Chapitre 1. Évaluation et recommandations
La contribution positive des migrations au développement est de plus en plus reconnue, et des politiques ciblées sont conçues pour maximiser leurs bénéfices aussi bien dans les pays d’origine que de destination. Mais l’on comprend moins clairement : (1) comment les migrations influent sur divers secteurs clés pour le développement tels que le marché de l’emploi, l’agriculture, l’éducation, l’investissement et les services financiers, et la protection sociale et la santé ; (2) comment les différentes politiques sectorielles peuvent renforcer ou affaiblir l’impact des migrations sur le développement. Le projet Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD), mené dans dix pays en développement entre 2013 et 2017, analyse ces liens en s’appuyant sur une analyse quantitative et qualitative. Ce chapitre, qui donne une vue d’ensemble des conclusions de l’étude, explique de quelles façons les migrations (émigration, transferts de fonds, migrations de retour et immigration) peuvent stimuler le développement, et quelles politiques sectorielles le permettent. Il conclut sur la nécessité d’adopter une approche pangouvernementale dans laquelle les migrations font partie intégrante des stratégies de développement des pays, tout en faisant l’objet d’une approche cohérente aux niveaux bilatéral et régional.
Alors qu’ils ne représentent que 3 % de la population mondiale, les migrants internationaux se sont retrouvés au cœur du débat public avec la crise des réfugiés de 2015-16 (OCDE, 2016). À cet égard, l’année 2015 a représenté un moment charnière de la question migratoire à l’échelle mondiale. D’une part, l’afflux massif de réfugiés a exacerbé les débats sur la capacité des communautés d’accueil à absorber et à intégrer les immigrés, ce qui a favorisé à travers le monde une tendance en faveur de politiques migratoires plus restrictives. D’autre part, en adoptant le Programme d’action d’Addis-Abeba de 2015 (NU, 2015a) et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 (NU, 2015b), la communauté internationale du développement a pris acte de la contribution positive que les migrants peuvent apporter au développement durable, aussi bien dans leur pays d’origine que dans celui de destination. Les Objectifs de développement durable (ODD) traduisent ainsi la nécessité de défendre les droits des travailleurs migrants, en particulier les femmes (cible 8.8), de mettre en œuvre des politiques migratoires bien gérées (cible 10.7) et de réduire les coûts de transaction des transferts de fonds (cible 10.c) (NU, 2015b).
C’est dans ce contexte que le Centre de développement de l’OCDE a lancé le projet Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD), cofinancé par le Programme thématique Migration et Asile de l’UE. Ce vaste projet fondé sur des données empiriques a été mené entre 2013 et 2017 dans dix pays en développement où les taux d’émigration et d’immigration sont significatifs : Arménie, Burkina Faso, Cambodge, Costa Rica, Côte d’Ivoire, Géorgie, Haïti, Maroc, Philippines et République dominicaine. Ce projet visait à fournir aux responsables de l’action publique des éléments probants sur le potentiel de développement encore inexploité qu’offrent les migrations et sur le rôle joué par plusieurs politiques sectorielles pour concrétiser ce potentiel. Ce chapitre donne une vue d’ensemble des conclusions tirées des travaux menés dans ces dix pays et résume les principales implications pour les politiques publiques.
Un cadre conceptuel et méthodologique novateur pour analyser les liens entre politiques publiques, migrations et développement
S’il existe de nombreuses preuves des impacts – positifs ou négatifs – des migrations sur le développement1, les raisons pour lesquelles les responsables de l’action publique devraient intégrer les migrations dans la planification du développement manquent encore de fondements empiriques. Le projet IPPMD visait à combler ce manque de connaissances en apportant des preuves fiables touchant non seulement la contribution des migrations au développement, mais aussi la façon dont les politiques menées dans plusieurs secteurs peuvent la renforcer. Pour ce faire, l’équipe IPPMD a conçu un cadre conceptuel établissant des liens entre quatre dimensions migratoires (émigration, transferts de fonds, migrations de retour et immigration) et cinq secteurs clés : marché de l’emploi, agriculture, éducation, investissement et services financiers, et protection sociale et santé (graphique 1.1)2.
Le cadre conceptuel établit également des liens entre les politiques adoptées dans ces cinq secteurs et divers résultats en matière de migrations (tableau 1.1).
Ensemble, le cadre méthodologique conçu par le Centre de développement de l’OCDE et les données recueillies par ses partenaires locaux de recherche offrent la possibilité de combler des lacunes significatives en termes de connaissances dans le domaine des migrations internationales et du développement. En raison de plusieurs de ses caractéristiques, l’approche IPPMD est sans équivalent et jette un éclairage important sur la façon dont la relation à double sens entre migrations et politiques publiques influe sur le développement (pour les détails, voir chapitre 2) :
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L’étude a été menée dans tous les pays avec les mêmes instruments et pendant la même période (2014-15), permettant ainsi les comparaisons entre pays.
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Plusieurs dimensions migratoires et résultats en matière de migrations étaient couverts (tableau 1.1), donnant ainsi une vue d’ensemble complète du cycle migratoire.
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Un vaste éventail de programmes liés aux politiques menées dans les cinq secteurs clés ont été analysés dans les pays étudiés.
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Grâce à la combinaison d’instruments quantitatifs et qualitatifs, un nouvel ensemble important de données primaires a été recueilli dans les dix pays partenaires :
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Une enquête sur les ménages couvrant en moyenne 2 000 ménages – avec ou sans émigré – a été menée dans chaque pays. Au total, plus de 20 500 ménages ont été interviewés dans le cadre du projet.
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Une enquête sur les communautés a porté au total sur 590 autorités locales et chefs de communauté dans les communautés où le questionnaire sur les ménages a été administré.
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Des entretiens qualitatifs ont été menés avec des parties prenantes clés représentant les autorités nationales et locales, le milieu universitaire, des organisations internationales, la société civile et le secteur privé, soit 375 entretiens au total pour les dix pays.
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Les données ont été analysées à la fois au moyen de techniques descriptives, afin de déterminer les tendances et corrélations générales entre les variables clés concernant les migrations et le développement, et de techniques de régression, afin d’approfondir la compréhension de ces interactions en prenant en compte d’autres facteurs (chapitre 2).
Les résultats des travaux empiriques du projet IPPMD confirment que les migrations peuvent contribuer au développement à la fois dans les pays d’origine et de destination, mais que leur potentiel n’est pas encore pleinement exploité dans la plupart des pays partenaires (tableau 1.2). Même si elles peuvent avoir des effets indésirables sur le tissu économique et social des pays d’origine et de destination des migrants, les migrations offrent sur le long terme de nombreuses opportunités aux pays en développement.
Les conclusions quantitatives et qualitatives du projet IPPMD montrent également que les politiques sectorielles ont des répercussions sur plusieurs résultats en matière de migrations, notamment la décision d’émigrer, l’utilisation et les montants des transferts de fonds, la durabilité du retour et l’intégration des immigrés. Toutefois, les effets des politiques sectorielles diffèrent parfois de ce à quoi on pourrait s’attendre (tableau 1.3). Cela tient à la façon dont les politiques sont conçues et mises en œuvre. La durée et la couverture d’un programme donné peut expliquer en partie les différences entre résultats attendus et résultats réels. Dans de nombreux cas, le nombre d’individus ou de ménages couverts par des politiques publiques spécifiques telles que les programmes d’emplois publics, les subventions agricoles ou les transferts monétaires conditionnels est plutôt limité, et lorsqu’ils sont couverts, c’est généralement dans des conditions strictes ou pour une brève période. L’objectif des politiques sectorielles, leur conception et leur mise en œuvre peuvent également différer selon les pays et dépendre du contexte propre à chacun. Par conséquent, des politiques similaires peuvent avoir des effets différents selon les pays. C’est pourquoi la diversité des pays partenaires du projet IPPMD est précieuse pour comprendre dans quelles conditions les politiques sectorielles influent sur les migrations, et de quelle manière elles le font.
