2. Encourager la diffusion d’une culture de l’égalité entre les femmes et les hommes

La promotion de l’autonomisation économique des femmes (AEF) ne peut être dissociée de l’analyse des normes et stéréotypes de genre. En influençant le rôle et statut des femmes et des hommes dans la société et la famille, elles jouent un rôle central dans leurs décisions économiques. Les normes sociales défavorables à l’égalité peuvent compromettre la mise en œuvre des réformes juridiques et politiques publiques, perpétuant le statu quo. La diffusion d’une culture de l’égalité au sein de la société et de la famille fait donc partie intégrante de toute stratégie visant à accroitre la contribution économique des femmes. L’école, les leaders communautaires et les médias en sont des alliés incontournables.

Au Maroc, le second plan gouvernemental pour l’égalité (PGE II) a intégré le rôle essentiel du changement des mentalités dans la réalisation des objectifs de développement inclusif à travers son axe « diffusion de la culture de l’égalité et lutte contre les discriminations et les stéréotypes basés sur le genre ». La Commission du Nouveau Modèle de Développement fait également référence aux normes discriminatoires : « les représentations pèsent également sur la sphère sociale et contribuent à entretenir une primauté de normes qui limitent l’épanouissement individuel et empêchent l’autonomisation. […] Ces pesanteurs sont en porte-à-faux avec le contexte actuel marqué par une appétence pour les libertés et une forte demande d’autonomisation (empowerment) et de reconnaissance » (Commission Spéciale pour sur le Modèle de Développement, 2020[1]). De même, le second pilier de la stratégie Green Inclusive Smart Social Regeneration (GISSR) du ministère de la Solidarité, de l’Insertion Sociale et de la Famille (MSISF) définit la mobilisation sociale en faveur de l’égalité comme un axe stratégique majeur. Les réformes juridiques, les campagnes de sensibilisation et de formation à l’égalité femmes-hommes, la lutte contre les stéréotypes dans les médias et manuels scolaires sont autant d’initiatives mises en place par les autorités marocaines pour assurer le soutien de la population envers sa politique d’AEF - même dans les communautés les plus réfractaires au changement (Section ‎2.2). En témoigne le changement d’attitude envers la capacité des femmes à être d’aussi bons dirigeants politiques que les hommes : seul 19.5 % de la population marocaine interrogée rejetait la supériorité des hommes à ce sujet en 2004, contre 57.2 % en 2022 (Haerpfer et al., 2022[2]).

Le changement social s’est amorcé : les normes de genre conservatrices laissent peu à peu place à une culture de l’égalité. L’idée que l’AEF n’entrave en rien les opportunités d’emploi des hommes ou le bien-être de la famille – mais au contraire y contribue - est de plus en plus partagée au Maroc.

Cependant, persistent, dans certaines régions et groupes de la société marocaine, des normes sociales définissant la sphère publique - en particulier les sphères économiques et politiques - comme le domaine des hommes, et la sphère privée comme celle des femmes. Hommes et femmes sont alors soumis à une pression extérieure qui les mène parfois à se comporter à l’encontre de leur propre valeur égalitariste. En découle une division sexuée du travail où les hommes - principaux pourvoyeurs de la famille - occupent les emplois rémunérés, et les femmes - principales responsables de l’entretien du foyer – sont dévouées aux tâches domestiques et de soins non rémunérés (Section ‎2.1).

En outre, alors que la Constitution de 2011 établit l’égalité entre les femmes et les hommes, certaines normes discriminatoires sont retranscrites dans le cadre juridique marocain et notamment dans le droit de la famille, reléguant les femmes à leur statut de dépendance envers les membres masculins du ménage, parfois même associé au statut du mineur.

C’est dans ce contexte de Maroc a deux vitesses que ce chapitre analyse l’impact des facteurs sociaux-culturels sur la stratégie d’AEF. S’appuyant sur les exemples de bonnes pratiques observées dans les pays OCDE et de la région MENA, ce chapitre offre aux parties prenantes marocaines des propositions visant à accélérer la diffusion d’une culture de l’égalité (Section ‎2.3), telles que :

  • Établir un cadre juridique promulguant l’égalité.

    • Réviser le code de la Famille - la Moudawana - : interdire le mariage des mineurs et garantir l’égalité des droits successoraux et de garde parentale.

    • Instituer la primauté du droit statutaire sur le droit coutumier.

  • Faire de toutes les parties prenantes des alliés de l’AEF :

    • Renforcer l’engagement les hommes pour assurer une distribution égalitaire des responsabilités au sein de la famille.

    • Encourager la visibilité de modèles positifs ou « role model ».

    • Travailler au niveau territorial et local avec les organisations et leaders communautaires.

    • Faire du système éducatif un vecteur de transmission intergénérationnelle des principes d’égalité.

    • Mobiliser les médias dans la mise en œuvre de la stratégie d’AEF.

  • Collecter régulièrement des données budget-temps et valoriser la contribution non rémunérée des femmes à l’économie.

Pour être efficaces, les incitations mises en place par les autorités marocaines du côté de l’offre de travail pour attirer et retenir plus de femmes sur le marché du travail, ou du côté de la demande pour amener le secteur privé à embaucher plus de femmes, doivent s’adapter aux normes socio-culturelles locales. De plus, anticiper l’acceptation ou le rejet d’une réforme juridique ou d’une politique publique par les citoyens est une étape importante du processus démocratique, surtout lorsque celui-ci suppose une transformation sociale. Si les réformes relatives à la promotion de l’AEF peuvent apparaitre comme nécessaires aux yeux du législateur ou du décideur politique qui en est à l’origine, il ne s’impose parfois pas avec autant d’évidence à l’ensemble de la population.

C’est la raison pour laquelle la mise en œuvre des politiques d’AEF doit s’appuyer sur une bonne compréhension des rôles traditionnels des femmes et des hommes au sein de la société et de la famille, et de ce fait des normes et stéréotypes de genre. Celle-ci nécessite la production de données sensibles au genre innovantes, telles que les données attitudinales – mesurant les attitudes et opinions de la population - ou les enquêtes budget-temps.

Si ces données sont disponibles au Maroc, elles ne sont pas toujours mises à jour régulièrement ou représentatives de la population marocaine. Ainsi, l’analyse qui suit s’appuie sur des données attitudinales collectées en 2021 sur l’ensemble du territoire, mais aussi en 2016 dans la région de Rabat-Salé-Kénitra1 et une enquête budget-temps menée en 2011-12, et doit, de ce fait, être nuancée. En effet, les bouleversements liés à la pandémie du Covid-19 ou de la guerre en Ukraine ont pu largement affecter les perceptions de la population Marocaine envers le rôle économique des femmes ainsi que la répartition des tâches domestiques au sein des ménages.

Cependant, en plus d’être les seules disponibles, les données utilisées ci-dessous restent pertinentes et offrent un cadre d’analyse indispensable à la mise en œuvre du PGE III et de la stratégie GISSR. Il est important de noter que la plupart des pays ou organismes qui collectent ce type de données – cruciales pour l’analyse genre – le font tous les dix ans, du fait de leur coûts et des changements marginaux observés (United Nations Statistics Division, 2021[3]).:

  • En France, par exemple, entre 1986 et 2010 (date de la dernière enquête), les emplois du temps des hommes et des femmes se sont légèrement rapprochés, bien qu’ils restent fortement différenciés et la spécialisation sexuée des tâches domestiques demeure très prégnante (Roy, 2019[4]).

  • De même, les attitudes discriminatoires sont légèrement moins répandues entre la sixième (2010-2014) et la septième (2017-2022) vague de l’enquête sur les valeurs mondiales mais le changement reste marginal Par exemple, 60.6 % et 56.2 % de la population souhaitait donner la priorité aux hommes dans un contexte de pénurie d’emploi, soit un écart de 4 points de pourcentage entre les deux vagues (Haerpfer et al., 2022[2]).

Des efforts de pédagogie et de communication ont été déployés par le gouvernement marocain et la société civile pour expliquer l’importance de l’égalité femmes-hommes pour la justice sociale et le développement économique. Ceux-ci se sont traduits sur le terrain par un soutien croissant aux mesures pro-actives favorisant l’égalité et l’autonomisation des femmes (Graphique ‎2.1) :

  • En témoigne les résultats de l'enquête IMAGES menée dans la région de Rabat-Salé-Kénitra en 2016 : 56 % des hommes et 87 % des femmes interrogés s’accordaient à dire que davantage de travail et d’efforts devraient être allouer à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes (Hamdouch et al., 2018[5]). Des résultats comparables ont été observés dans les autres pays de la région où cette étude a été menée : 73 % des Égyptiennes et 58 % des Égyptiens, 87 % des Libanaises et 68 % des Libanais, 87 % des Palestiniennes et 75 % des Palestiniens soutenaient cette allégation (ONU Femmes/Promundo-US, 2017[6]).

  • Un soutien important est accordé au système de quotas mis en place au Maroc assurant une meilleure représentation féminine au sein des conseils municipaux et au Parlement. Par exemple, 48.1 % des hommes et 59.8 % des femmes interrogés en 2016 étaient favorables aux quotas pour les femmes au sein du Parlement ou des cabinets ministériels. De même, 53.8 % des hommes et 61.3 % des femmes soutenaient l’établissement de telles mesures dans les universités ; 48.8 % et 60.8 % des répondants de sexe masculin et féminin approuvaient la discrimination positive visant à accroitre le nombre de sièges réservés aux femmes dans les postes de direction (Hamdouch et al., 2018[5]).

  • La population marocaine défend les grands principes liés à l’égalité professionnelle et salariale établis par le code du travail marocain. En effet, huit hommes sur dix et neuf femmes sur dix revendiquaient des salaires égaux pour un même poste sans discrimination basée sur le sexe. De manière similaire, plus de 90 % des répondants étaient favorables à une législation pénalisant le harcèlement sexuel dans les lieux publics (Hamdouch et al., 2018[5]).

Cependant, des réticences persistent aussi bien dans la population masculine que féminine. L’adéquation entre les valeurs égalitaristes et les valeurs traditionnelles du Maroc reste une source de questionnement. En effet, le même sondage indique que la majorité de la population marocaine – 50 % des hommes et 48 % des femmes et - jugeaient que l’idée de l’égalité femmes-hommes ne fait pas partie des « traditions et de la culture marocaine » (Hamdouch et al., 2018[5]). Cette perception est assez répandue dans la région MENA : une proportion similaire de la population interviewée partageait ce sentiment en Égypte (52 % des hommes et 60 % des femmes), et en Autorité palestinienne (59 % des hommes et 54 % des femmes), contrairement au Liban (32 % des hommes et 65 % des femmes) (ONU Femmes/Promundo-US, 2017[6]).

