5. Biodiversité

La biodiversité est en déclin au Luxembourg depuis plus de 40 ans. Les causes en sont multiples: croissance économique rapide, urbanisation, intensification de l'agriculture, perte et dégradation des habitats, fragmentation du paysage, espèces exotiques envahissantes et changement climatique. Le pays a fait quelques progrès dans des domaines clés, mais il doit intensifier ses actions.

Le Luxembourg n'a pas atteint les objectifs ambitieux qu'il s'était fixés dans le premier plan national pour la conservation de la nature (2007-2011). L'évaluation finale du deuxième plan (2017-21) sera probablement elle aussi insuffisante. Il doit préparer son troisième plan sans tarder en accordant une attention particulière aux conséquences potentielles de l'impact du changement climatique et du déclin de la biodiversité sur les services écosystémiques. Les préoccupations relatives à la biodiversité doivent être pleinement intégrées dans les politiques agricoles, d'aménagement du territoire et dans d'autres politiques sectorielles (climat, logement, transports, etc.). Cela exigera une meilleure coordination entre les niveaux national et local, ainsi qu'un engagement fort de la part des communes.

Le Luxembourg, malgré la surface réduite de son territoire possède une biodiversité et des paysages variés dus à une diversité géologique et microclimatique importante. Le maintien de la diversité des espèces et la diversité génétique est essentiel à la capacité des écosystèmes à fournir des services écosystémiques favorisant la résilience au changement climatique. Or cette biodiversité est en déclin depuis plus de quarante ans, au niveau des espèces, des habitats et des écosystèmes. Le Luxembourg est l’un des pays européens avec le plus grand nombre d’espèces communes en déclin. Celui des insectes qui sont à la base de la chaîne alimentaire et de la survie des écosystèmes est inquiétant. La forte croissance économique et démographique du Luxembourg emmène des développements urbains qui concourent à fragmenter le paysage et les habitats. De plus, l’intensification des activités agricoles entraîne de fortes pressions sur la biodiversité. En conséquence les écosystèmes naturels sont menacés.

La part des espèces d’intérêt communautaire dont l’état de conservation est jugé comme favorable s’établit à 15 % (comparé à 18 % en 2013) alors que la part dont l’état est jugé comme défavorable est de 83 % (comparé à 63 % en 2013) (Graphique 5.1). Ce déclin n’est pas nouveau. Lors du dernier examen de l’OCDE, la situation des espèces menacées était tout aussi préoccupante : tous les reptiles, le quart des oiseaux, des poissons, des amphibiens et des plantes vasculaires étaient menacés.

La Liste Rouge des espèces menacées d’oiseaux nicheurs de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) affiche ce qui suit (2020):

  • 13 espèces sont considérées éteintes, dont le Tarier des Prés (Saxicola rubetra), espèce bien présente il y a 30 ans encore.

  • 26 espèces sont dans un état de conservation critique.

  • 24 espèces se trouvent sur la liste d’alerte afin d’accroitre leur surveillance.

Le déclin des insectes enregistré au cours des quatre dernières décennies en Europe du Nord-Ouest est alarmant. Près du Luxembourg, en Allemagne, la biomasse d’insectes dans des aires protégées a diminué de 75 % en 27 ans (Hallmann et al. 2017). Cette dégringolade accélérée dépasse les pertes mondiales au niveau des vertébrés qui s’établit à 58 % sur 42 ans. Deux éléments importants sont à retenir au sujet de cette étude. Tout d’abord, il ne s’agit pas d’une étude sur la disparition d’espèces rares d’insectes mais de l’ensemble des populations d’insectes volants. Ensuite cette étude fut menée dans des aires protégées sensées protéger la biodiversité. Cette étude remet donc en question la capacité de ces aires à protéger la biodiversité de manière adéquate. L’intensification de l’agriculture (par exemple, l’utilisation de pesticides, le labour à longueur d’année, l’utilisation accrue d’engrais), ainsi que la fréquence des mesures agronomiques peuvent constituer des causes plausibles. En 2017, le Luxembourg ne comptait que 4 528 ha de terres en agriculture biologique (4.2 %).

En Belgique, des changements radicaux ont été observés dans l’abondance, la taille et la répartition des populations de bourdons. Entre 68 % et 88 % des espèces de bourdons ont connu un déclin au cours du siècle dernier et quatre espèces ont complètement disparu (RTBF, 2018). Cette tendance s’observe également au sein des populations d’abeilles domestiques au Luxembourg (Graphique 5.2). Seules quelques espèces ont tendance à accroître leur abondance relative et à dominer les autres, ce qui conduit à une homogénéisation des communautés de bourdons. Entre 1990-2009 et 2010-16 près des deux tiers des espèces de papillons ont aussi décliné dans leur zone d’occupation. Ce constat est valable à la fois pour les espèces de papillons des milieux herbeux comprenant des espèces dites « communes » et pour les espèces de papillons « spécialistes » des prairies.

Le déclin vertigineux des insectes est très préoccupant. Ils servent de nourriture à 60 % des oiseaux et 80 % des plantes sauvages en dépendent pour leur pollinisation (Hallmann et al. 2017). La déchéance des populations d’insectes se répercute inéluctablement chez nombre de population d’oiseaux, d’amphibiens, reptiles, poissons et de petits mammifères et bien entendu sur la capacité des écosystèmes à fournir leurs services essentiels. Le gouvernement a initié fin 2019 la préparation d’un programme d'action spécifique avec des mesures renforcées de protection des insectes pollinisateurs sur le territoire luxembourgeois.

Malgré que 19 % de l’état de conservation des oiseaux soit inconnu, la tendance négative de ce groupe d’espèces n’est pas différente de celle affectant l’ensemble des espèces d’intérêt communautaire. Seulement le tiers des oiseaux ont un état stable et amélioré alors que la moitié sont dans un état dégradé et instable.

Diverses espèces d’oiseaux champêtres sont en déclin depuis quatre décennies au Luxembourg. Parmi eux, le vanneau huppé, l’alouette des champs, le bruant cendré, la pie-grièche grise, une des espèces jugées prioritaires selon le 1er Plan national de protection de la nature 2007-11 (PNPN1). Ces espèces suivent les tendances des oiseaux des milieux ouverts au niveau européen marquées par une régression de l’ordre de 50-100 % depuis 1980.

Les régressions de ces espèces indicatrices pour les milieux ouverts sont largement imputables à l’intensification de l’exploitation agricole, notamment au niveau des herbages, qui conditionne des pertes de surface de l’habitat ainsi que des diminutions de sa qualité.

