Chapitre 2. Gouvernance et gestion de l’environnement
Ce chapitre présente les principales initiatives françaises en matière d’environnement et examine le cadre de gouvernance de la gestion de l’environnement. Il analyse notamment les mécanismes de coordination des différents niveaux d’administration et les impacts de la réforme de l’organisation territoriale. Il passe en revue les dispositifs d’évaluation des politiques et de leurs incidences sur l’environnement, les mesures de simplification réglementaire et de contrôle de la conformité. Il aborde également la promotion de la démocratie environnementale par l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement.
1. Cadre institutionnel du développement durable et de la gestion de l’environnement
1.1. Cadre d’action du développement durable
L’année 2015 a marqué une nouvelle étape dans la politique environnementale française, avec la promulgation de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (chapitre 4), l’adoption de l’Accord de Paris par la Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21), la reconnaissance à la COP21 du plan d’action Lima-Paris et le débat sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité (chapitre 5). En 2007, le Grenelle de l’environnement avait posé le précédent jalon. Ce large processus de concertation, et les deux lois qui en sont issues en 2009 et 20101, ont refondé la politique environnementale française à travers un corps législatif extensif, des objectifs élevés et une gouvernance participative institutionnalisée. Si les lois Grenelle ont pu être qualifiées de « monstre juridique » (Petit, 2011), elles ont servi à structurer l’action environnementale des secteurs et des collectivités, en déployant un arsenal d’instruments financiers, règlementaires et de planification. Suite au Grenelle, la seconde Stratégie nationale de développement durable (SNDD) pour 2010-13 a fourni un cadre général rassemblant l’ensemble des acteurs autour d’un projet de société. Elle a toutefois été critiquée pour l’absence d’outil d’évaluation de sa mise en œuvrepar les acteurs privés et pour son approche sectorielle qui diluait les priorités (Medde, 2013a). La Stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable 2015-20 répond à ces critiques en adoptant une approche transversale et en formalisant l’action des acteurs à travers des bilans d’avancement. Elle sert de base à l’élaboration de la feuille de route française de mise en œuvre des Objectifs de développement durable, adoptés par la communauté internationale en 2015, dans le cadre de l’Agenda 2030 pour le développement durable.
Comme dans tous les pays de l’Union européenne (UE), la législation et les politiques environnementales françaises sont largement déterminées par le droit européen, par exemple dans les domaines de l’eau et de l’assainissement, de la qualité de l’air, des déchets et de la biodiversité. Depuis 2007, la France excède systématiquement le nombre moyen d’infractions à la législation européenne environnementale (Commission européenne, 2014a). Cependant, l’écart s’est globalement réduit (Commission européenne, 2014a). Les cas d’infraction concernent notamment la pollution des eaux par les nitrates, le traitement des eaux urbaines résiduaires et la qualité de l’air (chapitre 1).
1.2. Les institutions et la gouvernance environnementale
Les stratégies et politiques environnementales de la France sont pilotées par le ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer (MEEM). Il supervise plusieurs établissements publics spécialisés dans des domaines variés, et son action est relayée dans les régions et départements par des directions dédiées. Les régions, départements et communes mettent en œuvre localement les politiques environnementales. Cependant, la faible coopération intercommunale nuit à l’efficacité de la mise en œuvre au niveau des communes. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) vise à renforcer cette coopération et devrait donc rendre la prestation des services environnementaux plus efficace.
L’intégration des questions environnementales se reflète dans les choix institutionnels de la France. En 2007, le ministère de l’Écologie et du Développement durable a été fusionné avec celui des Transports, de l’Équipement, du Tourisme et de la Mer, et avec la partie énergie du ministère de l’Industrie pour créer le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (Medde, rebaptisé MEEM en 2016). Il agit dans les domaines du développement durable, de l’environnement et des technologies vertes, de la transition énergétique et de l’énergie, du climat, de la prévention des risques naturels et technologiques, de la sécurité industrielle, des transports et de leurs infrastructures, de l’équipement, de la mer – à l’exception de la construction et de la réparation navales –, ainsi que dans les domaines des pêches maritimes et de l’aquaculture. Il regroupe six directions thématiques2 et deux structures transversales : le Commissariat général au développement durable (CGDD) et le secrétariat général.
L’action du MEEM est relayée dans les régions par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), qui regroupent depuis 2009 les anciens services régionaux des ministères de l’Écologie (Diren), de l’Industrie (Drire) et de l’Équipement (DRE) dans le cadre de la rationalisation des administrations publiques. Les Dreal et les directions départementales des territoires (DDT), placées respectivement sous l’autorité du préfet de région et de département, sont garantes de la continuité de l’État dans les territoires.
Le MEEM supervise par ailleurs des établissements publics spécialisés qui jouent un rôle important dans la gestion de l’environnement, notamment3 :
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Les six agences de l’eau4, correspondant chacune à un bassin versant, ont pour mission de préserver les ressources en eau et de lutter contre les pollutions aquatiques. Avec les Dreal, elles préparent les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux.
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L’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (Onema), créé en 2007, accompagne la mise en œuvre de la politique de l’eau par son expertise technique et scientifique. Il gère le système d’information sur l’eau, vérifie la bonne application des règlements, surveille les services d’eau et d’assainissement et garantit la solidarité financière interbassins.
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L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), sous tutelle conjointe du MEEM et du ministère de l’Éducation, propose de l’expertise et de l’aide au financement de projets dans les domaines liés à la transition énergétique et aux déchets.
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Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) a été créé en 2014 en fusionnant 11 centres techniques existants. Sous tutelle conjointe du MEEM et du ministère du Logement, de l’Égalité des territoires et de la Ruralité, il apporte une expertise scientifique pour élaborer et évaluer les politiques publiques de l’aménagement et du développement durable.
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Une Agence française pour la biodiversité (AFB) est prévue dans le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité. Elle vise à regrouper en son sein des établissements jusqu’alors séparés : l’Onema, l’Atelier technique des espaces naturels, l’Agence des aires marines protégées et Parcs nationaux de France (chapitre 5).
Les collectivités territoriales mettent en œuvre, localement, différents aspects des politiques et de la gestion environnementales :
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Les régions gèrent les parcs régionaux, élaborent les schémas régionaux climat air énergie, les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets dangereux, les schémas régionaux d’aménagement et de développement du territoire, des infrastructures et des transports et approuvent les contrats de projets État-région (section 1.3).
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Les départements sont chargés des plans de prévention et de gestion des déchets non dangereux5, des déchets issus du bâtiment et participent aux schémas d’aménagement et de gestion des eaux.
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Les communes élaborent les principaux documents d’urbanisme locaux, collectent et traitent les ordures ménagères et assurent les services de distribution d’eau et d’assainissement. La loi Notre leur confie également la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations depuis 2015 (chapitre 5).
Au nombre de 36 000, les communes sont le plus petit échelon territorial en France. Elles sont chargées de gérer les ordures ménagères, ainsi que la distribution et l’assainissement de l’eau, mais le développement d’un service par commune a créé des structures trop petites pour permettre de réaliser des économies d’échelle. Il en résulte des lacunes en termes de compétences, de connaissance et de qualité (Cour des comptes, 2015). La coopération entre communes pour gérer ces services ensemble – l’intercommunalité – est une manière d’augmenter la taille des services pour faire face à ces défis. Si l’intercommunalité est bien développée en matière de gestion des déchets, la France recensait plus de 35 000 services publics d’eau potable et d’assainissement en 2012 (Onsea, 2015). La loi Notre vise à renforcer la coopération intercommunale en relevant le seuil des intercommunalités à 15 000 habitants et en leur transférant les compétences liées à l’eau et à l’assainissement d’ici 2020. À titre de comparaison, en 2012, un service d’eau potable desservait 4 700 usagers en moyenne contre 3 100 pour un service d’assainissement collectif et 2 900 pour un service d’assainissement non collectif (Onsea, 2015). Cette réforme devrait rendre plus efficace la prestation des services d’eau et d’assainissement.
1.3. Les mécanismes de coordination
La France a fait des progrès en matière de coordination au niveau national. La création du Medde a rapproché l’enjeu de l’environnement de ceux de l’énergie, du transport et de l’équipement, et la création du CGDD en 2008 a formalisé la coordination interministérielle en la matière. La « gouvernance à cinq », instaurée par le Grenelle de l’environnement (section 4.1), a également créé un processus qui réunit, entre autres, l’État et les élus pour établir la direction future des politiques environnementales. Cependant, la coordination au niveau des collectivités territoriales (régions, départements, communes) présente encore des lacunes. Bien qu’un processus de décentralisation soit engagé depuis 1982, l’État est encore très présent dans les territoires à travers ses services déconcentrés, supervisés par les préfets. L’articulation entre les services étatiques et territoriaux est excessivement complexe, de nombreux doublons de compétences et des incohérences existent, et le pilotage par l’État est insuffisant (Cour des comptes, 2013a). La coordination financière entre l’État et les régions souffre également de plusieurs insuffisances (Cour des comptes, 2014).
La création d’un grand ministère de l’Environnement en 2007 lui a conféré un poids considérable au sein du gouvernement, sans pour autant résoudre les problèmes de coopération interministérielle existant entre le ministère de l’Environnement et d’autres ministères traditionnellement plus dominants (Medde, 2013b). D’une part, le choix de rassembler l’environnement avec certains secteurs pertinents, notamment l’énergie et l’équipement, mais pas avec d’autres, notamment la santé et l’agriculture, a possiblement distendu les liens avec les ministères en charge de ces sujets (Medde, 2013b). D’autre part, le rapprochement entre l’équipement et l’environnement a conduit à internaliser l’arbitrage entre ces deux secteurs au sein du même ministère, alors qu’il s’effectuait par le passé au niveau du Premier ministre (Bettina, 2010)6. Ce rapprochement a donc réduit la transparence de cet arbitrage délicat, tout en ayant tendance à assurer la primauté des politiques favorables à l’équipement (Lepage, 2008). Enfin, le ministère de l’Environnement a subi des restructurations fréquentes ces dernières années, qui ont nui à sa légitimité. Une stabilité institutionnelle, au moins à moyen terme, serait désirable (Medde, 2013b).