Les quatre sections suivantes analysent le potentiel de développement des dimensions migratoires étudiées et les façons dont les politiques sectorielles influent sur ce potentiel.
L’émigration constitue un atout puissant, mais sous-exploité, pour le développement
L’émigration est un atout important pour le développement des migrants eux-mêmes et des familles qu’ils laissent derrière eux, ainsi que pour leurs communautés et pays d’origine. C’est le cas dans la plupart des pays partenaires du projet IPPMD, où le taux d’émigration va de 2,8 %, au Costa Rica, à 31,1 %, en Arménie (graphique 1.2).
L’émigration peut soulager les marchés de l’emploi, améliorer les compétences et stimuler l’autonomie des femmes
Si l’émigration peut affecter négativement les ménages à travers la perte de main-d’œuvre qu’elle entraîne, les conséquences négatives pour les ménages sont susceptibles de se limiter au court terme et, possiblement, d’être minimes.
Malgré des pertes de main-d’œuvre à court terme, l’émigration peut avoir un effet positif à long terme
La perte de main-d’œuvre due à l’émigration peut avoir un impact significatif sur les membres du ménage, en particulier parce que les migrants sont souvent dans leurs années les plus productives. À leur départ, les émigrés de l’échantillon IPPMD ont en moyenne entre 25 et 36 ans, et ils sont généralement plus jeunes que les autres adultes du ménage. Leur taux d’emploi avant leur départ est également plus élevé que celui des non-migrants. Cependant, d’après l’enquête, plus des deux tiers des émigrés partent pour trouver de meilleures opportunités d’emploi. Quand ils y parviennent, leurs transferts de fonds pourraient permettre de rembourser toute dette contractée pour financer leur émigration ainsi que de compenser le coût d’opportunité résultant de la perte d’un membre actif du ménage.
L’émigration peut atténuer le sous-emploi
Le coût de l’émigration est plus élevé pour certains secteurs que pour d’autres. Le secteur agricole a beau subir des pertes plus importantes en termes de capital humain que les secteurs de la construction et de l’éducation, il souffre généralement d’un excédent de main-d’œuvre dû au sous-emploi. L’émigration pourrait soulager les pressions s’exerçant sur ce secteur et même aider à la transition du pays vers une économie plus diversifiée. De fait, il ressort de l’analyse que les ménages agricoles avec un émigré sont plus susceptibles d’embaucher des travailleurs extérieurs au ménage pour travailler sur l’exploitation (chapitre 4). Cela donne certaines indications que l’émigration réduit les pressions s’exerçant sur les emplois peu productifs dans les secteurs touchés par un excédent de main-d’œuvre et le sous-emploi.
L’émigration peut constituer une incitation à améliorer les compétences
L’émigration peut entraîner des pénuries de compétences plus marquées dans certains secteurs. Le coût est particulièrement élevé lorsque les émigrés sont diplômés de l’enseignement supérieur. Les données IPPMD suggèrent que, dans certains pays, les émigrés sont en général les individus les plus qualifiés et que les personnes les plus éduquées sont les plus susceptibles d’avoir l’intention d’émigrer. Cependant, l’émigration peut aussi constituer un élément déclencheur et pousser les individus à améliorer leurs compétences afin d’être en mesure d’émigrer. La réussite des professionnels de la santé qui émigrent, par exemple, peut inciter de futures cohortes à devenir médecins ou infirmières. Cela ne signifie pas que tous finiront par quitter le pays. En réalité, les effectifs des professionnels de la santé sont susceptibles d’augmenter dans les pays, tels que les Philippines, où le taux d’émigration des médecins et des infirmières est élevé.
L’émigration peut accroître l’indépendance économique des femmes
En général, les émigrés sont plus souvent des hommes que des femmes. Les données IPPMD montrent qu’il y a plus de chances qu’une femme soit chef du ménage dans les foyers avec un émigré. C’est particulièrement frappant en Arménie, au Cambodge, au Maroc et aux Philippines. Les parties prenantes interviewées dans ces pays ont confirmé une redistribution des rôles entre les hommes et les femmes dans les ménages avec un émigré. En tant que chefs de ménage, les femmes assument la responsabilité des décisions économiques et des transactions sur les marchés, ce qui accroît leur indépendance économique. L’émigration des hommes peut donc se traduire par davantage de responsabilités et d’autonomie pour les femmes restées au pays.
Comment les politiques sectorielles influent-elles sur l’émigration et le développement ?
Bien que l’émigration procure des occasions favorables aux pays d’origine, sa contribution au développement reste relativement limitée. Cela peut tenir à ce que les ménages restés au pays n’ont pas les outils pour surmonter les effets négatifs à court terme liés au départ d’un ou de plusieurs membres du ménage, ou à ce que le pays ne dispose pas des mécanismes adéquats pour tirer pleinement parti du potentiel de développement de l’émigration. De plus, le rôle que les politiques publiques jouent pour renforcer la contribution positive de l’émigration au développement peut être limité.
L’inefficience des marchés de l’emploi et l’inadéquation des compétences incitent à l’émigration
L’inefficience des marchés de l’emploi dans les pays en développement est un facteur clé de l’émigration. Alors même que des emplois sont offerts, employeurs et employés potentiels ne parviennent pas toujours à entrer en contact. C’est particulièrement frappant dans les zones les plus pauvres et les plus isolées. Si les individus émigrent, c’est souvent parce qu’ils ne trouvent pas un (bon) emploi, qui leur procure une sécurité aux plans matériel, social et financier. Les politiques actives du marché du travail (PAMT), en particulier les agences gouvernementales pour l’emploi, peuvent contribuer à réduire l’émigration en améliorant l’accès à l’information sur les besoins du marché de l’emploi.
Les données IPPMD montrent que, dans la plupart des pays, la proportion des individus qui n’ont pas l’intention d’émigrer est plus élevée chez ceux qui ont trouvé un emploi grâce à une agence gouvernementale pour l’emploi. Beaucoup d’entre eux ont un niveau d’instruction élevé, et, en moyenne, 77 % de ceux qui ont trouvé un emploi grâce à une agence de ce type travaillent dans le secteur public (90 % au Burkina Faso), ce qui est souvent considéré comme une profession sûre. Il existe des agences gouvernementales pour l’emploi dans tous les pays partenaires du projet IPPMD, sauf Haïti, même si elles diffèrent en termes de taille, de couverture géographique, de plateformes d’échange d’informations, d’efficacité et de notoriété auprès du public.
Les politiques qui atténuent les contraintes financières ne réduisent pas toujours l’émigration
La plupart des individus émigrent afin d’améliorer leurs conditions de vie : on s’attendrait donc à ce que les politiques qui atténuent les contraintes financières – comme les subventions, les transferts monétaires et les autres formes d’aide financière – les dissuadent d’émigrer. Cependant, il peut être coûteux d’émigrer et les ménages avec un émigré ne sont généralement pas les plus pauvres du pays. Si l’accès au crédit s’améliore ou que les niveaux de revenu augmentent en général dans le pays, l’émigration pourrait en fait augmenter chez les ménages qui ne pouvaient pas se le permettre auparavant.
Comme le montrent les données empiriques du projet IPPMD, l’effet dépend du type de politique concernée. Par exemple, les transferts monétaires conditionnels sont habituellement accordés sous condition de scolarisation des enfants, et parfois ils sont également liés à d’autres exigences – comme un examen de santé régulier des membres du ménage –, ce qui peut exiger que les parents restent au pays. De tels transferts semblent bien réduire l’émigration (chapitre 5). Les subventions agricoles, quant à elles, consistent souvent en transferts forfaitaires ou en intrants moins coûteux : cela réduit les contraintes financières mais n’oblige pas les exploitants agricoles à rester au pays. Les résultats montrent que ces subventions accroissent l’émigration chez les membres des ménages bénéficiaires dans les pays pauvres.