Quelques espèces rares et emblématiques sont en progression, entre autres grâce à des mesures ciblées, telles que le faucon pèlerin (Falco peregrinus), le grand-duc d’Europe (Bubo), la chouette chevêche (Athene noctua), les deux espèces de milans (Milvus milvus et Milvus migrans), la cigogne noire (Ciconia nigra) et la nouvelle apparition de la cigogne blanche (Ciconia ciconia) en tant que nicheur.

Les populations de plusieurs espèces de mammifères sont assez stables au Luxembourg. Le Chat sauvage est relativement bien réparti dans le pays, avec une présence accrue d’individus hybrides dans certaines régions comme l’Alzette supérieure. À l’instar du Chat sauvage, la Martre occupe la plupart des régions du pays, une occupation stable depuis plusieurs années. Le Putois européen, difficile à observer, a pu être repéré dans les mois de mars-avril à proximité de points d’eau. Le Muscardin, espèce dont la distribution était méconnue avant la mise en place du programme de surveillance, se révèle être présent de manière assez homogène dans l’ensemble du pays, alors que la Loutre d’Europe n’est plus observée.

Les connaissances de distribution et d’abondance des espèces d’amphibiens se sont améliorées. Parmi les 13 espèces d’amphibiens évaluées, 3 espèces sont fortement menacées (Hyla arborea, Epidalea calamita, Bombina variegata), 1 espèce se trouve sur la liste d’alerte (Alytes obstetricans), 1 espèce est reportée comme éteinte (Pelobates fuscus) alors que 8 espèces sont considérées comme non menacées.

Peu d’information est disponible concernant l’état des plantes au Luxembourg. Certaines ont leur plus grande population continentale sur le territoire du Grand-Duché. D’autres ne sont connues que d’une seule station au niveau national, qui mérite de ce fait une attention particulière. Une étude récente établit la disparition des plantes à un rythme trois fois plus élevé que celui des espèces animales depuis 1900 (Humphreys et al., 2019).

Une évaluation de 55 espèces de plantes vasculaires exotiques publiée en 2013 révèle que, 9 espèces présentent un impact écologique élevé ; elles ont été mises sur la liste noire des espèces qui exigent des interventions pour limiter leur répartition et leur impact. Dix espèces ont un impact moyen et se retrouvent sur la liste de surveillance, tandis que 8 espèces, pas encore présentes sur le territoire luxembourgeois, ont été mises sur la liste d’alerte afin de guetter toute apparition. Les autres 28 espèces ont un impact écologique faible et n’ont pas été reprises dans une liste.

Concernant les vertébrés exotiques, une évaluation de 2014 de 25 espèces exotiques a révélé que 3 espèces présentent un risque élevé et sont reprises sur la liste noire, 5 espèces ont un impact moyen et se retrouvent sur la liste de surveillance, tandis que 2 espèces ont été mises sur la liste d’alerte. Quinze espèces ne sont reprises sur aucune liste étant donné que leur impact a été jugé faible. L’étude a utilisé le protocole ISEIA (Invasive Species Environmental Impact Assessment).

Concernant les invertébrés exotiques au Luxembourg, 52 espèces ont été évaluées en 2016 avec le protocole ISEIA. L’étude a mis en évidence que 8 espèces présentent un risque élevé ; elles sont reprises sur la liste noire. Cinq espèces ont un impact moyen et se retrouvent sur la liste de surveillance, tandis que 6 espèces ont été mises sur la liste d’alerte. Finalement, 33 espèces ne sont reprises sur aucune liste étant donné que leur impact est jugé faible. (MDDI, 2017a).

La dégradation des habitats au Luxembourg est préoccupante : le déclin de leur qualité est évalué à 78 % entre 1962 et 2007. Selon le dernier rapport (2018) sur l’état de conservation des espèces et des habitats couverts par la directive « Habitats », 32 % des évaluations biogéographiques des habitats sont favorables (25 % en 2013) ; 18 % sont défavorables-inadéquates (29 % en 2013) et 50 % sont défavorables-mauvais (46 % en 2013) (Graphique 5.3). L’accroissement de la qualité générale des habitats est une évolution positive qui doit être maintenue.

Les principaux facteurs de la détérioration de l’environnement naturel constatée au Luxembourg sont la perte et la dégradation d’habitats, la fragmentation des paysages, les espèces exotiques envahissantes et les changements climatiques. L’effet conjugué du changement climatique risque d’accentuer cette tendance négative avec des répercussions imprévisibles pour le fonctionnement des écosystèmes terrestres et aquatiques.

Les milieux accessibles comme les milieux ouverts ou aquatiques sont les plus affectés, alors que les milieux rocheux et forestiers, moins accessibles, sont mieux préservés (Graphique 5.3). Les habitats riches en biodiversité tels que les zones humides, les prairies sèches et les vergers utilisés de manière extensive ont gravement diminué au cours des 30 dernières années, prouvant une homogénéisation continue des paysages. L’habitat des milieux ouverts, telles les prairies maigres de fauche et les Landes à callune, le plus important en surface, affiche une régression annuelle alarmante. Un autre habitat dont l’état de conservation est « défavorable » sont les chênaies du Stellario-Carpinetum. Elles sont dégradées au niveau de leurs structures et fonctions dues à un manque de régénération des chênes et à la pression exercée par les gibiers herbivores, ainsi qu’à un changement de l’hygrométrie ou de la nappe phréatique.

Seulement 2 % des masses d’eau de surface se trouvent dans un bon état écologique. Ce faible pourcentage résulte d’un appauvrissement de la diversité biologique des cours d’eau et de modifications de leur hydromorphologie. L’état chimique des cours d’eau est mauvais en raison de la présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques, de métaux lourds et de pesticides. La situation n’est pas meilleure pour les masses d’eau souterraine ; les deux tiers sont classés dans un mauvais état chimique notamment à cause des nitrates et de pesticides. (MDDI, 2015).

La fragmentation des paysages au Luxembourg est la plus élevée en Europe: 93 % du pays est classé comme hautement fragmenté (Graphique 5.4). La densité du maillage des infrastructures de transport et d’urbanisation s’élève à 136 mailles/100 km2. Le quart de cette fragmentation se situe dans les zones de population concentrée et les deux tiers dans des zones de population plus éparses (AEE, 2019a). Elle résulte de la croissance démographique et économique et du développement des infrastructures de transport.

La fragmentation est considérée comme une des causes principales de la dégradation de la biodiversité et des écosystèmes. Elle est toutefois moindre dans les zones Natura 2000 qu’à l’extérieur de celle-ci. Une réduction de la taille des habitats et de la connectivité entre eux diminue l’espace vital pour la faune et la flore et limite par le fait même leur potentiel de reproduction.

