Chapitre 1. Digitalisation et emplois en Afrique dans le contexte du COVID-19 et au-delà

La pandémie de COVID-19 et la crise mondiale qui s’en suit souligne l’urgence pour les économies africaines d’accompagner la mise en place de structures productives plus solides et plus résilientes. À la rédaction de ce rapport au cours des deuxième et troisième trimestres 2020, la propagation du virus était certes relativement limitée en Afrique, en comparaison avec les autres régions du monde, mais l’arrêt soudain de l’activité économique a provoqué un choc de grande ampleur (voir le chapitre 8 sur le financement du développement des pays africains). Pour faire face à cette situation sans précédent, la plupart des pays africains ont pris des mesures budgétaires temporaires, malgré une marge de manœuvre relativement limitée (graphique 1.1). De surcroît, plusieurs banques centrales ont mis en œuvre des programmes de stimulation monétaire (FMI, 2020a). Il n’en demeure pas moins que 41 des économies africaines subiront une récession en 2020 selon les prévisions du Fonds monétaire international (réalisées en octobre 2020). Ce chiffre est à mettre en perspective avec la crise financière mondiale de 2009 où seuls 11 pays africains étaient entrés en récession.

Les autorités africaines ont eu recours à de nombreuses solutions digitales pour combattre la pandémie de COVID-19 au niveau local, national, régional et continental. Les ministères de l’Éducation de 27 pays africains ont été en mesure de mettre en place dès mai 2020 des plateformes d’apprentissage en ligne efficaces à l’intention des étudiants (UNESCO, 2020). La plupart des banques centrales africaines ont fortement encouragé la population à utiliser les services de paiement digital (GSMA, 2020b)1. Les Centres africains de contrôle et de prévention des maladies ont lancé − en collaboration avec 20 fondations et partenaires internationaux − une plateforme électronique continentale à but non lucratif pour aider les gouvernements africains à se procurer des tests de diagnostic et du matériel médical auprès de fournisseurs agréés sur le marché mondial. Janngo, une startup établie en Côte d’Ivoire, a conçu et mis en place le portail web. Par ailleurs, plusieurs autres startup et entrepreneurs talentueux ont mis au point de nouvelles solutions abordables en vue de réduire la charge imposée par la pandémie aux fragiles systèmes de santé du continent. Les exemples vont du Solar Wash, un distributeur d’eau sans contact à énergie solaire au Ghana, jusqu’à des technologies plus avancées telles que DiagnoseMe, une application mobile de télédiagnostic au Burkina Faso, ou les outils de triage du COVID-19 au Nigeria (Ochieng et Fokuo, 2020 ; Sadibe, 2020). Au Sénégal, l’Institut Pasteur de Dakar a mis au point un prototype de test de diagnostic du COVID-19 dont les résultats seraient disponibles en dix minutes.

Cependant, les effets négatifs de la pandémie de COVID-19 sur les capacités productives de l’Afrique pourraient se faire ressentir pendant plus d’une décennie et réduire les progrès accomplis par l’Afrique dans la réalisation de l’Agenda 2063. Les simulations effectuées par Djiofack, Dudu et Zeufack (2020) sont parvenues à la conclusion que l’accumulation et la productivité du capital en Afrique pourraient rester jusqu’en 2030 à un niveau inférieur aux trajectoires prévues avant le COVID-19. Les perturbations les plus importantes des économies nationales pourraient prendre la forme d’une baisse de la productivité, d’une moindre utilisation de capital et d’un alourdissement des coûts du commerce international. Ces perturbations ralentiront la transformation productive de l’Afrique et, par conséquent, la réalisation de l’Agenda 2063 (CUA/OCDE, 2019). Par ailleurs, la pandémie risque de perturber les récents progrès de l’Afrique dans le domaine de la santé et de l’éducation, ce qui pourrait amoindrir la capacité d’élévation du niveau de vie des générations actuelles.

La pandémie de COVID-19 accélérera vraisemblablement certaines tendances actuelles du commerce mondial. La digitalisation et la coopération régionale et continentale constituent dès lors des conditions sine qua non de la transformation des économies africaines.

  • Le COVID-19 pourrait intensifier la réorganisation en cours des chaînes d’approvisionnement internationales. Depuis 2010, les entreprises internationales ont progressivement incorporé davantage d’intrants locaux et régionaux dans leurs produits (Miroudot et Nordström, 2019 ; Baldwin et Tomiura, 2020 ; OCDE, 2020b). Le besoin accru de mettre en place des chaînes d’approvisionnement plus résilientes dans la période post-COVID-19, conjugué à l’impératif de réduire l’empreinte carbone de la production, amplifieront cette transformation (CNUCED, 2020b). Cela pourrait aboutir à une « régionalisation » des chaînes de valeur mondiales complexes et perturber les flux mondiaux d’IDE.

  • L’incertitude risque d’alourdir les coûts des échanges internationaux. Le volume des échanges mondiaux de marchandises a diminué régulièrement depuis la crise financière mondiale de 2008-09 (OMC, 2020). L’OCDE estime que les coûts des échanges internationaux pourraient enregistrer une hausse de 6 % à 9 % selon les modes de transport dans la période post-COVID-19 (Benz, Gonzales et Mourougane, 2020). Les restrictions commerciales pourraient alourdir encore davantage les coûts des échanges mondiaux. Au cours du premier semestre 2020, 89 pays ont imposé 154 mesures de contrôle des exportations de fournitures médicales, et 28 ont mis en œuvre 40 mesures de restriction des exportations de produits agricoles et alimentaires (Global Trade Alert, 2020).

  • La crise du COVID-19 pourrait accélérer l’automatisation. En seulement une décennie, les installations de robots industriels dans le monde ont été quasiment multipliées par quatre, passant de 112 000 unités en 2008 à 422 000 en 2018 (IFR, 2020). La demande d’installations de robots émane principalement de l’industrie automobile (30 %), suivie par le secteur de l’électronique (25 %), puis par les secteurs de la métallurgie et des machines (10 %). La « servicification » des industries manufacturières (c’est-à-dire l’importance croissante des services dans la valeur ajoutée produite par les industries manufacturières) et la préférence des consommateurs pour des procédés de production plus durables et faibles en carbone peuvent amener les entreprises à privilégier la production locale par rapport à la production délocalisée. Les plus grandes entreprises européennes prévoient d’acquérir un plus grand nombre de systèmes robotiques dans leurs plans d’investissement post-COVID-19 (Ahmed, 2020).

  • L’automatisation croissante dans les pays avancés risque d’avoir des répercussions sur les marchés du travail africains. Nos estimations, basées sur la Banque mondiale (2020b), montrent que 14.1 % des flux d’exportation de l’Afrique à destination des pays de l’OCDE pourraient faire face au risque d’être substitués. Le risque est encore plus grand pour l’Afrique du Nord (dont 23 % des exportations totales de la région sont destinées aux pays de l’OCDE). À titre de comparaison, ce risque est estimé à 18.9 % pour les pays en développement d’Asie et 19.0 % pour les pays en développement de l’ALC.

  • La mise en œuvre effective de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) peut renforcer les chaînes de valeur régionales et accroître la résilience économique face aux crises à venir. Avant le COVID-19, les marchés régionaux africains enregistraient une croissance rapide, la demande de produits transformés augmentant 1.5 fois plus vite que la moyenne mondiale (CUA/OCDE, 2018).

