur les mesures liées aux conflits d'intérêts et à l’emploi d'après-mandat dans le code des valeurs et de l'éthique.

Source : Code des valeurs et de l’éthique pour la fonction publique du Canada ; Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, www.canada.ca/en/treasury-board-secretariat.html.

Au Maroc, l'article 157 de la Constitution de 2011 reconnaît la nécessité d'une charte de la fonction publique pour promouvoir une culture de bonne gouvernance ; toutefois, il n'existe pas à l’heure actuelle un code de conduite général pour les fonctionnaires du gouvernement. Cela a été pris en compte en vertu de la SNLCC et un projet de code est en cours d'élaboration par le ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative.

Le Statut général de la fonction publique contient des dispositions relatives à l'intégrité et à l'éthique dans le secteur public. Bien qu’il ne soit pas aussi vaste qu’un code de conduite, il aborde certaines des questions qu’un code peut présenter. En particulier, le chapitre 5 décrit les sanctions disciplinaires et les sanctions administratives auxquelles s’exposent les fonctionnaires s’ils commettent des actes illicites dans l'exercice de leurs fonctions. Toutefois, le Statut ne fait aucune référence spécifique à des normes éthiques ou à des valeurs de service public, il ne stipule pas non plus ce qui est considéré comme une violation de l'éthique. Ceci est une lacune importante du cadre sur l'intégrité ; les fonctionnaires doivent pouvoir bien comprendre les valeurs éthiques qui sont censées les guider dans leur rôle, et un soutien doit leur être fourni s’ils se retrouvent dans une situation difficile et discutable sur le plan éthique. Le manque de clarté autour des normes d'intégrité dans les opérations quotidiennes et l'incertitude sur les mesures à prendre en cas de violation de l'intégrité entravent le développement d'une culture organisationnelle ouverte. Le futur code de conduite devrait combler ces lacunes afin de renforcer le cadre éthique public au Maroc.

Les fonctionnaires du ministère de la Fonction publique et la Réforme administrative constatent que des codes de conduite doivent être mis au point par secteur afin d'atténuer les différents risques d'intégrité. Dans ce cas, il faut prévoir des mécanismes de coordination efficaces entre les différents services et ministères. Si ces codes sont développés en tant qu’instruments juridiques, la coordination entre les différents organismes du secteur public veillera à ce qu’ils soient cohérents. En outre, la formation des fonctionnaires sur l'intégrité devrait accompagner les codes d'éthique et de conduite pour favoriser une culture d'intégrité. En juillet 2015, l'Australie a mis en ligne un programme de sensibilisation au code d’éthique destiné aux fonctionnaires de l’Australie-Méridionale. Les organismes du secteur public informent régulièrement leurs employés du programme, et certains exigent des activités de suivi pour s’assurer que les employés ont bien suivi les cours (Encadré ‎1.3). Au Maroc, la formation sur l’éthique varie en fonction des différents ministères ; des fonctionnaires du ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative notent qu'il incombe à chaque ministère de fournir une formation à ses employés. Par conséquent, il n'existe pas de programme de formation cohérent sur l'éthique et l'intégrité, ni aucun suivi des activités de formation qui sont organisées au sein de différents organismes.

Encadré ‎1.3. Programme de sensibilisation au code d’éthique dans le secteur public de l'Australie-Méridionale

Le programme de sensibilisation à l’éthique du secteur public se compose d'un cours en ligne que les fonctionnaires sont invités à suivre dans le secteur public de l'Australie-Méridionale. Des conseils sont fournis sur cinq éléments clés : le code d’éthique ; les fondements solides de la fonction publique ; les valeurs du secteur public ; les normes de conduite professionnelle ; et l'application du code d’éthique.

Dans le dernier volet, « l'application du code d’éthique », le cours met en avant un modèle décisionnel que les fonctionnaires peuvent utiliser pour veiller à agir en conformité avec le Code. Le modèle ACTION se compose des éléments suivants :

  • A - Agir de manière responsable

  • C - Considérer le code des fondements de l'éthique et les valeurs du secteur public

  • T - Tester votre jugement

  • I - Identifier l’impact sur les parties prenantes

  • O - Obéir aux règles

  • N - Notification aux personnes concernées

Le programme encourage les individus à prendre des mesures s’ils sont témoins d’actes répréhensibles ou d’inconduite dans un organisme du secteur public. À la fin du cours en ligne, des situations difficiles et discutables sur le plan éthique sont exposées pour montrer comment les individus peuvent appliquer le processus décisionnel ACTION et quelles mesures entreprendre face à un dilemme éthique. Ceci est particulièrement utile car en réalité de telles situations peuvent être extrêmement complexes, et les individus peuvent être tiraillés entre des loyautés contradictoires ou concurrentes dans leur travail. Le programme s’avère être un outil efficace pour fournir des solutions pratiques aux problèmes d’éthique auxquels les fonctionnaires sont confrontés dans leurs tâches quotidiennes.

À la fin du programme, les employés doivent attester dans une base de données de formation qu'ils ont effectivement suivi le cours. Le programme est obligatoire dans certains organismes du secteur public en Australie-Méridionale, mais pour l'instant il n'est pas obligatoire pour tous les fonctionnaires.

Source : Office for the Public Sector, Government of South Australia.

Recommandation de réforme

Le Maroc devrait veiller à ce que le projet de code de conduite pour les agents publics contienne des dispositions détaillées pour les employés en stipulant clairement quelles valeurs de service public sous-tendent leurs fonctions et leurs activités quotidiennes. Le code devrait également fournir des conseils et des orientations sur les mesures à prendre face à une situation discutable sur le plan éthique, par exemple, lorsqu’une personne soupçonne un conflit d'intérêts potentiel.