Le changement climatique pourrait mener régionalement à des disparitions d’espèces et à l’apparition de nouvelles. Le climat est constamment soumis à différents facteurs d’origine naturelle ou humaine qui occasionnent des variations plus ou moins rapides et prolongées. Les effets du changement climatique devraient s’accentuer à l’avenir, modifier de façon importante la phénologie et les aires de distribution des espèces. Ces modifications sont actuellement constatables sur la biodiversité et sur les services écosystémiques au Luxembourg. Par exemple, des cyanobactéries ou algues bleues ont proliféré à la fin de juillet 2018 sur la totalité du lac de la Haute Sûre provoquant une interdiction prématurée de la baignade. De plus à cette même période, l’Administration de la gestion de l’eau a émis l’avis de ne pas faire de prélèvements d’eau de surface pour ne pas compromettre la survie d’organismes aquatiques.

Le régime hydrique peut être fortement affecté par les changements climatiques provoquant des surabondances d’eau et des inondations. Il peut aussi être réduit considérablement lors de sécheresses ce qui provoque habituellement des hausses de températures. Ainsi l’habitat pour les organismes aquatiques peut-être compromis pour plusieurs espèces. Le changement climatique est une cause importante de déclin sur la biodiversité qui s’ajoute aux effets des autres tendances contraires à la conservation des écosystèmes.

On reconnaît quatre types de services écosystémiques : les services d’approvisionnement, de régulation, de soutien et culturels. Au Luxembourg, une dégradation des écosystèmes et la perte de la biodiversité, couplés aux effets des changements climatiques ont réduit la capacité des écosystèmes à fournir certains biens et services socio-économiques vitaux : fourniture d’eau, lutte contre les inondations, régulation de la température et pollinisation.

En période caniculaire, la demande d’eau pour la consommation ou la baignade augmente. En même temps des restrictions sont imposées pour éviter des contaminations en raison de l’impact sur la qualité des eaux de surface des effluents de stations d’épuration ou pour maintenir la quantité d’eau pour la faune aquatique. Le manque d’espaces boisés particulièrement en milieu urbain, augmente la température ambiante et affecte particulièrement les enfants et les personnes âgées. À l’opposé, en raison d’une pluviométrie plus extrême, la mauvaise qualité des habitats aquatiques et humides nuit à la régulation des flux d’eau ce qui aggrave les inondations. Enfin, le déclin des insectes pollinisateurs peut nuire à l’agriculture et occasionner de sérieux impacts économiques.

Développer la connaissance sur l’état des écosystèmes et des services qu’ils fournissent au Luxembourg est important. Cela devrait s’accompagner d’une campagne de sensibilisation des décideurs nationaux et communaux à la nécessité de protéger des écosystèmes pour les services socio-économiques vitaux qu’ils procurent et d’interventions concrètes pour restaurer les écosystèmes dégradés pour qu’ils puissent fournir ces services.

Les aires protégées couvrent près de 50 % du territoire luxembourgeois. Toutefois ces aires sont souvent de faible superficie et multifonctionnels. Leur potentiel de conservation de la biodiversité et de fourniture de services écosystémiques est ainsi limité. Il peut être amélioré par la mise en place de diverses mesures comme la restauration, la réintroduction d’espèces et l’éradication d’espèces exotiques envahissantes, ou par l’accroissement de la connectivité écologique avec les espaces protégés environnants. Plusieurs des zones protégées possèdent plus d’un statut de protection en raison de leur contribution à différents objectifs de conservation. Un site Natura 2000 peut par exemple aussi être un site Ramsar en tant que milieu humide de valeur internationale. Dans ce cas, la zone doit répondre aux exigences de conservation de chacun des statuts.

Le Luxembourg a fait d'importants progrès dans la création de zones naturelles protégées d'intérêt national au cours de la décennie 2008-18. Ce sont des zones qui bénéficient de la plus haute protection pour la biodiversité au Luxembourg en raison de l’interdiction de plusieurs activités humaines. La protection peut être sous la forme de paysage protégé, et comme tel être grevées de servitudes et de charges en vue d'assurer la sauvegarde des habitats et des espèces, la sauvegarde du paysage ou le bien-être de la population. Lors du dernier examen de l’OCDE, la superficie de ces zones était de 3 734 ha (OCDE, 2010). On trouve maintenant plus de 8 000 ha, ce qui est un progrès notable. La dernière zone créée en 2018 englobe un grand massif forestier et fournit de l’eau à 6 % de la population luxembourgeoise, un service écosystémique irremplaçable.

Le réseau Natura 2000 occupe 27 % de la superficie nationale, comparé à une moyenne de 18 % dans l’UE. Le Luxembourg dispose de 66 sites Natura 2000, dont 18 zones de protection spéciales désignées dans le cadre de la directive « Oiseaux » couvrant 16 % (moyenne de l’UE: 12 %) et 48 sites d’importance communautaires (SIC) désignés dans le cadre de la directive « Habitats » couvrant 16 % comparé à la moyenne de l’UE: 13,8 %). (MECDD, n.d.).

Le Luxembourg a complété la mise en place du réseau Natura 2000 en 2018. En 2008, le réseau avait une superficie de 45 260 ha; il en a maintenant près de 70 000 ce qui représente une augmentation de 55 %. Les plans de gestion sont pratiquement terminés et la plupart des comités de pilotage pour les différents sites ont été mis en place. Il importe de souligner que la désignation d’un territoire comme zone Natura 2000 n’est que la première étape dans la démarche qui vise à ajouter à l’effort de conservation de la biodiversité par l’ajout d’un territoire. Il faut mettre en valeur le potentiel pour la biodiversité de la zone en le restaurant, en restreignant certaines activités, en établissant une connectivité avec d’autres zones protégées ou en y menant des activités spécifiques compatibles avec les caractéristiques environnementales de celui-ci. La date tardive à laquelle les plans de gestion ont été terminés ne favorise pas l’optimisation du potentiel de ces territoires pour la conservation ou l’arrêt du déclin de la biodiversité.

Les superficies couvertes par les parcs naturels au Luxembourg ont considérablement augmenté depuis le dernier examen et continueront de croître. S'appuyant sur ses deux premiers parcs naturels, celui de la Haute-Sûre et celui de l’Our, Le Luxembourg a créé un troisième parc en 2016, le Parc naturel du Mullerthal. Ce parc groupe 12 communes et couvre une superficie de 256 km2 avec une population de 23 000 habitants. A l’instar des deux autres parcs naturels, il ne s’agit pas d’une aire fermée comme un parc national, mais plutôt d’une région pour promouvoir le développement durable. La superficie des parcs naturels est maintenant de 785 km2 soit une augmentation de 69 % par rapport au dernier examen de l’OCDE 2010. Un quatrième parc est toujours en état de planification : le parc naturel des Trois Frontières chevauchant la frontière avec l’Allemagne. La gestion des parcs naturels est assurée par des syndicats mixtes composés de représentants des communes et de l’état sur la base de contrats de dix ans. Les parcs de la Haute-Sûre et de l’Our sont gérés en coopération avec des parcs naturels en Belgique et en Allemagne.

