Chapitre 1. Vue d’ensemble : Performances et contraintes du développement multidimensionnel au Maroc

Ce chapitre dresse un résumé du premier volume de l’Examen multidimensionnel du Maroc en se basant sur les analyses et les principaux résultats des chapitres suivants. Dans un premier temps, le chapitre présente les performances du pays sur le plan macroéconomique, du bien-être des citoyens et institutionnel. Il s’intéresse ensuite au modèle de développement marocain et aux choix d’orientation des politiques publiques qui en découlent, avant de souligner leur insuffisante cohérence. Sont enfin présentées les principales contraintes au développement : formation des compétences, dynamique de compétitivité et efficacité de l’action publique.

  

Le Maroc est engagé depuis les années 90 sur une trajectoire de développement stable, qui s’est traduite par d’importantes améliorations des conditions de vie. Une croissance soutenue, proche de 5 % par an, et des politiques publiques déterminées, ont permis une importante réduction de la pauvreté et des résultats positifs dans des ingrédients clés du développement humain, tels que l’accroissement du taux de scolarisation primaire ou de la longévité.

Le dynamisme du développement demeure cependant insuffisant pour atteindre l’ambition affichée de rejoindre les pays émergents et, à terme, de converger avec les pays avancés. En effet, la convergence des niveaux de revenus avec ceux des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) demanderait une croissance soutenue, supérieure à 7 % par an. De même, si les politiques volontaristes de transformation productive mises en œuvre depuis le début des années 2000 ont donné lieu à l’émergence de nouveaux secteurs manufacturiers, leur poids dans l’économie ne suffit pas à faire contrepoids au déficit structurel de la balance commerciale ou à la perte de vitesse de la création d’emplois dans les secteurs manufacturiers traditionnels.

Les succès marocains se sont bâtis sur un modèle de développement propre, construit au fil de l’histoire économique du pays par un certain nombre de grands choix d’orientation. Ce modèle se caractérise par un rôle affirmé de l’État dans l’économie, notamment en termes d’investissement, par la primauté de la stabilité politique, économique et sociale, par le choix de l’ouverture économique et par une articulation des politiques sociales en faveur de groupes vulnérables.

Le passage à la vitesse supérieure requiert une stratégie qui revisite le modèle de développement et sa mise en œuvre face à ses limites et aux transformations de l’économie mondiale. Ce modèle subit aujourd’hui d’importants déséquilibres, qui poussent à sa transformation. Tel est le cas, par exemple, de la réforme de la compensation. Ayant joué un rôle important dans le soutien du pouvoir d’achat et de la demande intérieure, le système de compensation était devenu trop onéreux dans un contexte de prix internationaux de l’énergie élevés. Sa réforme a permis la sauvegarde de l’équilibre budgétaire et nécessitera la mise en place d’instruments complémentaires pour remplir la fonction de stabilisation du pouvoir d’achat.

L’Examen multidimensionnel du Maroc, mené par l’OCDE, a pour objectif de soutenir les décideurs politiques marocains dans l’élaboration de stratégies appropriées visant à accélérer le développement du pays (encadré 1.1). Ce volume est le premier produit de cet examen. Il présente un état des lieux des diagnostics de développement et identifie les obstacles clés au développement du royaume. Ce premier chapitre donne un aperçu du volume et est suivi par trois chapitres se focalisant respectivement sur les performances macroéconomiques et le modèle de développement (chapitre 3), sur la compétitivité et la transformation structurelle (chapitre 2) puis sur le poids des inégalités et le rôle de la croissance économique dans le soutien d’une société inclusive (chapitre 4).

Encadré 1.1. L’Examen multidimensionnel du Maroc soutient le pays dans son développement

L’objectif de l’Examen multidimensionnel du Maroc est de soutenir les décideurs politiques marocains dans l’élaboration de stratégies appropriées visant à accélérer le développement du pays. Les examens multidimensionnels par pays de l’OCDE cherchent à appuyer l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies appuyant un processus de développement économique durable et inclusif qui accroît le bien-être des citoyens. Au Maroc, l’examen vise à accompagner les autorités dans l’identification des contraintes principales au développement et à apporter des réponses quant aux politiques à mettre en place pour les lever.

Le bien-être des individus est placé au centre et guide l’analyse des contraintes au développement. Dans les examens multidimensionnels par pays, le développement est perçu comme un processus de renforcement des capacités économiques, sociales et institutionnelles des sociétés, leur permettant de traduire des ressources monétaires, humaines et naturelles en un bien-être accru pour leurs citoyens. Le caractère multidimensionnel du développement constitue le fondement de l’analyse, et permet de rendre explicites les complémentarités et les arbitrages entre politiques publiques.

La méthodologie de l’examen multidimensionnel a été ajustée pour le Maroc. La première étape, qui correspond à ce rapport, dresse un état des lieux des analyses de croissance et des dynamiques de développement. Ce travail est mené à partir d’un examen des performances du pays dans un certain nombre de domaines économiques, sociaux, environnementaux et institutionnels et capitalise les travaux de veille et d’analyse existants. Une deuxième composante se concentrera sur un nombre limité de sujets clés pour le développement du Maroc afin d’accompagner la formulation de stratégies cohérentes permettant d’accélérer le développement du royaume.

L’évaluation des performances du Maroc se fonde sur une analyse comparative. L’analyse des performances d’un pays prend tout son sens lorsque comparée à des pays similaires, ou des pays concurrents. C’est pourquoi le Maroc est comparé à 11 pays tout au long de l’examen multidimensionnel, décrits en encadré 1.A1. Au-delà de l’analyse des performances, les pays de comparaison permettent également de tirer des enseignements et leçons constructives pour le Maroc en matière d’élaboration, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques publiques.

L’approche participative se trouve également au cœur de la démarche des examens multidimensionnels. Tout au long de ces examens, des outils de prospective stratégique sont utilisés pour tester et guider l’analyse avec le point de vue des priorités nationales et des perceptions des citoyens, comme par exemple pour mettre en lumière les éléments clés d’une vision de développement (encadré 1.4). Au Maroc, cette dynamique consultative vise à appréhender l’économie politique tacite tout en assurant le caractère pragmatique et réaliste des résultats. Les analyses étant ainsi spécifiques au Maroc, les décideurs politiques sont à même de maximiser les retombées des outils politiques, afin de réaliser les objectifs prioritaires du développement.

Le diagnostic identifie trois contraintes clés intimement liées. En premier lieu, la formation de compétences est au cœur des défis de développement du Maroc. En deuxième lieu, malgré des conditions cadres favorables, l’économie peine à développer des secteurs dynamiques, compétitifs à l’international et à même de générer de l’emploi et entraîner le reste de l’économie. En troisième lieu, il existe plusieurs contraintes à l’efficacité de l’action publique, notamment le besoin de mise en cohérence de politiques sectorielles fortes.

Ce premier chapitre puise dans les analyses contenues dans ce volume pour d’abord présenter un état des lieux des performances du Maroc en termes de développement sous trois plans : macroéconomique, bien-être des personnes et développement institutionnel. Il présente ensuite une vision stylisée du modèle de développement marocain, pour souligner les déséquilibres dont il pâtit et les besoins d’adaptation par rapport aux conditions extérieures changeantes. La question de la cohérence des politiques est déclinée ensuite, pour finir par une présentation des contraintes clés au développement.

Le Maroc réalise de bonnes performances dans un environnement parfois à risque

Le Maroc se caractérise par une forte stabilité économique et politique. La croissance économique, très volatile pendant les années 80 et 90, s’est stabilisée dans les années 2000, avec une réduction de moitié de l’écart-type de la croissance annuelle. Le taux d’inflation est stable et bas, avec une moyenne annuelle de 1.6 % entre 1997 et 2014. Au niveau politique, les retombées du Printemps arabe ont été moins marquées que dans des pays voisins, le fort attachement citoyen au système monarchique et à la personne du Roi ainsi que la refonte de la Constitution en 2011 ayant joué des rôles importants.

Une stabilité macroéconomique mais un certain manque de dynamisme

La stabilité macroéconomique est un important atout du Maroc. La croissance est stabilisée autour de 4 % en moyenne en dépit de la crise économique. L’ampleur du déficit budgétaire se réduit progressivement grâce notamment aux réformes du système de compensation, favorisées par l’évolution à la baisse des prix du pétrole. Sur le plan monétaire, l’inflation est maîtrisée et les réserves en devises en nette amélioration. Toutefois, le poids du secteur agricole (autour de 12 % de l’économie) et sa sensibilité aux aléas climatiques restent sources de volatilité pour l’économie marocaine.

Le rythme de la croissance est modeste et freiné par le contexte international. La croissance économique a atteint 4.7 % en moyenne pendant les années 2000. Depuis, elle a ralenti en raison de l’atonie de la reprise en Europe, principal partenaire commercial, et de la décélération de la demande intérieure. Ce niveau de croissance, s’il est comparable à celui de pays similaires, n’est pas suffisant pour inscrire clairement le Maroc dans une trajectoire de convergence avec les pays développés. De plus, la contribution de la croissance au niveau de vie multidimensionnel des Marocains est relativement modeste par rapport à d’autres pays et à d’autres sources d’amélioration, en particulier en termes de santé (chapitre 4).

Le contexte menace aussi les gains en termes de stabilité. L’investissement public et parapublic et le soutien à la demande intérieure ont joué depuis l’année 2000 un rôle important dans la dynamique de croissance. Le contexte international menace de tarir les sources de financement du développement marocain, or le poids de la dette publique s’alourdit. Par ailleurs, la dégradation du contexte sécuritaire dans la région affecte le secteur du tourisme, important fournisseur de devises et créateur d’emplois.

L’activité du secteur privé reste insuffisante pour accroître ses contributions au financement de l’économie et accélérer le processus de transformation structurelle. Au travers de multiples réformes, le pays a amélioré l’environnement des affaires, notamment en matière de création d’entreprises et d’enregistrement des propriétés. Un soutien marqué est également apporté par les autorités à des secteurs porteurs, les « métiers mondiaux » du Maroc (aéronautique, automobile, agroalimentaire, textile, électronique), sélectionnés en raison de leur potentiel de développement et leurs retombées sur l’économie nationale. Parallèlement, le pays diversifie ses partenaires de manière progressive grâce à une politique commerciale de plus en plus orientée vers les pays émergents et d’Afrique subsaharienne. Malgré ces succès, le poids des nouveaux secteurs dynamiques en termes d’emploi et d’exportations demeure insuffisant pour porter une dynamique de croissance forte.

La dynamique de transformation structurelle de l’économie marocaine reste confrontée à de nombreux défis. D’après les données de la Banque mondiale, la part du secteur manufacturier dans la valeur ajoutée diminue depuis le milieu des années 80 et stagne depuis 2007. Si l’agriculture a perdu de l’importance en faveur d’autres secteurs depuis les années 80, ce processus se fait à une vitesse bien plus lente qu’il n’a eu lieu dans des pays avec des industrialisations plus mûres, comme la Malaisie et la Turquie, ou dans des pays en croissance rapide comme le Viet Nam (chapitre 2). L’absence d’intégration économique régionale et la petite taille du marché marocain rendent indispensable le bon positionnement sur les marchés internationaux des produits marocains confrontés à une concurrence importante, notamment en provenance des pays émergents. Par ailleurs, le développement de certains pans de l’économie, comme les infrastructures (de transport, d’énergie), le monde agricole, ou encore le tissu industriel, est affecté par les problématiques environnementales.

Le bilan des performances de développement au niveau individuel est mitigé

Le bien-être des citoyens marocains affiche un bilan mitigé. L’OCDE a développé un cadre de mesure du bien-être (encadré 1.3) qui a été appliqué au cas du Maroc (graphique 1.1). Les indicateurs relatifs aux possibilités de consommation, au degré de vulnérabilité et à la satisfaction à l’égard de la vie présentent des performances supérieures, voire largement supérieures, à celles attendues compte tenu du niveau de développement du pays. En revanche, la qualité des liens sociaux, l’emploi, la santé et surtout l’éducation, sont des dimensions dans lesquelles le Maroc enregistre de mauvaises performances. Dans les autres domaines, les résultats sont contrastés et varient en fonction des indicateurs concernés.

Graphique 1.1. Les performances en termes de bien-être sont contrastées
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Note : Ce graphique met en évidence les forces ou les faiblesses pour chacune des dimensions du bien-être au Maroc en fonction de la performance attendue pour chacune d’entre elles (cercle noir). La performance attendue représente la performance escomptée pour le Maroc compte tenu de son niveau de produit intérieur brut (PIB) par habitant. Une ligne noire plus longue correspond à un domaine qui constitue une force relative et une ligne noire plus courte à un domaine de faiblesse relative.

Ce graphique se base sur des régressions bivariées calculées entre deux types de variables : les résultats sur les indicateurs de bien-être considérés comme variables dépendantes et le PIB par habitant considéré comme variable indépendante, et permettent de calculer le coefficient de corrélation entre les deux types de variables. Ce coefficient est ensuite appliqué au PIB actuel du Maroc afin de calculer la valeur attendue des différents indicateurs. Les valeurs attendues et actuelles du Maroc sont ensuite comparées pour chaque indicateur : la différence entre la valeur attendue et la valeur actuelle d’un indicateur est exprimée en nombre d’écarts-types. Les valeurs attendues pour chaque indicateur sont calculées sur la base d’un échantillon de 150 à 158 pays, justifiant d’une population supérieure à un million d’habitants.