La crise du COVID-19 a créé un contexte propice pour que la digitalisation accélère la transformation productive de l’Afrique et rende le continent plus résilient face aux crises à venir. La dynamique de développement rapide de l’Afrique peut permettre aux entreprises locales de faire un bond en avant technologique si les gouvernements adaptent suffisamment leurs stratégies de développement aux nouvelles opportunités. Tout au long de la dernière décennie, les marchés régionaux à forte croissance de l’Afrique ont permis à de nombreuses entreprises locales d’accroître leur taille et leur productivité. Les potentialités offertes par la transformation digitale n’en restent pas moins pour une large part à exploiter dans bon nombre de pays africains. Bien que la réponse mondiale au COVID-19 se soit largement appuyée sur les technologies digitales, des fractures numériques persistantes limitent la capacité de l’Afrique à faire face aux chocs induits par la pandémie. Une transformation digitale de l’ensemble de l’économie – telle qu’elle est définie dans l’encadré 1.1 – ne peut être assurée que si i) les technologies digitales sont largement diffusées et aident les entreprises des autres secteurs économiques à devenir plus productives ; ii) la population bénéficie de meilleures perspectives d’emploi ; et iii) les gouvernements améliorent les services publics de soutien.

2007 a été une année charnière pour la digitalisation de l’Afrique. Safaricom a lancé M-PESA2, le tout premier service de paiement mobile d’Afrique. Lors de son lancement, l’innovation majeure consistait à proposer des services financiers disponibles sur les téléphones portables afin de pallier le manque d’infrastructures bancaires au Kenya (tels que les guichets automatiques bancaires, par exemple), et de répondre ce faisant aux besoins financiers non satisfaits dans les régions peu bancarisées. Ce modèle commercial réduisait par ailleurs sensiblement les frais de transaction.

Depuis 2007, la révolution du paiement mobile s’est rapidement propagée. En 2018, l’Afrique comptabilisait plus de 300 millions de comptes de paiement mobile, soit le chiffre le plus élevé au monde. Actuellement, plus de 500 entreprises proposent des innovations technologiques dans le domaine des services financiers (connues sous le nom de fintech) tels que les services de paiement mobile en Afrique. Les pays proposent à présent un grand nombre de produits financiers digitaux (comptes de dépôt et d’épargne, systèmes de paiement, etc.). De nouveaux gros acteurs se sont développés (tableau 1.2). Par exemple, en novembre 2019, Interswitch est devenue la première startup africaine évaluée à plus d’un milliard de dollars. Cette année-là, Interswitch disposait de plus de 1 000 salariés et d’un chiffre d’affaire annuel estimé à plus de 76 millions USD. En février 2020, la startup sud-africaine JUMO a levé 55 millions USD pour étendre ses activités au Bangladesh, à la Côte d’Ivoire, à l’Inde et au Nigeria (Kazeem, 2020). Johannesburg et Le Cap en Afrique du Sud, Nairobi au Kenya, et Lagos au Nigeria se classent parmi les 100 premières villes au monde du point de vue des écosystèmes de fintech (Findexable, 2019).

Le développement digital de l’Afrique se propage rapidement dans les autres secteurs. Les Africains ayant l’esprit d’entreprise et tournés vers les technologies digitales élaborent actuellement des solutions innovantes pour répondre à l’essor de la demande dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’agriculture, entre autres. Ils adaptent les technologies digitales aux besoins spécifiques de l’Afrique pour déployer des modèles commerciaux à forte croissance. Par exemple, Kobo360, une startup nigériane fondée en 2017, s’attache à révolutionner le secteur des transports intérieurs et de la logistique du pays, ainsi qu’à mettre en relation les agriculteurs nigérians avec les acheteurs du monde entier. En août 2019, cette société a levé 30 millions USD (Bright, 2019a). Plusieurs autres startup tirent actuellement parti de la technologie pour améliorer le transport de marchandises en Afrique. Il s’agit notamment de Lori Systems au Kenya, une plateforme logistique tout-en-un, et d’AgroCenta au Ghana, qui fournit une plateforme de gestion de la chaîne d’approvisionnement qui facilite l’accès des petits exploitants agricoles aux grands marchés, ainsi qu’une plateforme d’inclusion financière.

Les pôles d’innovation et les incubateurs sont également florissants. En 2019, 643 technopoles étaient actives en Afrique, contre 314 en 2016, et seulement une poignée en 2010 (AFRILABS et Briter Bridges, 2019). Les quatre pays africains qui possèdent le plus grand nombre de technopoles sont le Nigeria (90 technopoles), suivi par l’Afrique du Sud (78), l’Égypte (56) et le Kenya (50). Dans les technopoles telles que Yabacon Valley (à Lagos), la diaspora joue un rôle essentiel en apportant des idées, des réseaux et du capital-risque. L’annexe 1.A1 présente les modèles commerciaux et les politiques mis en œuvre avec succès dans chacun de ces quatre parcs technologiques africains. Les chapitres consacrés aux différentes régions offrent des exemples issus d’autres pays.

Le secteur des télécommunications africains, qui est essentiel à la transformation digitale, a bénéficié d’une croissance soutenue durant les deux dernières décennies. L’ouverture des activités de télécommunications mobiles à la concurrence, ainsi que d’autres réformes réglementaires majeures au cours des années 2000 ont contribué à rendre ce secteur attrayant pour les nouveaux opérateurs et à améliorer la qualité de l’offre de services. Malgré la crise financière mondiale de la fin des années 2000, les secteurs des télécommunications ont enregistré une forte croissance dans la quasi-totalité des pays d’Afrique. Le chiffre d’affaires annuel des entreprises de télécommunications africaines a régulièrement progressé, passant de 29 milliards USD en 2007 à 55 milliards USD en 2019 (graphique 1.3, panel A), et les dépenses d’investissement ont doublé. Les grands indicateurs de rentabilité des investissements de capitaux sont relativement élevés dans l’ensemble des cinq régions africaines (graphique 1.3, panel B).

Le principal atout de l’Afrique en matière de digitalisation réside dans sa populationde jeunes de plus en plus qualifiés en constante augmentation. Le nombre d’Africains âgés de 15 à 29 ans ayant atteint un niveau d’études correspondant au deuxième cycle du secondaire ou à l’enseignement supérieur est déjà passé de 47 millions en 2010 à 77 millions en 2020 (graphique 1.4, panel A)3. Dans un scénario de maintien du statu quo en matière d’éducation, ce chiffre s’élèvera à 165 millions en 2040. En termes relatifs, le pourcentage de jeunes Africains menant à bien des études de deuxième cycle du secondaire ou d’enseignement supérieur pourrait atteindre 34 % d’ici 2040 (se rapprochant ainsi du pourcentage observé en Asie), contre 23 % aujourd’hui (voir graphique 1.4, panel B). Ce chiffre pourrait même atteindre 73 % (233 millions) à l’horizon 2040 si les pays africains parviennent à reproduire la stratégie d’éducation accélérée mise en œuvre par la Corée en procédant à des investissements plus ambitieux dans l’éducation et la santé.

Les secteurs digitaux créent peu d’emplois directs, en nombre insuffisant pour répondre à eux seuls aux besoins d’emploi du continent. Les Dynamiques du développement en Afrique 2018 ont montré que les économies africaines doivent créer davantage d’emplois, et de meilleure qualité, pour absorber les 29 millions de jeunes qui, chaque année jusqu’en 2030, atteindront l’âge de travailler (CUA/OCDE, 2018). À titre de comparaison, les entreprises de télécommunications offrent un emploi direct à environ 270 000 personnes. Les emplois liés aux TIC, tels que l’externalisation des services informatiques, des processus d’entreprise ou le développement de logiciels, restent limités et principalement concentrés dans quelques pays. Les 20 startup du tableau 1.2 qui enregistrent la plus forte croissance comptent au total moins de 20 000 salariés. De façon plus générale, l’écosystème digital ne fournira pas assez d’emplois pour tous les jeunes Africains dans un avenir proche.

Les possibilités réelles de création d’emplois à grande échelle résident dans la diffusion des innovations numériques des entreprises de pointe au reste de l’économie. Les canaux de création d’emplois indirects incluent : i) les liens intrants-produits au sein de l’écosystème digital ; ii) la dynamique des effets d’entraînement, qui dépendent du rythme auquel les économies locales accroissent la productivité ; et iii) les effets sur la société dans son ensemble, au-delà du PIB (voir tableau 1.3). Par exemple, la révolution des paiements mobiles en Afrique de l’Est a donné lieu à une importante création d’emplois à travers plusieurs canaux indirects tels que les effets d’entraînement sur les ménages et sur les entreprises, tout en permettant l’apparition de nouveaux modèles commerciaux (encadré 1.2).

