Résumé

Économie prospère et pôle financier, le Luxembourg se caractérise par une forte interdépendance internationale, un marché de l’emploi attractif et un nombre d’habitants et de travailleurs frontaliers en hausse. Jusqu’à la crise sanitaire due au COVID-19, sa croissance économique était été bien supérieure à celle de la zone OCDE. Dans ce contexte, le pays a mené une politique de l’environnement transversale et ambitieuse dont certains objectifs vont au-delà des engagements internationaux et européens. La baisse depuis 2005 de la consommation d’énergie, des émissions de gaz à effet de serre (GES) et des principaux polluants atmosphériques témoigne d’un découplage avec la croissance économique. Cela va de pair avec une amélioration générale de la qualité de l’air. Le Luxembourg a aussi rattrapé son retard en matière d’épuration des eaux usées, et multiplié par trois la part des renouvelables dans sa production d’électricité.

Le modèle économique luxembourgeois commence toutefois à montrer ses limites. Les progrès ne suffisent pas pour atténuer les pressions toujours grandissantes et restaurer un environnement naturel propice à la conservation de la biodiversité. L’intensité carbone de l’économie reste parmi les plus élevées des pays de l’OCDE et l’approvisionnement en énergie reste tributaire des combustibles fossiles. La consommation d’énergie et les émissions de GES sont repartis à la hausse montrant que les mesures doivent être renforcées pour pouvoir réduire de 55 % les émissions de GES hors marché carbone européen d’ici 2030 (par rapport à 2005), et atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050. Des efforts supplémentaires sont aussi nécessaires pour éliminer les points noirs restants de pollution locale, faire baisser davantage l’exposition aux particules fines qui reste proche des valeurs limites, et respecter les plafonds d’émissions à l’horizon 2030 pour les oxydes d’azote, les composés organiques volatils et l’ammoniac.

Le Luxembourg encourage la valorisation des déchets et l’utilisation de matières premières secondaires. Le système Superdreckskëscht, qui lui a permis d’être un leader dans la gestion des déchets problématiques, continue à se développer. On note cependant un ralentissement des progrès qui pourraient compromettre l’atteinte des objectifs de recyclage pour 2030, et la mise en œuvre de la stratégie « Luxembourg Zéro Déchets » pour une économie circulaire. Une extension de la responsabilité élargie des producteurs et l’utilisation des synergies avec le développement des écotechnologies sont notamment nécessaires.

Le Luxembourg fait montre d’une bonne gestion quantitative des ressources en eau, mais il lui faudra suivre avec attention l’évolution de la demande en eau dans les années à venir. Les efforts pour restaurer la qualité écologique et l’hydro-morphologique des cours d’eau doivent être poursuivis, et les risques de pollution d’origine agricole mieux encadrés.

La conservation de la nature se fonde sur un cadre institutionnel, législatif et financier approprié. Mais la biodiversité est en déclin depuis plus de quarante ans. L’artificialisation des sols et la dégradation des paysages provoquées par l’intensification des pratiques agricoles, le développement des infrastructures et l’étalement urbain en sont les causes principales. Le Luxembourg est aujourd’hui le pays le plus fortement fragmenté d’Europe. L’adoption tardive du deuxième Plan national pour la protection de la nature (PNPN) et le retard dans la mise en œuvre d’actions concrètes, dont la finalisation du réseau Natura 2000 et le réseau de corridors écologiques, ont ralenti les progrès. Pour rattraper ce retard, le Luxembourg doit rapidement préparer le prochain PNPN et lui adjoindre des objectifs précis, des indicateurs de suivi et des ressources accrues. Il devra aussi terminer la mise en œuvre des plans de gestion pour les sites Natura 2000 et les espèces menacées.

Intégrer la biodiversité dans les politiques et décisions concernant le développement du pays (transports, aménagement du territoire, agriculture, etc.) sera essentiel. Il faudra aussi soutenir la transition vers l’agriculture biologique et mettre en place un programme d’appréciation de la valeur socio-économique et culturelle des services écosystémiques. Cela devra aller de pair avec un réexamen des coûts et bénéfices de l’ensemble des instruments économiques utilisés dans la gestion de la biodiversité ou impactant la biodiversité, y compris les contrats de biodiversité et les subventions agricoles et forestières. Le Luxembourg a récemment rénové son système de compensation écologique en introduisant des éco-points qui donnent une valeur monétaire à la valeur écologique des biotopes et en créant des réserves foncières servant de « pools » pour les mesures compensatoires.

Le Luxembourg dispose d'un cadre juridique et institutionnel solide pour mener et coordonner ses politiques de l’environnement et du développement durable. Mais, comme dans d’autres pays, assurer la cohérence des politiques en vue d’une croissance verte et d’un développement durable reste un défi, en particulier dans la politique fiscale et dans les secteurs des transports, du logement et de l'agriculture. Une mesure qui pourrait aider est le "contrôle de durabilité" des projets de loi et de règlements prévu par le troisième Plan national de développement durable. La collaboration en matière de contrôle de conformité entre les administrations responsables de l'environnement, de l'eau et de la protection de la nature pourrait également être renforcée, avec des ressources accrues et une planification proactive des inspections en fonction des risques plutôt qu’en réaction aux plaintes et aux incidents.

