Chapitre 4. Conséquences imprévues des pratiques de conservation utilisées en agriculture pour le cycle de l’azote
Au travers d’une étude de cas portant sur l’agriculture, ce chapitre met en garde contre les possibles effets indésirables des mesures de gestion de la pollution azotée. Il passe en revue les différentes pratiques appliquées aux États-Unis pour gérer cette pollution dans le secteur agricole. Il examine en détail les possibles effets indésirables de chaque mesure et en tire des enseignements généraux.
Quelle que soit l’approche choisie (fondée sur les risques ou de précaution), il est primordial que les pouvoirs publics tiennent compte de la réalité de la cascade de l’azote pour orienter leur action (voir la description de la cascade au chapitre 1). Pour concevoir des politiques optimales de gestion de l’azote et des incitations appropriées pour les appuyer, il faut évaluer leurs effets indésirables sur les autres formes d’azote à l’intérieur de cette cascade. Ce principe vaut pour l’ensemble des sources d’azote : agriculture, énergie, transports, industrie, assainissement...
Le présent chapitre se concentre sur les pratiques agricoles et montre qu’elles peuvent avoir des conséquences imprévues si on omet de prendre en compte la cascade de l’azote. L’azote connaît de nombreuses transformations sous de nombreuses formes qui contribuent à sa migration entre les écosystèmes terrestres, atmosphériques et aquatiques. En raison de cette labilité, les effets bénéfiques visés deviennent souvent des effets négatifs pour des écosystèmes adjacents, voire au sein de l’écosystème dans lequel est appliqué l’azote (Follett et al., 2010).
4.1 Gestion de l’azote au service de l’agriculture et de l’environnement
Aux États-Unis, l’utilisation accrue d’engrais azotés commerciaux a permis un accroissement des rendements agricoles, mais aussi fait peser des risques plus importants sur la qualité de l’environnement. Le Service de conservation des ressources naturelles (NRCS) du ministère de l’Agriculture des États-Unis (USDA) a évalué le recours aux pratiques de conservation sur les terres cultivées dans plusieurs grands bassins hydrographiques, à partir de données d’enquête recueillies sur la période 2003-06 (USDA-NRCS, 2011a, 2012b, 2012c, 2013a, 2013b). L’état de la gestion de l’azote a été évalué sur la base d’un ensemble de critères définissant le taux, la méthode et le calendrier d’épandage appropriés. Le respect de ces trois critères garantissait un apport adéquat en éléments nutritifs aux cultures, tout en limitant les risques d’épandages excessifs risquant fort d’entraîner des rejets dans l’air et dans l’eau à partir des champs.
Le NRCS a constaté que de nombreux aspects restaient à améliorer dans l’ensemble (Tableau 4.1). En particulier, le faible taux d’application de bonnes pratiques de gestion des éléments nutritifs dans les cours supérieur et inférieur du Mississippi et dans le bassin Ohio-Tennessee sont notables, car ces régions concentrent la majeure partie de la production de maïs. Le maïs est la culture qui utilise le plus d’azote, à la fois par acre1 et en termes absolus. Ces régions sont également parmi les principaux pourvoyeurs de l’azote qui entre dans le golfe du Mexique par le Mississippi et qui est responsable au premier chef de la vaste zone d’eaux hypoxiques qui s’y est formée (Alexander et al., 2008).
La Clean Air Act (loi sur la qualité de l’air) et la Clean Water Act (loi sur la qualité de l’eau) réglementent les effets environnementaux de l’azote dans l’air et dans l’eau. Les programmes de protection de l’environnement de l’USDA encouragent de façon générale une meilleure gestion des éléments nutritifs au travers de programmes volontaires. Les agriculteurs décident eux-mêmes des mesures de conservation à adopter. Pour protéger un milieu particulier de l’environnement contre la pollution agricole, on encourage des ensembles spécifiques de pratiques de gestion, soit par le biais de la réglementation (ce qui est rare aux États-Unis) soit par celui de l’aide financière et de la sensibilisation (cas le plus fréquent). Les pratiques soutenues sont souvent choisies en fonction de leur efficacité escomptée pour ce qui est de prévenir les rejets de polluants dans un milieu particulier. Or, le fait de se focaliser sur une voie de transfert en particulier peut entraîner des conséquences imprévues préjudiciables à d’autres milieux.
La section suivante décrit la migration de l’azote dans le contexte des productions végétales et celui des installations d’élevage confiné. Les deux rejettent d’importantes quantités d’azote dans l’environnement, mais font l’objet d’approches de gestion différentes.
4.2 Voies de transfert de l’azote dans le cadre des productions végétales
Les émissions d’azote dans l’eau et l’atmosphère ne constituent pas des phénomènes indépendants, mais sont liées par les processus biologiques et chimiques qui engendrent les diverses formes d’azote. La production végétale se caractérise par des conditions climatiques et édaphiques stochastiques qui influent sur les rendements agricoles et les pertes d’azote. Sur le plan des éléments nutritifs, elle constitue un système « non étanche ». Il est impossible de s’assurer que les cultures absorbent tous les éléments nutritifs qui sont apportés aux terres cultivées via l’épandage direct d’engrais commerciaux ou d’effluents d’élevage, ou qui sont fixés par les légumineuses. L’azote épandu sur les terres cultivées peut être « perdu » de différentes manières :
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Érosion des sols. Les pertes peuvent se produire au niveau de la surface du sol, lorsque l’azote se fixe sur des particules de sol qui sont emportées à l’extérieur du champ par le vent ou l’eau. Bien que l’érosion éolienne et l’érosion hydrique soient observables dans l’ensemble des régions, la première domine généralement dans les régions sèches et la seconde, dans les régions humides. Dans l’ensemble, les pertes d’azote sous l’effet de l’érosion sont faibles si des pratiques de conservation élémentaires sont appliquées (Iowa Soybean Association, 2008).
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Ruissellement. Le ruissellement d’azote dissous à la surface du sol, généralement sous la forme de nitrate (NO3-), constitue un problème seulement lorsque les engrais et/ou effluents d’élevage épandus sont emportés par les eaux pluviales avant d’avoir pu pénétrer dans le sol (Legg et Meisinger, 1982 ; Iowa Soybean Association, 2008).