Source : Calculs des auteurs à partir de Gallup Organization (2015 ou dernières données disponibles), Gallup World Poll, http://www.gallup.com/ ; Transparency International (2015), Indice de perception de corruption, http://www.transparency.org/ ; Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD, 2015 ou dernière année disponible), http://hdr.undp.org/fr/data ; Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco, 2015 ou dernière année disponible), http://data.uis.unesco.org/ ; Banque mondiale (2015 ou dernière année disponible), http://data.worldbank.org/.

 https://doi.org/10.1787/888933475565

Le niveau de vie est relativement élevé mais la situation est préoccupante sur le marché de l’emploi

La capacité de consommation des Marocains est adéquate. Le revenu national brut par habitant, calculé en parité de pouvoir d’achat (PPA), s’élève à 6 957 dollars américains (USD) en 2014. Plus de deux tiers des Marocains sont satisfaits de leur niveau de vie, faisant écho à la hausse soutenue du taux de croissance de la dernière décennie. Ils disposent d’un niveau de revenu suffisant pour se nourrir et se loger décemment, 90 % des personnes interrogées jugeant leurs ressources financières suffisantes pour se loger (Gallup, 2015). Ces bons résultats s’inscrivent dans la dynamique d’une forte réduction du taux de pauvreté, passé de 21 % en 1985 à 4 % en 2014 (chapitre 4).

La situation en matière d’emploi paraît cependant préoccupante, tant en termes de quantité que de qualité. Selon les estimations nationales, seulement 43 % de la population en âge de travailler avait un emploi en 2015 (HCP, 2015a), bien en deçà du niveau d’emploi attendu, estimé à 60 %. Les jeunes, les diplômés et les femmes restent les groupes les moins intégrés sur le marché du travail. En 2015, le taux de chômage des moins de 24 ans était de plus de 20 %. Ce chiffre est plus élevé en milieu urbain (39 % en 2015) et concerne également les plus diplômés (21.2 % des diplômés de l’enseignement supérieur en 2015, HCP, 2015a). En outre, les emplois ne sont pas nécessairement de qualité : plus d’un sur deux est considéré comme vulnérable. Ainsi, plusieurs défis pèsent sur le dynamisme du marché du travail, tels que l’insuffisante création d’emplois, l’inadéquation entre l’offre de formation et les besoins du marché, ainsi que les rigidités de la réglementation du travail (chapitre 4).

Les réformes entreprises ces dernières années ont permis d’accélérer l’accès aux infrastructures de base mais les niveaux de satisfaction des usagers restent faibles. La couverture nationale en installations sanitaires améliorées (accès à des toilettes intérieures équipées de chasse d’eau) est aujourd’hui supérieure à celle attendue, passant de 52 % en 1990 à 77 % en 2015 avec des progrès considérables en zones rurales (Banque mondiale, 2015). À l’inverse, la satisfaction des Marocains à l’égard de l’offre de logement de qualité et des infrastructures routières (moins de 40 % étant satisfaits) est inférieure au niveau attendu (Gallup, 2015).

En termes de qualité de vie, la santé, et surtout l’éducation, tirent les performances du Maroc vers le bas

Les politiques volontaristes du gouvernement en matière de santé ont permis une nette amélioration des indicateurs objectifs de santé. L’espérance de vie s’est considérablement allongée ces dernières années, passant de 48 ans en 1960 à 74 ans en 2014, un âge supérieur à la valeur attendue. Les taux de mortalité infantile ont été pratiquement divisés par dix sur la même période mais restent en deçà des niveaux escomptés.

L’accès aux soins reste cependant difficile, et les niveaux de satisfaction des Marocains à l’égard de leur état de santé et du système de santé restent faibles. Seulement un Marocain sur quatre se déclare satisfait de l’offre de soins, ce qui témoigne de la persistance de dysfonctionnements au sein du système de santé (Gallup, 2015). Dans une moindre mesure, l’enquête du Haut-commissariat au plan (HCP) de 2012 sur le bien-être confirme également cette tendance : 63 % des personnes interrogées jugent faibles ou très faibles la qualité des services de santé. En effet, l’accès aux soins est difficile en raison du nombre insuffisant de structures de soins et de professionnels de santé, et d’une répartition déséquilibrée de l’offre de soins sur le territoire (voir chapitre 4). De plus, les dépenses des ménages en matière de santé sont élevées compte tenu du développement du pays, et la couverture maladie n’est pas encore universelle. Une part de 62 % des Marocains est couverte par l’Assurance maladie obligatoire de base (AMO) ou le Régime d’assistance médicale (Ramed) en 2015. L’état de santé des Marocains s’en trouve affecté avec près d’une personne sur trois déclarant souffrir de problèmes de santé qui les pénalisent dans leur vie quotidienne.

Au Maroc, la qualité des liens sociaux paraît relativement faible. La qualité du réseau social, tant amical que familial, influence positivement le bien-être individuel mais également le bien-être collectif en créant ou en renforçant des valeurs communes. Ils ne sont en effet que 65 % à avoir quelqu’un sur qui compter en cas de problème, contre 75 % pour la moyenne mondiale (Gallup, 2015). Les Marocains aident volontiers leurs proches ; la moitié d’entre eux reporte avoir porté assistance à un inconnu au cours des douze derniers mois, chiffre en ligne avec celui des pays de comparaison (Gallup, 2015). Ils sont en revanche peu enclins à le faire via des actions bénévoles ou des dons en faveur des réseaux associatifs (moins de 5 % le font soit l’un des taux les plus bas au niveau mondial - Gallup, 2015 et World Values Survey, 2011). Cette caractéristique est potentiellement liée à la pratique du Zakat al Fitr (aumône de rupture). Les résultats de l’enquête nationale sur le bien-être confirment cette tendance, plus de la moitié des Marocains (54 %) se déclarant peu ou pas satisfaits de la vie familiale et de l’environnement sociétal.

La présence de la corruption affecte la participation à la vie publique. Au cours des dernières années, le Maroc a engagé diverses réformes pour prévenir et lutter contre ce fléau. La Constitution de 2011 institue des exigences accrues dans le domaine de l’intégrité et de la lutte contre la corruption, en créant une diversité d’institutions indépendantes. Une stratégie nationale de prévention et de lutte contre la corruption a été mise en place en 2016 (encadré 1.2). Cependant, ces pratiques semblent encore importantes dans la vie des Marocains. L’indice de perception de la corruption (IPC), publié par l’organisation non gouvernementale (ONG) Transparency International, classe les pays en fonction du degré de corruption perçu dans les administrations publiques et la classe politique. En 2015, le Maroc se classe 88ème sur 167 pays (contre les 45ème et 76ème rangs respectivement pour la Jordanie et la Tunisie). L’ONG explique que la corruption s’est banalisée dans les secteurs essentiels au fonctionnement du pays comme la justice, la police, la santé et les services de l’administration publique. Dans l’ensemble, près d’un Marocain sur deux a payé un pot-de-vin en 2015 dans les secteurs concernés. La perception du degré de corruption au sein du gouvernement est également très élevée pour 70 % des Marocains interrogés. Plus inquiétants sont les faibles niveaux de dénonciation (89 % des personnes interrogées sont réticentes à dénoncer les cas de corruption), qui témoignent d’un manque de confiance dans l’efficacité des institutions publiques, malgré la mise en place de l’Instance nationale de probité, de prévention et de lutte contre la corruption (INPPLC) en 2007.

Encadré 1.2. Objectifs de la stratégie nationale de prévention et lutte contre la corruption (2016-25)

Le Maroc a adopté en 2016 une stratégie de prévention et de lutte contre la corruption qui se fixe deux objectifs majeurs, à savoir le renforcement de la confiance des citoyens et l’amélioration de l’intégrité des affaires et du positionnement du Maroc à l’international à l’horizon 2025.

S’agissant du premier objectif, la stratégie veillera au renforcement de l’intégrité et la réduction significative de la corruption à l’horizon 2025. Elle vise ainsi à réduire le taux de corruption défini par l’INPPLC de 75 % actuellement à 45 % en 2025, et à atteindre un score dans l’IPC de Transparency International de 60 sur 100 en 2025 contre 36 sur 100 en 2015. De même, le Maroc cherche à améliorer deux indicateurs de Transparency International mesurant la confiance : la part des citoyens estimant que la situation se détériore (de 89 % aujourd’hui à moins de 20 % en 2025), et la part insatisfaite de l’action gouvernementale en matière de corruption (de 72 % à moins de 30 % en 2025).

Concernant le deuxième objectif, la stratégie vise à gagner 20 places d’ici 2025 dans le classement du Maroc selon les indicateurs de Doing Business et World Justice Project et 25 places dans le classement de l’indice global de compétitivité du Forum économique mondial. L’objectif consiste à voir augmenter de 100 % le volume des investissements directs étrangers (IDE), d’un montant de 38.7 milliards de dirhams marocains (MAD) en 2015.

Ainsi, la stratégie nationale de prévention et lutte contre la corruption s’articule autour de cinq piliers, chacun décliné en axes stratégiques, dont la gouvernance, la prévention, la répression, la communication et sensibilisation, ainsi que la formation et l’éducation avec un portefeuille de 239 projets et un budget estimé à près de 1.8 milliard MAD.

Source : Commission nationale anti-corruption (2016).

Les Marocains montrent une certaine désaffection à l’égard de la vie publique, comme en témoignent les niveaux de confiance à l’égard des institutions et les taux de participation électorale. Depuis les années 70, durant lesquelles elle atteignait des taux record de 80 %, la participation électorale est en baisse régulière. Autour de 60 % dans les années 90 (62.75 % en 1993 ; 58.3 % en 1997), elle se situait autour de 45 % pour les élections législatives de 2011 et 43 % pour celles d’octobre 2016. En 2007, l’abstention avait atteint un niveau record de 63 %. Dans les pays de comparaison, le taux de participation électorale moyen aux dernières élections législatives s’élevait à 74 % (IDEA, 2016). En parallèle, le taux d’inscription des adultes sur les listes électorales est passé de 80 % en 2003 à 61 % en 2015. Ce désintérêt pour les urnes peut être relié au degré de confiance des Marocains envers les institutions gouvernementales, également en déclin depuis 2011. En 2014, ils étaient moins de 40 % à déclarer faire confiance au gouvernement contre 60 % en 2011 (Gallup, 2014 et 2011). Cette dernière proportion se trouve en ligne avec les résultats du HCP dans l’enquête sur le bien-être (38 % des personnes interrogées ont un faible niveau de confiance envers le gouvernement – HCP, 2012). Les dernières enquêtes1 montrent également que moins de 20 % des Marocains interrogés croient en l’honnêteté des élections (Gallup, 2015) alors que cette proportion oscillait entre 30 % (Gallup, 2011) et 40 % en 2011 (Afrobarometer, 2015).

Les plus grandes faiblesses du Maroc en termes de qualité de vie sont l’accès à l’éducation et la qualité des connaissances acquises. L’espérance de vie scolaire (11.6 années en 2014)2 (PNUD, 2016), est inférieure à la durée attendue et s’avère largement influencée par les disparités régionales et socio-économiques. Alors que les taux de participation dans l’enseignement primaire sont élevés, ils restent médiocres dans le secondaire et le supérieur. La qualité de l’éducation est également préoccupante. En effet, 32 % des Marocains sont considérés comme analphabètes, loin du niveau attendu et de la moyenne mondiale (HCP, 2015b). De plus, le score des élèves marocains en mathématiques, sciences et lecture aux tests internationaux (Trends in International Mathematics and Science Study - TIMSS) et Progress in International Literacy Study - PIRLS) n’atteint pas les niveaux de base attendus. Les faibles performances de ces indicateurs objectifs se reflètent dans le degré d’appréciation des Marocains à l’égard de la qualité du système éducatif. Très critiques, ils ne sont que 37 % à se déclarer satisfaits en 2014, un chiffre en diminution depuis 2010 et bien en deçà des 60 % attendus compte tenu du niveau de développement du pays (Gallup, 2015). Le système éducatif, considéré comme très inégalitaire, doit faire face à un certain nombre de défis pour offrir les mêmes opportunités à chaque élève (chapitre 4).

La sécurité personnelle dans l’espace public est la meilleure du continent. Le faible taux d’homicide (1.32 pour 100 000 habitants en 2013) classe le Maroc parmi les pays les plus sûrs d’Afrique. Le sentiment de sécurité au sein de la société marocaine confirme la bonne tenue de cet indicateur objectif. Par exemple, les Marocains sont plus de 66 % à se déclarer en sécurité lorsqu’ils marchent seuls la nuit dans leur quartier. Néanmoins cet indicateur ne reflète pas la situation de violence à l’égard des femmes, encore répandue : selon le HCP, plus de 60 % d’entre elles ont été victimes d’un acte de violence, notamment psychologique3, au cours des 12 derniers mois (HCP, 2011).