Par ailleurs, certaines pratiques discriminatoires continuent d’être largement soutenues par la population – aussi bien masculine et féminine – témoignant de l’enracinement du système patriarcale et de la nécessité de définir l’égalité à l’échelle nationale. C’est le cas des dispositions légales relatives au droit d’héritage :

  • Alors que le principe d’égalité entre hommes et femmes a guidé la réforme du Code de la famille en 2004 et de la Constitution en 2011, l’égalité des droits successoraux reste un sujet sensible au Maroc. Comme dans les autres pays de la région MENA (La Banque mondiale, 2021[7]), l’homme perçoit de jure le double de la part d’une femme (Article 342 du code de la Famille). En outre, les inégalités liées à l’accès à l’héritage au Maroc sont exacerbées par la règle du ta’sib, un héritage par agnation ou parenté par les mâles, inscrite dans le Code de la famille (Article 349). Celle-ci prévoit que les plus proches parents d’un défunt qui n’a pas de fils deviennent ses héritiers, tels que ses frères et cousins germains (Code de la Famille, 2004[8]).

  • Cette règle trouve ses racines dans une conception traditionnelle des rôles de genre, où seuls les hommes avaient des obligations et des responsabilités dans la prise en charge de la famille, et où l’activité économique des femmes se restreignaient aux emplois non rémunérés dans les entreprises ou sur les terres familiales. À travers l’héritage, c’est l’accès aux ressources soutenant l’activité économique des femmes qui est en jeu. Le patrimoine terrien, foncier ou financier permet non seulement d’accroitre la richesse de ses détenteurs, mais aussi leurs capacités d’endettement et d’investissement. Ainsi, les inégalités dans les droits successoraux perpétuent les inégalités financières et sociales entre les femmes et les hommes (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]).

  • Pour autant, la population ne semble pas être prête à réformer le cadre juridique à ce sujet. Une enquête publiée en mai 2022 par l’Organisation marocaine des droits humains et l’Association des femmes marocaines pour la recherche et le développement indiquait que 44 % des personnes (sur 1 200 interrogées) rejetaient toute modification de la loi successorale et 82 % affirmaient être favorables à la règle selon laquelle « un homme a une part équivalente à celles de deux femmes ». Dans la région, seuls les Libanais exprimaient une vision réformatrice : 67 % des hommes et 81 % des femmes seraient favorables à une révision du cadre légal (ONU Femmes/Promundo-US, 2017[6]).Une enquête qualitative suggère que si la religion est souvent utilisée pour défendre la pratique de lois successorales inéquitables, les intérêts économiques restent la raison principale.

Ces opinions contrastées envers l’égalité femmes-hommes sont confortées par une perception négative des implications des politiques en faveur de l’égalité sur la dynamique des relations entre les femmes et les hommes. En effet, l’égalité professionnelle et salariale remet en cause les relations de pouvoir au sein des systèmes économiques et politiques et dans les entreprises, mais aussi au sein des ménages. De ce fait, certains émettent l’idée que les privilèges accordés par le système patriarcale pourraient être affectés par exemple par une meilleure représentation des femmes dans les conseils d’administrations, les postes à responsabilités, les secteurs considérés comme « masculins ». Au Maroc, quatre hommes sur dix (41 %) – contre moitié moins de femmes (19 %) - pensaient qu’accorder plus de droits aux femmes signifie que les hommes en perdent (Hamdouch et al., 2018[5]). Ce sentiment est plus répandu au Maroc qu’au Liban (10 % des femmes et 24 % des hommes) ou dans l’Autorité palestinienne (18 % des femmes et 35 % des hommes) (ONU Femmes/Promundo-US, 2017[6]).

Force est de constater que le temps est une ressource limitée. Ainsi, chaque minute supplémentaire allouée aux activités productives non rémunérées - telles que les tâches ménagères et de soin apporté aux autres membres du ménage – réduit le temps disponible pour s’investir dans des activités génératrices de revenu.

De ce fait, les disparités entre les femmes et les hommes dans le temps consacré aux tâches domestiques contribuent à expliquer l’exclusion de certaines femmes du marché du travail. Nombre de femmes sont sans emploi, dans des contrats à temps partiels ou profession à responsabilités limitées par manque de temps. En 2018, 606 millions de femmes en âge de travailler dans le monde se sont déclarées indisponibles pour un emploi ou ne cherchant pas d'emploi en raison de leurs responsabilités domestiques non rémunérées, contre 41 millions d'hommes (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]).

La dernière enquête budget-temps disponible au Maroc a été menée en 2011-2012. Les résultats dessinent un partage sexué de la charge de travail plaçant les rapports économiques femmes-hommes dans le schéma classique de « l’homme gagne-pain et de la femme au foyer » (Graphique ‎2.2) :

  • Les hommes consacraient quatre fois plus de temps au travail professionnel que les femmes et sept fois moins aux activités domestiques, sachant que 95 % des femmes y contribuent contre 45 % des hommes (HCP, 2012[10]). Des données similaires sont observées dans les rares pays de la région ayant des enquêtes budget temps. Sur la même période, dans l’Autorité palestinienne, par exemple, 91 % des femmes participaient aux activités domestiques et de soin non rémunéré contre 45 % d’hommes, y dévouant sept fois plus de temps (Palestinian Central Bureau of Statistics, 2013[11]). De même, les femmes algériennes et égyptiennes dépensaient respectivement six et neuf fois plus de temps que les hommes aux tâches ménagères en 2012 et 2015 (OCDE, 2023[12]).

  • Les Marocaines de plus de 15 ans dévouaient près d’une heure et demie par jour au travail professionnel - contre cinq heures et demie pour les hommes -, et cinq heures aux travaux domestiques et de soin donné aux autres membres du ménage - contre une demi-heure pour les hommes. Ainsi, près de 80 % du temps de travail des femmes était dédié à des activités productives mais non rémunérés - contre 12 % pour les hommes (HCP, 2012[10]). À titre de comparaison, dans les pays OCDE les femmes consacrent en moyenne quatre heures et demie aux tâches domestiques - contre deux heures et quart pour les hommes – et trois heures et demie au travail marchand – contre cinq heures vingt pour les hommes (OCDE, 2023[12]).

Ces inégalités se transmettent dès le plus jeune âge. En effet, les jeunes marocaines âgées de 7 à 14 ans passaient une heure et quart à effectuer des tâches ménagères - contre 22 minutes pour les jeunes marocains du même âge (HCP, 2012[10]). De même, 80 % des jeunes Palestiniennes âgées de 10 à 17 ans participaient aux tâches domestiques et 13.7 % aux tâches de soin non rémunérées contre 50.5 % et 5.7 % des garçons, respectivement (Palestinian Central Bureau of Statistics, 2013[11]).

Cette division sexuée du travail au sein de la famille est largement influencée par une vision patriarcale des rôles au sein du ménage (Hamdouch et al., 2018[5]) et (Haerpfer et al., 2022[2]):

  • Plus des deux-tiers de la population marocaine considèrent que les enfants de moins de 6 ans souffrent du fait d’avoir une mère qui travaille, contre moins de la moitié de la population mondiale (Haerpfer et al., 2022[2]).

  • Un peu plus de 70 % des hommes et 49 % des femmes affirmaient que la responsabilité la plus importante de la femme est de s’occuper de la maison et que l’homme devrait avoir le dernier mot dans les décisions du ménage (Hamdouch et al., 2018[5]).

  • Une proportion significative de la population marocaine interrogée – 37 % des hommes et 24 % des femmes - déclaraient qu’il est « honteux » que les hommes s’occupent des enfants ou effectuent des tâches domestiques (Hamdouch et al., 2018[5]).

Cette vision binaire est renforcée dans les situations d’instabilité économique : plus de la moitié de la population marocaine sondée déclarait que les emplois devraient être donnés en priorité aux hommes dans un contexte de pénurie d’emplois - contre un tiers au niveau mondial, plus de deux-tiers au Liban et en Tunisie, plus des trois-quarts en Libye et en Jordanie, et près de neuf dixième en Égypte (Haerpfer et al., 2022[2]).

Les normes et stéréotypes de genre affectent non seulement la capacité des femmes à entrer sur le marché du travail, mais aussi les types d’emploi ou de secteur dans lesquels elles peuvent travailler en tant qu’employée ou entrepreneure. Ainsi, elles justifient une ségrégation professionnelle genrée qui tend à reléguer les femmes dans certains métiers traditionnellement considérés comme féminin (sage-femme, infirmière, institutrice, etc.) et des emplois avec des niveaux de responsabilités plus faibles, et donc payés des salaires inférieurs. D’ailleurs, 38.9 % des Marocains interrogés en 2021 (hommes et femmes confondus) déclaraient que les hommes font de meilleurs chefs d'entreprise que les femmes contre 30 % de la population mondiale, et 47.2 % pensent qu’il est indécent pour une femme de gagner plus que son mari, contre 33.7 % au niveau mondial (Haerpfer et al., 2022[2]).

Les moyennes nationales cachent une réalité bien plus complexe. Les femmes ne forment pas un groupe homogène et l’intersection de plusieurs facteurs crée une variété des situations des femmes face au travail domestique. En effet, les différents niveaux de développement, d’accès aux services marchands (garde d’enfant, restauration, livraison de courses, etc.) et aux infrastructures permettant de faire des économies de temps (eau courante et l’électricité, machines à laver, lave-vaisselle, robots ménagers, etc.) – impactent significativement le temps alloué à certaines tâches et leur pénibilité. Le système de soin des personnes âgées, malades ou personnes en situation de handicap, l’offre préscolaire et scolaire jouent ici encore un rôle prépondérant, exacerbé par un contexte de sociétés vieillissantes. De même, le recours au travail domestique - formel ou informel – varie considérablement d’un ménage à l’autre. Les enquêtes emploi du HCP montre en effet la fracture sociale à ce sujet : les ménages aisés urbains emploient fréquemment des personnes à domicile issues des zones rurales plus défavorisées (HCP, 2012[10]).

Ces variations nécessitent d’être prise en compte pour adapter les politiques publiques aux divers besoins des populations, notamment au Maroc où les inégalités territoriales et sociales créent des écarts importants dans le temps alloué aux tâches domestiques et de soin non rémunéré. L’enquête budget-temps de 2011-2012 montre par exemple que (Graphique ‎2.3) :

  • Les femmes octroyaient cinq heures par jour aux activités domestiques dans les zones rurales contre quatre heures dans les zones urbaines. Ces chiffres variaient de 43 à 30 minutes pour les hommes.

  • Les Marocaines sans diplôme y dévouaient cinq heures et quart contre trois heures et demie chez les diplômées du supérieur (respectivement 49 et 54 minutes pour les hommes).

  • Les femmes sans enfants de moins de 15 ans y passaient moins de de quatre heures contre plus de six heures pour celles ayant trois enfants et plus (respectivement 40 et 50 minutes pour les hommes).