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Lessivage. Le lessivage se produit lorsque des eaux pluviales et/ou d’irrigation sont présentes en quantités suffisantes pour entraîner facilement le NO3- soluble à travers le sol (Randall et al., 2008). Le NO3- aboutit à terme dans les aquifères ou les eaux de surface par le biais de drains en tuyaux et d’écoulements souterrains. Les drains en tuyaux peuvent constituer une importante voie de transfert de l’azote des sols agricoles jusqu’aux eaux de surface dans les régions où le niveau des nappes d’eau est élevé (Turner et Rabalais, 2003 ; Randall et al., 2008 ; Randall et al., 2010 ; Petrolia et Gowda, 2006).
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Volatilisation de l’ammoniac (NH3). Des quantités considérables d’azote peuvent être rejetées dans l’atmosphère sous forme de NH3 si l’urée ou les engrais d’origine animale épandus en surface ne sont pas enfouis immédiatement (Hutchinson et al., 1982 ; Fox et al., 1996 ; Freney et al., 1981 ; Sharpe et Harper, 1995 ; Peoples et al., 1995). De plus, par temps chaud, la transformation des effluents d’élevage et d’autres engrais azotés inorganiques sensibles en NH3 peut être accélérée.
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Dénitrification. Quand la teneur en oxygène du sol est faible, des micro-organismes appelés « bactéries dénitrifiantes » transforment le NO3- en diazote et en hémioxyde d’azote (N2O) (Mosier et Klemedtsson, 1994). La dénitrification se produit généralement lorsque les sols contiennent du NO3-, qu’ils sont chauds et que leur humidité est élevée ou que de l’eau stagnante est présente. Le rapport entre le diazote et le N2O dépend de la quantité d’oxygène dont disposent les organismes dénitrifiants. Plus l’oxygène est abondant, plus la quantité de N2O produite est importante.
Afin de préserver la viabilité économique des exploitations sur fond de variabilité temporelle des conditions météorologiques et de la teneur en azote des sols, les agriculteurs appliquent des quantités d’azote plus importantes que celles dont les végétaux ont besoin pour se protéger contre le risque de perte (il s’agit en quelque sorte d’un taux d’épandage d’azote « tout risque ») (Sheriff, 2005 ; Babcock, 1992 ; Babcock et Blackmer, 1992 ; Rajsic et Weersink, 2008). Cette méthode garantit la disponibilité de l’azote nécessaire aux cultures. De plus, les agriculteurs peuvent chercher à maximiser la rentabilité économique en appliquant un « filet de sécurité », c’est-à-dire en fixant pour un champ donné un objectif de rendement optimiste correspondant à des conditions météorologiques optimales, pour être sûrs que la quantité d’azote nécessaire à des rendements maximums est disponible (Schepers et al., 1986 ; Bock et Hergert, 1991). Les années où les conditions météorologiques ne sont pas optimales pour maximiser les rendements, leurs épandages d’azote sont alors excessifs d’un point de vue agronomique. Comme, quasiment par définition, les conditions climatiques sont rarement optimales, les agriculteurs adoptant cette approche épandent le plus souvent trop d’engrais sur leurs cultures. La décision d’appliquer des quantités « supplémentaires » d’azote est économiquement justifiée si le coût de ces épandages est faible comparé à celui d’épandages insuffisants (Rajsic et Weersink, 2008).
4.3 Voies de transfert de l’azote dans la production animale
Le cycle de l’azote dans la production animale intègre la production, le stockage et la gestion des effluents d’élevage. L’azote entre dans le système par l’alimentation animale. Une partie est retenue dans les produits d’origine animale (viande, lait, œufs), mais pas moins de 95 % sont rejetés dans l’urine et les déjections, dont une grande partie est épandue pour fertiliser les terres cultivées (Follett et Hatfield, 2001).
Ces effluents d’élevage peuvent s’accumuler dans ou sous les installations de production pendant quelques heures ou plusieurs mois, en fonction du système de collecte. Les installations de production sont dotées d’un dispositif de ventilation pour évacuer les gaz émis, notamment le NH3. Les effluents d’élevage sont par la suite retirés pour être acheminés vers une structure de stockage (bassin, réservoir, fosse ou dalle) et stockés pendant un laps de temps allant de quelques jours à de longs mois. En fonction du système et de l’ampleur des contacts avec la pluie et le vent, de l’azote peut être rejeté dans l’eau et dans l’air à ce stade-là. Les effluents stockés sont tôt ou tard acheminés vers des champs pour y être épandus. Les rejets d’azote dans l’air et l’eau à partir des champs varient en fonction de la méthode et du taux d’épandage. L’azote présent dans les champs permet de produire des végétaux, qui à leur tour peuvent servir de fourrage pour les animaux, bouclant ainsi le cycle. L’azote rejeté dans l’air finit par retomber sur terre, où il peut constituer une source d’éléments nutritifs pour les végétaux ou se perdre comme décrit plus haut.
La forme sous laquelle l’azote chemine des animaux aux champs dépend d’une multitude de facteurs, notamment les techniques de stockage, le taux d’humidité des effluents d’élevage, la température, la circulation d’air, le pH et la présence de micro-organismes. Lorsqu’on réduit la migration de l’azote selon une voie de transfert en modifiant sa forme, on amplifie sa migration selon une autre voie (NRC, 2003). Par exemple, le fait de diminuer les rejets de NH3 des champs vers l’atmosphère en injectant les déjections animales directement dans le sol accroît la quantité d’azote susceptible de parvenir dans les ressources hydriques sous la forme de NO3- (Oenema, 2001 ; Abt Associates, 2000). En ignorant les interactions du cycle de l’azote lors de l’élaboration des mesures de gestion des effluents d’élevage, on risque d’ouvrir la voie à des effets indésirables sur la qualité de l’environnement.
4.4 Pratiques de conservation et cycle de l’azote
Les pratiques de conservation classiques ont été évaluées sous l’angle de leurs effets sur les pertes d’azote selon différentes voies de transfert. Les changements apportés à la rotation des cultures pour réduire les pertes d’azote ne sont pas pris en compte, hormis l’ajout d’une culture de couverture2. Les pratiques ci-après influent sur les pertes d’azote dans l’environnement. Leur efficacité varie considérablement selon le contexte dans lequel elles sont appliquées (culture, sol, climat, aptitudes professionnelles). L’analyse se limite donc aux effets d’ordre général. Il convient de rappeler que les pratiques conçues en vue d’assurer la réalisation d’objectifs particuliers de la politique de l’environnement sont souvent utilisées de manière combinée (Encadré 4.1).
