8. Différends

Les droits et obligations des contribuables sont souvent définis par la loi ou des chartes fiscales. Le tableau 8.1 présente certains des droits et obligations les plus fréquemment mentionnés. Ces droits et obligations s’appuient sur un accès effectif à des procédures permettant aux contribuables de contester le calcul de l’impôt et les décisions. De telles procédures permettent aux contribuables de faire valoir leurs droits, et de mettre œuvre des contrôles appropriés quant à l’exercice des compétences fiscales des administrations. Les administrations fiscales et les contribuables devraient néanmoins également s’efforcer de travailler ensemble afin d’éviter la survenue de différends, ce qui permettrait d’alléger à la fois la charge de travail et les incertitudes pour les deux parties.

Ce chapitre examine les mécanismes de règlement et d’examen des différends en vigueur dans les juridictions couvertes par le présent rapport, ainsi que leurs performances dans ce domaine, et se penche sur les stratégies de prévention des différends qu’elles ont mis en place.

Les 58 juridictions couvertes dans ce rapport accordent aux contribuables le droit de contester l’établissement de l’impôt. Presque toutes les administrations déclarent disposer d’un mécanisme de contrôle interne, et une grande majorité d’entre elles offrent aux contribuables la possibilité de demander un examen indépendant par un organisme externe, un moyen qui peut contribuer à améliorer la sécurité juridique pour les contribuables, tout en évitant le risque de procédures judiciaires potentiellement longues et coûteuses. S’agissant des administrations qui proposent les deux mécanismes d’examen, environ 70 % d’entre elles imposent aux contribuables de demander un examen interne avant que leur cas ne puisse être examiné par un organisme externe (voir graphique 8.2).

Si les administrations fiscales ne peuvent généralement pas contrôler le calendrier des procédures judiciaires, nombre d’entre elles s’emploient à améliorer les procédures de règlement des différends afin de les accélérer. Parmi les solutions proposées, on peut citer la médiation ou d’autres mécanismes non judiciaires. L’exemple présenté dans l’encadré 8.2 illustre comment les avancées technologiques offrent aux administrations fiscales de nouvelles possibilités d’améliorer l’efficacité des procédures de règlement des différends.

Pour améliorer efficacement les procédures de règlement, il est nécessaire de disposer de mécanismes fiables d’information et de suivi. De nombreuses administrations se sont employées à améliorer le niveau des informations de gestion disponibles, si bien que le présent rapport contient des informations sur les performances d’environ 90 % des administrations.

Les tableaux  8.2 et 8.3 montrent l’évolution entre 2018 et 2020 du nombre de nouveaux dossiers examinés et de dossiers non clôturés en fin d’exercice ayant fait l’objet d’une procédure de contrôle interne et externe. Entre 2019 et 2020, la majorité des administrations ont fait état d’une diminution du nombre de nouveaux dossiers et de dossiers non clôturés en fin d’exercice. S’agissant des dossiers qui font l’objet d’une procédure de contrôle interne, on note un changement par rapport à la période 2018-2019, au cours de laquelle la majorité des administrations avaient observé une augmentation du nombre de dossiers.

Les graphiques 8.2 et 8.3 examinent plus en détail les données au niveau des juridictions, et montrent l’évolution entre 2019 et 2020 du nombre de dossiers non clôturés en fin d’exercice ayant fait l’objet d’une procédure de contrôle interne et externe. Il est intéressant de noter l’augmentation significative du nombre de dossiers examinés signalés par quelques juridictions.

On notera par ailleurs que le volume des dossiers varie considérablement d’une juridiction à l’autre, et lorsque ce volume est très faible, il peut y avoir des fluctuations importantes d’une année sur l’autre. Le graphique 8.4 confirme cette observation, et met en lumière les différences importantes qui existent entre les juridictions quant au recours à des procédures de contrôle interne.

Il n’est pas rare que la législation fiscale donne lieu à des interprétations différentes par les contribuables et l’administration fiscale, et que cela aboutisse à des différends après que les procédures de contrôle interne et externe ont été achevées. Bien que les administrations fiscales déclarent que la plupart des différends sont résolus sans qu’il soit nécessaire de recourir à une procédure judiciaire, le graphique 8.5 illustre les performances des administrations en ce qui concerne les dossiers jugés par les tribunaux. On constate des écarts importants dans le taux de réussite des administrations, même si, pour certaines juridictions, le nombre de dossiers jugés est très faible, ce qui signifie que les résultats peuvent fluctuer considérablement d’une année à l’autre.

Comme le règlement des différends peut mobiliser énormément de ressources, la prévention demeure la stratégie la plus efficace, et l’un des éléments clés d’un système de prévention des différends consiste à formuler des orientations et à fournir des conseils aux contribuables. Il s’agit d’une pratique courante des administrations fiscales dans le cadre de leur stratégie globale de service. Elles peuvent notamment diffuser des informations ou proposer des outils interactifs sur leur site web, publier des lignes directrices et des notes d’information destinées aux contribuables, et mettre en œuvre des initiatives éducatives et de soutien à l’intention des entreprises.

