Résumé

La reprise consécutive à la pandémie a été rapide. La vigueur des exportations et un programme volontariste d’aides publiques ont permis au PIB de retrouver son niveau d’avant la pandémie au début de 2021. La guerre en Ukraine a commencé à se répercuter sur l’économie.

L’inflation atteint un niveau record. La Lituanie enregistre un taux d’inflation parmi les plus élevés de la zone euro, qui a dépassé 22 % en septembre, sous l’effet de la hausse des prix de l’énergie et, dans une moindre mesure, des produits alimentaires ainsi que des logements (graphique 1). L’effet sensible du renchérissement de l’énergie tient à la forte intensité énergétique de l’économie et à la part excessive du pétrole et du gaz dans le mix énergétique. Si les salaires nominaux continuent d’augmenter rapidement, les salaires réels sont orientés à la baisse depuis la fin de 2021.

La situation dans les domaines de l’énergie et des échanges met au jour les vulnérabilités de la Lituanie. La part de la Russie dans les importations lituaniennes de pétrole et de gaz s’établissait respectivement à 73 % et 42 % en 2020. La Lituanie a cessé d’importer de l’énergie de Russie en avril-mai 2022, mais ce pays demeure un de ses principaux partenaires commerciaux, et il pourrait être affecté par la guerre et les sanctions. Au début d’avril, le gouvernement a présenté un train de mesures budgétaires destiné à soutenir les revenus des ménages et à renforcer l’indépendance énergétique.

Une forte incertitude entoure les prévisions économiques. La croissance du PIB devrait refluer à 1.7 % en 2022, sous l’effet du recul des exportations et de l'augmentation des incertitudes, puis à 1.6 % en 2023 (tableau 1). L’investissement devrait gagner en vigueur, étayé par des apports de fonds de l’Union européenne (UE). La poursuite de la guerre en Ukraine et une contraction brutale des approvisionnements énergétiques pourraient porter un nouveau coup à l’économie.

Les politiques financière et budgétaire ont permis de soutenir l’activité économique tout au long de la pandémie et aident maintenant les ménages et les entreprises à faire face à la hausse des prix de l’énergie. La marge de manœuvre budgétaire doit être reconstituée progressivement, en tenant compte des aides ciblées requises pour amortir l’impact de la guerre et de la nécessité de se préparer à la hausse des coûts liés au vieillissement de la population.

Le système financier semble rentable, bien capitalisé et doté de liquidités suffisantes. Les amples mesure de soutien à la liquidité ont aidé les ménages et les entreprises tout au long de la pandémie. Le crédit aux ménages a continué d’augmenter de manière quasiment ininterrompue, et les bilans des entreprises semblent sains. La banque centrale a commencé à durcir quelque peu la politique macroprudentielle face aux signes de surchauffe observés sur le marché du logement.

Un projet de loi de finances révisé prévoit des dépenses à hauteur de 1.4 % du PIB en 2022 pour aider les entreprises et les ménages à surmonter la crise énergétique, et de 0.6 % du PIB pour prêter assistance aux réfugiés ukrainiens. L’orientation de la politique budgétaire a été fortement expansionniste en 2020, restrictive en 2021, et devrait redevenir très expansionniste en 2022. Le gouvernement prévoit de revenir à l’objectif budgétaire à moyen terme d’ici à 2024. Les aides liées à la pandémie, en particulier le dispositif bien financé de chômage partiel, ont été déployées puis démantelées en temps opportun.

Les coûts liés au vieillissement démographique augmentent. La population lituanienne vieillit rapidement (graphique 2). L’émigration des jeunes et la faiblesse de l’immigration contribuent à accentuer les tensions liées au vieillissement. Malgré le facteur de viabilité intégré dans le système de retraite, le gouvernement prévoit une augmentation des coûts liés au vieillissement supérieure à 2 points de PIB d’ici à 2060. Après 2026, créer un lien automatique entre l’âge de la retraite et l’espérance de vie contribuerait à préserver la viabilité du système de retraite et l’adéquation des pensions.