Il est généralement impossible de régler les problèmes de pollution azotée au moyen d’une seule pratique de gestion, car les pratiques isolées ne produisent pas d’ordinaire tout l’éventail des effets requis sur un site. Plusieurs pratiques sont donc associées pour établir des systèmes de pratiques, lesquels sont habituellement plus efficaces en matière de lutte contre les polluants dans la mesure où ils peuvent être utilisés en plusieurs points du processus de production de ceux-ci. Cependant, pour qu’un ensemble de pratiques forme un système efficace, il faut que les pratiques soient choisies et conçues pour fonctionner ensemble et favoriser de concert la réalisation des objectifs considérés de la politique de l’environnement. Si l’objectif est la qualité de l’eau, par exemple, il est possible de combiner gestion des éléments nutritifs, façons culturales anti-érosives, bordures de champs et bandes rivulaires pour lutter contre les pertes d’azote. Les façons culturales anti-érosives peuvent permettre de limiter le transport en surface de l’azote en diminuant l’érosion et le ruissellement, tandis que la gestion des éléments nutritifs réduit au minimum les pertes de subsurface imputables à l’infiltration accrue qui en découle. Des bandes filtrantes peuvent être utilisées pour limiter le transport de l’azote par l’amplification de l’infiltration et par l’absorption de l’azote disponible par les plantes cultivées en lisière des champs. L’azote qui s’échappe malgré la gestion des éléments nutritifs, les façons culturales anti-érosives et les bandes filtrantes peut être capté et dénitrifié dans les bandes rivulaires.
Chaque élément du système de pratiques de gestion doit être choisi, conçu, mis en œuvre et administré en tenant compte des caractéristiques spécifiques du site pour assurer la synergie des pratiques au service des objectifs généraux de gestion. Ainsi, si la gestion des éléments nutritifs, les façons culturales anti-érosives, les bandes filtrantes et les bandes rivulaires sont utilisées pour traiter un problème de qualité de l’eau, les activités de plantation et d’épandage d’éléments nutritifs doivent être menées dans le respect des objectifs et pratiques de travail du sol favorable à la conservation des sols (injection plutôt qu’épandage à la volée et enfouissement des engrais, par exemple). De plus, l’eau de ruissellement issue des champs doit être acheminée de manière uniforme vers les bandes filtrantes qui, à leur tour, doivent être en mesure de la faire passer dans les bandes rivulaires conformément aux normes et spécifications prévues.
Source: USEPA (2003).
4.4.1 Gestion des éléments nutritifs
Selon la définition donnée par le NRCS, la gestion des éléments nutritifs consiste à gérer la quantité, la localisation, la forme et les caractéristiques temporelles de l’épandage sur le sol des éléments nutritifs destinés aux végétaux (USDA-NRCS, 2006). L’accent est mis sur l’efficacité d’utilisation globale des éléments nutritifs3, et non sur un vecteur ou une voie spécifique de rejet de ces éléments dans l’environnement. Cependant, les décisions relatives au taux, au calendrier et à la méthode d’épandage ont des répercussions sur la forme et la voie de migration de l’azote à l’intérieur et à partir du sol.
L’épandage d’azote sur les terres cultivées peut prendre diverses formes. Les formes d’engrais azotés les plus employées sont notamment l’ammoniac anhydre ou NH3 (gaz), l’urée (solide), le mélange d’urée et de nitrate d’ammonium (liquide)4 et le fumier (solide). Ces formes se différencient les unes des autres par la rapidité de leur transformation en NO3-, substance dont ont réellement besoin les végétaux. Plus l’épandage est rapproché de la période où le végétal requiert de l’engrais, plus la transformation de ce dernier en NO3- doit être rapide. L’application d’une forme d’engrais inadaptée au calendrier peut se traduire par d’importantes pertes dans l’environnement et de faibles rendements.
Il est possible d’accroître l’efficacité d’utilisation de l’azote en incorporant les engrais dans le sol plutôt que de les épandre à la volée à la surface. Ce procédé atténue les risques de pertes atmosphériques ou par ruissellement. Il réduit également les pertes liées à la volatilisation du NH3. Cependant, selon certaines études, l’enfouissement des engrais augmente les émissions de N2O (Flessa et Beese, 2000 ; Wulf et al., 2002 ; Drury, 2006). L’injection ou l’enfouissement des engrais pourrait aussi accroître le lessivage des NO3-, notamment en présence de sols à texture grossière (Abt Associates, 3).
Il est possible d’accroître l’efficacité d’utilisation de l’azote en faisant mieux correspondre la demande en azote des cultures et les apports tout au long de la période de croissance (Doerge et al., 1991 ; Cassman et al., 2002 ; Meisinger et Delgado, 2002). Cela suppose de maintenir une faible concentration d’azote inorganique dans le sol lorsque la croissance végétale est faible et d’apporter des quantités suffisantes d’engrais azotés inorganiques pendant les périodes de croissance végétale rapide. Par exemple, les besoins du maïs en azote ne sont pas très élevés jusqu’à environ 4 semaines après sa sortie de terre, qui intervient habituellement de juin à juillet dans les principales régions productrices de maïs aux États-Unis. Cependant, pour les cultures plantées au printemps, les agriculteurs épandent souvent l’azote en automne parce que les engrais sont moins chers et qu’ils sont moins pris par le temps qu’au printemps.
Un sol froid et l’utilisation d’inhibiteurs d’azote peuvent ralentir la transformation de l’engrais azoté en NO3-, mais les pertes par lessivage peuvent alors s’avérer assez importantes. Le passage aux épandages de printemps peut permettre de réduire les quantités appliquées et les pertes de NO3- dans l’eau, mais peut aussi accroître les émissions de N2O, dans la mesure où le temps est alors généralement plus chaud et plus humide (Delgado et al., 1996 ; Rochette et al., 2004 ; et Hernandez-Ramirez et al., 2009). L’épandage d’azote au cours de la période de croissance présente également des risques, car les conditions météorologiques peuvent empêcher de le réaliser au moment où les végétaux en ont besoin et nuire ainsi aux rendements. Bien que les inhibiteurs de nitrification soient efficaces pour réduire les émissions directes de N2O et le lessivage du NO3-, des études récentes laissent à penser qu’ils peuvent augmenter la volatilisation du NH3 et, par la suite, les émissions indirectes de N2O (Lam et al., 2017).