Le graphique 1.5 présente les principales évidences économétriques des études réalisées en Afrique et dans d’autres régions en développement. Une étude pionnière de Hjort et Poulsen (2019) montre que, dans le cas de 12 pays africains, l’arrivée de l’Internet haut débit dans une région, qui constitue un indicateur du degré de développement du digital, accroît de façon significative le taux d’emploi des travailleurs, qu’ils soient très qualifiés ou peu qualifiés. S’appuyant sur l’approche de ces deux auteurs, d’autres études ont mis en évidence que la digitalisation a un impact encore plus important sur les performances des entreprises (productivité, chiffre d’affaires et nouvelles perspectives d’exportation) et sur leur accès à des financements à long terme. Par exemple, des données portant sur plus de 30 000 entreprises de 38 pays en développement – dont 9 pays africains – font apparaître qu’une augmentation de 10 % de l’utilisation du courrier électronique par les entreprises dans une zone géographique donnée accroît de 37-38 % le montant total de leur chiffre d’affaires annuel, de 22-23 % leur chiffre d’affaires par travailleur et de 12-14 % leur nombre de travailleurs à plein temps (Cariolle, Goff et Santoni, 2019)4.

Au cours de la dernière décennie, la plupart des pays africains ont activement développé leurs réseaux d’infrastructures de communication, avec le concours d’importants investissements du secteur privé. En 2018, 45 des 54 pays d’Afrique avaient adopté une stratégie active pour le développement de l’infrastructure de communication haut débit, alors qu’ils n’étaient que 16 en 2011 (voir UIT, 2018). Le financement des infrastructures de communication s’est élevé à 7 milliards USD en 2018, dont 80 % avaient pour origine des investissements du secteur privé (ICA, 2018). Comme cela a été précédemment montré au graphique 1.3, la rentabilité des investissements est élevée et d’un niveau similaire à ceux observés en Asie. Les progrès en matière d’infrastructures de communication peuvent être séquencés en trois segments principaux qui s’étendent du premier kilomètre (first mile) au dernier kilomètre (last mile) en passant par le kilomètre intermédiaire (middle mile). Le premier kilomètre fait référence aux points d’accès par lesquels Internet entre dans un pays. Le kilomètre intermédiaire se réfère au réseau dorsal national et aux éléments associés tels que les serveurs, les centres de données et les points d’échanges Internet. Le dernier kilomètre se réfère aux réseaux d’accès locaux qui connectent les utilisateurs finaux.

Depuis 2009, les entreprises de télécommunications et les acteurs technologiques mondiaux ont été très actifs dans le développement des câbles sous-marins – c’est-à-dire des infrastructures de communication du premier kilomètre, qui relient les pays africains à l’Internet mondial. Les investissements dans les réseaux de câbles sous-marins et dans les stations d’atterissement des câbles terrestres ont permis de relier la plupart des pays africains à l’Internet mondial et accru la vitesse de connexion. La capacité totale de la bande passante Internet entrante du continent a été multipliée par plus de 50 en 10 ans seulement, pour atteindre 15.1 téraoctets par seconde (Tbps) en décembre 2019, contre seulement 0.3 Tbps en 2009 (Hamilton Research, 2020). Les perspectives de nouveaux projets restent solides. En mai 2020, Facebook et un groupe d’entreprises de télécommunications – dont China Mobile International, MTN GlobalConnect, Orange et Vodafone – ont commencé à collaborer en vue du déploiement de 37 000 kilomètres (km) de câbles sous-marins d’ici 2024 afin de relier le réseau internet à haut débit de l’Afrique à l’Europe et au Moyen-Orient. Ce nouveau réseau à haut débit, baptisé 2Africa, devrait assurer un accès supérieur à la capacité combinée totale de l’ensemble des 26 câbles sous-marins qui desservent actuellement l’Afrique (2AfricaCable, 2020).

L’Afrique a également plus que triplé les infrastructures Internet du kilomètre intermédiaire, qui assurent la connexion intra- et inter-pays. Des inventaires exhaustifs montrent que le réseau de fibre optique opérationnel de l’Afrique est passé de 278 056 kilomètres (km) en 2009 à 1.02 million de km en juin 2019 (Hamilton Research, 2020). Environ 58 % de la population africaine vit aujourd’hui dans une zone géographique couverte par un réseau mobile de quatrième génération (4G) (graphique 1.7). L’Afrique du Nord présente le chiffre le plus élevé, avec 85 % de sa population couverte par un réseau 4G en 2020 (voir chapitre 6). Ce chiffre est à comparer aux 86.5 % de l’Amérique latine et des Caraïbes et aux 88 % de l’Asie en développement pour la même année.

Malgré ces progrès, l’accès aux infrastructures à haut débit demeure une source de préoccupation au niveau du dernier kilomètre (last mile). Actuellement, près de 300 millions d’Africains vivent à plus de 50 km d’une connexion haut débit par la fibre ou le câble. Les solutions complémentaires permettant d’étendre et d’améliorer le réseau de transmission telles que les points d’échange Internet (IXP), les serveurs de données et les systèmes de transmission satellitaire demeurent insuffisamment développées. Par exemple, 42 % des pays africains ne possèdent toujours pas de IXP, et leur trafic Internet intérieur doit être acheminé à l’étranger pour arriver à destination. La réduction de la fracture numérique en Afrique d’ici 2030 nécessiterait environ 100 milliards USD ou 9 milliards USD par an, ce qui comprendrait la pose d’au moins 250 000 kilomètres de fibres dans la région (UIT/UNESCO, 2019).

L’utilisation des infrastructures de communication demeure extrêmement inégale selon les régions, le genre, le niveau d’études et la situation professionnelle. Par exemple, plus de 75 % des jeunes Africains possèdent un téléphone portable5. Cependant, seulement 22 % des jeunes des zones rurales utilisent régulièrement Internet, contre 53 % des habitants des zones urbaines (graphique 1.8). De même, la proportion de jeunes qui utilisent régulièrement Internet varie selon le genre (30 % des femmes et 44 % des hommes), le niveau d’études (8 % pour ceux ayant un niveau inférieur à l’enseignement primaire contre 77 % pour ceux ayant suivi des études de deuxième cycle du secondaire ou un enseignement supérieur), ainsi que la situation professionnelle (16 % des travailleurs indépendants et 58 % des travailleurs salariés).

Enfin, la concentration de l’économie digitale dans les mégalopoles met en lumière le problème d’inégalités spatiales croissantes liées à la digitalisation. La majorité des pôles et des startups numériques d’Afrique se concentrent dans les grandes villes. Par exemple, cinq villes abritent 49 % des startup africaines les plus dynamiques recensées par Crunchbase en 2019 (CUA/OCDE, 2019) : Le Cap (12.5 %), Lagos (10.3 %), Johannesburg (10.1 %), Nairobi (8.8 %) et Le Caire (6.9 %). Ces cinq villes ne comptent que 53 millions d’habitants, moins de 4 % de l’ensemble de la population africaine. Elles offrent de solides réseaux digitaux et une masse critique de compétences, des infrastructures de soutien, des investisseurs et des communautés entrepreneuriales.

Combler ces fossés spatiaux constitue une étape cruciale pour éviter d’accroître le décalage entre la distribution spatiale des emplois et celle de la population. Actuellement, la majorité de la population africaine vit en dehors des grandes villes. Environ 70 % des jeunes Africains résident dans les zones rurales. Les populations rurales représentent 1.4 milliard de personnes. Elles continueront à croître en termes absolus, au moins au-delà de 2050.