Le Luxembourg a jusqu’ici peu utilisé son système fiscal pour atteindre des objectifs environnementaux. Les taxes sur les carburants routiers sont la source principale des recettes fiscales liées à l'environnement. En raison des taux d'imposition plus faibles que dans les pays voisins, environ 70 % des carburants sont vendus pour des véhicules non immatriculés au Luxembourg (poids lourds en transit, navetteurs transfrontaliers et, dans une moindre mesure, tourisme à la pompe). Les avantages fiscaux pour la consommation de carburants (dans l'agriculture, la production d'électricité et le chauffage) et le faible coût général de l’énergie n’incitent guère à investir dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Le signal-prix du carbone est parmi les plus faibles des pays européens de l’OCDE.

Ces dernières années, le pays a essayé de redresser la barre. L’instauration d'une tarification spécifique du carbone annoncée pour 2021 est bienvenue. Elle s’appliquera sur tous les produits pétroliers et le gaz naturel, avec un prix de départ de 20 EUR la tonne de CO2. Le relèvement progressif, à partir de 2019, des taux de taxation des carburants, notamment du diesel, marque aussi un pas dans la bonne direction, mais risque d’être insuffisant pour freiner la vente des carburants aux non-résidents. Il faudrait que les taxes sur les carburants routiers augmentent davantage pour les rapprocher de ceux des pays voisins et que le taux d’accise sur le diesel rejoigne celui de l'essence. Cela apporterait des bénéfices en termes d’émissions de GES, de pollution atmosphérique et d’encombrement routier. Les pertes de recettes entraînées par une moindre consommation de carburants pourraient être compensées par un recours accru à la taxation environnementale dans le cadre d’une réforme fiscale plus large. Le Luxembourg devrait aussi mettre en place un dépistage et un examen systématiques des subventions potentiellement dommageables à l'environnement.

Depuis 2010, le Luxembourg est un leader européen de l’éco-innovation grâce au financement public accru pour la recherche et le développement, aux nombreuses subventions pour les investissements liés à l'environnement et aux initiatives phares comme « PRIMe House », « Clever akafen » (acheter malin) et le Pacte Climat avec les communes. Il n'est toutefois pas clair si toutes les aides financières permettent d’obtenir les avantages environnementaux souhaités ; leur efficacité pourrait être renforcée. Le marché intérieur pour les biens et services « verts » pourrait aussi être développé davantage, notamment en agissant sur la demande avec une politique plus claire en faveur des marchés public verts et des signaux-prix plus forts en faveur des modes de consommation durables.

La Bourse Verte du Luxembourg, créée en 2016, cote la moitié du marché mondial d'obligations vertes, durables et sociales. Le gouvernement s'est engagé à élaborer une stratégie nationale de finance verte et est actif à l’international en la matière. Il pourrait aller plus loin : renforcer le cadre juridique pour prendre en compte les risques et les impacts environnementaux dans les décisions d'investissement, élargir son champs d’action au-delà de la finance climatique (p.ex. biodiversité, économie circulaire), et mieux exploiter les synergies avec les technologies financières (FinTech) et les investissements directs étrangers. Afin de garantir la crédibilité des produits financiers verts et éviter l'« écoblanchiment », il devrait aussi élaborer des indicateurs pour suivre l’impact sur l'environnement des investissements financés par ces produits. La loi-cadre sur le climat offre l'occasion d’ancrer dans la législation l'engagement pris dans le cadre de l'Accord de Paris d’aligner les flux de capitaux avec les objectifs climatiques.

Carrefour pour le trafic de marchandises et pôle d’attractivité pour l’emploi dans la Grande Région, le Luxembourg attire quotidiennement plus de 200 000 navetteurs transfrontaliers et un trafic routier de transit dense. Cela s’accompagne de problèmes de saturation des routes et de pollution de l’air. La grande majorité des déplacements personnels se font en voiture. Plus de la moitié des émissions de GES proviennent des transports.

Pour répondre aux besoins en mobilité tout en améliorant la qualité de l’air, la stratégie pour une mobilité durable mise à jour en 2018 (Modu 2.0) fixe des objectifs bienvenus. Il s’agit de rééquilibrer la répartition modale et d’encourager les modes de déplacement actifs (marche à pied, vélo). Le pays a investi massivement dans les transports en commun, les infrastructures ferroviaires, les bus à faibles émissions, les parkings relais, les plateformes multimodales et les pistes cyclables. En mars 2020, les transports publics sont devenus gratuits afin d’induire un report modal. Cela devra s’accompagner d’une meilleure qualité du service et de la gestion du stationnement, principaux facteurs dans le choix entre voiture privée et transports collectifs. Dans la perspective d’un parc de voitures particulières composé pour près de la moitié de véhicules électriques d’ici 2030, l’achat de tels véhicules est encouragé financièrement et un réseau de bornes de recharge est en déploiement.

Réaliser les objectifs de mobilité durable exige un engagement fort de tous les acteurs (État, communes, employeurs, citoyens) et une coopération efficace avec les pays voisins et au sein de l’Union Européenne. Il faudra aussi exploiter les synergies entre les mesures concernant les transports, le logement, l’aménagement du territoire, la qualité de l’air, le climat et l’efficacité énergétique. Cela devrait aller de pair avec une refonte du bouquet d’instruments économiques qui s’applique aux transports (taxes sur les carburants, subventions et taxes sur les véhicules, taxes sur les voitures de société, indemnités de déplacement domicile-travail, redevances routières) afin de l’aligner avec l'objectif d’une mobilité durable. Enfin, il faudra suivre de près la mise en œuvre du paquet de mesures, y compris la gratuité des transports publics, pour en évaluer les effets réels sur la répartition modale et la qualité de l’air.

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