Le Maroc pourrait envisager d'élaborer des programmes de formation sur l'intégrité pour les organismes du secteur public, abordant les risques et les questions éthiques spécifiques au secteur. Cela pourrait se faire en conjonction avec le code de conduite qui est en train d’être rédigé à l’attention des fonctionnaires ou comme démarche à part entière. Ce type de formation apporte soutien et conseils aux employés dans leurs activités quotidiennes.

Le Maroc pourrait envisager d'élaborer un mécanisme de coordination pour assurer la cohérence entre les codes de conduite spécifiques qui sont en cours d'élaboration pour chaque secteur.

Prévention des conflits d'intérêts

La gestion des conflits d'intérêts dans le secteur public est essentielle pour maintenir la confiance dans les institutions publiques car elle garantit que les employés du gouvernement exercent leurs fonctions en toute impartialité et avec intégrité. Un conflit d’intérêts désigne l'influence indue des intérêts privés d'un agent public sur l'exercice de ses fonctions (OCDE, 2005), la détection d’un tel conflit d’intérêts constituant souvent une question complexe. Un conflit d'intérêts peut être réel, apparent ou potentiel. Un conflit d'intérêts se produit lorsqu'un agent public détient des intérêts privés susceptibles d’influencer injustement leurs fonctions dans le secteur public. Un conflit d'intérêts apparent se produit lorsqu’il semble que l'intérêt privé d’un agent public puisse influencer l’exercice de ses fonctions, mais que tel n’est pas le cas en réalité. Enfin, un conflit d'intérêts potentiel existe lorsqu'un agent public détient des intérêts privés susceptibles d’entraîner une influence indue à l'avenir (OCDE, 2005). Des conflits peuvent se produire si les individus ont, par exemple : un intérêt financier direct ou indirect, des intérêts personnels ou non financiers ou des loyautés contradictoires où les décideurs ont des obligations concurrentes envers différentes personnes ou entités (National Audit Office, 2015).

S’agissant d’une problématique potentiellement complexe, il est impératif que le système d'intégrité d'un pays prévoie des mécanismes de prévention et de gestion efficaces des conflits d'intérêts dans le secteur public. Ceci peut prendre la forme de conseils adressés aux employés sur la façon d'identifier les conflits potentiels et sur les mesures à prendre une fois qu'ils ont connaissance d'un conflit d'intérêts avéré. En outre, les organismes du secteur public peuvent proposer une formation ou entreprendre des activités de sensibilisation sur le sujet afin de gérer les conflits d'intérêts dès qu'ils se présentent.

Au Maroc, des dispositions légales et constitutionnelles sont en place pour la gestion des conflits d'intérêts. L'article 36 de la Constitution stipule que les infractions relatives aux conflits d'intérêts et aux délits d'initiés, ou d'ordre financier, sont sanctionnées par la loi ; en outre, le trafic d'influence ou de privilèges et l'abus de position dominante contraires aux principes de concurrence libre et loyale dans les relations économiques, sont autant de pratiques sanctionnables. L'article 245 du Code pénal fait référence aux sanctions qui pèsent sur les fonctionnaires qui se livreraient à des activités aux fins d’enrichissement personnel illicite dans l'exercice de leurs fonctions. L'article 247 stipule que les fonctionnaires y sont soumis pendant une période de cinq ans après avoir quitté leurs fonctions. Enfin, les articles 15 et 16 du Statut général de la fonction publique stipulent que les fonctionnaires ont l’interdiction d’occuper un poste rémunéré dans le secteur privé ou de détenir des intérêts économiques qui peuvent compromettre l'exercice de leurs fonctions en qualité de fonctionnaire.

Les dispositions décrites ci-dessus en ce qui concerne les conflits d'intérêts se rapportent uniquement aux gains économiques et à l'enrichissement illicite. Il n'y a pas de description claire précisant quelles activités ou intérêts personnels peuvent présenter un conflit d'intérêts, ou être contraires aux bonnes pratiques éthiques dans le secteur public ; des dispositions plus spécifiques et la clarification des situations potentielles de conflit d'intérêts pour les fonctionnaires favoriseraient peut-être la détection précoce et l'atténuation des activités contraires à l'éthique.

En outre, un rapport national sur l'éthique et la lutte contre la corruption qui a été présenté par des membres de la délégation marocaine lors d’une série de réunions au Qatar, en novembre 2009, cite qu’en vertu de l'article 2bis d'un décret royal adopté le 23 septembre 1975, les membres du gouvernement ont l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou commerciale dans le secteur privé ; en particulier, il est interdit aux fonctionnaires de participer à la gestion ou à l'administration d'une entreprise privée (Transparency Maroc, 2015). Toutefois, ce texte est resté introuvable, malgré une recherche approfondie dans le Journal officiel. Une circulaire du bureau du Premier ministre en date du 5 juin 1998 qui se trouve dans la base de données du ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative mentionne ledit décret, et l’a peut-être introduit. Malgré la confusion qui entoure ce décret, à l’instar des autres dispositions légales régissant les situations de conflit d'intérêts, les mesures à prendre ou les sanctions disciplinaires auxquelles s’expose un fonctionnaire en cas de non-respect de la loi ne sont pas suffisamment précisées.