Les indicateurs relatifs aux conditions environnementales, qui peuvent affecter négativement l’état de santé d’une population, sont également bons pour le Maroc. En 2013, le nombre de particules fines dans l’air, qui peut entraîner de graves troubles respiratoires, est inférieur au niveau attendu de 20 microgrammes par mètre cube, qui est aussi le seuil européen de qualité de l’air. La surface forestière, quant à elle, est restée stable depuis 1990. Quant aux indicateurs subjectifs, la majorité des Marocains se déclarent en moyenne satisfaits de la qualité de l’eau (71 % en 2014) et de la qualité de l’air (79 % en 2014), des degrés de satisfaction supérieurs aux niveaux attendus (Gallup, 2015).

Si la pollution atmosphérique n’est pas excessive, elle a un impact sur la santé des Marocains et son coût économique n’est pas négligeable. Parmi les causes de décès prématurés, la qualité de l’air occupe une place de premier ordre avant l’eau non potable, les questions d’insalubrité ou d’insuffisance pondérale infantile, laissant ainsi à penser qu’il s’agit d’une problématique de santé publique. Son coût économique est estimé à 4.7 milliards USD en 2013, niveau similaire à celui de la Tunisie et légèrement supérieur à la moyenne africaine. Le Maroc fait toutefois partie des rares pays africains ayant réussi à réduire le nombre de décès liés à la pollution découlant de l’utilisation de combustibles solides par les ménages à un niveau qui leur permet d’appréhender le problème de pollution atmosphérique comme étant uniquement lié à la pollution aux particules (Roy, 2016). Ceci explique sans doute que 79 % des Marocains se déclarent en moyenne satisfaits de la qualité de l’air (Gallup, 2014).

Enfin, le degré de satisfaction à l’égard de la vie est légèrement supérieur à la moyenne mondiale et au niveau attendu. Cet indicateur de bien-être subjectif correspond au jugement que les individus portent sur leur vie en général en utilisant l’échelle de Cantril notée de 1 à 10. La satisfaction moyenne des Marocains est estimée à 5.2/10 en 2014, une notation en hausse régulière depuis 2010, et supérieure à la moyenne des pays africains (4/10 en 2014). Même si le Maroc n’a pas connu de Printemps arabe aussi marqué que ses voisins, le climat semble être apaisé avec l’avènement d’une certaine paix sociale capable d’offrir les conditions favorables à une bonne dynamique de développement4.

Encadré 1.3. Mesurer le bien-être : le cadre de l’OCDE et les travaux du Haut-commissariat au plan

Le développement d’un pays ne se cantonne pas à la croissance économique. Celle-ci est en effet une condition nécessaire mais pas suffisante à une amélioration durable et équilibrée du bien-être des individus. Dans cette perspective, il s’avère nécessaire de dépasser les indicateurs macroéconomiques traditionnels, tels que le PIB, pour considérer le développement comme un phénomène multidimensionnel qui affecte différents aspects de la vie quotidienne.

Afin d’en rendre compte, l’OCDE a développé en 2011 un cadre d’évaluation du bien-être pour les pays de l’OCDE qui a été ajusté pour mesurer celui des pays émergents et en développement. Cet outil permet de mesurer le bien-être sur la base des résultats obtenus dans deux grands domaines : les conditions de vie matérielles et la qualité de vie. Le domaine des conditions de vie matérielles regroupe trois dimensions : les possibilités de consommation liées aux ressources financières disponibles, le travail, le logement et les infrastructures associées. Quant au domaine de la qualité de vie, il comprend sept dimensions indépendantes des niveaux de ressources : l’état de santé, l’éducation et les compétences, les liens sociaux, l’autonomisation et la participation à la vie publique, les conditions environnementales, le degré de vulnérabilité et l’évaluation à l’égard de la vie (graphique 1.2).

Graphique 1.2. Le cadre du bien-être de l’OCDE élargi aux pays émergents et en développement
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Source : Boarini, Kolev et McGregor (2014), https://doi.org/10.1787/5jxss4hv2d8n-en.

Pour chaque indicateur, les performances du Maroc sont analysées sur la base des performances réelles par rapport aux performances attendues. Ces dernières sont calculées à partir d’une régression entre les performances enregistrées dans le reste du monde selon le niveau de développement économique des pays. Ce coefficient de corrélation est ensuite appliqué au PIB actuel du Maroc afin de calculer la valeur attendue pour chaque indicateur du bien-être. Les différences entre les résultats réels du Maroc et ceux attendus sont calculés en nombre d’écarts-types.

Dans le sillage des initiatives nationales et internationales, le Maroc s’est intéressé dès 2011 à la mesure du bien-être. Le HCP s’est engagé dans plusieurs projets relatifs aux questions du développement humain, du progrès social et du bien-être de la population. Il a notamment mené en 2012 une enquête nationale sur le bien-être qui s’appuie, entre autres, sur le cadre d’évaluation du bien-être de l’OCDE. Cette enquête avait un double objectif : identifier les grandes dimensions qui importent pour le bien-être des Marocains et leurs composantes, et évaluer le niveau de satisfaction dans les différentes dimensions identifiées.

Si le cadre d’évaluation du bien-être de l’OCDE élargi aux économies émergentes analyse le bien-être selon dix dimensions, le HCP a identifié six dimensions : le logement, le revenu, l’emploi, la santé, l’éducation et la vie familiale ainsi que l’environnement sociétal. Le degré de vulnérabilité, l’autonomisation et la participation à la vie publique, les émotions et l’évaluation à l’égard de la vie, ainsi que les conditions environnementales n’ont pas été prises en considération par les autorités marocaines. De plus, la dimension marocaine sur la vie familiale et l’environnement sociétal s’intéresse à la qualité des liens sociaux mais couvre d’autres aspects qui ne sont pas mesurés par l’OCDE, tels que l’accès à une vie culturelle et de loisirs et la qualité des relations familiales.

Source : HCP (2012) ; Boarini, Kolev et McGregor (2014), https://doi.org/10.1787/5jxss4hv2d8n-en.

Le Maroc a atteint beaucoup d’Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) mais les inégalités restent très marquées

Le Maroc a réussi à atteindre une grande partie des OMD (tableau 1.1). Le pays a engagé de nombreuses réformes, comme dans le domaine de l’éducation. L’adoption de la Charte nationale d’éducation et de formation (Cnef) et la mise en œuvre du Programme d’urgence en 2009 ont permis de rattraper les retards dans l’accès à l’éducation primaire. Suite à l’adoption de la Constitution de 2011, qui érige la santé comme droit fondamental et priorité pour le développement, les pouvoirs publics se sont lancés dans une vaste réforme du système de santé. Celle-ci a permis de faire baisser les taux de mortalité infantile et maternelle, ainsi que d’accroître la couverture maladie. Cependant, la faiblesse du capital humain demeure importante et a affecté d’autres OMD liés à l’éducation, à la santé, à l’emploi et à l’égalité entre les sexes.

Tableau 1.1. Récapitulatif sur l’atteinte des OMD
Sélection d’indicateurs

OMD

Objectifs

Objectif Cible

Performances (dernière année disponible)

OMD 1

Éliminer l’extrême pauvreté et la faim

Cible 1.A - Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à 1.25 dollar par jour.

1.8 %

0 %(2014)

Cible 1.B - Assurer le plein-emploi et la possibilité pour chacun, y compris les femmes et les jeunes, de trouver un travail décent et productif.

- Taux d’activité de la population âgée de plus de 15 ans

47.4 % (2015)

Cible 1.C - Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population qui souffre de la faim.

4.5 %Proportion d’enfants de moins de 5 ans présentant une insuffisance pondérale

3.1 %(2011)

2.3 %Proportion de la population n’atteignant pas le niveau minimal d’apport calorique

0.1 %

OMD 2

Assurer l’éducation primaire pour tous

D’ici à 2015, donner à tous les enfants, garçons et filles, partout dans le monde, les moyens d’achever un cycle complet d’études primaires.

100 % Taux net de scolarisation dans le primaire des 6-11 ans

99 % (2014)

100 % Proportion d’écoliers commençant la 1ère année d’étude dans l’enseignement primaire et achevant la 6e année

87.8 % (2014)

100 % Taux d’alphabétisation de la population âgée de 15 à 24 ans

90 % (Recensement général de la population et de l’habitat - 2014)

OMD 3

Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes

Éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d’ici à 2005, si possible, et à tous les niveaux de l’enseignement en 2015 au plus tard.

100 % Rapport filles/garçons dans l’enseignement secondaire collégial

81 %

100 % Taux d’alphabétisation des femmes âgées de 15 à 24 ans par rapport aux hommes

85.9 % (Recensement général de la population et de l’habitat - 2014)

OMD 4

Réduire la mortalité infantile

Réduire de deux tiers, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.

25 pour milleTaux de mortalité des enfants de moins de 5 ans

27.6 pour mille (2015)2

19 pour milleTaux de mortalité infantile

23.7 pour mille (2015)2

OMD 5

Améliorer la santé maternelle

Cible 5.A - Réduire de trois quarts, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité maternelle.

83 pour cent milleTaux de mortalité maternelle(pour cent mille naissances vivantes)

112 pour cent mille (2010)

Cible 5.B - Rendre l’accès à la médecine procréative universel d’ici à 2015.

100 % Proportion de femmes ayant fait au moins une consultation prénatale

77.1 % (2011)1

OMD 6

Combattre le Virus de l’immunodeficience humaine (VIH)/Sida, le paludisme et d’autres maladies

Cible 6.A - D’ici à 2015, avoir enrayé la propagation du VIH/Sida et avoir commencé à inverser la tendance actuelle.

- Séroprévalence du VIH/Sida dans la population générale

0.085 % (2014)

Cible 6.B - D’ici à 2010, assurer à tous ceux qui en ont besoin l’accès aux traitements contre le VIH/Sida.

- Proportion des personnes vivant avec le VIH/Sida sous traitement antirétroviral

26.1 % (2011)

Cible 6.C - D’ici à 2015, avoir maîtrisé le paludisme et d’autres maladies graves et commencer à inverser la tendance actuelle.

- Taux d’incidence du paludisme autochtone (pour 100 000 habitants)

0

- Taux d’incidence de la tuberculose (pour 100 000 habitants)

De 106 (2000) à 82 (2014)

OMD 7

Préserver l’environnement

Cible 7.A - Intégrer les principes du développement durable dans les politiques et programmes nationaux et inverser la tendance actuelle de déperdition des ressources environnementales.

Superficies annuelles moyennes reboisées et régénérées (hectares)

De 20 000 à 42 469 ha (2011)

Cible 7.B - Réduire la perte de la biodiversité et atteindre, d’ici à 2010, une diminution significative du taux de perte.

-

-

Cible 7.C - Réduire de moitié, d’ici à 2015, le pourcentage de la population qui n’a pas accès à un approvisionnement en eau potable ni à des services d’assainissement de base.

76.25 % Proportion de la population branchée au réseau ou ayant accès à une source d’eau salubre

94.5 % (2014 – Accès à l’eau potable); 97.5 % (2014 - Accès à un système d’assainissement amélioré)

Cible 7.D - Améliorer sensiblement, d’ici à 2020, les conditions de vie de 100 millions d’habitants des bidonvilles.

- Proportion de la population urbaine habitant dans des bidonvilles et dans des habitats sommaires

5.6 % (2014)

OMD 8

Mettre en place un partenariat mondial pour le développement

Pas de suivi pour le Maroc en particulier

1. La dernière enquête du ministère de la Santé date de 2011 (Enquête nationale de la population et la santé de la famille publiée en 2012)

2. Estimations du groupe Inter-agences du système des Nations Unies.

Source : HCP (2015b et 2015c) ; Ministère de la Santé (2012) ; Organisation des Nations Unies (ONU), « Objectifs du Millénaire pour le Développement et l’après-2015 », www.un.org/fr/millenniumgoals/

Des efforts ont été entrepris pour diminuer les inégalités de genre. La Constitution de 2011 établit le principe d’égalité entre les hommes et les femmes (article 19) et le Maroc a ratifié plusieurs conventions internationales pour la protection des droits des femmes, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et le Pacte des droits économiques et sociaux. Récemment, un système de quota pour les femmes a été mis en place lors des élections de 2015 (BAfD/OCDE/Pnud, 2016). Les femmes sont aujourd’hui plus nombreuses à accéder aux professions juridiques, et représentent aujourd’hui 20 % des juges (OCDE/CAWTAR, 2014). L’indice sur les institutions sociales et l’égalité homme-femme (Sigi)5 de l’OCDE classe le Maroc dans les pays avec un faible niveau de discrimination, une position en nette amélioration depuis 2009. Cet indice mesure les discriminations fondées sur le genre à travers cinq dimensions : les discriminations au sein du Code de la famille, les atteintes à l’intégrité physique, la préférence pour les garçons, l’accès restreint aux ressources et aux biens ainsi que les atteintes aux libertés civiles. À noter que les discriminations au sein du Code de la famille, notamment à l’égard des droits de succession, des femmes divorcées et des mariages précoces, restent encore très élevées.

