Résumé

Les citoyens du Maroc veulent une société plus inclusive, résistante à la corruption et ancrée dans l'intégrité. Les manifestations du printemps arabe en 2011 ont été provoquées entre autres par l'aggravation des conditions sociales et les préoccupations liées à la corruption.

Depuis, le gouvernement du Maroc a adopté une approche globale pour favoriser l'intégrité. La Stratégie nationale de lutte contre la corruption comprend des dispositions visant à accroître la transparence dans le secteur public et à améliorer l'intégrité des entreprises. Néanmoins, des lacunes subsistent dans le système d'intégrité du Maroc. En 2015, un nouvel organe, l’Instance Nationale de Probité, de Prévention et de Lutte contre la Corruption (INPPLC), a été créé pour remplacer l'organe précédent, l’Instance Centrale de Prévention de la Corruption (ICPC). Cependant, l'INPPLC n'est toujours pas opérationnel, et l’ICPC n’est pas en mesure d’accomplir efficacement ses tâches.

En ce qui concerne les conflits d'intérêts, des dispositions légales et constitutionnelles existent pour les agents publics, mais concernent uniquement les gains économiques. Actuellement, le système de divulgation des actifs n'exige pas des agents publics qu’ils déclarent des intérêts privés et non financiers. En élargissant la portée de ce qui doit être déclaré et en définissant clairement les activités et les intérêts susceptibles de présenter un conflit d'intérêts, le Maroc pourrait faciliter la détection précoce des activités illicites et prévenir d'éventuelles situations de conflit d'intérêts.

Le statut général de la fonction publique contient certaines dispositions relatives à l'intégrité, mais ne fait aucune référence spécifique aux normes éthiques ou aux valeurs du service public. Le Maroc pourrait établir un code de conduite pour les agents publics afin de communiquer ses attentes et promouvoir des normes élevées d'intégrité. De plus, un programme de formation cohérent à l'échelle du gouvernement sur les questions liées à l'intégrité et les situations de conflit d'intérêts pourrait être introduit parallèlement à un code de conduite.

Au cours de la dernière décennie, le Maroc a déployé des efforts soutenus pour développer une bonne gouvernance fiscale, notamment en adoptant une nouvelle loi budgétaire. Il pourrait élargir la portée des contrôles sur les opérations financières. Les efforts d'information financière pourraient se concentrer sur la rationalisation des procédures de clôture des comptes, et demander formellement des commentaires des principales parties prenantes sur la valeur des rapports budgétaires.

Au Maroc, les marchés publics sont réglementés par plus de 40 décrets, lois et arrêtés, mais aucun organisme spécifique ne supervise le système. En unifiant le cadre juridique et en clarifiant les arrangements institutionnels, le Maroc pourrait améliorer l'efficacité et l'intégrité de son système de passation des marchés publics. En outre, il pourrait officiellement reconnaître les marchés publics en tant que profession spécialisée et élaborer une stratégie globale de renforcement des capacités pour les responsables des achats.

La corruption d'agents publics pour obtenir des avantages excessifs compromet la bonne gestion des entreprises publiques et privées et fausse la concurrence. Une réforme législative conforme aux normes internationales pourrait revoir la définition d'un agent public, augmenter les sanctions financières pour corruption d'agents publics, et permettre une confiscation adéquate. En s'inspirant de la Convention de l'OCDE sur la corruption d'agents publics étrangers, le Maroc pourrait reconnaître le délit de corruption et renforcer son arsenal juridique.

Au Maroc, les autorités fiscales devraient pouvoir aider les autres agences gouvernementales à lutter contre les crimes financiers en refusant les pots-de-vin comme déduction fiscale, en exigeant le signalement de corruption présumée et en permettant le partage d'informations entre les autorités fiscales et autres. Le Maroc pourrait également envisager une formation ciblée pour les fonctionnaires du fisc.

Le Maroc a récemment adopté une législation sur la concurrence qui est globalement conforme aux pratiques internationales, ce qui inclut l'augmentation des pouvoirs d'enquête et de sanction du Conseil de la concurrence. Cependant, la loi n'a été appliquée qu’en partie. Le gouvernement devrait veiller à ce que la législation soit mise en œuvre pour atténuer les risques de corruption et prévenir les comportements anticoncurrentiels.

Le gouvernement devrait identifier les acteurs, y compris toutes les organisations d'employeurs, pour engager un dialogue institutionnalisé afin d'améliorer la compréhension des effets néfastes de la corruption et promouvoir l'adoption de mesures préventives dans les entreprises. Les membres des associations professionnelles devraient être encouragés à adopter des mécanismes de prévention, y compris des mécanismes d'action collective et d'évaluation de la conformité, le cas échéant. En outre, le Maroc pourrait mieux communiquer avec le public sur les objectifs et la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la corruption.

Un nombre croissant de pays de l'OCDE ont adopté des règlements pour empêcher que des intérêts particuliers ne nuisent à l'intérêt public. Le Maroc pourrait introduire une législation pour réglementer les activités de lobbying afin d'éviter un accès inégal au processus décisionnel.

Au Maroc, les lanceurs d’alerte des secteurs public et privé bénéficient d'une certaine protection, mais les dispositions existantes concernent davantage la protection des témoins, ne différencient pas les employés des secteurs public et privé et ne décrivent pas clairement les formes de représailles. Conformément aux bonnes pratiques de l'OCDE, une loi spécifique sur la protection des lanceurs d’alerte peut encourager davantage de salariés à se manifester lorsqu'ils soupçonnent ou ont connaissance d'une faute professionnelle.

La Constitution de 2011 du Maroc contient des dispositions sur l'engagement des citoyens et la participation de la société civile à l'élaboration des politiques. La société civile et le secteur privé ont participé à l'élaboration de la Stratégie nationale de lutte contre la corruption et au comité chargé de superviser sa mise en œuvre. Pour renforcer la confiance, le gouvernement pourrait rendre compte plus efficacement aux citoyens des résultats de leur engagement, tandis que la société civile pourrait renforcer sa propre transparence.

Les médias peuvent accroître la sensibilisation à l'intégrité et à la corruption et aider à demander des comptes au gouvernement. La mise en œuvre du droit à l'accès à l'information et à la protection des sources permettrait aux médias marocains de mieux jouer ce rôle. Le renforcement de l'indépendance et de la transparence des médias contribuerait à créer un climat plus propice aux médias d'investigation.

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