20. Mexique

Au Mexique, durant la période 2020-22, l’estimation du soutien aux producteurs (ESP) a représenté 11.3 % des recettes agricoles brutes, soit environ un tiers du niveau enregistré pour 1991-93 (31 %) et moins que la moyenne OCDE. Bien que relativement faible, l’ESP est principalement composés de formes de soutien susceptibles de créer le plus de distorsions. Le soutien des prix du marché (SPM) et les paiements fondés sur les subventions à la production et aux intrants ont diminué au cours des 20 dernières années, passant de 77.9 % en 2000-02 à 68.9 % en 2020-22. Alors que, dans les années 1990, la libéralisation des échanges et les réformes de la politique intérieure ont réduit ces formes de soutien, le SPM a de nouveau augmenté après 2016. Le ratio du prix à la production au prix à la frontière (coefficient nominal de protection) est de 1.07, ce qui signifie que les prix intérieurs sont en moyenne supérieurs de 7 % aux cours mondiaux. Les transferts réalisés au titre d’un seul produit sont les plus élevés pour le sucre, le lait, la volaille et le riz.

Les transferts budgétaires effectués vers les producteurs en 2020-22 l’ont surtout au titre de l’utilisation d’intrants, en particulier l’électricité (pompage des eaux souterraines à des fins d’irrigation) et les engrais. Les paiements directs fondés sur la superficie de terres sont une autre forme importante de soutien utilisée dans deux grands instruments d’action : le programme de production pour le bien-être (paiements directs fondés sur la superficie de terres) et le programme pour l’amélioration de la durée de vie des semis (paiements directs fondés sur la superficie dédiée au boisement et à l’agroforesterie). Les paiements au titre de l’utilisation d’intrants et de la superficie de terres représentent 80 % du total des transferts budgétaires aux producteurs.

En 2020-22, les dépenses au titre des services d’intérêt général (estimation du soutien aux services d’intérêt général, ESSG) ont représenté environ 1 % de la valeur de la production agricole et 8 % de l’estimation du soutien total (EST), soit moins que la moyenne OCDE dans les deux cas. La plupart de ces dépenses concernent l’innovation, la vulgarisation et la formation agricoles (55 %, en particulier les instituts techniques et les écoles professionnelles), ainsi que l’aménagement et la maintenance des infrastructures (37 %), en particulier des grands ouvrages hydrologiques. Le soutien total à l’agriculture nationale a représenté 0.6 % du produit intérieur brut en 2020-22, soit bien moins que les 1.3 % enregistrés en 1991-93.

En 2022-23, la politique agricole s’est concentrée sur la consolidation de la mise en œuvre et de la portée des principaux programmes de soutien à l’agriculture, dans le cadre d’un processus pluriannuel. L’accent est mis sur le soutien aux petits producteurs de céréales de base telles que le maïs, les haricots, le blé, le lait, et le riz, ainsi que sur le soutien aux femmes des zones rurales, aux populations autochtones et aux groupes vulnérables.

Le changement le plus important concerne la couverture géographique du programme d’engrais, qui n’était mené que dans les cinq États les plus pauvres du pays. Sa mise en œuvre a été étendue à l’échelle nationale à partir de 2023, tout en continuant à cibler les communautés les plus pauvres de chaque État. Le budget consacré à ce programme est passé de 1.9 milliards MXN (88.4 millions USD) en 2020 à 16.7 milliards MXN (938.2 millions USD) en 2023. Environ 55 % des bénéficiaires du programme sont issus de communautés abritant des populations indigènes, et 41 % d’entre eux sont des femmes.

Le programme de prix minimums garantis mené par l’organisme SEGALMEX (Seguridad Alimentaria Mexicana) a été actualisé pour soutenir plus de 117 000 petits et moyens agriculteurs. Il a permis d’acheter 9 millions de tonnes de maïs et de blé et 618 millions de litres de lait en 2022. En outre, la quantité maximale pouvant bénéficier des prix garantis est passée de 20 tonnes à 35 tonnes de maïs par agriculteur, et de 25 litres à 30 litres de lait par vache. La quantité maximale de riz a été ramenée de 120 tonnes à 80 tonnes par agriculteur. Pour les exploitations de taille moyenne dont la production n’est pas rachetée par SEGALMEX, un mécanisme de couverture des prix a été introduit en 2021-22 : la différence entre le prix garanti et le prix de référence est couverte par une assurance et le gouvernement prend en charge une partie de la prime d’assurance. Enfin, l’organisme national de financement du développement agricole, rural, forestier et halieutique fait l’objet d’un processus de démantèlement, ce qui a entraîné une suspension de l’octroi de crédits en 2023.

  • Les directives nationales de 2022 pour l’adaptation de l’agriculture définissent des mesures largement conformes aux bonnes pratiques en matière d’adaptation. Toutefois, des mesures plus détaillées et plus concrètes, qui seraient intégrées dans les instruments de la politique agricole du pays, peuvent être élaborées pour renforcer la résilience du secteur face au changement climatique et l’aider à mieux s’adapter à ses effets. En outre, l’utilisation d’informations plus nombreuses et de meilleure qualité sur l’adaptation au changement climatique (mesures d’adaptation, etc.) et d’indicateurs agroenvironnementaux est essentielle pour évaluer l’impact de l’action publique. Enfin, le Mexique devrait envisager de réformer ses subventions à la consommation d'électricité, qui continuent d’encourager la surconsommation d’eau, et plus généralement d’améliorer la gestion de l’eau, ce qui sera déterminant pour l’avenir de l’agriculture dans un contexte marqué par les effets du changement climatique.