La coopération interministérielle est également assurée par des organes à part entière. Le CGDD remplit ainsi la fonction de délégué interministériel au développement durable, qui l’autorise à animer et à coordonner l’action des administrations en matière de développement durable. En sa qualité de délégué interministériel, le CGDD préside le comité des hauts fonctionnaires au développement durable (HFDD), qui se réunit tous les deux mois. Un HFDD est désigné par chaque ministre afin de préparer la contribution de son administration à la stratégie nationale de développement durable.
Malgré ces efforts de coordination interministérielle, l’organisation territoriale de l’État présente encore des défauts notables de cohérence et de coordination. La gouvernance d’ensemble s’en trouve affectée et cela entraîne une articulation inefficace des échelons administratifs et une prolifération de stratégies et d’objectifs (Cour des comptes, 2013a ; Kamal-Chaoui et Plouin, 2012). La démarche de réorganisation territoriale de l’État vise à rationaliser et à clarifier la gouvernance, y compris celle de l’environnement (encadré 2.1). Deux problèmes se posent concernant la coordination des différentes administrations. D’un côté, les instructions données par l’État à ses services déconcentrés souffrent d’une insuffisante hiérarchisation de leur contenu ; de l’autre, l’articulation entre les services déconcentrés et les services régionaux des agences nationales est insuffisante. En particulier, l’articulation entre l’action territoriale des services étatiques régionaux de l’Ademe et des Dreal manque de clarté. La création de l’Ademe et de ses directions régionales est intervenue alors que le ministère chargé de l’environnement ne disposait pas de ses propres services déconcentrés. Les directions régionales de l’Ademe ont alors fortement collaboré avec les conseils régionaux et ont été, dès lors, considérées par les préfets comme distinctes des services centraux de l’État. La création des Dreal en 2009 a doté l’État de services déconcentrés, placés sous l’autorité des préfets. Dès lors, se pose la question de la coexistence, à l’échelle régionale, de deux services déconcentrés d’entités nationales chargées de l’environnement. Même si la nature des missions de l’Ademe diffère en partie de celles des Dreal, la convention triennale de 2009 n’a pas suffi à clarifier leurs rôles respectifs et leur articulation sur le terrain.
L’acte III de la décentralisation en France, initié en 2013, s’est décliné en trois lois visant à clarifier le millefeuille territorial français et à simplifier les documents de planification, contribuant ainsi à rationnaliser la gouvernance de l’environnement :
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La loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles clarifie les compétences des collectivités territoriales dans des domaines où interviennent plusieurs niveaux de collectivité en créant des « chefs de file ». La région pilote ainsi le travail concernant le développement économique, l’organisation des transports et la biodiversité. Le département est pilote pour l’action sociale, l’aménagement numérique et la solidarité territoriale. Enfin, les communes et groupements de communes, compétents pour l’organisation des transports urbains, sont dotés de compétences supplémentaires en matière de mobilité durable (vélo, marche, covoiturage, autopartage, transports de marchandises et logistique urbaine).
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La loi relative à la délimitation des régions vise à générer des économies d’échelle et à favoriser l’homogénéisation en réduisant à 13 le nombre de régions métropolitaines à compter du 1er janvier 2016. Ces regroupements ne remettent pas en cause les compétences des régions ni leurs ressources.
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La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) clarifie les compétences et simplifie la planification en matière d’aménagement. Elle confirme la suppression de la clause de compétence générale des régions et départements, prévue en 2010, source de chevauchement en matière d’aménagement, et renforce le rôle des régions pour l’aménagement. Pour simplifier les documents de planification à cette échelle, les régions élaboreront un schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalitédes territoire (Sraddet) fixant des objectifs à moyen et long terme en matière, entre autres, de transports, d’énergie, de changement climatique, de pollution de l’air, de biodiversité et de gestion des déchets. Les Sraddet regroupent les schémas préexistants dans ces domaines, comme les schémas régionaux climat, air, énergie, et les documents de planification infrarégionaux, comme les plans de déplacement urbains et les chartes des parcs naturels régionaux, devront s’aligner sur les orientations qu’ils fixent. Autre exemple de rationalisation, un plan régional de prévention et de gestion des déchets regroupera trois schémas précédemment compétents en matière de déchets à l’échelle départementale et régionale.
Source : République française (2014), loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles ; République française (2015), loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ; République française (2015), loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.
La coordination et la répartition des finances entre l’État et les collectivités territoriales pourraient être améliorées (Cour des comptes, 2014 ; Kamal-Chaoui et Plouin, 2012). Les contrats de plan État-région (CPER) sont les principaux outils de coordination financière entre l’État et les régions. Ils intègrent également des contributions d’autres collectivités territoriales, ainsi que des financements européens (Kamal-Chaoui et Plouin, 2012). « L’écologie » était le troisième domaine de contractualisation en termes de budgets alloués sur la période 2007-13, derrière le transport et l’enseignement supérieur (Cour des comptes, 2014). Pour la période en cours (2015-20), la « transition écologique et énergétique » est la seconde priorité après la mobilité multimodale (CGET, 2016). Les CPER ont été critiqués à plusieurs reprises pour leur manque de cadrage stratégique et d’objectifs clairs, rendant les programmes peu lisibles (Cour des Comptes, 2014 ; OCDE, 2006). L’intervention du Parlement en amont pour fixer la stratégie des CPER à mettre en œuvre pourrait répondre à ce défi (Cour des comptes, 2014). Concernant le secteur de l’« écologie », la Cour des comptes a constaté un « effet d’affichage » : plusieurs projets auraient été engagés dans tous les cas, même en l’absenced’un CPER, notamment ceux menés par les agences de l’eau, ce qui remet en question l’efficacité de l’utilisation de ces ressources. Néanmoins, le Medde a reconnu l’utilité du cadre créé par les CPER, qui permet de faire dialoguer l’État et les régions régulièrement (Cour des comptes, 2014). En dehors des CPER, les moyens financiers alloués aux collectivités territoriales sont limités, réduisant ainsi leur champ d’action (Kamal-Chaoui et Plouin, 2012). Le processus de décentralisation engagé par l’État devrait s’accompagner de moyens financiers à destination des collectivités territoriales afin de leur permettre de faire face à des responsabilités accrues.
2. Évaluation environnementale
La France dispose d’une multitude de structures assurant l’évaluation des politiques publiques. Si la qualité des évaluations est globalement bonne et la diversité des approches complémentaire (en termes de méthodes, de granularité, d’accès à l’information et d’engagement des parties prenantes), il manque néanmoins une coordination entre ces structures et une synthèse de leurs résultats. Cela nuit à la compréhension et à l’utilisation de leurs principales conclusions et engendre un gaspillage de ressources. La communication autour de l’importance de la pratique d’évaluation et des résultats des différentes évaluations est également déficiente. Le public et les responsables politiques restent peu sensibilisés et, par conséquent, les conclusions des évaluations ne sont pas assez prises en compte dans la décision politique. Pour renforcer l’évaluation, il paraît essentiel de développer davantage la formation, de mieux prévoir l’évaluation en début de processus et d’affecter les ressources humaines et financières nécessaires pour mener une évaluation de qualité, qui puisse être disponible avant la prise de décision politique (Mansouri-Guilani, 2015 ; Chauffaut, 2014).
La France a mené des réformes au cours de la période de l’examen pour mieux transposer les directives européennes concernant l’évaluation des plans, programmes et projets. Cependant, certains éléments de ces réformes demeurent mal compris ou ont complexifié les processus, et des différences entre les directives européennes et la loi française continuent de poser problème (AE, 2015). L’articulation entre les évaluations environnementales stratégiques et les études d’impact est moins bien définie que dans les autres pays de l’UE (AE, 2015 ; Vernier, 2015). Des études publiques récentes, ainsi que la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite « loi Macron »), proposent des voies pour rendre les processus plus efficients et pour renforcer la participation du public (Duport, 2015 ; Vernier, 2015 ; CNTE, 2015).
2.1. Les institutions de l’évaluation
La France ne manque pas d’institutions assurant l’évaluation des politiques publiques. La Cour des comptes, créée en 1807, est l’organe principal d’évaluation de l’action publique. À l’origine, elle est chargée par la Constitution de garantir le bon usage des fonds publics, mais la mission d’évaluation lui a été expressément confiée en 20087. En matière d’évaluation, le Parlement dispose de six commissions permanentes par assemblée, chacune compétente dans un domaine, et il peut mobiliser exceptionnellement une commission spéciale pour examiner un texte en particulier. La loi sur la transition énergétique a, par exemple, été examinée par une commission spéciale. L’Assemblée nationale joue également un rôle dans l’évaluation de l’action publique. Sa compétence en matière d’évaluation a été renforcée en 2009 avec la création du comité d’évaluation et de contrôle (CEC) des politiques publiques. Toujours au niveau de l’Assemblée, le Conseil économique social et environnemental (CESE) dispose d’une double compétence de prospective et d’évaluation des politiques publiques (Mansouri-Guilani, 2015). France Stratégie est une autre institution importante dans l’évaluation des politiques publiques, rattachée au Premier ministre. Au sein du MEEM, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (Cgedd), créé en2008, mène des missions d’expertise et de conseil que lui confie le gouvernement. Il assure également un rôle d’inspection générale sur l’efficacité de l’action des services du MEEM. L’Ademe mène également des évaluations liées aux questions environnementales. Les autres acteurs de l’évaluation publique sont les chercheurs et universitaires, les cabinets de conseil privés, les organisations représentatives de salariés et d’employeurs. Une meilleure coordination de l’ensemble de ces institutions serait essentielle afin de rationaliser l’utilisation des ressources et d’envoyer des messages clairs aux décideurs en matière de performance des politiques publiques.