Les technologies de l’agriculture de précision jouent un rôle grandissant dans la production agricole et créent de nouvelles possibilités d’accroître l’efficacité d’utilisation de l’azote. Les technologies de précision – comme les systèmes de guidage des tracteurs par GPS, l’établissement de cartes des sols et des rendements par GPS et la modulation intra-parcellaire des épandages – aident les agriculteurs à recueillir des informations sur l’évolution des conditions de terrain afin d’adapter les pratiques de fertilisation (Schimmelpfennig, 2016). La première vague de l’agriculture de précision a été le guidage des tracteurs par GPS. Apparu au début des années 90, ce système est maintenant largement répandu (Schmaltz, 2017). Le GPS réduit les erreurs de conduite et les chevauchements durant l’épandage. Le taux de pénétration de la deuxième vague technologique, à savoir la modulation intra-parcellaire des épandages, est actuellement estimé à 15 % en Amérique du Nord et devrait continuer de progresser rapidement (ibid.). La troisième vague pourrait bien être celle des « mégadonnées » et la quatrième vague, à plus long terme, celle de la robotique. La notion de mégadonnées renvoie aux volumes massifs de données d’une grande variété qui peuvent être captés (par exemple, par des drones), analysés et utilisés pour la prise de décision (Wolfert et al., 2017).
4.4.2 Travail du sol
Le travail du sol favorable à la conservation des sols (façons culturales anti-érosives) est une pratique courante qui présente plusieurs avantages, dont une consommation réduite de carburant, des disponibilités en eau du sol accrues et une érosion des sols réduite. Une érosion moindre des sols maintient davantage de particules du sol et les éléments nutritifs qui y sont fixés à l’écart des eaux de surface. Comme l’ont établi certaines études, les systèmes de culture sans travail du sol réduisent le lessivage du NO3- par rapport au travail du sol conventionnel, sans oublier la rotation adéquate des cultures, en particulier celles comportant des végétaux fixateurs d’azote (Meek et al., 1995). Cependant, une autre étude a montré que les façons culturales anti-érosives augmentaient le taux d’infiltration des sols (Baker, 1993). Le risque de lessivage du NO3- peut être accru en raison des disponibilités en eau plus importantes et de la plus grande porosité du sol (larges espaces poraux) (USEPA, 2003). La macroporosité du sol et la proportion des précipitations empruntant des voies d’écoulement préférentielles progressent souvent lorsqu’on adopte des façons culturales anti-érosives, ce qui peut accroître le transfert du NO3- et d’autres substances chimiques présentes dans les couches supérieures du sol vers le sous-sol et les nappes souterraines peu profondes (Shipitalo et al., 2000). De plus, le travail réduit du sol crée un environnement plus favorable à l’ammonisation et à la dénitrification, ce qui peut se traduire par une augmentation des émissions atmosphériques d’azote. Cela dépend toutefois des sols et de leur humidité (MacKenize, Fan et Cadrin, 1997).
4.4.3 Cultures de couverture
Les cultures de couverture sont plantées après la récolte de la culture principale pour maintenir un couvert végétal à la surface du sol et prévenir son érosion, et pour empêcher le lessivage de l’azote ou son ruissellement vers les eaux de surface (Dabney et al., 2010). Les cultures de couverture remplissent cette fonction en puisant l’eau et le NO3-, réduisant ainsi la quantité de NO3- qui s’infiltre à travers le sol. Par exemple, d’après une étude menée sur six ans (1999-2005) et portant sur le maïs et le soja au Canada, l’utilisation de blé d’hiver en guise de culture de couverture peut réduire les pertes de NO3- par rapport à l’absence d’une telle culture, tout en augmentant les rendements (Drury et al., 2014). Les cultures de couverture présentent l’avantage supplémentaire d’accumuler le carbone du sol. Toutefois, elles ne sont pas aussi efficaces pour réduire les pertes atmosphériques d’azote, qui se produisent principalement lors des épandages d’engrais ou peu de temps après.
4.4.4 Bandes filtrantes
Les bandes filtrantes végétales retirent des eaux de ruissellement de surface des sédiments, des matières organiques et d’autres polluants, lesquels sont ainsi tenus à l’écart des cours d’eau. L’effet sur l’azote dissous est moins évident. Il est possible que le filtre accentue la dénitrification. Par ailleurs, le lessivage du NO3- peut augmenter en raison du ralentissement du mouvement des eaux de surface. Fares et al. (2010) ont passé en revue les études publiées sur les filtres végétaux et le cycle de l’azote.
4.4.5 Zones humides remises en état
Il a été démontré que les zones humides remises en état sont efficaces pour réduire la migration de l’azote depuis les terres cultivées vers les eaux de surface (Jansson et al., 1994 ; Hey et al., 2005 ; Mitsch et Day, 2006). La végétation de ces zones assimile l’azote et les sols humides accentuent la dénitrification. La désazotation se produit principalement par le biais de la dénitrification (Crumpton et al., 2008). Pour certains, la dénitrification produit plutôt du diazote inerte et peu de N2O (USEPA, 2010 ; Hernandez et Mitsch, 2006 ; Crumpton et al., 2008).
4.4.6 Drainage des champs
Des tuyaux de drainage sont utilisés pour réduire le ruissellement et accroître le drainage des sols. En abaissant la nappe d’eau du sol, ils permettent des productions végétales intensives sur des champs qui seraient autrement trop humides. Les sols drainés ont tendance à être très productifs. Environ 26 % des terres cultivées bénéficiant d’apports d’azote sont dotées de tuyaux de drainage et ce, principalement dans la production de maïs (Ribaudo et al., 2011). Cependant, quelque 71 % des superficies disposant de tuyaux de drainage ne remplissent pas les trois critères de gestion de l’azote.
Les tuyaux de drainage offrent un passage rapide pour le NO3- soluble, qui évite concrètement toute atténuation dans le sol ou dans les tampons végétaux. De ce fait, ils peuvent avoir pour effet indésirable de concentrer l’azote et de l’acheminer directement dans les cours d’eau (Hirschi et al., 1997). Dans les zones où les champs sont dotés de tuyaux de drainage, ceux-ci sont à l’origine de pertes de NO3- qui sont une importante cause de dégradation de la qualité de l’eau (Dinnes et al., 2002 ; David et al., 2010 ; Randall et al., 2010)5.
Afin de réduire la pollution azotée provoquée par les tuyaux de drainage, d’autres pratiques de gestion peuvent s’avérer nécessaires, comme la gestion des éléments nutritifs dans l’optique de la réduction à la source et le recours à des biofiltres (ou bioréacteurs) fixés à la sortie des drains aux fins d’interception (USEPA, 2003). Cependant, les bioréacteurs amplifient aussi la dénitrification6.