Une autre question importante à considérer dans le contexte marocain est la question des conflits d'intérêts en matière d'emploi pré et post-public. En dehors de l'article 247 du Code pénal cité précédemment, aucune des dispositions légales en vigueur au Maroc ne fait référence à la prévention des conflits d'intérêts, soit en ce qui concerne l’ancien poste occupé par un fonctionnaire, soit en ce qui concerne les emplois futurs auxquels pourra prétendre un fonctionnaire après avoir quitté la fonction publique. Il est important de trouver un équilibre entre attirer des collaborateurs qualifiés et expérimentés, et permettre qu’une influence indue soit exercée sur la prise de décisions dans le secteur public (OCDE, 2015). L'OCDE a mis en place un ensemble de principes sur l'emploi post-public pour guider les pays dans l'élaboration d'une politique d'emploi post-public (Encadré ‎1.4). Il convient de noter ici que le Maroc est en train de développer de nouvelles dispositions pour aligner son cadre juridique de gestion des conflits d'intérêts sur les normes internationales. Ces dispositions devraient tenir compte des risques d’emploi pré- et post-public auxquels peuvent s’exposer les employés du gouvernement.

Encadré ‎1.4. Principes de l'OCDE pour la gestion des problèmes liés à l'emploi post-public

Problèmes qui se posent principalement lorsque les fonctionnaires sont encore en poste au gouvernement

  • Les fonctionnaires ne doivent pas améliorer leurs perspectives d'emploi futures dans les secteurs privés et à but non lucratif en accordant un traitement préférentiel à des employeurs potentiels.

  • Les fonctionnaires devraient, en temps opportun, divulguer leur recherche ou leur négociation d’un emploi ainsi que les offres d'emploi susceptibles de constituer un conflit d'intérêts.

  • Les fonctionnaires devraient, en temps opportun, divulguer leur intention de rechercher et de négocier un emploi et l'acceptation d'une offre d'emploi dans les secteurs privés et à but non lucratif qui pourrait constituer un conflit d'intérêts.

  • Les fonctionnaires qui ont décidé de prendre des fonctions dans les secteurs privé et à but non lucratif, doivent, dans la mesure du possible, être dispensés des devoirs actuels qui sont les leurs et qui pourraient constituer un conflit d'intérêts avec leurs responsabilités probables auprès de leur futur employeur.

  • Avant de quitter le secteur public, les fonctionnaires dont le poste les expose à un conflit d'intérêts devraient avoir un entretien de sortie avec l'autorité compétente pour étudier d'éventuels conflits d'intérêts et, le cas échéant, déterminer les mesures appropriées pour y remédier.

Problèmes qui se posent surtout après que les fonctionnaires aient quitté le gouvernement

  • Les fonctionnaires ne doivent pas utiliser d’informations confidentielles ou d'autres informations « privilégiées » après avoir quitté le secteur public.

  • Les fonctionnaires qui quittent le secteur public doivent se voir imposer des limites dans leurs efforts de lobbying vis-à-vis de leurs anciens subordonnés et collègues dans le secteur public. On pourrait envisager d’imposer une limite sur les domaines d’exercice, les délais, ou encore une période de « récupération ».

  • Le système d'emploi post-public devrait envisager des mesures appropriées pour prévenir et gérer les conflits d'intérêts lorsque des fonctionnaires acceptent des nominations dans des entités avec lesquelles les autorités avaient des rapports officiels avant leur départ du secteur public.

  • Les fonctionnaires doivent avoir l’interdiction de « changer de camp » et de représenter leur nouvel employeur dans une procédure en cours sur une question litigieuse dont ils avaient la responsabilité avant de quitter le secteur public.

Obligations des fonctionnaires actuellement en poste et confrontés à d’anciens fonctionnaires

  • Les fonctionnaires actuels doivent avoir l’interdiction d'accorder un traitement préférentiel, un accès particulier ou des informations privilégiées à quiconque, y compris à d'anciens fonctionnaires.

  • Les fonctionnaires actuels qui engagent d'anciens fonctionnaires sur une base contractuelle pour faire essentiellement le même travail que ces anciens fonctionnaires effectuaient dans l’organisme public qui les employait doivent veiller à ce que le processus d'embauche ait été suffisamment compétitif et transparent.

  • Le système d'emploi post-public doit réfléchir à la façon de gérer les indemnités de licenciement perçues par d'anciens fonctionnaires lorsqu'ils sont réembauchés.

Responsabilités des organisations qui emploient d’anciens fonctionnaires

  • Des limites doivent être imposées aux entreprises privées et aux organismes à but non lucratif qui chercheraient à solliciter ou encourager des fonctionnaires qui souhaiteraient quitter le gouvernement ou qui l’ont déjà quitté, à se livrer à des activités interdites par la loi ou la réglementation.

Source : OCDE (2010).

Recommandation de réforme

Le Maroc devrait veiller à ce que les modifications des dispositions légales actuelles concernant les conflits d'intérêts incluent des définitions claires et précises de ce qui constitue des intérêts personnels et non financiers. Ceci apportera des éclaircissements aux fonctionnaires sur ce qui constitue un conflit d'intérêts.

Le Maroc pourrait envisager de fournir une formation régulière aux fonctionnaires sur les conflits d'intérêts et les mesures à adopter dans une telle situation. Ces activités de formation permettront la détection et la gestion précoces des conflits d'intérêts.

Le Maroc devrait envisager de préciser dans la législation concernée quelles dispositions peuvent être appliquées à un emploi avant et après un passage dans le secteur public afin de réduire les risques en matière d'intégrité dans le secteur public.

Déclarations de patrimoine

Obliger les agents publics à divulguer leurs intérêts privés est un moyen efficace d’empêcher l'enrichissement illicite et de maintenir des normes d'intégrité élevées. Les principaux objectifs de la déclaration de patrimoine incluent notamment :

  • Accroître la transparence et la confiance des citoyens dans l'administration publique ;

  • Aider les responsables des institutions publiques à éviter les conflits d'intérêts chez leurs employés ;

  • Surveiller la variation des richesses des employés du gouvernement pour les dissuader de commettre des actes répréhensibles et les protéger contre de fausses accusations (OCDE, 2011).