Le Luxembourg possède deux zones humides d’importance internationale inscrites sur la liste Ramsar, à savoir "Haff Réimech" dans la commune de Schengen (Encadré 5.2), et "Vallée de la Haute-Sûre", zone transfrontalière. La situation est inchangée par rapport au dernier examen (OCDE, 2010).

La biodiversité au Luxembourg est en déclin depuis plus de quarante ans (MDDI, 2017b). L’état de conservation des espèces et des habitats sont respectivement à 68 % et 80 % défavorable (Graphique 5.1 ; Graphique 5.3). Ces évaluations concernent l’ensemble du pays.

L’objectif des aires protégées est de fournir un refuge aux différentes espèces et de servir de réservoir de biodiversité pour la colonisation des écosystèmes environnants et même lointains pour les espèces migratrices. Force est de constater qu’elles n’ont pas su endiguer le déclin de la biodiversité. Déterminer les raisons de cet insuccès peut servir à trouver des pistes de solutions ou à prioriser des interventions qui pourront avoir un effet domino au bénéfice de la biodiversité.

Le Luxembourg n’évalue pas l’efficacité et l’impact des aires protégées individuelles et même du réseau sur les espèces menacées et sur la biodiversité en général. Le pays ne compte que peu d’aires fermées correspondant aux catégories 1 et 2 de forte conservation de l’UICN. Malgré l’utilisation intensive du territoire, le Luxembourg devrait consentir des efforts importants pour établir des zones de forte conservation, d’abord dans les milieux agricoles et ensuite, forestiers.

La protection de la biodiversité repose principalement sur le réseau Natura 2000 complété en 2018. Celui-ci regroupe des aires polyvalentes où la protection de la biodiversité doit cohabiter avec des activités socioéconomiques. Il importe donc d’optimiser ces sites avec (i) la mise en œuvre par les comités de pilotage de plans de gestion adaptés à chacun de ces sites et comportant des objectifs et des cibles précises, (ii) un système de reddition de comptes auprès des parties prenantes locales, et (iii) des évaluations régulières de l’efficacité des interventions menées sur chaque site. Les plans de gestion peuvent aussi inclure des démarches de restauration de sites dégradés et de réintroduction d’espèces. Lorsqu’approprié, les plans peuvent aussi inclure des infrastructures légères pour permettre au public de prendre contact avec la nature et de mieux apprécier sa valeur et son importance.

Ce réseau d’une importance capitale pour le pays ne pourra toutefois fournir de contribution réelle à la conservation que lorsque la connectivité biologique entre les différents sites sera assurée. Cette connectivité doit être complétée par la mise en place de couloirs biologiques terrestres et aquatiques. Elle doit aussi prévoir des passages pour favoriser la traversée d’infrastructures de transport. Par ailleurs, pour que la connectivité soit optimale, elle doit se baser sur des sites de qualité écologique, et le cas échéant inclure des sites restaurés dans le cas de dégradations biologiques.

La gestion et la conservation de la biodiversité doivent reposer sur des informations et des données comportant multiples paramètres. La mise en place d’un système de surveillance de la biodiversité sous la coordination du Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) en 2008 a été une avancée appréciable (Encadré 5.1). Il vise principalement à produire les données nécessaires pour satisfaire aux obligations de rapportage des directives « Oiseaux » et « Habitats » dans le cadre de l’Article 17 de la directive « Habitats ».

Afin de garantir un accès direct à ces données et à une actualisation permanente de celles-ci, l'intégration et l'interopérabilité des différentes banques de données géographiques sont essentielles, notamment celles du Ministère ayant l’Environnement dans ses attributions, du Musée national d’histoire naturelle (MNHN), de l’Administration de la nature et des forêts (ANF), de l’Administration de la gestion de l’eau (AGE), de l’Administration des Services techniques de l’agriculture (ASTA), du Département de l'Aménagement du Territoire ainsi que de l’Administration du Cadastre et de la Topographie sont essentielles.

Le MNHN et sa base de données « Recorder » sont reconnus comme la banque centrale de données pour les observations des espèces. Pour le milieu aquatique, l’AGE centralise l’information concernant les eaux de surface et souterraines, les caractéristiques chimiques et biophysiques, et la faune et la flore aquatiques.

L’ANF dispose d’une base de données centralisée destinée aux multiples acteurs gestionnaires d’espaces naturels comme les communes, les bureaux d’études, les organismes non gouvernementaux (ONG), etc. Toutes les données essentielles à la gestion des zones protégées, notamment les informations relatives aux programmes « biodiversité », aux conventions avec des particuliers, aux actions concrètes d’entretien, aux subsides, aux unités de gestion sont consultables, voire peuvent être encodées par les différents gestionnaires des sites.

En ce qui a trait aux pools compensatoires, une application en ligne permettant l’établissement de bilans écologiques sur base du système de quantification mentionné ci-dessus a été développée. Cette application constitue un outil unique et obligatoire à l’établissement de tels bilans pour des projets de compensation et de développement et est mise à la disposition de tous les acteurs concernés (ANF, stations biologiques, bureaux d’études). Un registre informatique des mesures compensatoires sera également développé.

Les objectifs nationaux du deuxième plan national de protection de la nature (PNPN2) sont adaptés aux objectifs de la stratégie biodiversité 2020 de l’Union européenne qui vise notamment à stopper le déclin de la biodiversité pour 2020. Ces objectifs correspondent également aux objectifs d’Aïchi de la Convention sur la Diversité Biologique pour 2020. Par ailleurs, le pays a aussi pris l’engagement de mettre en place les mesures pour contribuer à l’atteinte des objectifs de développement durable des Nations Unies (2015-30) notamment les objectifs 14 et 15 sur les écosystèmes marins et terrestres.

Le Ministère de l’environnement, du climat et du développement durable (MECDD) remplit un rôle politique et administratif qui consiste en l’élaboration, la mise en œuvre, la coordination et la supervision des décisions dans le domaine de l’environnement naturel. Il joue également un rôle charnière dans tous les efforts d’intégration des principes de la protection de la nature dans d’autres domaines et secteurs, notamment en tant qu’interlocuteur direct des ministères et administrations concernées. La traduction sur le terrain de décisions et orientations politiques en matière de protection de la nature est assurée principalement par l’ANF, ainsi que de l’AGE en collaboration avec les Syndicats de Communes, les ONG et les fondations œuvrant dans le domaine de la protection de la nature, le MNHN, des universités, les centres de recherche et l’ASTA. Cette multiplicité d’acteurs assure la décentralisation de certains projets et études, notamment au niveau communal.

