Chapitre 5. Le rôle des stratégies sectorielles dans la cohérence des politiques publiques au Maroc

Ce chapitre s’intéresse à la cohérence des politiques publiques, et en particulier au rôle des stratégies sectorielles. Il part d’un cadre d’analyse pour appréhender la cohérence des politiques publiques et tirer des leçons des stratégies de compétitivité, d’éducation et d’emploi en analysant les complémentarités entre elles, ainsi que les mécanismes de coordination des politiques dans ces domaines transverses. La cohérence des stratégies sectorielles est à rechercher à chaque étape de leur cycle de vie – élaboration, mise en œuvre et évaluation. Ce chapitre formule des recommandations pour appuyer la cohérence à chacun de ces stades. Il est capital d’aligner les objectifs des stratégies sectorielles avec la vision de développement du pays, d’avancer dans la mise en place de mécanismes de coordination efficaces pour leur mise en œuvre et de renforcer le suivi et l’évaluation des politiques publiques, en particulier des stratégies sectorielles. En outre, le chapitre analyse en détail la contribution du processus budgétaire et des réformes en cours à la cohérence entre les stratégies.

    

Le succès des réformes publiques dépend de la combinaison de plusieurs facteurs. Plusieurs travaux de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) se sont intéressés aux instruments nécessaires pour concrétiser et réussir les réformes publiques (OCDE, 2010). La réussite des réformes publiques peut être favorisée, par exemple, par la présence d’institutions qui permettent d’aller de la décision à la mise en œuvre ; des finances publiques saines ; une communication efficace ; une véritable volonté politique ; ainsi que des analyses et recherches solides (OCDE, 2010). Pour atteindre pleinement leurs objectifs, ces différents éléments doivent s’accompagner nécessairement d’une cohérence des politiques. Cela signifie que les mesures prises dans différents domaines ne doivent pas être contradictoires. Des complémentarités entre les réformes peuvent être identifiées, avec pour objectif une mise en œuvre coordonnée de multiples réformes qui se consolident mutuellement, amplifiant ainsi les effets positifs de chacune d’elles prise isolément.

Au Maroc, les défaillances dans la cohérence des politiques publiques affectent directement l’efficacité de l’action publique et les performances économiques et sociales. Le premier volume de l’examen multidimensionnel a constaté que la mise en cohérence des différentes politiques publiques permettrait de lever une contrainte majeure au développement du pays (OCDE, 2017a). En effet, l’action publique peut apparaître en cohérence insuffisante avec les objectifs de transformation structurelle. Par exemple, le secteur de l’immobilier bénéficie en premier lieu des dépenses fiscales et accapare une grande partie des investissements privés, alors que ce secteur n’est ni le plus porteur, ni le plus productif. Pour être efficace, cet effort de mise en cohérence doit porter sur l’ensemble des politiques publiques y compris celles régissant le cadre macroéconomique (politique fiscale, monétaire, de taux de change) et social (OCDE, 2017a).

La cohérence des politiques publiques est au cœur des préoccupations nationales au Maroc. Le Roi l’a réaffirmé à l’occasion de la fête du Trône en 2012, et les assises nationales de la gouvernance ont été organisées en 2013. L’efficience des politiques publiques, la durabilité des stratégies sectorielles et la cohérence de l’action publique ont été inscrites dans le programme du gouvernement précédent (2012-16). Le renforcement de la convergence et de l’efficience des politiques publiques, et la réforme des finances publiques, sont également des objectifs de l’actuel programme gouvernemental (Royaume du Maroc, 2017). Le programme d’appui à l’harmonisation et l’évaluation des politiques publiques a été lancé. Le ministère des Affaires générales et de la Gouvernance (MAGG) a réalisé un état des lieux de la convergence des politiques publiques et des pistes d’action, pris en compte dans ce rapport (MAGG, 2015a et 2015b).

Les stratégies sectorielles occupent une place importante dans l’articulation de l’action publique au Maroc. En effet, les stratégies sectorielles ont pour objectif de structurer l’action publique dans la durée en proposant une vision du futur et des actions à entreprendre pour réaliser cette vision. Bien que portées par un département ministériel, ces stratégies dépassent souvent son champ d’action. Les différentes stratégies ont d’ailleurs des objectifs qui se recoupent largement, que ce soit en termes d’effets sur la balance commerciale, de création de valeur ou de création d’emploi. Certaines stratégies sectorielles correspondent aux grandes orientations royales, comme le Plan d’accélération industrielle (PAI), le Plan logistique ou le Plan Maroc vert (PMV), et sont déclinées dans l’action gouvernementale. D’autres traduisent des visions sectorielles en plans d’actions avec pour but d’articuler l’action publique sur un horizon de moyen à long terme. Par exemple, dans le secteur éducatif, la Vision stratégique de la réforme 2015-30 propose les grandes orientations pour réformer le système, dont la mise en œuvre est tributaire des ministères concernés.

Compte tenu de leur importance, ce chapitre, dédié à l’examen de la cohérence des politiques publiques, met l’accent sur les stratégies sectorielles et les grands programmes au Maroc. Les stratégies sectorielles de première importance dans les domaines étudiés dans le reste du volume – la consolidation d’une offre industrielle compétitive (Chapter 2) et le système éducatif et l’adéquation formations-emplois au Maroc (Chapters 3 et 4) – font office d’études de cas. Ce chapitre aborde également certains programmes, tels que l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), composante majeure de la politique sociale marocaine.

Renforcer la cohérence entre les stratégies sectorielles à chaque étape de leur cycle de vie - élaboration, mise en œuvre et évaluation - permettrait d’améliorer l’efficacité globale des politiques publiques au Maroc. Le Maroc devrait s’assurer que sa vision du développement soit déclinée en objectifs prioritaires clairs et partagés dans la conception des différentes stratégies sectorielles. Le pays ambitionne de rejoindre le rang des pays émergents, mais les grandes orientations stratégiques gagneraient à être traduites de façon détaillée en termes d’objectifs et de priorités. De plus, les mécanismes institutionnels de coordination de la mise en œuvre des stratégies sectorielles devraient être renforcés. À l’heure actuelle, il existe plusieurs mécanismes de mise en coordination au Maroc, dont les résultats sont variables et dans lesquels l’implication des parties prenantes n’est pas systématique. Par ailleurs, développer une culture d’évaluation, et les outils associés à sa mise en œuvre, est essentiel pour soutenir un meilleur suivi et une évaluation régulière des stratégies sectorielles. Tout au long du cycle de vie de la politique publique, les réformes en cours dans le processus budgétaire représentent un instrument important pour assurer une meilleure coordination des stratégies sectorielles et, plus globalement, des politiques publiques.

Ce chapitre propose ainsi une analyse approfondie des principales stratégies sectorielles à partir du cadre d’analyse des politiques publiques de l’OCDE (2012). La définition et les objectifs des stratégies sectorielles sont analysés, dans un premier temps, au regard de leur articulation avec la vision de développement du pays. La mise en œuvre, et le suivi-évaluation des stratégies sectorielles sont ensuite étudiés à tour de rôle. Enfin, le chapitre s’attarde sur la gouvernance budgétaire comme un instrument important de mise en cohérence de l’action de l’État. Des recommandations sont proposées à chaque étape du cycle d’analyse.

Pour améliorer la cohérence des stratégies sectorielles et accompagner le changement de cap du modèle de développement, plusieurs recommandations sont avancées pour chaque étape du cycle d’analyse. Il s’agit : i) d’assurer que la vision du développement du Maroc soit déclinée en objectifs prioritaires clairs et partagés ; ii) d’améliorer la planification et l’élaboration des stratégies sectorielles ; iii) de renforcer la coordination des politiques publiques ; iv) d’informer la prise de décision par un système intégré de suivi de la réalisation des stratégies ; v) de développer une culture de l’évaluation au sein de l’administration ; et vi) d’améliorer la gouvernance budgétaire en adoptant une vision consolidée des comptes publics s’inscrivant dans une perspective budgétaire interministérielle et pluriannuelle pour assurer une meilleure coordination et une soutenabilité des politiques publiques à court et moyen terme.

Un cadre d’analyse pour la cohérence des stratégies au Maroc en trois étapes

Qu’est-ce que la mise en cohérence des politiques publiques ? Ce chapitre se fonde sur la définition de la cohérence des politiques publiques utilisée dans les travaux de l’OCDE (2009, 2012, 2015a et 2017b). Les objectifs de développement d’un pays sont multiples. La mise en cohérence des politiques publiques pour le développement suppose la prise en compte du développement durable dans l’ensemble de ses dimensions (économiques, sociales, environnementales et de gouvernance) à chaque stade de la conception et de la mise en œuvre des politiques (OCDE, 2015a). Cet effort doit accroître la capacité des gouvernements à identifier et tirer parti des synergies, et à envisager les arbitrages éventuels entre objectifs. Ce concept visait à l’origine à analyser la cohérence des politiques d’aide des pays développés vis-à-vis d’autres politiques, fiscales ou commerciales par exemple, pour des pays récipiendaires de l’aide (OCDE, 2012). Cependant, sa définition reste pertinente pour l’analyse de la cohérence des politiques publiques à l’échelle d’un pays. La cohérence des politiques publiques englobe le renforcement mutuel qui peut s’opérer entre les politiques dans l’atteinte d’objectifs de développement, et ne se résume pas à la minimisation des impacts négatifs de politiques envers d’autres politiques (OCDE, 2012).

La mise en cohérence des stratégies est analysée du point de vue de leurs objectifs, de la cohérence interne de chaque stratégie, ainsi que des mécanismes de coordination dans la mise en œuvre. Les stratégies sectorielles sont au service d’objectifs de développement spécifiques, souvent transversaux, clairement définis et partagés par tous. Dans cette perspective, la cohérence correspond à l’effort commun d’atteinte de ces objectifs. Elle doit permettre de minimiser les contradictions entre stratégies et de renforcer les synergies. Autrement dit, un besoin de mise en cohérence est identifié si une première stratégie minimise l’action d’une autre dans l’atteinte d’un objectif commun, voire d’un objectif spécifique de la deuxième. Les stades d’élaboration, de mise en œuvre, d’évaluation et de réajustement des stratégies doivent aussi être cohérents : il s’agit de la cohérence interne de chaque stratégie au cours de son cycle de vie, et de la cohérence entre stratégies à travers l’alignement de leurs objectifs, mesures et mise en œuvre. La cohérence des indicateurs de suivi constitue aussi un angle d’analyse pour définir s’ils sont complémentaires, ou si leurs performances peuvent être imputables à une ou plusieurs stratégies. Enfin, la cohérence peut également être analysée au travers de la structuration de l’action publique et les différents niveaux de gouvernance (central, régional, local). L’approche retenue dans cet examen multidimensionnel prend en compte l’absence de document d’évaluation à mi-parcours ou final, et d’informations suffisantes sur les liens entre actions au niveau central et régional, ce qui a conduit à écarter ces deux perspectives de l’analyse de la cohérence des stratégies.

Le cadre d’analyse est conceptualisé autour de trois grandes étapes (Figure 5.1). L’étape 1 vise à la définition et la priorisation, si nécessaire, d’objectifs de développement. L’étape 2 vise à réduire les incohérences pouvant survenir lors de la mise en œuvre et à maximiser les synergies grâce à des mécanismes de coordination efficaces. Ces mécanismes, formels ou informels, existent au niveau de l’administration centrale (Centre de gouvernement, coordination interministérielle), des ministères (comités, groupes de travail) et infranational. L’étape 3 correspond au suivi et à l’analyse des impacts et résultats des politiques publiques, basé sur la collecte précise et systématique de données, et permettant de mener une politique de reddition de comptes auprès du pouvoir législatif et des populations.

Graphique 5.1. Les trois étapes du cycle de mise en cohérence des politiques publiques permettent d’identifier les forces et faiblesses d’un pays
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Source : OCDE (2012), « Policy coherence for development, Policy framework for policy coherence for development », http://www.oecd.org/pcd/50461952.pdf.

Des définitions précises et une priorisation des objectifs de développement liés à sa vision de futur permettraient au Maroc d’avancer dans l’harmonisation de ses stratégies

La vision du développement du Maroc ne se décline pas aujourd’hui en objectifs prioritaires clairs et partagés

Le Maroc affiche une volonté d’accélérer son développement mais sa vision de futur n’est pas établie dans un document consolidé. Le pays cherche à atteindre le niveau de développement des pays émergents. Cet engagement politique fort est inscrit au plus haut niveau de l’État, comme en témoigne le discours du Roi à l’occasion du 61e anniversaire de la révolution du Roi et du peuple du 20 août 2014 : « Gagner le pari de rattraper les pays émergents n’est pas impossible, quand bien même cette entreprise recèle de nombreuses difficultés et de multiples défis ».

Les grandes orientations stratégiques du Maroc fixées par le Roi se traduisent en stratégies sectorielles. Leur traduction en termes d’objectifs et priorités clairement définies et partagées permettrait de renforcer la cohérence des politiques. Les discours du Roi abordent des thèmes de façon récurrente, comme la jeunesse, l’environnement, la justice, la gouvernance, les inégalités de richesses ou encore la régionalisation, et s’inscrivent dans l’actualité nationale et internationale (flux migratoire, question sécuritaire, etc.). Ils orientent l’action publique sur des priorités données, comme le développement des infrastructures, de l’énergie, du monde agricole, ou encore de l’éducation. Les stratégies sectorielles sont souvent une déclinaison d’orientations stratégiques données par le Roi dans ses différents discours. Cette déclinaison gagnerait à être précédée par une traduction des orientations générales en termes d’objectifs et priorités, clairement définis et partagés au niveau national. Ceci faciliterait la priorisation des actions et les arbitrages entre politiques, notamment au travers de la prévision et de l’exécution budgétaire (voir la section dédiée à la gouvernance budgétaire). Certains pays ont des séries d’objectifs à atteindre qui constituent la grille d’évaluation des impacts de politiques publiques. Ainsi par exemple, la France dispose de dix indicateurs objectifs phares en lien avec le développement économique (taux d’emploi, dépenses en recherche et développement, dette publique et privée), social (années de vie passées en bonne santé, satisfaction à l’égard de la vie, inégalités de revenus, pauvreté, abandon scolaire) et environnemental (empreinte carbone, artificialisation des sols ; ministère des Finances et des Comptes publics, 2016).

L’expérience internationale montre que les Centres de gouvernement (CDG) peuvent appuyer la réflexion stratégique d’un pays sur sa vision. Il existe différents modèles de CDG au niveau international : i) un cercle réduit de haut niveau situé à proximité du Chef du gouvernement et lui étant directement rattaché ; ii) un système de réunions stratégiques impliquant plusieurs départements, intégrant souvent des idées développées au niveau du département par le biais de séminaires, de brainstormings intra-départemental, etc., et coordonné par le CDG ; et iii) une unité spécifique dédiée à l’analyse prospective (OCDE, 2015b). Ces unités spécifiques sont généralement assez petites, allant de plus de 40 employés en Australie à moins de 10 professionnels dans la plupart des autres pays de l’OCDE, y compris en Suède et au Canada. Dans certains cas, la réflexion stratégique est très proche du Chef du gouvernement et dirigée par une ou deux personnalités de haut niveau plutôt que par une équipe de la fonction publique. Dans la majorité des cas, lorsque la planification stratégique n’est pas une activité clairement distincte au sein du Centre, il existe un risque que la réflexion à long terme soit évincée par les questions de politique quotidiennes (OCDE, 2015b).