Par ailleurs, les pratiques de contrôle du ruissellement peuvent contribuer à réduire les débits hydriques (USEPA, 2003). La gestion des eaux de drainage fait partie des pratiques actuellement utilisées pour lutter contre les pertes de NO3-. Ce processus consiste à gérer l’étalement dans le temps et le volume des rejets d’eau provenant des systèmes de drainage agricole. Au cours de la période de croissance, le niveau d’eau est abaissé (et le drainage accru) pour permettre la croissance optimale des végétaux. Durant les périodes de jachère, le niveau peut augmenter, ce qui réduit la quantité d’eau drainée à partir des champs et augmente la dénitrification dans le sol (Randall et al., 2010).
4.4.7 Ajout de substances chimiques aux effluents d’élevage
Des substances chimiques, telles que l’alun, peuvent être ajoutées aux effluents d’élevage lors de leur collecte afin de lier les composés odorants et de réduire les émissions de NH3 (Moore et al., 2000). Le recours à cette technique augmente la teneur en azote du fumier épandu dans les champs. Cela peut accroître le risque de pertes de NH3 et de NO3- à partir des champs, sauf si l’on recourt à des pratiques culturales appropriées.
4.4.8 Couvercles de cuve
Le fait de couvrir les cuves de stockage du fumier peut considérablement réduire les rejets atmosphériques de NH3, principalement en modifiant le pH et en prévenant la formation de NH3 (Jacobson et al., 1999). S’ils abaissent les émissions de NH3, les couvercles de cuve accroissent aussi la teneur en azote des effluents d’élevage qui sont tôt ou tard épandus sur les champs, ce qui augmente le risque d’émissions de NH3 et de pertes de NO3- par lessivage si l’on ne recourt pas à des pratiques culturales appropriées.
4.4.9 Couverture des bassins de décantation
Des couvertures en plastique flottant à la surface des bassins de décantation ou tendues au-dessus peuvent considérablement réduire les émissions d’azote sous des formes gazeuses (Jacobson et al., 1999 ; Arogo et al., 2002). Certains systèmes (digesteurs anaérobies) captent aussi le méthane et s’en servent comme biocombustible pour produire de l’électricité. Couvrir un bassin de décantation accroît la teneur en azote des effluents d’élevage qui sont tôt ou tard épandus sur les champs. Même si les champs sur lesquels sont épandus les effluents des bassins de décantation peuvent émettre davantage de NH3, l’effet net est une diminution des émissions cumulées de NH3 depuis les bassins de décantation et les épandages. En revanche, le risque de rejets de NO3- dans l’eau augmente.
4.4.10 Enfouissement et injection d’effluents d’élevage
Environ 10 % des surfaces cultivées ayant bénéficié d’apports d’azote ont reçu des effluents d’élevage en 2006 (Ribaudo et al., 2011). Si 62 % des surfaces cultivées recevant uniquement des engrais commerciaux ne remplissaient pas les critères de bonne gestion de l’azote, cette proportion atteignait 86 % pour les surfaces cultivées recevant uniquement des effluents d’élevage et 96 % pour celles recevant à la fois des engrais commerciaux et des effluents d’élevage. Des études indiquent que les exploitations comportant des installations d’élevage confiné ont tendance à épandre des quantités excessives d’éléments nutritifs sur les cultures, principalement en raison de l’important volume d’effluents produits par rapport aux terres cultivées de l’exploitation (Ribaudo et al., 2003 ; Gollehon et al., 2001).
L’incorporation rapide des effluents d’élevage dans le sol, par le recours à une charrue ou un enfouisseur à disques après épandage des matières solides ou par l’injection des matières liquides et du lisier directement dans le sol, réduit les émissions de NH3 (Abt, 2000 ; Arogo et al., 2002). Cependant, cette technique augmente aussi la quantité d’azote disponible pour les végétaux dans le sol, et par là même le risque de lessivage et ruissellement du NO3- dans les masses d’eau. L’enfouissement et l’injection d’effluents d’élevage doivent donc s’accompagner d’analyses de sol appropriées et d’autres pratiques culturales.
4.5 Les changements de gestion des éléments nutritifs sur les terres cultivées peuvent entraîner des effets de compensation sur le plan environnemental
Dans une étude (Ribaudo et al. 2011), le Service de recherche économique (ERS) de l’USDA a évalué l’incidence de l’adoption de différentes pratiques de gestion sur la migration de l’azote selon diverses voies de transfert, en recourant au modèle NLEAP (Nitrogen Loss and Environmental Assessment Package) avec fonctions de système d’information géographique (NLEAP-GIS) (Shaffer et al., 2010 ; Delgado et al., 2010). Cette étude présentait l’intérêt particulier d’examiner le degré auquel des effets de compensation pouvaient survenir sur le plan environnemental à mesure de l’amélioration de l’efficacité d’utilisation globale de l’azote.
Comme le modèle NLEAP fonctionne à l’échelle des champs, les chercheurs ont sélectionné huit sols différents, répartis dans quatre États (Arkansas, Ohio, Pennsylvanie et Virginie), pour évaluer les variations des rejets d’azote dans l’environnement qui découlent de modifications des pratiques de gestion dans le cadre de la production non irriguée de maïs7. Quatre de ces sols étaient de type A ou B (c’est-à-dire bien drainés) et les quatre autres, de type D (relativement mal drainés). Pour chaque sol, les chercheurs ont examiné deux rotations de culture (maïs-maïs et maïs-soja), deux pratiques de travail du sol (travail du sol conventionnel et absence de travail du sol) ainsi que deux sources d’azote (engrais inorganiques et engrais inorganiques + effluents d’élevage). Les sols présentaient une déclivité de 0 à 6 %, avec un faible potentiel d’érosion.
Pour chaque combinaison sol/rotation de culture/travail du sol/source d’azote, huit scénarios différents ont été modélisés avec NLEAP. Partant d’une situation de référence où au moins un des critères de bonne gestion de l’azote n’est pas respecté (bon taux d’épandage, bon calendrier d’épandage et bonne méthode d’épandage), les chercheurs ont postulé que des changements sont apportés aux pratiques de gestion afin de répondre à l’ensemble des critères. Les changements concernant uniquement le calendrier et/ou la méthode d’épandage posaient en principe que le taux d’épandage ne variait pas.