En plus d’une déclaration de patrimoine, les agents publics doivent également avoir l’obligation de déclarer les autres mandats qu'ils sont susceptibles de détenir, ou les intérêts privés qui pourraient donner lieu à un conflit d'intérêts, comme indiqué plus haut dans ce chapitre. La prise en compte de tous ces éléments contribue à renforcer le système d'intégrité du secteur public d'un pays.

Un système efficace de déclaration de patrimoine doit comporter plusieurs éléments clés. Tout d'abord, un tel système exige une base juridique solide qui définit la finalité de la déclaration de patrimoine, par exemple, éviter l'enrichissement illicite et les conflits d'intérêts. Il faut également des informations complètes sur ce que les agents publics doivent déclarer ; les principaux flux financiers entrants et sortants, y compris les prêts reçus ou les cadeaux, les comptes bancaires et les actifs immobiliers tels que les biens immobiliers sont autant d’actifs à rapporter. Des informations sur l'emploi externe ou sur des intérêts non financiers, par exemple la participation à des conseils administratifs d'entreprises, peuvent révéler des conflits d'intérêts potentiels. La soumission des déclarations est un autre élément clé ; une déclaration doit être fournie dès la prise de fonction d’un agent public, puis à intervalles réguliers pendant son mandat. Idéalement, ce processus devrait se faire en ligne, pour faciliter l'analyse automatique et la publication ultérieure des déclarations. Un système de vérification efficace doit être mis en place pour vérifier la soumission des déclarations ; il doit s’accompagner d'un organisme de surveillance qui dispose de ressources suffisantes pour contrôler les déclarations ; un tel organisme doit avoir accès à des technologies actuelles pour prendre en charge la soumission, le traitement et la publication en ligne des informations (Transparency International, 2015). Une coordination efficace entre les organismes de surveillance et d'autres organismes (par exemple, les services de poursuites) peut également contribuer à la détection des activités illicites. Si les employés omettent de fournir des déclarations opportunes, complètes et exactes, des sanctions proportionnées et dissuasives doivent être en place. Enfin, un élément clé d'un système de divulgation qui protège l'intégrité et favorise la confiance du public est la publication de déclarations de patrimoine. Ces informations devraient être accessibles en ligne et mises à la disposition du public, augmentant ainsi la surveillance de la société civile sur les agents publics et renforçant la responsabilisation. Ces dernières années, la France a rendu obligatoire la publication des déclarations de patrimoine des responsables du gouvernement ; une autorité administrative indépendante, la Haute Autorité pour la Transparence dans la Vie Publique (HATVP), est responsable de la réception, de la gestion et de la publication des déclarations (Encadré ‎1.5). Un tel système renforce la gestion de l'intégrité dans le secteur public.

Encadré ‎1.5. Publication des déclarations de patrimoine en France

La Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) est une autorité administrative indépendante qui a été créée en France en 2013. La HATVP est chargée de garantir l'intégrité des fonctionnaires. Plus précisément, en vertu de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 sur la transparence dans la vie publique, l'Autorité est chargée de la réception et du contrôle des déclarations de patrimoine et des déclarations d'intérêts présentées par les fonctionnaires. Une déclaration doit être soumise à la HATVP au début et à la fin du mandat d'un fonctionnaire ; toute personne qui omet de soumettre une déclaration ou qui dresse une évaluation mensongère de son patrimoine s’expose à des sanctions pénales pouvant aller jusqu'à trois ans de prison et 45 000 EUR d’amende. Depuis l'entrée en vigueur de la loi, la HATVP a reçu les déclarations de 15 000 fonctionnaires.

Les déclarations de patrimoine des membres du gouvernement sont publiées par la HATVP sur son site Web dans un délai de trois mois après que l'Autorité ait reçu le retour des autorités fiscales. Toute évaluation faite par la HATVP accompagne la publication de la déclaration de patrimoine de l'individu concerné. Le site de l'Autorité comporte une fonction de recherche qui permet au public de trouver les déclarations d'un fonctionnaire spécifique. Ce système renforce l'intégrité et réduit les risques de corruption dans le système politique en permettant un contrôle accru du public sur les actions des responsables publics.

Source : La Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique.

Depuis l'adoption de la Constitution de 2011, le suivi du patrimoine des fonctionnaires est devenu une exigence constitutionnelle au Maroc. L'article 158 stipule que tout élu ou fonctionnaire nommé doit déposer une déclaration écrite des biens et des avoirs qu'il possède, directement ou indirectement, au moment de sa prise de fonctions, pendant son mandat et à la fin de son mandat dans la fonction publique. Cette disposition vise à empêcher l'enrichissement et les gains financiers illicites, mais ne couvre pas le risque de conflit d'intérêts ; il n'y a pas d'obligation de déclarer les intérêts privés au Maroc (Tableau ‎1.1). Les déclarations sont à remettre lors de l’entrée en fonction, tous les trois ans au cours du mandat et à l’issue du mandat. La déclaration doit indiquer les changements (le cas échéant) dans les revenus, les actifs ou les activités entreprises par le fonctionnaire. Les organes de contrôle chargés de recevoir les déclarations des employés du gouvernement sont les suivants :

  • Le Greffier de la Cour des comptes reçoit les déclarations des membres du gouvernement et des fonctionnaires ayant des compétences nationales ;

  • Les élus des conseils locaux et les agents publics ou fonctionnaires ayant des compétences au niveau régional soumettent leurs déclarations au Greffier de la Cour des comptes régionale.

Tableau ‎1.1. Catégories financières à déclarer par les agents publics du Maroc

Revenus

Dépenses / Style de vie

Salaire

Espèces

Revenus locatifs

Dépôts bancaires

Honoraires pour prestation de service

Immobilier

Intérêts, redevances

Biens meubles (obligations, bijoux, actifs commerciaux, etc.)