Afin d’évaluer l’ensemble des politiques publiques de la France, le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, créé en 2012 et placé sous l’autorité du Premier ministre, a commandé en 2013 une évaluation de 40 politiques publiques, dont quatre portant sur l’environnement8. En 2014, un nouveau cycle a prévu l’évaluation de 12 politiques publiques, dont seulement une politique environnementale9. Les évaluations sont conduites principalement par les services des ministères concernés, en cherchant à y associer les acteurs impliqués. La publication des rapports d’évaluation doit être suivie d’une liste de décisions prises par le gouvernement pour prendre en compte les enseignements tirés. Cette procédure va dans le sens d’une meilleure prise en compte de l’évaluation.
2.2. Des indicateurs pour évaluer les progrès environnementaux
La France a fourni un effort particulier pour intégrer les enjeux environnementaux à la comptabilité nationale et améliorer leur prise en compte au plus haut niveau de la décision publique. Le rapport de la commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social (2009) préconisait de préférer des tableaux de bord d’indicateurs à un indicateur synthétique unique, de valoriser les indicateurs de durabilité et de retenir des indicateurs physiques en matière d’environnement. La SNDD et l’Agence des aires marines protégées, en établissant des tableaux de bord de suivi des indicateurs, sont en ligne avec ces recommandations. Par ailleurs, la loi visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques (loi n° 2015-411 du 13 avril 2015) impose que les principales réformes engagées, notamment dans le cadre de la loi de finances, soient évaluées au regard d’indicateurs d’inégalités, de qualité de vie et de développement durable.
La France a été pionnière dans le développement d’indicateurs dérivés de la comptabilité environnementale. Ainsi, le SOeS s’appuie non seulement sur de nombreuses séries annuelles ayant trait à l’environnement, comme les dépenses de protection de l’environnement ou les émissions polluantes par activité, mais il a également développé de nouveaux indicateurs d’empreinte carbone, de consommation de matière et de productivité matières, ainsi que d’empreinte eau (CGDD, 2011).
Cependant, l’utilisation d’indicateurs pour le suivi des politiques environnementales n’est pas complètement satisfaisante. En effet, le suivi des objectifs fixés dans les lois est parfois assuré par des indicateurs de moyens et non de résultats, ce qui rend leur impact et leur efficacité difficile à évaluer (Crosmarie, 2012). La loi Grenelle II vise par exemple à réduire la consommation d’énergie dans les bâtiments existants d’au moins 38 % d’ici 2020 ; or, les indicateurs de suivi portent sur le nombre d’éco-prêts distribués et sur le crédit d’impôt développement durable, et non sur les économies d’énergie réalisées grâce à ces mesures. Par ailleurs, certains objectifs sont fixés sans que la pérennité de leur accompagnement financier ne soit assurée. Par exemple, en 2011, à peine un dixième de l’objectif du plan de performance énergétique des exploitations agricoles avait été réalisé, alors qu’il devait prendre fin en 2013 selon le Grenelle, et ce en raison d’une baisse des crédits consacrés au financement de ce plan de près de deux tiers entre 2009 et 2011 (Cour des comptes, 2013b). La formulation d’un trop grand nombre d’objectifs sans que les moyens nécessaires à leur réalisation ne soient assurés peut conduire à ce type d’insuccès.
2.3. Les évaluations environnementales stratégiques
En 2012, la France a publié deux décrets (n° 2012-616 ; n° 2012-995) pour améliorer la transposition de la Directive européenne relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (2001/42/CE) qui encadre l’évaluation environnementale stratégique (EES), avec des résultats mitigés. Le premier a défini 43 types de plans et programmes devant systématiquement donner lieu à une évaluation, et dix autres types soumis à une décision au cas par cas de l’autorité compétente, qui décide de procéder ou non à une évaluation environnementale. Le but était d’éviter la lourdeur d’une EES si elle ne s’avère pas nécessaire. Le deuxième a énoncé des dispositions analogues pour les documents d’urbanisme. Si ces réformes précisent mieux le champ d’application des EES, la Commission européenne considère qu’il existe encore des exemptions injustifiées de l’obligation de procéder à des EES (Commission européenne, 2015). De plus, l’introduction de l’examen au cas par cas a complexifié la tâche des services déconcentrés de l’État, par exemple en ce qui concerne la signature et la transmission des dossiers pour les documents d’urbanisme. En outre, concernant les documents d’urbanisme, les Dreal soulignent que les porteurs de projets connaissent mal cette réforme ; il en découle une saisine tardive de l’autorité environnementale,ce qui entraîne une surcharge de travail administratif. Enfin, l’utilité des EES est mal comprise par les porteurs de projets dans le cas des plans et programmes ayant un effet bénéfique sur l’environnement (par exemple, les zonages d’assainissement). Une meilleure formation et communication autour de ces réformes paraît nécessaire (CGDD, 2014a).
La Commission européenne souligne depuis 2009 le manque de séparation fonctionnelle entre l’autorité environnementale et l’autorité décisionnelle, qui nuit à l’indépendance des EES en France (Commission européenne, 2015). La création en 2009 du Cgedd, en tant qu’autorité environnementale, contribue à mettre en œuvre le principe de l’indépendance de l’évaluation stipulé dans le droit européen. Mais pour les plans et programmes relevant des collectivités locales, c’est le préfet de département ou de région qui assume à la fois l’autorité environnementale et administrative. Bien que la Cour de justice de l’UE reconnaisse qu’une séparation organique n’est pas nécessaire pour assurer l’indépendance de l’évaluation (arrêt « Seaport », 20 octobre 2011), le Conseil d’État français, saisi par une organisation non gouvernementale (ONG) environnementale sur la question de la légalité du décret n° 2012-616, a corroboré la critique émise par la Commission européenne en constatant que la France n’organise pas l’indépendance fonctionnelle de l’autorité environnementale chargée d’émettre un avis sur des plans et programmes (Conseil d’État, 2015 ; Gossement, 2015). Cette décision pourrait avoir des impacts sérieux. En effet, les plans et programmes dans 30 des 43 catégories donnant systématiquement lieu à uneEES et dans 4 des 10 catégories soumises à une étude au cas par cas pourraient être déclarés illégaux. Mais une telle mesure pourrait nuire à la protection de l’environnement mise en œuvre par ces plans et programmes et laisserait un vide juridique. Le Conseil d’État a donc saisi la Cour de justice de l’UE pour déterminer la meilleure façon de procéder (Gossement, 2015). La publication d’un décret organisant l’indépendance de l’autorité environnementale est devenue urgente.
2.4. Les études d’impact
En 2011, la France a mené une réforme des études d’impacts (EI) visant à renforcer cet outil et à augmenter son efficacité (décret n° 2011-2019). Leur champ d’application a été redéfini, passant de critères financiers relatifs à la taille du projet à des catégories sectorielles assorties de seuils techniques. Le décret a également rendu obligatoire la présentation de solutions alternatives et de mesures d’atténuation et de compensation des impacts dommageables sur l’environnement. Le suivi de la mise en œuvre de ces mesures est lui aussi devenu obligatoire, et les liens avec le processus d’autorisation ont été renforcés. Pourtant, la Directive 2011/92/UE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement et sa mise à jour en 2014 (2014/52/UE) restent à être transposées, ce qui est prévu par la loi Macron. L’introduction d’une « clause filet » qui permettrait le déclenchement d’une étude d’impact lorsque le milieu naturel est sensible, même en dessous des seuils fixés, est l’une des propositions qui permettrait à la France de remplir ses obligations européennes (Vernier, 2015).
Si l’introduction de l’étude au cas par cas, en 2010, a complexifié le processus d’évaluation des plans et programmes (section 2.3), elle a en revanche conduit, pour les projets, à une amélioration de la qualité des dossiers déposés par les maîtres d’ouvrage et les bureaux d’études. La réforme a également favorisé une approche plus pragmatique du rôle de l’EI par les pôles évaluation environnementale des Dreal. Cette simplification a ainsi permis une diminution des soumissions à EI et un abaissement des exigences (CGDD, 2014a).
Malgré ces progrès, l’efficacité des EI pourrait encore être améliorée en adoptant notamment l’EI unique par projet et en s’inscrivant davantage dans l’esprit des directives européennes. Actuellement, l’approche française d’une EI par procédure donne fréquemment lieu à plusieurs EI pour le même projet, ce qui peut rendre le projet complexe et coûteux : chaque étude prend entre six mois et un an et peut coûter jusqu’à un demi-million d’euros. Cela engendre également un fractionnement du projet, conduisant le maître d’ouvrage, l’autorité environnementale et le public à perdre la vision globale du projet et de ses impacts potentiels (Duport, 2015 ; Vernier, 2015). L’autorité environnementale du Cgedd a également constaté des difficultés provenant de l’écart entre les textes européens et leur transposition en droit français (AE, 2015). Par exemple, la notion de « programme de travaux » en France ne trouve pas de fondement dans la directive européenne, ce qui a conduit le groupe de travail sur la modernisation du droit de l’environnement, établi en 2015, à proposer qu’elle soit supprimée et que les définitions de la directive européenne soient reprises (Vernier, 2015).