L’investissement public augmente. Les fonds de l’UE contribuent à susciter l’adhésion à des réformes politiquement difficiles, en particulier dans les domaines de l’éducation et de la santé, où les efforts de réforme sont restés timides jusqu’ici. Rationaliser les vastes réseaux d’établissements scolaires et d’hôpitaux en procédant à des regroupements pourrait contribuer à la réalisation de gains de productivité et à la réduction des tensions sur les dépenses dans le secteur public.

La Lituanie est fortement centralisée. L’autonomie fiscale et budgétaire des collectivités locales est faible, les communes étant dépendantes de transferts budgétaires, ce qui fait obstacle à l’investissement local. Les autorités envisagent d’élargir l'assiette des impôts fonciers et d'en affecter la totalité des recettes aux communes, et elles ont engagé des procédures pour accroître la capacité des collectivités locales à emprunter pour procéder à des investissements. Augmenter leurs recettes propres pourrait stimuler l’investissement des collectivités locales, mais leurs capacités administratives doivent encore être améliorées, de même que la coordination au niveau régional.

Les dispositifs d’incitation fiscale en faveur de l’innovation sont nombreux, mais ils sont peu utilisés. Ils semblent passer à côté des facteurs de déclenchement qui caractérisent une économie lituanienne en phase de rattrapage, reposant sur de nombreuses jeunes pousses (start-ups) de petite taille confrontées à des contraintes de crédit. Les aides directes et non fiscales aux entreprises sont négligeables. Une combinaison plus équilibrée d’incitations fiscales et d’aides directes serait plus efficace pour soutenir l’innovation.

Une réforme des entreprises publiques et une modernisation du système d’enseignement à tous les niveaux tireront vers le haut la productivité et l’emploi. Renforcer les aides à la recherche-développement (R-D) et moderniser le secteur public permettront de récolter les fruits de la transformation numérique.

Les entreprises publiques sont présentes dans de nombreux secteurs, et la qualité de leur gouvernance pourrait être encore améliorée. Il manque en particulier aux entreprises municipales un cadre de réglementation et de gouvernance transparent, ce qui peut fausser la concurrence avec les prestataires privés. Le gouvernement continue d’adapter sa stratégie actionnariale en transformant plusieurs entités publiques en sociétés par actions (détenues par l’État). Il est essentiel de veiller à ce que toutes les entités publiques aient les mêmes possibilités et contraintes juridiques, financières et réglementaires que les entreprises privées, afin d’instaurer des conditions de concurrence équitables et, in fine, de rehausser la productivité.

La qualité de l’enseignement obligatoire laisse à désirer. Les résultats obtenus par les jeunes Lituaniens dans le cadre du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) sont inférieurs à la moyenne de l’OCDE (graphique 3). Cela tient au nombre excessif d’établissements scolaires, à l’insuffisance des compétences des enseignants et à l’inadéquation des programmes scolaires. En 2021, le gouvernement a entamé une réforme de l’enseignement primaire et du premier cycle de l’enseignement secondaire, en élaborant un nouveau cadre de compétences des enseignants, en revalorisant les salaires des chefs d’établissement, en adaptant les programmes scolaires et en revoyant à la hausse la taille minimale des établissement et des classes.

Le système d’enseignement et de formation professionnels (EFP) devrait jouer un plus grand rôle. La formation en entreprise (apprentissage) est très limitée. Le gouvernement a commencé à rendre la filière professionnelle plus attrayante, en renforçant les prérogatives des conseils d’établissement et en assouplissant les programmes d’enseignement. Étoffer encore l’apprentissage en milieu professionnel, notamment en adaptant mieux les programmes aux besoins des entreprises, pourrait aussi contribuer à améliorer l’adéquation entre l’EFP et le marché du travail.

L’enseignement supérieur accuse un certain retard. La Lituanie est à la traîne de pays comparables en matière d’excellence universitaire, et le décalage entre les programmes pédagogiques et les besoins du marché du travail est considérable. Les étudiants issus d’un milieu socioéconomique défavorisé ont davantage de difficultés à entrer à l’université, en partie du fait des modalités d’admission particulièrement sélectives appliquées aux jeunes dont les études sont financées par l’État. Des réformes consistant, par exemple, à lier les financements publics des établissements au devenir professionnel de leurs étudiants ou à des critères de mobilité internationale des étudiants pourraient inciter les universités à améliorer la qualité de leurs services.