Au Maroc, les stratégies sectorielles sont des outils de planification stratégique, mais demeurent insuffisants du fait de leur mode d’élaboration en silo. Le manque de politique générale n’est pas entièrement compensé par des stratégies sectorielles concertées entre ministères (Union européenne, 2014). Par exemple, le Maroc multiplie les initiatives, les programmes et les acteurs impliqués dans la promotion des exportations, ce qui pose la question de leur complémentarité et leur synergie. Or le Maroc n’a pas de politique globale, ni de document unique de cohérence globale du commerce extérieur définissant les lignes directrices de la promotion des exportations et les priorités, et rassemblant les différentes actions menées (MAGG, 2015). L’absence d’échelon stratégique entraîne ainsi une faible lisibilité des différentes actions menées : certains programmes ne sont pas des stratégies sectorielles, tandis que les stratégies ne couvrent pas toutes les réformes entreprises par le Maroc. Cela peut rendre plus difficile l’harmonisation de l’action des partenaires techniques et financiers (Union européenne, 2014).

Un document d’orientation de politique générale à long terme pourrait déterminer et prioriser les objectifs à atteindre, et ainsi fédérer et arbitrer entre les différentes stratégies sectorielles et appuyer la planification stratégique. Les discours du Roi montrent l’importance d’une vision nationale claire, partagée par tous, et permettant d’établir les priorités nationales (Box 5.1). Le MAGG a identifié L’absence de document d’orientation générale servant de référentiel comme un des chaînons manquants au soutien d’une meilleure cohérence des politiques publiques au Maroc (MAGG, 2015). En effet, contrairement à d’autres pays, le Maroc ne dispose pas d’un document général de développement de long terme permettant d’inscrire et de coordonner les actions publiques en fixant les objectifs, moyens et séquences de politiques publiques (OCDE, 2017a). Les discours du Roi ou les programmes de gouvernement en sont proches, mais ne forment pas de cadre suffisamment concerté et participatif pour identifier les priorités nationales.

Encadré 5.1. Discours du Roi sur la vision, les priorités et l’engagement des acteurs

L’importance d’une vision nationale claire et partagée est au centre des discours du Roi. « Nous avons engrangé de nombreux acquis, en réalisant les projets prévus dans les secteurs où le gouvernement dispose d’une vision claire et précise. Tant et si bien que le Maroc est devenu un immense chantier foisonnant de projets structurants, tant au niveau local que régional et national » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2007). « C’est pourquoi Nous avons fait de la préservation de la dignité du citoyen la finalité de toutes les réformes politiques et sociales et de toutes les initiatives vouées au développement » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2015). Cette vision doit s’accompagner :

  • De priorités clairement établies. « La nécessité de veiller à ce que l’État, sous Notre conduite, assume le rôle stratégique qui lui revient dans la détermination des options fondamentales de la nation, la réalisation des grands chantiers structurants, l’impulsion, l’organisation et l’encouragement de l’initiative privée et de l’ouverture économique maîtrisée » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2010). « Le gouvernement est une structuration efficace et harmonieuse qui s’adapte au Programme et aux priorités » (Discours du Roi à l’occasion de l’anniversaire de la Marche Verte, 2016).

  • D’un engagement de toutes les parties prenantes (administration publique, secteur privé et société civile). « Mais, nous n’aurions pu parvenir à ce résultat sans la confiance des citoyens et des investisseurs, et sans la crédibilité dont le Maroc jouit auprès de ses partenaires étrangers grâce à son attachement aux règles de bonne gouvernance » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2007). « À cet égard, il faudrait susciter une forte adhésion en faveur de la mise en œuvre de la stratégie d’efficacité énergétique (…) » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2010). « Afin d’assurer le succès de la réforme dans sa portée stratégique, chacun doit se l’approprier et s’impliquer sérieusement dans sa mise en œuvre. En outre, Nous appelons à l’élaboration de cette réforme dans le cadre d’un contrat national contraignant, et ce, à travers l’adoption d’une loi-cadre cernant la vision à long terme et mettant fin à l’interminable cercle vicieux de la réforme de la réforme » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2015).

Sources : Royaume du Maroc (2015, 2010 et 2007), « Discours de SM le Roi à l’occasion de la fête du Trône », 2015, 2010, 2007 ; http://www.maroc.ma ; Royaume du Maroc (2016), « Discours de SM le Roi à l’occasion de l’anniversaire de la Marche Verte », http://www.maroc.ma.

Une meilleure élaboration des stratégies sectorielles est nécessaire

Deux études de cas ont été sélectionnées pour illustrer le besoin d’une meilleure élaboration des stratégies sectorielles : la compétitivité de l’économie marocaine d’une part, et le système éducatif et l’adéquation formations-emplois, d’autre part. Pour ces deux sujets, les objectifs sont transversaux, touchant un large spectre de secteurs et d’acteurs de l’économie marocaine, et rendant l’action de plusieurs ministères nécessaire. Plusieurs stratégies sectorielles sont donc analysées dans chacune des études de cas.

Étude de cas : le développement d’une offre exportable compétitive

L’équilibre commercial est un objectif impératif pour le Maroc afin d’assurer une stabilité macroéconomique dans le temps (voir Chapter 2). Pour atteindre cet objectif et assurer un développement pérenne du Maroc, la cohérence des stratégies est indispensable. Comme indiqué dans le discours du Roi : « Aussi faudrait-il œuvrer pour susciter une interaction féconde entre les différents plans, si l’on veut que le produit marocain gagne en qualité et en compétitivité, de manière à redynamiser les exportations et à préserver les équilibres financiers extérieurs. La situation exige également de faire fructifier, de façon optimale, les acquis que nous avons engrangés dans le domaine des échanges commerciaux » (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2009). Les stratégies sectorielles retenues dans l’étude de cas se rapportent toutes directement ou indirectement au développement d’une offre exportable compétitive (secteurs primaire et secondaire, énergie, logistique, commerce, technologies de l’information et de la communication [TIC], emploi et tourisme – voir la liste détaillée en Annex 5.A1).

Les ambitions et les visions des stratégies sont dans l’ensemble bien établies. Dans le cas de la stratégie industrielle, l’ambition est de créer les conditions pour diversifier et élargir le tissu industriel, ce qui permettra de garder le cap des métiers mondiaux tout en changeant la dimension industrielle. Le leadership du ministre, la vision du développement industriel et les objectifs à atteindre sont clairs (Table 5.1). Le plan Maroc Export + a pour vision d’assurer que les exportations constituent un levier de croissance à l’offre existante et un débouché pour les offres prévues par les plans sectoriels en cours. Le Plan logistique a pour ambition une mise à niveau pour parachever le processus de renforcement de la compétitivité de l’économie et moderniser l’offre. La stratégie des énergies renouvelables vise à ce que le Maroc devienne un champion dans le domaine des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Enfin, Maroc digital 2020, cherche à positionner le Maroc parmi les pays émergents dynamiques dans les TIC et à renforcer la digitalisation de l’administration marocaine. Toutefois, certaines stratégies n’affichent pas de vision, comme le Plan national de développement des échanges commerciaux, qui ne dispose que d’un objectif de réduction du déficit commercial, la Stratégie énergétique nationale ou le Plan Halieutis. Assurer que toutes les stratégies aient une vision serait bénéfique pour faciliter le pilotage de la réforme.

Tableau 5.1. Le Plan d’accélération industriel du Maroc : de la vision aux défis à relever

Vision et ambition

Garder le cap

Changer la dimension industrielle (diversifier et élargir le tissu industriel)

Objectifs

Emplois +500 000 dans l’industrie (dont 50 % issus des investissements directs étrangers [IDE])

PIB industriel = 23 % du PIB

Rééquilibrage des comptes extérieurs par la promotion de l’export et la substitution aux importations : priorité stratégique incontournable

Mesures

Écosystèmes et mesures sectorielles

Outils de soutien

Développement international et inclusif

Défis à relever pour rattraper les émergents

Emplois industriels : croissance x2 à x5 en 10 ans

PIB industriel : 23 %

Croissance des exportations : x5 en 10 ans

Croissance des IDE : x10 à x30 en 10 ans

Croissance de la productivité : x3.5

Les objectifs des stratégies sont clairs. Les objectifs sont alignés avec les visions, et souvent chiffrés. Quasiment toutes les stratégies convergent, de façon plus ou moins marquée, vers la réduction du déficit commercial, qui apparaît comme l’objectif transversal, et la création d’emplois. Le pan social des stratégies est souvent réduit, à l’exception des politiques de l’emploi et de l’éducation, les objectifs recherchés étant souvent de nature purement économique (création d’emploi, accroissement des exportations et de la valeur ajoutée, etc.). Seul Maroc Numeric faisait référence au bien-être des citoyens, et la Stratégie logistique aux aspects de nuisances sonores et de pollution liés au trafic routier.

Les stratégies manquent d’indications budgétaires, temporelles et liées à la gouvernance. Les stratégies ne donnent aucune indication de coûts et de budgétisation des actions, à l’exception de la Stratégie nationale d’efficacité énergétique et du PMV. Elles ne disposent pas non plus de calendrier clair à court, moyen et long terme, à l’exception de la Stratégie nationale d’efficacité énergétique et, dans une moindre mesure, du PAI (le document public ne faisant mention que de 2014 uniquement). Par ailleurs, pour de nombreuses stratégies, la période de mise en œuvre est révolue, sans que des suites claires aient été données. Enfin, les responsabilités des acteurs devant prendre part à la mise en œuvre de la stratégie ne sont souvent pas clairement définies (sauf pour le PAI). Budgétiser chaque stratégie faciliterait la priorisation au sein et entre les stratégies, permettrait de disposer d’horizons temporels précis (notamment pour communiquer auprès des acteurs non gouvernementaux, tels que le secteur privé et les bailleurs de fonds) et de définir au préalable les acteurs impliqués et leurs responsabilités dans la mise en œuvre des stratégies.

L’exemple de la politique industrielle marocaine, qui a connu un certain succès, montre l’importance de poursuivre les efforts en matière de conception et d’élaboration de politique. Le Maroc a réussi à développer de nouvelles filières d’activité (OCDE, 2017a) et les efforts de communication ont permis de développer rapidement le concept d’écosystème, aujourd’hui largement reconnu parmi les acteurs présents au Maroc. Toutefois, la politique industrielle affiche certaines faiblesses qui contribuent à réduire l’efficacité de son pilotage :

  • Les objectifs fixés sont très ambitieux. Alors que seulement 75 000 emplois industriels ont été créés sur 10 ans, le PAI ambitionne d’en créer 71 000 par an (MIICEN, 2014). La création d’emploi prévue s’élève à 500 000 sur la période 2014-20 dans le cadre du PAI, 173 000 emplois ont été contractualisés en 2014-16 (MIICEN, 2014). Si ces résultats sont positifs, il s’agira de pérenniser ces bonnes performances dans le temps. Par ailleurs, certains objectifs ne pourront être atteints par le PAI seul, comme l’objectif de rétablissement de l’équilibre commercial.

  • La définition des filières d’activités apparaît relativement floue. Le document de politique industrielle ne précise pas si tous les métiers mondiaux restent prioritaires dans l’orientation « garder le cap », et ne fournit pas d’éléments sur les nouvelles filières (« changer la dimension industrielle »). Cela peut nuire à la clarté du message auprès d’investisseurs, notamment étrangers. De plus, l’arbitrage entre les filières sera d’autant plus difficile à lire, voire à faire, que la vision et les objectifs de la stratégie sont relativement génériques par rapport à ces aspects de spécialisation de filières. Les contrats-programmes et la Charte d’investissement donnent davantage d’indications quant aux orientations et aux choix de spécialisation des filières (incitations fiscales pour certains secteurs, etc.). Ainsi le projet de nouveau dispositif législatif de la Charte d’investissement, de par son recours à une loi-cadre, un décret d’application transverse et des décrets sectoriels, vise à donner à l’investisseur une clarté et une lisibilité accrues sur l’arsenal des mesures d’appui prévues par l’État.

Le faible ancrage du PAI avec les autres stratégies sectorielles reflète plus largement le peu de liens d’interdépendance entre les stratégies. Au-delà de l’ancrage avec le Programme gouvernemental, les stratégies sectorielles n’affichent pas de cohérence d’ensemble. Les liens qui existent entre elles sont très peu nombreux (Figure 5.2). Ainsi, le PAI apparaît isolé des autres stratégies sectorielles (énergétique, logistique, commerciale, numérique, etc.). Alors que le PAI vise à faire des énergies renouvelables une nouvelle filière, et que la Stratégie énergétique a également pour objectif de créer une filière de l’efficacité énergétique structurée et professionnelle, aucun lien n’est fait entre ces deux stratégies. Plus largement, aucune référence n’est faite aux problématiques transversales de l’environnement ou de l’accès aux services pour les activités de production (notamment les TIC). À terme, cela peut nuire à la capacité des écosystèmes de mobiliser des acteurs autour de projets collectifs jugés trop partiels, pour lesquels la vision commune est faible. Les liens avec la stratégie logistique, notamment en matière de foncier, de parcs industriels locatifs et de zones industriels font défaut. Or ce manque de cohérence des politiques publiques a déjà des répercussions sur les activités industrielles : par exemple, les zones industrielles ne sont pas coordonnées avec des capacités logistiques comme les services de ramassage des ordures industrielles, le transport intérieur (accès aux routes, système de bus publics), ou les bassins d’emplois locaux.

Graphique 5.2. Les liens entre les stratégies sont insuffisants
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Note : Les textes des différentes stratégies présentées dans ce graphique ont été analysés pour établir la cohérence entre les différentes visions et objectifs, notamment en matière d’emploi, de balance commerciale et de compétitivité. Il apparaît ainsi que certains liens existent (ligne bleue), d’autres devraient exister compte tenu des objectifs fixés (ligne noire), tandis que certains sont absents malgré les besoins exprimés de liens avec d’autres stratégies (ligne grise).

Source : La liste des stratégies mentionnées dans ce graphique sont listées en Annex 5.A1.

Lorsque les liens existent entre les stratégies, ils sont unidirectionnels. La stratégie Halieutis, par exemple, exprime le besoin d’une meilleure structuration et dynamisme du marché intérieur autour de marchés de gros et de détail, et d’espaces portuaires dédiés à la pêche, mais ces éléments ne sont pas repris dans la stratégie logistique. Dans la filière du bâtiment, la stratégie énergétique vise à réduire la consommation de 20 % d’ici 2030, or cet objectif ne semble pas pris en considération dans la politique industrielle en tant que telle, sauf dans les écosystèmes de la chimie organique et des matériaux de construction.

Dans certains cas, les stratégies sont totalement déconnectées les unes des autres. Toutes les stratégies sectorielles ont des besoins importants en matière d’éducation et de formation professionnelle. Pourtant, aucune d’elles n’est alignée avec la politique de l’éducation, et toutes développent leurs propres initiatives en la matière. De même, alors que la très grande majorité des stratégies pointe un besoin logistique important, la stratégie logistique ne fait référence à aucune autre stratégie dans ses textes. Enfin, les stratégies mettent peu d’accent sur le secteur tertiaire (à l’exception du PMV) et la recherche et développement (R&D) est un sujet quasiment absent de toutes les stratégies.

La formalisation des déclinaisons territoriales des stratégies sectorielles varie. La plupart des grandes stratégies sectorielles incluent des déclinaisons régionales. Les seize plans agricoles régionaux ont été adoptés en concertation avec les partenaires locaux, les régions étant représentées par les walis et les présidents des chambres d’agriculture. Le Plan Halieutis prévoit la création de pôles de compétitivité sur certaines régions du Royaume. Maroc Numeric prévoit le désenclavement des territoires ruraux à travers l’e-gouvernement. À l’inverse, d’autres stratégies, telles que Maroc Export +, sont moins détaillées sur les stratégies ou les modalités de développement de l’ensemble des territoires.

Les défaillances dans l’élaboration des stratégies résultent en des décalages, voire des situations non réalistes. La stratégie Maroc Export + propose des mesures sectorielles pour les secteurs à fort potentiels (les métiers mondiaux) et des mesures transversales pour les entreprises, quels que soient leur secteur, leur taille, ou leur marché (exportateurs émergents, irréguliers ou confirmés). Si à première vue, cela peut sembler bénéfique pour le développement d’entreprises exportatrices, ce dispositif laisse également percevoir que les secteurs des métiers mondiaux bénéficieront d’aides de l’État provenant de deux stratégies différentes (PAI et Stratégie commerciale). Enfin, les stratégies industrielles, de l’agriculture et de la pêche visent toutes à faire de leur secteur le principal moteur de l’économie marocaine (OCDE, 2017a). Ainsi, il apparaît urgent que le Maroc élabore des stratégies sectorielles en lien avec celles déjà existantes pour mettre en commun les synergies et réduire les risques de doublon.