Sur quelques indicateurs de bien-être, les femmes enregistrent de meilleures performances que les hommes (graphique 1.3). L’espérance de vie est plus élevée pour les femmes que pour les hommes (76 ans contre 74.2). Les femmes sont en moyenne plus satisfaites que les hommes sur les indicateurs subjectifs. Leurs niveaux de satisfaction à l’égard des conditions de vie et de l’évaluation de la vie sont plus élevés que ceux des hommes et dépassent les niveaux attendus. Les Marocaines également sont plus nombreuses que leurs homologues masculins à avoir quelqu’un sur qui compter en cas de problème (63 % contre 48 %). Enfin, les efforts des pouvoirs publics pour généraliser l’accès à l’éducation primaire et améliorer l’accès à l’enseignement des filles ont très récemment porté leurs fruits. Même s’il reste largement inférieur à la valeur attendue, le taux net de scolarisation des Marocaines au lycée est légèrement supérieur à celui des garçons (33.1 % pour les filles contre 30.5 % pour les garçons en 2011-12).

Graphique 1.3. L’accès à l’emploi apparaît comme la disparité de genre la plus importante
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Note : Les indicateurs de bien-être pour les femmes et les hommes sont exprimés par rapport à la valeur attendue, estimée en base à une régression de chaque indicateur sur le PIB par habitant en PPA et normalisés par l’écart-type de la distribution par pays de l’indicateur.

Source : Calculs des auteurs à partir de Gallup Organization (2015), Gallup World Poll, http://www.gallup.com/ ; Banque mondiale (2015), Indicateurs du développement humain http://data.worldbank.org/ ; et HCP (2013).

 https://doi.org/10.1787/888933475573

Cependant, la plupart des indicateurs relatifs à la vie économique et publique restent nettement en défaveur des femmes marocaines (graphique 1.3). Les disparités entre les genres dans la vie économique du pays sont préoccupantes pour la situation des femmes mais également pour le développement économique. Depuis 1999, le taux d’activité des femmes enregistre une baisse continue. En 2015, le taux d’emploi des femmes était de 22 % contre 67 % pour les hommes. Dans les zones urbaines, le taux d’emploi ne dépasse pas 15 % (HCP, 2015a). Le graphique 1.3 illustre les grandes disparités de genre sur cet indicateur. Les femmes qui travaillent sont plus nombreuses à être victimes de travail précoce (73 % des femmes actives rurales contre 60 % pour les hommes) et sont plus exposées au risque de chômage. Ces dernières sont également peu nombreuses à accéder à des postes à responsabilités que ce soit dans l’administration ou dans le secteur privé : d’après le Conseil économique social et environnemental (CESE), 0.1 % des femmes occupent un poste de responsabilité au sein d’entreprises privées (CESE, 2014a). De plus, l’analphabétisme est encore très élevé, notamment dans les zones rurales : en moyenne, plus d’une Marocaine sur deux est analphabète et ce taux s’élève à plus de 90 % pour les femmes de plus de 40 ans vivant en zones rurales. Au niveau de la participation à la vie publique, les femmes sont moins nombreuses à avoir contacté un représentant des pouvoirs publics, mais sont plus critiques à l’égard des institutions publiques. Par exemple, leur degré de confiance dans le gouvernement et dans les élections est plus faible que pour les hommes. Elles sont plus nombreuses à estimer que la corruption est plus répandue.

Les inégalités de genre se conjuguent aux inégalités socio-économiques et spatiales. Les inégalités sur les dépenses de consommation sont restées stables sur la dernière décennie. La pente légèrement négative de la courbe d’incidence de la croissance (CIC) sur la période 2007-14 montre que la croissance a un peu plus profité aux pauvres, permettant de réduire légèrement les écarts de richesse au sein de la population marocaine. Les inégalités économiques et de genre s’intensifient avec les disparités spatiales. La pauvreté reste importante dans les zones rurales où une personne sur dix vit en dessous du seuil de pauvreté. Elle revêt souvent un visage multidimensionnel : les populations les plus pauvres vivant en milieu rural sont également celles qui disposent d’un accès plus faible aux services sociaux de base. En matière de santé, l’accès aux soins est plus difficile et coûteux dans les campagnes. Conséquence, l’espérance de vie est plus faible (71.7 ans contre 77.3 dans les zones urbaines) et les indicateurs de mortalité infantile et maternelle restent très élevés. Dans le domaine de l’éducation, l’analphabétisme représente un véritable fléau qui affecte particulièrement les populations féminines (90 % des plus de 40 ans et 25 % des moins de 15 ans). Les programmes sociaux ont favorisé la généralisation de l’accès à l’enseignement primaire mais, au-delà du primaire, les disparités en fonction du milieu de résidence augmentent avec les cycles d’enseignement. C’est également en milieu rural que le décrochage scolaire est le plus élevé et que l’accès à l’instruction est le moins valorisé, notamment quand le chef de famille ne justifie d’aucun diplôme. La faiblesse des opportunités d’emplois et les difficultés de mobilité sociale entretiennent, dans une certaine mesure, la reproduction des inégalités au sein de la société marocaine et creusent le fossé avec les zones urbaines. En conséquence, les performances en termes de bien-être sont nettement inférieures dans les zones rurales que dans le reste du pays. L’analyse multidimensionnelle des niveaux de vie souligne l’importance du déficit d’emploi.

L’OCDE a développé un cadre d’analyse de la croissance inclusive qui s’appuie sur la mesure du « niveau de vie multidimensionnel ». Ce dernier se calcule en agrégeant le revenu moyen, la longévité, l’emploi et les inégalités de revenus dans un indice monétaire unique (voir chapitre 4). En pratique, le niveau de vie multidimensionnel se définit comme le revenu moyen diminué d’une pénalité correspondant à l’écart monétisé des taux d’emploi et de longévité par rapport aux pays les plus performants, ainsi qu’au degré d’inégalité des revenus. Pour le Maroc, il se situait en 2013 au-dessus de celui de l’Afrique du Sud. Même si le revenu moyen en Afrique du Sud est largement supérieur à celui du Maroc, les pénalités dues au déficit d’emploi, de longévité et d’inégalités y sont aussi plus importantes. En revanche, le niveau de vie multidimensionnel du Maroc se classait en dessous de celui de la Tunisie (graphique 1.4). La performance du Maroc dans ce modèle montre que la croissance n’a pas été suffisamment inclusive au regard du groupe de pays de comparaison. Alors que la consommation moyenne du Maroc se situe à 39 % du niveau moyen dans le groupe témoin, son niveau de vie multidimensionnel est égal à 22 % de la moyenne correspondante.

Graphique 1.4. Le niveau de vie multidimensionnel est relativement bas
2013 ou dernière année disponible
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Source : Calculs des auteurs à partir de données fournies par le Maroc.

 https://doi.org/10.1787/888933475580

Cette performance moyenne en termes de niveaux de vie multidimensionnel s’explique principalement par la faiblesse du taux d’emploi au Maroc, notamment chez les femmes. En 2013, le Maroc se montre moins performant que d’autres pays du groupe témoin en la matière puisque son taux d’emploi est inférieur d’environ 10 points à la moyenne. Les possibilités d’amélioration du niveau de vie au Maroc reposent donc essentiellement sur de meilleurs taux d’emploi, en particulier chez les femmes.

Sur la période 1991-2013, l’allongement de l’espérance de vie a contribué à l’amélioration du niveau de vie multidimensionnel alors que la croissance de la consommation est restée faible. Le moteur des améliorations du niveau de vie multidimensionnel a été l’allongement de l’espérance de vie à la naissance (+ 8.5 ans) entre 1991 et 2013. L’augmentation de 0.39 année de longévité par an est la plus rapide observée dans les pays du groupe témoin. En revanche, sur la période, la croissance annuelle de la consommation des ménages (+2.2 %) reste sensiblement inférieure à celle enregistrée dans le groupe des pays de comparaison (voir chapitre 4 pour l’analyse complète sur les niveaux de vie multidimensionnels).

Le développement institutionnel et la dynamique de réforme offrent au Maroc d’importants atouts sur lesquels l’économie n’a pas encore pu capitaliser pleinement

Une analyse comparative dans une vaste collection d’indicateurs confirme la faiblesse des performances en termes d’éducation, d’emploi et le bilan mitigé du secteur de la santé. En analysant les performances dans chacun de ces indicateurs par rapport à la valeur attendue en raison du niveau du PIB par habitant, il est possible de présenter les particularités du Maroc par rapport à d’autres pays de niveau de revenu similaire6. En effet, le taux de participation au marché du travail est 14 points en dessous du taux de référence, ce qui correspond à 1.3 écarts-types par rapport à la distribution mondiale. Cette valeur est encore plus importante dans le cas de la participation féminine.

Les performances du système de production de compétences apparaissent donc comme les plus importantes sous-performances du Maroc. Les écarts en termes de proportion de la main-d’œuvre par niveau d’instruction par rapport aux valeurs de référence sont aussi très élevés – 20 % des actifs marocains ont un niveau secondaire ou supérieur, par rapport à une valeur de référence de 58 % pour le niveau de revenu du pays. De plus, la faiblesse du capital humain a des retombées multiples sur le secteur productif et donc la croissance (BAfD/GdM/MCC, 2015) ainsi que sur le bien-être, en raison de la valeur intrinsèque de l’éducation.

Cette analyse fait néanmoins ressortir des atouts importants liés au développement du secteur bancaire, d’infrastructures clés et du climat des affaires. Le niveau de crédit du secteur bancaire au secteur privé est supérieur de 30 points à la valeur de référence, correspondant à plus d’un écart-type. Le secteur bancaire est ainsi un atout majeur pour la mobilisation de financement, en plus d’un secteur dynamique et avec une importante projection internationale (chapitre 2). La force du secteur financier marocain est néanmoins tempérée par la liquidité relativement faible du marché boursier, le poids très important des banques dans l’ensemble du secteur financier et le rôle des emprunts du secteur public et parapublic. Le Maroc bénéficie également d’un réseau d’infrastructure développé (ports, aéroports, routes). Enfin, de nombreuses réformes sont en cours pour améliorer l’environnement des affaires et des progrès sont observés en matière de création d’entreprises et d’enregistrement des propriétés.

Le Maroc fait mieux que la moyenne des pays de son groupe de revenu en termes d’infrastructures clés. Ceci est particulièrement le cas du réseau électrique, accessible à plus de 99 % de la population et avec un service bien plus fiable que dans la moyenne des pays du même niveau de revenu. C’est aussi le cas des réseaux de télécommunications, en particulier mobiles. Il s’agit en effet de deux secteurs clés dans l’insertion du Maroc à l’international (chapitre 3).

Le climat des affaires s’est sensiblement amélioré à l’instar des processus de réforme continuelle qui ont permis au Maroc de gravir les échelons des classements internationaux. De ce fait le pays exhibe des performances largement supérieures à ce qui serait attendu, en raison de son revenu, en termes de facilité à la création d’entreprise et d’institutions d’appui aux échanges internationaux. La qualité des infrastructures portuaires, l’efficacité des procédures de douane et les coûts à l’export sont tous meilleurs que les valeurs de référence.

Certains éléments attenants à la conduite des affaires demeurent néanmoins problématiques. Le diagnostic de croissance (BAfD/GdM/MCC, 2015) identifie les contraintes microéconomiques comme freins à la croissance, en particulier l’inefficacité du système judiciaire, l’accès au foncier, les distorsions liées au régime fiscal, ainsi que la règlementation et le coût du travail. Ces contraintes limitent le rendement des investissements privés mais sont d’autant plus lourdes pour la croissance des petites entreprises, et peuvent de ce fait être identifiées parmi les obstacles à la constitution d’un tissu productif plus dense dans le segment des entreprises de taille moyenne (chapitre 3). Face à ces contraintes, la performance du Maroc en termes de capacités productives est mitigée. Si le Maroc exporte comparativement plus de produits finis (52 % des exportations contre une valeur de référence de 32 %), ceux-ci ont un indice de complexité plus faible (Hausmann et al., 2011). Cet indicateur mesure le degré de spécificité des produits et en conséquence, leur potentiel pour bénéficier de marges et de parts de valeur ajoutée plus importantes. Ceci s’explique en partie par le niveau de capital humain relativement faible du Maroc mais aussi par la faiblesse du système de recherche, développement et innovation (chapitre 3).

Ces faiblesses du système productif conduisent en partie à la performance insuffisante en termes de compétitivité globale. Celle-ci est reflétée dans le nombre relativement faible de produits exportés avec un avantage comparatif, mais aussi sur le poids insuffisant des exportations sur la balance commerciale face au déficit structurel lié aux besoins énergétiques. Cette situation est toutefois à nuancer par l’orientation récente de l’industrie marocaine vers les nouveaux métiers mondiaux, générant une hausse des exportations de biens. L’automobile en particulier est devenue le premier secteur exportateur, avec 22.7 % du total des exportations marocaines en 2015.

Les défis de l’environnement se présentent de manière particulière. La dépendance de l’importation d’énergie se traduit par une forte prépondérance des combustibles fossiles dans la consommation énergétique. Malgré les distorsions introduites par les subventions à la consommation de combustibles dans le passé (chapitre 2), les dépenses énergétiques demeurent en dessous des valeurs de référence, ce qui mène à des taux d’intensité carbone qui, à 260 grammes de CO2 par unité de PIB, correspondent au niveau de PIB par tête. Il y a donc de la marge pour améliorer l’efficacité énergétique de l’économie mais aussi un grand potentiel pour tirer parti des sources de croissance verte, en particulier à partir du développement des sources alternatives d’énergie qui permettront en plus de limiter l’exposition aux risques extérieurs.