La Lituanie a progressé en matière de technologies numériques, mais elle reste à la traîne en ce qui concerne leur adoption et leur utilisation. Une amélioration de l’efficacité des aides à la R-D des entreprises et de la collaboration entre le monde de la recherche et les entreprises pourrait stimuler l’investissement privé dans l’innovation. Renforcer l’infrastructure numérique, remédier à la « fracture numérique » entre les zones urbaines et rurales, et améliorer l’accès des jeunes entreprises aux financements pourraient contribuer à améliorer l’adoption des technologies numériques et l’efficacité avec laquelle elles sont utilisées, notamment par les petites entreprises.

Un secteur public modernisé et des compétences solides constituent des vecteurs importants de transformation numérique. Il est possible d’aller nettement plus loin en termes de transformation numérique du secteur public, notamment en étoffant les processus d’administration en ligne, en intégrant les ressources informationnelles et en renforçant les infrastructures informatiques. Une amélioration des services numériques et de leur accessibilité aux groupes vulnérables renforcerait l’inclusivité. De manière plus générale, des pénuries subsistent en matière de compétences liées aux technologies de l’information et de la communication (TIC). Des fonds supplémentaires pourraient être accordés aux établissements d’enseignement supérieur au titre des diplômes décernés dans des disciplines importantes pour le processus de transformation numérique. L’acquisition de compétences numériques solides et utiles est cruciale pour que les fruits de la transformation numérique puissent être équitablement partagés.

Réduire la pauvreté et les disparités entre régions, renforcer la confiance, améliorer la qualité des institutions et limiter les émissions de carbone contribueront à rendre l’économie lituanienne plus inclusive et durable.

Bien qu’elle diminue, la pauvreté reste problématique. La Lituanie se classe toujours au deuxième rang des pays européens de l’OCDE à l’aune de la proportion de la population exposée au risque de pauvreté. Le système de prélèvements et de transferts ne contribue guère à réduire les inégalités et la pauvreté. Néanmoins, au cours des deux dernières années, dans le contexte de la pandémie, le gouvernement a considérablement accru les dépenses sociales, notamment au titre des pensions et des prestations sociales ciblées, et il a relevé le seuil de non-imposition des revenus pour les personnes faiblement rémunérées.

Les différences observées entre régions en matière de revenu, de productivité et d’emploi sont supérieures à la moyenne de l’OCDE. Les migrations internes vers les grandes agglomérations se sont accélérées ces dernières années, mais les écarts de productivité entre les principales régions du pays et ses régions périphériques ont tendance à diminuer. Le gouvernement s’efforce de remédier aux disparités entre régions en donnant davantage de pouvoirs aux institutions régionales et en améliorant la cohérence et la coordination de l’action publique au niveau régional.

La confiance et la qualité des institutions sont relativement faibles. La proportion de citoyens lituaniens ayant confiance dans les pouvoirs publics est inférieure à la moyenne de l’OCDE, et la réactivité des institutions politiques aux demandes des citoyens ainsi que la satisfaction suscitée par les processus politiques sont comparativement faibles. Le niveau de corruption est supérieur à la moyenne de l’OCDE, mais l’écart se réduit manifestement. Le gouvernement s’efforce d’endiguer une inflation juridique galopante, en améliorant la conception des lois et des règlements et en favorisant une élaboration des politiques fondée sur des données probantes dans le but d’améliorer la qualité des institutions et de renforcer la confiance dans les pouvoirs publics.

L’objectif que s’est fixé la Lituanie de réduire ses émissions de carbone de 30 % d’ici à 2030 est ambitieux. Les émissions de carbone par habitant sont inférieures à la moyenne de l’OCDE, mais continuent d’augmenter. Les transports et l’agriculture constituent d’importantes sources d’émissions. Le taux d’imposition du carbone est supérieur à la moyenne de l’OCDE, mais la persistance de subventions aux combustibles réduit l’efficacité de la tarification du carbone. Les dépenses de protection de l’environnement sont modestes. Élargir la portée du système de tarification du carbone et investir dans les technologies à faible émission de carbone, en particulier dans les secteurs des transports et de l’agriculture, contribueront à la réalisation des objectifs climatiques. Le gouvernement est en train de prendre des mesures en faveur de la décarbonation et de la sécurité énergétique.

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