De plus, de nombreuses administrations ont mis en place des dispositifs spécifiques de prévention des différends. Par exemple, dans le chapitre intitulé Innovations in dispute resolution de l’édition 2019, l’administration fiscale australienne (Australian Taxation Office) donne des explications sur le dispositif d’examen indépendant portant sur le bien-fondé du dossier de contrôle fiscal d’un point de vue technique avant sa finalisation. L’examen vise à encourager un dialogue plus précoce afin de résoudre les différends (OCDE, 2019[1]). À l’origine, ce service n’était destiné qu’aux grandes entreprises dont le chiffre d’affaires annuel dépasse 250 millions AUD. Toutefois, à l’issue d’une phase expérimentale jugée concluante, ce dispositif a été étendu aux petites entreprises, c’est-à-dire à celles dont le revenu ou le chiffre d’affaires est inférieur à 10 millions AUD (Australian Taxation Office, 2022[2]).

Comme le montre le tableau A.120 de l’édition 2019 (OCDE, 2019[1]), conformément à leur engagement d’apporter aux contribuables des garanties quant au traitement qui leur sera appliqué, il est désormais courant que les administrations fiscales précisent comment elles interpréteront les lois qu’elles mettent en œuvre, ainsi que la législation fiscale dans des situations particulières, au moyen de décisions relevant d’une des deux catégories suivantes :

  • Une décision publique est une déclaration par laquelle une administration explique comment elle interprétera les dispositions de la législation fiscale dans des situations données. En règle générale, l’objectif d’une décision publique est de clarifier l’application de la loi, en particulier lorsqu’un grand nombre de contribuables peuvent être concernés par des dispositions particulières, et/ou lorsqu’une disposition est source de confusion ou d’incertitude. Une décision publique revêt généralement un caractère contraignant pour l’administration fiscale si elle s’applique au contribuable et que ce dernier s’y réfère.

  • Une décision privée porte sur une demande précise d’un contribuable (ou de son représentant fiscal) visant à obtenir plus de certitude quant à l’application de la loi par l’administration fiscale dans le cadre d’une ou de plusieurs transactions à l’étude ou achevées. L’objectif d’une décision privée vise à apporter aux contribuables davantage de soutien et de certitude quant aux conséquences fiscales de transactions plus complexes.

Ces dernières années, le recours aux accords de coopération pour gérer la discipline fiscale et renforcer la sécurité juridique en matière fiscale a mobilisé une attention croissante. Ces programmes passent souvent par une plus grande transparence dans la relation entre l’administration fiscale et le contribuable, et peuvent nécessiter des approches plus proactives afin de remédier aux risques fiscaux importants. Le concept de discipline fiscale coopérative a fait l’objet de plusieurs rapports rédigés par l’OCDE, dont le plus récent est intitulé Co-operative Tax Compliance: Building Better Tax Control Frameworks (OCDE, 2016[3]).

Étant donné que les programmes de discipline fiscale coopérative mobilisent énormément de ressources en raison du niveau élevé d’engagement entre les agents de l’administration fiscale et les contribuables, ils étaient traditionnellement réservés aux grandes entreprises. Cependant, les progrès technologiques dans le domaine de l’évaluation des risques ont conduit plusieurs administrations à étendre la formule à d’autres catégories de contribuables (voir graphique 8.6).

Le Programme international pour le respect des obligations fiscales (ICAP) est un processus de coopération multilatérale pour l’évaluation des risques et la certitude fiscale, fondé sur une participation volontaire. Il est conçu pour donner aux groupes d’entreprises multinationales (EMN) disposés à s’engager de manière active, ouverte et parfaitement transparente, une sécurité juridique accrue en matière fiscale concernant certaines de leurs activités et transactions. Le programme ICAP ne procure pas aux EMN la sécurité juridique qui pourrait être obtenue, par exemple, par le biais d’un accord préalable en matière de prix de transfert (APP). Il leur donne cependant une certitude et une sécurité lorsque les administrations fiscales qui participent à l’évaluation des risques d’une EMN jugent que le risque considéré est faible1 (OCDE, 2021[4]).

Les vérifications conjointes sont un autre instrument qui peut contribuer à prévenir les différends. Les agents de deux administrations fiscales ou plus s’associent pour former une seule équipe de vérificateurs chargée d’examiner les questions ou les transactions du ou des contribuable(s) ayant des activités commerciales internationales dans lesquelles les juridictions ont un intérêt commun ou complémentaire. Grâce à cette collaboration, les administrations fiscales participantes ont la possibilité de détecter et de résoudre les désaccords ou les différends potentiels à un stade précoce (OCDE, 2019[5]).

Bibliographie

[2] Australian Taxation Office (2022), Independent review for small businesses with turnover less than $10 million, https://www.ato.gov.au/General/Dispute-or-object-to-an-ATO-decision/In-detail/Avoiding-and-resolving-disputes/Independent-review/Independent-review-for-small-businesses-with-turnover-less-than-$10-million/ (consulté le 13 May 2022).

[4] OCDE (2021), International Compliance Assurance Programme – Handbook for tax administrations and MNE, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/publications-and-products/international-compliance-assurance-programme-handbook-for-tax-administrations-and-mne-groups.htm (consulté le 13 May 2022).

[5] OCDE (2019), Joint Audit 2019 – Enhancing Tax Co-operation and Improving Tax Certainty: Forum on Tax Administration, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/17bfa30d-en.

[1] OCDE (2019), Tax Administration 2019: Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/74d162b6-en.

[3] OCDE (2016), Co-operative Tax Compliance: Building Better Tax Control Frameworks, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264253384-en.

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