Étude de cas : l’amélioration de l’adéquation entre formation et besoins du marché du travail

L’amélioration de l’adéquation entre la formation et les besoins du marché du travail est une nécessité pour accroître la compétitivité du pays. Le stock de capital humain est actuellement trop faible pour soutenir une croissance économique forte : le niveau de scolarité moyen des travailleurs reste en deçà de la norme pour le niveau de développement du pays, et 32 % des Marocains sont considérés comme analphabètes. De plus, les compétences disponibles sont mal ou sous-utilisées sur le marché de l’emploi, comme en témoignent le taux de chômage élevé des jeunes diplômés du supérieur et le faible taux d’activité des femmes marocaines.

La Vision stratégique de la réforme 2015-30, la Stratégie nationale pour l’emploi (SNE) 2015-25 et la Stratégie nationale pour la formation professionnelle (SNFP) 2021 guident l’élaboration des politiques publiques dans ce domaine, sans que les liens entre les différentes stratégies ne soient toujours explicites. La réforme du système d’éducation et de formation marocain repose sur la Vision stratégique de la réforme 2015-30 élaborée par le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS). Ancré sur les grandes orientations de cette vision, le Département de la Formation professionnelle du ministère de l’Éducation nationale a élaboré la SNFP 2021. Cette dernière établit une liste de 103 mesures prioritaires pour la période 2015-21 autour de six axes stratégiques. Pilotée par le ministère de l’Emploi et des Affaires sociales (MEAS), la SNE 2015-25 ambitionne de promouvoir l’emploi productif et décent autour de quatre axes stratégiques (promouvoir la création d’emploi ; valoriser le capital humain ; améliorer l’efficacité des programmes actifs de l’emploi et renforcer l’intermédiation sur le marché de l’emploi ; développer le cadre de gouvernance du marché du travail). Les champs d’actions de l’emploi et de la formation professionnelle sont intimement liées, mais la SNE ne fait pas explicitement référence à la SNFP 2021, et inversement.

Chacune de ces stratégies définit des orientations stratégiques claires. Les orientations de la Vision stratégique de la réforme 2015-30 s’inscrivent dans le sillage des documents antérieurs, faisant état du même constat sur les déficits du système éducatif. La Vision ambitionne de mettre en place une École nouvelle fondée sur l’égalité et l’équité des chances, la qualité pour tous et la promotion de l’individu et de la société. La vision stratégique de la SNFP 2021 est également clairement établie. Elle vise « le développement d’une formation professionnelle de qualité partout, pour tous et tout au long de la vie, au service du développement et de la valorisation du capital humain, et pour une meilleure compétitivité de l’entreprise ». En matière d’emploi, l’ambition de la SNE est de concrétiser le droit au travail en conformité avec la Constitution (art. 31).

Les trois stratégies évoquées s’inscrivent dans des horizons temporels longs. Les politiques publiques doivent généralement être poursuivies sur plusieurs années pour permettre des réformes structurelles qui ne soient pas soumises aux aléas politiques. C’est le cas de la Vision de l’éducation et de la SNE, qui s’inscrivent dans des horizons temporels supérieurs ou égaux à 15 ans. Cependant, une révision des orientations stratégiques peut être utile pour s’assurer qu’elles restent réalistes et réalisables. C’est le cas de la SNFP 2021, qui présente les réformes opérationnelles de court et moyen terme à mettre en œuvre dans le cadre de la Vision à l’horizon 2030. Une nouvelle stratégie sera élaborée pour la période 2021-30.

La déclinaison de la Vision de l’éducation au niveau de chaque département ministériel peut être source de lenteur et d’imprécisions. La Vision de l’éducation n’est pas opérationnelle en tant que telle. Ce document d’orientation générale ne présente pas d’objectifs chiffrés cibles et ne définit pas non plus les programmes d’actions prioritaires. Le département de l’Éducation nationale du MENFPESRS a décliné les grandes orientations de la Vision en 16 projets d’actions stratégiques. Cependant, la définition de ces projets d’actions stratégiques, validée en juin 2016, arrive longtemps après l’adoption de la Vision (2014). De plus, ces 16 projets ne s’inscrivent pas dans un horizon temporel défini et ne font l’objet, ni d’un séquençage prioritaire, ni d’une estimation budgétaire pour leur mise en œuvre. Par ailleurs, et bien qu’arrimée à la Vision stratégique, la structure de la SNFP se distingue largement de celle de la Vision et de la liste des projets intégrés du ministère. Par exemple, et contrairement aux autres documents stratégiques, la SNFP 2021 propose des indicateurs chiffrés annuels pour chaque objectif de la Stratégie. Il serait utile d’harmoniser la cohérence entre ces deux documents et de s’assurer que les projets d’action stratégiques du MEN soient budgétisés et ancrés dans le temps.

La SNE 2015-25 n’est pas alignée avec les stratégies sectorielles des secteurs productifs. Cette stratégie, qui propose de mettre l’emploi au centre de l’action publique, ne se réfère pas explicitement aux stratégies sectorielles en vigueur dans ses prévisions de création d’emplois. De plus, elle présente le nombre de créations d’emplois attendu pour chaque grand secteur économique (primaire, secondaire et tertiaire), un découpage qui rend difficile les comparaisons avec les prévisions de création d’emplois avancées dans les différentes stratégies sectorielles. Par exemple, la SNE prévoit une perte d’emplois dans le secteur primaire d’ici 2025, alors que la Stratégie Halieutis prévoit une forte hausse des emplois dans le secteur de la pêche et que le PMV ne propose pas d’objectifs chiffrés en matière de création d’emplois. De plus, la SNE avance une forte création d’emplois (1 442 000 créations d’emplois sur la période 2013-25 dans le scénario volontariste), une hypothèse supérieure à la somme des projections d’emploi évoquées dans chacune des stratégies sectorielles : moins de 800 000 créations d’emplois sur la base des projections avancées dans les domaines du tourisme, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie et du numérique). De plus, les différences d’horizons temporels rendent difficiles la compréhension de la méthodologie adoptée.

Ce décalage entre la SNE 2015-25 et les stratégies sectorielles se répercute directement sur l’anticipation des besoins en compétences. Remédier à l’inadéquation entre l’offre de formation et les demandes du marché de l’emploi nécessite un fort niveau de coordination entre le MENFPESRS, notamment le département de la formation professionnelle, les différents ministères sectoriels et le MEAS. Il existe des liens entre les différentes stratégies sectorielles, la SNFP et la SNE, mais ceux-ci pourraient être plus explicites. Ainsi, la plupart des stratégies sectorielles évoquent les nombreuses créations d’emplois qui devraient découler de leur mise en œuvre, sans pour autant les relier systématiquement aux besoins en compétences. Par exemple, la Stratégie tourisme table sur une création de 470 000 emplois directs d’ici 2020 sans faire référence aux programmes pédagogiques à développer, ni aux compétences nécessaires pour pourvoir ces nouveaux emplois. Le PMV met en avant le rôle crucial de la formation, mais ne se réfère pas aux acteurs de la formation. D’autres stratégies sont plus explicites sur leurs besoins en compétences. Par exemple, la Stratégie numéric précise les compétences nécessaires pour les 58 000 emplois concernés et évoque des objectifs chiffrés relatifs aux conventions de partenariat avec les universités et les grandes écoles. Elle se réfère également à certaines mesures du Pacte national pour l’émergence industrielle (PNEI) pour intégrer les TIC dans les plans de formation initiaux. Ainsi, à l’exception de quelques stratégies sectorielles, l’articulation entre formation et emploi pourrait être plus explicite entre les différents documents de politiques publiques.

Le manque de décentralisation des capacités au niveau régional accentue le défaut de coordination des politiques publiques. Cela est particulièrement vrai pour les politiques publiques impliquant une multitude d’acteurs et ayant des répercussions sur chaque citoyen, comme l’emploi et l’éducation. Au niveau de l’école, les acteurs locaux sont faiblement impliqués dans la définition et la planification de la politique éducative, notamment dans la définition des besoins de nouvelles infrastructures éducatives. Ce manque de connaissance des besoins sur le terrain, que partagent les acteurs associatifs porteurs de projets de l’INDH et les acteurs locaux du système éducatif, a pu conduire à des doublons dans la réalisation d’infrastructures scolaires. En ce qui concerne le marché de l’emploi, les élus locaux, les petites et moyennes entreprises (PME) locales ou les groupements locaux ne bénéficient pas non plus toujours de la connaissance des besoins en compétences dans leurs bassins d’emplois respectifs afin de faire remonter au niveau central l’inadéquation locale entre l’offre et le besoin de compétences, d’autant qu’il peut s’agir de niches d’emplois très spécifiques. L’absence ou la défaillance des capacités des relais régionaux ne permettent pas toujours une mise en cohérence efficace des politiques publiques à l’échelle locale. Les pistes d’actions proposées dans le Chapter 4 pourraient permettre d’améliorer la remontée d’information de l’échelon local à l’échelon central.

La mise en œuvre des politiques publiques du Maroc doit être mieux coordonnée

Le besoin de mécanismes de coordination efficace pour assurer la bonne mise en œuvre des stratégies est reconnu au plus haut niveau de l’État (Discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône, 2009 et 2010). La cohérence lors de l’élaboration des textes est certes importante, mais elle ne suffit pas. En effet, des stratégies sectorielles cohérentes dans leur phase d’élaboration peuvent ne pas fournir les résultats escomptés faute de mécanismes institutionnels adéquats.

Les mécanismes de mise en cohérence au Maroc présentent des résultats variés. La mise en cohérence des stratégies et la coordination des actions spécifiques au Maroc se fait par l’intermédiaire de plusieurs mécanismes (comités interministériels, structures de pilotage, contractualisation, etc.). Certains de ces mécanismes sont ad hoc, comme les contrats-programmes qui engagent sur des bases très précises l’État, le secteur privé et éventuellement les collectivités, ou le recours à des circulaires internes à l’administration sur des sujets spécifiques (par exemple pour la clarification des objectifs ou des responsabilités). Ces mécanismes ad hoc présentent de meilleurs résultats que des mécanismes plus institutionnalisés avec l’ambition d’assurer une coordination stratégique sur des pans entiers de l’action publique. Le recours à des mécanismes ad hoc de coordination, qui n’est pas systématique, n’est pas négatif en soi. Toutefois, ces mécanismes ne peuvent remplacer intégralement une coordination plus stratégique encore souvent absente. Les failles de coordination au niveau de l’exécution des stratégies mènent en effet à des doublons et des déperditions.

Ainsi, le Maroc pourrait, d’une part, évaluer l’expérience de contrat-programme pour en tirer des enseignements pour l’élaboration d’un cadre global de contractualisation. D’autre part, le Maroc devrait davantage institutionnaliser l’approche interministérielle en : i) réactivant les comités interministériels peu (ou pas) dynamiques et en veillant à la tenue régulière des sessions de façon à développer une culture du travail collectif sur des sujets transversaux ; et ii) en évaluant leur pertinence en fonction de leurs objectifs, de leurs représentants et de leurs modes de fonctionnement. Par ailleurs, les capacités d’impulsion du CDG (cabinet du Chef du gouvernement et autres instances au Maroc) pourraient être renforcées afin de garantir une approche commune, orientée par politique plutôt que par ministères. Enfin, l’implication plus régulière des différentes parties prenantes lors de l’élaboration des stratégies et dans leur mode de gouvernance permettrait de renforcer leur appropriation par les acteurs.

Dans la pratique, la contractualisation est un mécanisme de coordination entre ministères efficace

La pratique contractuelle a pour effet de réduire la verticalité de l’action publique. La démarche contractuelle se définit par : i) l’existence d’un accord négocié sur la base d’objectifs définis conjointement ; ii) un engagement sur un calendrier de réalisation ; iii) des contributions conjointes des parties pour la réalisation des objectifs en termes de financement ou de compétences humaines (MAGG, 2015). Elle permet de substituer les rapports de subordination et les logiques décisionnelles unilatérales à des rapports fondés sur la négociation, la consultation et la concertation. Le Maroc recourt désormais fréquemment à des contrats-programmes autour d’un axe stratégique (Box 5.2). Ceux-ci peuvent être signés entre le secteur public et le secteur privé (comme dans le cas de la politique industrielle), entre différentes parties de l’administration publique (mise en place de la stratégie énergétique via des contrats-programmes avec chacun des ministères concernés), ou entre l’État, des entreprises et des établissements publics (Régie autonome de distribution d’eau et d’électricité de Marrakech, Compagnie nationale Royal Air Maroc, Caisse marocaine de retraites, Office national des chemins de fer, Société nationale des autoroutes du Maroc, etc.). Les contrats-programmes sont même proposés à l’échelle des territoires, « Il est prévu de mettre au point des contrats-programmes entre l’État et les Régions, où seront définies les obligations de chaque partie pour la réalisation des projets de développement » (Discours de SM le Roi à l’occasion de l’anniversaire de la Marche Verte de 2015). Cette généralisation des rapports contractuels entre l’État et les établissements publics a fait partie du programme du gouvernement 2012-16 et a notamment visé à assurer que les établissements publics soient des acteurs essentiels de la mise en œuvre des stratégies, et à améliorer leurs prestations (Royaume du Maroc, 2012).

Encadré 5.2. La contractualisation, un mécanisme de mise en cohérence ad hoc fréquent au Maroc

Plusieurs départements ministériels ou agences travaillent ensemble pour mettre en cohérence leurs actions découlant de stratégies sectorielles.

Le département de l’industrie, le département de l’énergie et l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique ont contribué à l’élaboration du contrat-programme pour la mise en œuvre de la feuille de route de l’efficacité énergétique concernant les secteurs du bâtiment, transport, industrie, éclairage public et agriculture. Il a été convenu que l’Agence serait un partenaire dans la sélection et la validation des projets portant sur des actions liées à l’efficacité énergétique dans le cadre des contrats performance des écosystèmes prévoyant un appui financier, à travers le Fonds de développement industriel et des investissements. Il a été également convenu que les PME industrielles seraient accompagnées par Maroc PME pour la réalisation de leurs projets d’efficacité énergétique.

Dans l’industrie navale, le contrat de performance pour le développement de l’écosystème a été élaboré et signé en collaboration avec le département de l’équipement. Ce contrat de performance prend en compte la stratégie de développement des infrastructures portuaires menée par ce département.

De même, le contrat-programme relatif au développement du secteur des industries agro-alimentaires a été élaboré et signé en avril 2017 par les ministères de l’Industrie et de l’Agriculture et les opérateurs privés. Il a pour objectif d’assurer une meilleure convergence de la stratégie industrielle avec le PMV à travers le renforcement de l’intégration entre l’amont productif et l’aval de transformation dans le cadre d’une synergie entre les départements de l’industrie et de l’agriculture. La mise en œuvre de ce contrat-programme sera financée conjointement par le Fonds de développement industriel (fonds prévu par le PAI) et le Fonds de développement agricole (principal outil de financement des subventions accordées dans le cadre du PMV).

La mise en œuvre de la stratégie du PMV a été largement portée par la contractualisation. Tout d’abord, le PMV s’est décliné au niveau territorial avec l’adoption de 16 plans agricoles régionaux (PAR) en concertation avec les partenaires locaux (collectivités locales, chambres d’agriculture et départements ministériels concernés). Ces PAR constituent la feuille de route en matière de développement agricole (indicateurs quantitatifs de projets, d’investissements, d’emplois et d’exportations) pour chaque région du Royaume. D’autre part, 19 contrats-programmes ont été signés depuis 2008 entre le département ministériel concerné et les professionnels chargés de développer les chaînes de valeur des principales filières de production agricole à l’horizon 2020.