  • Au titre des objectifs fixés pour l’ensemble de l’économie, à savoir réduire, d’ici à 2030, les émissions de gaz à effet de serre de 22 % et les émissions de carbone noir de 51 % par rapport aux niveaux de référence dans l’hypothèse de politiques inchangées, un objectif de réduction de 8 % est spécifiquement prévu pour l’agriculture. Des mesures supplémentaires sont nécessaires pour atteindre cette cible, car le soutien et les financements visant à développer le recours aux biodigesteurs dans les exploitations d’élevage, ainsi qu’à conserver et à restaurer les prairies sont insuffisants pour obtenir les résultats attendus.

  • Le Mexique devrait renforcer les activités de formation, de transfert et d’adoption de technologies, et de renforcement des capacités en matière d’agriculture durable, et promouvoir les techniques connexes. Cela est d’autant plus important que les vastes ressources en agrobiodiversité du Mexique doivent être mieux protégées. Il faut en faire davantage pour encourager la production durable. Les pratiques climato-intelligentes, le semis direct, la diversification des cultures et la récupération des sols, entre autres, sont pertinents dans ce contexte. Les connaissances traditionnelles devraient être reconnues comme une ressource précieuse. En outre, la transition vers des programmes qui favorisent l’agrobiodiversité en utilisant les ressources phytogénétiques locales (un des principaux services écosystémiques fournis par les petites exploitations agricoles des régions pauvres) pourrait être plus rentable pour aider les agriculteurs défavorisés et accroître la résilience des systèmes agricoles ainsi que la diversité génétique des plantes.

  • Les efforts déployés par le Mexique pour réorienter ses systèmes de paiement vers les populations vulnérables constituent une évolution remarquable, en particulier la nature adaptée et ciblée des instruments d’action, nouveaux ou non, et suivent les recommandations antérieures de l’OCDE. Il s’agit notamment de rémunérations de la production pour le bien-être fondées sur la superficie, qui ciblent les petits et moyens producteurs et ceux issus des communautés autochtones marginalisées dans les États les plus pauvres, du programme d’engrais élargi et mieux ciblé, ainsi que du programme « Semer la vie » qui soutient les projets d’agroforesterie des petits exploitants dans les communes pauvres.

  • Malgré tous ces efforts, des améliorations sont nécessaires pour garantir que les programmes atteignent leurs objectifs en matière de durabilité. Le programme d’engrais devrait cibler uniquement les imperfections du marché qui empêchent les agriculteurs pauvres d'accéder aux engrais, aux intrants ou au crédit, et pourrait s’accompagner d’une formation aux bonnes pratiques agricoles. Pour une mise en œuvre plus efficace, le programme d’engrais devrait systématiquement tenir compte des caractéristiques du sol et de leurs besoins en éléments nutritifs au moment de la distribution des engrais. Le programme « Semer la vie » doit s’assurer qu’il n’incite pas les agriculteurs à déboiser leurs parcelles pour pouvoir intégrer le dispositif. Une solution consiste à offrir une rémunération complémentaire au titre des services environnementaux de façon à inciter à préserver les forêts. Ces programmes seraient plus en efficience si, parallèlement, un système de zonage était mis au point, qui permettrait de décider de l’affectation des terres en fonction de critères agroclimatiques et de la fertilité des sols. En outre, des paiements subordonnés à la mise en œuvre de pratiques agricoles durables pourraient réduire l’impact du secteur sur l’environnement. Il pourrait également s’avérer utile d’appuyer les associations de producteurs (les coopératives, par exemple) et l’accès des petits exploitants pauvres aux marchés d’intrants et de produits pour surmonter les obstacles liés à l’échelle.

  • Si le soutien du Mexique à l’agriculture est relativement faible, la plupart des aides sont susceptibles d’entraîner les distorsions les plus fortes, comme le SPM à l’égard de produits comme le sucre, le lait et la volaille. Le SPM est en hausse depuis 2016, après avoir légèrement reculé du fait des réformes pendant les années 1990 et 2000. Compte tenu de la transition susmentionnée vers des politiques ciblées, les objectifs des politiques de SPM restantes peuvent être réévalués. Le Mexique devrait envisager de supprimer progressivement la réglementation des prix de la canne à sucre et poursuivre ses efforts destinés à réorienter les paiements vers des programmes ciblant les petits exploitants pauvres et les pratiques durables sur le plan environnemental.

  • Les ressources publiques allouées aux services d’intérêt général et aux biens publics sont limitées alors qu’elles peuvent améliorer les performances du secteur et créer un environnement favorable. En particulier, le secteur bénéficierait d’investissements plus importants dans les services de vulgarisation et d’assistance technique, les systèmes d’information sur les prix et les conditions météorologiques, l’amélioration des connaissances agricoles, les systèmes d’innovation et la recherche-développement agricole.

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