Recherche-développement pharmaceutique
Le financement de la R-D (recherche-développement) pharmaceutique est le fruit d’une combinaison de sources publiques et privées. Avant la pandémie de COVID-19, les pouvoirs publics soutenaient principalement la recherche fondamentale et les travaux de recherche préliminaires par l’intermédiaire de dotations budgétaires, de subventions de recherche et en finançant des établissements de recherche et des établissements d’enseignement supérieur. L’industrie pharmaceutique participe activement à toutes les phases de R-D, mais sa plus grande contribution consiste à traduire et appliquer les connaissances pour développer des produits. Elle finance également la plupart des essais cliniques préalables à l’enregistrement, mais bénéficie souvent de subventions à la R-D ou de crédits d’impôt. En 2019, les gouvernements de 33 pays de l’OCDE pour lesquels il existe des données ont alloué ensemble environ 67 milliards USD à la R-D dans le domaine de la santé. Ce chiffre ne concerne pas uniquement les produits pharmaceutiques, et reste une sous-estimation du soutien total des pouvoirs publics car il exclut la plupart des incitations fiscales et des fonds alloués à l’enseignement supérieur et aux entreprises publiques. La même année, l’industrie pharmaceutique a consacré quelque 114 milliards USD à la R-D dans ces mêmes pays.
La majeure partie des dépenses de R-D de l’industrie pharmaceutique a lieu dans les pays de l’OCDE, mais la part des pays non membres est en hausse (EFPIA, 2020[9]). En 2019, l’industrie pharmaceutique a dépensé plus de 14 milliards USD dans la R-D en République populaire de Chine (0.06 % du PIB) – plus que dans aucun autre pays de l’OCDE à l’exception des États-Unis (OCDE, 2021[10]). Près des deux tiers des dépenses effectuées dans les pays de l’OCDE interviennent aux États-Unis (Graphique 9.9), où l’industrie pharmaceutique a dépensé environ 75 milliards USD (0.36 % du PIB), et où les budgets publics de R-D dans le domaine de la santé étaient de 44 milliards USD (0.21 % du PIB). La majeure partie du reste des dépenses a eu lieu en Europe et au Japon. En proportion du PIB, les dépenses de l’industrie sont les plus élevées en Suisse (0.8 %), en Belgique (0.5 %) et en Slovénie (0.4 %), qui sont des pays plus petits dotés de secteurs pharmaceutiques relativement importants.
Même si les données officielles ne sont pas encore disponibles, cette situation a clairement évolué suite à la pandémie de COVID-19. Les pouvoirs publics ont mobilisé des dizaines de milliards de dollars pour financer des processus de R-D complets, y compris les essais cliniques de phase avancée, en particulier pour des vaccins, mais aussi des traitements. Ils ont également conclu d’importants engagements préalables d’achats pour des vaccins contre le COVID-19 avant que les données des essais cliniques soient disponibles, transférant ainsi efficacement des entreprises aux contribuables les risques financiers liés à la R-D. Ainsi, en juillet 2021, l’accélérateur ACT-A (Access to COVID-19 Tools Accelerator ) de l’OMS avait reçu de divers États 12 milliards USD de fonds pour le vaccin, dont 1.7 milliard USD en soutien direct à la R-D relative à des projets sélectionnés par la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI) (OMS, 2021[11]). Fin 2020, le gouvernement des États-Unis avait alloué 12 milliards USD pour les phases finales de développement des vaccins et les engagements d’approvisionnement (Bloomberg, 2020[12]). Les analyses préliminaires des déclarations financières laissent penser que les dépenses de R-D de l’industrie pharmaceutique ont également continué d’augmenter, malgré une grande variabilité, certaines entreprises faisant état d’une baisse dans ce domaine (OCDE, 2021[13]).
L’industrie pharmaceutique affiche une forte intensité de R-D : le secteur dépense en moyenne plus de 13 % de sa valeur ajoutée brute en R-D – une part inférieure à celle observée dans le secteur des produits électroniques et optiques, comparable à celle de l’industrie aéronautique et spatiale, mais qui reste considérablement supérieure à la moyenne de l’ensemble du secteur manufacturier (Graphique 9.10). Tandis que les dépenses de R-D sont une mesure des investissements en R-D, les systèmes de santé sont surtout intéressés par les produits de R-D, qui sont bien plus compliqués à mesurer. Le nombre d’autorisations de mise sur le marché de nouveaux médicaments est une de ces mesures, mais il ne rend pas compte des bénéfices sanitaires que les nouveaux produits vont apporter ou non. Entre 2010 et 2020, la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis a autorisé en moyenne 43 nouveaux médicaments par an, avec une forte tendance à la hausse : de moins de 30 en 2010 à environ 50 les dernières années (Graphique 9.11). Près d’un tiers étaient des produits contre le cancer et des immunomodulateurs, 14 % étaient des anti-infectieux, et 10 % étaient des produits pour les voies digestives et le métabolisme et le système nerveux.
Les dépenses intérieures de R-D du secteur des entreprises (DIRDE) couvrent la R-D réalisée par les entreprises, quelle que soit l’origine des fonds. Les DIRDE sont enregistrées dans le pays où a lieu l’activité de R-D. Les agences statistiques nationales recueillent ces données principalement par des enquêtes et selon le Manuel de Frascati mais les pratiques nationales varient dans une certaine mesure. La « R-D pharmaceutique » désigne les DIRDE des entreprises classées dans l’industrie pharmaceutique.