L’ANF est, depuis 1965, chargée de la protection de la nature. Cette administration est également compétente pour la gestion des forêts soumises au régime forestier (État, communes, établissements publics), l’aide et la surveillance de la forêt privée et la chasse. Elle est placée sous l’autorité du MECDD. L’AGE, aussi sous l’autorité du MECDD, est chargée de la protection de la nature au niveau des cours d’eau (renaturation, continuité écologique, restauration des berges), de la protection des espèces aquatiques et de la pêche.

Les organes consultatifs sont le Conseil Supérieur de la Protection de la Nature et des Ressources naturelles (CSPN) et dans une moindre mesure, le Conseil Supérieur de la Chasse (CSC) et le Conseil Supérieur de la Pêche (CSP). Un certain nombre de communes ont mis en place des commissions consultatives de l’environnement.

L’Observatoire de l’environnement naturel, établi en 2005, a pour mission le suivi, l’évaluation et l’orientation de la politique nationale. Il est composé de représentants du MECDD, de l'ANF, de l’AGE, du MNHN, des communes et syndicats communaux ainsi que des associations de protection de la nature et de l'environnement. L’Observatoire aide le Ministre de l’Environnement et ses partenaires, notamment les communes et les syndicats communaux, à définir les orientations et le contenu de la politique en matière de protection de la nature et à évaluer l’état de conservation du milieu naturel au Luxembourg. Il joue un rôle clé dans le PNPN dans la mesure où il est chargé du suivi de sa mise en œuvre. Pour remplir ces fonctions, l’Observatoire est tributaire d’une analyse scientifique des données gérées par le MNHN, l’ANF et l’AGE. Le LIST contribue également à cet exercice.

La protection de la nature est une préoccupation au Luxembourg qui existe depuis longtemps. La première loi adoptée en 1885 visait à réglementer la chasse et la protection du gibier. Nombre de lois et de règlements furent adoptés par la suite notamment la Loi sur la protection de la nature (1965) et la Loi concernant la protection de la nature et des ressources naturelles (2004). Cette dernière prévoit entre autres que le ministre établit un plan national concernant la protection de la nature et que ce plan ’il est révisé tous les cinq ans (articles 51, 52). Une modification importante de cette loi en 2018 précise les modalités d’autorisation de construction et les compensations à faire dans le cas où des biotopes protégés, des habitats d’intérêt communautaire et des habitats d’espèces d’intérêt communautaire évalués non favorable sont réduits ou détruits. Ce système compensatoire est basé sur un calcul d’éco-points découlant d’un bilan écologique. Ce système s’apparente au principe de pollueur-payeur.

Le Fonds pour la protection de l’environnement (FPE) est alimenté par des dotations budgétaires annuelles et des recettes des éco-points. Il offre pour la protection de l’environnement naturel aux communes et aux établissements d’utilité publique des aides concernant les travaux d’aménagement, frais d’études et acquisitions de terrains pour la constitution du réseau de zones protégées et pour la cohérence écologique du réseau. Le Fonds pour la gestion de l’eau peut financer jusqu’à 100 % des coûts de renaturation des cours d’eau.

Le MECDD initie des contrats « biodiversité qui favorisent la biodiversité en milieu agricole en supplément des mesures agro-environnementales financées par le Ministère de l’Agriculture. Le MECDD offre également des programmes de soutien pour la sauvegarde de la biodiversité en milieu forestier et pour l’amélioration de l’environnement naturel.

Un Fonds cynégétique est financé principalement à partir d’un prélèvement sur les permis de chasse. Ses objectifs sont d’améliorer la situation du gibier, mais le fonds n’a pas fait de dépenses depuis quelques années. Il existe aussi un autre fonds, le Fonds spécial de la chasse, financé aussi par un prélèvement sur le permis de chasse dont l’objectif était de compenser les dommages aux récoltes causées par le gibier. Les dépenses sont d’environ 300 000 EUR par an. Un Fonds de pêche, financé par une taxe sur le permis de pêche, vise l’ensemencement et les aménagements d’habitats piscicoles.

Les importants instruments financiers communautaires comme le Fonds européen pour le développement régional (FEDER) et le Fonds européen agricole de développement rural (FEADER), ainsi que le programme LIFE+ sont accessibles et contribuent à divers projets. Le Luxembourg bénéficie d’un financement du Feader de 0,1 milliard EUR au cours de la période 2014-20.

Le PNPN2 adopté par le Gouvernement pour la période 2017-21 inclut la Stratégie nationale sur la biodiversité. Le PNPN2 propose des mesures détaillées dans les domaines de la biodiversité et des ressources naturelles. Il présente les objectifs de la Stratégie et les actions prévues qui sont conformes à la stratégie de l'UE en matière de biodiversité. La stratégie nationale vise ainsi à mettre en place une infrastructure verte, à restaurer les écosystèmes et leurs services ainsi qu’à obtenir un état de conservation favorable pour les espèces et les habitats protégés. Elle est aussi le principal instrument de mise en œuvre de l’Agenda 2030 plus particulièrement ses objectifs 14 et 15.

Les objectifs du PNPN2 sont :

  • Mettre pleinement en œuvre la législation relative à la protection de la biodiversité.

  • Préserver et rétablir les écosystèmes et leurs services.

  • Réduire considérablement la consommation foncière et la fragmentation des paysages.

  • Renforcer la contribution de l’agriculture et de la sylviculture au maintien et à l’amélioration de la biodiversité.

  • Lutter contre les espèces exotiques envahissantes.

  • Assurer la sensibilisation de la population.

  • Contribuer à enrayer la perte de la biodiversité au niveau mondial.

L’évaluation en 2012 des résultats de la mise en œuvre du PNPN1 a conclu que les menaces et pressions pesant sur la biodiversité et les écosystèmes s’étendaient de façon généralisée sur la totalité du territoire. Et ce malgré les efforts avérés et les mesures réalisées, hélas souvent localisées et restreintes. Le PNPN1 visait à enrayer la perte de la biodiversité à l’horizon 2010.

En conséquence, les mesures du second Plan visent à accroître considérablement l’efficacité sur le terrain du PNPN1 et un degré d’achèvement et de réussite supérieur. Par rapport au premier plan, le second présente l’avantage d’avoir 7 objectifs et 27 actions. Il comporte des indicateurs de mesures plus précis dans le temps qui facilitent l’évaluation les résultats.