Les approches fondées sur des politiques territoriales peuvent faire la différence en articulant différentes politiques sectorielles pour tirer parti du potentiel sous-exploité dans toutes les régions, et en accroissant ainsi la compétitivité régionale (BAfD/OCDE/PNUD, 2015 ; OCDE, 2016). Les canaux à travers lesquels les innovations numériques se diffusent au sein de l’économie locale dépendent de plusieurs facteurs propres à chaque endroit. Dans les régions isolées, des facteurs non digitaux tels que des compétences, des infrastructures de base (électriques, par exemple) et un accès aux financements limités peuvent empêcher une part importante de la population de bénéficier des technologies digitales. Le chapitre 2 examinera plus en détail les moyens par lesquels les politiques peuvent s’adapter à ces contraintes territoriales spécifiques.

Le travail indépendant, souvent dans l’économie informelle, restera vraisemblablement la forme d’emploi la plus répandue en Afrique d’ici 2040, y compris dans les deux scénarios comportant les projections les plus optimistes. Les travailleurs indépendants et les travailleurs familiaux représentent actuellement 68 % de l’ensemble des travailleurs en Afrique, contre 71 % en 2000 (graphique 1.9, panel A). Si la tendance des 20 dernières années se confirme, ce pourcentage tombera à 65 % (dans le scénario du maintien du statu quo). En termes absolus, le nombre de travailleurs indépendants en Afrique pourrait augmenter de 163 % pour atteindre 529 millions de personnes en 2040, contre un chiffre estimé à 325 millions de personnes en 2020 (graphique 1.9, panel B). Même si l’Afrique pouvait être en mesure de reproduire le succès de la Chine du point de vue de la transformation structurelle de son secteur manufacturier au cours de la période 1990-2010 (scénario S2), la majorité (51 %) des travailleurs continuerait à travailler dans des entreprises familiales. De même, si l’Afrique parvenait à reproduire les progrès de l’Inde par la mise en place d’un secteur des TIC et des services aux entreprises mondialement reconnu (scénario S3), 55 % des emplois de l’Afrique relèveraient encore de la catégorie des travailleurs indépendants. L’encadré 1.3 explique la méthodologie de l’analyse spatiale et des projections du marché du travail.

Le secteur informel demeure la principale porte d’entrée sur les marchés de l’emploi pour la grande majorité de la population africaine en âge de travailler, y compris les jeunes diplômés. Actuellement, seulement 20 % de la population africaine en âge de travailler occupe un travail salarié contre 11 % seulement pour les femmes (CUA/OCDE, 2018 ; OIT, 2020). En Afrique, environ 85.8 % de l’emploi est informel, contre 25.1 % en Europe et en Asie centrale (OIT, 2018). Les enquêtes sur la transition entre l’école et le travail confirment que plus de 75 % des jeunes diplômés âgés de 15 à 29 ans commencent à travailler dans des activités informelles (OCDE, 2017b).

Actuellement, de nombreux travailleurs informels ne tirent pas profit des avantages de la digitalisation, en raison de leur faible adoption du digital. Seulement 16 % des travailleurs indépendants utilisent Internet régulièrement, contre 58 % des salariés (graphique 1.8). Le faible recours aux outils digitaux constitue une occasion manquée pour les travailleurs informels. Les chapitres régionaux de ce rapport présentent divers exemples de cas où les outils digitaux et les modèles commerciaux reposant sur le digital permettent aux travailleurs informels d’accroître leur productivité, d’améliorer leur production et de formaliser leurs activités. La fintech a en particulier obtenu des résultats remarquables en Afrique de l’Est en matière d’extension des services financiers aux populations peu bancarisées (voir l’encadré 1.2).

Les pouvoirs publics devront préparer la jeunesse africaine aux défis futurs liés à la digitalisation, tout en s’attaquant aux défaillances connues du marché du travail. En particulier, la jeunesse africaine devra acquérir des compétences essentielles pour s’épanouir à l’ère du digital. Les décideurs politiques peuvent jouer un rôle crucial en promouvant un plus grand recours à la fintech et en évitant que les travailleurs des plateformes digitales soient soumis à des conditions de travail précaires. Dans le même temps, les programmes de transition entre l’école et le travail doivent être repensés tant du point de vue de leurs priorités que sous l’angle de leur mise en œuvre, afin d’assurer une meilleure adéquation entre la formation des jeunes et les débouchés professionnels.

Outre l’accessibilité, d’autres facteurs (tels que les compétences, un prix abordable des services et la disponibilité d’un contenu adapté) ont également un impact sur l’utilisation d’Internet. L’utilisation régulière des services Internet demeure faible parmi les travailleurs indépendants, même lorsqu’ils vivent dans une zone géographique connectée. Seulement 16 % de ces travailleurs utilisent régulièrement Internet, alors même que 80 % d’entre eux possèdent un téléphone portable (graphique 1.10, panels A et B). De même, le taux d’utilisation régulière d’Internet est de 10 % parmi les personnes ayant un niveau d’études inférieur à l’enseignement secondaire, alors que 60 % d’entre elles possèdent un téléphone portable (graphique 1.10, panels C et D). Le taux d’utilisation d’Internet est même inférieur à 10 % parmi les agriculteurs (graphique 1.10, panels E et F). Le chapitre 2 abordera plus en détail les domaines d’interventions politiques prioritaires.

Le fort esprit d’entreprise de l’Afrique est un atout pour la création d’emplois. Les données issues des enquêtes réalisées entre 2013 et 2019 par le Global Entrepreneurship Monitor (GEM, 2020) montrent que l’Afrique obtient de meilleurs résultats que les pays d’Asie ou de l’ALC tant du point de vue de l’intention entrepreneuriale que de l’activité entrepreneuriale totale en phase de démarrage (AET).

Les entreprises africaines éprouvent des difficultés à se développer et à innover. En Afrique, seulement 17 % des entrepreneurs en phase de démarrage espèrent créer au moins six emplois, ce qui constitue le plus faible pourcentage au monde ; en Asie, ce chiffre s’élève à 21 %. Environ 19 % des entrepreneurs africains en phase de démarrage déclarent diriger une entreprise innovante ou avoir de fortes perspectives de création d’emplois, contre environ 27 % en Asie. Les mesures de confinement et le risque d’un effondrement économique durable du fait de la pandémie de COVID-19 constituent un nouvel obstacle à la croissance de ces entreprises.

Pour renforcer leur croissance et leur résilience, ces entreprises devront avoir davantage recours au digital, en particulier dans le cas des MPME. Parmi les entreprises couvertes par les enquêtes de la Banque mondiale auprès des entreprises, seulement 59 % de toutes les entreprises africaines utilisent Internet pour communiquer avec leurs clients et leurs fournisseurs, contre 50 % pour les petites entreprises africaines (graphique 1.11, panel A). Le pourcentage des entreprises possédant leur propre site web est encore plus faible, puisqu’il n’est que de 31 % pour toutes les entreprises africaines et de 23 % pour les petites entreprises du continent (graphique 1.11, panel B). Estimé à 5.7 milliards USD en 2017, le marché continental du commerce électronique représente moins de 0.5 % de son PIB combiné, alors que la moyenne mondiale s’établit à 4 %. Les obstacles à l’adoption du digital auxquels se heurtent les MPME vont de facteurs structurels tels que les problèmes d’infrastructures jusqu’à des facteurs propres à chaque entreprise, comme les capacités financières et organisationnelles.