Tous les scénarios font apparaître les variations attendues des pertes totales d’azote en cas de respect des critères, avec des baisses qui indiquent une amélioration de l’efficacité d’utilisation de l’azote. Les résultats du modèle NLEAP confirment, comme on pouvait s’y attendre, que les émissions d’azote sont réduites en cas de respect des trois critères. Comme l’azote migre en cascade sous différentes formes et à travers différents écosystèmes, il ne fait aucun doute que la diminution de l’azote total est bénéfique à l’environnement à long terme. Cependant, certains effets de compensation entre les diverses formes d’azote peuvent poser des problèmes environnementaux. Dans notre exemple, l’adoption de pratiques d’injection et d’enfouissement fait systématiquement augmenter le lessivage de NO3-, parfois de manière considérable (il est multiplié par plus de deux dans certains cas). De même, le fait de basculer les épandages de l’automne au printemps (sans modifier le taux d’épandage) réduit les pertes de NO3- et les pertes totales d’azote, mais accroît les émissions de N2O en raison des conditions météorologiques généralement plus chaudes et plus humides, ce qui cadre avec les conclusions de Delgado et al. (1996), Rochette et al. (2004) et Hernandez-Ramirez et al. (2009). Comme cet effet peut augmenter les émissions de gaz à effet de serre (GES), il doit être bien soupesé lors de la formulation des recommandations visant à améliorer l’efficacité d’utilisation de l’azote.
L’injection/enfouissement et l’élimination des épandages d’automne donnent des résultats mitigés. Les émissions de NH3 diminuent dans tous les cas de figure. Le lessivage est généralement moins élevé mais, dans certains cas où l’on utilise du fumier, il peut augmenter. Les émissions de N2O accusent presque toujours une progression, qui va de 5 à 50 % selon la situation. Seule la réduction du taux d’épandage garantit une diminution des pertes d’azote sous ces trois formes (Mosier et al., 2002 ; Meisinger et Delgado, 2002). Ce constat tend à indiquer que, dans les régions où il y a un risque de lessivage vers des sources d’eau potable, la diminution du taux ou l’ajustement du calendrier d’épandage pourrait être privilégié pour améliorer l’efficacité d’utilisation de l’azote.
4.5.1 Projet d’évaluation des effets de la conservation du NRCS
Ces effets de compensation peuvent également être observés à plus grande échelle. Le NRCS a évalué les effets des systèmes de conservation (travail du sol, gestion des éléments nutritifs, mesures de lutte contre l’érosion) sur les pertes d’azote à partir des terres cultivées dans 12 grands bassins hydrographiques aux États-Unis, dans le cadre de son projet CEAP (Conservation Effects Assessment Project) (USDA-NRCS, 2011a, 2011b ; 2012a, 2012b, 2012c ; 2013a, 2013b, 2013c ; 2014a, 2014b, 2014c, 2014d ; 2015). L’USDA a mis en avant la gestion des éléments nutritifs pour réduire les pertes d’azote dans l’eau. En combinant des enquêtes sur le terrain et des modélisations, les chercheurs ont estimé, pour les pratiques culturales observées au cours des années de 2003 à 2006, la fraction des apports d’azote aux terres cultivées qui est absorbée par les plantes cultivées (une mesure de l’efficacité d’utilisation de l’azote) et celle qui est perdue selon les différentes voies de transfert8. En général, la part des apports d’azote absorbée par les plantes cultivées variait de 60 % dans le bassin South Atlantic Gulf à 76 % dans le bassin Souris-Red-Rainy (tableau 4.2).
Au moyen de modélisations, le NRCS a évalué les effets des pratiques de gestion observées sur les pertes d’azote en posant l’hypothèse d’une autre situation possible, caractérisée par l’absence de pratiques de conservation. Les résultats sont résumés dans le Tableau 4.2. Dans certains grands bassins hydrographiques agricoles, dont le Mississippi supérieur et inférieur et l’Ohio-Tennessee, la panoplie des pratiques de conservation observée a, d’après les estimations, accru le volume des pertes atmosphériques d’azote par volatilisation et dénitrification (de respectivement 3 % et 5 % dans le premier nommé de ces bassins), même si les pertes totales d’azote ont baissé (augmentation de l’efficacité d’utilisation de l’azote). Ce phénomène s’explique généralement par le fait que les engrais azotés sont demeurés plus longtemps à la surface des champs, où ils sont exposés au vent et à des conditions météorologiques qui favorisent la volatilisation et la dénitrification. En revanche, on estime que les systèmes de gestion observés ont réduit les pertes totales d’azote toutes voies de transfert confondues.
Les résultats concernant la baie de Chesapeake sont particulièrement riches d’enseignements. Une étude a été menée sur le terrain en 2006 et en 2011, couvrant une période où une importance particulière a été accordée à la réduction des charges en éléments nutritifs dans la baie. D’après les estimations, entre 2006 et 2011, l’efficacité d’utilisation de l’azote a progressé, passant de 62 à 66 %, mais les pertes d’azote par volatilisation (NH3) et par dénitrification (principalement diazote mais aussi N2O) ont augmenté respectivement de 3.2 et 1.9 %. Il apparaît que les pratiques de gestion choisies pour réduire les pertes d’azote dans l’eau (gestion des éléments nutritifs, cultures de couverture et mesures de lutte contre l’érosion) se sont traduites par un accroissement des pertes dans l’atmosphère.
Une analyse des voies de transfert de l’azote dans l’air et dans l’eau contribuerait à éclairer la gestion des arbitrages entre la pollution de l’air et de l’eau. Si on prend l’exemple de la baie de Chesapeake, environ la moitié des émissions de NH3 à partir de son bassin hydrographique n’y retourne pas pour cause de transport atmosphérique (Linker et al., 2013). Selon les estimations, 90 % de la charge se déposant dans le bassin hydrographique sont atténués dans les forêts, les champs et des terres affectées à d’autres usages, et environ la moitié des 10 % restants se perd lors du transport dans les cours d’eau en direction des eaux côtières de la baie (ibid.). En d’autres termes, sur 100 kg de NH3 perdus par volatilisation à partir des terres cultivées de la baie de Chesapeake, on estime que 2 kg seulement parviennent dans les eaux côtières eutrophes de la baie. Par ailleurs, les émissions de NH3 ne sont généralement pas visées par les règlements d’application de la loi sur la qualité de l’air.