Prêts reçus

Titres

Dettes remboursées au fonctionnaire

Prêts accordés

« Revenus exonérés » (cadeaux, héritages, actifs vendus, etc.)

Prêts remboursés par le fonctionnaire

Source : Transparency International (2015).

Étant donné que les dispositions légales en vigueur au Maroc couvrent largement les agents publics, on estime que 110 000 employés du gouvernement sont tenus de déclarer leur patrimoine (Transparency International, 2015). Face à l’important volume de déclarations, la Cour des comptes se voit contrainte d’endosser un rôle plus administratif ; l’organisme s’assure que les exigences de soumission sont respectées, mais ne traite pas les déclarations, à l'exception de cas particuliers qui font l'objet d'une enquête. La Cour des comptes dispose de pouvoirs limités pour procéder à un audit financier si une déclaration n'est pas plausible. Le décret royal n°1-02-124 du 13 juin 2002 stipule que la Cour peut enquêter sur toute inexactitude ou omission constatée dans une déclaration, et a le droit de demander des preuves (par ex., des justificatifs pertinents) si elle le juge nécessaire. Cependant, les demandes d'informations auprès de l’administration fiscale doivent être formulées sur ordre du président de la Cour des comptes. En outre, le juge rapporteur peut également demander des informations pertinentes auprès des banques ou établissements de crédit (là encore, sur ordre du président de la Cour) sur les comptes de dépôt ou de titres de l'individu.

Le dernier rapport annuel de la Cour des comptes ne cite pas de statistiques sur les déclarations qui ont fait l’objet de vérifications ou ont conduit à une enquête par les organismes d'application de la loi. En ce qui concerne le contrôle public, toutes les personnes qui traitent les déclarations de patrimoine sont liées par le secret professionnel en vertu de l'article 446 du Code pénal ; les personnes qui communiquent des renseignements concernant les déclarations de patrimoine s’exposent à une amende ou à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu'à six mois. Cette disposition affaiblit les mécanismes de responsabilisation en limitant le contrôle public sur les actions des agents publics.

Enfin, les organismes responsables de la réception des déclarations peuvent imposer des sanctions disciplinaires aux fonctionnaires qui omettent de fournir une déclaration. Dans un premier temps, un avertissement écrit peut être envoyé; l’organisme peut ensuite demander le renvoi des agents publics qui ne respectent pas les obligations de déclaration. Les affaires impliquant de hauts fonctionnaires sont soumises au Roi. En 2008, un amendement a été apporté au Code pénal, en vertu de l'article 262bis qui impose une amende de 3 000 à 15 000 dirhams aux individus qui omettent de remplir correctement leur déclaration, ou d’en soumettre une. Ce montant est toutefois très faible compte tenu de la quantité de richesses illicites qui pourraient être amassées par des personnes (ce montant est équivalent à 815 - 4 080 USD, soit 700 - 3 000 EUR). Un régime disciplinaire n’a nul besoin d’être excessivement sévère, mais les sanctions doivent tenir compte de la gravité de l'inconduite qu’elles sanctionnent.

Recommandation de réforme

Le Maroc pourrait envisager de rationaliser son système de déclaration de patrimoine afin d’en améliorer l’efficacité. Ceci est possible en traitant les déclarations selon des catégories spécifiques, ou en utilisant différentes méthodes d'échantillonnage. La vérification des soumissions, la vérification formelle et les audits financiers devraient être opérationnels et stipulés dans le cadre juridique. Cela permettra aux organismes de surveillance de traiter efficacement l’important volume de déclarations qui sont demandées.

Le Maroc devrait envisager d'étendre les déclarations obligatoires aux intérêts privés et non financiers. De telles mesures renforcent l'intégrité dans le secteur public en atténuant les conflits d'intérêts potentiels.

Le Maroc devrait envisager de modifier la législation afin de permettre le contrôle public des déclarations de patrimoine. Cela permettrait de renforcer les mécanismes de responsabilisation et de promouvoir la confiance dans les institutions publiques.

Le Maroc pourrait envisager de pénaliser toute infraction relative aux déclarations de patrimoine. Les sanctions existantes ne constituent pas un moyen de dissuasion efficace pour la non-conformité ou la falsification et l'omission de renseignements concernant les déclarations de patrimoine.

1.2.3. Une détection et une mise en application fortes

Contrôle interne et gestion des risques

Les systèmes de contrôle interne assurent que les entités publiques fonctionnent de manière effective et conformément aux lois et règlements pertinents qui régissent le secteur public. L'exigence de rapports financiers et de respect des lois en vigueur renforce la responsabilité et fournit un mécanisme de surveillance des activités du gouvernement. Un système de contrôle interne solide doit refléter l'engagement d'une organisation vis-à-vis des principes éthiques ; ces valeurs doivent être au cœur des organismes du secteur public, et se traduire par des actions dans leurs processus et activités. Bien qu'il soit essentiel que la haute direction démontre son engagement envers des principes tels que l'honnêteté et l'intégrité, les entités du secteur public doivent aller au-delà des approches qui « donnent le ton au sommet » afin d'intégrer des valeurs fondamentales dans les opérations quotidiennes, impliquant tous les employés dans le processus.