  • Les femmes mariées dédiaient près de six heures aux tâches ménagères contre trois heures et demie pour les célibataires (respectivement 52 et 27 minutes pour les hommes).

L’accès universel à l’éducation est un objectif de l’Agenda 2030 auquel le Maroc a dédié des efforts considérables. Force est de constater les résultats positifs à cet égard. En effet, les taux de scolarisation des filles se sont améliorés à tous les niveaux (HCP, 2022[13]) (Ministère de l’Education Nationale, du Préscolaire et des sports, 2023[14]):

  • L’accès universel à l’éducation primaire semble atteint en 2023 avec des taux de scolarisation bruts de 100 % pour les filles et les garçons, alors que 80.6 % des filles et 88.4 % des garçons âgés de 6 à 11 ans étaient scolarisés en 2000.

  • Presque toutes les filles (99.4 %) entraient au collège en 2023, contre une sur deux en 2000.

  • Alors que moins d’un tiers des filles fréquentaient le lycée en 2000, plus des trois-quarts des filles âgées de 15 à 17 ans étaient scolarisées en 2023.

  • Ainsi, les filles représentaient 49.5 % des élèves du préscolaire, 48.1 % des effectifs du primaire, 47.5 % du secondaire collégial et 52.8 % des élèves du secondaire qualifiant en 2023.

  • C’est dans l’enseignement supérieur que les progrès sont les plus importants : 51.7 % des étudiants fréquentant les bancs des universités marocaines étaient des étudiantes en 2021, contre 41.2 % en 2000 ; 59.1 % des inscriptions dans les instituts et écoles supérieures concernaient des jeunes femmes en 2021, contre seulement 27.6 % en 2000.

D’après les données du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) collectées en 2018,2 au Maroc comme ailleurs, les filles réussissent mieux à l’école. Par exemple, ces dernières ont de meilleurs résultats en lecture et en science, et des performances similaires en mathématiques. Le score moyen des filles en compréhension de l’écrit est de 373, alors que celui des garçons s’établit à 347, soit une différence significative de 26 points, l’équivalent d’une année de scolarité. Cependant, les résultats des Marocaines sont largement inférieurs à la moyenne des filles des pays de l’OCDE, et se classent dans les dix derniers parmi les 69 pays participants à PISA 2018. Par ailleurs, dans presque tous les systèmes éducatifs, y compris au Maroc, les filles ont exprimé une plus grande peur de l'échec que les garçons, et cet écart entre les sexes était considérablement plus important parmi les élèves les plus performants (OECD, 2020[15] ; Instance Nationale d’Évaluation, 2021[16]).

L’amélioration des taux de scolarisation au Maroc est entachée par de forts taux de décrochage scolaire. Plus d’un million des 13-18 ans est en dehors du système éducatif formel, dont une partie non négligeable de filles. Si, l’ensemble des filles scolarisées la première année de primaire accédait à la dernière année de ce cycle en 2023, leur taux de transition effective de l'enseignement primaire au premier cycle de l'enseignement secondaire général est plus faible que celui des garçons (90.2 % contre 88.2 % en 2023) (Ministère de l’Education Nationale, du Préscolaire et des sports, 2023[14]). C’est ensuite que la situation des jeunes filles devient préoccupante : près d’un quart des collégiennes et la moitié des lycéens sortaient du système éducatif avant d’avoir terminé l’année en cours, en 2020 (HCP, 2022[17]).

Par conséquent, les jeunes femmes représentaient plus des trois-quarts %des Marocains de 15 à 24 ans qui ne sont ni en éducation, ni en emploi, ni en formation (NEET) en 2022. Le même année, 37.3 % des femmes âgées de 15 à 24 ans étaient considérées comme des NEET, contre trois fois moins de jeunes hommes (13.5 %) (HCP, 2022[17]). Ces disparités de genre ont des conséquences de long terme particulièrement importante chez les jeunes femmes. Parmi celle considérées comme NEET en 2012, 84 % le sont restées en 2019, 7 % ont décroché un emploi et 9 % ont repris leurs études. En revanche, seulement 30 % des jeunes hommes NEET en 2012 le sont restés en 2019, 45 % sont devenus des actifs occupés et 25 % ont repris les études ou suivent une formation professionnelle (Graphique ‎2.4). Ces données doivent être comprises au prisme de l’intersectionnalité. En effet, il apparaît que l’essentiel des NEET de longue durée sont des femmes vivant en milieu rural, dans des ménages parmi les 20 % les plus pauvres (UNICEF/ONDH, 2022[18]).

Le décrochage scolaire au sein des filles peut être expliqué par plusieurs facteurs et notamment les mariages et grossesses précoces. En effet, les infrastructures scolaires n’étant pas adaptées aux besoins des mères adolescentes, celles-ci sont incitées à quitter l’école et n’ont que peu d’incitations à y rester. Par exemple, l’obligation de scolarité jusqu’à 16 ans révolus peut être levée dans certains cas, y compris une dérogation pour mariage précoce (Observatoire National du Développement Humain, 2021[19]). L’âge légal de mariage est fixé à 18 ans pour les hommes et les femmes par l’article 19 du code de la Famille, et le Maroc a signé des accords internationaux interdisant le mariage des enfants.3 Cependant l’article 20 du Code marocain de la famille accorde le droit aux juges des affaires familiales d’autoriser le mariage de mineures, alors que l’article 16 reconnait les mariages coutumiers - ou dits par Fatiha – comme preuve légale de mariage s’ils sont déclarés dans les cinq ans (Code de la Famille, 2004[8]) et (UNICEF, 2017[20]). Entre 2011 et 2018, 85 % des dérogations pour mariage mineur(e) ont été approuvées, 94.8 % concernant des filles, dont 99 % étaient âgées entre 15 et 17 ans. Au total, 55.9 % de ces demandes étaient issues de zones rurales (CESE, 2019[21]).

La persistance des mariages précoces reste préoccupante. En 2020, 12 600 mariages de mineurs étaient célébrés au Maroc, représentant 6.5 % des unions enregistrées (HCP, 2022[17]). En 2018, 14 % des femmes marocaines âgées de 20 à 24 ans avaient été mariées avant 18 ans – contre 16 % en 2004 – sans compter les mariages coutumiers qui n’entrent pas systématiquement dans les statistiques officielles (ENPSF, 2018[22]). En effet, ceux-ci peuvent être scellés par la simple récitation de la Fatiha – sourate du Coran – sans la présence d’un adoul, ni d’un représentant de l’État, et donc sans reconnaissance par la loi.4 À titre de comparaison, on dénombrait 17 % de jeunes femmes de la même tranche d’âge mariées avant 18 ans en Égypte, 13 % dans l’Autorité palestinienne, 10 % en Jordanie et 4 % en Algérie en 2018 (UNICEF, 2020[23]).

L’égalité des droits est une condition sine qua none à la diffusion d’une culture de l’égalité, qui suppose en outre que chaque partie prenantes - juges, adouls5, organisation de la société civile, individus - en soit le garant.

Les formations aux problématiques genre doivent faire partie intégrante de l'éducation juridique afin de renforcer la sensibilisation aux droits des femmes parmi les juges et les professionnels du droit. En outre, des efforts sont nécessaires pour assurer que les femmes et les hommes connaissent leurs droits et aient les moyens de les défendre (OCDE, 2017[24]).

Le rapport de l’OCDE de 2020 a notamment mis en exergue la réforme du Code de la Famille marocain de 2004 (Encadré ‎2.2) qui a permis de redéfinir le rôle des femmes dans la famille et la société (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]). Depuis, le Maroc a mis en place un certain nombre de révision de son cadre légal (présentées ci-dessous par ordre chronologique) qui garantissent non seulement les mêmes droits aux hommes et aux femmes, mais participent aussi à remettre en cause les stéréotypes de genres et pratiques discriminatoires qui réduisent les opportunités économiques des femmes. Ces réformes ont été assorties d’actions complémentaires pour assurer qu’elles se traduisent en réel changement dans le quotidien des femmes.

Les résultats PISA de l’OCDE montrent que si les systèmes éducatifs ont réalisé des avancées majeures pour ce qui est de réduire les écarts constatés entre filles et garçons en termes de résultats scolaires y compris au Maroc, un net fossé demeure entre eux sur le plan de l’orientation professionnelle, laquelle se détermine bien plus tôt qu’on ne le pense généralement. Un tel état de fait résulte en partie des préjugés entretenus, sciemment ou non, par les parents, les enseignants et les employeurs (OECD, 2020[15]).

La transmission d’une culture de l’égalité commence au plus jeune âge. Diffuser une culture de l’égalité, lutter contre toutes les formes de violence, contribuer à la mixité des filières de formation sont les principaux leviers que l’ensemble de la communauté éducative, de l’école à l’enseignement supérieur, doit activer dans les enseignements, les activités éducatives et la vie scolaire.

Les manuels scolaires – papiers ou digitaux - représentent un support incontournable de la lutte contre les préjugés et stéréotypes, et de la diffusion des valeurs humanistes et égalitaristes auprès des enseignants, des enfants et de leurs parents. Ceci contribue à donner à chacune et chacun les mêmes chances de réussite - objectif premier du projet académique.

Le Maroc est un pionnier de la lutte contre les stéréotypes de genre dans le système scolaire dans la région MENA. Le pays a participé à la création d’un kit d’outils de l’UNESCO pour la révision et l’adaptation des programmes d’enseignements. En effet, le conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a élaboré une vision stratégique « pour une école de l’équité, de la qualité et de la promotion 2015-2030 ». Certains points de la cible 4.76 de l’Objectif de Développement Durable 47, figurent dans les piliers de cette vision dont une recommandation consiste à « l’intégration de l’approche « valeurs et droits » dans les curricula, programmes et les ressources didactiques [...] le renforcement de l’éducation à l’égalité des genres et à la lutte contre la discrimination, les stéréotypes et les représentations négatives des femmes dans les programmes et manuels scolaires ».

La stratégie marocaine repose sur l’évaluation critique des manuels scolaires, l’éducation inclusive et une diffusion large de guides, accompagnée par des séminaires de formation. Dès 2016, le ministère de l’Éducation nationale marocain a entrepris de supprimer les préjugés sexistes dont étaient truffés les manuels scolaires, les illustrations négatives des filles et des garçons, des femmes et des hommes, mais aussi des personnes en situation de handicap. En outre, des instances chargées du suivi des aspects relatifs aux valeurs et à la promotion de l’éducation inclusive, et des droits humains ont été établies - tels que le comité permanent des programmes, le comité des valeurs, les cellules genre mises en place par le ministère de l’Éducation Nationale du Préscolaire et des sports au niveau central et régional ou encore la cellule centrale de l’éducation aux droits de l’homme.