Évaluer l’expérience marocaine de contrat-programme pourrait être utile pour en tirer des enseignements pour l’élaboration d’un cadre global de contractualisation. Le Programme de travail 2012-16 visait à dynamiser le suivi et l’évaluation des conventions d’investissement et des engagements des investisseurs dans les projets ayant bénéficié de mesures incitatives de l’État. Chaque contrat-programme étant signé et négocié par les interprofessions de façon ad hoc, la lisibilité globale de l’action de l’État a pu en être affectée. Ce fut par exemple le cas lors du choix des opérateurs dans le cadre de la construction de logements sociaux ou de la mise en œuvre du PMV, où les opérateurs historiques ont pu bénéficier d’un effet d’aubaine. À l’inverse, les contrats-programme ont permis de donner une forte solidité au système : le cadre réglementaire et les objectifs à atteindre sont fixés, et donc clairs pour les investisseurs, ce qui crée une dynamique favorable pour le développement des secteurs.

Les instances interministérielles ont des résultats contrastés et moins probants que la contractualisation

Le travail d’articulation des réformes pour l’amélioration de l’environnement des affaires offre un exemple d’instance de planification stratégique et de coordination efficace. Le Comité national de l’environnement des affaires (CNEA) mis en place en 2009 a permis des avancées significatives en matière de mise en œuvre des réformes du climat des affaires. Pour ce faire, il a établi des priorités sur la base de critères objectifs (doléances des opérateurs économiques, recommandations des rapports internationaux, degré de l’impact sur la qualité de l’environnement des affaires) et il a élaboré et mis en œuvre des plans d’action en lien étroit avec ces priorités et en concertation avec les acteurs publics et privés concernés (MAGG, 2015a et 2015b). Ce comité se réunit régulièrement, sous la présidence du Chef du gouvernement, pour faire le bilan des actions réalisées et adopter le plan annuel des réformes.

En revanche, les comités interministériels mis en place dans le domaine de l’emploi et de l’éducation pour renforcer la convergence des politiques publiques transversales ne se réunissent que très peu. Des réunions auxquelles participent des représentants des secteurs public et privé sont souvent conçues comme des organes de coordination utiles, mais peuvent s’avérer insuffisants pour assurer la bonne mise en œuvre des stratégies (MAGG, 2015). Par exemple, le gouvernement a mis en place une Commission interministérielle permanente de l’éducation et de la formation, co-présidée par le ministre des Affaires islamiques et le MENFPESRS. L’un des objectifs de cette commission composée de 16 départements ministériels est de suivre la mise en œuvre de la réforme de l’éducation et de favoriser la coordination ministérielle. Toutefois, depuis le décret d’application d’avril 2016, il semblerait que cette commission ne se soit réunie qu’une seule fois. De même, conformément aux dispositions de la SNE, un Comité interministériel de l’emploi, présidé par le Chef du gouvernement et coordonné par le ministère de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle (MEIP), a récemment vu le jour. Composé de 13 départements ministériels, il a pour mission d’élaborer un plan d’action à court, moyen et long terme pour opérationnaliser la SNE. Depuis l’adoption du décret en septembre 2015, ce comité s’est réuni une seule fois, en août 2017, sous la présidence du Chef du gouvernement. Au cours de cette réunion, la composition du comité technique de suivi, présidée par le ministre du MEIP, a notamment été validée.

D’autres secteurs sont concernés par ces défaillances dans le fonctionnement des instances interministérielles. Par exemple, le Conseil supérieur de la normalisation, de la certification, de l’accréditation et de la promotion de la qualité, rattaché au Chef du gouvernement, auquel prend part le secteur privé, ne s’est pas réuni depuis quatre ans. De même, le Conseil supérieur de l’aménagement du territoire, créé en 2001, ne s’est réuni que deux fois (en 2004 et 2016). Enfin un Comité interministériel de convergence a été mis en place pour favoriser la convergence entre la planification des programmes de l’INDH et les engagements ministériels, mais ce dernier n’a pas fonctionné conformément aux engagements contractuels et s’est rapidement auto-dissous (CESE, 2013).

Le fonctionnement des cabinets interministériels à vocation sociale ou économique, tels qu’ils existent dans certains pays d’Amérique latine, pourrait apporter des pistes de réflexion utiles pour renforcer la coordination ministérielle au Maroc. Beaucoup de pays d’Amérique latine ont mis en place des organes de coopération interministérielle, appelés cabinets interministériels, pour gérer au plus haut niveau la cohérence de la politique publique et assurer la mise en œuvre des politiques publiques transversales. La constitution de ces cabinets interministériels, généralement à vocation sociale ou économique, est très répandue en Amérique latine et dans les Caraïbes. En 2016, des cabinets sociaux étaient présents dans plus de 22 pays de la région1 (Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, 2016). Ces structures collégiales intersectorielles sont généralement composées des ministres à la tête de ministères sociaux et présidées par le président de la République, le vice-président ou un ministre spécifique nommé comme coordinateur spécial. Ces cabinets sociaux travaillent généralement en étroite collaboration avec une équipe technique chargée du suivi de la mise en œuvre des politiques sociales. Ces dernières années, de nouveaux cabinets interministériels ont été établis dans la région concernant des populations ou des thématiques plus ciblées (lutte contre la pauvreté, protection sociale, sécurité alimentaire et nutritionnelle, etc.). La mise en place de ces cabinets interministériels offre une structure de gouvernance originale qui permet, en quelque sorte, de mutualiser la responsabilité de la politique sociale entre les différents ministères concernés. Pour fonctionner efficacement et se réunir régulièrement, ces cabinets ministériels doivent disposer d’un mandat clairement défini, d’une stabilité établie dans le temps, de ressources propres et d’un engagement fort exprimé au plus haut niveau. C’est le cas du Conseil national de politique économique et sociale (Conpes) qui existe en Colombie (Box 5.3).

Encadré 5.3. Regards sur le fonctionnement du Conpes en Colombie

La Colombie fut l’un des pays pionniers dans la mise en place de cabinets interministériels. Crée par la Loi n° 19 de 1958, le Conseil national de politique économique et social (Consejo Nacional de Política Económica y Social [Conpes]) est l’organe de coordination des politiques publiques de plus haut-niveau du gouvernement en Colombie. Il présente les caractéristiques institutionnelles suivantes :

  • Autorité de supervision - Le Conpes est directement placé sous la responsabilité du président de la République.

  • Missions - le Conpes coordonne et guide les agences et départements ministériels chargés de la politique économique et sociale du gouvernement (OCDE, 2013).

    • Il supervise l’élaboration du Plan national de développement du pays (Plan Nacional de Desarrollo) avant que ce dernier ne soit approuvé par le Congrès et transcrit par le ministère des Finances dans la Loi de finances.

    • Il examine et approuve les documents officiels relatifs au développement de la politique économique et sociale du gouvernement. Même si ces documents ne prévoient pas l’obligation d’exécuter les politiques publiques, ils permettent la bonne coordination entre les différents acteurs du gouvernement central, mais également avec les acteurs locaux. De plus, ces documents incluent une composante technique pour appuyer les recommandations de politiques dans les domaines concernés.

    • Le Conseil n’a aucun pouvoir législatif mais il trace la feuille de route annuelle du gouvernement en matière de politique économique et sociale.

  • Composition - La composition du Conpes varie en fonction des sujets abordés. Les membres permanents qui ont le droit de s’exprimer et de voter sont le président de la République, tous les ministres, le directeur du département administratif de la présidence de la République, le directeur du département national de la planification (Departamento Nacional de Planeación) et le directeur du département administratif de la science, de la technologie et de l’innovation (COLCIENCIAS).

  • Relations avec le département national de la planification - Ce dernier prépare tous les 4 ans le Plan national de développement qui est révisé par le Conpes. Une fois ce plan approuvé par le Congrès, le département national de la planification coordonne la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation du contenu du plan. Il assume également les fonctions de secrétariat exécutif du Conpes : il coordonne et présente tous les documents qui seront discutés en session.

  • Fréquence des réunions - Une fois par semaine et en session extraordinaire sur demande du président de la République.

Sources : Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (2016), Panorama Social de América Latina, http://repositorio.cepal.org/bitstream/handle/11362/39965/4/S1600175_es.pdf ; OCDE (2013), Colombia: Implementing Good Governance, https://doi.org/10.1787/9789264202177-en.

Le Centre de gouvernement du Maroc n’impulse pas suffisamment l’action gouvernementale

Au Maroc, les relations verticales ont tendance à prendre le pas sur les relations horizontales. Au sein de la structure gouvernementale, il n’existe pas de dispositif institutionnel spécifique de veille de la mise en cohérence des stratégies sectorielles (MAGG, 2015). La nouvelle constitution a renforcé les attributions du Chef du gouvernement et, par conséquent, son leadership au sein du gouvernement. En vue de permettre au Chef du gouvernement d’assumer pleinement son rôle, les capacités d’impulsion du centre de gouvernement (CDG) au Maroc pourraient être renforcées afin de garantir une approche commune, orientée par politique plutôt que par ministères (Box 5.4). Au-delà de l’analyse contenue dans ce chapitre, qui se construit sur les études de cas de stratégies sectorielles, une exploitation de l’expérience internationale en matière de renforcement du rôle du CDG dans le pilotage stratégique des politiques publiques pourrait contribuer à identifier des réformes institutionnelles pertinentes pour le Maroc.

Encadré 5.4. Les fonctions des CDG (Bureau du gouvernement et Cabinet du Premier ministre)

L’expérience internationale montre que les CDG peuvent endosser six fonctions différentes et non exclusives dans leurs interactions avec leurs ministres de tutelle et les agences gouvernementales :

  • La fonction de leadership, qui permet au CDG de parler au nom du Chef du gouvernement lorsqu’il travaille avec les ministres qui souhaitent contribuer à la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement. Cette fonction peut autant concerner la définition des priorités du gouvernement que le séquençage des initiatives afin d’obtenir un bénéfice maximal pour le pays.

  • Les fonctions de coordination a priori et a posteriori du CDG, qui lui permettent d’exploiter les ressources de l’ensemble du gouvernement pour assurer la cohérence gouvernementale dans la définition et la mise en œuvre des politiques. L’évaluation des performances a posteriori tient compte de façon efficace de la nature concertée de la conception et de la mise en œuvre de politiques gouvernementales.

  • La fonction de contestation, qui permet au CDG de questionner l’approche d’un ministre sectoriel dans la résolution de problèmes pour évaluer si sa proposition prend en compte toutes les considérations internes et externes à court, moyen et long terme (risque, coûts, etc.).

  • La fonction consultative, qui permet au CDG de conseiller le ministre, le comité du cabinet et le chef d’État/de gouvernement sur la pertinence d’une proposition soumise pour examen (Cette proposition est-elle prête à être examinée ? Est-elle opportune ? S’inscrit-elle dans la stratégie globale du gouvernement ? Des consultations appropriées et significatives ont-elles été menées avec les parties prenantes ? Les résultats sont-ils reflétés dans la proposition soumise pour examen ?…).

  • La fonction « feux de circulation », qui permet au CDG d’informer un ministre sectoriel que son initiative n’est pas encore prête à être examinée par le Cabinet.

  • La fonction de communication, qui permet au gouvernement, à travers les activités de l’institution du CDG dans ce domaine, de rendre compte en interne et en externe de ses objectifs stratégiques à l’échelle du gouvernement et des progrès réalisés pour les atteindre, renforçant ainsi la responsabilité du gouvernement envers les citoyens.

Source : OCDE (2014), Kazakhstan: Review of the Central Administration, https://doi.org/10.1787/9789264224605-en.

Dans ses travaux, l’OCDE recommande de renforcer les liens entre la gestion des risques (évaluation, prévention, gestion de la crise, reconstruction) et les différentes politiques sectorielles, notamment relatives à l’eau, l’aménagement du territoire, l’urbanisation, la lutte contre le changement climatique (OCDE 2016a). L’OCDE propose également d’établir une structure de coopération et de coordination qui pourrait s’appuyer sur les compétences de chacun des départements, afin de mieux assurer la résilience du pays face aux risques majeurs. L’OCDE accompagne aujourd’hui le Maroc dans la mise en place d’une structure institutionnelle de type « Chief Risk Officer » dédiée à la gouvernance des risques permettant ainsi le renforcement de la coopération interministérielle sur cette politique transversale. Cette initiative pilote pourra servir d’exemple pour d’autres champs de politiques publiques au Maroc.

Un bon pilotage des stratégies sectorielles nécessite l’implication de toutes les parties prenantes ayant des rôles définis

L’implication régulière des parties prenantes dans l’élaboration de stratégies apporte des résultats positifs. L’implication des parties prenantes n’est pas systématique. Par exemple, le Programme d’urgence 2009-12 pour une éducation inclusive a été développé par un bureau d’étude sans réelle implication des syndicats, voire des directions du ministère (Union européenne, 2014). En revanche, tous les dispositifs institutionnels de pilotage qui ont porté leurs fruits ont en commun d’impliquer plusieurs parties prenantes et d’avoir une définition claire des rôles des acteurs :

  • Le PNEI a mis en place un dispositif de gouvernance et de coordination global, décliné en échelons et niveaux de pilotage et de coordination, avec des objectifs bien définis et des rôles bien formulés (MAGG, 2015a). Le PNEI disposait d’un comité de pilotage composé du cabinet du Premier ministre, de neuf ministères et deux représentants du secteur privé. Les missions étaient bien établies (fixer les priorités, lancer les travaux des chantiers, résoudre les points d’arbitrage, valider et communiquer sur l’avancement des chantiers), et le comité devait se réunir au moins une fois par an. Le PNEI disposait également de quatre comités de suivi chargés de la mise en œuvre des mesures par thématique, au sein desquels des représentants de plusieurs ministères et du secteur privé se rencontraient. Les missions de ces comités étaient de suivre l’avancement des travaux, débattre des problèmes rencontrés dans le cadre de la mise en œuvre et proposer des solutions, et de communiquer l’avancement des travaux aux différents intervenants en vue de maintenir une forte mobilisation.

  • Le Comité national de l’environnement des affaires (CNEA), qui a réalisé de solides avancées, est présidé par le Chef du gouvernement et composé de représentants de l’administration, du secteur privé et d’institutions indépendantes. Le dispositif de gouvernance est multisectoriel et multi-acteurs, avec une répartition claire des rôles et des responsabilités, et organisé autour de plans d’actions communs adoptés annuellement.

  • L’implication et la participation d’acteurs dans la mise en œuvre du programme de l’INDH a été soutenue. L’INDH fait participer les associations à travers des contributions aux commissions et comités locaux, et instaure ainsi une culture de travail collaboratif entre l’administration et la société civile (Box 5.5). Ce retour des acteurs de terrain permet également de renforcer la convergence des projets et programmes, mais nécessite une forte implication des décideurs locaux, notamment des gouverneurs. Ainsi, le Maroc devrait veiller à l’implication régulière des différentes parties prenantes lors de l’élaboration des stratégies afin de renforcer leur appropriation par les acteurs.

Encadré 5.5. Une gouvernance participative : le cas de l’INDH

L’INDH constitue une première expérience d’approche ascendante, participative et inclusive associée à une démarche déconcentrée et décentralisée des politiques sociales locales. Malgré certains dysfonctionnements, cette approche originale constitue un exemple de modèle de gouvernance dans lequel l’ensemble des parties prenantes sont associées.

L’INDH s’est caractérisée par la participation de nombreux acteurs : associations et coopératives, élus locaux, services extérieurs, autorités locales, universités, secteur privé, partenaires techniques et financiers. Parmi tous les acteurs cités, les associations et les coopératives occupent une place centrale car les financements des projets INDH passent obligatoirement par elles. Sur la première phase de l’INDH, la contribution des associations dans la maîtrise d’ouvrage des projets a représenté 29 % de l’enveloppe globale des projets en milieu urbain et 19.3 % en milieu rural (ONDH, 2013).