Le système de contrôle interne ne doit pas être mis en œuvre comme un module complémentaire aux organismes et services existants ; au contraire, le système doit fonctionner comme partie intégrante des pratiques et processus existants dans les entités gouvernementales. Cela implique d’écarter un état d’esprit qui se limite à la conformité ou qui consiste à traiter l'atténuation des risques comme un exercice exclusivement négatif. À cet effet, les systèmes de contrôle interne doivent être caractérisés par :

  • Un accent sur les principes et la performance : le système ne doit pas se contenter d’approches fondées sur les règles ;

  • Une connaissance de la culture et de l'attitude organisationnelle : il faut donc éviter les seuls « contrôles durs » et l'intégration des valeurs de base dans le système de contrôle interne ;

  • Une nature dynamique : les systèmes de contrôle interne doivent évoluer et s'adapter à une organisation. Les systèmes obsolètes ou statiques sont incapables de remplir efficacement leur fonction en tant que mécanisme de responsabilisation ;

  • Une approche adaptée à l'entité : les approches universelles sont à proscrire. Au lieu de quoi, le système de contrôle interne doit répondre aux besoins spécifiques de l'organisation (CIPFA et IFAC, 2014).

Un élément clé d'un système de contrôle interne solide est une approche positive et intégrée de la gestion des risques de corruption ; le système doit permettre d'identifier les risques potentiels et contenir les mécanismes de contrôle appropriés pour les traiter efficacement. Le Cadre pour la gestion des risques au Royaume-Uni au sein du gouvernement (Encadré ‎1.6) en est un bon exemple. Le cadre est un outil complet qui regroupe les bonnes pratiques applicables à différents ministères pour atténuer les risques. Il utilise l’approche des « trois lignes de défense » : dans un premier temps, les gestionnaires devraient identifier et gérer activement les risques dans le cadre de leurs processus quotidiens ; ensuite, le processus de gestion des risques utilisé par l’entité doit faciliter la gestion de l'organisation et la surveillance des risques, par exemple en renforçant les capacités de l'organisation face au risque et en définissant clairement ses pratiques en matière de gestion des risques ; enfin, le processus d'audit interne doit fournir une assurance indépendante et objective sur l'efficacité des mécanismes de gestion des risques, et partager les bonnes pratiques grâce à une évaluation comparative (Cabinet Office & Civil Service, 2017).

Encadré ‎1.6. Gestion du risque dans le gouvernement du Royaume-Uni

Le Cadre du Royaume-Uni pour la gestion des risques au sein du gouvernement permet aux employés du secteur public d'identifier et d'atténuer les risques possibles, y compris les infractions de corruption et d'intégrité. Le cadre décrit quatre types de risques : Risques internes (fraude, santé et sécurité, capacité et aptitude), externes, stratégiques et pour les projets majeurs. Le cadre identifie trois éléments qui sont essentiels à la gestion des risques une fois qu'ils ont été identifiés. Tout d'abord, des blocs de construction essentiels doivent être en place, ce sont les fondations d'un système efficace de gestion des risques. Ceux-ci incluent de créer une culture positive de gestion des risques, établir clairement les rôles et les responsabilités, communiquer des informations sur les risques et renforcer la capacité de gestion des risques grâce à la formation. Deuxièmement, les processus de routine doivent atténuer les risques. Par exemple, l'identification et l'évaluation efficaces des risques permettent à l'organisation d'aborder et d'examiner ce type de problèmes. L'environnement doit également être propice au signalement des risques. Enfin, les activités périodiques doivent veiller à la gestion efficace des risques dans le secteur public. Il s’agit notamment des examens par les pairs, de l'analyse de données, de l’élaboration et du test des cadres de résilience. Le cadre définit également le rôle de différents acteurs au sein des entités du secteur public concernant le risque, comme les ministres, les gestionnaires et les comités d'audit et d'assurance des risques.

Source : Cabinet Office & Civil Service, United Kingdom (2017).

Au Maroc, l'Inspection Générale des Ministères (IGM) est l’un des mécanismes de surveillance et de contrôle du gouvernement, qui relève du ministre concerné. Son mandat est de faire un rapport sur le fonctionnement des services, effectuer des missions d'audit, entreprendre des évaluations des performances et des enquêtes dans le but d'améliorer la qualité des services publics. L'IGM a la responsabilité verticale des audits au sein des ministères. Son mandat est le suivant :

  • Contrôler la mise en œuvre de la gestion administrative et financière afin de préserver l'intérêt public, lutter contre l'abus de pouvoir et le gaspillage des fonds publics ;

  • Promouvoir une culture de transparence, d'éthique, d'équité, d'efficacité et de citoyenneté dans l'administration publique, ainsi que des valeurs morales ;

  • Coopérer avec d'autres organes de lutte contre la corruption et d'audit, comme l'ICPC et la Cour des comptes.

Dans la pratique, peu d’audits et d’évaluations sont réalisés, et le suivi des recommandations n’est pas systématique.

L'Inspection Générale des Finances (IGF) a été créée par la loi en 1960 et dépend du ministère de l'Économie et des Finances (MEF) ; elle assure la fonction d'audit et de contrôle internes dans le secteur public marocain. L'IGF a le pouvoir de procéder au contrôle des services de trésorerie et de comptabilité, de la trésorerie et des actifs, des experts-comptables, et des cadres de l’État en général, des conseils locaux, des entreprises publiques et d'autres organismes de l'État. Cet organe supervise également la gestion des comptes publics et évalue la façon dont sont gérées les opérations. La planification des audits par l'IGF dépend de l'importance des activités à auditer, des conclusions des précédents audits, des demandes particulières du ministère des Finances ou du gouvernement, ou des questions soulevées dans le débat parlementaire ou dans les médias.

Afin de renforcer sa capacité technique, l'IGF a conclu des alliances stratégiques avec la Banque mondiale et d'autres pays. Elle a mis au point un plan stratégique sur cinq ans qui comprend un programme de formation complet, et une spécialisation technique connexe dans les fonctions d'audit, d'inspection, d'évaluation et de recherche. En 2013, l'IGF a signé un mémorandum de coopération avec l'ICPC afin de renforcer les mécanismes de coordination entre les organismes chargés de la prévention de la corruption. Son objectif principal est de promouvoir les principes de bonne gouvernance économique et financière dans le secteur public, ainsi que des mécanismes de prévention des différentes formes de corruption.