Les réglementations publiques, les financements et les services aux entreprises peuvent aider les startup et les PME dynamiques à se développer et à soutenir la concurrence à l’ère du digital. En particulier, le rapport CUA/OCDE (2019) a identifié deux catégories d’entreprises prometteuses qui pourraient tirer le plus parti de la digitalisation pour se développer et créer de nouveaux emplois :

  • Les startup à forte croissance sont de petites entreprises avec un grand potentiel de croissance qui repose sur leur utilisation de technologies innovantes. Bien qu’elles représentent généralement moins de 10 % des petites entreprises dans les pays en développement, ces startup peuvent apporter une importante contribution à l’économie grâce à leur forte croissance et à leurs innovations (CFF, 2018). Dans le cas de l’Afrique, ce premier groupe est principalement dominé par de jeunes entreprises en phase de démarrage. Le tableau 1.4 décrit cinq exemples de modèles commerciaux de startup prometteuses qui s’attaquent aux obstacles traditionnels de développement en Afrique. S’ils bénéficient d’un soutien approprié, ces types de modèles commerciaux innovants peuvent rapidement se propager à l’ensemble du continent.

  • Les PME dynamiques déploient des produits existants ou des modèles commerciaux robustes pour assurer leur croissance en se spécialisant dans des marchés de niche, en élargissant leur marché ou en introduisant des innovations progressives. Leur potentiel de croissance et d’agrandissement est modéré et dépend de leur accès aux marchés régionaux et mondiaux. Les décideurs politiques peuvent aider ces entreprises à se développer en tirant parti des débouchés commerciaux ouverts par le digital, qui demeurent embryonnaires en Afrique. Estimé à 5.7 milliards USD en 2017, le marché du commerce électronique grand public du continent représente moins de 0.5 % de son PIB combiné, alors que la moyenne mondiale s’établit à 4 %.

La digitalisation constitue une priorité pour le programme d’intégration continentale de l’Afrique. À travers les programmes de l’Agenda 2063, l’Union africaine pilote plus de 15 initiatives visant à tirer parti des technologies et des innovations numériques au profit de l’industrie, du commerce, des services financiers et de paiement, de l’éducation, de l’agriculture, de la santé, etc. Conformément aux aspirations de l’Agenda 2063, l’objectif est également de renforcer la position de l’Afrique en tant que producteur digital au sein de l’écosystème mondial. L’annexe 1.A2 décrit quelques-unes de ces initiatives phares continentales, leurs grands objectifs et les principaux résultats attendus sur le plan digital.

L’Union africaine s’est donnée pour objectif de créer un marché unique digital d’ici 2030 (CUA, 2020a). À cet effet, la Commission de l’Union africaine (CUA) a élaboré une Stratégie de transformation digitale pour l’Afrique 2020-2030, qui a été approuvée par le Conseil exécutif de l’Union africaine lors de sa Trente-sixième session ordinaire, qui s’est tenue en février 2020. Cette stratégie prévoit « une société et une économie digitales intégrées et inclusives en Afrique qui améliorent la qualité de vie des citoyens africains, renforcent le secteur économique existant, en permettent la diversification et le développement, et garantissent au continent la maîtrise de son destin, l’Afrique assumant un rôle de producteur et pas uniquement de consommateur au sein de l’économie mondiale ». La stratégie s’appuie sur les initiatives et les cadres existants, tels que l’Initiative de politique et de réglementation pour l’Afrique numérique (PRIDA), le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) et la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). La CUA mobilise actuellement les partenaires du développement international pour mener à bien ce programme de transformation digitale :

  • Depuis avril 2020, la PRIDA, lancée en collaboration avec l’Union internationale des télécommunications (UIT) et l’Union européenne, a mis en place deux groupes de travail – le premier sur « les régimes d’autorisation et d’octroi de licences » et le second sur « la protection et la localisation des données » – en vue d’évaluer les réglementations, d’identifier les meilleures pratiques et de les harmoniser dans tout le continent.

  • L’initiative Économie digitale pour l’Afrique (DE4A) 2020-2030, mise en œuvre avec le Groupe de la Banque mondiale, aide les gouvernements à procéder à des investissements stratégiques dans le développement des infrastructures digitales, les services abordables, les compétences et l’esprit d’entreprise. Actuellement, 15 opérations d’investissement sont en cours de déploiement au sein du continent, et 29 autres sont en préparation.

  • La CUA assure par ailleurs la mise en œuvre d’un programme visant à garantir l’accès de l’Afrique aux technologies satellitaires et aux services de données qui leur sont liés. La Politique et stratégie spatiales africaines engagée en 2016 par l’UA vise à renforcer l’utilisation par l’Afrique de l’espace extra-atmosphérique dans des secteurs cruciaux tels que l’agriculture, la gestion des catastrophes, les prévisions climatiques, la défense et la sécurité. Les réseaux mobiles satellitaires constituent un moyen efficace en terme de coûts de développer ou d’améliorer les réseaux de télécommunications dans les zones où la densité des utilisateurs est inférieure à 200 abonnés au kilomètre carré (CUA, 2019). Ces réseaux mobiles peuvent être mis en place cinq à dix fois plus vite et pour un coût de 50 % plus bas que les réseaux terrestres. L’économie spatiale est en expansion, et elle est de plus en plus mondialisée (OCDE, 2019b). D’autres technologies émergentes ont le potentiel de relever les défis de la distance dans les zones rurales éloignées de manière rentable (voir chapitre 2).

Confirmant les orientations des projets phares de la CUA, l’enquête auprès d’experts réalisée par la CUA et l’OCDE en 2020 met en évidence plusieurs domaines où il serait possible de créer davantage d’emplois de qualité. Le graphique 1.12 récapitule ces domaines prioritaires par ordre décroissant. Par exemple, la coordination régionale et continentale des services de télécommunications en itinérance, de la réglementation des données et de la sécurité numérique est essentielle à la création d’emplois. Ensemble, ces domaines prioritaires peuvent créer un environnement favorable à la création de valeur grâce aux données et au développement de contenus locaux en Afrique. Les sous-sections suivantes mettent en lumière les domaines qui requièrent une action immédiate.

La coordination continentale est nécessaire pour remédier aux goulots d’étranglement dans l’accès à la bande passante internationale et pour assurer un coût d’accès plus abordable. Il est essentiel de mettre en place des points d’échange Internet − interconnectant les dorsales optiques terrestres − pour assurer à l’Afrique un accès aux services digitaux internationaux à moindre coût. Le PIDA fournit à cet égard un cadre d’action et un outil de suivi importants. Sur les 114 projets d’infrastructures des TIC prévus par le PIDA, 42 visent à améliorer les principaux points d’échange Internet, 37 sont dédiés à la construction de nouvelles infrastructures de fibres optiques à haut débit au sein du continent, et 34 ont pour objet de moderniser le réseau optique de câbles terrestres existant (AUDA-NEPAD, 2020). En juin 2020, 14 des projets de TCI du PIDA étaient achevés et opérationnels et 47 étaient en construction ou à un stade antérieur à l’achèvement (graphique 1.13).

Dans la prochaine phase du Plan d’action prioritaire 2021-2030 pour le PIDA, l’objectif sera de sélectionner un nombre plus restreint de projets viables. Les difficultés liées à la préparation des projets risquent de compromettre la réalisation des infrastructures de qualité (OCDE/ACET, 2020). Les problèmes suivants sont particulièrement importants à relever :

  • Les projets qui desservent le plus grand nombre possible de villes intermédiaires non connectées doivent figurer parmi les principales priorités. Les villes intermédiaires d’Afrique sont riches de promesses et ouvrent de nouvelles perspectives de transformation productive, de mise en relation des zones rurales et urbaines et de création d’emplois (voir OCDE/ACET, 2020).

  • Accélérer les programmes de mise en place de points d’échange Internet. Le volume du trafic intrarégional acheminé jusqu’aux points d’atterrissage des câbles sous-marins s’est accru de 37 % en 2018 pour atteindre 479 gigaoctets par seconde (Go/s) grâce à l’achèvement de nouvelles liaisons transfrontalières et à l’augmentation de la capacité des autres liaisons. Il convient de comparer ce chiffre aux 350 Go/s de 2017 et aux seulement 103 Go/s de 2014 ( Hamilton Research, 2020).