L’articulation entre les EI et les EES pose également problème, par exemple, en rendant l’évaluation environnementale insatisfaisante. Si un programme est assujetti à une EES, il n’est pas toujours nécessaire d’examiner chaque projet qu’il comporte par une étude d’impact. Dans ce cas, les mesures nécessaires pour éviter les impacts environnementaux peuvent être mal définies, et les impacts non pris en compte (AE, 2015). La comparaison avec les autres États membres de l’UE montre que la cohérence de cette articulation pourrait être significativement améliorée (AE, 2015). En outre, le CGDD a identifié une mauvaise articulation entre les codes d’urbanisme et de l’environnement, menant parfois à une double évaluation des documents d’urbanisme (CGDD, 2014a). La loi Macron permet désormais au gouvernement d’améliorer l’articulation entre les EI et les EES.
3. Réglementation, conformité et mesures d’exécution
3.1. Régime d’autorisation
Communauté réglementée
Trois grands régimes réglementaires s’appliquent aux installations10 dites « classées » : certaines installations doivent obtenir une autorisation du préfet, d’autres peuvent obtenir un enregistrement simplifié et les installations de la troisième catégorie doivent présenter une déclaration au préfet avant de commencer leurs activités. Les installations non classées, qui se situent en deçà du seuil de déclaration, ne sont pas réglementées par le ministère à des fins de protection de l’environnement. Elles relèvent des règles locales définies par les communes. Les sources de pollution diffuses sont réglementées pour chaque milieu par le MEEM et une direction ministérielle spécifique s’occupe des questions de transport.
Fin 2013, on dénombrait 500 000 installations « classées » en France, dont 450 000 installations déclarées, 3 120 installations soumises à enregistrement et 41 400 établissements comprenant au moins une installation soumise à autorisation. Dans cette dernière catégorie, 6 500 établissements, dont 3 200 exploitations d’élevage, sont visés par la Directive relative aux émissions industrielles (2010/75/UE), 14 400 sont des exploitations agricoles non visées par cette directive et 4 000 sont des carrières. La France compte en outre environ 1 200 installations industrielles « seuil haut » visées par la Directive Seveso III (2012/18/UE).
Installations soumises à autorisation
En France, la délivrance d’autorisations est intégrée pour tous les milieux environnementaux depuis l’adoption et l’entrée en vigueur de la loi de 1976 sur les installations classées, 20 ans avant la Directive européenne relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (PRIP, 2008/1/CE). L’autorisation est délivrée par le préfet sous la forme d’un arrêté préfectoral à partir d’une proposition émanant d’un service d’inspection et reste valable pendant une durée indéterminée (sauf pour les carrières et les décharges). Les autorisations doivent toutefois être réexaminées tous les dix ans et l’exploitant est tenu de signaler au préfet toute modification significative de ses activités susceptible de justifier le dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation.
Une demande d’autorisation doit comporter une EI et une étude des dangers. Cette dernière se concentre sur les risques qu’entraînerait l’installation en cas d’accident, qui justifient les mesures d’atténuation proposées.
L’autorisation est préparée par un inspecteur après une procédure de consultation des parties prenantes désignées par la loi, du public et des ONG (il s’agit d’une enquête publique effectuée par recueil de commentaires ou par organisation de réunions publiques).
Installations soumises à enregistrement
La France a introduit en 2009 un nouveau régime de réglementation environnementale : l’enregistrement. Il s’agit essentiellement d’un régime d’autorisation simplifié destiné aux installations présentant un risque suffisamment significatif pour en justifier l’évaluation préalable mais qui peut être couvert par des prescriptions réglementaires normalisées. La mise en œuvre de ce régime s’inscrit dans la tendance à la diversification de la réglementation en fonction des risques, que l’on observe dans de nombreux pays membres de l’OCDE. Il s’applique à certains secteurs d’activité (comme les entrepôts, les stations-service, les pressings, les petites distilleries) en précisant, si nécessaire, des seuils de volume d’activité. La liste des secteurs éligibles, qui comprennent essentiellement des petites et moyennes entreprises (PME), devrait être élargie à l’avenir.
Le régime d’enregistrement a été introduit pour combler une lacune entre la formalité administrative de déclaration et le processus extrêmement rigoureux d’autorisation. L’enregistrement exige toujours le dépôt d’une demande et l’organisation d’une consultation publique simplifiée, mais réduit le nombre d’études techniques requises, augmente la prévisibilité des prescriptions (des dispositions techniques sectorielles sont progressivement élaborées) et raccourcit le délai de traitement des demandes (la durée maximum du processus de demande est de sept mois, contre un an pour une autorisation complète). Il est important de noter que la demande d’enregistrement ne nécessite pas d’étude d’impact environnemental (EIE).
Fin 2014, 35 % des installations auparavant soumises au régime d’autorisation devaient théoriquement passer au régime d’enregistrement. Début 2015, seules 28 % d’entre elles avaient opéré cette transition. La cible, désormais repoussée à 2017, n’a pas été atteinte en raison de la difficulté à identifier les catégories d’installations éligibles à un régime d’autorisation simplifié et de la lenteur de l’élaboration des nouvelles exigences techniques sectorielles.
Installations soumises à déclaration
Les installations soumises à déclaration sont régies par des règles générales contraignantes énoncées dans des arrêtés-types ministériels. Ces prescriptions sont jointes à l’accusé de réception officiel envoyé par le préfet à l’exploitant. Dans certains cas, elles peuvent être durcies par un arrêté préfectoral pour tenir compte du contexte local. Toutefois, les services d’inspection n’ont en général pas la possibilité de contrôler une déclaration ou de recommander son rejet. Certaines installations relevant du régime déclaratif peuvent en outre être soumises à des contrôles périodiques.
Intégration réglementaire et allègement de la charge administrative
Le programme stratégique de l’inspection 2014-17 (Medde, 2014) énonce parmi ses grandes priorités la simplification administrative des procédures. En mai 2014, une autorisation unique a été mise en place à titre expérimental pour une durée de trois ans dans plusieurs régions de France (dont la Champagne-Ardenne, la Franche-Comté, Rhône-Alpes et l’Île-de-France). Cette autorisation intègre l’autorisation environnementale traditionnelle, le permis de construire, l’autorisation de défrichement, les autorisations au titre du code de l’énergie, les dérogations relatives aux espèces protégées, etc. Depuis août 2015, la loi Macron permet au gouvernement de généraliser l’autorisation unique par ordonnance à l’ensemble du territoire.
Le programme stratégique envisage d’autres mesures de simplification, conformément au principe de réglementation proportionnée. En particulier, la poursuite du passage des installations réglementées du régime d’autorisation au régime d’enregistrement devra atteindre, d’ici fin 2017, la cible mentionnée plus haut de 35 % d’installations « transférées ». Il met l’accent sur l’élaboration d’une réglementation technique sectorielle standard et sur la réduction des délais d’instruction des dossiers.
3.2. Inspections environnementales
Instruments de surveillance de la conformité
Les services d’inspection français distinguent les contrôles selon qu’ils sont annoncés (au moins 48 heures à l’avance) ou inopinés ; ciblés ou généraux ; ponctuels, courants ou approfondis ; planifiés ou circonstanciels (consécutifs à des plaintes/accidents). Les inspections sont généralement conduites par un inspecteur de terrain généraliste même si, dans certaines Dreal, ce dernier est souvent accompagné d’un spécialiste de l’antenne régionale. Si le nombre annuel total de visites sur site a reculé de 23 % depuis 2006, le nombre d’inspections approfondies a augmenté (graphique 2.1). Cela s’explique probablement par la redistribution des ressources affectées à la surveillance de la conformité au profit des installations plus complexes et présentant davantage de risques pour l’environnement.
On observe indiscutablement une tendance à la normalisation quasi totale des méthodes et outils utilisés par les inspecteurs. La direction générale de la Prévention des risques (DGPR) publie un guide méthodologique des visites d’inspection, qui décrit la préparation des visites d’inspection, leur contenu, la phase de notification des résultats, et contient les principaux formulaires-types. Chaque inspecteur se voit remettre un manuel contenant les principales instructions relatives aux procédures, des formulaires-types et des informations d’appui. En outre, la plupart des services d’inspection éditent leurs propres procédures pour les visites d’inspection et les interventions en cas d’accident.
Les services d’inspection recourent à plusieurs indicateurs fondés sur l’activité (rendement) pour mesurer leurs performances, mais en général (à l’exception de l’indicateur relatif au nombre d’accidents) ils ne mesurent pas les résultats en termes de connaissance et de comportement de la communauté réglementée. Par conséquent, les stratégies de surveillance de la conformité ne sont pas suffisamment liées aux résultats sur le terrain.
Ciblage des activités de surveillance de la conformité
Le régime d’inspection couvre toutes les installations relevant du régime d’autorisation et du régime d’enregistrement. Celles qui sont soumises à déclaration ne sont pas systématiquement incluses dans le programme d’inspection et ne sont pas inspectées, sauf en cas d’accident ou de plainte. Toutefois, elles peuvent être concernées par une campagne d’inspection ciblée organisée à l’initiative du MEEM. Les inspections inopinées représentent 10 % du nombre total d’inspections réalisées chaque année dans des installations autorisées. Elles visent essentiellement à prélever des échantillons et à vérifier l’exactitude des données d’autosurveillance. Chaque service d’inspection élabore un programme d’inspection pluriannuel et un plan d’inspection annuel, qu’il soumet à la DGPR pour approbation (encadré 2.2).