Les politiques de développement des compétences accroissent l’émigration s’il n’y a pas d’emplois correspondants
L’inadéquation entre la demande et l’offre de compétences peut être un facteur encourageant l’émigration. Cette situation peut survenir lorsque le système éducatif et de formation ne parvient pas à développer les compétences qu’exige le marché de l’emploi. Cela vient non seulement de ce que les pays pauvres manquent de ressources pour investir dans le capital humain, mais aussi du manque de coordination entre les établissements d’enseignement et les employeurs, en particulier le secteur privé. Par conséquent, investir dans l’acquisition et l’amélioration des compétences et favoriser la coordination entre les différents acteurs impliqués dans l’éducation et la formation devrait contribuer à réduire à la fois les inadéquations de compétences et les pressions à l’émigration.
L’effet de la formation professionnelle sur les décisions migratoires dépend de son résultat sur le marché de l’emploi. Si la formation renforce les compétences, les personnes peuvent trouver de meilleurs emplois sur le marché de l’emploi domestique, ce qui réduit leur incitation à émigrer. Mais, si elle ne débouche pas sur le bon emploi ou sur un revenu plus élevé, cela peut les inciter à se retirer du marché de l’emploi domestique et à chercher un emploi à l’étranger. Le graphique 1.3 compare l’intention d’émigrer chez les personnes actives et inactives selon qu’elles ont ou non participé à des programmes de formation professionnelle. Dans la plupart des pays, la proportion de personnes ayant l’intention d’émigrer est plus élevée parmi celles qui ont participé à un programme de formation professionnelle. Il est également possible que certaines participent à des programmes de formation professionnelle dans le but de trouver un emploi à l’étranger. L’Arménie et le Cambodge font exception à la règle : les intentions d’émigrer sont plus marquées dans les groupes professionnels peu qualifiés que dans les groupes professionnels très qualifiés (chapitre 3). Dans ce contexte, la formation professionnelle peut contribuer à la mobilité ascensionnelle de la main-d’œuvre et réduire les incitations à chercher du travail à l’étranger.
Les politiques qui limitent le risque peuvent réduire l’émigration, mais n’y suffisent pas toujours
Outre le marché de l’emploi et les contraintes financières, l’exposition au risque peut également pousser les individus à émigrer, même s’ils ont un travail et de l’argent. Ainsi, les personnes qui ont un contrat de travail formel, à durée déterminée ou indéterminée, ouvrant droit à une protection sociale peuvent être moins susceptibles d’émigrer que celles qui n’en ont pas. Les contrats de travail plus formels assurent en effet une stabilité de revenu aux travailleurs et obligent les employeurs et le gouvernement à respecter certaines normes en matière de sécurité et de protection sociale. Ces travailleurs n’ont donc pas à chercher un emploi ailleurs afin de réduire le risque. Bénéficier grâce à l’émigration de revenus provenant d’un ou de plusieurs pays peut aussi réduire le risque qu’un ralentissement économique n’entraîne une perte totale de revenu du ménage, ce qui réduit la probabilité que d’autres membres du ménage aient l’intention d’émigrer.
Les recherches IPPMD ont montré qu’en général, plus le niveau de dépenses sociales d’un pays est élevé, plus la part des personnes ayant l’intention d’émigrer est faible (chapitre 7). Inversement, plus la part des personnes qui ont des contrats de travail informels est élevée, plus la part de celles qui ont l’intention d’émigrer est élevée.
Cependant, d’autres types de mécanismes d’assurance ne semblent pas dissuader l’émigration. Celle-ci est ainsi plus probable dans les ménages qui bénéficient de programmes d’assurance agricole, jouissent de l’assurance maladie ou ont accès à des syndicats. Une réduction du risque ne se traduit donc pas toujours par une émigration plus faible. Trois facteurs principaux pourraient expliquer ce paradoxe :
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Souvent l’assurance couvre surtout des personnes très qualifiées et mobiles, qui peuvent saisir des opportunités d’emploi à l’étranger.
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Les personnes sans accès aux mécanismes d’assurance vivent souvent dans des régions marginalisées, où l’option de l’émigration est déjà difficile ; elles peuvent être trop pauvres pour pouvoir se permettre d’émigrer.
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Une assurance peut accélérer l’abandon de l’agriculture dans les économies qui effectuent la transition entre l’agriculture et l’industrie, ce qui explique que l’assurance agricole semble accroître l’émigration dans des pays comme le Cambodge et la Géorgie.
Les transferts de fonds peuvent aider à accumuler capital financier et capital humain, avec de bonnes politiques
Pour beaucoup de pays en développement, les transferts de fonds constituent une source importante de capitaux étrangers, à la fois en valeur absolue et en pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Parmi les pays partenaires du projet IPPMD, les transferts de fonds sont particulièrement importants pour les économies d’Haïti (25 % du PIB), de l’Arménie (14 %) et de la Géorgie (10 %) (graphique 1.4).
Les transferts de fonds servent à consommer, mais aussi à investir
Même si les ménages recevant des transferts de fonds, en particulier les plus pauvres, utilisent généralement ces sommes pour accroître leur consommation de biens essentiels, cette source supplémentaire de revenus sert également à faire des investissements productifs.
Les transferts de fonds peuvent lever les contraintes de crédit des ménages et leur permettre d’investir
Les données IPPMD montrent qu’en général, les ménages recevant des transferts de fonds, en particulier les ménages urbains, comptent une proportion plus élevée de travailleurs indépendants (chapitre 3) et sont plus susceptibles de gérer une entreprise (chapitre 6). Les résultats montrent également que ces ménages sont plus susceptibles de posséder des biens immobiliers. Les ménages agricoles recevant des transferts de fonds sont plus susceptibles d’investir dans les actifs agricoles, en particulier dans les pays où la propriété de tels actifs est généralement faible, comme au Burkina Faso (chapitre 4). Cependant, de nombreux ménages s’endettent pour financer l’émigration, ce qui peut expliquer que les transferts de fonds ne débouchent pas sur des investissements productifs ou que ces investissements soient repoussés.
Les transferts de fonds permettent aux ménages d’investir dans le capital humain
Dans la plupart des pays partenaires, les transferts de fonds sont liés à des dépenses d’éducation plus élevées des ménages, et ceux qui en reçoivent sont plus susceptibles de scolariser des enfants dans le privé que ceux qui n’en reçoivent pas. Cependant, dans la plupart des pays, les transferts de fonds ne sont pas liés à une fréquentation scolaire plus élevée, sauf au Burkina Faso, qui a le taux de scolarisation au primaire le plus faible de l’échantillon. Par conséquent, lorsque l’accès à l’éducation est assuré, les transferts de fonds peuvent être dépensés dans d’autres domaines.
Les fonds reçus sont souvent gérés par les femmes, mais leur utilisation productive peut pâtir des discriminations
Dans la plupart des pays partenaires, la détention d’une entreprise est plus courante dans les ménages dont le chef est un homme. C’est particulièrement vrai dans les pays où l’émigration concerne surtout les hommes (Burkina Faso, Costa Rica, Côte d’Ivoire et Cambodge). L’émigration à dominante masculine modifie l’équilibre et la dynamique entre les sexes au sein du ménage, ce qui peut avoir des répercussions sur l’utilisation des fonds reçus. Lorsque les émigrés sont en majorité des hommes, les femmes qui restent dans le ménage jouent un rôle clé en tant que destinataires et gestionnaires des transferts de fonds. Comme vu plus haut, l’émigration peut faire basculer la prise de décision économique des hommes vers les femmes, et accroître ainsi l’indépendance économique de ces dernières. Cependant, les activités productives des femmes peuvent être entravées par leur accès limité aux terres et aux marchés de crédit.