La dynamique participative de l’INDH a permis de dynamiser le tissu associatif marocain et de favoriser l’émergence de nouvelles élites locales décidées à joindre leurs efforts aux pouvoirs publics dans la conduite des projets de développement. La communication de proximité avec l’ensemble des acteurs locaux a été un élément essentiel pour rendre cette gouvernance participative opérationnelle.

Toutefois, au regard de l’évaluation de la première phase de l’INDH, les associations ne disposent pas toujours des compétences nécessaires à la gestion et la pérennisation des projets. De plus, leur position dans l’INDH fait d’elles un concurrent potentiel des élus en matière d’influence sur les politiques locales. Cette situation a pu conduire, soit à la création de nombreuses associations par opportunisme et à leur instrumentalisation à des fins politiques, soit à une faible implication des élus et donc un faible engagement des collectivités territoriales dans la gouvernance locale de l’INDH.

Source : CESE (2013), « Initiative nationale pour le développement humain : analyse et recommandations », www.cese.ma/Documents/PDF/Rapport-INDH-VF.pdf ; ONDH (2013), « Évaluation des réalisations de la première phase de l’INDH (2005-2010) et de leurs effets sur les populations cibles – Synthèse », www.ondh.ma/sites/default/files/documents/synthese_du_rapport_ondh_2013.pdf.

La clarté des responsabilités est nécessaire pour éviter le chevauchement des prérogatives. Dans le cas du programme de l’INDH, les acteurs locaux ne connaissaient pas suffisamment les plans ministériels, ce qui a conduit à des doublons dans la réalisation des projets, à des opportunités de planification de développement local intégré manquées, et à une déconnexion entre les investissements et le fonctionnement (CESE, 2013). De plus, les évaluations montrent que le programme de l’INDH a fonctionné en parallèle des autres programmes sociaux (Plans communaux de développement, programmes des Agences de développement, PMV, Tayssir, Régime d’assistance médicale [Ramed]) sans rechercher les possibilités de convergence, ces différents programmes répondant à différentes logiques d’intervention (CESE, 2013). En effet, les mécanismes de coordination définissent souvent insuffisamment les missions, règles de fonctionnement, statuts ou mandats, aboutissant à des situations de cloisonnement entre les différentes parties de l’administration (MAGG, 2015a et 2015b). Si les attributions et l’organisation des départements ministériels étaient plus complémentaires et cohérentes, les mécanismes de coordination pourraient être plus efficaces, comme par exemple dans le cas de l’investissement ou de la promotion du commerce, qui concentrent l’intervention de multiples organismes (MAGG, 2015a et 2015b). À ce titre, la mise en place de l’Agence marocaine pour le développement des investissements et des exportations (AMDIE), fruit de la fusion de trois entités (AMDIE, Maroc export et Office des foires et expositions de Casablanca [OFEC]), crée en vertu de la Loi n° 60-16 est positive.

Le suivi des politiques publiques marocaines et l’analyse de leurs impacts sont insuffisants

Le suivi et l’analyse des impacts et résultats des politiques publiques, basé sur la collecte précise et systématique de données, permet de mener une politique de reddition de comptes auprès du pouvoir législatif et des populations. Toutefois, au Maroc, tant le suivi des politiques publiques (analysé dans une première partie de cette section) que l’évaluation de leurs impacts (analysée dans un second temps) sont limités.

La prise de décision n’est pas soutenue par un suivi régulier des stratégies

Le système statistique marocain a une capacité reconnue, mais sa gouvernance présente des difficultés. L’indicateur synthétique de capacité statistique de la Banque mondiale place le Maroc au milieu des pays de comparaison (Figure 5.3), soulignant les capacités de production de données. Cependant, la dispersion de la production statistique et les limites du cadre de partage de l’information réduisent son efficacité pour la prise de décision. En l’absence d’entité de coordination du système statistique dans son ensemble, la production statistique émane de plusieurs agences (Haut-commissariat au plan [HCP], Observatoire national du développement humain [ONDH], Observatoire marocain de l’industrie, etc.), qui ont des méthodologies différentes. La multitude de sources de production des statistiques complexifie le partage et l’accès à l’information, qui circule difficilement au sein de l’administration publique, pénalisant l’analyse du suivi de la mise en œuvre des stratégies. Par exemple, les données de l’enquête nationale sur la consommation et les dépenses des ménages réalisée en 2013-14 n’ont été publiées que fin 2016. Ce besoin a été pris en compte dans le Programme du gouvernement 2012-16, qui prévoyait la mise en place d’une agence nationale des statistiques dotée de prérogatives organisationnelles et fonctionnelles, et disposant de moyens à même de lui permettre d’émettre des données statistiques globales, précises, crédibles, répondant aux besoins des décideurs et permettant aux citoyens d’évaluer les politiques publiques. Ce projet n’a cependant pas été repris dans le projet du gouvernement de 2017. Ainsi, le Maroc devrait mieux encadrer le partage et l’accès aux informations pour accroître son utilisation au sein et à l’extérieur de l’administration. Les Philippines offrent un exemple d’organisation institutionnelle efficace pour la production et le partage de statistiques (Box 5.6).

Graphique 5.3. Le système statistique marocain est d’une qualité similaire à ceux de l’Afrique du Sud, de la Jordanie ou de la Pologne
Indice global de la capacité statistique, échelle de 0-100 (maximum), 2017
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Source : Banque mondiale (2017), Indicateurs du développement dans le monde (base de données), http://data.banquemondiale.org.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933709147

Encadré 5.6. Le système de production statistique aux Philippines

Aux Philippines, l’Autorité des statistiques (Philippine Statistics Authority) est chargée de la collecte, de l’analyse et de la dissémination des statistiques nationales. Le mode de gouvernance de l’Autorité des statistiques implique des mécanismes de collaboration étroits avec les différents départements ministériels du gouvernement, ces derniers étant chargés de la collecte, de l’analyse et de la dissémination des statistiques nationales sectorielles.

Cette coordination est assurée au plus haut niveau de l’Autorité des statistiques, par le comité directeur. Celui-ci est présidé par le secrétariat à la planification socio-économique, composé de 15 représentants de haut niveau de chaque département ministériel du gouvernement. Dans le cadre de son mandat, ce comité directeur définit les grandes orientations stratégiques en matière de collecte de statistiques, d’adoption des systèmes de classification, de définition des normes statistiques nationales et de dissémination. Il se réunit au moins quatre fois par an et à la demande expresse du président ou de l’un de ses 15 membres.

Dans le cadre de ses prérogatives, le comité directeur a mis en place un système de statistiques nationales (System of designated statistics) nécessaires à la planification et à l’analyse socio-économique du pays. La mise en place d’un tel système permet de prioriser la production statistique, de rationaliser les activités statistiques du gouvernement et de responsabiliser l’agence chargée de la production statistique (types de statistiques collectées, niveaux de désagrégation requis, fréquence et calendrier de dissémination). Les statistiques et les rapports associés sont directement accessibles sur le site internet de l’Autorité des statistiques des Philippines.

Source : Site internet de l’Autorité des statistiques, http://www.psa.gov.ph/philippine-statistical-system/sds

Au niveau spécifique des stratégies, le suivi des indicateurs de performance est difficile. Les stratégies sectorielles se fixent des cibles ambitieuses, notamment en matière de création d’emplois ou de valeur ajoutée. Leur réalisme apparaît limité du fait que les cibles ne prennent pas en compte l’existence d’autres stratégies et de leurs impacts potentiels. Par conséquent, l’addition cumulée des cibles des stratégies n’est pas exploitable (Table 5.2). Par exemple, il n’est pas clair si les créations d’emplois industriels dans la filière de la conserverie de produits de la mer sont comptabilisées dans les chiffres du PAI ou du Plan Halieutis, ou si elles sont doublement comptabilisées. De même, il n’est pas évident de déterminer si les chiffres d’export de la stratégie commerciale Maroc Export + prennent en compte les montants d’exportation de la stratégie Halieutis. Ces zones d’incertitude, combinées à la difficile réalisation des objectifs à court terme, contribuent à la faible utilité de ces indicateurs pour le pilotage des stratégies. Les stratégies devraient être accompagnées d’indicateurs plus spécifiques à des filières prioritaires, et d’indicateurs de résultat intermédiaires (nombre d’entreprises créées, taux de survie des entreprises, rythme de croissance des entreprises). À titre d’exemple, Maroc Digital 2020 dispose d’indicateurs relatifs à l’usage des TIC (part des PME équipées et connectées à internet, etc.). Certaines stratégies ne font mention d’aucun indicateur (Plan national de développement des échanges commerciaux ; Stratégie de développement et de compétitivité du secteur halieutique), ce qui rend l’intérêt de leur suivi limité. Pour réaliser un suivi des stratégies sectorielles plus fin que les indicateurs macroéconomiques, le Maroc devrait choisir un nombre limité d’indicateurs de performance issus d’un processus de sélection rigoureux et qui serviront de base pour mettre en place la culture de l’évaluation de la performance dans l’administration marocaine. La sélection de ces indicateurs pour l’atteinte des résultats suppose une construction cohérente, avec de réels liens entre indicateurs agrégés liés aux objectifs stratégiques et leur déclinaison en indicateurs spécifiques mesurables.

Tableau 5.2. Les objectifs de PIB, emploi et échanges commerciaux entre les différentes stratégies sectorielles du Maroc ne sont pas cohérents

Stratégies sectorielles

PIB

Emploi

Exportation

Importations

PAI : de l’émergence aux écosystèmes performants 2014-20

Part de l’industrie : +9 points à 23 % PIB

Emplois industriels : x2 à x5 en 10 ans.

Création de 500 000 emplois dans l’industrie dont :

  • la moitié par IDE

  • 100 000 dans la branche textile d’ici 2020

  • 90 000 dans la branche automobile.

x5 en 10 ans

Export = Import

Stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique 2010-15

Pas d’information

  • 36 000 emplois directs d’ici 2015

  • 96 000 emplois directs d’ici 2030

Pas d’information

Pas d’information

Stratégie de développement et de compétitivité du secteur halieutique marocain à l’horizon 2020

De 8.3 milliards MAD (dirhams marocains) à 21.9 milliards MAD entre 2007 et 2020

Emploi direct : de 61 650 à 105 000 (ou 115 000) entre 2007 et 2020.

Emploi indirect : de 488 500 à 510 200 entre 2007 et 2020.

La stratégie indique également une contribution à l’emploi de 170 000 emplois directs et 490 000 emplois indirects.

De 1.2 milliards USD (dollars américains) à 3.1 entre 2007 et 2020

Matières premières : de 30 000 tonnes à 130 000 tonnes entre 2007 et 2020

Maroc Export + 2008-18

+45 milliards MAD d’ici 2015

+200 000 d’ici 2015

+380 000 d’ici 2018

De 114 milliards MAD en 2008 à 229 milliards MAD en 2015, à 327 milliards MAD en 2018

Plan national de développement des échanges commerciaux 2014-16

Pas d’information

Pas d’information

Pas d’information

Pas d’information

Stratégie des énergies renouvelables & Plan d’efficacité énergétique

+30 points de base de croissance annuelle du PIB entre 2014 et 2030

520 000 emplois créés de 2014 à 2030

  • 149 000 induits

  • 142 000 indirects

  • 230 000 directs

500 milliards MAD de réduction de la facture énergétique nationale, soit 15 % de la facture énergétique sur la période

PMV 2008

Accroissement du PIB agricole (+60 à 90 milliards MAD entre 2008 et 2020).

+1 à 1.5 millions d’emplois

Doublement à long terme des exportations

Plan Rawaj 2010-20 (plan de développement du commerce intérieur)

Tripler le PIB du commerce.

Porter la contribution du commerce au PIB national à 15 % (contre 11 % en 2006).

+450 000 emplois d’ici 2020.

Source : Auteurs.

La culture de l’évaluation, pourtant indispensable pour assurer un bon pilotage de la mise en œuvre des politiques, est faible au Maroc

Le système d’évaluation des politiques publiques n’est pas développé, ne permettant pas de tirer des bilans des actions et réformes menées. Très peu de stratégies sectorielles bénéficient d’évaluations à mi-parcours et finales, et d’évaluations externes indépendantes. Seuls les secteurs de l’éducation, et dans une moindre mesure de l’emploi et de l’agriculture, font figure d’exception (Box 5.7), même si leurs pratiques de l’évaluation pourraient être renforcées, plus régulières et indépendantes. La systématisation des évaluations des politiques publiques permettrait le réajustement des réformes existantes, l’élaboration des réformes à venir et leur meilleure mise en synergie, comme en témoigne le discours du Roi à l’occasion de la fête du Trône en 2016 : « Ceci requiert un travail sérieux pour relever la compétitivité de l’économie nationale, et assurer l’évaluation objective des politiques publiques et la mise à jour continue des stratégies sectorielles et sociales ». Par exemple, une évaluation du bilan du PNEI 2009-15 aurait très certainement bénéficié à l’élaboration du PAI.

Encadré 5.7. Dans le domaine de l’évaluation, l’éducation, et dans une moindre mesure l’emploi, font figure d’exception

L’Instance nationale de l’évaluation (INE), créée en 2006 au sein du CSEFRS, a présidé la conduite du rapport d’évaluation de 2008, qui a posé les jalons du Programme d’urgence de 2009. La création de cette institution a contribué à la diffusion d’une culture d’évaluation dans le secteur de l’éducation. L’INE a supervisé le Programme national d’évaluation des acquis des élèves (PNEA) de 2008. Plus récemment, l’INE a piloté l’évaluation de la mise en œuvre de la Charte de l’éducation (CSEFRS, 2014) à partir de laquelle la nouvelle Vision de l’éducation a été élaborée. Les travaux d’évaluation de l’INE ont été conduits à l’issue des différents programmes de politiques publiques dans l’éducation.

À l’instar du Maroc, de nombreux pays de l’OCDE ont mis en place des structures indépendantes chargées de suivre la mise en œuvre des réformes du secteur de l’éducation sans être sujettes aux changements de majorité politique. Certaines de ces instances ont un poids important dans le suivi des réformes et l’évaluation des politiques publiques. Par exemple, au Mexique, l’Institut national pour l’évaluation de l’enseignement est devenu autonome en 2013, lui permettant d’élaborer une approche stratégique uniforme de l’évaluation. En tant qu’instance autonome, il lui incombe de définir la procédure d’évaluation des enseignants et des élèves, et il doit coopérer avec le ministère de l’Éducation publique et les organes décentralisés pour consolider l’évaluation. Au Chili, l’Agence d’assurance qualité de l’enseignement peut effectuer des inspections sur site pour évaluer la performance des établissements et aide les établissements les moins performants.

Dans le domaine de l’emploi, le ministère du Travail et de l’Insertion professionnelle (MTIP) a procédé à l’évaluation des politiques actives de l’emploi. Début 2000, le MTIP a développé des programmes actifs de l’emploi mis en œuvre par l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (Anapec) pour résoudre l’inadéquation emploi-formation (voir Chapter 4). Ces programmes ont fait l’objet d’un suivi-évaluation par une unité de l’Observatoire du marché du travail. Cette unité a pour mission le suivi et l’évaluation des programmes de l’emploi sur le plan national, régional et sectoriel, ainsi que le pilotage et l’analyse des données quantitatives sur les caractéristiques des trajectoires d’insertion professionnelle dans le marché du travail. Ces études de suivi-évaluation ont permis de corriger certaines dispositions des programmes actifs de l’emploi pour renforcer leur efficacité.

Source : CSEFRS (2014), « Vision stratégique de la réforme 2015-30, pour une école de l’équité, de la qualité et de la formation », www.csefrs.ma/pdf/Vision_VF_Fr.pdf.