Les performances marocaines découlent d’une série d’orientations générales issues du modèle de développement

Le modèle de développement marocain est constitué d’orientations décidées au plus haut niveau, mais aussi de choix implicites. Un modèle de développement peut être défini comme l’agrégation de plusieurs composantes d’une économie (équilibres macroéconomiques, ouverture commerciale, degré d’interventionnisme, caractéristiques du tissu productif, développement des territoires, cohésion sociale, développement humain, environnement, etc.) et de grands choix d’orientation des politiques publiques. Le modèle de développement s’inspire d’une vision de long terme et influence l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques, et nécessite ainsi que ses composantes soient équilibrées, cohérentes, et complémentaires les unes des autres. Au Maroc, les grandes orientations stratégiques des politiques publiques données par le Roi constituent une partie du modèle de développement, notamment en ce qui concerne la politique sociale. Au niveau macroéconomique, tandis que certains choix sont avérés, d’autres paraissent davantage induits.

De grands choix d’orientation des politiques publiques sous-tendent le développement du Maroc

Les politiques de développement des années 90 et 2000 ont été marquées par un certain nombre de grands choix. Au niveau macroéconomique, ces derniers ont porté sur la recherche de la stabilité. D’où le développement d’un système intérieur solide pour financer la dette publique et le soutien à la demande intérieure afin de limiter la vulnérabilité aux chocs internes (conditions climatiques entraînant une volatilité du PIB agricole) et externes (volatilité des prix du pétrole et des matières premières en régime de change fixe), via des subventions pour certains produits de base et produits pétroliers ainsi que des mesures fiscales orientées sur certains secteurs d’activités. L’insertion à l’international est marquée par une accélération de l’ouverture économique et des accords de libre-échange avec plusieurs régions et pays, le tout avec un régime de taux de change fixe servant d’ancrage aux investisseurs. En même temps, une politique volontariste d’attraction des IDE et de diversification de l’économie est menée pour faire émerger de nouveaux secteurs exportateurs et en promouvoir d’autres, dont l’immobilier. Finalement, un rôle prépondérant s’avère donné à l’État et aux entreprises publiques, notamment par l’importance des investissements publics en infrastructures mais aussi dans une fonction de coordination et d’accompagnement du développement de secteurs et d’entreprises clés.

La politique sociale, quant à elle, relève d’une stratégie de plus en plus ciblée. À partir du milieu des années 2000, elle a visé à combler le déficit de logements sociaux urbains et à stimuler l’emploi des groupes sociaux vulnérables au travers de politiques actives pour l’emploi. En 2005, l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) a été lancée afin de lutter contre la pauvreté et les disparités sociales au travers de nombreux projets de développement. Cette initiative cible des communes rurales et les quartiers urbains les plus défavorisés, ainsi que des catégories d’individus jugées vulnérables ou en situation de précarité. Le programme de l’INDH s’est intensifié lors sa seconde phase (2011-15) en élargissant le nombre de communes et de populations cibles. En parallèle, le gouvernement a mis en place un certain nombre de programmes sociaux pour des populations ciblées, notamment dans le cadre du Fonds d’appui à la cohésion sociale (voir chapitre 4).

Le modèle de développement marocain présente des déséquilibres et des limites

Certaines orientations du modèle de développement limitent les performances économiques et sociales du Maroc. La recherche de stabilité économique et sociale grâce au maintien de la stabilité des prix, avec le système de compensation et le régime de change fixe, a généré des distorsions dans les marchés et soutenu des dynamiques de rentes (chapitre 2). Par exemple, le secteur de l’immobilier bénéficie en premier lieu des dépenses fiscales, et accapare une grande partie des investissements privés. Or ce secteur n’est ni le plus porteur ni le plus productif. Par ailleurs, le choix du soutien à la demande interne pèse sur les dépenses et le déficit public alors que cette politique semble moins efficace que par le passé.

La rapide ouverture de l’économie a engendré des déficits structurels importants. Les accords de libre-échange sont tous déficitaires pour le Maroc, à l’exception de celui conclu avec la Jordanie7. Une des explications réside dans la faible compétitivité de l’offre industrielle au moment de l’ouverture commerciale qui n’a pas réussi à se positionner stratégiquement sur les marchés partenaires. Les importations, dominées par le poids de l’énergie (quasiment intégralement importée) et des produits alimentaires, pénalisent également la balance commerciale, structurellement déficitaire.

Le choix de secteurs manufacturiers soutenus par les politiques publiques a permis de développer les exportations mais le développement des entreprises reste difficile. Au début des années 2000, le Maroc a mis en place des stratégies sectorielles pour stimuler de nouveaux secteurs d’activités, notamment la sous-traitance industrielle à l’exportation et la délocalisation de services (offshoring). Toutefois, les petites entreprises peinent toujours à passer à une taille intermédiaire, condition pourtant indispensable pour intégrer les chaînes de valeur mondiales, comme en témoigne l’exemple malaisien où près de 50 % des petites et moyennes entreprises (PME) y participent. Ainsi, la création d’emplois supplémentaires et l’amélioration de la productivité du travail sont pénalisées par cette difficulté d’expansion du secteur privé.

Les activités et les opportunités économiques sont concentrées géographiquement, entraînant des inégalités importantes. La croissance économique n’est pas inclusive et le modèle de développement n’a pas réussi à endiguer la persistance d’inégalités entre les citoyens (de revenus, de consommation, d’accès aux services de base, etc.) ainsi qu’entre régions. L’ampleur des actions entreprises dans le cadre de l’INDH apporte des résultats tangibles, mais ne peut se substituer à une meilleure répartition territoriale des opportunités économiques.

Le financement du modèle de croissance se heurte à un taux d’épargne domestique en baisse. Le besoin de financement de l’économie reste important malgré sa diminution depuis quelques années. Désormais, il est confronté à la difficulté de mobilisation de l’épargne intérieure qui menace d’entraîner un ajustement à la baisse du taux d’investissement. Ainsi, le Maroc cherche désormais à développer les banques islamiques, dites participatives, pour mobiliser davantage l’épargne marocaine et attirer celle d’autres pays.

Les évolutions du contexte international et national appellent à la réorientation de certaines politiques

Le Maroc est confronté au repositionnement du centre de gravité de l’économie mondiale. Depuis le début des années 90, les transformations opérées à l’échelle internationale ont progressivement fait évoluer le cœur de l’économie mondiale des pays de l’OCDE vers les pays émergents, notamment asiatiques (OCDE, 2010). Pour les économies en développement, cette dynamique implique des besoins d’adaptation, notamment en matière commerciale ou d’attractivité des investissements. Au Maroc, ceci est d’autant plus important que le pays est fortement lié aux économies européennes caractérisées par une faible reprise. Cette réorientation des partenariats est en marche, comme le montrent les rapprochements récents avec la Chine ou l’importance croissance du marché indien comme débouché pour les phosphates et produits dérivés.

Le climat économique et politique dégradé dans la région affecte l’économie. Bien que le Maroc ait su gérer les contestations du Printemps arabe sans les subir autant que certains pays de la région, certaines répercussions économiques et sociales se font néanmoins ressentir : ralentissement du flux d’IDE au moment de la crise, manifestations populaires, etc. Les conséquences de ces mouvements, moins marquées au Maroc qu’ailleurs, ont permis de préserver la stabilité politique et une certaine stabilité macroéconomique. Toutefois, la dégradation rapide de la situation sécuritaire en Afrique du Nord et en zone sahélienne a affecté le tourisme, une importante source de devises pour le pays.

Sur le plan intérieur, le poids démographique pèse sur la structure économique et sociale marocaine. Avec la transition démographique (baisse des taux de mortalité et de fécondité, allongement de l’espérance de vie), la part des jeunes dans la population s’est réduite et la part de la population active a augmenté, entraînant une réduction du taux de dépendance. Entre 1982 et 2002, le Maroc a connu un effet d’aubaine démographique, avec un taux de croissance de la population active supérieur à celui de la population totale. En raison d’une faible productivité du travail, d’une faible participation des femmes et d’un taux élevé d’analphabétisme, le Maroc n’a pas su tirer pleinement profit de cet effet d’aubaine et son effet sur l’emploi n’a été bénéfique qu’entre 1994 et 2002. Les changements démographiques intérieurs s’accompagnent de flux migratoires importants, notamment en provenance d’Afrique de l’Ouest. Le dernier recensement de la population (2014) fait état de 86 000 étrangers présents au Maroc (0.26 % de la population). Ce chiffre est en constante augmentation depuis le début des années 2000 (+62 %, OCDE, 2017).

L’urbanisation croissante fait peser des défis sur la conception de politiques publiques adaptées. Le taux d’urbanisation du pays est encore relativement faible (60 % en 2014 contre 66 % en Tunisie ou 83 % en Jordanie) mais son rythme très soutenu, puisqu’il se situait à 48 % en 1990. Les villes attirent en raison de leurs meilleures perspectives en matière d’emploi et d’accès aux services de base. Elles contribuent ainsi à plus de 75 % du PIB et bénéficient de 70 % des investissements (BAfD/OCDE/PNUD, 2016). Toutefois leur développement rapide pose des défis en termes de soutenabilité environnementale, de gouvernance locale et de développement inclusif. Ainsi, la création d’emplois n’est bien souvent pas suffisante pour absorber les flux de populations rurales.

La cohérence des politiques publiques apparaît insuffisante pour un développement intégré

La conception des politiques publiques en silo engendre certaines incohérences

Les stratégies sectorielles marocaines ne sont pas conçues de façon intégrée. Le Maroc a développé de nombreuses stratégies sectorielles qui ont permis de développer rapidement des pans de son économie : le Plan Maroc vert (PMV), le Plan Halieutis, le Plan d’accélération industrielle (PAI), le Plan Rawaj 2020 pour le commerce, la Vision 2020 du tourisme, le Plan solaire, la Stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique, Maroc Numeric, etc. Or ces politiques, conçues en silo, ne permettent pas d’optimiser l’intégration des différentes activités économiques. Par exemple, les aspects de formation sont souvent abordés sous un angle sectoriel et non transversal, et apparaissent dissociés des politiques éducatives et de l’innovation. Il en est ainsi du PMV et du PAI.

La définition et la mise en œuvre des politiques publiques comportent parfois certaines incohérences. Entre les politiques commerciale et industrielle, des défaillances sont observées en matière de séquençage : la stratégie industrielle a été adoptée tardivement (2005 avec le plan émergence) par rapport à la conclusion des accords de libre-échange (à partir de 1998) et n’a ainsi pas réussi à servir de relais d’exportation, l’offre exportable n’étant pas suffisamment compétitive et adaptée aux marchés des pays partenaires (Ires, 2013). Par ailleurs, il n’y a pas eu d’adaptation des tarifs douaniers suffisamment tôt dans le processus de libéralisation pour soutenir le développement des entreprises marocaines avec des intrants importés à faibles coûts (Ires, 2013). Par exemple, l’industrie agroalimentaire a été soumise à des droits de douanes sur les importations d’intrants tandis que les concurrents étrangers avaient un accès libre au marché marocain (Ires, 2013).

Plusieurs causes permettent d’expliquer l’incohérence des politiques publiques

Trois causes principales permettent d’expliquer la faible cohérence entre les politiques publiques marocaines : l’absence d’une stratégie globale à long terme, certaines faiblesses institutionnelles et des insuffisances en matière de mécanismes opérationnels.

L’absence de stratégie globale de développement au Maroc

Le Maroc ne dispose pas d’un document de politique générale du développement à long terme qui pourrait fédérer les différentes stratégies sectorielles. Les orientations générales et un certain nombre de stratégies sectorielles spécifiques répondent à un désir de promouvoir l’émergence du Maroc, comme l’a indiqué le Roi Mohammed VI à l’occasion du 61ème anniversaire de la Révolution du Roi et du peuple du 20 août 2014 : « Gagner le pari de rattraper les pays émergents n’est pas impossible, quand bien même cette entreprise recèle de nombreuses difficultés et de multiples défis ». Elles capitalisent sur les atouts du Maroc, et en particulier son capital immatériel, tout en cherchant à préserver le tissu social et en luttant contre l’exclusion : « L’élément humain reste la vraie richesse du Maroc et l’une des composantes essentielles de son capital immatériel », a ajouté le Roi. Néanmoins il n’existe pas de déclination de ces orientations en une stratégie globale fixant les objectifs, moyens et séquences de politiques publiques. Un travail de prospective stratégique à l’horizon 2030, initié dans le milieu des années 2000, a été mené par le HCP. Ce travail s’est décliné en de nombreuses études stratégiques (système financier, statut de la femme, gestion des ressources naturelles, etc.), et un travail autour de scénarios futurs pouvant affecter la sphère économique et sociale pour permettre d’orienter les choix stratégiques du pays. La qualité de ces travaux a permis d’établir des diagnostics sectoriels précis alimentant l’élaboration de certaines stratégies, mais n’ont pas fourni de document d’orientation stratégique générale dépassant la logique sectorielle. Ainsi, le Maroc ne dispose pas de document cadre de long terme permettant d’inscrire et de coordonner les actions publiques. Par exemple, il apparaît que dans le cas de la politique commerciale, le processus de négociation des accords de libre-échange ne s’est accompagné ni d’une vision stratégique pouvant servir de base commune d’échange entre tous les acteurs impliqués, ni d’évaluations d’impacts préalables (Ires, 2013).