Comment les politiques sectorielles influent-elles sur l’utilisation des transferts de fonds ?
Les politiques sectorielles peuvent agir indirectement sur le comportement des destinataires des transferts de fonds en influant sur les individus et les caractéristiques des ménages ainsi que sur les institutions et les infrastructures. Cependant, probablement parce que leurs objectifs sont plus vastes que les seuls transferts de fonds, ces politiques ont généralement un impact plus faible que prévu ou des effets secondaires non désirés.
Les politiques qui atténuent les contraintes financières ne semblent pas influer sur le montant des fonds reçus
Les transferts monétaires conditionnels (TMC) sont un bon exemple de programmes susceptibles de modifier les tendances des transferts de fonds. Les données portant sur quatre pays partenaires disposant de programmes de TMC à grande échelle – Costa Rica, Haïti, Philippines, République dominicaine – révèlent une relation contrastée entre TMC et transferts de fonds. En Haïti, il semble y avoir un lien entre le fait de bénéficier de TMC et la probabilité de recevoir des transferts de fonds, tandis qu’aux Philippines et en République dominicaine, être bénéficiaire de TMC est généralement associé négativement au fait de recevoir des transferts de fonds. Cela tient probablement aux tendances de l’émigration, car les programmes de TMC sont corrélés avec des taux d’émigration plus élevés en Haïti, où la conditionnalité des programmes est moins contraignante, mais avec des taux d’émigration plus faibles dans les autres pays.
Les politiques qui facilitent l’accès au marché peuvent générer plus de transferts de fonds formels et favoriser l’investissement
Le marché financier joue un rôle essentiel dans la transformation des transferts de fonds en investissements productifs. Comme dans beaucoup de pays en développement, les systèmes financiers de plusieurs pays partenaires du projet IPPMD ne desservent souvent qu’une part limitée de la population. Les politiques qui rendent le secteur financier plus accessible à un plus grand nombre peuvent encourager le transfert de fonds via le système financier formel, ce qui est plus sûr pour ceux qui les envoient et ceux qui les reçoivent. L’afflux de transferts de fonds via le système financier formel peut aussi entraîner des effets multiplicateurs, car il stimule la demande locale et accroît le capital disponible pour le crédit.
Les données du projet IPPMD montrent que les ménages dépourvus de compte bancaire sont plus susceptibles de recevoir les transferts de fonds par des canaux informels (chapitre 6). Le graphique 1.5 compare le montant total des fonds reçus par les ménages selon qu’ils ont ou non un compte bancaire. Dans tous les pays, sauf la Géorgie, les ménages disposant d’un compte bancaire reçoivent en moyenne des montants plus importants. La différence entre les montants moyens reçus par les ménages disposant d’un compte bancaire et ceux que reçoivent les ménages dépourvus de compte bancaire est frappante au Cambodge et aux Philippines.
Les migrations de retour constituent une ressource inexploitée
Le capital humain, les moyens financiers et les normes sociales qu’ont acquis les migrants de retour constituent une source importante de développement pour de nombreux pays. Le potentiel de développement des migrants de retour est un domaine auquel peu de recherches ont été consacrées, mais il dépend fortement de l’environnement économique, social et institutionnel qui prévaut dans le pays d’origine. Les données IPPMD suggèrent que les tendances en matière de retour diffèrent considérablement entre les pays partenaires. L’Arménie est le pays qui compte le plus de migrants de retour en nombre absolu dans l’échantillon (707), tandis que la part des migrants de retour dans le total personnes de retour-émigrés va de 9 % en République dominicaine à 55 % au Costa Rica. Au niveau des ménages, c’est en République dominicaine que le pourcentage de ménages avec un émigré comptant un migrant de retour est le plus faible (13 %) et au Burkina Faso qu’il est le plus élevé (65 %). L’explication tient à ce que la crise politique traversée par la Côte d’Ivoire en 2010-11 a brusquement incité nombre d’immigrés originaires des pays voisins à rentrer chez eux.
Les migrants de retour peuvent apporter capital financier, compétences et connaissances
Il est essentiel de comprendre ce qui motive les migrations de retour pour comprendre leur impact. Dans l’enquête sur les ménages du projet IPPMD, les migrants de retour déclarent que leurs principales raisons de rentrer étaient liées à des préférences personnelles, notamment se rapprocher de leur famille, mais aussi à l’incapacité d’obtenir un permis de travail ou un titre de séjour dans le pays de destination et aux difficultés d’intégration économique et sociale. Les opportunités d’emploi et d’investissement dans le pays d’origine ne constituaient un motif de retour que pour une minorité.
Les migrants de retour peuvent investir dans la création d’une entreprise et le travail indépendant
Les données IPPMD confirment que les migrants de retour sont généralement plus susceptibles que les non-migrants de gérer une entreprise ou d’être travailleurs indépendants. Cela peut tenir à ce qu’ils utilisent l’épargne accumulée à l’étranger pour créer une entreprise ; pour certains, ces types d’activités peuvent être la seule option, surtout si leur retour a été contraint ou si leurs compétences ne correspondent pas aux besoins du marché de l’emploi. Les migrations de retour peuvent donc être un moteur de diversification économique pour le pays, dans la mesure où les ménages agricoles avec un migrant de retour sont plus susceptibles de posséder une entreprise non agricole que leurs homologues sans migrant de retour.
Cependant, la plupart des entreprises identifiées dans l’enquête n’emploient généralement que des membres de la famille ou de proches parents. Partant, la contribution des migrants de retour à l’économie via la création d’emplois reste limitée. Les contraintes financières font partie des facteurs clés qui déterminent la taille d’une entreprise ; le manque d’accès au crédit peut empêcher les migrants de retour de faire croître leur entreprise.
Les migrants de retour pourraient transférer plus de compétences et de connaissances
À leur retour, il est fréquent que les professionnels qui ont des compétences technologiques, managériales, en marketing ou d’ordre scientifique créent des nouvelles entreprises, transfèrent des connaissances et accroissent le capital humain dans leur pays d’origine. Dans l’étude IPPMD, les migrants de retour sont généralement plus instruits que les non-migrants, sauf au Burkina Faso, au Cambodge et au Maroc, où le niveau global d’éducation est notablement plus faible que dans les autres pays. Le niveau d’éducation plus élevé des migrants de retour pourrait s’expliquer par le fait que ce sont les personnes les plus instruites qui sont le plus susceptibles d’émigrer, par la poursuite des études ou de la formation à l’étranger, ou par une combinaison de ces deux facteurs.
Malgré leur niveau d’éducation plus élevé, les migrants de retour peuvent avoir des difficultés à se réintégrer dans la vie sociale et politique de leur pays d’origine. Selon les données IPPMD, plus de la moitié d’entre eux font face à des difficultés d’une nature ou d’une autre à leur retour (graphique 1.6). La plus grande préoccupation est l’intégration sur le marché de l’emploi local, de nombreux migrants de retour ayant des difficultés à trouver un travail. Pour certains, la difficulté consiste à trouver un emploi correspondant à leurs compétences – en particulier en Haïti, où le niveau de compétences plus élevé des migrants de retour est peu adapté au marché de l’emploi domestique. Dans la plupart des pays, les migrants de retour sont proportionnellement plus nombreux que les non-migrants à être surqualifiés pour l’emploi qu’ils occupent. Le sous-emploi de leurs compétences pourrait constituer un obstacle à leur pleine participation au marché de l’emploi, et donc à leur contribution au développement de leur pays d’origine.
Comment les politiques sectorielles influent-elles sur les migrations de retour ?
Les recherches IPPMD montrent que les politiques sectorielles jouent un rôle clé non seulement pour inciter les émigrés à revenir, mais aussi pour les aider à se réintégrer durablement dans la société et à apporter tout leur potentiel au développement de leur pays. Par exemple, les politiques qui atténuent les contraintes financières et qui réduisent le risque peuvent inciter les émigrés à rentrer dans leur pays, tandis que celles qui renforcent les compétences et facilitent l’adéquation entre l’offre et la demande d’emplois peuvent les encourager à rester.