Les capacités de l’administration marocaine pour l’évaluation sont confrontées à des défaillances en matière de pratiques et de méthodologie. L’évaluation est reconnue comme une des faiblesses de l’administration marocaine. Certaines structures ont désormais une mission d’évaluation, comme l’Observatoire national du développement humain (ONDH). L’Inspection générale des finances a également procédé à l’évaluation de certaines stratégies sectorielles, mais ces travaux d’évaluation ne sont pas systématiques, ne sont pas librement accessibles et ne génèrent pas des retombées directes en termes de politiques publiques. De même, la Cour des comptes a introduit des pratiques d’évaluation dans ses missions de contrôle. Enfin, le CSEFRS ou le Haut-commissariat au plan (HCP) ont des structures dédiées à l’évaluation. Toutefois, l’absence d’une politique générale et d’un cadre institutionnel d’évaluation des stratégies conduit à une pratique non homogène et des méthodologies faiblement uniformisées (MAGG, 2015). Le Maroc devrait ainsi systématiser l’évaluation à mi-parcours et finale des stratégies en ayant d’abord homogénéisé les pratiques et uniformisé les méthodologies sous-tendant les évaluations. Dans ce cadre, la mise en place d’un organe indépendant des départements ministériels et agences d’exécution chargées de l’évaluation des stratégies et programmes sectoriels pourrait être envisagée.

L’évaluation devrait conduire à une meilleure élaboration des stratégies. En effet, l’évaluation programmatique dans les règles de l’art suppose la formulation d’une « théorie du changement ». Celle-ci propose un cadre logique détaillant le processus par lequel les actions proposées mèneront à l’objectif annoncé. La formulation d’un cadre d’évaluation contribue de cette façon à la formulation de stratégies et actions cohérentes par rapport à l’ensemble de la stratégie, et évaluables à leur tour par rapport aux objectifs intermédiaires de la stratégie, ou à leur contribution aux objectifs finaux. Le souci d’évaluation mène aussi à la formulation de meilleures politiques. En matière de réglementation, l’OCDE a montré que le développement des analyses préalables d’impact est essentiel pour aider les gouvernements à évaluer leurs effets, bénéfices et impacts (OCDE, 2013).

Les unités de mises en œuvre, comme elles existent dans certains pays, peuvent favoriser le suivi de la mise en œuvre des politiques et des programmes. Le Royaume-Uni et la Malaisie, par exemple, ont mis en place dans leurs agences centrales des unités de mise en œuvre des politiques et des programmes (Box 5.8 ; OCDE, 2015c). Ces unités peuvent avoir un rôle d’examen préalable afin de déterminer si les programmes sont prêts à être mis en œuvre, ou un rôle de surveillance pour assurer une mise en œuvre efficace. Ces unités de mise en œuvre utilisent une combinaison de leviers techniques (par exemple, une analyse formelle de la mise en œuvre) et de leviers plus opérationnels (tels que la formation et l’échange des meilleures pratiques) afin d’améliorer les performances de mise en œuvre.

Encadré 5.8. Unités de mise en œuvre au Royaume-Uni et en Malaisie

L’Unité de mise en œuvre du Premier ministre du Royaume-Uni, dirigée par le Premier ministre Tony Blair, utilisait des indicateurs quantitatifs pour mesurer la performance des ministères selon les priorités du Premier ministre et pouvait intervenir avec une action ciblée au cas où des ajustements étaient nécessaires. Le rôle de cette Unité était de fournir des services publics meilleurs et plus efficaces en : surveillant et rendant compte des mesures et réformes prioritaires du Premier ministre ; identifiant les principaux obstacles à l’amélioration et les actions nécessaires au renforcement de la provision de services publics ; renforçant la capacité des ministères dans la provision de services ; favorisant le partage des connaissances sur les meilleures pratiques en matière de provision de services ; et soutenant le développement d’objectifs pour un service public de grande qualité (Bureau du Cabinet, Royaume-Uni, 2006).

En 2009, le Premier ministre malaisien a créé l’Unité de mise en œuvre et de gestion des performances (The Performance Management and Delivery Unit [PEMANDU]) au sein du Département du Premier ministre. Cette unité composée de responsables des secteurs public et privé pilote le programme de transformation du gouvernement et le programme de transformation économique du pays. Plus précisément, elle est chargée de « catalyser les changements dans la provision de services publics et privés, de soutenir les ministères dans le processus de planification de provision de services et de fournir une vision indépendante de leurs performances au Premier ministre et aux ministres » (PEMANDU, sans date). À noter que la responsabilité de la performance du gouvernement incombe en dernier ressort aux ministères compétents, et que le succès des secteurs économiques nationaux repose sur le secteur privé. Grâce à l’unité PEMANDU, le gouvernement assure une mise en œuvre efficace de ses initiatives de transformation par rapport aux indicateurs clés de performance, tout en s’appuyant sur l’expertise du secteur privé pour aider au processus de transformation gouvernementale et économique.

Source : OCDE (2015c), Costa Rica: Good Governance, from Process to Results, https://doi.org/10.1787/9789264246997-en.

Le suivi-évaluation est une composante intégrante d’une politique du rendre compte, nécessaire pour restaurer la confiance entre l’administration et les citoyens, mais qui fait encore défaut au Maroc. La participation électorale, la confiance dans le gouvernement et les contacts avec les représentants politiques sont faibles ou en baisse au cours des dernières années (Figure 5.4). La nécessité de rapprocher les citoyens de l’administration est mise en avant dans les travaux de l’OCDE sur le Maroc à travers des recommandations en matière d’engagement civique, de transparence et de redevabilité (OCDE, 2015d) ; et sur la possibilité de création d’un système d’intégrité plus cohérent et mieux coordonné en mobilisant les pouvoirs publics et la société civile (OCDE, 2016b). Ce sujet est au cœur des discours du Roi et a fait partie du programme du gouvernement 2012-16. Cet engagement se poursuit sur la période 2017-22 avec le second axe du Programme du gouvernement entièrement dédié au renforcement des valeurs d’intégrité, de la réforme de l’administration et à l’ancrage de la bonne gouvernance.

Graphique 5.4. La politique du rendre compte est nécessaire pour rapprocher les citoyens de l’administration au Maroc
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Source : Gallup Organization, Gallup World Poll (base de données), http://www.gallup.com/services/207413/gallup-world-poll.aspx ; International Institute for Democracy and Electoral Assistance, Voter Turnout Database (base de données), https://www.idea.int/data-tools/data/voter-turnout.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933709166

Le développement des différentes formes de participation citoyenne, et notamment la participation à l’action publique, pourrait favoriser la confiance dans les institutions. La participation citoyenne dans diverses activités civiques et politiques permettrait aux citoyens d’influencer les décisions de politique publique. Les mécanismes favorisant cette participation peuvent inclure la création d’enveloppes budgétaires participatives, la mise en place d’ateliers citoyens ou encore la participation des citoyens à la formulation de la législation et de la règlementation. La participation des parties prenantes à l’élaboration de l’action publique favorise généralement l’adoption de textes plus fédérateurs et de meilleure qualité, du fait que les personnes concernées par les propositions apportent ainsi leur contribution et que le public peut exercer un droit de regard. La participation des parties prenantes est également un rempart contre la corruption et favorise la confiance des citoyens à l’égard des pouvoirs publics. Dans près des deux tiers des pays de l’OCDE, les parties prenantes doivent être systématiquement impliquées dans la formulation de la législation primaire et dans un peu plus de la moitié des pays, elles doivent être impliquées dans la formulation des textes d’application (OCDE, 2016c). La réforme de la gouvernance locale à travers le processus de régionalisation avancée constitue une opportunité de rapprocher les citoyens de leurs administrations à travers les responsabilités confiées aux collectivités territoriales pour fournir des services de proximité de qualité et soutenir la participation des citoyens au cycle des politiques publiques. Les principes d’actions de l’OCDE et l’analyse comparative en matière de gouvernement ouvert au niveau local peuvent s’inscrire dans cette démarche (OCDE, à paraître).

Une meilleure gouvernance budgétaire contribuerait au renforcement de la cohérence des politiques publiques au Maroc

Le budget de l’État permet de porter un regard sur la pertinence des choix et arbitrages présentés par le gouvernement et adoptés par le Parlement en matière budgétaire et fiscale à court terme2 . Il offre un moment privilégié pour s’interroger sur la cohérence de ces choix avec la stratégie de développement suivie à moyen et long terme. Il permet aussi d’examiner la convergence entre les diverses composantes financières d’une structure publique, et l’articulation entre les budgets des structures publiques chargées de la mise en œuvre des politiques publiques. Garantir la cohérence de la décision et de l’action publique, tout en donnant sa pleine portée au vote démocratique, nécessite une connaissance complète des ressources et des charges donnant en une seule lecture une vision complète de tous les flux financiers.

Depuis quelques années, le Maroc s’est engagé dans une dynamique de réformes des processus budgétaires. Ces réformes concernent le renforcement de la gouvernance des finances publiques, notamment à travers la consécration des principes de transparence et de responsabilité, la mise en œuvre de la régionalisation avancée et le lancement de la gestion budgétaire axée sur les résultats. Ces réformes peuvent être, si elles sont bien mises en œuvre, un levier pour améliorer la cohérence des politiques publiques.

La nécessité d’établir une situation consolidée des comptes du secteur public

La vision consolidée des comptes du secteur public constitue une nécessité pour le renforcement de la cohérence financière entre les différents acteurs économiques publics. Elle permet d’appréhender la réalité économique de l’État, ainsi que sa situation financière et patrimoniale intégrée. Elle contribue à l’optimisation financière et fonctionnelle de l’action publique à travers une plus grande articulation des stratégies publiques, une meilleure hiérarchisation des priorités et une amélioration du cadre de performance des politiques publiques. En effet, certaines décisions stratégiques nécessitent que l’ensemble du secteur public dispose d’une vision globale et exhaustive des politiques publiques. C’est notamment le cas pour l’investissement public. De même, les données consolidées permettent d’évaluer certains secteurs particuliers (l’éducation nationale, la santé, etc.). Au Maroc, l’article 48 de la LOLF dispose que « le projet de loi de finances de l’année peut être accompagné d’un rapport sur les comptes consolidés du secteur public ». Une fois appliqué, cela permettrait d’avoir une vision complète des comptes publics3 .

Une vision consolidée des comptes du secteur public nécessite à son tour une unité et exhaustivité documentaire, ainsi que le respect de l’universalité des ressources et des charges. Les documents budgétaires doivent d’abord viser l’unité et retracer dans un document unique et exhaustif l’ensemble des recettes et des charges de l’État. L’unité et l’exhaustivité restent difficiles à atteindre en raison de la disparité entre les ressources et les charges, ce qui conduit à une certaine pluralité de documents qui, réunis, forment le budget de l’État. D’autre part, toutes les ressources doivent servir à couvrir la totalité des charges, car elles appartiennent au même ensemble. Ce dernier impératif se concrétise dans le principe d’universalité des ressources et des charges.

Malgré la reprise de ces principes dans le droit budgétaire et comptable, le Maroc connaît une certaine prolifération de formes budgétaires originales. Cette particularité se trouve liée à l’affectation de certaines ressources à certaines dépenses, ou encore à la constitution de structures autonomes agissant en parallèle de l’État ou pour l’exécution d’un service public, mais conservant une relation financière forte avec lui de par leurs fonds et la définition de leurs objectifs, l’origine de leurs fonds et les modalités de leur perception et leur utilisation. En d’autres termes, il s’agit de retirer du budget de l’État des dépenses qui y figuraient ou auraient eu vocation à y être, pour les faire financer par d’autres ressources ou les confier à d’autres structures.

Les exceptions budgétaires et les démembrements de l’État entravent la cohérence de l’action publique

Les exceptions budgétaires entravent la cohérence de l’action publique. En 2016, le périmètre du secteur public marocain se compose de l’administration centrale, qui regroupe 39 départements ministériels et institutions, 74 comptes spéciaux du Trésor (CST) et 204 services de l’État gérés de manière autonome (Segma). Les dépenses du budget de l’État4 , telles que prévues par la Loi de finances de 2016 s’élèvent à près de 389 milliards MAD, répartis entre le budget général, les CST et les Segma (Figure 5.5). Les exceptions budgétaires (par exemple, les reports de crédits d’une année sur l’autre, l’affectation des ressources aux dépenses, les taxes parafiscales) privent le pouvoir législatif et le gouvernement d’une vision globale des politiques publiques et d’une capacité générale de décision et d’évaluation de celles-ci.

Graphique 5.5. Les dépenses du budget de l’État marocain (hors amortissement de la dette publique) se répartissent entre budget général, CST et Segma
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Note : Les données sont pour l’année 2016.

Source : Royaume du Maroc (2015), Bulletin officiel, http://lof.finances.gov.ma/sites/default/files/budget/files/corps_de_la_loi_de_finances_2016_fr_0.pdf.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933709185

Les CST, destinés à la mise en œuvre des orientations du gouvernement et à l’allocation des ressources budgétaires, ne respectent pas le principe d’unité budgétaire. Les CST sont juridiquement distincts du budget général de l’État : leurs dépenses et recettes n’y figurent pas, ils échappent à la règle de non affectation de certaines recettes à certaines dépenses5 , et les pouvoirs du Parlement sur ces comptes se trouvent ainsi réduits. Les dépenses des CST s’élèvent à 66.7 milliards MAD en 2016. Face à cela, des efforts sont entrepris pour les rationaliser (156 CST en 2001, 74 en 2016), et leur développement est encadré : à partir de 2018, les opérations des CST seront prévues, autorisées et exécutées dans les mêmes conditions que les opérations du budget général, sous réserve de certaines dispositions comme le report du solde de chaque compte spécial d’année en année (art. 28 de la Loi organique n° 130.13 relative à la loi des finances [LOLF]). Par ailleurs, les projets d’opérations programmés dans le cadre des comptes d’affectation spéciale sont présentés aux commissions parlementaires concernées en accompagnement des projets de budgets des départements ministériels ou institutions auxquels ils se rattachent (art. 30). Malgré ces efforts, les CST représentent 19 % du budget de l’État, ce qui altère la visibilité sur l’affectation d’une part importante des dépenses de l’État aux différentes politiques publiques. Par ailleurs, et malgré les évolutions significatives introduites par la LOLF, certains comptes spéciaux restent exclus des débats et du contrôle parlementaire. Tous ces éléments amenuisent la cohérence de l’action publique. En 2016, près de la moitié du montant des CST avait pour objet le développement territorial. Leur intégration dans un cadre consolidé représentant l’action de l’État est donc particulièrement importante dans le contexte de la régionalisation avancée et la territorialisation des politiques publiques.

En expansion depuis l’année 2000, la création des Segma accorde à un service plus de souplesse de gestion afin d’atteindre une performance accrue. Les Segma visent essentiellement la production de biens ou de services donnant lieu à rémunération dans des domaines tels que la santé, l’enseignement, la formation professionnelle, les transports, l’eau, etc. En 2015, leurs recettes se sont élevées à 6.9 milliards MAD, et les dotations d’équilibre ont atteint 925 millions MAD. Le taux global de couverture des dépenses par les recettes propres s’est élevé à 79 %6 . Le projet de loi de finances pour 2017 a fixé à 2.9 milliards MAD les dépenses prévisionnelles des Segma (ministère de l’Économie et des Finances, 2016). La création des Segma par la Loi de finances reste soumise à l’existence et la justification de ressources propres provenant de la rémunération de biens ou de services rendus. La LOLF de 20157 a rationnalisé la création et l’utilisation des Segma, désormais les ressources propres doivent représenter, à compter de la troisième année budgétaire suivant la création du Segma, au moins 30 % de l’ensemble de leurs ressources autorisées par la loi de finances de l’année. L’insuffisance des recettes propres des Segma se trouve compensée par le versement de subventions d’équilibre du budget général de l’État couvrant leurs dépenses d’exploitation et d’investissement (ministère de l’Économie et des Finances, n.d.).