Actuellement, les installations autorisées sont inspectées une fois tous les quatre ans en moyenne. Les installations « prioritaires» (on en dénombre environ 2 000) sont inspectées au moins une fois par an. Il s’agit :
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des établissements Seveso « seuil haut » ;
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des installations d’élimination, de traitement et de stockage des déchets d’une capacité supérieure à 20 000 tonnes par an pour les déchets dangereux et à 40 000 tonnes par an pour les déchets municipaux solides ;
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des installations émettant de grandes quantités de polluants (la plupart étant des établissements soumis à la Directive PRIP) ;
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des établissements qui épandent des déchets ou des produits à base d’effluents (par exemple des boues) sur les sols agricoles.
Il existe également une liste, actualisée chaque année, d’environ 8 000 établissements dits « à enjeu » (ou prioritaires au niveau régional) qui sont inspectés une fois tous les trois ans et qui comprennent toutes les installations visées par la législation communautaire, en particulier celles soumises à la Directive PRIP et ne faisant pas partie de la liste des établissements de priorité nationale. Cette liste est établie à l’échelle régionale sur la base de critères nationaux. Toutes les autres installations autorisées doivent être inspectées tous les sept ans au moins.
Outre les prescriptions nationales relatives aux inspections, il existe une batterie de critères de risque qui doivent être pris en compte dans le programme annuel d’inspection. Ces critères portent essentiellement sur l’importance de l’installation (complexité des opérations et caractère plus ou moins sensible du milieu environnant) et sur ses antécédents en matière de conformité aux prescriptions. L’existence d’un système de management environnemental et la promptitude avec laquelle une installation réagit à des plaintes de la population locale sont considérées comme des circonstances atténuantes, tandis que la survenue d’accidents graves au cours des quatre années précédentes est un facteur aggravant. Les orientations nationales relatives à la planification des inspections fournissent des recommandations précises sur l’utilisation de ces critères.
Source : Medde (2015), Inspection des installations classées (site web), www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr.
Le rapport d’évaluation 2015 sur les pratiques d’assurance de la conformité a souligné que la planification des inspections ne tenait que partiellement compte du risque et ne prêtait pas attention aux facteurs de gestion et d’exploitation. Afin de combler cette lacune, le programme stratégique de l’inspection pour 2014-17 envisage d’affiner encore les critères de ciblage pour y intégrer l’emplacement de l’installation, la vulnérabilité du milieu environnant et le dossier de conformité de l’exploitant.
3.3. Mesures d’exécution
La DGPR du MEEM a élaboré des orientations concernant les mesures à prendre par les services d’inspection en cas de non-conformité. La riposte doit être proportionnée aux antécédents de l’exploitant en matière de conformité. Par exemple, un exploitant respectant dans l’ensemble les textes pourra recevoir des prescriptions de mise en conformité tenant compte de ses capacités financières, accompagnées d’une modification des conditions de son autorisation. Un exploitant ayant déjà commis des infractions mineures s’exposera à des sanctions administratives, et un contrevenant récidiviste risquera une suspension de ses activités et des sanctions pénales.
Mesures administratives
Les mesures administratives sont prises par le préfet, indépendamment de toutes poursuites pénales éventuelles susceptibles d’être engagées par un procureur. Dans un premier temps, sur recommandation d’un service d’inspection, le préfet notifie au contrevenant un arrêté de mise en demeure précisant quelles mesures prendre et dans quel délai. La mise en demeure n’est pas une sanction mais forme la base juridique des mesures d’exécution formelles (encadré 2.3).
Un service d’inspection vérifie que la mise en demeure est suivie d’effets. Si l’exploitant ne remet pas son installation en conformité dans le délai imparti, le préfet peut recourir, successivement ou simultanément, aux mesures d’exécution administratives suivantes :
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L’arrêté de consignation d’une somme d’argent auprès d’un comptable public en garantie de la réalisation des travaux de mise en conformité prescrits. La somme placée en consignation doit être égale, ou légèrement supérieure, aux coûts estimés des travaux (il n’existe pas d’instructions particulières sur la méthode d’estimation de ces coûts). La somme consignée est remboursée (souvent de manière échelonnée) après vérification de la mise en conformité ou, dans des cas exceptionnels, sert à financer les travaux à réaliser si ces derniers sont entrepris par l’État. Ce type de dépôt de garantie constitue la forme de sanction administrative la plus utilisée, même si elle requiert une procédure assez longue et complexe.
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L’arrêté de travaux d’office, afin que l’État exécute les travaux prescrits par les services d’inspection, aux frais de l’exploitant. Ce type de mesure est très rarement utilisé – lorsque l’exploitant n’obéit pas à la mesure de consignation – car l’État préfère éviter de prendre en charge les travaux.
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L’arrêté de suspension du fonctionnement de l’installation ou de suspension de son autorisation, assorti de mesures visant à prévenir toute nouvelle dégradation de l’environnement pendant la période de suspension.
Un préfet est en droit d’ordonner la fermeture définitive d’une installation opérant sans l’autorisation ou la déclaration requise ou dont la demande d’autorisation a été rejetée. Une autorisation peut également être annulée pour des raisons de sécurité publique ou sil’exploitant refuse de réaliser les travaux prescrits. Si l’exploitant refuse d’obtempérer à un arrêté de suspension ou de fermeture définitive, le préfet peut ordonner de mettre l’installation sous scellés.
L’ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 a simplifié la procédure de mise en œuvre des sanctions administratives et a renforcé le recours aux amendes administratives fixes par infraction et aux astreintes journalières. Ces amendes et astreintes, qui ne s’appliquaient auparavant qu’aux infractions relatives aux déchets, peuvent aujourd’hui être imposées à toute infraction mineure. Cependant, les procédures et les instructions pour leur utilisation par les services d’inspection n’existent pas encore.
Source : Medde (2015), Inspection des installations classées (site web), www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr
Ces dernières années, on a observé une tendance au recul du nombre de mesures de police administrative (graphique 2.2), qui peut s’expliquer par la diminution du nombre des inspections (graphique 2.1). Un peu plus de 10 % des inspections débouchent sur l’émission d’une mise en demeure. Ce chiffre n’a pas évolué au cours de la décennie passée, ce qui montre que le taux de détection des infractions n’a pas progressé. Il serait donc possible d’améliorer le ciblage des inspections en fonction des performances des installations réglementées en matière de conformité.
Les statistiques relatives à la conformité des établissements prioritaires au niveau national sont disponibles sur internet. De plus, la base de données en ligne ARIA (analyse, recherche et information sur les accidents) recense plus de 30 000 incidents ou accidents industriels.
Mesures pénales
Les contraventions pour infractions mineures (par exemple, le non-respect d’une mise en demeure, le défaut de notification au préfet d’un changement important dans l’exploitation ou le défaut de déclaration) relèvent de la compétence des tribunaux de police, lesquels peuvent infliger une amende par infraction ou une astreinte journalière. Les délits sont quant à eux passibles d’amendes plus élevées (jusqu’à 750 000 EUR pour les personnes morales), voire de peines d’emprisonnement pour les personnes physiques. Un juge peut également prononcer, à l’encontre de l’exploitant, une interdiction d’exploitation de l’installation, temporaire (d’une durée maximale de cinq ans) ou définitive. En droit français de l’environnement, aucune infraction n’est considérée comme un crime.
Bien que les sanctions pénales soient devenues plus sévères au fil des années et que le nombre de demandes de poursuites progresse, les sanctions pénales sont rarement appliquées dans la pratique. C’est le procureur qui décide s’il y a lieu de renvoyer l’affaire devant les tribunaux (il n’est tenu de poursuivre que si l’affaire engage la responsabilité civile de l’exploitant vis-à-vis d’une partie privée). Malgré la publication en 2005 par le ministère de la Justice des Orientations de politique pénale en matière d’environnement à l’intention des procureurs et des tribunaux, les affaires liées à l’environnement ne sont pas toujours la priorité des procureurs.
3.4. Responsabilité environnementale
Avant 2008, la législation française ne reconnaissait que la responsabilité civile « traditionnelle », c’est-à-dire l’atteinte à la santé ou aux intérêts économiques privés. Cette responsabilité est généralement fondée sur la notion de faute si la partie est une personne physique, et de responsabilité stricte (sans faute) dans le cas des personnes morales11. Un juge civil peut également ordonner le remboursement des frais engagés par l’État pour intervenir à la suite d’une infraction (par exemple en cas d’accident).
En 2008, une loi sur la responsabilité environnementale a été votée afin de transposer en droit français la Directive européenne sur la responsabilité environnementale (2004/35/CE). Cette loi couvre les atteintes à l’eau, aux espèces biologiques et aux habitats naturels, ainsi qu’aux sols si leur contamination menace la santé humaine. Toutes les installations « classées » sont soumises à une responsabilité « sans faute » en cas d’atteinte à l’environnement. Un tribunal peut émettre une injonction pour la réparation d’un préjudice environnemental dans un délai fixé soit par l’exploitant, soit par l’agence publique aux frais de l’exploitant. Cependant, la loi sur la responsabilité environnementale ne précise pas de procédures ou de méthodes pour la réparation des atteintes à l’environnement, ce qui en rend l’application difficile dans la pratique.
En février 2015, le ministère de la Justice a fait part de son intention de présenter un projet de loi visant à renforcer les dispositions du Code civil sur les réparations des atteintes à l’environnement. En particulier, ce projet de loi privilégierait la réparation « en nature » des préjudices environnementaux (c’est-à-dire la restauration de l’écosystème dégradé) par la partie responsable, et n’autoriserait une indemnisation pécuniaire qu’en cas d’impossibilité. Il s’appuierait sur des méthodes spécifiques (l’analyse d’équivalence) pour définir la procédure de réparation du préjudice environnemental. Il permettrait également au juge d’infliger une amende civile si le dommage est commis intentionnellement et a engendré un gain ou une économie pour son auteur (Hopquin, 2015). Cette réforme constituerait un progrès remarquable dans l’orientation du régime de la responsabilité environnementale vers la restauration des écosystèmes.