Les politiques qui atténuent les contraintes financières peuvent inciter les émigrés à rentrer
Atténuer les contraintes financières pesant sur les ménages peut inciter les émigrés à rentrer. Selon les données IPPMD, la proportion de migrants de retour est plus élevée dans les pays où une part importante des ménages agricoles bénéficient de transferts financiers directs, ce qui signifie que de telles politiques peuvent aider à attirer les migrants de retour. Une des explications possibles est que les transferts financiers reçus par le ménage ont contribué à payer les frais de retour.
Les politiques qui réduisent les risques peuvent inciter les émigrés à rentrer et les encourager à rester
La vulnérabilité des ménages encourage l’émigration. Si ces vulnérabilités persistent avec le temps, les migrants ne seront pas disposés à rentrer dans leur pays. En raison des insuffisances des régimes de transfert des droits de pension, les migrants de retour sont moins susceptibles que les non-migrants de bénéficier d’un régime public de retraite, ce qui peut dissuader le retour. Non seulement les politiques qui réduisent les risques incitent davantage les émigrés à rentrer, elles peuvent aussi contribuer à ce que leur retour soit durable. Un niveau de dépenses de protection sociale plus élevé est corrélé positivement avec une proportion plus importante de migrants de retour et avec la proportion de migrants ayant l’intention de s’installer de façon permanente dans leur pays d’origine (chapitre 10). La stabilité économique et politique du pays d’origine peut aussi rendre le retour plus attractif. Par exemple, des pays plus stables peuvent avoir davantage de ressources à consacrer aux dépenses publiques de protection sociale.
Les immigrés pourraient apporter beaucoup plus avec des politiques favorables
L’immigration est une composante essentielle à prendre en compte lorsqu’on analyse l’impact des migrations sur le développement, en particulier dans les pays où les immigrés représentent une part significative de la population. De nombreux pays partenaires du projet IPPMD comptent une proportion importante d’immigrés (graphique 1.2). Le Costa Rica (8.8 %) et la Côte d’Ivoire (9.6 %), en particulier, ont un taux d’immigration relativement élevé par rapport à leur population. Bien que les immigrés contribuent à l’économie de bien des façons, les responsables de l’action publique négligent souvent de soutenir leur intégration économique et sociale. C’est particulièrement vrai dans nombre de pays en développement. Toutefois, les droits des migrants et leur intégration importent : faire sentir aux immigrés qu’ils font partie intégrante du tissu social du pays peut renforcer la cohésion sociale et favoriser une productivité accrue. C’est pourquoi l’immigration et l’intégration sont mises en avant et considérées dans les Objectifs de développement durable (ODD) comme des éléments clés du développement.
Le potentiel économique des immigrés reste en partie inexploité
Les immigrés contribuent de diverses façons à l’économie de leur pays d’accueil, mais, avec des politiques plus favorables, cette contribution pourrait être plus importante encore.
Les immigrés contribuent à leur pays d’accueil par leur travail
Non seulement les immigrés apportent un capital humain précieux à leur pays d’accueil, mais ils sont aussi plus susceptibles que les personnes nées dans le pays d’être dans leurs années les plus productives et d’être actifs. Les données IPPMD montrent que les immigrés ont un taux d’emploi plus élevé que les travailleurs nés dans le pays, en particulier au Costa Rica, en Côte d’Ivoire et en République dominicaine. Ils sont en particulier présents dans trois secteurs : agriculture, construction et activités liées aux véhicules automobiles. En Côte d’Ivoire et en République dominicaine, environ 60 % des immigrés sont des hommes. Cela tient à ce que beaucoup d’immigrés travaillent dans le secteur agricole, secteur globalement à dominante masculine. Dans ces pays, l’agriculture est également le secteur le plus affecté par les départs liés à l’émigration : les immigrés comblent donc un manque.
Cependant, en termes d’adéquation entre l’offre et la demande d’emplois, alors qu’au Costa Rica et en République dominicaine les immigrés sont moins susceptibles d’être surqualifiés que les personnes nées dans le pays, c’est l’inverse au Burkina Faso. Pour ce pays, c’est donc une occasion manquée d’utiliser les compétences des immigrés. Ce n’est peut-être pas si surprenant, étant donné que l’économie du Burkina Faso est très informelle et repose principalement sur l’agriculture. Réduire le sous-emploi permettrait, quoi qu’il en soit, une meilleure allocation de compétences, tout en envoyant un signe favorable aux futures vagues d’immigrés potentiels.
Les immigrés investissent et paient des impôts dans leur pays d’accueil
Les immigrés contribuent au pays d’accueil non seulement par leur travail, mais également en y faisant des investissements. Dans l’ensemble des pays du projet, ce sont 20 % des immigrés en moyenne qui ont effectué des investissements. La Côte d’Ivoire est le pays où le taux d’investissement est le plus élevé. Environ la moitié des immigrés y ont investi dans le secteur agricole (cultures et élevage), alors que dans les autres pays les immigrés ont surtout investi dans l’immobilier. Les ménages avec un immigré qui gèrent leurs propres activités agricoles, telles que les cultures et l’élevage, sont plus susceptibles que les ménages sans immigré d’embaucher des travailleurs extérieurs, en particulier au Burkina Faso, et de vendre leurs produits sur le marché (comme en République dominicaine), ce dont bénéficie l’ensemble de l’économie (chapitre 4).
Au-delà de leurs contributions liées au travail et à l’économie, les immigrés ne semblent pas, contrairement à une croyance répandue, avoir un impact négatif sur le budget public. Les données IPPMD montrent que les immigrés sont moins susceptibles que les citoyens nés dans le pays de bénéficier de transferts gouvernementaux et d’utiliser les structures de santé du pays d’accueil. Néanmoins, comme ils sont moins nombreux que les travailleurs nés dans le pays à avoir un contrat de travail formel dans le secteur non agricole, les immigrés sont moins susceptibles de payer des impôts. C’est également préjudiciable à leur intégration et à la protection de leurs droits de l’homme fondamentaux, et cela peut aussi nuire à leur productivité. Lorsque les ménages avec un immigré paient des impôts, ils contribuent autant que les ménages nés dans le pays. Dans la mesure où ils reçoivent moins de prestations sociales que la population née dans le pays, les immigrés pourraient avoir un effet positif net sur le solde budgétaire du pays d’accueil, en particulier s’ils ont accès à des contrats de travail formels.
L’apport des immigrés est limité par des niveaux d’éducation plus faibles
Au sein de l’échantillon, les immigrés sont en moyenne moins instruits que la population née dans le pays d’accueil. Le nombre élevé d’immigrés sans éducation formelle que compte l’échantillon IPPMD est frappant (graphique 1.7).
Comment les politiques sectorielles influent-elles sur l’immigration et le développement ?
Malgré leurs contributions positives à l’économie, les immigrés sont à la traîne au regard de plusieurs indicateurs de développement ; c’est une occasion manquée non seulement pour eux, mais pour le pays d’accueil. Si la contribution des immigrés ne se concrétise pas pleinement, cela tient en grande partie aux lacunes des politiques publiques.
Le manque d’accès aux services publics nuit à l’intégration des immigrés
L’intégration des immigrés est essentielle pour maintenir la cohésion sociale et tirer le meilleur parti de l’immigration. L’éducation est un outil fondamental pour l’intégration sociale des immigrés et de leurs ménages : elle les aide à apprendre la langue locale, ainsi qu’à comprendre les particularités et l’histoire du pays, et à se constituer des réseaux sociaux. Il est donc dans l’intérêt du pays d’accueil de donner accès à l’éducation aux immigrés et à leurs enfants, car leur productivité et leur capacité de gain à venir en seront accrues. Les données IPPMD montrent également que les immigrés qui s’instruisent dans le pays d’accueil sont plus susceptibles d’y rester (chapitre 5). Or, les enfants immigrés et les enfants nés dans le pays d’accueil de parents immigrés sont moins susceptibles d’être scolarisés. Les ménages avec un immigré ont également moins accès aux programmes de soutien à l’éducation, tels que les transferts monétaires conditionnels.