Cependant, les entretiens menés lors de la présente étude fait état de résultats mitigés : certains contenus continuent de présenter des textes et illustrations discriminant les femmes. À cet égard, le Mémorandum adressé au ministre de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports en décembre 2022 par l’Association démocratique des femmes au Maroc (ADFM), soutient la mise en place d’une stratégie globale pour la promotion de la culture de l’égalité à travers la suppression de tous les préjugés et des stéréotypes sexistes dans tous les manuels scolaires, et la révision de la façon d’enseigner et du contenu des programmes.

La création d’un environnement propice à l’AEF s’appuie sur l’absence de risque de violence, et ce quel que ce soit son auteur (mari/conjoint, professeur, collègue/camarade, etc.), sa forme (physique, sexuelle, psychologique, économique, etc.) ou l’endroit où l’agression a lieu (domicile, lieu de travail, école, transport, espace public, etc.). En effet, les victimes de harcèlement, d'abus sexuels et physiques et de viol souffrent physiquement et mentalement. En plus de ces conséquences, la violence dans les espaces domestiques et publics, à l'école et au travail, sape les opportunités éducatives et économiques des femmes qui en souffrent. En premier lieu, cela reflète le fait qu'elles s'absentent plus fréquemment de l'école ou de leur lieu de travail pour éviter des situations dangereuses, ce qui affecte directement les résultats scolaires, la productivité au travail et le bien-être. Un pourcentage élevé de filles qui vivent un épisode traumatique de cette nature décident de changer d'école ou de quitter complètement le système éducatif. Pour les femmes qui finissent par quitter leur emploi, du fait des violences qu’elles subissent sur leurs lieux de travail, cette décision a des répercussions sur les carrières et les opportunités d'emploi. La décision forcée de restreindre les déplacements du fait de violences dans les transports publics limite également les opportunités économiques des femmes (OIT, 2021[27]).

Les données sur la violence à l’école ou sur le lieu de travail sont rares. Elles montrent pourtant que le phénomène est répandu. Au Maroc, c’est le cas de l’évaluation des violences en milieu scolaire réalisée à la fin du premier trimestre de l’année scolaire 2021-2022 par le Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique à travers l’Instance Nationale d’Évaluation en partenariat avec l’UNICEF. Ainsi, 10.3 % des filles scolarisées indiquaient avoir été souvent insultés, 15.7 % affirmaient avoir été victime d’ostracisme, et 9.2 % confrontées à la violence physique de manière répétée. Celle-ci est principalement le fait des enseignant (54.9 %), des garçons de l’école (32 %) et, dans une moindre mesure, des filles de l’école (23.3 %). Il est important de noter que les personnes rencontrées sur le chemin de l’école restent une source potentielle de violence physique (9.3 %). En ce qui concerne les cas de cyberviolence, 6.7 % des filles affirment avoir été victimes de diffusion, via internet ou par message textuel, de photos, vidéos ou informations intimes les concernant.8 Conformément aux orientations internationales9, le Maroc avait publié une Stratégie nationale de lutte contre la violence fondée sur le sexe en 2004 renforcée par les PGE I et II (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]). Depuis, le pays a renforcé son arsenal juridique – composé du Code de la Famille et du Code Pénal10 - en intégrant plusieurs types de violence à caractère sexiste envers les femmes : corporelles, sexuelles, psychologiques et économiques. Ainsi, la loi 103-13 adoptée en 2018 (Bulletin Officiel, 2018[28]):

  • Criminalise « [t]out acte matériel ou moral ou abstention fondés sur la discrimination en raison du sexe entraînant pour la femme un préjudice corporal, psychologique, sexuel ou économique » (article 1).

  • Alourdit les peines encourues pour des actes qualifiés de violents ; soutient la création des commissions nationale, régionale et locale pour prendre en charge les femmes victimes de violence (article 4).

  • Incite les autorités publiques à élaborer des programmes de prévention (article 17) aux risques des violences faites aux femmes et de sensibilisation aux droits des femmes en la matière.

Cependant, certaines lacunes sont à noter. En effet, la loi ne criminalise pas le viol conjugal (OCDE, 2023[26]). En outre, le rôle de la police, des procureurs ou des juges d’instruction dans le traitement des affaires de violences envers les femmes gagnerait à être mieux définis, renforcé par des formations appropriées et assorti d’actions complémentaires pour assurer la mise en œuvre de la loi (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]).

En 2019, la Commission nationale pour la prise en charge des femmes victimes de violences (CNFV) a été créée afin :

  • de renforcer l’institutionnalisation des mécanismes de coordination entre les acteurs œuvrant pour la lutte contre la violence à l’égard des femmes

  • d’assurer la communication et la coordination, au niveau national, entre les interventions des départements gouvernementaux et des administrations centrales concernés

  • de contribuer à la mise en place de mécanismes visant à améliorer le fonctionnement des cellules nationales qui prennent en charge les femmes victimes de violence

  • de préparer des rapports et de soumettre des propositions pour juguler le phénomène des violences subies par les femmes

  • de renforcer les mécanismes de partenariat et de coopération entre les commissions régionales et locales, les associations de la société civile et les autres parties intervenantes.

La CNFV a contribué aux changements des attitudes envers la violence faites aux femmes à travers la production de vidéos de sensibilisation (sur la loi 103.13 et le travail de la Commission) et d’un guide sur la prise en charge des femmes victimes de violence.

La Politique nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes et filles à l’horizon 2030 élaborée par le MSISF adoptée lors du conseil de gouvernement du 4 juin 2021 vise à accompagner la loi 103-13 afin de renforcer la protection des femmes et honorer les divers engagements internationaux. Elle se base sur une série de consultations avec les secteurs gouvernementaux concernés, les organisations de la société civile, la Commissions de prise en charge des femmes victimes de violence et autres mécanismes de coordination aux niveaux régional et local. Cette politique s’appuie sur quatre axes : la prévention, la protection, le prise en charge et la poursuite judiciaire. Une attention particulière a été donnée aux femmes réfugiées, migrantes et victimes d’exploitation sexuelle ou de traite des êtres humains.

Une particularité de cette politique tient à la prise en compte des facteurs socio-culturels dans la persistance des actes de violences envers les femmes. Elle cherche à changer les normes sociales et culturelles marquées par la violence et toutes les pratiques fondées sur des rôles stéréotypés pour les hommes et les femmes. Il persiste en effet au sein de la population marocaine une forte conviction que les femmes devraient tolérer des traitements violents de la part de leur conjoint pour maintenir l’unité de la famille : 60 % des hommes et 46 % des femmes interrogés dans le cadre de l’étude IMAGES sur « les masculinités et l'égalité des sexes » menée en 2016 dans la région Rabat-Salé-Kénitra partageait cette opinion. Les trois-quarts des hommes pensaient qu’il existe des cas dans lesquels une femme mérite d’être battue, notamment du fait de tenues provocantes (Hamdouch et al., 2018[5]). De même, les résultats de l'enquête mondiale sur les valeurs montrent que 57 % des personnes consultées justifiaient le recours à la violence contre sa conjointe en 2021, une augmentation de 23 et 16 points de pourcentage par rapport à 2009 (34 %) et 2014 (41 %), respectivement (Haerpfer et al., 2022[2]).

En outre, deux conventions de partenariat ont été signée le 8 mars 2023 entre les secteurs publics et privé, économique et institutionnel. Entérinée par le ministre de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, la première vise à engager l’ensemble des acteurs dans la lutte contre le harcèlement sexuel en milieu professionnel. La seconde concerne l’utilisation des technologies et l’action de proximité dans la lutte contre le harcèlement sexuel.

Les parties prenantes interviewées dans le cadre de la présente étude ont accueilli favorablement la politique nationale de lutte contre la violence et la prise en compte des facteurs socio-culturels. Cependant, elles ont soulevé le besoin urgent de traduire cette stratégie en action et d’assurer la mise en place d’un système de gouvernance garantissant sa réalisation.

L’économie sociale et solidaire revêt un grand potentiel pour l’AEF dans les zones rurales. Au Maroc, les coopératives agricoles et les organisations de femmes productrices, qui peuvent offrir des services de soutien à leurs membres et compléter les prestations de sécurité sociale fournies par l’État, sont largement développées. Le Plan Vert Maroc publié en 2014 comprend à cet effet un volet sur l’agriculture solidaire et les activités génératrices de revenus dont bénéficient principalement les femmes rurales (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]).

L’autonomisation des femmes rurales, s’appuie également sur l’égalité d’accès aux ressources productives et agricoles (Encadré ‎2.3). En effet, l’accès à la terre est essentiel dans les zones rurales où celle-ci est le bien le plus important de la famille, représentant non seulement la richesse d'une personne, mais aussi son pouvoir de décision dans la communauté, tout en offrant des garanties déterminant sa capacité d’emprunt (Holcombe, 2020[29]).

Au Maroc, l’article 49 du code de la Famille proclame de jure l’égalité d’accès à la propriété terrienne sur tout le territoire. Cependant, jusqu’à récemment, selon le droit coutumier marocain (« l’ôrf ») qui prévaut de facto dans certaines parties du pays, seuls les hommes avaient le droit d’utiliser les terres collectives qui représentaient en 2007 près de 15 millions d’hectares – soit 40 % des surfaces agricoles (La Banque mondiale, 2008[30]). Celles-ci se transmettaient entre les membres masculins d’une même famille âgés de plus de 16 ans. Lors des dernières années, une part importante de ces terres collectives a été transférée aux autorités régionales ou au secteur privé dans le cadre de projets de développement d'infrastructures et du tourisme (melkisation), en contrepartie de compensations financières ou parcelles de terrain11. Compte tenu de l’absence de droit foncier des femmes sur ces terres collectives, seuls les hommes percevaient ces contreparties, exacerbant la dépendance économique des femmes et les inégalités de genre dans les zones rurales (Berriane, 2015[31]).

Ces inégalités ont été dénoncées par le mouvement « Soulaliyate »12 conduit par des femmes de l’ethnie soulaliyate dès 2007. Elles ont obtenu gain de cause en 2020 à travers la réforme globale du régime foncier et la promulgation de trois nouvelles lois. Celles-ci incluent la loi n° 62-17 (Encadré ‎2.4) relative à la tutelle administrative sur les communautés Soulaliyates et la gestion de leurs biens adoptée en 2019 (remplace le Dahir du 27 avril 1919), qui stipule que les hommes et les femmes jouissent de façon égale des biens de la communauté et ont l'obligation de les protéger (article 6). En outre, elle met en place un organe représentatif « Nuwab » dans chaque communauté Soulaliyate composé d'hommes et de femmes élus (article 11). En résulte la participation des femmes aux organes de décisions, garantissant leur représentativité et la prise en compte de la problématique d’égalité des genres dans la gestion des terres collectives. Les femmes Soulaliyates ont ainsi reçu des terres ou une compensation financière en cas de melkisation ou de transfert de terres à des étrangers. Dans la tribu Ben Mansour par exemple, 160 femmes et 160 hommes ont reçu 6 300 MAD chacun (équivalents de 600 EUR) à titre de dédommagement.