Une gouvernance efficace de la législation et des politiques environnementales incluant les politiques sur la biodiversité de l'UE et du pays requiert un cadre institutionnel approprié, la cohérence et la coordination des politiques, l’application d’instruments juridiques et non juridiques, un engagement auprès des parties prenantes non gouvernementales. Une mise en œuvre réussie dépend aussi d’une administration centrale et communale accomplissant les tâches législatives et administratives comme l’adoption de solides dispositions d'exécution et une action coordonnée pour répondre aux objectifs de conservation de la biodiversité.

La loi du 3 août 2005 concernant le partenariat entre les syndicats de communes et l’État donne un cadre légal à la décentralisation de la protection de la nature au niveau communal et au cofinancement par l’État des travaux réalisés par les syndicats de communes pour la protection de la nature. Ainsi les communes ont pour mission de promouvoir sur le plan local la protection de la biodiversité, la conservation et la restauration des paysages naturels et la cohérence écologique. Elles contribuent à la sensibilisation du public en faveur de la protection de la nature ; elles peuvent conférer cette mission à un syndicat de communes.

L’action prévue par le PNPN1, d’accélérer le processus d’adhésion des communes aux stations biologiques a connu un grand succès. On retrouve 6 stations biologiques qui transposent des projets de protection de la nature au sein des communes partenaires. La couverture des stations biologiques est d’environ 75 % du territoire national ; elle a augmenté de 1 400 à 1 900 km2 entre 2011 et 2016. Les communes sont regroupées au sein de syndicats intercommunaux sous forme de stations biologiques (Sicona-Ouest, Sicona-Centre, SIAS, Naturpark Öewersauer, Naturpark Our, Naturpark Mëllerdall) œuvrant dans le domaine de la protection de la nature via convention avec le Ministère ayant la protection de la nature dans ses attributions. Une 7e station biologique (Biologische Station Osten) est actuellement en voie de création. D’ici 2021, et afin de bénéficier des mêmes subventions que les communes membres d’un syndicat, toutes les communes actuellement conventionnées et non membres d’un syndicat intercommunal devront être affiliées à un syndicat de communes œuvrant dans le domaine de la protection de la nature.

Le Conseil supérieur de la Protection de la Nature et des Ressources naturelles (CSPN) est l’organe de conseil du Gouvernement pour tous les projets d’envergure en matière de protection de la nature. Il a comme principale mission d’aviser les projets des plans de gestion Natura 2000 et des dossiers de classement des zones protégées d’intérêt national, ainsi que de superviser leur mise en œuvre. Sur le terrain, de nombreux acteurs sont impliqués dans la protection de la nature avec des activités souvent complémentaires et de multiples flux et échanges de données (Graphique 5.5).

L’élément central de coordination horizontale et verticale est le comité de pilotage (COPIL). L’objectif principal des COPIL Natura 2000 est de créer une plateforme régionale, dynamique et proactive, permettant une meilleure implication des acteurs locaux, communaux et régionaux pour favoriser le maintien de la biodiversité tout en tenant compte des exigences écologiques, économiques, sociales, culturelles et régionales. Un COPIL Natura 2000 permet une meilleure coordination des actions des acteurs locaux avec celles des administrations nationales, et facilite la mise en œuvre des mesures contractuelles. Par exemple, le COPIL «Éislek» est composé de représentants des ministères et des services régionaux des administrations, des 14 communes concernées, du Parc naturel de l’Our, d’exploitants agricoles et conseillers agricoles de la Chambre d’agriculture et de la coopérative agricole Convis s.c., du groupement des sylviculteurs, de la Société électrique de l’Our, de la section régionale de Natur&Ëmwelt et du Mouvement écologique, de l’ASBL Frënn vun der Schlënner ainsi que de l’Office régional du tourisme des Ardennes luxembourgeoises.

Comme les politiques de protection et de gestion des ressources en eaux sont intimement liées à la protection et la conservation de la biodiversité et aux mesures d’adaptation au changement climatique, une concertation a lieu entre les différents acteurs lors de l’élaboration des plans ou stratégies. Lors de la rédaction du plan de gestion des districts hydrographiques et du plan de gestion des risques d’inondations, des concertations ont eu lieu avec l’ANF, l’AGE et le MECDD. De même, des mesures inscrites dans les plans de gestion « eau » ont été intégrées dans le PNPN 2 ainsi que dans les plans de gestion « Natura 2000. La stratégie d’adaptation aux effets du changement climatique fait également référence aux plans de gestion « eau » et « nature ». Enfin, il est à noter que chaque projet de renaturation de cours d’eau, est élaboré en étroite collaboration entre l’ANF, l’AGE et le MECDD. Ces projets sont essentiels pour atteindre les objectifs concernant à la fois l’eau et la biodiversité. Des rencontres régulières du « groupe renaturation » ont lieu afin de coordonner les mesures.

Malgré ces efforts de concertation, la conservation de la biodiversité et des écosystèmes continue d’être considérée trop souvent de façon isolée, et d’être perçue comme entrant en conflit direct avec d’autres secteurs d’activités. En conséquence, diverses mesures ont été proposées dans cinq secteurs où l’intégration des principes favorisant la diversité biologique est prioritaire : l’urbanisme et le transport, l’aménagement du territoire, l’agriculture et le développement rural: la sylviculture, la gestion de l’eau.

Les ONG jouent un rôle important dans les programmes relatifs à la conservation de la biodiversité. Elles sont impliquées, au sein du CSPN, lors de la planification des grandes orientations politiques comme la préparation du PNPN2. Elles sont également impliquées dans la mise en œuvre des plans d’action qui en découlent telle que l’exécution des plans de gestion Natura 2000 à travers les COPIL. Des représentants d’ONG font aussi partie du « comité de gérance » avec des responsabilités dans le domaine des mesures compensatoires. Des délégués des parties prenantes sont aussi membres de « l’Observatoire de l’environnement naturel ».

Enfin les parties prenantes participent au Conseil Supérieur pour un Développement durable (CSDD). Le Conseil supérieur agit en tant que forum de discussion sur le développement durable. Il propose des recherches et études dans tous les domaines ayant trait au développement durable. Il établit des liens avec les comités comparables des pays membres de l’Union européenne. D’autre part, il suscite la participation la plus large des organismes publics et privés ainsi que celle des citoyens à la réalisation de ces objectifs.

L’utilisation d’instruments économiques tels les taxes, les subventions, les permis, les charges fiscales, les compensations économiques n’est pas fréquente au Luxembourg. Les recettes fiscales environnementales en pourcentage des recettes totales provenant des taxes et des cotisations sociales s’élèvent à 4,5 %, alors que la moyenne pour l’OCDE Europe est de plus de 6 % (Chapitre 3). Ces instruments peuvent être efficaces et efficients, mais nécessitent souvent des démarches d’information et de sensibilisation pour être acceptées par la population ou par les groupes concernés. L’utilisation de nouveaux instruments économiques est prévue dans la PNPN2 toutefois la mise en place tardive de ceux-ci n’a pas encore procuré les bénéfices de ces mesures.