Le manque d’aides et de protection sociale réduit les opportunités d’investissement des immigrés
L’investissement peut être le vecteur clé d’une intégration réussie. À cet égard, les responsables de l’action publique devraient veiller à ce que les immigrés bénéficient de conditions leur permettant d’investir, en particulier dans les secteurs ayant besoin d’être stimulés. Même si beaucoup d’immigrés travaillent dans le secteur agricole, les ménages avec un immigré sont moins susceptibles de gérer leur propre exploitation agricole que les ménages nés dans le pays, et, ce qui sans doute en résulte, ils font moins d’investissements dans ce secteur (chapitre 7).
Une solution pour libérer le potentiel d’investissement des immigrés consisterait à adopter des politiques migratoires plus souples. Les chefs de ménages avec un immigré qui sont en situation régulière sont plus susceptibles d’être propriétaires d’un logement, de terres ou d’une entreprise non agricole (comme au Costa Rica, en Côte d’Ivoire et en République dominicaine ; graphique 1.8). Or, de nombreux immigrés ne jouissent pas du statut de migrant régulier, qu’ils aient emprunté des filières d’immigration clandestine ou soient restés dans le pays après l’expiration de leur visa. C’est le cas en République dominicaine, où près de 90 % des immigrés étudiés n’ont pas les documents exigés pour vivre et travailler dans le pays.
Un programme d’action cohérent peut concrétiser le potentiel de développement des migrations
Le projet IPPMD a montré que, pour les dimensions étudiées (émigration, transferts de fonds, migrations de retour et immigration), les migrations peuvent contribuer au développement à la fois dans les pays d’origine et de destination (et beaucoup de pays sont les deux). Cependant, il est clair que ce potentiel de développement n’est pas pleinement exploité. Cette étude jette la lumière sur la façon dont il pourrait l’être en analysant le rôle, souhaité ou non, que jouent les politiques sectorielles (en particulier celles touchant le marché de l’emploi, l’agriculture, l’éducation, l’investissement et les services financiers, et la protection sociale et la santé) dans la décision d’émigrer ou de rentrer dans son pays, la façon dont les transferts de fonds sont effectués et utilisés, la capacité des immigrés à s’intégrer et la contribution qu’ils apportent à leur pays d’accueil.
La conclusion de cette étude est qu’un programme d’action cohérent est nécessaire pour tirer pleinement parti du potentiel de développement des migrations. Si la plupart des pays étudiés disposent d’un large éventail de politiques spécifiques aux migrations3, très peu ont adopté dans d’autres secteurs des politiques visant à renforcer le potentiel de développement des migrations. Les ministères responsables de ces secteurs ne sont bien souvent pas conscients des effets des migrations dans leur champ de compétences, ni, inversement, des effets de leurs politiques sur les migrations.
À quoi ressemblerait un cadre d’action plus cohérent ? Un tel cadre devrait répondre aux besoins suivants :
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mieux intégrer les migrations dans les stratégies de développement ;
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améliorer les mécanismes de coordination ;
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renforcer la coopération internationale.
Intégrer davantage les migrations dans les stratégies de développement
Afin de renforcer la contribution des migrations au développement, les pouvoirs publics, dans les pays d’origine comme dans les pays de destination, doivent suivre une approche duale à la fois (graphique 1.9) :
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Transversale : prendre en compte les migrations dans la conception, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques sectorielles de développement pertinentes ;
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Ciblée : adopter des mesures, des programmes et des politiques spécifiques aux migrations et au développement visant à minimiser les coûts des migrations et à maximiser leurs bénéfices.
Les politiques sectorielles peuvent influer sur les décisions liées aux migrations en améliorant l’efficience des marchés, en atténuant les contraintes financières, en contribuant au développement des compétences pertinentes et en réduisant les risques. Cependant, la façon dont les politiques sectorielles influent sur les migrations n’est pas toujours tranchée. Des programmes similaires peuvent produire des effets différents selon les pays où ils sont mis en œuvre. Par exemple, les programmes de formation professionnelle ont tendance à accroître l’émigration dans certains pays, mais la réduisent dans d’autres (chapitre 3). Bien que les politiques ou programmes sectoriels spécifiques n’influent pas de la même façon sur les migrations, c’est la combinaison des politiques qui est le plus susceptible d’influer sur les effets des migrations. Partant, les interactions entre les politiques publiques doivent être prises en compte dans l’élaboration des stratégies de développement d’un pays.
Sur la base de cette approche, les sections suivantes et les tableaux qui les illustrent donnent une synthèse des principales recommandations de politiques suggérées dans ce rapport.
Tirer le meilleur parti de l’émigration : recommandations de politiques
Lorsqu’on élabore des politiques pour maximiser le potentiel de développement des migrations, il importe de cerner clairement les objectifs. Tous les pays ne voient pas l’émigration de la même manière : si certains craignent de perdre une part significative de leurs travailleurs qualifiés, d’autres voient l’émigration comme un moyen de soulager le marché de l’emploi d’un excédent de main-d’œuvre. Accroître ou réduire l’émigration ne devrait pas être en soi un objectif des politiques. Les gens sont libres de prendre leurs décisions par eux-mêmes et de quitter leur pays s’ils le souhaitent. Par conséquent, la tâche des responsables de l’action publique devrait consister à définir les conditions qui permettent aux individus de décider librement s’ils souhaitent partir ou rester et dans lesquelles l’émigration peut être bénéfique, et non préjudiciable. En d’autres mots, le rôle des politiques publiques devrait être de créer un environnement où les individus émigrent par choix et non parce qu’ils y sont contraints.
En concevant leur stratégie de migrations et de développement, les pays d’origine se focalisent habituellement sur les effets positifs de l’émigration, en oubliant généralement les aspects négatifs, tels que l’éclatement des familles ou la perte de main-d’œuvre, en particulier dans le secteur agricole. Les responsables de l’action publique dans les pays d’origine doivent comprendre quelles catégories de personnes sont le plus affectées par l’émigration et ajuster les politiques en conséquence de façon à minimiser les coûts potentiels. Les pays d’origine doivent également adopter des politiques qui contribuent à accroître les bénéfices de l’émigration. Les politiques pertinentes concernant l’émigration qui se dégagent de cette étude sont présentées dans les chapitres 3 à chapitre 8 et résumées dans le tableau 1.4.
Tirer le meilleur parti des transferts de fonds : recommandations de politiques
Les responsables de l’action publique peuvent jouer un rôle important et renforcer les effets positifs des transferts de fonds en abaissant les coûts de ces transactions et en favorisant leur orientation vers des usages plus productifs. Un certain nombre de politiques, telles que les exonérations fiscales des revenus tirés de ces transferts, les obligations des diasporas et les dispositifs de subventions de contrepartie, visent ces objectifs.
Les transferts de fonds sont des sources de financement privées, et les responsables de l’action publique ne peuvent pas décider de la manière dont les individus ou les ménages dépensent leur argent. Cependant, les politiques publiques peuvent jouer un rôle important en orientant les transferts de fonds vers des investissements plus productifs. Les politiques pertinentes concernant les transferts de fonds qui se dégagent de cette étude sont présentées dans les chapitres 3 à chapitre 7 et chapitre 9 et résumées dans le tableau 1.5.