La fonction d'audit externe au Maroc relève de la Cour des comptes. Créée en 1979, la Cour a été incorporée dans la Constitution en 1996, et son indépendance est officiellement reconnue par la Constitution. Son mandat couvre à la fois la vérification des états financiers et des performances. La Cour est tenue de produire des rapports annuels qu’elle soumet au Parlement, ces rapports sont également mis à la disposition du public sur le site de la Cour des comptes. La Cour dispose d'une grande autonomie financière et ses juges sont nommés par décret royal. Neuf tribunaux régionaux ont été établis en 2004 pour améliorer l'audit des collectivités et des entreprises publiques locales.

Les dernières conclusions de la Cour qui ont été présentées en juillet 2017 par le premier président de la Cour des comptes, M. Jettou, révèlent de graves problèmes dans plusieurs institutions publiques, services et ministères du gouvernement. En particulier, M. Jettou a mentionné la mauvaise gestion et l’abus apparent des comptes spéciaux du Trésor. De telles questions soulignent la nécessité pour le gouvernement de mettre en œuvre les recommandations formulées par la Cour.

Au niveau départemental, les fonctionnaires du ministère de la fonction publique et de la réforme administrative précisent qu'ils sont en train d'élaborer des procédures de cartographie des risques spécialement adaptées aux différentes entités gouvernementales. En particulier, le renforcement de l'intégrité dans les processus de recrutement est une priorité. La gestion des ressources humaines (GRH) dans le secteur public devrait reposer sur trois principes : le recrutement et la promotion basés sur le mérite, la durée de l'emploi pour protéger l'indépendance des fonctionnaires contre toute influence politique indue et un cadre normalisé de rémunération et de conditions (U4, 2015). Au Maroc, le ministère a proposé un roulement des fonctionnaires tous les quatre ans qui permettrait de s’assurer que ces derniers restent impartiaux, toutefois le processus n’a pas encore été mis en place. Conjointement à cette démarche, un concours sera introduit pour garantir la sélection des candidats sur la base du mérite.

Recommandation de réforme

Tandis que le Maroc prend actuellement des mesures pour améliorer la capacité technique de l'IGF à mener des vérifications internes, le pays devrait chercher à intégrer les valeurs d'intégrité et d’éthique dans son système de contrôle interne. Cela peut être fait conjointement au développement d'un code de conduite pour les agents publics et les fonctionnaires.

Les procédures de cartographie des risques qui sont en cours d'élaboration par le ministère de la Fonction publique et de la réforme administrative doivent être conformes aux normes et aux bonnes pratiques internationales.

Le Maroc pourrait envisager d'intégrer des mesures d’intégrité dans les processus RH. Par exemple, l'introduction de tests d'intégrité, de la vérification des antécédents et d’évaluations régulières du rendement permettrait de maintenir des normes élevées en matière d'intégrité dans la fonction publique.

Plan d'action et soutien potentiel de l'OCDE

Recommandations

  • Le Maroc pourrait envisager d'élaborer des indicateurs internes dans la SNLCC pour évaluer les mesures d'intégrité dans le secteur public. Cela peut impliquer l’introduction d'indicateurs et de mesures politiques en matière d'éthique au niveau institutionnel.

  • Le Maroc pourrait envisager d'adopter une approche plus cohérente et constante pour renforcer ses activités de sensibilisation. Cela peut inclure d’évaluer les efforts de sensibilisation de l’ICPC pour déterminer quels programmes ont porté leurs fruits, et d'utiliser ces évaluations pour développer des initiatives plus régulières.

  • Le Maroc pourrait envisager de mettre en œuvre le nouveau mandat pour l’INPLCC et sa loi pour qu’elle puisse assumer ses nouvelles fonctions, et surtout son mandat d’enquête sur les infractions de corruption et les violations de l'intégrité. La nouvelle Instance devrait développer un plan stratégique pour cibler ses activités.

  • Le Maroc devrait veiller à ce que le projet de code de conduite pour les agents publics contienne des dispositions détaillées pour les employés en stipulant clairement quelles valeurs de service public sous-tendent leurs fonctions et leurs activités quotidiennes. Le code devrait également fournir des conseils et des orientations sur les mesures à prendre face à une situation discutable sur le plan éthique.

  • Le Maroc pourrait envisager d'élaborer des programmes de formation sur l'intégrité pour les organismes du secteur public, abordant les risques et les questions éthiques spécifiques au secteur. Cela pourrait se faire en conjonction avec le code de conduite qui est en train d’être rédigé à l’attention des fonctionnaires ou comme démarche à part entière.

  • Le Maroc pourrait envisager d'élaborer un mécanisme de coordination pour assurer la cohérence entre les codes de conduite spécifiques qui sont en cours d'élaboration pour chaque secteur.

  • Le Maroc devrait veiller à ce que les modifications des dispositions légales actuelles concernant les conflits d'intérêts incluent des définitions claires et précises de ce qui constitue des intérêts personnels et non financiers.

  • Le Maroc pourrait envisager de fournir une formation régulière aux fonctionnaires sur les conflits d'intérêts et les mesures à adopter dans une telle situation. Ces activités de formation permettront la détection et la gestion précoces des conflits d'intérêts.

  • Le Maroc devrait envisager de préciser dans la législation concernée quelles dispositions peuvent être appliquées à un emploi avant et après un passage dans le secteur public afin de réduire les risques en matière d'intégrité dans le secteur public.