Les allocations de crédits budgétaires publics de R-D (CBPRD) englobent la R-D menée directement par les administrations publiques et les sommes versées à d’autres institutions pour financer la R-D. La R-D dans le domaine de la santé désigne les CBPRD employés dans le but de protéger, promouvoir et restaurer la santé humaine, ce qui recouvre notamment tous les aspects des soins médicaux et sociaux, mais exclut les dépenses des entreprises publiques et les fonds universitaires généraux qui sont ensuite affectés à la santé.
L’Europe inclut les 21 pays membres de l’UE qui sont aussi membres de l’OCDE ainsi que l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Royaume-Uni. Les données ne sont pas disponibles pour l’Australie, la Colombie, le Costa Rica, le Luxembourg et la Nouvelle-Zélande.
La valeur ajoutée brute d’un secteur correspond à la production brute moins la consommation intermédiaire. Elle inclut le coût des salaires, la consommation de capital fixe et les impôts sur la production. Les moyennes OCDE du Graphique 9.10 correspondent aux moyennes non pondérées de l’intensité de R-D, sur la base de 17 pays qui disposent de données pour les industries aéronautique et spatiale ; et sur 31 à 34 pays pour tous les autres secteurs.
Le Graphique 9.11 inclut les approbations des demandes d’autorisation de nouvelles entités moléculaires et de nouveaux produits biologiques du Centre de recherche et d’évaluation des médicaments de la FDA, et les approbations des demandes d’autorisation de nouveaux produits biologiques relatives aux vaccins, aux thérapies géniques, et aux facteurs de coagulation par le Centre de recherche et d’évaluation des produits biologiques de la FDA, mais à l’exclusion des autres types de produits approuvés par le Centre de recherche et d’évaluation des produits biologiques de la FDA. Les domaines thérapeutiques sont basés sur les groupes de niveau 1 de la classification ATC de l’OMS
Références
[1] Belloni, A., D. Morgan et V. Paris (2016), « Pharmaceutical Expenditure And Policies : Past Trends And Future Challenges », Documents de travail de l’OCDE sur la santé, n° 87, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/5jm0q1f4cdq7-en.
[12] Bloomberg (2020), Inside Operation Warp Speed’s $18 Billion Sprint for a Vaccine, https://www.bloomberg.com/news/features/2020-10-29/inside-operation-warp-speed-s-18-billion-sprint-for-a-vaccine.
[2] CIHI (2020), Pharmaciens au Canada, 2019 - Tableaux de données, Ottawa CIHI, https://www.cihi.ca/fr/pharmaciens (consulté le 14 juillet 2021).
[9] EFPIA (2020), The Pharmaceutical Industry in Figures - Key Data 2020, https://www.efpia.eu/media/554521/efpia_pharmafigures_2020_web.pdf.
[6] Eurofound (2021), Living, working and COVID-19 dataset, http://eurofound.link/covid19data (consulté le 9 juillet 2021).
[16] GPUE (2021), Position du GPUE sur le rôle des pharmaciens d’officine dans la lutte contre la COVID-19 : les leçons tirées de la pandémie, https://www.pgeu.eu/publications/pgeu-position-paper-on-the-lessons-learned-from-the-covid-19-pandemic/?lang=fr (consulté le 14 juillet 2021).
[5] Mars, B. et al. (2017), « Influences on antidepressant prescribing trends in the UK: 1995–2011 », Social Psychiatry and Psychiatric Epidemiology, vol. 52/2, pp. 193-200, https://doi.org/10.1007/s00127-016-1306-4.
[3] Ministry of Health, Labour and Welfare (2018), Summary of 2018 Survey of Physicians, Dentists and Pharmacists, Bureau des statistiques de santé, Direction générale des statistiques et de la politique d’information, Ministère de la santé, du travail et des affaires sociales, https://www.mhlw.go.jp/toukei/saikin/hw/ishi/18/index.html (consulté le 14 juillet 2021).
[10] OCDE (2021), Base de données analytique des dépenses en recherche et développement dans l’industrie (ANBERD) et base de données des principaux indicateurs de la science et de la technologie (PIST), https://stats.oecd.org/.
[13] OCDE (2021), OECD Main Science and Technology Indicators: Highlights on R&D expenditure, March 2021 release, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/sti/msti-highlights-march-2021.pdf.
[15] OCDE (2021), « Renforcer la première ligne : Comment les soins primaires aident les systèmes de santé à s’adapter à la pandémie de COVID-19 », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/ae139cf5-fr.
[4] OCDE (2020), Realising the Potential of Primary Health Care, Études de l’OCDE sur les politiques de santé, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/a92adee4-en.
[7] OCDE (2018), « Strategies to reduce wasteful spending: Turning the lens to hospitals and pharmaceuticals », dans Health at a Glance : Europe 2018 : State of Health in the EU Cycle, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/health_glance_eur-2018-5-en.
[11] OMS (2021), Access to COVID-19 tools funding commitment tracker, https://www.who.int/publications/m/item/access-to-covid-19-tools-tracker.
[8] Socha-Dietrich, K., C. James et A. Couffinhal (2017), « Reducing ineffective health care spending on pharmaceuticals », dans Tackling Wasteful Spending on Health, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264266414-7-en.
[14] Troein, P., M. Newton et K. Scott (2020), The Impact of Biosimilar Competition in Europe (white paper), IQVIA, https://www.iqvia.com/en/library/white-papers/the-impact-of-biosimilar-competition-in-europe (consulté le 15 juillet 2021).