4.6 Effets de compensation eau-air dans la gestion des effluents d’élevage
Aux termes des règlements d’application de la loi sur la qualité de l’eau, les exploitations d’élevage concentré sont tenues de respecter une norme d’épandage qui vise à empêcher l’introduction de NO3- dans les eaux souterraines et superficielles. En l’occurrence, une surface plus grande que par le passé est généralement requise pour l’épandage des effluents d’élevage, ce qui s’avère onéreux pour beaucoup de grandes exploitations (Ribaudo et al., 2003). En présence d’une norme d’épandage, les exploitants peuvent juger qu’ils ont intérêt à favoriser la volatilisation de l’azote à partir des effluents d’élevage (par exemple, utilisation de bassins de décantation non couverts, épandage en surface) pour réduire la teneur en azote de ceux-ci, afin de pouvoir en épandre davantage sur les terres cultivées et de réduire la superficie requise (Sweeten et al., 2000). Or, cette stratégie augmente les émissions atmosphériques de NH3 et dégrade la qualité de l’air. Selon Zilberman et al. (2001), la multiplicité des voies de transfert à partir des effluents d’élevage est l’une des raisons de l’inadéquation des politiques. Les mesures centrées sur les épandages d’azote en surface permettent en outre l’accumulation d’autres polluants potentiels dans le sol, comme le phosphore9, et négligent les problèmes tels que les odeurs et les poussières.
Une étude réalisée par l’ERS a évalué les mesures appliquées par les éleveurs de porcs au niveau des exploitations en réaction à des restrictions imposées aux émissions d’azote dans l’eau, dans l’air et dans l’eau et l’air à la fois. Elle montre les conséquences imprévues que peuvent avoir des mesures environnementales qui ne tiennent pas compte du cycle de l’azote (Aillery et al., 2005).
La mesure de protection des eaux examinée par l’ERS était une norme limitant les épandages d’azote à un niveau supérieur de 50 % au maximum à la quantité prélevée par les cultures. Pour les exploitants d’installations d’élevage confiné habitués à épandre des quantités excessives d’éléments nutritifs, le principal coût induit par cette limitation était celui du transport des effluents vers des superficies plus étendues (Ribaudo et al., 2003). Pour se mettre en conformité, les éleveurs porcins ont étendu le périmètre d’épandage, et les exploitants stockant les effluents d’élevage dans des cuves ont réduit de 11.8 % l’injection de lisier (augmentant ainsi les émissions de NH3 et réduisant la teneur en azote du lisier). Dans l’ensemble, les émissions de NH3 ont progressé de 3.4 %, principalement parce que les effluents d’élevage sont épandus sur une superficie plus vaste et parce que certains agriculteurs sont passés de l’injection à l’épandage en surface.
La mesure de lutte contre les émissions atmosphériques modélisée par l’ERS était une limitation des émissions de NH3 des exploitations utilisant des fosses à un niveau de 10 % supérieur au minimum obtenu en cas d’injection de la totalité des effluents. Pour les exploitations utilisant des bassins de décantation, les émissions de NH3 ont été limitées à un niveau de 20 % supérieur à celui pouvant être obtenu en cas de couverture des bassins. Le plafonnement des émissions de NH3 se présente sous la forme d’un pourcentage de réduction des émissions nettes d’azote par porc. Ces limitations ont incité les exploitations utilisant des fosses de stockage à abandonner l’épandage en surface au profit de l’injection sur certaines terres, et plusieurs exploitations utilisant des bassins de décantation à les couvrir. Elles ont fait baisser de 38 % les émissions de NH3 provenant des installations de stockage des effluents d’élevage (la plus importante source d’émissions de NH3) et augmenter de 57 % celles provenant des champs, avec à la clé une diminution nette des émissions de 29 %. Si les émissions à partir des champs ont augmenté, c’est parce que davantage de bassins de décantation ont été couverts, ce qui a accru la teneur en éléments nutritifs des effluents liquides issus de ces bassins et épandus à la surface des champs, et entraîné ainsi une plus grande volatilisation de l’azote. La norme d’émission de NH3 a conduit à une augmentation de 79 % des épandages excessifs d’azote10 (aggravant considérablement les menaces qui pèsent sur l’eau), et il y a donc eu un important effet de compensation entre la qualité de l’eau et la qualité de l’air.
4.7 Pratiques de gestion de l’hémioxyde d’azote (N2O)
Des études récentes ont examiné en quoi les pratiques de gestion du N2O pouvaient constituer un moyen efficace et économe de réduire les émissions de GES d’origine agricole. Pellerin et al. (2013), par exemple, ont identifié des actions pouvant faire baisser les émissions de N2O sans imposer des modifications importantes des systèmes de production ou une diminution significative (supérieure à 10 %) des rendements, et ils ont estimé leur potentiel d’atténuation et leur coût sur la période 2010-30. Leur étude montre que huit actions sont rentables pour réduire les émissions de N2O (Tableau 4.3). Ces actions se traduisant in fine par une baisse de la quantité d’azote épandue dans les champs, le risque de déplacement de la pollution azotée est minimisé.
4.8 Résumé, conclusions et points à approfondir
Une mesure de lutte contre les émissions d’azote provenant des épandages qui ne tient pas compte du cycle de l’azote peut avoir des conséquences imprévues. Par exemple, l’injection et l’enfouissement d’engrais azotés inorganiques et organiques dans le sol réduisent les pertes atmosphériques, mais peuvent amplifier le lessivage du NO3-. À l’inverse, limiter la fertilisation à la saison de croissance peut réduire les pertes de NO3- dans l’eau, mais aussi augmenter les émissions de N2O. Le fait de réduire les épandages d’azote diminue les pertes par toutes les voies de transfert.
Le travail du sol et le recours aux filtres végétaux peuvent également avoir des conséquences indésirables. Les façons culturales anti-érosives réduisent le ruissellement des éléments nutritifs et des sédiments, mais peuvent augmenter le lessivage du NO3- et les pertes atmosphériques. Les bandes filtrantes végétales éliminent des sédiments, matières organiques et autres polluants des eaux de ruissellement de surface, mais peuvent augmenter le lessivage du NO3- et les pertes atmosphériques.
Le drainage des champs constitue une importante source de rejets de NO3- dans l’eau. La gestion des eaux de drainage réduit la quantité de ces eaux et des polluants qui sortent des champs, mais cette pratique peut amplifier la dénitrification et les pertes atmosphériques de N2O. Les bioréacteurs font baisser les concentrations de NO3- dans le système de drainage des champs en accentuant la dénitrification, mais le cas échéant au prix d’une hausse des rejets atmosphériques de N2O.