  • Le Maroc pourrait envisager de rationaliser son système de déclaration de patrimoine afin d’en améliorer l’efficacité. Ceci est possible en traitant les déclarations selon des catégories spécifiques, ou en utilisant différentes méthodes d'échantillonnage. La vérification des soumissions, la vérification formelle et les audits financiers devraient être opérationnels et stipulés dans le cadre juridique.

  • Le Maroc devrait envisager d'étendre les déclarations obligatoires à aux intérêts privés et non financiers.

  • Le Maroc devrait envisager de modifier la législation afin de permettre le contrôle public des déclarations de patrimoine. Cela permettrait de renforcer les mécanismes de responsabilisation et de promouvoir la confiance dans les institutions publiques.

  • Le Maroc pourrait envisager de pénaliser toute infraction relative aux déclarations de patrimoine.

  • Tandis que le Maroc prend actuellement des mesures pour améliorer la capacité technique de l'IGF à mener des vérifications internes, le pays devrait chercher à intégrer les valeurs d'intégrité et d’éthique dans son système de contrôle interne. Cela peut être fait conjointement au développement d'un code de conduite pour les agents publics et les fonctionnaires.

  • Les procédures de cartographie des risques qui sont en cours d'élaboration par le ministère de la Fonction publique et de la réforme administrative doivent être conformes aux normes et aux bonnes pratiques internationales.

  • Le Maroc pourrait envisager d'intégrer des mesures d’intégrité dans les processus RH. Par exemple, l'introduction de tests d'intégrité, de la vérification des antécédents et d’évaluations régulières du rendement permettrait de maintenir des normes élevées en matière d'intégrité dans la fonction publique.

Plan d'action

Domaines de réforme

Soutien potentiel de l’OCDE

- Améliorer les normes d'intégrité dans le secteur public en établissant des codes de conduite pour les agents publics et des codes spécialisés pour les postes à risque

- Élaborer des indicateurs internes sur l'éthique dans le secteur public

- Aligner la législation sur les conflits d’intérêts avec les bonnes pratiques à l’échelle internationale

- Améliorer le système actuel de déclaration de patrimoine

- Développer des procédures de cartographie des risques

- Examen de l'intégrité

- Examen sectoriel des domaines à haut risque

- Ateliers d'intégrité pour chacun des domaines de réforme identifiés

Pour en savoir plus

CIPFA & IFAC (2014), International Framework: Good Governance in the Public Sector, https://www.ifac.org/publications-resources/international-framework-good-governance-public-sector

OCDE (2014), CleanGovBiz Toolkit, OECD, Paris, https://www.oecd.org/cleangovbiz/toolkit/

OCDE (2013), Ethics Training for Public Officials, https://www.oecd.org/corruption/acn/resources/EthicsTrainingforPublicOfficialsBrochureEN.pdf

OCDE (2011), Asset Declarations for Public Officials: A Tool to Prevent Corruption, Fighting Corruption in Eastern Europe and Central Asia, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264095281-en.

OCDE (2005), Gérer les conflits d'intérêts dans le secteur public : Mode d'emploi, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264018259-fr.

The World Bank (2012), Public Office, Private Interests: Accountability through Income and Asset Disclosure, Stolen Asset Recovery Initiative (StAR), Washington DC, https://star.worldbank.org/star/publication/public-office-private-interests

Références

Cabinet Office & Civil Service (2017) Management of Risk in Government: Framework, United Kingdom, https://www.gov.uk/government/publications/management-of-risk-in-government-framework.

CIPFA & IFAC (2014), International Framework: Good Governance in the Public Sector, https://www.ifac.org/publications-resources/international-framework-good-governance-public-sector.

Gilman, S. (2005) “Ethics Codes and Codes of Conduct as Tools for Promoting an Ethical and Professional Public Service: Comparative Successes and Lessons”, Paper prepared for the PREM, The World Bank, Washington DC.

National Audit Office (2015), Conflicts of Interest, Session 2014-15, 27 janvier 2015, Royaume-Uni, https://www.nao.org.uk/wp-content/uploads/2015/01/Conflicts-of-interest.pdf.

OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur l'intégrité publique. http://www.oecd.org/gov/ethics/Recommandation-integrite-publique.pdf

OCDE (2016), Renforcer l’intégrité du secteur public au Maroc, Examens de l'OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264253612-fr.

OCDE (2015), Panorama des administrations publiques 2015, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/gov_glance-2015-fr.

OCDE (2014), Lobbyists, Governments and Public Trust: Volume 3, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264214224-en.

OCDE (2011), Asset Declarations for Public Officials: A Tool to Prevent Corruption, Fighting Corruption in Eastern Europe and Central Asia, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264095281-en.

OCDE (2005), Gérer les conflits d'intérêts dans le secteur public : Mode d'emploi, Éditions OCDE, Paris. https://doi.org/10.1787/9789264018259-fr.

The World Bank (2012), Public Office, Private Interests: Accountability through Income and Asset Disclosure, Stolen Asset Recovery Initiative (StAR), Washington DC, https://star.worldbank.org/star/publication/public-office-private-interests.

Transparency International (2015), Asset Declarations in Morocco: Illicit Enrichment and Conflicts of Interest of Public Officials, Berlin, https://www.transparency.org/whatwedo/publication/asset_declarations_in_morocco_illicit_enrichment_and_conflicts_on_interest.

Transparency Maroc (2015), Les conflits d’intérêts, Rabat, http://transparencymaroc.ma/TM/fr/page/conflits-d%E2%80%99int%C3%A9r%C3%AAt.

U4 Anti-Corruption Resource Centre (2015), Corruption and anti-corruption practices in human resource management in the public sector, U4 Expert Answer 2015:2, www.u4.no/publications/corruption-and-anti-corruption-practices-in-human-resource-management-in-the-public-sector/.

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