Tirer le meilleur parti des migrations de retour : recommandations de politiques
Un nombre croissant de pays ont adopté des politiques ciblant les migrations de retour. Par exemple, grâce à ses liens étroits avec les réseaux de la diaspora, l’Arménie organise des salons de l’emploi dans les principaux pays de destination, afin d’encourager ceux qui le souhaitent à rentrer. Les avantages financiers et non financiers accordés aux migrants de retour sont une incitation de plus à revenir au pays. Ces avantages peuvent prendre la forme d’exonérations de taxes et de droits sur le transport des effets personnels, de subventions salariales ou d’un capital de démarrage pour créer des micro-entreprises. Des programmes ciblés – formations de requalification offertes aux migrants de retour ou création d’environnements permettant de mieux tirer parti de leurs compétences, par exemple – peuvent également aider les migrants de retour à se réintégrer dans leur pays d’origine.
Les politiques sectorielles peuvent également jouer un rôle clé en rendant les migrations de retour attractives et durables. Les politiques pertinentes concernant les migrations de retour qui se dégagent de cette étude sont présentées dans les chapitres 3 à chapitre 7 et chapitre 10 et résumées dans le tableau 1.6.
Tirer le meilleur parti de l’immigration : recommandations de politiques
Les politiques publiques peuvent aider à maximiser l’impact de l’immigration sur l’économie du pays d’accueil et faciliter le processus d’intégration. Une mauvaise intégration ne pose pas seulement des défis en termes de cohésion sociale ; cela signifie également une moindre contribution des immigrés au développement des sociétés d’accueil. Par conséquent, les responsables de l’action publique devraient avoir pour but de protéger les droits des immigrés, quel que soit leur statut migratoire, de combattre les discriminations et de promouvoir l’intégration des immigrés dans la société, en commençant par le marché de l’emploi et le système d’éducation.
Le succès de l’intégration ne dépend pas toujours des politiques propres à l’intégration : il peut être tout aussi déterminant d’offrir aux immigrés un accès universel et non discriminatoire au système d’éducation, à la protection sociale et aux services de santé, et ce, quel que soit leur statut. De même, si les conditions d’accès au crédit et à l’investissement sont identiques pour les immigrés et les personnes nées dans le pays, adopter des politiques spécifiques aux immigrés n’est pas toujours nécessaire, même si les responsables des politiques doivent s’assurer que ces conditions, non seulement sont identiques sur le papier, mais s’appliquent de fait dans le pays. Les politiques pertinentes concernant l’immigration qui se dégagent de cette étude sont présentées dans les chapitres 3 à chapitre 7 et chapitre 11 et résumées dans le tableau 1.7.
Améliorer les mécanismes de coordination
Outre l’approche duale exposée ci-dessus, un programme d’action cohérent exige également que les responsables de l’action publique améliorent les mécanismes de coordination à trois niveaux : entre les différentes autorités au plan national ; entre les autorités nationales, régionales et locales ; entre les pouvoirs publics et les acteurs non étatiques.
Améliorer la coordination entre les différentes autorités au plan national
Dans la plupart des pays, le dossier des migrations relève d’un petit nombre de ministères et d’organismes centraux : le ministère de l’Intérieur et le ministère du Travail s’occupent habituellement de l’immigration ; le ministère des Affaires étrangères, ainsi que, dans certains cas, un organisme spécifique chargé des diasporas, sont en général responsables des personnes émigrées ; tandis que la Banque centrale s’occupe des transferts des fonds. Rares sont les autres ministères sectoriels impliqués dans les questions touchant les migrations ; dans certains cas, les migrations n’entrent même pas dans leur champ de compétences. Or, comme le montre ce rapport, les migrations ont des répercussions dans divers secteurs de l’action publique, tandis que les politiques sectorielles influent également sur les migrations. Un échantillon plus vaste d’instances gouvernementales devrait par conséquent être impliqué dans le programme d’action sur les migrations et le développement.
Un moyen d’y parvenir consiste à créer des organismes de coordination rassemblant les différentes instances pertinentes pour prendre des décisions sur les questions clés touchant les migrations et le développement. De tels comités ou organes interinstitutionnels, qui parfois impliquent également des organisations multilatérales et des organisations de la société civile, sont déjà actifs en Arménie, en Géorgie et aux Philippines (chapitre 2).
Améliorer la coordination entre les autorités nationales et locales
Si la plupart des décisions concernant les migrations et le développement sont généralement élaborées par les gouvernements nationaux, les autorités locales et régionales (ALR) s’occupent directement d’un certain nombre de questions liées aux migrations, notamment le soutien aux familles restées au pays, en particulier les enfants, la réintégration des migrants de retour dans les communautés locales, la protection des droits des immigrés, ainsi que leur accès au marché de l’emploi, à l’éducation et aux services de santé. Les politiques qui s’appuient sur l’expérience des ALR et impliquent celles-ci dans le processus de décision sont par conséquent plus susceptibles de renforcer la contribution des migrations au développement (CE-NU ICMD, 2010).
Les ALR doivent donc concevoir leur propre programme d’action en matière de migrations et de développement, en particulier dans les territoires qui connaissent des taux d’émigration ou d’immigration élevés. Entres autres, elles devraient étendre les programmes et les services locaux aux immigrés et se doter de mécanismes de recours leur offrant un soutien, en particulier en matière d’aide juridique, d’information quant aux droits et aux procédures, ainsi que de dénonciation des abus. Les ALR peuvent également jouer un rôle actif en encourageant l’apprentissage de la langue par l’embauche d’enseignants locaux et la conception de cours pour les étrangers. Les autorités nationales peuvent aider les acteurs locaux à mieux s’occuper des questions liées aux migrations en leur allouant des ressources économiques et humaines spécifiques et en investissant dans le renforcement des capacités.
Améliorer la coordination avec les acteurs non étatiques
Les acteurs non étatiques, tels que les organisations de la société civile, les syndicats, les associations patronales, les établissements universitaires et les médias, contribuent de façon significative au succès des migrations, tant dans les pays d’origine que de destination. Par exemple, ils peuvent fournir aux migrants des informations utiles et contribuer à changer les perceptions. Ils peuvent également aider à protéger les droits des migrants et de leurs familles, ainsi que les intérêts des ménages non migrants. Cependant, les décisions touchant les migrations sont souvent prises sans les consulter.
Un cadre d’action cohérent devrait comporter des mécanismes de consultation ainsi que des partenariats avec un éventail d’acteurs non étatiques. Outre les questions spécifiques directement liées aux migrations, tels les programmes d’intégration, les mécanismes de coordination pourraient couvrir des secteurs qui influent sur les migrations ou sur lesquels celles-ci influent. À cet égard, renforcer la coopération entre les ministères responsables du travail, de l’éducation et des compétences, les établissements d’enseignement et les employeurs pourrait favoriser la conception de programmes de formation professionnelle et d’apprentissage mieux adaptés aux besoins du marché de l’emploi domestique. De même, une meilleure coordination entre les différents acteurs du système financier – Banque centrale, institutions financières, sociétés de transfert de fonds et organismes de microfinancement – pourrait favoriser l’inclusion financière et les investissements dans les zones qui reçoivent des transferts de fonds
Renforcer la coopération internationale
Par définition, les migrations internationales impliquent au moins deux pays : le pays d’origine et le pays de destination. Afin de renforcer la contribution des migrations au développement, les pays d’origine et les pays d’accueil doivent donc se doter d’instruments de coopération, à la fois au niveau bilatéral et au niveau régional.