Le contrat pour la biodiversité est un des instruments économiques utilisés par le Luxembourg pour arriver à un état favorable ou amélioré pour les 2/3 des habitats naturels et ainsi de répondre aux directives « nature » de l’UE. Ce régime vise en effet la conservation et la gestion écologique de terrains abritant des espèces ou habitats d’intérêt écologique particulier. Cet instrument, mis en place en 2002 et doté d’un budget de 10,5 millions EUR (2017-21), s’applique sur plus de 5000 ha avec une tendance croissante.

Un programme d’aide pour le milieu forestier qui couvre la moitié du pays est disponible. Il est accompagné d’un important effort de sensibilisation et de formation technique. L’objectif est également d’améliorer la biodiversité et le rétablissement des services écosystémiques provenant des forêts.

L'acquisition de terrains à des fins de protection de la nature par des organismes publics, tels que l'État, les communes ou les fondations d'utilité publique constituent souvent le seul moyen pour obtenir une protection définitive d’un biotope rare ou menacé à long terme. D'un point de vue financier, l'acquisition de fonds est, malgré le prix élevé des terrains, bien souvent plus avantageux que le paiement d'indemnités à long terme. Le PNPN2 vise l’acquisition de 50 % des terrains contenus dans les zones protégées, et de 100 % des terrains de leurs zones noyaux. Il vise aussi à favoriser ces acquisitions et la mise en œuvre de leur plan d’action par les communes ou les fondations. L’évaluation du PNPN1 par l’Observatoire de l’Environnement naturel avait souligné la faible utilisation de cette mesure. Pour la période du PNPN2, le budget associé à cette mesure est de 4,8 millions EUR. Compte tenu du coût élevé du foncier, le Luxembourg pourrait accroître ce budget. Il pourrait notamment prélever une taxe « biodiversité – services écosystémiques » à partir des transactions foncières et y associer le mécénat d’entreprises pour financer ces acquisitions.

L’Observatoire de l’Environnement naturel a développé un système de quantification de la valeur écologique des biotopes et habitats (éco-points). Ce système sert à évaluer la compensation des pertes découlant de la mise en place d’un projet susceptible d’affecter le patrimoine naturel. Des pools de compensation au niveau national et régional font office de réserves foncières à haut potentiel d’amélioration écologique et servent à compenser des projets ayant provoqué une détérioration du patrimoine naturel. Un répertoire a été instauré afin d’enregistrer les mesures réalisées dans les pools de compensation et de gérer l’attribution de ces mesures pour les projets à venir. La mise en place et la gestion des pools compensatoires régionaux sont assurées par les communes ou les syndicats de communes. L’estimation des achats et de la gestion de terrains pour la constitution d’un pool compensatoire est de 25 millions EUR (2017-21).

Le Luxembourg devrait veiller à prévenir la perte de biodiversité découlant de mauvaises compensations en utilisant les meilleures pratiques (OECD 2016) et ne considérer la compensation qu’à la suite des étapes primordiales d’évitement et de réduction. Un moyen d’optimiser les bénéfices des compensations serait d’attribuer les compensations dans les écosystèmes affectés. Le Luxembourg pourrait aussi coopérer avec les pays voisins et promouvoir l’application d’un système de compensation dans d’autres pays.

L’évaluation des incidences sur l’environnement (EIE) est un instrument important pour l’intégration des préoccupations de conservation de la biodiversité dans le processus de décisions des politiques et des programmes de développement. L’EIE est appliquée lors de la planification d’un projet pour déterminer les impacts potentiels et apporter des modifications pour les éliminer ou les rendre acceptables.

Cette démarche sert aussi à l’application du principe de précaution en environnement. Encadrée par une directive européenne de 1985 et modifiée fréquemment depuis, celle-ci a été transposée en législation nationale par la loi relative à l’évaluation des incidences sur l’environnement de 2018. Cette transposition est tardive par rapport à d’autres pays ; on peut présumer qu’une adaptation plus hâtive aurait permis d’éviter des incidences négatives pour la biodiversité comme la fragmentation ou la dégradation de biotopes importants.

L’EIE intègre les exigences des directives « Habitats » et « Oiseaux ». Ainsi, tout projet susceptible d’avoir des incidences significatives sur une zone protégée ou une espèce d’intérêt communautaire ou menacée (réseau Natura 2000) est soumis à une évaluation spécifique. Celle-ci se focalise sur les objectifs de conservation définis pour la zone protégée d’intérêt communautaire concernée. Le MECDD veillera par ses divers avis et conseils au maître d’ouvrage à assurer une coordination optimale entre l’évaluation « Natura 2000 » et l’EIE.

L’intensité de l’agriculture et l’abandon de surface sont deux facteurs clés de la diminution de la biodiversité au Luxembourg. L’agriculture, gestionnaire de 53 % du territoire national, détient le plus haut potentiel en matière de conservation et de protection de la nature par la modification des pratiques agricoles incluant la réduction des intrants.

Le PNPN2 vise d’ici à 2020 à étendre à un minimum de 10 % les zones cultivées dans les prés et prairies, les terres arables et les cultures permanentes, couvertes par des mesures de conservation de la biodiversité. La majeure partie de la pollution diffuse au Luxembourg est constituée de substances nutritives et de pesticides qui proviennent de l’agriculture et des domaines publics et privés. Le PNPN2 vise aussi à éliminer complètement les subventions néfastes pour la biodiversité en 2020. L’influence de l’agriculture intensive sur le milieu naturel reste négative ce qui est surtout dû à la difficulté à éliminer les subventions néfastes pour l’environnement. Le manque de terrain disponible pour établir des trames vertes et bleues limite le succès des mesures prévues dans le plan.

Depuis 2009, le Luxembourg encourage l'agriculture biologique par le biais d'un plan national spécifique. En 2017, on retrouve 132 producteurs (4,8 % des agriculteurs luxembourgeois) en agriculture biologique qui occupent 5 446 ha équivalant à une superficie agricole de 4.15 % au pays. L’objectif est d’accroitre la superficie à 20 % en 2025 (MAVDR, 2020 ; MAVPC, 2019). Depuis 2007, l’Institut sur l’agriculture biologique et la culture agraire œuvre à l’amélioration et au soutien de l’agriculture biologique par la recherche, le conseil et le transfert de connaissances. L’Institut aide les agriculteurs à effectuer leur transition vers l’agriculture biologique ou biodynamique.