Dans un contexte de déconcentration, l’ensemble des préfectures ont reçu des circulaires ministérielles afin que cette réforme soit mise en œuvre et que la participation des femmes soit garantie (Bulletin Officiel, 2019[32]). Un système de suivi a également été instauré en collaboration avec les Soulaliyates et les organisations de plaidoyer féminin. En outre, la commission du Nouveau Modèle de Développement préconise « la protection des droits liés au capital et au foncier notamment par la poursuite des initiatives de melkisation des terres collectives en faveur des femmes rurales en application de la loi 62-17 ».

Cette réforme marque un tournant pour l’autonomisation économique et la participation aux organes décisionnelles des femmes rurales. Cependant, la situation rappelle les difficultés créent par la coexistence d’un droit statutaire progressiste et d’un droit coutumier conservateur. Les divergences juridiques engendrent en effet des réalités différentes pour les femmes selon leur milieu de résidence et le type de droit régissant leurs communautés.

La transformation sociale nécessaire pour soutenir les politiques d’AEF au Maroc reste timide. Ceci tient notamment du caractère de long terme du changement qui requiert des efforts supplémentaires dans la mise en œuvre du PGE III et de la stratégie GISSR.

Les pistes de réflexion présentées dans cette section (Graphique ‎2.5) s’appuient sur la Recommandation de l’OCDE sur l’égalité femmes-hommes dans l’éducation, l’emploi et l’entrepreneuriat qui traite de cet aspect de manière transversale, ainsi que sur une étude comparative des bonnes pratiques observées dans les pays membres et partenaires (Annexe A).

Les discriminations légales, tels que le droit successoral marocain, institutionalisent les stéréotypes de genre et réduisent les opportunités d’implication des femmes dans l’économie. Il est donc important de promouvoir l’égalité des droits pour soutenir la diffusion d’une culture de l’égalité au Maroc. Ceci implique en outre que chacun connaisse ses droits, et donc un système de communication renforcée, mais aussi et surtout la primauté du droit statutaire sur le droit coutumier. Pour que le premier soit respecté, il est important de mettre en place des garde-fous et de s’assurer que son non-respect soit sanctionné par les autorités nationales, régionales et locales – autorités communautaires inclues. Réformes, pédagogie et sanctions sont donc les éléments essentiels d’une solution efficace.

La dernière analyse de l’OCDE publiée en 2020 sur l’impact des réformes sur l’AEF dans la région MENA démontre qu’un facteur de succès réside dans l’échelonnement des politiques d’AEF en vue d’une réforme juridique progressive, surtout si certains sujets sont sensibles (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]). C’est le cas de la révision du Code de la Famille et plus précisément des droits successoraux. Cette étude rappelle l’importance d’un engagement politique en faveur de la réforme au plus haut niveau. Dans son discours du trône fin juillet 2022, le roi Mohammed VI a ouvert la voie à une révision globale du Code pénal et du code de la Famille, dont les droits à l’héritage – pour instaurer davantage d’égalité entre les femmes et les hommes. De même, le Nouveau Modèle de Développement fait référence à la nécessaire révision des droits successoraux pour promouvoir l’égalité des droits et l’AEF (Commission Spéciale pour sur le Modèle de Développement, 2020[1]).

A été lancé fin septembre 2023, le processus de révision du Code de la Famille pour une durée de six mois. Les pistes de réformes proposées par l’OCDE incluent le mariage des mineurs, la représentation légale et les droits de garde des enfants mineurs, et la consécration de l’égalité femmes-hommes. Cette dernière appelle notamment à une relecture du concept coranique de Qiwâmah, ou autorité de l'époux, à la suppression des discriminations – notamment liée à la période de viduité ou Idda - et à un amendement des droits à l’héritage.

Si la loi régulant le mariage des mineurs ne discrimine ni les filles, ni les garçons, sa mise en pratique est à la défaveur des premières. En effet, les données présentées ci-dessus ont démontré le caractère courant des mariages de jeunes filles âgées de moins de 18 ans, et les conséquences néfastes sur leur accès à l’éducation.

La lutte contre les mariages et les grossesses précoces nécessite de supprimer l’autorisation exceptionnelle accordée par le juge d’autoriser le mariage de mineures promulguée par l’article 20 du code de la Famille. En outre, il est nécessaire d’accompagner cette réforme de campagnes de sensibilisation afin d’éviter les mariages coutumiers de mineurs.

Garantir l’égalité des droits des pères et des mères suppose d’amender les principes discriminatoires guidant la représentation légale de l’enfant mineur, sa tutelle et sa garde après divorce - et notamment dans le cas du remariage de la mère. En effet, dans le droit marocain, le père est par défaut le représentant légal de l’enfant et la mère n’obtient ce statut que suite au décès ou la perte de capacité de ce dernier (Art. 231). En outre, si l’article 164 du Code la Famille stipule que « [l]a garde de l'enfant incombe au père et à la mère tant que les liens conjugaux subsistent », l’article 175 indique que le remariage de la mère entraine la déchéance de son droit de garde, sauf dans les cas suivants :

  • « si l'enfant n'a pas dépassé l'âge de sept ans ou si sa séparation de sa mère lui cause un préjudice »

  • « si l'enfant soumis à la garde est atteint d'une maladie ou d'un handicap rendant sa garde difficile à assumer par une personne autre que sa mère »

  • « si le nouvel époux est un parent de l'enfant avec lequel il a un empêchement à mariage ou s'il est son représentant légal »

  • « si elle est la représentante légale de l'enfant ».

La consécration de l’égalité femmes-hommes appelle donc à la révision des articles définissant la représentation légale du mineur et sa tutelle, et gouvernant les droits de garde.

La réforme des droits successoraux promouvant l’égalité femmes-hommes suppose l’amendement des articles discriminatoires du code de la Famille et notamment ceux qui donne priorité aux parents de sexes masculins sur les épouses et filles du défunt, ou qui stipule que « la succession est partagée de manière à ce que la part de l'héritier soit le double de celle de l'héritière » (Art. 351).

Ce sujet continue d’accentuer le clivage entre partisans d’une évolution et franges conservatrices, notamment du fait du prisme religieux. L’année 2023 a été le témoin de cette confrontation idéologique entre évolution sociétale et conservatisme religieux. De ce fait, l'application d’une décision de justice en faveur de l’égalité semble difficilement réalisable dans le climat socio-culturel et politique actuel.

Cependant, le débat sur l'égalité des femmes et des hommes en matière d'héritage doit être poursuivi pour faire de l’opinion publique un allié des réformes à venir. Celui-ci doit être fondé sur une analyse intellectuelle objective, l’ijtihad, ainsi qu’une coopération et un dialogue ouvert entre les partis concernés (théologiens, conseil des Oulémas, ministères, société civile, acteurs privés, etc.), afin d’aboutir à une solution égalitaire respectant les ratifications internationales du Maroc, les volontés institutionnelles, ainsi que les mœurs locales. Les initiatives menées par les associations de soutien aux droits des femmes, telle que l’Association marocaine des femmes du Maroc (ADFM), et les travaux publiés en mars 2023 sur les « Libertés fondamentales » pourraient être un point de départ.13 Les efforts pressentis par les autres pays de la région MENA peuvent également inspirer le débat au Maroc (Encadré ‎2.5).

Enfin, en cas d’accord, la réforme devrait s’appuyer sur une large campagne de communication et de formation des agents étatiques, notaires et juges, impliqués dans les décisions et les procédures d'héritage, afin de ne pas entraver sa mise en œuvre. En outre, une assistance juridique devrait être fournie aux femmes qui souhaitent revendiquer leurs droits de succession.

Dans certaines régions marocaines et notamment dans les sociétés amazighes, une partie importante de la population exerce ses activités conformément au droit coutumier. Celui-ci continue de gouverner les décisions individuelles et collectives liées au mariage, à l’héritage, notamment lorsque celle-ci concernent la propriété foncière. Or, dans la plupart des cas, il s’inscrit dans un système patriarcal basé sur une vision conservatrice des rôles des femmes et des hommes, qui va à l’encontre des progrès observés ses dernières décennies dans le droit statutaire marocain et sa population. Pour autant, le droit coutumier marocain a le pouvoir d’adaptation et se modèle selon les nécessités sociales (Aboulkacem, 2008[35]).

Ainsi, si la réforme législative est la première étape vers l’égalité, il est nécessaire de garantir sa mise en application dans les cours de justice et sa traduction dans le droit coutumier. Pour ce faire, nombreux pays ont instituer la primauté du droit statutaire sur le droit coutumier, et certain, tel l’Afrique du Sud, ont légiféré sur le droit coutumier y intégrant ainsi les principes d’égalité (Encadré ‎2.6). Il est nécessaire d’accompagner ce processus d’un plaidoyer de sensibilisation aux lois statutaires dans tous les territoires, et de porter une attention particulière aux populations les plus reculées, pour assurer leur mise en application. Il est également important d’adopter des stratégies gouvernementales visant à sensibiliser et former les juristes et agents d’état aux niveau territorial, mais aussi les chefs coutumiers et religieux, afin que ceux-ci jouent pleinement leur rôle d’agent du changement.

Encourager un changement de mentalité à tous les niveaux de la société nécessite l’implication de tous : hommes et femmes, famille et communauté, système éducatif, leaders communautaires et religieux, médias. Pour ce faire, il est important d’adopter un langage adéquat qui exclut tout termes à caractère discriminatoire et reconnait qu’il ne s’agit pas d’une « bataille des sexes » dans laquelle les femmes sont victimes d’hommes mal intentionnés. Il est important de reconnaitre que ces derniers souffrent aussi des stéréotypes de genre, de l’homme qui est décrié parce qu’il partage les tâches domestiques avec sa femme, au père qui voit son héritage partir dans les mains de ses frères, déshéritant ainsi ces filles pour la simple raison qu’il n’a pas de descendants hommes. La communication doit se concentrer sur le fait que l’autonomisation économique n’est pas un jeu à somme nulle à la défaveur des hommes, mais, au contraire, est bénéfique pour tous.

Le rapport de l’OCDE publié en 2020 donnait une attention particulière au rôle du parlement, des institutions nationales des droits de l’homme et de la société civile (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]). Les propositions ci-dessous complètent cette analyse en se focalisant sur le rôle des hommes, des « role model », des communautés, de l’école et des médias.