La création d’un marché unique panafricain des biens et services, comme le prévoit la ZLECAf, est prometteur en termes de croissance et de création d’emplois. D’après la CEA (2018), la suppression des droits de douane sur les marchandises permettrait à elle seule d’accroître les échanges intra-africains de près de 40-50 % entre 2020 et 2040. D’après la CNUCED (2018), la pleine mise en œuvre de la ZLECAf aboutirait à une augmentation de l’emploi de 1.17 %.

Pour aller de l’avant dans la mise en œuvre de la ZLECAf, les États membres de l’Union africaine (UA) ont commencé à négocier des protocoles sur l’investissement, les droits de propriété intellectuelle et la politique de la concurrence. Avant la pandémie de COVID-19, il était prévu que les négociations de la deuxième phase des négociations s’achèvent en décembre 2020. Les négociations en vue de la signature d’un protocole continental sur le commerce électronique et les échanges digitaux commenceront peu après la fin de la deuxième phase de négociations (Muchanga, 2020). La création d’un Système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) figure parmi les principaux résultats attendus sur le plan digital. Le PAPSS vise à permettre un règlement rapide des transactions transfrontalières grâce au digital. L’accélération des paiements et des règlements accroîtra la liquidité des marchés et renforcera les marchés de capitaux et les marchés financiers nationaux, régionaux et continentaux.

La CUA prévoit également de lancer une plateforme digitale pour aider les PME africaines à développer leurs activités. La CUA et l’African eTrade Group travaillent actuellement de concert en vue de créer une plateforme de commerce électronique à l’échelle continentale à l’intention des PME. Cette plateforme offrira aux PME un lieu d’échange en ligne et un moyen de règlement des paiements afin de faciliter les échanges transfrontaliers et la livraison de produits sur tout le continent, et de réduire ce faisant les coûts de transaction (CUA/A-eTrade Group, 2018).

L’Afrique peut tirer des enseignements de l’expérience des autres régions en matière de coûts d’itinérance (Bourassa et al., 2016). Un niveau élevé des coûts d’itinérance et des obstacles à l’utilisation des données qui en résultent risque de réduire très sensiblement les avantages de l’économie digitale et ralentir la mise en œuvre d’un marché unique digitale à l’échelle régionale (Cullen International, 2016 et 2019). D’autre part, les efforts pour créer un marché unique digital au sein de l’Union européenne ont offert des avantages immédiats aux consommateurs, aux entreprises et aux échanges en ligne (voir l’encadré 1.4). Le commerce électronique transfrontalier à l’intérieur de l’UE a augmenté de plus de 4 %, et le volume des échanges en ligne s’est accru de 5 % (Commission européenne, 2019b). Les pays africains devraient également s’attaquer sans tarder au problème des coûts d’itinérance intra-africains.

À ce jour, les progrès en direction de services d’itinérance intra-africains à prix abordable ou gratuits demeurent limités. Seules trois des Communautés économiques régionales d’Afrique – la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la CAE et la SADC – s’acheminent vers une réduction des coûts d’itinérance. En 2017, les États membres de la CEDEAO ont approuvé une réglementation qui permet aux citoyens en déplacement au sein de la région de ne régler aucuns frais supplémentaires d’itinérance et de bénéficier des tarifs locaux lorsqu’ils se rendent dans un autre État membre. Cette initiative est actuellement en cours de mise en œuvre et elle devrait présenter des avantages considérables du point de vue du bien-être des citoyens et de l’intégration régionale (Banque mondiale, 2018). La CAE a également décidé d’établir une règle d’itinérance au sein d’une « zone de réseau unique » (One Network Area) en 2014 (UIT, 2016). Au sein de la SADC, les tarifs d’itinérance devraient à présent être établis, depuis 2020, « au prix coûtant + 5 % » en vertu d’un projet adopté en 2014 (UIT, 2017, pp. 25-32). Ce projet a été approuvé par l’Association des organes de réglementation des télécommunications d’Afrique australe à la suite du rapport de 2014 sur l’itinérance au sein de la SADC.

Compte tenu de la dimension internationale des chaînes de valeur des données digitales, les pays africains ne devraient pas se limiter aux cadres nationaux de réglementation des données. Premièrement, une plus grande cohérence entre les réglementations des différents pays s’avère nécessaire pour naviguer parmi les données digitales mondiales. Malgré certains efforts régionaux et continentaux, le cadre national de réglementation des données de la plupart des pays africains demeure bien en-dessous de ce qui serait nécessaire à l’ère du digital. Deuxièmement, les données disponibles provenant de 64 pays entre 2006 et 2016 montrent que les tentatives isolées pour restreindre la circulation transfrontalière des données ou exiger un stockage local des données entravent le commerce de services et réduisent la productivité des entreprises locales (Ferracane et Marel, 2018). Troisièmement, un cadre continental unique serait plus efficace et plus simple à comprendre. En Europe, par exemple, depuis que le Règlement général de l’UE sur la protection des données (RGPD) est entré en vigueur en mai 2018, toute entreprise désireuse de faire des affaires au sein de l’UE doit se conformer à un certain nombre de principes et de lignes directrices similaires pour assurer le respect de la vie privée et la protection des données personnelles. À ce jour, seuls 28 pays d’Afrique disposent d’une législation exhaustive de protection des données personnelles (CNUCED, 2020c). Les experts considèrent déjà cette faiblesse comme un risque majeur pour le développement digital de l’Afrique (graphique 1.14).

Seul un pays africain sur cinq possède un cadre juridique en matière de cybersécurité (sécurité numérique), et 11 pays seulement ont adopté des règles juridiques de fond pour lutter contre la cybercriminalité (incidents de sécurité numérique) (Farrah, 2018 ; OCDE, 20156). En 2014, la 23ème Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’UA a adopté une Convention sur la cybersécurité et la protection des données personnelles, ce qui a constitué une première étape vers la coopération continentale. Toutefois, en juin 2020, elle n’avait été signée que par 14 États membres de l’UA, et ratifiée par 5 (Ghana, Guinée, Maurice, Namibie et Sénégal). On est encore loin des 15 ratifications nécessaires pour que la Convention entre en vigueur (CUA, 2020b).

Pourquoi la coopération en matière de sécurité numérique est-elle urgente ? Le coût de la cybercriminalité en Afrique est en augmentation et risque d’être un frein à la révolution digitale de l’Afrique ( Farrah, 2018). Plusieurs évaluations montrent que l’écosystème en ligne de l’Afrique est l’un des plus vulnérables au monde (Serianu, 2017 ; KnowBe4, 2019). Serianu (2017) estime que le coût de la cybercriminalité en Afrique s’élevait à environ 3.5 milliards USD en 2017, le Nigeria et le Kenya subissant à eux seuls des pertes de 649 millions USD et de 210 millions USD, respectivement. En outre, l’essor des technologies digitales fait émerger un ensemble de nouveaux problèmes plus complexes pour les organes de réglementation nationaux, dans des domaines tels que la fiscalité à l’ère du digital, la sécurité numérique, le respect de la vie privée, la protection des données personnelles et les flux transfrontaliers de données. L’intensité de ces problèmes tient à la conjonction d’une technologie en rapide évolution de par son essence même et de la nécessité pour les gouvernements d’y répondre par des cadres réglementaires et des mécanismes de mise en application adaptés aux objectifs visés, ainsi qu’à leur portée mondiale et à leur nature transfrontalière (OCDE, 2019c). Aussi, les juristes et les experts des organes publics de règlementation ne peuvent pas faire face à l’ampleur de ces problèmes séparément.