Les visions de développement à long terme sont utiles pour orienter les efforts et guider les acteurs dans l’atteinte de résultats. De nombreux pays en disposent, comme notamment le Viet Nam qui vise à devenir une économie industrialisée en 2020, la Malaisie qui cherche à atteindre le club des pays à hauts revenus en 2020, ou encore la Jordanie avec le document stratégique à l’horizon 2025 qui décrit une série d’objectifs et plus de 400 mesures à mettre en place par le gouvernement, le secteur privé ou la société civile. Similairement, le Maroc bénéficierait ainsi d’une vision commune partagée par tous les acteurs qui orienterait stratégiquement le modèle de développement et permettrait d’accroître les performances, notamment en matière de bien-être des citoyens.

Les ateliers de prospective stratégique de l’OCDE contribuent à l’identification d’éléments clés des préférences citoyennes de la vision de développement du pays. La difficulté dans l’élaboration d’une vision commune réside dans la hiérarchisation des priorités de ses nombreuses composantes, ce à quoi s’est attelé l’atelier de prospective stratégique organisé à Rabat (encadré 1.4). L’objectif de définir les dimensions pertinentes pour le développement du Maroc, pouvant constituer les éléments d’une vision du développement, a été atteint et 23 dimensions sont ressorties : le développement du monde rural, la technologie, l’éducation, la modernisation de l’administration, la diversification de l’économie, la gouvernance, le système financier, la méritocratie, l’État de droit, les infrastructures, la citoyenneté, l’emploi, la durabilité, la régionalisation, le genre, la solidarité et la protection sociale, la santé, le bien-être, le revenu, l’entreprenariat, la mobilité sociale, la transformation digitale et les métropoles.

Encadré 1.4. Méthodologie de l’atelier de prospective stratégique « Maroc : vision du développement et défis »

La méthodologie des examens multidimensionnels par pays intègre des ateliers participatifs qui s’appuient sur des méthodes de prospective stratégique. Ceux-ci permettent de capter les connaissances tacites de la politique économique du pays, et facilitent une réflexion commune et une définition du cap de trajectoire de développement. Les premiers ateliers visent à définir les objectifs de développement spécifiques des pays à travers une réflexion commune sur le futur, les défis et l’environnement dans lequel les pays se développent.

Le premier atelier de l’examen multidimensionnel du Maroc s’est déroulé le 21 avril 2016 à Rabat sur le thème : « Maroc : vision du développement et défis ». Au cours de cette journée, une trentaine de participants, issus de l’administration publique, du secteur privé, des institutions de la société civile et du monde académique, se sont réunis pour participer à différents exercices et discussions. Les participants ont été invités à s’exprimer en tant que citoyens marocains, au-delà de leur appartenance professionnelle, et à envisager la société marocaine dans sa globalité, ainsi que la vie d’individus issus de milieux différents.

La première session avait pour objectif de réfléchir aux différents éléments devant sous-tendre la vision de développement du Maroc. Répartis en groupes de cinq à sept personnes, les participants ont été amenés à se projeter dans le Maroc 2030, défini comme un pays idéal où toutes les politiques publiques poursuivies au cours de la dernière décennie ont porté leurs fruits en amenant un niveau de développement plus élevé, et à raconter l’histoire imaginaire d’un citoyen dans ce futur. Les histoires (encadré 1.A2) ont permis de mettre en avant la dimension du genre car toutes se rapportaient à la vie de femmes marocaines éduquées et indépendantes économiquement et socialement. Seule une histoire a été pessimiste, laissant ainsi implicitement suggérer l’ampleur des défis à relever par le Maroc vis-à-vis du bien-être des citoyens. À partir des exercices de narration, l’identification et la hiérarchisation des priorités dans les éléments de la vision ont été menés. Les participants ont ainsi répertorié 23 dimensions à prendre en compte dans le cadre de la vision 2030, avec en priorité la gouvernance et l’éducation qui ont fait consensus, suivis dans une moindre mesure du développement territorial, de l’environnement, de l’entreprenariat, de la protection sociale, du bien-être et de la santé. Pour chacun de ces éléments, les participants ont évalué le potentiel de progrès à l’horizon 2030 en déclinant les défis à relever.

Source : Atelier de prospective stratégique (21/04/2016).

L’éducation et la gouvernance figurent au centre de la vision de développement national. Parmi les éléments de la vision, le système éducatif et la gouvernance paraissent phares et rejoignent les priorités émises dans le discours royal à l’occasion de la Fête du trône de 2010 : « Quant au deuxième écueil, il tient aux entraves qui caractérisent la gouvernance de ces plans, et qui doivent être impérativement éliminées. (. . .) Enfin, le troisième obstacle – qui représente en fait le plus grand défi – c’est celui qui pénalise la mise à niveau des ressources humaines ». Pour le système éducatif, la faiblesse de la rentabilité, le taux de participation bas et la qualité de la formation professionnelle feront partie des obstacles à relever. Pour la gouvernance, la nature des progrès à accomplir est multiple tant sur le plan de la lutte contre la corruption, de l’égalité devant la loi, de l’égalité des chances et des genres, ou encore de la reddition des comptes (accessibilité de l’information, interactions entre citoyens et pouvoirs publics). Le discours royal à l’occasion de la Fête du trône de 2013 rappelle ceci : « (. . .) le Maroc s’appliquera à poursuivre la dynamique qu’il a enclenchée au niveau interne, essentiellement pour réaliser plus de bonne gouvernance économique et sociale (. . .) ».

Plusieurs autres éléments apparaissent comme prioritaires et appartenant à la vision de développement national, parmi lesquels le développement territorial, la durabilité environnementale, le développement de l’entreprenariat, et l’accès à la protection sociale et aux services sociaux. La politique de régionalisation avancée doit permettre aux différentes régions d’avoir des vocations affirmées selon leur localisation et leurs spécificités intrinsèques et des modes de gouvernance efficaces (présidents élus, capacités de gestion, mécanismes efficaces de mise en œuvre des prérogatives), et à certaines zones rurales d’évoluer progressivement vers des petits centres urbains grâce à un meilleur maillage territorial en infrastructure permettant à l’État de rationaliser les services publics et d’accompagner la diversification économique. La durabilité environnementale et le rôle renforcé des énergies renouvelables dans l’agenda international (COP 22, Objectifs de développement durable 2030), s’accompagne du développement d’une conscience environnementale. L’entreprenariat, répandu au sein d’une population active avec les compétences adéquates, soutient le processus de transformation structurelle et les secteurs créateurs de richesse à plus forte valeur ajoutée. La protection sociale relève d’un projet de société afin de renforcer la cohésion sociale et le bien-être des populations, en généralisant les progrès à toutes leurs catégories (personnes âgées, isolées, accidentés, etc.). Enfin, le bien-être des citoyens se traduit par un accent important sur la santé en termes d’infrastructures, d’accès et de qualité des soins.

Les faiblesses des institutions gouvernementales

Les stades d’élaboration et de mise en œuvre des politiques témoignent de peu de coopération entre les services du gouvernement. L’organisation des relations entre ministères est caractérisée par les difficultés de fonctionnement rencontrées par les comités interministériels et l’insuffisance de rigueur dans le suivi des décisions prises. Ces faibles interactions entre ministères renforcent la verticalisation des politiques publiques, qui peut se retranscrire à très haut niveau lors de l’élaboration et la mise en œuvre de la nouvelle Loi organique de finances, publiée en juin 2015.

La coordination entre les acteurs gouvernementaux reste insuffisante. La gestion de la politique commerciale est représentative du manque de coordination entre les acteurs, caractérisée par une absence d’instance centrale de coordination des accords de libre-échange qui a parfois entraîné des conflits de compétences entre départements ministériels (Ires, 2013).

La coordination s’avère particulièrement importante pour augmenter l’impact des grands projets dans l’économie des régions. De même, il importe d’assurer une bonne coordination entre les différents niveaux de l’administration centrale, et d’assurer la jonction avec les autres programmes d’investissements socio-économiques locaux. Par ailleurs, une partie de l’argent gagnerait à être consacrée au développement de l’environnement de mobilité et de connectivité à la vie locale. Ces aspects qualitatifs sont importants pour obtenir des impacts socio-économiques qui dépassent les simples liens directs de sous-traitance. Il faudrait en tenir compte au niveau du montage financier et du pilotage opérationnel des projets.

Les insuffisances des mécanismes de mise en cohérence

Les stratégies sectorielles se caractérisent par des horizons temporels qui ne sont pas alignés, ce qui limite leurs effets de synergies (CESE, 2014b). Quelques stratégies ont une échéance de moyen terme fixée à 2020 (PMV, Plan Rawaj, Vision 2020 du tourisme, PAI). Toutefois pour beaucoup d’autres, les horizons diffèrent : la stratégie nationale de développement de la compétitivité logistique 2010-15, Maroc Numeric 2009-13, le Plan national de développement des échanges commerciaux 2014-16, etc. L’unification des horizons temporels des stratégies permettrait de faciliter le pilotage du changement, grâce à une meilleure évaluation de la réalisation des objectifs globaux de moyen ou long terme, l’élaboration de projections statistiques, mais aussi de renforcer la cohérence des politiques publiques (CESE, 2014b).

Les mécanismes d’harmonisation des objectifs des politiques publiques n’existent pas. Dans le cas de la politique commerciale, la faible coordination entre les acteurs a entraîné des décalages d’harmonisation des dispositions commerciales et juridiques (Ires, 2013). Ainsi, en 2009, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a souligné les risques entraînés par la signature d’accords de libre-échange hétérogènes en termes géographique, de programme de libéralisation et de dispositions juridiques (notamment pour les règles d’origine) qui risquent de complexifier le régime commercial et d’en réduire la lisibilité (OMC, 2009).

Le système d’évaluation des politiques publiques n’est pas développé, ne permettant pas de tirer des bilans des actions et réformes menées. À l’exception du secteur de l’éducation, très peu de stratégies ont bénéficié d’une évaluation externe et indépendante. Depuis 2006, au sein du Conseil supérieur de l’enseignement, devenu Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) en 2014, existe une instance de suivi et d’évaluation des réformes du système éducatif. La systématisation des évaluations des politiques publiques paraît cruciale pour le réajustement des réformes existantes, l’élaboration des réformes à venir et leurs meilleures mises en synergie. Par exemple, une évaluation du bilan du Pacte national pour l’émergence industrielle 2009-15 aurait ainsi très certainement bénéficié à l’élaboration du Plan d’accélération industrielle (2014-20). Les donateurs internationaux, tels que l’Union européenne (UE), commencent progressivement à insuffler une telle dynamique au sein de leurs projets et programmes respectifs, mais restent encore souvent confrontés à des manques de données. Ainsi, un système de veille statistique performant, permettant de suivre au jour le jour les évolutions des secteurs paraît indispensable pour un développement informé et maîtrisé du Maroc, comme a pu le faire la Turquie.

Principales contraintes au développement du Maroc : formation de compétences, élargissement de la base compétitive et cohérence des politiques.

La formation de compétences est au cœur des défis de développement du Maroc

Le niveau d’éducation de la main-d’œuvre ressort clairement de l’analyse de ce volume comme un obstacle clé au développement du Maroc. D’une part, le niveau d’éducation a une valeur intrinsèque et participe de l’intégration sociale des populations. D’autre part, le capital humain est un facteur essentiel dans la génération et la durabilité de la croissance, or il n’apporte qu’une contribution marginale à la croissance du Maroc aujourd’hui. De plus, la capacité de l’économie à générer des compétences adéquates est primordiale pour que le pays atteigne ses ambitions et dépasse un modèle de développement fondé sur l’avantage comparatif lié à la main-d’œuvre bon marché.

Les schémas observés suggèrent que le déficit quantitatif de capital humain s’accompagne d’un déficit qualitatif. Les scores issus des tests internationaux (TIMSS et PIRLS) et des évolutions nationales confirment le retard des élèves marocains dans l’acquisition des connaissances de base. Par exemple, en 2015, les élèves en 4ème primaire et en 2ème secondaire terminaient antépénultièmes aux tests TIMSS en mathématiques, tests respectivement conduits sur 49 et 39 pays (TIMMS, 2015). La faible qualité de l’éducation, couplée à la faiblesse des rendements de l’éducation dans le marché du travail, pourrait limiter la demande d’éducation de la part des jeunes.

Si le défi tient à la politique d’éducation, il va bien au-delà. La formation de capital humain se fait aussi non seulement à l’école mais aussi dans d’autres centres de formation et dans le monde du travail, or le système marocain de formation continue a des faiblesses importantes. Le manque de dynamisme du marché du travail participe aussi de la faible demande de formation de compétences de la part des jeunes, ainsi que l’inadéquation des formations proposées.

La formation de capital humain a un rôle central à jouer pour casser le cycle de transmission intergénérationnelle des inégalités. Le resserrement des inégalités entre les territoires passera par une migration rural-urbain maîtrisée et favorable ou par un développement des opportunités économiques en milieu rural et dans les villes secondaires. Dans les deux cas, l’adéquation de la formation aux opportunités et au milieu doit jouer un rôle clé pour permettre à tous les citoyens de bénéficier de ces opportunités.