Les décideurs politiques ont longtemps considéré la sphère familiale comme une entité privée dont les activités étaient difficiles à légiférer. Pour autant, à travers ses politiques familiales et fiscales, entre autres, le gouvernement influence la distribution du travail rémunéré et non rémunéré entre les femmes et les hommes d’un ménage ou d’une communauté (Chapitre 3). Cette influence agit à long terme, du fait de la transmission intergénérationnelle des valeurs d’égalité. En effet, en observant leurs parents et par effet de mimétisme, les enfants intègrent une première compréhension des rôles de chacun, qu’ils pourront confronter par la suite à leurs propres conceptions de l’égalité.

Ainsi, créer des incitations pour redistribuer les responsabilités domestiques et de soin entre les membres de la famille favorise l’AEF de deux manières :

  • Directement, en augmentant le temps disponible des femmes pour exercer des activités productives rémunérées.

  • Indirectement, en diffusant les valeurs de l’égalité au sein du ménage et de la société.

Ceci nécessite d’accompagner les politiques publiques en faveur d’une redistribution des activités de soin non rémunérés par une campagne de sensibilisation des hommes et de déculpabilisation des femmes. Ces incitations passent par la mise en place d’infrastructure permettant de réduire le temps dévoué à ses activités et leur pénibilité, mais aussi de congé parental, réservant une partie aux hommes, ainsi que d’une offre de garde d’enfant de qualité et abordable, incluant notamment une offre préscolaire.

Cependant, malgré la mise en place d’incitations financières, l’utilisation de ces prérogatives reste souvent contrainte par la norme sociale. Tant qu’ils seront victimes de stéréotypes, les mères de jeunes enfants continueront d’hésiter à reprendre une activité salariale ou entrepreneuriale et les pères continueront à minimiser leurs implications dans les tâches domestique et de soin.

De nombreux gouvernements, organisations internationales (par ex. ONU Femmes, UNFPA) et acteurs de la société civile se sont penchées sur la question : comment inciter aux changements de mentalité et de comportement. Les travaux de Promundo14 et Men Engage15 ont démontré l’efficacité d’une approche ciblant les hommes et plus particulièrement les pères pour transformer les normes rigides et néfastes marquées par l’impératif d’« être un vrai homme » (Encadré ‎2.7).

Ces expériences ont démontré qu’il était important d’établir un débat sur le rôle des hommes afin de comprendre et répondre aux obstacles qui les empêchent de s’impliquer davantage dans les activités domestiques et de soin non rémunérées. Ceci passe d’abord par l’organisation de focus group et la collecte de donnée attitudinales quantitatives. Ensuite, il est important de travailler en petits groupes afin que les hommes se sentent en confiance pour apprendre à contester la norme, mais aussi à acquérir les compétences nécessaires pour effectuer ses tâches. Par la suite, ces hommes peuvent se faire les vecteurs du changement en partageant leur expérience auprès de plus grand nombre.

Le statu quo ne peut être remis en cause efficacement que lorsque ses limites sont connues de tous. Ainsi, favoriser un contexte de changement implique non seulement d’exposer le caractère discriminatoire des rôles de genre traditionnels, mais aussi leurs conséquences socio-économiques – telle que la perte de revenu générée par les inégalités sur le marché du travail (par ex. faible participation à la force de travail, surreprésentation dans les postes faiblement rémunéré, discriminations salariales).

Il s’agit par la suite d’indiquer que le changement est possible en s’appuyant sur l’expression « le voir pour le croire » et de mettre en avant des exemples de modèles positifs. Créer des « role model », c’est-à-dire partager l’exemple de femmes et d’hommes dont le comportement favorable à l’égalité femmes-hommes peut être imité par des tiers, notamment par les jeunes, a montré ses preuves. Il s’agit en outre de mettre en avant les femmes ayant réussi dans des secteurs, métiers, rôles et activités où on ne les attendait pas – telles que les nombreuses femmes cheffes d’entreprises dans les secteurs de pointe. Le Maroc peut compter sur le leadership de certaines personnalités, mais aussi de ses citoyens auxquels la population marocaine peut s’identifier.

Cette méthode joue sur deux aspects complémentaires (Lockwood et al., 2005[38]):

  • Expliquer les bienfaits des valeurs favorables à l’égalité femmes-hommes et ainsi rassurer les réfractaires ou les hésitants. En effet, quel que soit le nombre d'études scientifiques citées, il est difficile pour les hommes d'imaginer que les femmes seraient de bons PDG s'ils n'en voient pas beaucoup. De même, le succès des femmes cheffes d’entreprises et de leurs enfants permet aux conservateurs d’imaginer les bénéfices éducatifs d’une mère épanouie dans la sphère professionnelle.

  • Encourager les individus à adopter d’autres comportements, même s’ils vont à l’encontre des normes et stéréotypes de genre. En effet, lorsque les femmes voient d'autres femmes dans des emplois traditionnellement attribués aux hommes (par ex. mécanicien, chauffeurs poids lourds, ingénieur, scientifique), elles trouvent plus facile de s'imaginer dans ces emplois et sont plus susceptibles de se prendre les dispositions nécessaires pour intégrer ce corps professionnel. De nombreuses initiatives se sont appuyées sur les « role model » pour inciter les jeunes filles - et leurs parents - à poursuivre leurs études et leurs carrières, dans les filières scientifiques, technologique, d’ingénierie ou de mathématiques (STIM) (Encadré ‎2.8). De même, la définition de la masculinité et des tâches socialement définies comme appropriées pour les hommes peut évoluer grâce au partage d’expérience (Encadré ‎2.8).

Si le gouvernement national peut donner des orientations stratégiques, c’est au niveau local que les changements s’effectuent au quotidien et répond aux exigences de la diversité territoriale. Ce sont les acteurs locaux qui vont être les porte-paroles des politiques nationales d’AEF sur le terrain, et ainsi répondre aux questions de clarification et préoccupations de ses concitoyens. Il est donc important d’impliquer les acteurs locaux – autorités publiques, secteur privé, associations de la société civile (Encadré ‎2.9).

Les leaders communautaires et religieux ont un rôle central à jouer. En effet, la culture s’appuie à la fois sur la tradition et les coutumes, la religion, et les courants émergeants. En tant que guides spirituels, les leaders religieux sont parmi les personnalités les plus respectées dans de nombreuses communautés et contribuent souvent à déterminer quels comportements sont acceptables ou non. Ils peuvent ainsi encourager le changement de normes au sein de ces communautés. Par exemple, des militants et des théologiens de plusieurs pays ont élaboré conjointement un cadre d’action international contenant des principes fondamentaux visant à encourager l’égalité des genres dans les lois nationales musulmanes, dans le cadre de la plateforme Musawah16. Les membres du collectif marocain ayant publié « Liberté fondamentales »17 inclus des théologiens dont certains ont été interviewés dans le cadre de ce rapport.

Le Maroc pourrait s’appuyer davantage sur l’engagement des communautés et de leurs leaders dans la transformation sociale nécessaire à l’AEF. Les approches ayant fait leurs preuves varient considérablement : du travail avec des dirigeants formels par le biais de la sensibilisation par les pairs, à l'organisation de séances de sensibilisation pour les volontaires, en passant par la relecture des textes religieux sous le prisme de l’égalité des genres. Il s’agit dans tous les cas :

  • D’équiper les communautés et leurs leaders avec les compétences et outils nécessaires à leur engagement dans la diffusion d’une culture en faveur de l’égalité.

  • De les intégrer dans le processus de remodelage des normes de genre afin de mieux refléter les spécificités culturelles des différentes communautés marocaines.

C’est à travers le processus de socialisation et d’apprentissage que se construisent - dès le plus jeune âge - les représentations mentales liées aux rôles des femmes et des hommes dans l’économie et la société. Dès lors, l’école joue un rôle essentiel dans la transmission des principes d’égalité aux enfants pour que, progressivement, les stéréotypes s'estompent et que d'autres modèles de comportement se construisent sans discrimination sexiste ni violence. L’école a aussi pour finalité la constitution d'une culture de l'égalité et du respect mutuel. Pour cela, il faut trouver de nouveaux moyens d’ouvrir l’esprit des enfants quant à leurs aptitudes et d’élargir leur horizon professionnel en abordant la question dans ses dimensions sociale et affective, à travers une action concertée des parents, des enseignants et des employeurs (OECD, 2020[15]).

Malgré des efforts considérables sur l’inclusion des principes d’égalités dans la politique éducative, le Maroc gagnerait à développer une approche holistique. En effet, la Recommandation de l’OCDE incite les pays adhérents à mettre en place une politique éducative en faveur de l'égalité qui encourage un climat scolaire serein, assure un cadre protecteur - sans comportements ni violences sexistes - et favorise la mixité et l'égalité en matière d'orientation (OCDE, 2017[41]). Cette politique éducative implique non seulement la communauté éducative mais aussi les élèves et leurs parents (Encadré ‎2.10).

Plus précisément, la responsabilité de la communauté éducative repose à la fois sur :

  • La formation, initiale et continue, de l'ensemble des personnels (enseignant, administratif et d’encadrement), et la prise en compte de l'égalité au cœur des enseignements et de la pratique pédagogique.

  • La mise à disposition de ressources pédagogiques proposant des outils concrets et interactifs aux enseignants et personnels administratifs et d’encadrement.

  • L’intégration des principes d’égalité d’opportunité et de traitement, ainsi que l’absence de discrimination et de violence, dans le règlement intérieur des établissements scolaires.

  • La nomination de référents égalités dans les établissements scolaires.

  • L’établissement de mécanismes nécessaires à la prévention des violences à caractères sexistes.

Il est tout aussi important d’agir auprès des élèves. Si le Maroc a déjà fait des progrès quant aux contenus de l’enseignements et des manuels scolaires, des efforts supplémentaires doivent être apportés afin de fournir aux élèves une éducation dénuée de tout caractère discriminatoire. Ceci inclut notamment la mise en place d’actions de sensibilisation dédiées aux élèves afin de faire de l’égalité filles-garçons un axe fondamental du socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

La mise en œuvre des actions pour l’égalité entre filles et les garçons à l’école doit faire l’objet d’une information complète auprès des parents. L’école joue notamment un rôle clé dans l’engagement des hommes envers l’égalité :

  • De nombreuses initiatives ont montré l’importance de travailler avec les administrateurs scolaires, les enseignants et d'autres décideurs clés pour encourager davantage l'implication des hommes au sein des écoles fréquentées par leurs enfants, et promouvoir leur implication dans le suivi d'enseignement effectué à la maison.

  • Par ailleurs, il peut être pertinent de promouvoir des programmes éducatifs au sein du système scolaire renforçant les compétences et les connaissances nécessaires aux garçons et aux hommes pour assumer de nouveaux rôles dans les ménages.