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Le gouvernement égyptien a soutenu pendant longtemps les startups locales grâce à des projets de financement spécialisés. En 2010, les pouvoirs publics ont inauguré le Technology Innovation and Entrepreneurship Centre (TIEC) dans le but d’encourager l’entrepreneuriat et l’innovation dans le secteur local des technologies de l’information et de la communication (TIC). Ce centre propose des équipements et un financement aux startups en phase de démarrage. Il apporte également un cadre en matière de propriété intellectuelle afin de favoriser l’innovation dans le domaine des TIC et la croissance de l’économie locale. En 2017, le TIEC a lancé le Fekratek Sherkatek (Ton idée, Ton projet) qui a permis de créer 42 startups locales chacune dotée de 100 000 EGP à 500 000 EGP (5 620 USD à 28 100 USD). En 2018, le Centre a créé le Falak Startups Accelerator, un programme d’accélération de quatre mois, proposé aux startups naissantes, qui s’accompagne d’un financement allant jusqu’à 1 million EGP (environ 63 000 USD), de la mise à disposition d’un espace de travail et d’un mentorat.

L’Égypte fait également partie des premiers pays d’Afrique à s’être dotés de parcs technologiques. En 2001, le gouvernement a lancé le développement du projet Smart Village au Caire, un parc technologique où secteurs public et privé sont partenaires et qui accueille des entreprises informatiques multinationales (comme IBM, CISCO et Microsoft), des prestataires d’externalisation du processus d’entreprise (par ex. Raya), des bureaux du gouvernement, des centres de recherche et de nombreuses autres entreprises technologiques. Le parc s’étend sur plus de 3 millions de mètres carrés. Depuis 2017, le gouvernement a investi dans le nouveau parc technologique de Maadi qui ambitionne de devenir un parc technologique et un parc d’affaires.

Les investisseurs locaux ont joué un rôle majeur dans l’accompagnement des startups en phase de démarrage. Des investisseurs providentiels et des accélérateurs (par ex. Algebra Ventures, Cairo Angels, Ebni, EdVentures, Flat6Labs) apportent leur soutien sous forme de mentorat, de réseaux et de financements allant de 50 000 EGP (2 800 USD environ) à 150 000 EGP (8 000 USD environ).

  • Depuis sa création en 2016, Algebra Ventures, située au Caire, a apporté des financements de Série A et de Série B à 15 startups du domaine technologique. Elle rejoint une liste d’investisseurs internationaux, principalement du Moyen-Orient (comme DiGAME, BECO Capital et Silicon Badia), qui financent et conseillent des startups pour qu’elles se développent en Égypte et à l’étranger.

  • Flat6Labs est une jeune entreprise qui propose des financements d’amorçage et un hébergement au sein de ses locaux et qui accompagne des entrepreneurs tout au long des premières étapes cruciales du développement. Créé en 2011, Flat6Labs était le premier membre originaire d’Afrique à intégrer le Global Accelerator Network (GAN) en mai 2012.

Grâce à ces initiatives, l’écosystème s’est rapidement développé ces dernières années et a attiré 59 millions USD d’investissements en fonds propres en 2018, alors qu’ils n’étaient que de 9 millions USD en 2017. Le Caire représente le plus grand écosystème de startups d’Afrique du Nord. La ville comptait plus de 400 startups dynamiques en 2019, pour la plupart au service des consommateurs du pays comme Swvl (transport en bus), Yaoota (comparateur de prix en ligne), Vezeeta (prise de rendez-vous médicaux) et Wuzzuf (plateforme de recrutement). Plusieurs startups, telles qu’Iqraaly, Bey2ollak et Eventtus, se sont développées plus largement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en particulier en Jordanie, au Liban, au Maroc et aux Émirats arabes unis. En 2019, avec le développement de Swvl au Kenya et au Nigeria, les startups égyptiennes entrevoient un virage stratégique vers le marché de l’Afrique subsaharienne (Digest Africa, 2019).

En 2007, Safaricom a lancé une des premières plateformes de paiement par téléphone mobile. Cette révolution de l’argent mobile a créé les fondations technologiques et la base d’utilisateurs nécessaires à l’apparition d’autres innovations et startups dans des secteurs tels que la fintech (comme Cellulant, CarePay et AZA Group [anciennement BitPesa]), les énergies renouvelables (par ex. M-KOPA et Powerhive) et le commerce en ligne (Twiga Foods et Copia Global). Aujourd’hui, le Kenya représente un des quatre écosystèmes technologiques les plus vastes et les plus dynamiques d’Afrique. En 2018, le secteur a contribué à hauteur de plus d’1 milliard USD à l’économie kenyane (KNBS, 2018).

Au-delà de ces résultats impressionnants, l’écosystème des startups de Nairobi a atteint une grande maturité et une profonde expérience. Il rassemble plus de 200 startups locales et des entreprises reconnues mondialement telles qu’IBM, Intel et Microsoft. Depuis 2010, iHub offre un environnement dynamique, des réseaux fiables et des infrastructures de grande qualité aux startups kenyanes. En 2019, les startups iHub avaient levé plus de 40 millions USD de financements en phase d’amorçage et de croissance, et le portefeuille d’entreprises iHub avait contribué à créer plus de 40 000 emplois en Afrique de l’Est. CcHub, au Nigeria, a acheté iHub et réalisé une des transactions les plus importantes du secteur technologique africain.

Le succès des secteurs technologiques a attiré les investissements des plus grandes sociétés mondiales technologiques. En 2019, Microsoft a lancé son Centre de développement pour l’Afrique à Nairobi. L’entreprise se prépare à investir plus de 100 millions USD dans l’infrastructure et l’emploi d’ingénieurs locaux qualifiés au cours des cinq premières années de fonctionnement. Toutefois, le manque de main-d’œuvre très qualifiée inquiète fortement les entreprises technologiques du Kenya. Les entreprises locales sont de plus en plus contraintes de faire venir des professionnels d’autres pays à des coûts élevés.

Le Kenya Communications Act de 1998 a fixé le cadre permettant la libéralisation et la règlementation du marché des télécommunications et des TIC au Kenya. En 2004, cette initiative a donné lieu à un régime d’attribution des licences basé sur le marché qui a mis fin au monopole de Telkom Kenya. En 2007, Government’s Vision 2030 a considéré le secteur des TIC comme un pilier essentiel du développement et approuvé la création de la Ville technologique de Konza, projet phare du projet (KoTDA, 2019). Le projet devrait attirer 15.5 milliards USD d’investissements, permettre de créer 100 000 emplois et de générer 1 milliard USD par an à compter de début 2022 (Ventureburn, 2018).

En 2009, le gouvernement kenyan a conduit l’investissement dans quatre câbles de fibre optique permettant d’améliorer la qualité de l’Internet haut débit tout en diminuant son coût. Le secteur des TIC du Kenya est gouverné par une politique nationale mise en œuvre en 2019. Toutefois, d’autres documents stratégiques majeurs et plusieurs éléments de législation ont été développés depuis.

Le Nigeria offre aux startups l’environnement le plus foisonnant d’Afrique. L’écosystème de Lagos, également connu sous le nom de Yabacon Valley, détient un capital d’une valeur estimée à 2 milliards USD en 2017, le plus important en Afrique (Startup Genome, 2019). Il accueille la première licorne d’Afrique (Jumia) ainsi que d’autres startups dynamiques du commerce électronique (Konga, Carmudi et Jovago), de la logistique (Kobo 360), de la santé (Lifebanks) et des plateformes de réservation (Hotels.ng), entre autres. De plus, la scène technologique nigériane s’étend au-delà de Lagos. D’autres grandes villes, comme Ibadan et Abuja, possèdent des communautés de startups bouillonnantes dans certains secteurs tels que les technologies agricoles, l’éducation, l’énergie et la santé.

Cette croissance rapide de l’écosystème technologique du Nigeria s’explique essentiellement par deux facteurs qui se renforcent l’un l’autre : le fort degré d’attractivité du marché national du Nigeria pour les géants mondiaux de la technologie, et un vivier croissant d’éléments compétents à l’esprit d’entreprise.