Capitaliser sur les atouts de compétitivité pour générer une dynamique porteuse de l’économie

Le constat sur la performance du secteur productif soulève un paradoxe apparent : une économie très ouverte, avec des conditions de base favorables, peine à développer des secteurs dynamiques qui soient à même de générer de l’emploi et un effet d’entraînement sur le reste de l’économie. Le symptôme clé réside dans la capacité de l’économie à soutenir l’identification des opportunités et l’émergence organique de secteurs porteurs avec un avantage comparatif. Le cas du succès de l’équipement électrique, fort de son expérience dans l’électrification du Maroc, est exemplaire à ce sujet.

Ces difficultés sont en partie liées aux performances en capital humain. Le développement de secteurs porteurs, surtout dans les industries manufacturières ou les services à haute valeur ajoutée, nécessite de ressources humaines qualifiées, avec des capacités pertinentes en quantité suffisante. La stratégie marocaine de la dernière décennie s’est focalisée sur la création d’instituts de formation initiale spécifique aux secteurs porteurs. Il est incertain si cette stratégie permettrait l’émergence d’autres secteurs tirés par l’esprit d’entreprise du secteur privé.

En pratique, les succès en termes de dynamisation voire d’attraction de secteurs se sont faits en se tournant vers les marchés de l’export. Le défi est donc d’accroître les liens de ces secteurs (ou d’autres secteurs émergents) avec le tissu productif marocain, dont la majorité est peu à même de s’intégrer à ces secteurs porteurs. Une hypothèse est que malgré les facilités apparentes pour la conduite des affaires, des blocages importants demeurent (lourdeurs administratives, concurrence du secteur informel, etc.) qui pèsent particulièrement lourd sur les petites et moyennes entreprises et qui en conséquence empêchent l’essor d’un secteur d’entreprises de taille moyenne, capables de démarcher à l’export et de remplir des conditions de qualité et de rigueur nécessaires.

L’efficacité de l’action publique et la cohérence des politiques

L’efficacité de l’action publique apparaît comme une contrainte majeure au développement du Maroc. Elle se traduit par une capacité hétérogène entre les différentes administrations à faire fructifier les réformes et les stratégies sectorielles. Les rendements relativement faibles en apparence de l’investissement national sont, entre autres, tributaires de l’efficacité dans la conception et la mise en œuvre de grands projets d’investissement. Au niveau des enquêtes auprès des entreprises réalisées par la Banque mondiale, la corruption est citée comme un problème majeur qui entrave l’efficacité de l’action publique.

La nécessité de mise en cohérence des politiques sectorielles est un point d’entrée de choix pour l’amélioration de l’efficacité. En effet, une mise en cohérence reposant sur des mécanismes institutionnels aurait des effets majeurs sur de nombreux pans de l’action publique. Dans un certain nombre de domaines, la mise en cohérence des politiques publiques pourrait contribuer à débloquer les forces dynamiques de l’économie. Par exemple, les stratégies dans l’industrie, l’agriculture et la pêche visent toutes à faire de leur secteur respectif le principal moteur de l’économie marocaine et ne poursuivent ainsi pas un objectif commun. De même, bien que les stratégies de développement des secteurs supposent de solides capacités productives, les liens entre les secteurs et la politique de capital humain ne sont pas tissés, laissant ainsi le soin à chaque secteur de mettre en place ses propres processus de formation. Or, les mécanismes de mise en cohérence de politiques sectorielles construites en silos ne semblent pas remplir leur rôle efficacement. Parmi eux, on pourrait citer à titre d’exemple, le renforcement du rôle de coordination du centre de gouvernement, la formulation d’une stratégie fédératrice à moyen terme, le processus budgétaire et des réformes institutionnelles clés comme la régionalisation avancée.

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ANNEXE 1.A1. Les pays de comparaison pour l’examen multidimensionnel du Maroc

La comparaison des performances d’un pays par rapport à un autre s’avère compliquée car ces derniers font face à des défis et des opportunités variés. La prise en compte d’un groupe de pays peut remédier à cette difficulté car elle permet d’évaluer les performances d’un pays au travers d’un prisme plus large de dimensions. Par ailleurs, cela permet de formuler des recommandations plus adaptées au pays analysé, issues de la comparaison de plusieurs situations nationales présentant des similitudes.

Cette annexe présente la liste des 11 pays retenus pour étayer l’analyse des performances du Maroc, accompagnée d’un bref descriptif des aspects économiques et politiques les plus pertinents. Ces pays ont été sélectionnés en fonction de leur niveau de développement, mesuré par leur PIB par habitant, et du degré de réussite de leurs politiques économiques, pouvant être considérées comme des modèles ou des sources d’inspiration pour le Maroc. La sélection a également porté sur la similitude des structures économiques des pays, notamment en termes de dotation en ressources naturelles, du degré d’industrialisation ou de la structure des exportations. La population, le degré d’inégalité sociale et spatiale ainsi que la superficie des territoires ont également figuré comme critères d’identification afin de comparer le Maroc avec des pays ayant des caractéristiques similaires.

Pays du Maghreb et du Moyen-Orient

Tunisie

Géographiquement très proches, la Tunisie et le Maroc sont des partenaires culturels, historiques et économiques depuis l’indépendance des deux pays en 1956. Leurs relations de coopération sont régies par un cadre juridique comptant plus d’une cinquantaine d’accords et de conventions. La Révolution tunisienne de 2010-11, qui a marqué le début du Printemps arabe dans la région, a profondément marqué la situation économique et politique du pays. La Tunisie est parvenue à sortir de l’impasse politique avec l’achèvement du processus de transition et la formation d’un nouveau gouvernement en février 2015. Les conséquences sociales de la Révolution conjuguées à la faible croissance de la zone euro ont plombé l’activité en 2014, mais les perspectives tablent sur une reprise avec un taux de croissance de 3 % en 2015 et de 4.1 % en 2016. L’économie tunisienne est aujourd’hui dominée par les services et l’industrie avec un poids du secteur agricole en constante régression, passé sous la barre des 10 % du PIB. Son économie aujourd’hui diversifiée la distingue de ses autres voisins d’Afrique du Nord mais elle doit accroître la teneur en valeur ajoutée locale de ses exportations afin de faire progresser l’emploi. Dans un futur proche, la réduction du chômage, notamment celui des jeunes, et des disparités régionales constitueront des enjeux cruciaux pour le pays.

Jordanie

Dans un environnement régional marqué par les crises successives, le Jordanie s’efforce de préserver stabilité politique et entente diplomatique avec ses voisins – l’une de ses grandes forces actuelles. Depuis la fin des années 80, la Jordanie poursuit une vaste politique de modernisation économique initiée par le roi Hussein qui s’est accélérée sous le règne de son fils, le roi Abdallah II. Au cours des années 2000, le royaume a enregistré un fort taux de croissance, autour de 8 % entre 2004 et 2008, principalement porté par les services financiers (l’Arab Bank, groupe bancaire et financier jordanien, bénéficie d’une présence internationale importante). Au cours de cette décennie, les autorités ont amélioré la gestion du secteur public et mené une vaste campagne de privatisations, qui a positivement contribué à un fort afflux d’IDE. La croissance s’est aujourd’hui stabilisée à un niveau plus modeste : de 3 % en 2014, et 2.4% en 2015.

Comme le Maroc, la Jordanie dispose de ressources énergétiques très limitées, ce qui l’oblige à importer plus de 95 % de ses besoins énergétiques, dont la facture représente près de 20 % du PIB. Elle a récemment accompli d’importantes réformes dans le secteur de l’énergie afin de diversifier ses sources d’approvisionnement et de développer sa production renouvelable (éolien et solaire). La future feuille de route des autorités, appelée stratégie Jordan 2025, insiste sur un développement massif des infrastructures afin de répondre à la croissance économique et à la pression démographique du pays.

Pays de l’UE et membres de l’OCDE

Espagne

L’Espagne est la 5ème économie de l’UE et la 12ème puissance économique mondiale. Marqué au cours des années 2000 par une croissance très forte, liée en partie à un essor de la construction dans l’immobilier, le pays a été ébranlé par la crise de 2008. Ces dernières années, l’Espagne a renoué avec la croissance grâce à un programme de réformes fiscales et bancaires ambitieuses qui ont permis de stimuler les exportations et de soutenir la demande intérieure. Le chômage, qui touche encore plus de 20 % de la population active, reste le défi économique et social le plus urgent. De par leur proximité géographique, l’Espagne et le Maroc sont des partenaires économiques naturels de longue date. L’Espagne est devenue le premier partenaire commercial du Maroc alors que ce dernier attire plus de la moitié des investissements espagnols en Afrique, notamment dans les secteurs de l’industrie, du tourisme et de la banque.

Turquie

La Turquie, 17ème puissance économique mondiale, ambitionne de se hisser à la 10ème place en 2023. Depuis la crise financière de 2001, caractérisée par une inflation galopante, ce pays a mené une série de réformes financières et bancaires avec comme point d’orgue l’adoption d’une nouvelle monnaie en 2005. Il a également soutenu les réformes en faveur des affaires, a axé son développement sur l’exportation de produits industriels et a su maîtriser ses dépenses publiques. Autant de mesures qui ont permis de multiplier par deux le PIB par habitant entre 2002 et 2012. Le pays est aujourd’hui un grand producteur et exportateur de produits agricoles, de textile et de matériel de construction, soutenu par un secteur privé efficace et robuste. Maroc et Turquie sont liés par un accord de libre-échange depuis 2006 dans lequel le Maroc exporte des phosphates et importe des équipements électroménagers. Après la forte croissance des années 2000 (5.2 % en moyenne entre 2002 et 2012), la Turquie a vu son rythme ralentir ces dernières années (2.2 % en 2012, 4.1 % en 2013), en ligne avec celui enregistré au Maroc sur les mêmes années. La croissance turque est néanmoins très tributaire de la demande intérieure et des financements extérieurs. Comme le Maroc, la Turquie importe plus de 70 % de ses besoins énergétiques. Ces dernières années, la Turquie n’a eu de cesse de se rapprocher des institutions économiques, commerciales et financières dominées par les pays occidentaux. Enfin, le pays constitue une puissance régionale qui s’est efforcée de préserver la stabilité avec le Proche et le Moyen-Orient.

Corée

La Corée, économie développée, fait partie des plus ouvertes aux échanges extérieurs dans le monde. Son économie repose largement sur les exportations de produits finis tels que l’électronique grand public, la construction navale ou les automobiles. Le pays a connu de larges restructurations depuis le début des années 2000 en s’ouvrant aux investisseurs étrangers, industriels et financiers, et en multipliant les accords de libre-échange. La Corée dispose d’un excellent réseau d’infrastructures et d’un environnement macroéconomique sain, qui contribuent à sa compétitivité internationale. La qualité de son système éducatif constitue l’une de ses principales forces : en 2014, son taux de scolarisation brut dans l’enseignement tertiaire est le plus élevé au niveau mondial. Sa capacité à innover, la sophistication de son climat des affaires et son degré important d’adoption technologique font également partie de ses points forts. Comme le Maroc, la Corée est faiblement dotée en ressources pétrolières et importe plus de 80 % de ses besoins énergétiques.

Pays asiatiques industrialisés et à forte croissance

Malaisie

La Malaisie, avec un taux de croissance annuel moyen d’environ 6.5 % entre son indépendance en 1957 et le milieu des années 2000, représente l’un des principaux succès asiatiques. Par le passé, le pays était l’un des plus grands producteurs d’huile de palme, de caoutchouc et d’étain, mais son économie s’est progressivement transformée et repose désormais principalement sur les services et l’industrie manufacturière. Le pays reste très exposé aux fluctuations du commerce international, ce qui explique la chute de croissance observée pendant la dernière crise financière. La croissance a toutefois atteint 6 % en 2014, grâce à une reprise des échanges commerciaux internationaux et l’amélioration de la situation économique des principaux pays industrialisés. Les niveaux élevés d’investissement privé (domestique et étranger) ont joué un rôle clé dans le développement de la Malaisie, lui permettant de diversifier et moderniser son économie. Enfin, ce pays figure dans le haut du classement de l’indice du climat des affaires 2014 de la Banque mondiale.

Viet Nam

Suite aux réformes politiques et économiques, connues sous le nom de « Doi Moi » (ou « Renouveau »), introduites en 1986, le Viet Nam a connu un taux de croissance économique soutenu qui a permis d’améliorer significativement le niveau de développement humain. Entre 1990 et 2012, le score du Viet Nam au sein de l’indice de développement humain du PNUD a augmenté de 40 %, principalement tiré par la croissance du PIB par habitant. Le Viet Nam est l’un des principaux exportateurs de produits agricoles et attire de nombreux IDE qui contribuent au soutien de la croissance. La majorité des entreprises vietnamiennes sont des PME. Au cours de la dernière décennie, la part des travailleurs occupant des emplois non qualifiés a chuté de 10 % et la part des travailleurs occupant des emplois très qualifiés a pratiquement triplé.