Les décisions en matière de gestion des effluents d’élevage influent sur les pertes d’azote. La couverture des fosses et bassins de décantation réduit les odeurs et les pertes atmosphériques de NH3, mais accroît la teneur en azote des matières épandues ultérieurement sur les champs, augmentant ainsi le risque de pertes lors de l’épandage et les coûts. L’ajout de substances chimiques telles que l’alun aux effluents d’élevage atténue les odeurs et les émissions de NH3, mais fait aussi progresser la teneur en azote des matières épandues sur les champs.
Dans le cadre du projet CEAP, le NRCS a évalué les effets des systèmes de conservation (travail du sol, gestion des éléments nutritifs, mesures de lutte contre l’érosion) sur les pertes d’azote dans 12 grands bassins hydrographiques des États-Unis. Ces systèmes ont fait reculer les pertes d’azote dans l’eau, mais aussi parfois augmenter les pertes atmosphériques d’azote à l’échelle du bassin hydrographique.
L’ERS a modélisé une limitation des émissions de NH3 des élevages porcins sans restriction des épandages. Les résultats montrent qu’en réduisant les émissions de NH3 à partir des effluents d’élevage, on peut amplifier les pertes de NO3-.
Comme le montre une étude récente, les pratiques rentables de réduction des émissions de N2O ont pour effet ultime de faire baisser la quantité d’azote épandue sur les champs. Tous les risques de pollution azotée d’origine agricole s’en trouvent réduits.
En résumé, les effets de compensation entre l’air et l’eau sont omniprésents dans la gestion de l’azote en agriculture. L’absence de coordination des pratiques agricoles entraîne des conséquences indésirables qui peuvent amoindrir les gains environnementaux d’ensemble. Elle peut aussi imposer des coûts supplémentaires aux agriculteurs. Réduire l’azote à la source (en s’attaquant à l’épandage excessif d’engrais et d’effluents d’élevage) pourrait apporter une solution à plusieurs problèmes. Il serait possible de réduire la quantité d’éléments nutritifs apportée par les effluents d’élevage qui doivent être épandus sur les terres en améliorant la gestion de l’alimentation animale et en trouvant d’autres usages aux effluents.
En conclusion, étant donné que les flux d’azote dans l’environnement se traduisent par une multiplicité de pollutions, il existe sans aucun doute des avantages à coordonner les pratiques au lieu d’agir au coup par coup (Bull et Sutton, 1998 ; Baker et al., 2001). Des études menées aussi bien au niveau régional que sur le terrain ont montré qu’à se focaliser sur un milieu particulier de l’environnement (l’eau, par exemple), on risque de créer des incitations qui se traduisent par une dégradation dans un autre milieu (l’air). Ces effets de compensation ne constituent pas forcément un problème si l’un des milieux peut absorber une augmentation des charges d’azote. En revanche, si toute augmentation est indésirable, les mesures qui tiennent compte de l’ensemble des voies de transfert entraînant des pertes d’azote sont plus efficaces que celles qui en ignorent certaines.
En général, si on évite dès le départ de polluer, on s’épargne les problèmes que soulève une action ciblant les diverses voies de transfert de l’azote. Dans le cas des terres cultivées, la réduction des taux d’épandage pour assurer une meilleure efficacité d’utilisation de l’azote fait baisser les pertes d’azote sur l’ensemble des voies de transfert, permettant ainsi d’éviter les effets de compensation caractéristiques de la plupart des autres pratiques de conservation. Dans le cas des installations d’élevage confiné, l’amélioration de l’efficacité alimentaire dans la production animale peut diminuer la concentration d’azote dans les déjections. Cela atténue les menaces qui pèsent sur la qualité de l’air et de l’eau ainsi que les coûts liés à la gestion des effluents qu’implique le traitement de ces menaces.
L’analyse présentée dans ce chapitre s’est concentrée sur certaines pratiques de gestion de l’azote. D’autres pratiques de gestion pourraient être analysées, comme la rotation des cultures, la gestion de l’alimentation animale ou l’irrigation. Il pourrait aussi être intéressant d’évaluer la spécificité des végétaux fixateurs d’azote et de l’agriculture biologique. En ce qui concerne cette dernière par exemple, il n’existe apparemment pas de consensus scientifique sur le fait que les sols recevant des effluents d’élevage émettent moins de N2O que ceux recevant des engrais azotés inorganiques (Graham et al., 2017).
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Notes
← 1. Un acre est égal à 0.4 hectare.
← 2. Aussi appelée « culture dérobée ».
← 3. Définie comme la fraction des apports d’azote aux terres cultivées qui est absorbée par les cultures.
← 4. Solution liquide composée d’ammonium, de nitrate et d’urée.
← 5. Beaucoup de terres cultivées drainées au moyen de tuyaux sont situées dans le bassin du Mississippi, ce qui n’est pas sans conséquence pour l’hypoxie dans le golfe du Mexique.
← 6. Un bioréacteur est une structure installée à l’extrémité d’un réseau de drainage que l’on remplit de copeaux de bois ou d’une autre matière et qui favorise la dénitrification (Christianson et al., 2012).
← 7. Ces quatre États ont été sélectionnés parce qu’ils présentent une large diversité de conditions de croissance et que les données nécessaires à l’exécution du modèle NLEAP existaient déjà.
← 8. Par exemple, dans le bassin du Mississippi supérieur, étant donné la panoplie des systèmes de gestion en place, les pertes totales d’azote dans l’environnement à partir des champs s’élevaient à environ 39 livres par acre en moyenne (USDA-NRCS, 2012c). Ce total se répartissait comme suit entre les différentes voies de transfert : 6.9 livres/acre pour la volatilisation, 2.3 livres/acre pour la dénitrification, 2.1 livres/acre pour les sédiments éoliens, 8.8 livres/acre pour le ruissellement de surface et 18.7 livres/acre pour les écoulements hypodermiques.
← 9. Le rapport du phosphore à l’azote dans les effluents d’élevage étant supérieur à celui dont ont besoin les végétaux, le respect d’une norme d’épandage d’azote n’empêche pas la persistance d’épandages excessifs de phosphore.
← 10. Aux États-Unis, le durcissement progressif des normes d’émission de NH3 imposées au secteur porcin a entraîné une hausse des épandages excessifs d’azote dans les champs (Aillery et al., 2005).