En raison de leur implantation régionale et locale, les Segma forment un instrument budgétaire de grande importance dans l’application des politiques publiques, or ils peuvent nuire à la cohérence de l’action publique. D’une part, les ressources des Segma sont constituées de transferts budgétaires et de recettes propres constituées principalement de rémunérations des prestations rendues. Les résultats réalisés par un Segma sur une année peuvent être reportés à l’année suivante (N+1), sans que cela apparaisse au niveau de la Loi des finances de l’année N+1. Dès lors, leur création devrait être limitée aux activités pour lesquelles elle procure un avantage indiscutable. D’autre part, les Segma dérogent au principe de spécialité et au caractère limitatif des crédits. En effet, leurs ressources se trouvent directement affectées aux dépenses, et leur montant peut être augmenté en cours d’exécution. Enfin, ils dérogent au principe d’annualité budgétaire car ils peuvent être planifiés sur plusieurs années.

La régionalisation représente une opportunité unique pour revoir et rationaliser les démembrements de l’État. Il serait en effet utile pour le Maroc d’évaluer la pertinence des démembrements de l’État à la lumière des objectifs de la régionalisation avancée, et de préciser leurs rôles et leur articulation avec les autres dispositifs institutionnels existants, dans le respect d’une architecture institutionnelle claire et efficiente.

En raison de leur place dans l’économie nationale et dans l’élaboration, la planification et l’exécution des politiques publiques, les entreprises et établissements publics (EEP) assument un rôle essentiel dans le développement économique et social du Maroc. Certains disposent de budgets relativement proches de ceux de leurs ministères de rattachement (par exemple, Autoroutes du Maroc a un budget très important en comparaison au budget du ministère de l’Équipement). Avec 92 milliards MAD de transferts budgétaires sur la période 2012-15, les EEP se révèlent globalement dépendants du budget de l’État. La cohérence de leur action avec celle de l’État constitue donc un enjeu fondamental pour les politiques publiques. Il faudrait donc :

  • Clarifier la notion d’EEP. Ceux-ci sont divers par la taille, le secteur d’activité, le statut juridique, le concours au service public, le niveau de la participation publique au capital et le degré de dépendance du budget de l’État. Cette clarification conduirait à distinguer les opérateurs de l’État - organismes distincts de celui-ci au statut juridique public ou privé, auxquels revient une mission de service public - des opérateurs économiques pour lesquels la collectivité publique s’avère surtout un actionnaire.

  • Améliorer l’information du Parlement sur les EEP. La principale source d’information du Parlement est le rapport sur les EEP annexé au projet de Loi de finance, ainsi que des rapports de la Cour des comptes sur ce secteur. Toutefois, ces documents regroupent des entités trop diverses. Pour une plus grande transparence, les informations communiquées au Parlement lors de l’examen des projets de lois de finances sur les transferts budgétaires de l’État vers les entreprises publiques seraient à classer en trois catégories : i) les dotations budgétaires destinées aux établissements publics non marchands qui assurent des missions d’intérêt général, à l’instar des administrations publiques ; ii) les subventions d’équipement et les dotations en faveur d’EEP en vue de leur recapitalisation ou la consolidation de leurs fonds propres ; iii) les subventions d’exploitation accordées à des EEP déficitaires exerçant une activité industrielle ou commerciale.

  • Indiquer en totalité les transferts budgétaires émanant du budget général de l’État en faveur des EEP dans les crédits alloués à chaque département ministériel en évitant, autant que possible, le recours au chapitre des charges communes. Les informations feraient également ressortir les concours financiers dont bénéficient certains EEP par l’intermédiaire des CST. Enfin, les informations communiquées au Parlement devraient mentionner les taxes parafiscales recouvrées par certains EEP ou collectées pour leur compte par l’État ou d’autres organismes publics (Cour des comptes, 2016).

  • Étendre le vote du Parlement concernant les EEP. Lors du vote de la Loi de finances, le Parlement se prononce sur les transferts budgétaires de l’État aux EEP. La décision d’établir les taxes parafiscales revient, en revanche, au pouvoir exécutif. Il serait donc souhaitable de réduire sensiblement le nombre de ces taxes.

  • Renforcer le contrôle de l’État sur les EEP et leur gouvernance. Les décisions de gestion des EEP sont prises par leurs organes propres de direction. L’État n’a donc qu’une vision incomplète de leur gestion quotidienne, voire de leurs options stratégiques, ce qui peut limiter la cohérence de leurs actions avec les orientations sectorielles. Pour pallier ces manques, la tutelle technique ministérielle devrait davantage veiller à ce que les EEP agissent en accord avec les politiques sectorielles et nationale arrêtées par l’État. Cela peut intervenir à travers l’amélioration de la gouvernance des EEP, la contractualisation de leur relation avec l’État - comme c’est déjà le cas pour certaines EEP, notamment dans le domaine de l’infrastructure - et à travers une participation active de l’État actionnaire.

  • Assainir et clarifier la situation financière des EEP. En premier lieu, il apparaît utile de prévenir les risques potentiels et lutter contre l’accumulation des arriérés de dettes en procédant à des restructurations formalisées des contrats-programmes. En second lieu, il se révélerait opportun de rationaliser les transferts financiers de l’État vers les EEP. Ceux-ci seraient à examiner par rapport à la politique budgétaire définie dans la politique générale du gouvernement. Les dotations en capital seraient préalablement justifiées par rapport aux objectifs définis par l’État actionnaire et assorties d’engagements des entreprises bénéficiaires à consigner dans des contrat-programmes.

La consolidation des comptes de l’État requiert l’harmonisation des dispositifs comptables

Une vision consolidée des comptes du secteur public ne saurait être concrétisée sans l’harmonisation des dispositifs comptables de l’ensemble des composantes du secteur public. En effet, l’incapacité du système comptable à éclairer l’ampleur des engagements pris et des risques financiers supportés contribue à masquer la performance financière véritable des différentes structures publiques. La consolidation comptable nécessite de poursuivre les efforts d’harmonisation et d’intégration des systèmes d’information financière et comptable, ainsi que l’harmonisation des dispositifs de contrôle de la qualité comptable. L’élaboration d’un référentiel de consolidation des comptes est un prérequis de la construction d’un modèle national de consolidation des comptes publics. Il consiste en la détermination et l’harmonisation des règles et méthodes à suivre par le processus de consolidation et les modalités de présentation des comptes consolidés, les caractéristiques de l’information consolidée et les utilisateurs de l’information contenue dans les comptes publics consolidés.

La régionalisation avancée offre une opportunité de renforcer la gouvernance budgétaire locale et de promouvoir la cohérence des politiques publiques nationales et locales

La Constitution de 2011 introduit la régionalisation avancée. Cette forme de décentralisation répond à une demande populaire forte et prévoit des compétences et des moyens nouveaux pour les collectivités locales. En contrepoint, elle fait naître, si elle n’est pas bien préparée, le risque d’une moindre cohérence de l’action publique. Le souci de cohérence justifie la coordination et l’équilibre des pouvoirs au niveau local entre l’élu de la collectivité territoriale, qui tire sa légitimité du suffrage universel, et le représentant de l’État désigné par le pouvoir central, garant de l’intérêt général national et chargé de contrôler la légalité financière de l’action des collectivités locales.

Il existe un besoin important d’amélioration de la cohérence de la gouvernance financière entre l’État et les collectivités locales, rendant plus équitable et durable la régionalisation avancée. Les collectivités territoriales sont des entités juridiques indépendantes, jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière, mais actuellement, leurs compétences et leurs moyens demeurent très réduits. Leurs dépenses et leurs ressources proviennent ou transitent pour l’essentiel par le budget de l’État. Les transferts de ce dernier constituent ainsi le tiers des ressources des communes marocaines. Les actions dans les territoires font souvent appel à des fonds extrabudgétaires (fonds Hassan II, fonds de développement régionaux). Les recettes fiscales des collectivités locales restent également mal connues du Parlement dans la mesure où la situation comptable préparée par la Trésorerie générale du Royaume n’accompagne pas le projet de Loi des finances de l’année.

L’opérationnalisation de la régionalisation implique un transfert de compétences au profit des collectivités locales concernées. Les lois organiques de 2015 (Lois n° 111-14, 112-14 et 1-113-114) prévoient les compétences propres des collectivités locales, les compétences transférées de l’État aux collectivités locales selon le principe de subsidiarité et les compétences partagées en fonction de chaque échelon territorial. Dans ce sens, les régions deviennent les collectivités prééminentes et sont principalement chargées de la conception des stratégies de développement économique et d’aménagement du territoire. Les provinces/préfectures deviennent les collectivités intermédiaires et ont pour vocation la promotion du développement social, notamment en milieu rural, et le renforcement de la mutualisation et la coopération entre les communes appartenant à leur territoire. Enfin, les communes constituent l’espace de mise en œuvre du développement local ; elles ont pour vocation la prestation de services de proximité aux citoyens (OCDE, 2017c).

Cette nouvelle répartition des compétences s’accompagne d’un transfert progressif et pragmatique des ressources financières et humaines de l’État vers les collectivités locales. En complément des dotations versées par le budget général de l’État, les régions bénéficient d’un transfert de 5 % des produits de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de l’impôt sur les sociétés. Au total, selon la Loi de finances 2017, les ressources financières des régions s’élèvent à 5.2 milliards MAD. Il apparaît cependant que les sommes mises à disposition des collectivités locales, notamment pour les investissements publics dans les communes, ne sont pas toujours dépensées (7 milliards MAD de fonds non consommés pour l’ensemble des collectivités territoriales à la fin de 2016 ; OCDE, 2017c). Afin de permettre une réforme réussie de la régionalisation, il serait donc utile de renforcer les capacités des décideurs publics locaux et de clarifier les rôles et missions de chaque acteur au niveau territorial (OCDE, 2017c). De plus, une meilleure harmonisation des fiscalités locale et de l’État passerait, d’une part, par l’harmonisation entre le système fiscal de l’État et celui des collectivités territoriales et, d’autre part, une pression fiscale globalement soutenable pour les citoyens et les entreprises.

La cohérence de la gestion financière de l’État et des collectivités locales intègre aussi la maîtrise de l’endettement de celles-ci. Il revient à l’État de veiller à la pérennité de l’équilibre budgétaire et financier, et à la maîtrise de l’endettement du secteur public local grâce à des normes et règles prudentielles de gestion budgétaire. L’emprunt des collectivités territoriales doit aussi rester suffisamment encadré et participer à la politique de soutenabilité de l’endettement du secteur public. Le Maroc introduit par étape la gestion budgétaire par la performance et a adopté une nouvelle LOLF applicable à l’État. Les lois organiques des collectivités locales introduisent la notion de programme8 , qui, une fois appliquée, permettrait d’améliorer la cohérence de l’action de l’État et des collectivités locales.

La régionalisation avancée implique le renouveau du système de contrôle et de reddition des comptes. Elle passe par la déconcentration des administrations financières et comptables de l’État, mises au service des collectivités locales. Elle implique le renforcement du partenariat entre ces services et les collectivités territoriales en matière de conseil financier, d’assistance juridique et de mise à niveau des capacités de gestion. Elle nécessite l’harmonisation du contrôle des finances publiques (État, EEP, collectivités territoriales). Elle tirerait profit du développement des contrôles budgétaires des cours régionales des comptes auxquelles appartiendrait un pouvoir de décision, et qui pourraient certifier les comptes des collectivités locales.

La convergence des normes de gestion des marchés publics, de la comptabilité et de la production de l’information financière impose l’harmonisation des règles et des procédures d’achat public entre l’État, les EEP et les collectivités territoriales (sur ce point, un projet de texte unifié est d’ailleurs en cours d’adoption). Elle requiert aussi le rapprochement de leurs dispositifs comptables et leurs systèmes d’information financière, facilitant la consolidation des comptes de tout le secteur public. La cohérence budgétaire, la convergence comptable et la mise en harmonie des décisions financières entre les finances de l’État et les finances locales sont, enfin, à consacrer dans la LOLF.

La gestion axée sur les résultats, un outil pour renforcer la cohérence des politiques publiques

Les dispositions concernant la gestion axée sur les résultats (GAR) de la LOLF n° 130-13 entreront en vigueur le 1er janvier 2018, ce qui aura des conséquences considérables sur l’ensemble de l’action publique. Tout d’abord, la logique des résultats remplacera la logique des moyens. Ensuite, l’approche managériale de l’administration, au service des citoyens, se substituera à l’approche juridique et technique en cours.

En modifiant l’architecture du budget des finances publiques, la LOLF permettrait de changer la manière dont sont conçues et mises en œuvre les politiques publiques, et de favoriser une plus grande cohérence de l’action publique. De surcroît, la GAR permet de s’inscrire dans une perspective budgétaire pluriannuelle et d’assurer la stabilité et la soutenabilité des politiques publiques sur le moyen terme. En somme, elle vise à améliorer la cohérence de l’action publique et favorise la logique de décision interministérielle et pluriannuelle.

La répartition du budget par programme, introduite par la LOLF, assure la cohérence interne des politiques publiques

Pour atteindre ces objectifs, la GAR requiert notamment la structuration de l’action publique autour de programmes encadrant la démarche de performance, ainsi que des indicateurs chiffrés permettant de mesurer les résultats et faisant l’objet d’une évaluation. En échange d’une plus forte responsabilité, la GAR accorde aux gestionnaires une liberté accrue dans la gestion de leurs crédits. Elle nécessite aussi une plus grande réflexion stratégique, l’identification des priorités, des objectifs pertinents et des moyens nécessaires pour chaque politique publique, et permet d’en mesurer les résultats.

La LOLF instaure une nouvelle logique de conception, de répartition et de contrôle du budget de l’État, qui est réorganisé autour d’une logique de résultats. À partir du 1er janvier 2018, le budget sera voté par finalité, dans le cadre d’enveloppes globales. Les informations qui l’accompagneront rendront compte des résultats attendus et obtenus. La discussion budgétaire portera sur la question des missions de l’État et des politiques publiques qu’il met en place, des moyens affectés à chacune de ces politiques et des acteurs responsables de leur mise en œuvre. Cette approche par programme permet d’assurer la cohérence globale des objectifs retenus et de justifier leurs choix pour chaque ministère.

De manière générale, la GAR est une forme d’organisation hiérarchique des objectifs et des moyens mis en œuvre pour atteindre les objectifs escomptés. En effet, il revient au pouvoir politique de définir les objectifs et de les classer de façon hiérarchique. Dans cette approche, les objectifs priment et les moyens sont au service de ces objectifs. Enfin, le budget de l’État constitue le moyen d’exécution de la politique générale du gouvernement qui, une fois approuvée par le Parlement, est ensuite déclinée par stratégies sectorielles.

Il en résulte une double nécessité de cohérence : d’abord, dans les différents éléments formant une politique publique réunis dans un programme ; puis, dans la méthode d’établissement, d’adoption, de mise en œuvre et d’évaluation de la GAR. En effet, à l’intérieur du programme, les projets ou actions doivent présenter entre eux des rapports logiques ou de causalité, tout en étant subordonnés à l’objectif fondamental du programme. Cela oblige à construire de véritables politiques publiques et assurer leur cohérence interne. Concernant la méthode d’établissement, d’adoption, de mise en œuvre et d’évaluation de la GAR, le programme s’avère précieux à plusieurs titres. Le service chargé de son élaboration se trouve obligé à une vision complète de tous les aspects du programme. Le Parlement se prononce en ayant une connaissance plus précise, systématique et organisée des objectifs stratégiques et des résultats des politiques de l’État, présentés dans les projets annuels de performances annexés aux projets de lois de finances. Le responsable de programme, chargé de son exécution, connaît les objectifs à atteindre et maîtrise mieux les moyens dont il dispose pour ce faire, de plus, il dispose des outils adéquats (indicateurs, projet de performance et rapport annuel de performance) pour en mener l’évaluation.