L’ensemble des médias – traditionnels ou sociaux -, influencent nos perceptions et nos idées sur le rôle que doivent jouer les femmes et les hommes dans nos économies et sociétés. D’un côté, les médias peuvent renforcer les attitudes et pratiques discriminatoires, favoriser leur transmission intergénérationnelle, et ainsi perpétuer les inégalités. D’un autre côté, ils peuvent tout aussi bien être un vecteur de changement, en soutenant la diffusion d’une culture de l’égalité. En effet, l'exposition à des représentations stéréotypées de genre et à une ségrégation claire entre les genres est en corrélation avec des préférences pour un contenu médiatique, des jouets, des jeux et des activités stéréotypés ; des perceptions traditionnelles des rôles de genre, des professions et des traits de personnalité.

La Recommandation de l’OCDE préconise de travailler avec les médias et d’en faire un allié des stratégies gouvernementales d’égalité (OCDE, 2017[41]). Les gouvernements peuvent s’appuyer sur les médias de trois façons :

  • Communiquer les données et favoriser la vulgarisation des savoirs relatifs aux niveaux et conséquences économiques des inégalités femmes-hommes.

  • Soutenir les efforts de communication et de pédagogie du gouvernement relatifs à ses politiques et objectifs.

  • Diffuser une culture de l’égalité à travers des contenus sensibles au genre, contestant les stéréotypes de genre, défiant les normes et attitudes discriminatoires ; une meilleure représentation et visibilité des femmes journalistes et présentatrices télévisions ; travailler davantage sur la visibilité des modèles positifs et « role model ».

Au Maroc, les stéréotypes de genre restent très répandus dans les médias. En effet, les publicités continuent de mettre en scène des femmes confinées dans la sphère domestique et dans leur rôle d’épouse ou de mère alors que les hommes sont associés à l’espace public ; les femmes y sont souvent présentées comme vulnérables et dépendantes, tandis que les hommes sont présentés comme forts et autonomes (OCDE/OIT/CAWTAR, 2020[9]).

Plusieurs actions pourraient être développées par le gouvernement marocain pour mieux impliquer les médias dans la mise en œuvre du PGE III. Ceci inclut notamment :

  • L’élaboration de supports de communication adaptés aux différents types de médias pour soutenir les politiques d’AEF.

  • La mise en place de dialogues et partenariats entre les médias, la société civile et les décideurs politique pour sensibiliser les premiers au rôle qu’il joue dans le renforcement et la transmission des inégalités femmes-hommes.

  • Le développement de formation dédiées aux décideurs politiques pour améliorer leur compétence communicationnelle et dédiées aux médias sur l’utilisation des données et statistiques sensible au genre, et le vocabulaire favorable à la diffusion des valeurs d’égalité (Encadré ‎2.11).

De manière générale, collecter régulièrement des données fiables et de qualité est indispensable à l’élaboration et au suivi des politiques publiques. Ceci est particulièrement vrai pour les problématiques d’égalités femmes-hommes puisque certaines discriminations – ou leurs sources - restent invisibles par manque de données disponibles.

C’est le cas des données budget temps, qui, du fait de leur coût18 et des difficultés de traitement ne sont que rarement collectées (en moyenne tous les 10 ans pour les pays OCDE). Pour autant, il est difficile de comprendre comment les responsabilités domestiques des femmes influencent l’étendue de leur activité économique sans de telles données. L’enquête budget temps est souvent citée comme la pierre angulaire des statistiques sensibles au genre car, non seulement elles mettent en évidence des disparités de comportement essentielles à la compréhension du sous-emploi des femmes, mais aussi car elles offrent une nouvelle conception de la valeur crée par une économie.

Valoriser les activités productives non rémunérées permet en effet de mettre en exergue la partie invisible de la contribution économique des femmes. Les activités domestiques et de soin, tel que le temps accordé aux enfants, la préparation d’un repas ou le bricolage, sont à la fois des éléments indispensables au bien-être des individus, de leurs familles et des sociétés, mais aussi un aspect important de l'activité économique. L’existence d’un substitut marchand (aide à domicile s’occupant des enfants, du ménage, des réparations ; restaurant et livraison alimentaires) montre que ces activités sont créatrices de valeur. En effet, toute activité qui peut être effectué par un tiers contre une rémunération est considérée comme productive et peut être exprimée en points de produit intérieur brut (PIB) ou en dirhams marocains (MAD).

Jusqu’à récemment, les biens et services consommés par un ménage et produits dans le cadre du travail non rémunéré de ses membres étaient exclus du calcul du PIB. Pourtant, ils représentent une part importante de la valeur crée dans un pays, d’autant plus importante que le recours aux substituts marchands est limité. Au niveau mondial, l'OIT estime que ces activités représentaient une production de 11 000 milliards USD, soit 9 % du PIB mondial en 2017 (Addati et al., 2019[45]). Dans certains pays, où les activités non-marchandes répondent aux défaillances de marché, telles que le manque d’accès aux infrastructures de garde d’enfant, à l’eau potable et à l’énergie, le travail domestique et de soin non rémunéré peut représenter une part encore plus importante du PIB : 14 % en Afrique du Sud, 23 % en Argentine et 33 % en Chine (Ferrant et Thim, 2019[46]).

Au Maroc, la valeur du travail domestique atteignait 285 milliards MAD en 2012, soit 34.5 % du PIB. Les femmes réalisant plus de 75 % des tâches productives du ménage, ces calculs fournissent une estimation plus réaliste de la contribution des femmes à l’économie nationale, réduisant les disparités avec les hommes à cet égard. Le Haut-Commissariat au Plan estimait à cet égard la contribution économique des femmes à 21 % de la richesse nationale selon les calculs standards de la comptabilité nationale, contre le double si on inclut les tâches productives non rémunérées (HCP, 2012[10]).

Comptabiliser la contribution invisible des femmes à l’économie et communiquer à ce sujet participe à la diffusion d’une culture de l’égalité en donnant de la valeur aux activités considérées comme peu valorisantes. Récemment, un certain nombre de pays se sont engagé dans cette voie, certains allant jusqu’à légiférer en la matière (Encadré ‎2.12).

Le HCP prévoit de réaliser une nouvelle enquête budget temps en 2025. La méthodologie appliquée nécessiterait de refléter la Recommandation du Conseil de l’OCDE concernant les bonnes pratiques statistiques adopté en 2015 (OCDE, 2015[47]) ainsi que les dernières directives définies par la Division de statistique de l'ONU et approuvée par la 53ème Commission de statistique de l'ONU en 2022.19

Références

[35] Aboulkacem, E. (2008), Droit coutumier amazigh face aux processus d’institution et d’imposition de la législation nationale au Maroc, Organisation internationale du Travail, https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_norm/---normes/documents/publication/wcms_100800.pdf.

[45] Addati, L. et al. (2019), Prendre soin d’autrui : Un travail et des emplois pour l’avenir du travail décent, Organisation internationale du Travail, https://www.ilo.org/global/publications/books/WCMS_633135/lang--en/index.htm (consulté le 19 septembre 2023).

[31] Berriane, Y. (2015), « Inclure les “N’ayants Pas Droit” : Terres collectives et inégalités de genre au Maroc », L’Année du Maghreb, vol. 13, pp. 61-78, https://doi.org/10.4000/anneemaghreb.2546.

[32] Bulletin Officiel (2019), Dahir n° 9-1-9 du 09 août 2019 portant application de la loi n° 62-17 relative à la tutelle administrative sur les communautés Soulaliyates et la gestion de leurs biens.

[28] Bulletin Officiel (2018), Dahir n° 1-18-19 du 5 Joumada II 1439 portant promulgation de la loi n° 103-13 relative à la lutte contre les violences faites aux femmes, Bulletin Officiel, http://www.chambredesrepresentants.ma/sites/default/files/103-13-fr.pdf (consulté le 22 mai 2022).

[25] Bulletin Officiel (2005), « Bulletin Officiel portant sur la promulgation de la loi n° 70-03 portant sur le code de la famille », Bulletin Officiel, vol. 5358/6 octobre 2005, p. 667, http://jafbase.fr/docMaghreb/MarocCodeFam-oct2005.pdf.

[21] CESE (2019), Rapport annuel, Conseil Économique, Social et Environnemental, http://www.cese.ma/media/2020/11/RA-VF-2019-1.pdf.

[8] Code de la Famille (2004), Dahir n° 1-04-22 du 12 Hija 1424 portant promulgation de la loi n° 70-03 portant Code de la Famille, http://www.legal-tools.org/doc/0e057b/pdf/ (consulté le 19 septembre 2023).

[1] Commission Spéciale pour sur le Modèle de Développement (2020), À propos de la Commission Spéciale sur le Modèle de Développement, https://csmd.ma/fr/ (consulté le 19 août 2022).

[43] Conseil de l’Europe (2014), Report of the 2nd Conference of the Council of Europe National Focal Points on Gender Equality, Conseil de l’Europe, https://rm.coe.int/1680590fe5.

[39] Cundill, A. et al. (2014), Findings from the SASA! Study: a cluster randomized controlled trial to assess the impact of a community mobilization intervention to prevent violence against women and reduce HIV risk in Kampala, Uganda, BMC Med, https://doi.org/10.1186/s12916-014-0122-5 (consulté le 19 septembre 2023).

[22] ENPSF (2018), Enquête Nationale sur la Population et la Santé Familiale, Ministère de la Santé, Rabat, https://www.unicef.org/morocco/media/1626/file/Enqu%C3%AAte%20Nationale%20sur%20La%20Population%20et%20la%20Sant%C3%A9%20Familiale%20(ENPSF%20-2018).pdf.

[46] Ferrant, G. et A. Thim (2019), « Measuring women’s economic empowerment : Time use data and gender inequality », OECD Development Policy Papers, n° 16, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/02e538fc-en.

[2] Haerpfer, C. et al. (2022), Enquête sur les valeurs mondiales : Fichier de données regroupées par pays, JD Systems Institute & WVSA Secretariat, Madrid, Espagne, Vienne, Autriche, https://www.worldvaluessurvey.org/WVSNewsShow.jsp?ID=362 (consulté le 19 septembre 2023).

[5] Hamdouch, B. et al. (2018), Enquête IMAGES sur les hommes et l’égalité des sexes menée dans la région de Rabat-Salé-Kénitra, Cairo and Washington, D.C.: UN Women and Promundo-US., https://morocco.unwomen.org/sites/default/files/Field%20Office%20Morocco/Documents/Publications/2018/07/Rapport%20Images-VF-WEB.pdf.

[17] HCP (2022), La femme marocaine en chiffres, Haut-Comissariat au Plan.

[13] HCP (2022), La Femme Marocaine en Chiffres: Evolution des Caractéristiques Démographiques et Socioprofessionnelles, Haut-Commissariat au Plan.

[10] HCP (2012), Le Budget Temps ou l’Enquête Nationale sur l’Emploi du Temps au Maroc 2011/2012, Haut-Commisariat au Plan, https://mujeres.andaluciasolidaria.org/wp-content/uploads/Enquete-budget-temps-FR.pdf.