3.5. Promotion de la mise en conformité et des pratiques vertes
Diffusion de l’information à la communauté réglementée
La DGPR n’a pas établi de programme officiel d’aide à la conformité mais encourage les services d’inspection à communiquer régulièrement à la communauté réglementée des informations sur les prescriptions à venir et les activités d’inspection dans le cadre de diverses rencontres. Cependant, l’auditoire de cette communication est très limité.
Ce sont surtout des associations d’entreprises qui diffusent l’information sur les dispositions de la réglementation environnementale. Par exemple, « Enviroveille », un service de « veille réglementaire » disponible sur abonnement payant et géré par la Chambre de commerce et d’industrie de France (CCI France), envoie régulièrement des courriers électroniques qui font le point sur l’actualité et a également mis en place un site internet consacré à l’évolution de la législation et aux nouvelles réglementations applicables.
Systèmes de management environnemental et certifications vertes sectorielles
Depuis le dernier examen environnemental de la France, le nombre d’entreprises françaises dotées d’un système de management environnemental (SME) certifié ISO 14001 s’est accru de façon spectaculaire : le nombre de certificats délivrés est passé de 3 300 en 2005 à plus de 7 900 en 2013 (graphique 2.3). Cette croissance est principalement tirée par la demande des marchés intérieur et international, même s’il n’est pas impossible que l’incitation produite par la baisse de fréquence des inspections contribue également à cette tendance.
La France est l’un des pays les plus avancés pour la promotion des SME simplifiés à l’intention des PME. Avec l’appui technique, méthodologique et financier substantiel apporté par l’Ademe, CCI France a conçu deux dispositifs de SME « allégés » permettant aux PME d’obtenir une reconnaissance pour les améliorations moins ambitieuses, mais néanmoins souhaitables, de leur gestion environnementale. Le programme « 1.2.3. Environnement » (encadré 2.4) est conçu pour faciliter un processus pas à pas de certification ISO 14001. « EnVol » est un programme de management environnemental spécialement destiné aux petites entreprises (de moins de 50 salariés) qui aspirent à une certification ISO 14001 complète mais souhaiteraient faire reconnaître leur SME de base, ce qui correspond globalement au premier niveau de « 1.2.3 Environnement ».
Le programme « 1.2.3. Environnement » offre aux PME la possibilité d’acquérir trois niveaux de SME. CCI France, en partenariat avec plusieurs entreprises et organismes publics français et avec l’appui du ministère chargé de l’environnement et de l’Ademe, a mis en place le programme « 1.2.3 Environnement » pour aider les entreprises à se doter d’un SME. Comme d’autres dispositifs simplifiés, ce programme permet aux entreprises de choisir le niveau d’exigence auquel elles entendent se conformer.
Depuis 2007, 415 entreprises ont pris part à la mise en œuvre de « 1.2.3. Environnement ». Les CCI régionales mettent à disposition les services d’un consultant, qui a pour mission d’aider les PME à engager une démarche « 1.2.3. Environnement ». De plus, les associations professionnelles et les ONG apportent leur concours tout au long du processus. En France, au moins sept sociétés, accréditées par l’Assemblée française des chambres de commerce et d’industrie (ACFCI), proposent cette certification. À l’issue d’un audit externe effectué par l’un de ces organismes, les entreprises candidates reçoivent une certification pour l’un des trois niveaux. Cette certification est valide pour une période de trois ans et s’accompagne d’un audit annuel.
Source : Chambre de commerce et d’industrie de France (2015), « 1.2.3. Environnement » (site Internet), www.cci.fr/web/123environnement.
En France, les programmes de verdissement des entreprises bénéficient en général de plusieurs sources de financement, ce qui aide à les pérenniser. Par exemple, le programme régional « Performance Bretagne environnement plus » (PBE+) est financé conjointement par le Conseil régional, l’État, des organisations professionnelles et de grandes entreprises (Peugeot Citroën, EDF et Gaz de France). Il reçoit en outre une subvention de la Commission européenne. Il fournit aux entreprises des informations environnementales, des recommandations et une assistance technique depuis 1994 (Chambre de commerce et d’industrie de Bretagne, 2015).
Les pouvoirs publics travaillent en collaboration avec les organismes professionnels pour produire des « normes vertes » à l’intention de certains secteurs économiques, ainsi que des instructions expliquant aux entreprises, dont beaucoup de PME, comment « gagner » le droit d’afficher les labels correspondants (autocollants, affiches, etc.) afin de faire connaître leurs pratiques environnementales à leurs clients.
Un programme de ce type existe pour les imprimeries depuis 1998. Créé par la Chambre régionale des métiers et de l’artisanat, puis déployé à l’échelle nationale, le label « Imprim’Vert » a été attribué à plus de 1 950 imprimeries qui adhèrent à un ensemble de bonnes pratiques environnementales, comme la non-utilisation de produits toxiques, la sécurisation des stockages et l’élimination conforme des déchets (Imprim’Vert, 2015). Cependant, la conformité avec la réglementation environnementale ne figure pas parmi les critères d’attribution du label.
Initiatives volontaires des acteurs économiques
En 2008, à la suite du Grenelle de l’environnement, un cadre a été mis en place pour les conventions d’engagement volontaire, qui sont des partenariats conclus entre les secteurs industriels et l’État pour promouvoir et diffuser des pratiques écologiques. Ces conventions, qui s’inspirent de bonnes pratiques mises en œuvre dans d’autres pays membres de l’OCDE, comme les Pays-Bas, peuvent être thématiques (maîtrise des ressources, minimisation des déchets, atténuation des effets du changement climatique, etc.) ou multithématiques. Ces conventions, initiées par des associations professionnelles, conviennent d’objectifs quantitatifs ambitieux avec le ministère de l’Environnement pour une période de trois à cinq ans, pouvant être prolongée. Le ministère est à la fois signataire et promoteur des engagements pris au titre de ces conventions. En outre, l’Ademe est souvent partie prenante à la convention ; elle apporte une expertise technique et parfois un financement pour certains projets spécifiques.
À ce jour, 26 conventions (16 multithématiques et 10 thématiques) ont été signées avec plusieurs secteurs économiques, dont : les transports, les travaux publics, les hôpitaux, les laboratoires pharmaceutiques, les télécommunications, le commerce de détail, le sport, etc. Pour chaque convention, un bilan annuel est publié chaque année afin de rendre compte des progrès réalisés vers l’atteinte des objectifs. Par exemple, le secteur du transport aérien a fait état d’une réduction de 710 000 tonnes de ses émissions de CO2 et celui de la distribution alimentaire a annoncé le doublement de l’offre de produits issus de l’agriculture biologique (CGDD, 2014b). Depuis 2008, plus de 1 200 entreprises de transport routier (marchandises et voyageurs) ont adhéré volontairement à la charte « Objectif CO2, les transporteurs s’engagent » pour réduire les émissions de CO2 liées à leur consommation de carburant à travers des actions menées selon quatre axes (véhicules, carburant, conducteurs, organisation des flux). Depuis 2015, le dispositif « FRET 21 » engage les chargeurs (détenteurs de marchandises). Un cadre national pour les chartes de logistique urbaine a également été établi.
4. Promouvoir une démocratie environnementale
4.1. Participation du public
La mise en œuvre la plus emblématique des principes de la démocratie environnementale a été le Grenelle de l’environnement en 2007. Si la participation du public au domaine environnemental n’est pas quelque chose de totalement neuf en France (la France a ratifié en 2002 la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public et l’accès à la justice en matière d’environnement), le Grenelle en a fait un acte politique majeur. Le Grenelle a fondé le modèle de la « gouvernance à cinq », associant État, élus, entreprises, syndicats et ONG au sein de groupes de travail, afin d’intégrer les perspectives de toutes les parties prenantes. Ce système de gouvernance participatif a été repris dans le cadre des conférences environnementales annuelles, instaurées en 2012, qui font le point sur les avancées vers l’atteinte des objectifs environnementaux et définissent les priorités pour l’année à venir.
En associant l’ensemble des parties prenantes concernées, la « gouvernance à cinq » renforce la crédibilité des engagements et l’efficacité des mesures prises, et les protègent des aléas de l’alternance politique. Cependant, ce processus reste limité dans la phase de mise en œuvre des politiques et son efficacité est amoindrie par l’inégale capacité des parties à assister à toutes les consultations, surtout les plus techniques. Par exemple, lors de la seconde série de travaux du Grenelle, au sein d’une trentaine de comités opérationnels sur des enjeux plus précis, l’État et les employeurs représentaient 70 % des participants contre 14 % et 2 % pour les ONG et les salariés, respectivement (Boy, 2010).
La concertation multipartite a été institutionnalisée en 2010 avec la création du comité national du développement durable et du Grenelle environnement (Cnddge), qui assure le suivi des engagements du Grenelle et renforce le dialogue social environnemental. En 2012, le Cnddge a été remplacé par le Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui adjoint un collège de parlementaires aux cinq groupes de parties prenantes déjà existants. Le CNTE est une instance de concertation collégiale, présidée par le ministre en charge de l’écologie, qui rend des avis structurant sur la politique environnementale. Cette institution présente néanmoins plusieurs limites. Le CNTE n’ayant pas de caractère interministériel, son influence dépend directement de celle du ministre en charge de l’écologie. La représentativité de ses membres pose également question. De fait, la présence d’associations environnementales ne suffit pas à garantir la représentativité de la société civile (Gossement, 2013).