La GAR implique une logique interministérielle qui améliore l’articulation entre les politiques publiques

L’établissement, l’exécution et l’évaluation de certaines grandes politiques de l’État requièrent parfois de dépasser le cadre ministériel, d’autant plus que la constitution et la définition des compétences d’un ministère tiennent souvent à une logique électorale. Par exemple, la sécurité routière peut constituer un véritable enjeu politique national et justifier la création d’un programme qui implique des services appartenant aux ministères chargés des routes, des forces de l’ordre, de l’aménagement du territoire, de la lutte contre l’alcoolémie, et du contrôle du bon état des véhicules. Pour garantir la cohérence des politiques impliquant plusieurs ministères au Maroc, des comités interministériels, tels que le comité de concertation pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, ou le comité permanent de la politique de la ville, sont instaurés. Il se révélerait aussi envisageable de regrouper dans un même programme, confié à un responsable de programme, certaines grandes politiques de l’État nécessitant de dépasser les attributions d’un seul ministère. Actuellement, ce regroupement en un programme interministériel s’avère impossible, car la LOLF dispose dans son article 39 que les programmes correspondent à des politiques publiques sectorielles confiées chacune à un seul ministère. Dans la mesure où la mise en œuvre réelle et généralisée de la GAR au Maroc est encore à ses débuts, et que sa maîtrise par les différents départements nécessite du temps, le choix de se limiter actuellement aux programmes ministériels semble justifié. Cependant, il serait utile ultérieurement d’envisager une évolution de la LOLF dans le sens de la création de programmes interministériels pour les grandes politiques publiques faisant intervenir un nombre réduit de ministères, qui faciliterait la mise en œuvre intégrée et cohérente de ces politiques, et renforcerait l’efficacité de l’action publique.

À défaut d’instaurer des programmes interministériels, pour chaque politique transversale, il pourrait être utile de désigner un ministre « chef de file » qui coordonnerait les activités de l’État relevant des différents programmes concernés, afin d’obtenir des résultats socio-économiques communs. Chaque ministre chef de file aurait la responsabilité de concevoir le ou les documents budgétaires relatifs à la politique transversale dont il aurait la responsabilité, en vue de les présenter au Parlement.

Le cadre de dépenses à moyen terme (CDMT) permet d’assurer la cohérence de l’action publique dans le temps

La cohérence temporelle entre les différentes politiques publiques est nécessaire. L’élaboration des politiques et la planification peuvent se trouver déconnectées les unes des autres et du budget, et ne sont pas bornées par les ressources disponibles ou les priorités stratégiques. Le processus de budgétisation annuel vise donc plus le maintien d’un certain équilibre que l’allocation des ressources sur la base de choix politiques clairs pour atteindre des objectifs stratégiques. Le besoin de maîtrise du temps pour l’action publique peut se résoudre par divers moyens : à défaut de l’existence d’un Plan national ou d’un Cadre de développement, le budget de l’État s’impose comme le document de référence de la programmation pluriannuelle des choix et projets de l’État.

La programmation pluriannuelle vise à établir le lien indispensable entre les stratégies à moyen ou long terme et le budget annuel en définissant la voie pour atteindre les objectifs des plans ou stratégies, et en encadrant les adaptations du budget nécessaires à leur mise en œuvre. Elle ambitionne trois objectifs majeurs :

  • Renforcer la discipline budgétaire dans sa globalité, y compris la pérennité des politiques budgétaires et sectorielles, tout en s’assurant de la compatibilité de l’impact des politiques budgétaires avec les ressources financières de l’État et le cadre macroéconomique.

  • Consolider l’efficacité de la répartition intersectorielle des ressources par le développement de méthodes et d’outils assurant la relation entre les stratégies des politiques publiques et leur traduction concrète à travers le budget.

  • Améliorer la performance opérationnelle en renforçant l’efficacité et l’efficience dans les prestations de services publics, en donnant aux gestionnaires une plus longue perspective dans leurs projets et en leur offrant un cadre de suivi de la performance.

Le CDMT, élément d’une gestion budgétaire fondée sur les objectifs et résultats, est un instrument indispensable pour donner plus de clarté aux choix stratégiques. Destiné à assurer la viabilité des politiques budgétaires et à définir un chemin temporel pour atteindre les objectifs et procéder aux changements, le CDMT permet de tenir compte des priorités et des contraintes financières et de donner de la prévisibilité aux gestionnaires. Il constitue une étape entre le budget annuel et la définition de la stratégie globale du gouvernement (pour le CDMT global) ou de la stratégie sectorielle d’un ministère (pour le CDMT sectoriel). Il garantit, au cours de la procédure budgétaire, que le budget de l’année et les budgets suivants respecteront certaines exigences, et assure la cohérence entre le budget annuel et les budgets des années ultérieures dont les grandes lignes – le cadre budgétaire à moyen terme – sont déterminées au début de la procédure budgétaire. De manière générale, le CDMT renforce la programmation budgétaire pluriannuelle et accroît la visibilité des choix stratégiques. Il peut être utilisé pour assurer que les politiques publiques, quand elles sont reliées entre elles, sont planifiées et budgétisées de façon cohérente.

Tableau de recommandations

1. Assurer que la vision du développement du Maroc soit déclinée en objectifs prioritaires clairs et partagés

1.1. Doter le Maroc d’un document d’orientation de politique générale à long terme, ou d’une série d’objectifs prioritaires bien établis et partagés.

2. Améliorer la planification et l’élaboration des stratégies sectorielles

2.1. Assurer que toutes les stratégies aient une vision.

2.2. Budgétiser chaque stratégie pour faciliter la priorisation au sein et entre les stratégies.

2.3. Avoir des horizons temporels précis pour chaque stratégie.

2.4. Définir au préalable les acteurs impliqués et leurs responsabilités dans la mise en œuvre des stratégies.

2.5. Assurer que l’élaboration des stratégies prenne en compte les stratégies existantes.

3. Renforcer la coordination des politiques publiques

3.1. Évaluer l’expérience des contrat-programmes pour en tirer des enseignements utiles à l’élaboration d’un cadre global de contractualisation.

3.2. Institutionnaliser l’approche interministérielle :

  • Réactiver les comités interministériels peu (ou pas) dynamiques et veiller à la tenue régulière des sessions prévues pour véritablement développer une culture du travail collectif sur des sujets transversaux.

  • Évaluer leur pertinence en fonction de leurs objectifs, de leurs représentants et de leurs modes de fonctionnement.

3.3. Renforcer les capacités d’impulsion du CDG (Cabinet du Chef du gouvernement et instances y dépendant) afin de garantir une approche commune, orientée par politique plutôt que par ministères.

3.4. Impliquer plus régulièrement les différentes parties prenantes lors de l’élaboration des stratégies et dans leur mode de gouvernance pour renforcer leur appropriation par les acteurs.

4. Soutenir la prise de décision par un système intégré de suivi de la réalisation des stratégies

4.1. Mieux encadrer le partage et l’accès aux informations pour accroître leur utilisation au sein et à l’extérieur de l’administration.

4.2. Accompagner les stratégies sectorielles d’indicateurs plus spécifiques à des filières prioritaires et d’indicateurs de résultats intermédiaires.

4.3. Sélectionner un petit nombre d’indicateurs de performance pour chaque stratégie au sein d’un processus rigoureux de sélection et élargir le champ des indicateurs pour inclure des indicateurs sociaux.

5. Développer une culture de l’évaluation et du rendre compte au sein de l’administration

5.1. Homogénéiser les pratiques et uniformiser les méthodologies.

5.2. Systématiser l’évaluation à mi-parcours et finale des stratégies.

5.3. Envisager la mise en place d’un organe indépendant des départements ministériels et agences d’exécution chargés de l’évaluation des stratégies et programmes sectoriels.

5.4. Développer une culture du rendre compte, avec notamment une définition claire des responsabilités de chaque acteur et en tablant sur la réforme de la gouvernance locale.

6. Renforcer les ressources humaines

6.1. Développer les capacités des ressources humaines au niveau de chaque département ministériel en matière de planification, de gestion de projet et de suivi-évaluation de chaque stratégie sectorielle.

7. Établir une situation consolidée des comptes du secteur public

7.1. Respecter de façon stricte les dispositions de la LOLF relatives à la limitation des reports des crédits d’investissement à 30 % des crédits de paiement et réduire le recours aux taxes parafiscales. En effet, l’usage excessif des exceptions aux règles budgétaires prive les documents de leur cohérence, unité, universalité et annualité, tout en amenuisant la portée du vote parlementaire.

7.2. Réduire la part des CST dans le budget de l’État.

En 2016, les 74 CST représentaient 17 % du budget de l’État, près de la moitié de leur montant concernait le développement territorial et les comptes spéciaux relatifs à la sécurité intérieure et extérieure du pays restaient exclus des débats et du contrôle parlementaire. Ces éléments altéraient la visibilité de l’affectation d’une part significative des dépenses de l’État aux différentes politiques publiques. Il serait donc souhaitable de limiter strictement la création des CST, conformément aux dispositions de l’art. 25 de la LOLF.

7.3. Restreindre la création des Segma, qui forment un instrument budgétaire de grande importance dans l’application des politiques publiques, mais peuvent nuire à la cohérence de l’action publique.

Il convient, en conséquence, de clarifier la notion d’EEP ; d’améliorer l’information du Parlement sur les EEP ; d’indiquer en totalité les transferts budgétaires émanant du budget général de l’État en faveur des EEP dans les crédits alloués à chaque département ministériel ; de renforcer le contrôle de l’État sur les EEP et leur gouvernance ; et d’assainir et clarifier la situation financière des EEP. Enfin, il serait bon d’évaluer la pertinence des démembrements de l’État à la lumière des objectifs de la régionalisation avancée.

7.4. Harmoniser les dispositifs comptables de l’ensemble des composantes du secteur public.

Pour ce faire, il s’agit de poursuivre l’intégration des systèmes d’information financière et comptable, rapprocher les dispositifs de contrôle de la qualité comptable, et élaborer un référentiel de consolidation des comptes.

7.5. Améliorer la cohérence de la gouvernance financière dans le contexte de la régionalisation avancée.

Cette dernière implique le transfert de compétences et de ressources matérielles, financières et humaines considérables de l’État vers les collectivités locales. Pour la rendre plus soutenable, équitable et durable, il faut maîtriser l’endettement des collectivités locales et renouveler leur système de contrôle et de reddition des comptes, ainsi que faire converger les normes de gestion des marchés publics, de la comptabilité et de la production de l’information financière.

Il en résulte la nécessité de clarifier les rôles et responsabilités des acteurs locaux à chaque échelon territorial ; évaluer les moyens financiers nécessaires aux collectivités locales ; renforcer les capacités des acteurs locaux ; maîtriser l’endettement du secteur public local ; repenser le système de contrôle et de reddition des comptes entre l’État et les collectivités locales ; harmoniser les règles et les procédures d’achat public entre l’État, les EEP et les collectivités territoriales.

8. Poursuivre les réformes associées à l’adoption de la GAR

8.1. Continuer la mise en œuvre de la LOLF en structurant la répartition du budget par programme et autour d’indicateurs de résultats. En effet, en modifiant l’architecture du budget des finances publiques, la LOLF change la façon dont les politiques publiques sont conçues et mises en œuvre, et améliore par conséquent leur cohérence.

8.2. Envisager, une fois que la GAR sera généralisée et que ses outils seront maîtrisés par l’ensemble des départements ministériels, le développement de programmes interministériels à travers :

  • L’amendement de la LOLF, de sorte à permettre des programmes interministériels. En effet, l’article 39 de la LOLF prévoit actuellement que le programme correspond à des politiques publiques sectorielles, confiées à un seul ministère. Mais, en raison de la souplesse de gestion qu’apporteraient les programmes intégrant des politiques sectorielles confiées à divers ministères, il serait utile d’envisager ultérieurement cette évolution de la LOLF.

  • À défaut de cette évolution, désigner un ministre « chef de file » à qui il reviendrait de coordonner les activités de l’État relevant des différents programmes contribuant à une même politique publique. En effet, lorsqu’une politique publique intègre des activités relevant de différents programmes, le Chef du gouvernement pourrait désigner un ministre chargé d’organiser les activités et ayant la responsabilité de concevoir les documents budgétaires relatifs en vue de les présenter au Parlement.

8.3. Adopter un CDMT global afin de s’assurer de la cohérence de l’action publique dans le temps. En effet, le Maroc s’est doté de CDMT sectoriels. Il serait utile de développer un CDMT global qui aiderait à accroître la visibilité des choix stratégiques et assurer que les politiques publiques, quand elles sont reliées entre elles, soient planifiées et budgétisées de façon cohérente.

Références

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ANNEXE 5.A1. Liste des stratégies et documents de politiques nationales pris en compte dans l’analyse de la cohérence des politiques publiques

Ministère de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie numérique

  • Plan d’accélération industrielle : de l’émergence aux écosystèmes performants 2014-20

  • Maroc Digital 2020

  • Maroc Numeric

Ministère de l’Équipement et des Transports

  • Stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique 2010-15

Ministère délégué auprès du ministre de l’Industrie, du Commerce de l’Investissement et de l’Économie numérique, chargé du Commerce extérieur

  • Maroc Export +

  • Plan national de développement des échanges commerciaux 2014-2016

  • Plan Rawaj

Ministère de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement

  • Stratégie des énergies renouvelables // Stratégie nationale d’efficacité énergétique à l’horizon 2030

  • Stratégie énergétique nationale

Ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime

  • Stratégie de développement et de compétitivité du secteur halieutique marocain à l’horizon 2020

  • Plan Maroc vert

Ministère de l’emploi

  • Stratégie nationale pour l’emploi

Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique

  • Vision stratégique de la réforme 2015-2030

Ministère de l’Éducation nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique

  • Stratégie nationale de la formation professionnelle 2021

Notes

← 1. Antigua et Barbuda, Argentine, Brésil, Belize, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Salvador, Guatemala, Haïti, Honduras, Mexico, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Uruguay, Venezuela.

← 2. Le budget est le document primordial en matière de politique gouvernementale. Il doit être exhaustif et couvrir l’ensemble des dépenses et des recettes de l’État de façon à permettre de comparer les différentes options (OCDE [2002], « Transparence budgétaire: Les meilleures pratiques de l’OCDE », Revue de l’OCDE sur la gestion budgétaire, vol. 1/3, https://doi.org/10.1787/budget-v1-art14-fr).

← 3. Accompagner le projet de Loi de finances d’un rapport sur les comptes consolidés du secteur public est facultatif. Le projet de Loi de finances de 2017 n’a pas été accompagné d’un tel rapport.

← 4. Les dépenses de l’État mentionnées incluent les dépenses d’investissement (61 392 millions MAD), mais pas l’amortissement de la dette publique (40 907 millions MAD).

← 5. Cette règle suppose que les recettes soient versées dans une caisse unique où l’origine des fonds est indéterminée.

← 6. Le projet de Loi de finances pour 2017 prévoit que le montant total des charges hors dépenses relatives aux remboursements, dégrèvements et restitutions fiscaux s’élève à 393.02 milliards MAD. De leur côté, les ressources s’élèvent à 373.1 milliards MAD. Le solde du budget de l’État (hors produits des emprunts et hors amortissement de la dette publique à moyen et long terme) ressort à 49.30 milliards MAD. Il était de 53.66 milliards MAD en 2016 (ministère de l’Économie et des Finances, « Projet de loi de finances pour l’année 2017, Rapport sur les services de l’État gérés de manière autonome ».

← 7. Dahir n° 1-15-62 du 14 chaabane 1436 (2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13 relative à la Loi de finances.

← 8. Dahir n° 1-15-83 du 7 juillet 2015 portant promulgation de la loi organique n° 111-14 relative aux régions, art. 170 à 172 ; Dahir n° 1-15-84 du 7 juillet 2015 portant promulgation de la loi organique n° 112-14 relative aux préfectures et provinces, art. 149 à 151 ; Dahir n° 1-15-85 du 7 juillet 2015 portant promulgation de la Loi organique n° 113-14 relative aux communes, art. 157 à 159.

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