[29] Holcombe, R. (2020), Power in Agrarian and Feudal Societies, Palgrave Macmillan, Cham., https://doi.org/10.1007/978-3-030-48667-9_6.

[16] Instance Nationale d’Évaluation (2021), Rapport National PISA 2018, Conseil Supérieur de l’Education, de la Formation et de la Recherche Scientifique, https://www.csefrs.ma/wp-content/uploads/2023/04/Rapport-PISA-V-Fr.pdf.

[7] La Banque mondiale (2021), Les Femmes, l’Entreprise et le Droit, Groupe de la Banque mondiale, Washington, https://openknowledge.worldbank.org/server/api/core/bitstreams/899ecaac-f451-5b1e-a22b-d516da59cb20/content.

[30] La Banque mondiale (2008), « Marchés fonciers pour la croissance économique au Maroc - Volume I. Héritage et structures foncières au Maroc : Les contraintes structurelles et institutionnelles à l’emergence d’un marché efficient du foncier au Maroc », vol. 1, https://documents1.worldbank.org/curated/fr/639221468274187453/pdf/499700v10P11651age0foncier0Mai02008.pdf.

[38] Lockwood, P. et al. (2005), « To do or not to do: Using positive and negative role models to harness motivation », Social Cognition, vol. 22/4, pp. 422–450, https://doi.org/10.1521/soco.22.4.422.38297.

[40] M. Künkler et E. Nisa (2018), Re-establishing juristic expertise: A historic congress of female Islamic scholars, The International Institute for Asian Studies, https://www.iias.asia/the-newsletter/article/re-establishing-juristic-expertise-historic-congress-female-islamic-scholars.

[42] MINEDUC (2019), Estadistica de la Calidad Educativa, http://escale.minedu.gob.pe/ueetendencias2016.

[14] Ministère de l’Education Nationale, du Préscolaire et des sports (2023), Recueil statistique de l’éducation 2022-2023, https://www.men.gov.ma/Fr/Pages/Statistiques_syspedag.aspx (consulté le 19 septembre 2023).

[33] Nations unies (2020), Rapport valant cinquième et sixième rapports périodiques soumis par le Maroc en application de l’article 18 de la Convention, attendu en 2014, https://digitallibrary.un.org/record/4017290/files/A_78_48-FR.pdf.

[19] Observatoire National du Développement Humain (2021), Les NEET au Maroc : analyse qualitative, https://www.ondh.ma/fr/publications/les-neet-au-maroc-analyse-qualitative.

[26] OCDE (2023), « L’indice Institutions sociales et égalité des genres (Édition 2023) », Statistiques de l’OCDE sur le développement international (base de données), https://doi.org/10.1787/1c372ab6-fr (consulté le 28 novembre 2023).

[12] OCDE (2023), Temps consacré au travail non rémunéré, rémunéré et total, par sexe, OCDE, Paris, https://stats.oecd.org/index.aspx?queryid=54757 (consulté le 19 septembre 2023).

[24] OCDE (2017), L’autonomisation économique des femmes dans la région MENA: L’impact des cadres juridiques algérien, égyptien, jordanien, libyen, marocain et tunisien, Compétitivité et développement du secteur privé, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264280434-fr.

[41] OCDE (2017), Recommandation de 2013 du Conseil de l’OCDE sur l’égalité hommes-femmes en matière d’éducation, d’emploi et d’entrepreneuriat, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264279407-fr.

[47] OCDE (2015), « Recommandation du Conseil concernant les bonnes pratiques statistiques », Instruments juridiques de l’OCDE, OECD/LEGAL/0417, OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0417.

[9] OCDE/OIT/CAWTAR (2020), Changer les lois et éliminer les obstacles à l’autonomisation économique des femmes : Égypte, Jordanie, Maroc et Tunisie, Compétitivité et développement du secteur privé, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/af7f3846-fr.

[15] OECD (2020), « Girls’ and boys’ performance in PISA », dans PISA 2018 Results (Volume II) : Where All Students Can Succeed, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/f56f8c26-en.

[27] OIT (2021), La violence et le harcèlement dans le monde du travail : Guide sur la convention n° 190 et la recommandation n° 206, Organisation internationale du Travail, https://www.ilo.org/global/topics/violence-harassment/resources/WCMS_831786/lang--fr/index.htm (consulté le 19 septembre 2023).

[34] ONU Femmes (2018), Au Maroc, les femmes soulaliyates disposent enfin de leurs droits fonciers, ONU Femmes, https://morocco.unwomen.org/fr/actualites-evenements/actualites/2018/08/femmes-soulalyat-maroc.

[6] ONU Femmes/Promundo-US (2017), Understanding Masculinities: Results from the International Men and Gender Equality Survey (IMAGES) - Middle East and North Africa, ONU Femmes/Promundo-US, https://www.unwomen.org/sites/default/files/Headquarters/Attachments/Sections/Library/Publications/2017/IMAGES-MENA-Multi-Country-Report-EN.pdf.

[36] Osman, F. (2019), « The Consequences of the Statutory Regulation of Customary Law: An Examination of the South African Customary Law of Succession and Marriage », Potchefstroom Electronic Law Journal 22, pp. 1–24, https://doi.org/10.17159/1727-3781/2019/v22i0a75.

[11] Palestinian Central Bureau of Statistics (2013), Time Use Survey 2012/ 2013 - Final Report, PCBS, https://www.pcbs.gov.ps/site/lang__en/757/default.aspx?lang=en.

[4] Roy, D. (2019), « L’évolution des temps sociaux à travers les enquêtes « Emploi du temps » », Informations sociales, vol. 2009/3/153, pp. 8-11, https://doi.org/10.3917/inso.153.0008.

[44] UNECE (2017), Guide on Valuing Unpaid Household Service Work, ONU, Genève, https://unece.org/fileadmin/DAM/stats/publications/2018/ECECESSTAT20173.pdf.

[37] UNFPA/PROMUNDO (2018), Engaging men in unpaid care work: an advocacy brief for eastern Europe and Central Asia, UNFPA/PROMUNDO, Istanbul, Washington D.C., https://eeca.unfpa.org/sites/default/files/pub-pdf/180829_Gender_Fatherhood%20PB_ENG_WEB.pdf.

[23] UNICEF (2020), Progress on Children’s Well-being: Centring child rights in the 2030 Agenda, UNICEF, https://data.unicef.org/.

[20] UNICEF (2017), Child Marriage in the Middle East and North Africa – Morocco Country Brief, UNICEF, https://www.unicef.org/mena/media/1791/file/MENA-ChildMarriageInMENA-Executive%20Summary.pdf.pdf.

[18] UNICEF/ONDH (2022), NEET au Maroc : analyse qualitative, UNICEF/ONDH, https://www.unicef.org/morocco/recits/etude-sur-les-neetau-maroc.

[3] United Nations Statistics Division (2021), Eighth Global Forum on Gender Statistics, https://unstats.un.org/unsd/demographic-social/genderstat-forum-8/Report%20of%208th%20GFGS_2021_FINAL.pdf (consulté le 19 septembre 2023).

Notes

← 1. Promundo et ONU Femmes en partenariat avec l’Association Migration Internationale (AMI) et des chercheurs indépendants ont interviewé 1 200 hommes et 1 200 femmes âgés de 18 à 59 ans dans 7 préfectures de la région Rabat-Salé-Kénitra (Hamdouch et al., 2018[5]).

← 2. Le Maroc a intégré l’évaluation internationale PISA de l’OCDE pour la première fois en 2018, dans le cadre de la première phase du Programme Pays. Les données collectées en 2022 n’ont pas encore été publiées.

← 3. Dont la ratification de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE), ainsi que l’engagement du Maroc dans la réalisation des ODD à l’horizon 2030, en particulier la cible 5.3 « éliminer toutes les pratiques préjudiciables, telles que le mariage des enfants, le mariage précoce ou forcé et la mutilation génitale féminine ».

← 4. L’article 475 du Code pénal stipule que « quiconque, sans violences, enlève ou détourne un mineur de moins de dix-huit ans […] est punie d’un à cinq ans d’emprisonnement ».

← 5. Notaire de droit islamique.

← 6. Cible 4.7 appelle à « faire en sorte que tous les élèves acquièrent les connaissances et compétences nécessaires pour promouvoir le développement durable, notamment par l’éducation en faveur [...] de l’égalité des sexes, de la promotion d’une culture de paix et de non-violence [...] ».

← 7. L’Objectif de Développement Durable 4 vise à « veiller à ce que tous puissent suivre une éducation de qualité dans des conditions d’équité et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ».

← 8. Les données sur le harcèlement sexuelles n’ont pas pu être utilisées par manque d’information ventilée par sexe.

← 9. L’ODD 5.2 vise à « éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, y compris la traite et l’exploitation sexuelle et d’autres types d’exploitation ».

← 10. Voir les articles 404, 431, 446, 481 et 503-01 du Code Pénal approuvé par le Dahir n° 1-59-413 du 26 novembre 1962.

← 11. Le Dahir de 1919 ne permettait la cession et la vente des terres collectives qu’à l’État, aux établissements publics et aux collectivités locales. La nouvelle loi n° 62-17 ouvre la voie aux acteurs économiques.

← 12. Le nom Soulaliyate est dérivé du mot Soulala, qui signifie en arabe « lignée ethnique ». Ceci fait référence aux femmes « tribales » marocaines, qui ont lancé un mouvement communautaire à l’échelle nationale pour l’égalité des droits d’accès à la terre en 2007, avec un appui particulier de l’Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) et d’ONU Femmes, interviewés pour cette étude.

← 13. Voir https://medias24.com/content/uploads/2023/03/13/libertes_fondamentales_DP_VF.pdf?x50680

← 14. Fondée en 1997, Promundo est une organisation non gouvernementale qui cherche à promouvoir l'égalité des sexes et la prévention de la violence en mettant l'accent sur la participation des hommes et femmes dans la transformation des normes sociales.

← 15. L’Alliance MenEngage est un réseau mondial qui travaille avec les hommes et les garçons pour à mettre fin au statu quo patriarcal et soutenir les droits des femmes.

← 16. Voir https://www.musawah.org/wp-content/uploads/2018/11/MusawahFrameworkforAction_Fr.pdf

← 17. Voir https://medias24.com/content/uploads/2023/03/13/libertes_fondamentales_DP_VF.pdf?x50680

← 18. Le département de statistiques des Nations Unies ainsi que le groupe d’experts inter-agence sur les données sensibles au genre (IAEG-GS) travaillent actuellement sur des méthodologies moins onéreuses.

← 19. Voir https://unstats.un.org/unsd/demographic-social/time-use/ pour plus d’information.

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