Au-delà de la conception des politiques publiques, la France a également fait des efforts pour améliorer la participation du public aux décisions concernant l’impact des plans, programmes et projets sur l’environnement. Le plus grand progrès a été l’adoption de la loi de participation du public en 2012 (loi n° 2012-1460), qui met en œuvre l’article 7 de la Charte de l’environnement. Le processus de participation a été rendu plus transparent et son accès facilité grâce à l’organisation de la participation du public en ligne. Les projets de décision, accompagnés d’une note de présentation, sont ainsi mis à disposition sur internet et le public est invité à fournir ses observations, qui sont ensuite synthétisées par la Commission nationale du débat public (CNDP). La synthèse est également publiée en ligne. D’autres efforts incluent la mise en ligne du formulaire d’examen au cas par cas et la publication des avis de l’autorité environnementale sur son site internet.
Cependant, le processus de participation du public demeure insuffisant, comme cela a été illustré lors des contestations violentes autour de grands projets d’aménagement (le barrage de Sivens ou l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes). Une étude du CNTE constate que, paradoxalement, le fort désir de participation aux décisions ne se concrétise pas par une mobilisation des procédures mises à disposition (CNTE, 2015). Ce comportement pourrait s’expliquer en partie par la prévalence d’un sentiment d’inéluctabilité, provenant du fait que la consultation du public concernant les plans, programmes et projets se fait trop tard, à un stade auquel le projet ne peut pas être remis en question et où seuls des changements marginaux peuvent être apportés (AE, 2015 ; Duport, 2015).
Un renforcement de la concertation en amont est donc essentiel pour améliorer le dialogue environnemental (Duport, 2015), tout en veillant à ne pas trop alourdir les procédures (CNTE, 2015). En 2015, le CNTE a proposé deux régimes distincts pour organiser la participation en amont : l’un pour les plans et programmes susceptibles d’avoir un impact sur l’environnement ; l’autre pour les grandes infrastructures de transport et d’énergie. Les premiers sont déjà soumis au code de l’environnement et à l’évaluation environnementale, tandis que les secondes doivent saisir la CNDP. Ces régimes seraient complétés d’un droit d’initiative – un mécanisme d’alerte – à déclencher en cas de problème par une représentation légitime du public (CNTE, 2015).
La loi Macron vise également à améliorer la procédure de participation du public à l’élaboration des projets, plans et programmes afin qu’elle intervienne plus en amont dans le processus d’évaluation, qu’elle soit plus transparente mais également plus flexible. Cette flexibilité doit permettre aux autorités compétentes de fixer les modalités d’information et de participation du public en fonction des caractéristiques du plan ou du projet et de son stade d’élaboration, mais également d’utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication. La loi vise également à simplifier la participation du public, par exemple en recourant à une procédure unique de participation du public pour plusieurs projets, plans ou programmes. Cependant, la même loi donne au gouvernement le pouvoir de réformer le droit de l’environnement par simple ordonnance, par exemple pour accélérer l’instruction et la prise de décisions relatives aux projets d’aménagement12. Le recours aux ordonnances, qui écarte le Parlement des discussions, paraît paradoxal pour des dispositions liées à la participation démocratique : cela souligne l’enjeu et la difficulté de concilier simplification procédurale et démocratie environnementale.
4.2. Accès à l’information environnementale
L’accès à l’information environnementale est de bonne qualité en France : il s’adosse à la fois sur le rôle de diffusion qu’exerce le service de l’observation et des statistiques (SOeS) du ministère et sur les nombreux portails de données mis à disposition du public sur internet ces dernières années. La qualité de l’information environnementale et de son accès est ancrée dans le droit français : en 2005, le droit d’accès à l’information environnementale a été intégré à la Charte de l’environnement, adossée à la Constitution, et la France a également transposé les deux directives européennes en la matière (2003/4/CE ; 2007/2/CE). Les Français s’estiment pourtant moins bien informés des sujets environnementaux que leurs voisins européens.
Le SOeS joue un rôle crucial dans la diffusion de l’information environnementale. Depuis 1994, il publie un rapport tous les quatre ans sur l’état de l’environnement en France. L’ensemble des chiffres et des analyses ponctuelles qu’il produit est également publié sur son site internet, qui a enregistré 700 000 visites et plus de 2 millions de pages vues en 2015. Il assure également la collecte et l’analyse des statistiques environnementales. Initialement établissement indépendant créé sous le nom d’Institut français de l’environnement, il est transformé en 2004 en service de compétence nationale, rattaché directement au ministère en charge de l’environnement, avant d’être intégré au CGDD en 2008. Ces décisions ont été critiquées du fait de l’affaiblissement potentiel de l’indépendance de l’institut et de sa mission d’évaluation des politiques environnementales qui en résulterait (Sueur, 2007). De surcroît, malgré son importance, le SOeS subit de fortes pressions en termes de ressources humaines, qui pourraient nuire à la qualité de son travail : sur chaque sujet il n’y a qu’un spécialiste, difficilement remplaçable.
En plus du site du SOeS, la France dispose de nombreux autres portails en ligne pour rendre l’information environnementale disponible au public. Le plus important d’entre eux est le portail « Tout sur l’environnement », qui répond aux exigences de la Convention d’Aarhus et du Grenelle de l’environnement. Lancé en 2009, le portail rassemblait, fin 2015, 132 800 références alimentées par 185 contributeurs publics concernant l’état de l’environnement, les pressions qu’il subit, les actions visant à le protéger et la réglementation en vigueur. En 2015, le portail a enregistré 142 000 visites et 380 000 pages vues. Sa fréquentation augmente d’environ 10 % par an. Les autres portails internet à disposition du public sont : « Geoidd » pour les données cartographiques ; « Eider » pour les séries et tableaux thématiques ; les portails des différents observatoires environnementaux, comme celui pour la biodiversité et celui pour les risques naturels ; un portail sur l’eau ; et un autre sur l’agriculture. Depuis 2011, la France se penche sur l’ouverture des données publiques (open data) à travers sa mission « Etalab ». Elle est ainsi passée, de 2013 à 2014, de la douzième à la troisième place du classement mondial de l’Open Data Index. Parmi les dix critères utilisésdans ce classement, trois concernent l’environnement.
Malgré la mise à disposition de ces informations, l’enquête Eurobaromètre 2012 constate que seuls 57 % des Français s’estiment bien informés sur les sujets environnementaux, ce qui situe la France en dessous de la moyenne de l’UE (62 %) (Commission européenne, 2014c). La dynamique est toutefois positive puisque la France a gagné deux points de pourcentage depuis l’enquête Eurobaromètre 2011 (graphique 2.4).
L’insatisfaction des Français à l’égard de leur niveau d’information environnementale peut s’expliquer par le manque d’informations relatives à des actions environnementales concrètes et quotidiennes – qui contraste avec l’abondance des portails de données sur internet –, notamment en ce qui concerne les informations mises à la disposition des consommateurs quant à l’impact environnemental de la production et de l’utilisation des produits, et sur la façon de les recycler. En ce qui concerne le recyclage, les consignes de tri et les informations sur les produits sont hétérogènes et confuses (UFC Que Choisir, 2015). Le logo « Triman », introduit le 1er janvier 2015 comme mesure de simplification, s’avère complexe et d’une portée limitée : tous les produits ne sont pas concernés par le logo et celui-ci n’est pas non plus obligatoirement apposé sur l’emballage. Aucune sanction n’est d’ailleurs prévue en cas d’absence de logo (Gossement, 2014). En ce qui concerne les caractéristiques environnementales des produits, il existe des centaines de labels différents, de qualité et fiabilité variables. Il existe donc un besoin pressant de rationalisation et d’amélioration de la qualité de l’information sur le marché.
4.3. L’éducation environnementale
En France, l’éducation environnementale repose sur d’importantes bases légales, mais la France est confrontée à des difficultés pour mettre en œuvre ces ambitions dans la pratique quotidienne des établissements d’enseignement. Dès 2004, le ministère de l’Éducation nationale a lancé un processus pour généraliser l’éducation au développement durable, renforcé par une circulaire de 2007 et par la loi Grenelle II en 2010 prévoyant l’intégration du développement durable dans toutes les matières scolaires. L’éducation à l’environnement et au développement durable a en outre été intégrée dans le code de l’éducation en 2013. Néanmoins, les élèves français étaient moins informés des enjeux environnementaux que leurs pairs de l’OCDE en 2006 (OCDE, 2008) et une évaluation constatait en 2014 que l’enseignement environnemental au collège demeure spontané et disparate (Ademe, 2014).
En 2006, la sensibilisation des élèves aux enjeux environnementaux était insuffisante. D’après une enquête conduite auprès d’élèves de 15 ans par le programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE, les pourcentages d’élèves déclarant être informés des risques environnementaux à l’école étaient systématiquement inférieurs à la moyenne des pays membres de l’OCDE. La France enregistrait même les plus faibles résultats de l’OCDE concernant les pénuries d’énergie et les déchets nucléaires (OCDE, 2008).
Le ministère de l’Éducation nationale a lancé en 2004 un processus pour généraliser l’éducation au développement durable en trois phases. La première (2004-07) visait à intégrer le développement durable dans les programmes scolaires de sciences, d’histoire-géographie et de mathématiques. La deuxième phase (2007-11) s’articulait autour de la démarche « établissements en démarche de développement durable » (E3D), conçue par le gouvernement pour accompagner et inciter les écoles à s’engager dans la voie de la transition. En parallèle, l’office français de la Fondation pour l’éducation à l’environnement en Europe (FEEE) lançait le programme « Éco-École ». Ces deux programmes incitatifs encouragent les établissements scolaires à développer des actions d’éducation environnementale en partenariat avec différents acteurs (associations, collectivités, entreprises, familles) et aboutissent à l’attribution d’un label aux établissements remplissant les critères. En 2013, 1 800 établissements français participaient au programme « Éco-École » et mi-2014 3 250 s’étaient engagés dans le processus E3D. Enfin, la troisième phase (2011-15) insistait sur la gouvernance et le pilotage, en dotant les académies de comités pour l’éducation au développement durable chargés de coordonnerles enseignements.