Les accords bilatéraux
La coopération bilatérale repose souvent sur des accords bilatéraux de main-d’œuvre passés entre pays d’origine et pays de destination afin de promouvoir les migrations régulières et de garantir la protection des droits des migrants. Ces accords ont tendance à favoriser les migrations temporaires, de manière à empêcher que les immigrés ne s’installent. Ils couvrent habituellement des questions telles que les droits fondamentaux, les conditions de travail et les salaires. La question des migrations circulaires, qui donnent aux migrants la possibilité de passer une partie de l’année dans le pays d’accueil et une autre partie dans le pays d’origine, est désormais abordée plus couramment dans les accords bilatéraux de main-d’œuvre. Les régimes de migrations circulaires génèrent des bénéfices pour le pays d’accueil, car les immigrés y viennent lorsque la demande de travail est forte et sont plus enclins à rentrer dans leur pays d’origine que dans le cadre d’autres programmes de migration. Ils bénéficient également aux pays d’origine, car les migrants sont toujours en mesure d’apporter leur contribution aux activités locales. Les compétences et l’épargne dont les migrants circulaires se dotent au fil des années peuvent également les aider à soutenir leur pays d’origine et à y mettre sur pied des projets productifs (OCDE, 2011).
Il reste encore à couvrir certaines questions dans les accords bilatéraux afin de faciliter le processus de mobilité, d’aider les migrants à mieux s’intégrer dans leur pays d’accueil ou à se réintégrer dans leur pays d’origine, et de tirer pleinement parti du potentiel de développement des migrations. Les accords bilatéraux devraient en particulier s’attaquer à la question du regroupement familial, qui est devenue un sujet sensible dans de nombreux pays, mais qui devrait constituer un droit fondamental pour tous les migrants. La signature d’accords sur la protection sociale et la transférabilité des droits de pension entre pays d’origine et de destination est également un moyen de promouvoir les droits des migrants à une retraite décente et de faciliter les migrations de retour (Holzmann, 2016).
Les accords régionaux
La coopération régionale peut faciliter les mouvements de main-d’œuvre entre pays voisins et accroître l’impact des migrations sur le développement. La mobilité régionale permet une meilleure allocation des compétences disponibles dans une région et aide les pays à s’ajuster aux chocs économiques, ce qui réduit donc les coûts sociaux des récessions. À cet égard, les accords régionaux devraient non seulement comprendre la liberté de circulation, mais des mécanismes garantissant que les personnes peuvent réellement aller d’un pays à l’autre. En particulier, les responsables de l’action publique devraient :
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mettre sur pied des agences régionales pour l’emploi, de sorte que les travailleurs de chaque pays soient informés des emplois offerts dans les autres pays de la région ;
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supprimer toute discrimination ou autre forme d’obstacle à l’emploi, afin de faciliter l’inclusion des travailleurs de la région dans les marchés de l’emploi domestiques, y compris le secteur public, et leur donner pleinement accès aux droits liés au travail ;
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promouvoir la coopération entre les établissements d’enseignement, afin de favoriser la mobilité des étudiants et de faciliter la reconnaissance des diplômes et des compétences ;
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accroître l’intégration régionale des marchés financiers, afin de réduire les coûts de transaction des transferts de fonds et de favoriser l’investissement ;
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harmoniser les systèmes de protection sociale et les régimes de retraite, et favoriser la transférabilité des droits, afin d’encourager la mobilité.
Structure du rapport
Le rapport est structuré de la façon suivante.
Le chapitre 2 jette les bases en décrivant les cadres conceptuel et méthodologique de ce projet. Il présente les outils quantitatifs et qualitatifs utilisés et analyse l’approche analytique ainsi que les limites des données.
Le rapport comprend deux parties. La partie I, constituée des chapitres 3 à chapitre 7, examine la façon dont les migrations influent sur les cinq secteurs étudiés – marché de l’emploi, agriculture, éducation, investissement et services financiers, et protection sociale et santé – dans les pays partenaires du projet IPPMD. Les analyses sont présentées secteur par secteur, les chapitres sectoriels analysant la façon dont les différentes dimensions migratoires (émigration, migrations de retour, transferts de fonds et immigration) influent sur le secteur en question et, inversement, la façon dont les politiques peuvent influer sur les migrations. Les chapitres 8 à chapitre 11, qui forment la partie II, mettent chacun spécifiquement l’accent sur une des dimensions migratoires déjà évoquées : émigration, migrations de retour, transferts de fonds et immigration. Les interrelations entre les migrations et les politiques publiques, présentées dans la partie I, y sont réexaminées, mais cette fois sous l’angle des migrations.
Références
CE-NU ICMD (2010), From Migration to Development: Lessons Drawn from the Experience of Local Authorities, Initiative conjointe pour la migration et le développement CE-NU, NU/PNUD, Bruxelles, www.migration4development.org/sites/default/files/project_reports/jmdi_migration_to_development_la_report_en.pdf.
Holzmann, R. (2016), « Do bilateral social security agreements deliver on the portability of pension and health care benefits? A summary policy paper on four migration corridors between EU and non-EU member states », Social Protection and Labor Discussion Paper 1605, Groupe de la Banque mondiale, Washington, DC, http://documents.worldbank.org/curated/en/380411467296864200/Do-bilateral-social-security-agreements-deliver-on-the-portability-of-pensions-and-health-care-benefits-A-summary-policy-paper-on-four-migration-corridors-between-EU-and-non-EU-member-states.
NU (2015a), The Addis Ababa Action Agenda of the Third International Conference on Financing for Development, Nations unies, New York, www.un.org/esa/ffd/wp-content/uploads/2015/08/AAAA_Outcome.pdf.
NU (2015b), Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030, Nations unies, New York, https://sustainabledevelopment.un.org/post2015/transformingourworld/publication.
OCDE (2016), Perspectives du développement mondial 2017 : Les migrations dans un monde en mutation (version abrégée), Éditions de l’OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/persp_glob_dev-2017-4-fr
OCDE (2011), Tackling the Policy Challenges of Migration: Regulation, Integration, Development, Éditions de l’OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264126398-en.
Notes
← 1. Un autre projet mené par la Commission européenne, l’Organisation internationale du travail (OIT) et le Centre de développement de l’OCDE tente d’aboutir à une compréhension, fiable et fondée sur des données factuelles, de l’impact de l’immigration sur les économies de dix pays en développement en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Il s’intéresse, en particulier, à la contribution des immigrés au PIB et à la croissance, ainsi qu’à leur impact sur le marché de l’emploi, et sur les finances publiques et les services sociaux (www.oecd.org/dev/migration-development/eclm.htm).
← 2. Ces dimensions migratoires ainsi que les secteurs étudiés ne sont pas exhaustifs et ne rendent pas compte de la totalité des liens entre migrations et développement. Par exemple, en raison du manque de données sur cette question, ce rapport n’analyse pas le rôle de la diaspora, qui contribue souvent activement au développement dans le pays d’origine par le biais d’associations de villes d’origine (hometown associations) et de réseaux professionnels ou personnels. De plus, outre leur composante financière, les transferts de fonds ont également une composante sociale : les idées, les valeurs et le capital social transférés par les migrants. Bien que ces « transferts sociaux » forment un aspect important du lien entre migrations et développement, ils excèdent la portée de ce projet et ne sont donc pas analysés dans ce rapport. Quant aux cinq secteurs étudiés ici, si l’on considère que ce sont les plus pertinents en termes de migrations et de développement, cela n’exclut pas qu’il y ait des interactions entre d’autres politiques sectorielles et les migrations. Les politiques commerciales, par exemple, constituent un secteur important pour le développement, qui peut avoir des effets significatifs sur les flux migratoires et sur lequel peuvent influer les réseaux de migrants. De même, les politiques environnementales peuvent influer sur la décision de migrer, tandis que les flux migratoires peuvent avoir des répercussions sur l’environnement aussi bien dans les pays d’origine que de destination.
← 3. Par exemple apporter un soutien social et juridique aux émigrants via les consulats, réduire les coûts liés aux transferts de fonds et les orienter vers des investissements plus productifs, encourager les membres de la diaspora à s’impliquer dans des projets de développement dans leur communauté d’origine et encourager les émigrés à rentrer dans leur pays.