Pays avec de fortes inégalités sociales et/ou spatiales

Afrique du Sud

Avec un PIB estimé à plus de 350 milliards USD, l’Afrique du Sud, économie la plus avancée du continent, présente de nombreux atouts. Elle dispose d’importantes ressources minières (l’Afrique du Sud est l’un des premiers producteurs d’or mais recense également de fortes réserves de charbon, de platine et d’argent), a su développer des infrastructures modernes sur l’ensemble du territoire et concentre quelques-unes des principales multinationales africaines. Le pays s’est également doté d’un robuste arsenal juridique, particulièrement efficace en matière de droit des affaires. Membre du G20, l’économie émergente africaine est également un acteur diplomatique de poids en Afrique, dont la voix compte sur la scène internationale. Le pays poursuit sa transition d’une économie minière vers une économie plus diversifiée avec un puissant secteur des services qui représente aujourd’hui près de 70 % du PIB. Le secteur des services financiers est particulièrement développé.

Cependant, plus de 20 ans après la fin de l’apartheid, le pays souffre de profondes distorsions sociales, marquées par un haut niveau de chômage (à la fin de 2014, il frappait 24 % de la population active totale, et 49 % des jeunes) et de fortes inégalités de revenu (coefficient de Gini de 0.7, supérieur à ce qu’il était à la fin de l’apartheid). Dans ce contexte social tendu, la criminalité reste un fléau national alors que le système de santé se caractérise par un système à deux vitesses avec un taux de prévalence du HIV/Sida très élevé. Enfin, l’éducation demeure un problème d’importance critique qui contribue à la persistance d’un chômage élevé. Le Plan national de développement, qui vise à l’élimination de la pauvreté et la réduction des inégalités d’ici 2030, met l’accent sur la création d’emplois et l’amélioration de l’éducation. Les mesures politiques proposées dans ces domaines pourront servir de référence pour le Maroc qui connaît, dans une certaine mesure, des problématiques similaires en matière de chômage et d’éducation.

Chili

Le Chili apparaît aujourd’hui comme l’une des économies les plus stables et les plus dynamiques d’Amérique du Sud. Les industries minières (et notamment le cuivre) et manufacturières, les services financiers, les services à la personne sont les principaux secteurs qui tirent aujourd’hui l’économie. L’industrie du cuivre a su bénéficier d’une politique juridique favorable et d’un climat propice aux investissements qui ont permis de hisser le Chili au rang de premier producteur mondial avec plus d’un tiers du marché et la moitié des exportations. Afin de minimiser l’impact de la volatilité du marché du cuivre sur l’économie chilienne, le gouvernement a créé en 1985 le Fonds de stabilisation du cuivre. Ce fonds profite des hausses de prix du marché pour collecter une partie des revenus afin de protéger l’économie en cas de chute des cours.

L’industrie des services a également enregistré une croissance rapide ces dernières années, notamment grâce aux progrès réalisés en matière d’accès à l’éducation et aux avancées notables dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. Ce secteur a en effet été libéralisé sous l’impulsion du gouvernement et a permis la conclusion de plusieurs accords de libre-échange. L’industrie des services a aujourd’hui réussi à s’exporter et à se spécialiser dans les services maritimes et aéronautiques, le tourisme, les services informatiques et d’ingénierie, l’éducation et la santé.

Classé au 33ème rang des pays les plus compétitifs dans le Rapport sur la compétitivité mondiale de 2014, le Chili a su tirer profit de l’efficacité de ses marchés financiers, de son environnement économique, de ses faibles niveaux de corruption et plus globalement de la qualité de ses institutions.

Sur le plan social, même si les inégalités demeurent importantes, le Chili a connu une baisse significative de ses niveaux de pauvreté et enregistre aujourd’hui l’un des taux de pauvreté les plus bas d’Amérique latine (moins de 15 %).

Pérou

Au cours des deux dernières décennies, la situation socio-économique du Pérou s’est considérablement améliorée dans un contexte international favorable à la mise en place de réformes économiques. Au cours de cette période, le pays a enregistré une solide croissance économique, de l’ordre de 5.3 % par an en moyenne entre 2000 et 2014, qui s’est accompagnée d’une réduction significative de la pauvreté (60 % de la population était considéré comme pauvre en 2004 contre 23 % en 2014). L’émergence d’une classe moyenne, qui représente aujourd’hui plus d’un tiers de la population totale, constitue l’un des traits marquants de l’histoire récente du Pérou. Le pays s’est engagé dans un processus d’industrialisation basé sur une ouverture économique et une politique fiscale et monétaire solide, capable d’endiguer les fortes pressions inflationnistes enregistrées au cours des années 80. Naturellement doté en ressources naturelles, le Pérou s’efforce de diversifier son économie vers les services afin de minimiser son exposition à la volatilité du prix des matières premières.

Cependant, ces solides performances macroéconomiques tardent à se diffuser dans la société péruvienne qui est encore marquée par de fortes inégalités, tant en termes de revenu que de bien-être. Le coefficient de Gini au Pérou est estimé à 0.45 en 2013, en ligne avec le dernier coefficient marocain disponible estimé à 0.40 (2014). Comme pour le Maroc, ces inégalités se retrouvent également au niveau spatial, entre les zones urbaines de la capitale et le reste du pays, notamment les zones rurales de la Sierra et de l’Amazonie. Ces inégalités sont ainsi largement supérieures à la moyenne des pays de l’OCDE. Par ailleurs, l’économie du pays est marquée par le poids de l’économie informelle.

Pologne

Après la chute du régime communiste, la Pologne s’est engagée dans un vaste programme de modernisation et de transformation vers une économie de marché qui lui a progressivement permis de se rapprocher des niveaux de vie de ses voisins d’Europe occidentale. Même si les débuts de la « thérapie de choc » ont été douloureux dans un premier temps, la Pologne est aujourd’hui vue comme l’un des pays qui a le mieux réussi sa transition. En effet, de tous les pays en transition, la Pologne est celui où la croissance du PIB a été la plus forte, où la libéralisation de l’économie a été la plus rapide et où les inégalités ont le moins progressé grâce à de généreux programmes de transferts sociaux. Ce dynamisme a été stimulé par son adhésion à l’UE en 2004. Au cours de la dernière décennie, la Pologne a été l’une des économies les plus dynamiques d’Europe centrale et orientale, avec un taux de croissance moyen de l’ordre de 4 % par an, loin devant la moyenne européenne.

L’économie du pays s’appuie sur une large base industrielle (près de 25 % de la valeur ajoutée du PIB) spécialisée dans la transformation de produits intermédiaires, mais elle a également su se diversifier avec le développement massif des services (financiers comme aux entreprises) au cours des dernières années. Avec plus de 38 millions d’habitants et un PIB de près de 400 milliards EUR, la Pologne apparaît comme le plus grand marché intérieur de la région et attire massivement les investisseurs étrangers (le stock d’IDE en Pologne a plus que quadruplé, passant de 57.9 à 252 milliards USD entre 2003 et 2013).

ANNEXE 1.A2. Atelier de prospective – exercices de narration

Histoire 1

Amal est née dans l’Atlas, à Anfgou, un village rural défavorisé. Elle a pu suivre sa scolarité en bénéficiant du programme d’aide à la scolarisation marocain, Tayssir, et des transports publics scolaires. Sa famille, trop vulnérable pour rester dans l’Atlas, a décidé de déménager en périphérie de Casablanca. Dans ce nouvel environnement, Amal s’est retrouvée en situation d’échec scolaire mais elle a réussi à rebondir en intégrant l’École de la deuxième chance qui lui a permis de rejoindre un cursus de formation professionnelle de qualité et d’obtenir un diplôme de technicienne. En 2030, Amal est heureuse, elle travaille dans le secteur aéronautique, bénéficie d’une couverture médicale, s’est mariée et est mère de deux enfants scolarisés dans une école publique jouissant d’une bonne réputation dans la société. Plus tard, Amal décide de créer sa propre structure de sous-traitance et s’engage dans la vie associative.

Histoire 2

C’est l’histoire d’une femme née en 1980. Elle a fait ses études dans l’école publique et a poursuivi des études universitaires, terminées avec une licence en biologie. Après quatre années de chômage, elle a fini par trouver un travail, payé au salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig), dans une usine de câblage automobile. En 2030, cette femme n’est pas heureuse, elle gagne un salaire de 6 000 MAD, elle est toujours célibataire et a ses parents à charge. Elle s’est battue en vain pour obtenir un logement social. Elle est frustrée de ne pas avoir réussi sa carrière professionnelle malgré sa solide formation en biologie.

Histoire 3

En 2030, notre héroïne Ito a 32 ans et travaille à l’Agence régionale d’exécution des projets, créée dans le cadre de la régionalisation. Elle dispose d’un diplôme universitaire en gestion et a suivi en 2018 une formation additionnelle sur la durabilité. Dans le cadre d’un partenariat avec une association espagnole, elle a développé un concept de quartier résidentiel écologique autour d’une ferme agricole. Elle habite dans ce nouveau quartier qui se situe désormais à une quinzaine de kilomètres de son travail grâce au passage d’une nouvelle autoroute. En 2020, le gouvernement a lancé un programme pour faciliter l’acquisition de voitures électriques dont Ito a pu bénéficier. Ito a la chance d’avoir une bonne qualité de vie. Elle travaille parfois de la maison et s’est investie dans le milieu associatif et politique en créant un nouveau parti de Démocratie sociale.

Histoire 4

Kenza est née le 22 avril 2006 à Anfgou. Elle est l’aînée d’une fratrie de trois enfants. Son père travaille dans une activité pastorale alors que sa mère est au foyer. Excellente élève, elle obtient une bourse pour suivre sa scolarité dans une école d’excellence et intègre l’une des meilleures universités marocaines, classées dans le top 10 des universités de la région Afrique du Nord et Moyen-Orient. Dans le cadre de ses études supérieures, elle rejoint la junior entreprise de son université et développe un projet innovant dans le cadre de l’économie numérique pour promouvoir les musiques marocaines. Ce projet naissant lui offre la possibilité de créer sa propre maison d’édition pour organiser des concerts à l’échelle du Maghreb. Toutes les démarches administratives peuvent se faire depuis son portable et elle obtient des financements grâce aux plateformes de financement participatif (Crowdfunding) et à l’accompagnement de certains « Business Angels ». Kenza habite dans une grande ville, et a réussi avec facilité à trouver un logement moderne. Elle vit seule et est heureuse du succès de son auto-entreprise.

Histoire 5

Meriem est une femme active, mariée avec deux enfants. Elle vit dans un Maroc moderne où l’air est pur. Grâce aux incitations financières de l’État, les Marocains sont désormais attentifs aux défis environnementaux qui peuvent affecter le développement du pays. Dans ce cadre, Meriem a équipé son logement d’un chauffe-eau solaire qui lui permet de fonctionner uniquement à l’énergie solaire, et son foyer utilise désormais les énergies renouvelables. Ses enfants poursuivent leur scolarité à l’école publique qui, au-delà de l’enseignement, offre des activités épanouissantes aux enfants. Le réseau de transports publics fonctionne bien et lui permet de rentrer à son domicile à l’heure du déjeuner. Après sa journée de travail, Meriem se rend au parc avec ses enfants et retrouve ses amies, avec lesquelles elle échange sur la possibilité de développer un centre de quartier pour l’insertion des enfants défavorisés. Ce projet est soutenu par le ministère de la Jeunesse et devrait bientôt voir le jour. Meriem se sent heureuse d’avoir la possibilité de contribuer au développement social de sa ville.

Notes

← 1. En 2011, 40 % des Marocains interrogés jugeaient les élections de 2011 libres et honnêtes (Afrobarometer, 2015).

← 2. Il s’agit du nombre d’années de scolarité qu’un élève commençant son parcours aujourd’hui effectuerait si les taux de scolarisation et de progression restaient en l’état.

← 3. Le HCP décrit la violence psychologique comme tout acte qui « consiste à dominer ou à isoler une femme, ainsi qu’à l’humilier ou à la mettre mal à l’aise » (HCP, 2011).

← 4. Propos recueillis au cours des différents entretiens menés.

← 5. Lancé en 2009, le Sigi est une mesure des facteurs des écarts et inégalités liés au genre entre les 160 pays qui sont représentés dans l’indice. Les institutions sociales discriminatoires regroupent les lois formelles et informelles, les normes sociales et les pratiques qui restreignent ou excluent les femmes et par conséquent limitent leurs accès aux droits, justice et capacités d’autonomisation. En tant qu’indicateur composite, le Sigi mesure les pays sur la base de 14 indicateurs, notamment le mariage précoce, les préférences liées à la fertilité, la participation à la vie politique, l’accès sécurisé à la terre et l’accès aux services financiers.

← 6. Chaque indicateur est normalisé par une transformation qui consiste à régresser l’indicateur sur le niveau de PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat, puis calculer l’écart entre la valeur observée et la valeur prédite et le normaliser par l’écart-type de la distribution de l’indicateur pour l’ensemble de pays de plus d’un million d’habitant. L’exercice est répété pour les seuls pays de revenu moyen en guise de test de robustesse. Les résultats qualitatifs ne sont pas modifiés sensiblement. Des moyennes sur trois ans sont considérées pour chaque indicateur afin de lisser les comportements cycliques et atténuer les problèmes liés aux données manquantes.

← 7. Toutefois, il convient de signaler que le déficit commercial le plus important du Maroc est réalisé avec la Chine, pays avec lequel le Maroc n’a pas signé d’accord de libre-échange.