En dépit de ces efforts, les progrès réalisés par la France dans le domaine de l’éducation environnementale demeurent insuffisants. Une étude de l’Ademe, en 2014, constate que le développement durable n’est pas encore systématiquement intégré dans toutes les matières, en raison d’un manque de formation des enseignants et de la tradition française d’enseignement strictement disciplinaire. En outre, les élèves adolescents interrogés n’ont pas montré beaucoup d’intérêt pour le développement durable et ils ressentent une incohérence entre ce qu’ils apprennent à l’école et la réalité de terrain (politiques des collectivités et entreprises, modèle de société consumériste) (Ademe, 2014). Un accompagnement professionnel des professeurs et une transformation institutionnelle seraient nécessaires afin d’atteindre les ambitions de l’éducation environnementale inscrites dans la loi.
La problématique de l’éducation environnementale bénéficie d’un intérêt croissant de la part de l’exécutif. Celle-ci figurait parmi les cinq chantiers prioritaires lors de la conférence environnementale de 2013 et, la même année, le Premier ministre a saisi le Conseil économique social et environnemental (CESE) pour qu’il rende un avis sur le sujet (Dubourg et Dulin, 2013). Le CESE a recommandé la systématisation des projets et démarches d’éducation à l’environnement et au développement durable dans les établissements d’enseignement, la systématisation des classes découvertes en nature au primaire et secondaire, ainsi que la conduite d’études sur les modalités d’évaluation des connaissances des élèves sur les enjeux du développement durable.
Au-delà de la problématique scolaire, l’éducation au développement durable devrait concerner tous les citoyens tout au long de leur vie, en tant que professionnels, consommateurs et individus. Pour faciliter cet apprentissage continu, le CESE propose l’intégration de l’environnement dans la formation continue, mais également l’amélioration de la qualité de l’information sur les impacts sociaux et environnementaux des produits et la mise à disposition d’un répertoire d’initiatives combinant éducation environnementale et participation citoyenne (par exemple, en associant patrimoine naturel et culturel lors des journées européennes du patrimoine). De plus, un volet « éducation à l’environnement et au développement durable » devrait être inséré dans tous les plans et schémas de politiques publiques et le CNTE pourrait créer une commission dédiée sur ce sujet. Bien qu’il reste à voir si et de quelle manière ces recommandations seront mises en œuvre, il semble que les campagnes d’information sur le changement climatique en amont de la COP21 à Paris ont porté leurs fruits : une étude du Pew Research Center montre en effet que 56 % des Français pensent que le changement climatique est un problème très sérieux, le troisième taux le plus élevé parmi les 14 pays membres de l’OCDE étudiés (Stokes et al., 2015).
4.4. Accès à la justice
En France, les citoyens ont accès à la justice environnementale soit en tant qu’individu, soit par le biais d’une association environnementale. Cependant, les voies de recours mises en place afin de garantir que toute personne puisse saisir un tribunal dans les dispositions prévues par la Convention d’Aarhus ne fonctionnent pas toujours efficacement. La complexité administrative et le manque d’organisation interministérielle pèsent sur le traitement des saisines, et l’accès au système juridique est parfois trop onéreux pour ceux ne bénéficiant pas d’aides.
Pour les citoyens se heurtant à un refus de communication de documents administratifs, y compris ceux relatifs à l’environnement, le premier interlocuteur est la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), une autorité administrative indépendante. La CADA rend alors un avis aux deux parties, suivi dans 77.8 % des cas. En 2012, la CADA a enregistré 4 569 demandes d’avis, dont 6.5 % concernaient l’environnement (contre 6 % en 2009) et 16.8 % l’urbanisme (contre 15.4 % en 2009) (CEE‐ONU, 2014).
Les personnes s’estimant lésées dans leurs droits par une administration publique peuvent saisir le Défenseur des droits, qui a succédé au Médiateur de la République en 2011. Si la réclamation est justifiée, le Défenseur des droits émet des recommandations à l’organisme mis en cause pour résoudre le conflit, sans toutefois pouvoir contraindre l’administration. Malgré le peu de dossiers recensés, le traitement des saisines du Défenseur des droits par le Medde a été jugé insuffisant (Soulié et Piney, 2014). Le ministère manque en effet de réactivité face aux demandes du Défenseur des droits en raison de l’absence d’organisation ministérielle pour le traitement des dossiers. Pour corriger ces lacunes et améliorer la diffusion de l’information, le Cgedd préconise de créer un point unique d’échange d’informations entre le Défenseur des droits et les services du MEEM. La tenue de réunions semestrielles devrait en outre contribuer à un meilleur suivi des dossiers.
Le code de l’environnement précise depuis 2000 les possibilités d’action en justice des associations de protection de l’environnement. Elles peuvent agir contre toute décision administrative affectant l’environnement et exercer les droits reconnus à la partie civile dans certains cas. Suivant une décision de la Cour de cassation en 2006, elles peuvent agir au nom d’intérêts collectifs s’ils entrent dans leur objet social (Cour de cassation, 2006). Les particuliers peuvent également mandater directement des associations. Un arrêt du Tribunal de l’UE de 2012 a créé un précédent permettant aux ONG de davantage solliciter le réexamen des décisions de la Commission en matière d’environnement (Gossement, 2012). Les pouvoirs publics contribuent en général pour moitié au financement des associations environnementales (Assemblée nationale, 2011), favorisant ainsi indirectement l’accès des citoyens à la justice environnementale.
La France s’est dotée dès 1991 d’un système d’assistance pour réduire les obstacles financiers entravant l’accès à la justice : l’« aide juridictionnelle » pour l’accès aux tribunaux et l’« aide à l’accès au droit » pour les consultations juridiques. Mais l’accès à la justice demeure malgré tout très onéreux pour ceux n’ayant pas accès aux aides, notamment s’il y a pourvoi en cassation (CEE-ONU, 2014).
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Simplifier les documents de planification relatifs à l’environnement et adopter une approche plus globale et intégrée des différents enjeux.
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Renforcer et simplifier l’évaluation environnementale en :
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adoptant un plus grand nombre d’indicateurs fondés sur les impacts dans l’évaluation des politiques publiques ;
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promouvant l’étude d’impact unique par projet ;
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poursuivant la clarification de l’articulation entre les études d’impact des projets et l’évaluation environnementale des plans et programmes.
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Poursuivre la réforme du régime d’autorisation environnementale en élargissant l’éventail des secteurs d’activité éligibles au régime d’enregistrement, et rationaliser encore les règles de procédure et de fond applicables.
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Améliorer le ciblage des inspections sur la base des dossiers de conformité des installations réglementées ; introduire des indicateurs de performance pour mesurer la non-conformité, tant pour les installations considérées individuellement que pour l’ensemble de la communauté réglementée ; renforcer les mesures d’exécution administratives en introduisant des amendes administratives proportionnelles aux avantages économiques tirés du non-respect des prescriptions ; envisager de rendre les infractions mineures passibles de mesures administratives.
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Renforcer le cadre juridique de la responsabilité environnementale en définissant des procédures et des normes de réparation environnementale par les parties responsables.
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Simplifier la participation du public à l’élaboration des plans, programmes et projets en facilitant son implication plus en amont, en créant une procédure de participation par projet et en modernisant les moyens de participation (via internet par exemple) ; conforter l’information du public et la communication sur les coûts environnementaux (externalités et dépenses de protection de l’environnement).
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Renforcer la formation des enseignants sur les questions de développement durable.
Références
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Notes
← 1. Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement ; loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.
← 2. Cinq directions générales : i) de l’Énergie et du Climat ; ii) des Infrastructures, des Transports et de la Mer ; iii) de l’Aménagement, du Logement et de la Nature ; iv) de la Prévention des risques ; v) de l’Aviation civile ; et une direction des Pêches maritimes et de l’Aquaculture.
← 3. Sont également sous tutelle du MEEM : Météo France, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (Oncfs) (chapitre 5), les parcs nationaux, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris), le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (Celrl) et l’Agence des aires marines protégées (AAMP).
← 4. Et quatre offices de l’eau à La Réunion, en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane.
← 5. Sauf pour la région Île-de-France qui doit se doter d’un plan régional.
← 6. Laville Bettina parle « d’État durable dans l’État », le pouvoird’arbitrage étant concentré dans les mains d’un seul cabinet.
← 7. La loi constitutionnelle de juillet 2008 permet au Parlement de saisir la Cour pour l’évaluation des politiques publiques. La loi du 3 févier 2011 étend ce droit aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.
← 8. La politique de l’eau, la police de l’environnement, la politique de développement agricole et la politique maritime.
← 9. La gestion des déchets par les collectivités locales.
← 10. En France, le terme « installation » n’a pas la même définition qu’au Royaume-Uni par exemple. Il désigne une unité technique d’un établissement, même s’il arrive que plusieurs unités techniques reçoivent une seule autorisation les couvrant toutes (ce qui correspond à la définition d’une « installation » au Royaume-Uni).
← 11. Il existe une clause exonérant l’exploitant de la responsabilité stricte (sans faute) si l’activité n’a pas été modifiée depuis que le demandeur s’est établi à proximité de l’installation.
← 12. Une ordonnance est une mesure prise par le gouvernement entrant en vigueur dès sa publication. Un projet de loi doit en parallèle êtredéposé devant le Parlement. L’ordonnance acquiert valeur de loi si le projet de loi est approuvé, sinon elle conserve simplement une valeur réglementaire.