  • Premièrement, compte tenu des prévisions démographiques qui annoncent un doublement de la population passant de 206 millions en 2020 à 401 millions en 2050, les perspectives du marché des TIC au Nigeria sont très attractives pour les entreprises technologiques mondiales. En 2009, IBM a ouvert son premier pôle en Afrique de l’Ouest, à Lagos, et investi plus de 50 millions USD dans les startups locales sous forme de subventions allouées via des appels à projets. En 2017, Google a ouvert le premier Launchpad Space de son programme mondial destiné aux startups en phase d’amorçage en dehors des États-Unis, à Lagos. En 2018, Facebook a lancé son premier pôle africain à Lagos. D’autres entreprises phares, comme MTN Nigeria, Nokia et MainOne, sponsorisent désormais des incubateurs de startups. En 2019, plus de 147 startups nigérianes ont bénéficié de 377 millions USD de financements issus de 100 investisseurs en capital-risque, de programmes d’accélération et d’autres types d’investisseurs. Près de 90 % de ces capitaux provenaient d’investisseurs internationaux (Techpoint, 2019).

  • Deuxièmement, les innovations technologiques du Nigeria bénéficient d’un vivier important de jeunes talents. Nombre d’entre eux ont l’esprit d’entreprise et sont prêts à tirer profit des dernières technologies. D’après les prévisions, le nombre de jeunes issus de l’enseignement supérieur devrait être multiplié par quatre et passer de 7 millions à 28 millions d’ici 2040. La communauté de la diaspora nigériane représente également un réseau d’envergure et expérimenté à l’échelle internationale, ainsi qu’un vivier de compétences spécialisées. En 2010, le premier incubateur local du Nigeria, Co-Creation Hub (CcHub), est né à Yaba, Lagos. En 2015, CcHub a lancé un fonds d’innovation de 5 millions USD qui avait aidé plus de 50 startups technologiques fin 2018. En 2019, CcHub a acheté le kenyan iHub, concrétisant l’union entre deux des plus grands incubateurs d’Afrique.

Au début, le secteur public n’a joué qu’un rôle limité dans la réussite relative du secteur technologique du Nigeria. En 2007, l’Information Technology Development Act du Nigeria a donné naissance à une instance spécialisée — la National Information Technology Development Agency – chargée de développer et réglementer le secteur. Ceci a ouvert la voie à plusieurs autres stratégies et plans. Les États d’Edo et de Kaduna ont également mis en œuvre leurs propres stratégies et initiatives locales (Banque mondiale, 2019). Toutefois, la mise en œuvre a progressé de façon limitée, à l’image, par exemple, du lancement au ralenti de zones d’accès sans fil gratuit dans certaines écoles (Gillwald, Odufuwa et Mothobi, 2018). Le dernier plan d’action national pour les TIC 2017-20 est plus ambitieux. Il a fixé un cadre intégré et des orientations stratégiques pour le secteur des TIC au Nigeria : i) la gouvernance ; ii) les cadres politiques, juridiques et règlementaires ; iii) l’industrie et l’infrastructure ; et iv) le renforcement des capacités.

La promesse d’une filière des TIC nigériane concurrentielle au niveau mondial est particulièrement importante et au cœur des projets de diversification de l’économie du pays, moins dépendante du pétrole. En adoptant les bonnes mesures, ceci pourrait également apporter une réponse au problème de la fuite des cerveaux et soutenir la croissance du PIB à long terme.

L’Afrique du Sud héberge 78 technopoles. C’est le deuxième pays le mieux doté du continent et près de 60 % de ces technopoles sont basées au Cap. Alors que Johannesburg et ses nombreuses entreprises implantées constituent la capitale financière et économique du pays, Le Cap abrite plus de 800 startups technologiques. Elles concentrent leurs activités dans de multiples secteurs tels que la fintech (Jumo, MFS Africa, Lulalend, Yoco), les échanges de cryptomonnaie (Luno et OVEX), l’éducation (African Leadership Academy), les services aux consommateurs (Travelstart, SweepSouth), l’agriculture de précision (Aerobotics) et l’équipement TIC (Stalcor, Sensor Networks, Nervedata, Cape). La province du Cap-Occidental héberge également des entreprises de délocalisation qui ont créé plus de 12 000 emplois en 2018 et 2019 (BPESA, 2019).

La Cape Innovation and Technology Initiative (CiTi) est le plus ancien incubateur du secteur technologique d’Afrique, fondé en 1998 par des acteurs du secteur et des citoyens bien inspirés. Le Cap bénéficie d’une riche pépinière de talents issus des établissements universitaires voisins, d’infrastructures de TIC solides et de liens professionnels avec le monde. La ville offre également un environnement de financement qui a fait ses preuves avec des apporteurs de capital-risque tels que Naspers, un des plus grands investisseurs du secteur technologique au monde, et des accélérateurs et des pôles d’incubation bien implantés. Par exemple, d’après le bilan financier de l’entreprise publié en mars 2020, Naspers a investi 1.3 milliard USD dans des entreprises existantes et naissantes entre mars 2019 et mars 2020 et généré 2.9 milliards USD de gains nominaux.

Un autre bon exemple est la Silicon Cape Initiative, une organisation communautaire fondée sur les adhésions, créée en 2009, qui a pour objectif de mettre les entrepreneurs en relation avec le capital-risque, les ingénieurs et d’autres partenaires acteurs de l’écosystème. La base des membres a progressé jusqu’à dépasser les 350 000 adhérents en 2018. La Silicon Cape a signé un accord de collaboration avec le parc numérique Hamburg@Work de Hambourg, en Allemagne, afin de donner accès à ses membres à des réseaux de soutien, des chaînes d’approvisionnement et des marchés européens, et pour leur offrir d’autres occasions d’apprentissage.

Le gouvernement de l’Afrique du Sud incite activement au développement de l’écosystème numérique depuis le début des années 2010. La frise chronologique met en avant quatre documents de la stratégie numérique depuis 2010. Pourtant, la mise en œuvre est peu efficace, en particulier à cause de plusieurs changements et d’irrégularités dans la formulation des mesures adoptées entre 2009 et 2014 (Gillwald, Mothobi et Rademan, 2018). La fracture numérique nécessite la mise en œuvre d’actions plus poussées. À titre d’exemple, 61 % des habitants en zones rurales n’utilisent pas Internet, contre 39 % en zones urbaines. Le Plan national de développement de l’Afrique du Sud 2030, élaboré en 2015, souligne l’importance d’un haut débit abordable et d’un environnement de TIC mieux structuré. Ceci pourrait donner un élan à la transformation digitale de l’Afrique du Sud.

Notes

← 1. Au Rwanda, les virements de personne à personne ont augmenté de 377 % en seulement cinq semaines suite à cette décision, et le nombre de transactions a atteint 3 millions par semaine, contre 0.9 million la semaine antérieure à cette décision (article de presse disponible à l’adresse https://nextbillion.net/covid-rwanda-mobile-money/).

← 2. M-PESA, le service de paiement mobile du Kenya, était à l’origine en 2005 une expérience de remboursement des emprunts à travers les téléphones portables dans le cadre des systèmes de microcrédit, mise en place grâce à un partenariat public-privé entre le ministère britannique du Développement international, le gouvernement du Kenya et Vodafone.

← 3. Tout au long de ce rapport, la définition de la jeunesse (ou des jeunes) renvoie à celle de la Charte de la jeunesse de l’Union africaine, qui recouvre la tranche d’âge de 15 à 35 ans. Cependant, pour des raisons de disponibilité des données, les statistiques présentées dans ce rapport correspondent aux 15-29 ans.

← 4. Afin de remédier aux problèmes d’endogénéité au moment de déterminer les relations de cause à effet, cette étude utilise les perturbations des réseaux câblés sous-marins provoquées par les tremblements de terre en tant que variable instrumentale du recours au courrier électronique.

← 5. Comme la pénétration de l’Internet fixe (filaire) à haut débit reste très limitée (moins de 5 % de la population en 2018), la majorité des Africains accèdent à Internet via leurs téléphones portables.

← 6. Pour une définition de la sécurité numérique, de la cybersécurité, de l’incident de sécurité numérique et de la cybercriminalité, voir OCDE, 2015 : 4.

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