Le Luxembourg se distingue de la majorité des autres pays de l’Union européenne par un double système d’aides. Il est composé d’une part par des mesures agro-environnementales (MAE) cofinancées par le Fonds européen FEADER, et d’autre part par le régime d’aides nationales en faveur de la biodiversité. Alors que les MAE regroupent un ensemble de mesures d’extensification des pratiques agricoles visant à réduire les impacts environnementaux au sens large (réduction d’intrants, réduction d’émissions), le régime national d’aides « biodiversité » vise spécifiquement la conservation et la gestion écologique de terrains abritant des espèces ou habitats d’intérêt écologique particulier.

La superficie consacrée aux terres agricoles sous contrats est la plus élevée de l’UE, bien que cela s’explique par la participation élevée (89 % des terres agricoles) à la prime à l’entretien du paysage. Cette prime qui fait partie des mesures agro-environnementales est une prime visant une extensification de base sans impact toutefois sur les enjeux biodiversité. Le Luxembourg ne met en œuvre aucun projet intégré LIFE.

La forêt couvre environ 90 000 ha, soit plus d’un tiers du territoire du Grand-Duché; les forêts privées représentent 54 % des forêts luxembourgeoises. La forêt qui est l’écosystème le moins touché par le développement économique, abrite un nombre considérable d’espèces et d’habitats et fournit le plus grand nombre de services écosystémiques aux citoyens. Cependant, leur état de santé s’est constamment détérioré au cours des 30 dernières années. Elles sont fractionnées par des voies de communication et l’urbanisation ; elles sont affectées par la pollution de l’air et les changements climatiques ; enfin elles sont âgées.

Afin d’atteindre l’objectif d’une gestion durable des forêts, le gouvernement a initié la révision de la législation forestière. Il vise à mettre en place d’ici à 2020, des plans de gestion durable des forêts pour toutes les forêts publiques, ainsi que pour les domaines forestiers privés dépassant 10 ha. Il a mis en place un système d’aides financières qui promeut l’amélioration et le renforcement des écosystèmes forestiers. Un cluster d’innovation bois établi en 2016 contribue à une meilleure valorisation locale et régionale du bois et sert de modèle de l’économie circulaire.

Le développement économique a causé d’énormes pressions sur les écosystèmes aquatiques par une grande demande en eau potable et par la pollution diffuse des cours d’eau. Le rétablissement vers le bon état écologique est entamé. Il faudra néanmoins accélérer les efforts. Une collaboration étroite entre le secteur de la gestion de l’eau et la protection de la nature est primordiale afin d’intégrer tous les objectifs dans les différents types de plans de gestion, notamment les plans de gestion de district hydrographique.

La croissance économique et démographique du pays engendre une vaste expansion de l’urbanisation et le développement d’infrastructures au détriment de la biodiversité. La majorité des emplois sont situés sur le territoire de la capitale et les communes limitrophes, tandis que les habitations ont été déplacées vers la périphérie des agglomérations et l’espace rural suite à l’explosion des prix du logement. De plus, près de 200 000 travailleurs proviennent des pays limitrophes et traversent quotidiennement les frontières. Cette situation a provoqué un accroissement des infrastructures de transport. Les surfaces non bâties, telles que surfaces agricoles et forestières ont diminué entre 1999 et 2007 de 1 386 ha au niveau national.

Pour infléchir cette tendance, il est nécessaire d’articuler diverses politiques notamment celles concernant le logement, les transports publics, la gestion du foncier et l’aménagement du territoire, la construction, la fiscalité, etc. Le défi de gouvernance est grand particulièrement dans un pays où l’espace est une ressource rare et où la préservation des écosystèmes prend une grande importance en raison des services écosystémiques essentiels. Le PNPN2 prévoit d’intégrer des objectifs de biodiversité et de favoriser le concept d’infrastructure verte livrant différents services aux zones urbaines et à leurs habitants.

Les infractions environnementales sont constatées par les agents de la police grand-ducale, les agents de l’ANF et les agents de l’AGE ainsi que par les agents de l’Administration des douanes et accises.

Le faible nombre de procédures d’infraction et de plaintes ou pétitions semble refléter une approche efficace de la protection de la santé humaine et de l’environnement, Toutefois, les ressources affectées aux vérifications de conformité sont modestes. La transposition des directives a généralement lieu en temps opportun; la vérification de la conformité n’identifie normalement que des problèmes mineurs. Les cas de mauvaise application sont rares. (Chapitre 2).

Le PNPN2 prévoit qu’un règlement grand-ducal déterminera les modalités d’application et établira un catalogue des contraventions suivant les différents montants des taxes à percevoir. Un groupe de travail sera chargé de l’élaboration d’un document stratégique et d’un programme de formation concernant la poursuite judiciaire des infractions environnementales. Il analysera notamment si les capacités des administrations chargées du constat des infractions ainsi que des tribunaux chargés des poursuites sont suffisantes et fera des recommandations le cas échéant pour assurer le respect des normes environnementales grâce à la dissuasion et la poursuite conséquente des infractions.

Le Luxembourg est le pays le plus fragmenté de l’Europe; la surface bâtie a doublé entre les années 1960 et aujourd’hui. Le PNPN2 vise à la protection, la conservation et la reconstruction de corridors de migration terrestres et aquatiques, qui sont affectés par l’urbanisation et la fragmentation de l’habitat. Il inclut aussi des programmes pour la restauration entre autres 15 % des zones humides, des paysages semi-ouverts et des prairies sèches.

On retrouve des d’infrastructures vertes à l’échelle locale ; elle comprend des zones de verdure le long des infrastructures de transport et sur des places publiques, des parcs, des ruisseaux, des bois des « passages à faune » ou les « échelles à poissons ». À l’échelle régionale ou nationale, l’infrastructure verte est composée de bassins hydrographiques, de forêts à haute valeur naturelle comme le réseau de zones protégées et de toute composante importante pour la connectivité écologique.

Des plans détaillés de restaurations, de renaturations, d’acquisitions et de défragmentation des habitats sont inclus dans le PNPN2. Des efforts de réhabilitation et de restauration d’habitats sont planifiés pour supporter à long terme la conservation. La restauration d’une gravière dans les terres alluviales de la Moselle est un exemple éloquent du succès de la réhabilitation de terrains dégradés. Cette zone est aujourd’hui une Zone Ramsar, une zone humide d’importance internationale (Encadré 5.2).

Les efforts d’intégration de la biodiversité au niveau des constructions publiques et la réalisation d’un projet de restauration de l’Alzette ont commencé en 2017. Ces projets, quoique tardifs, acquièrent également une importance croissante dans le contexte des stratégies d’adaptation au changement climatique.

Le PNPN1 (2007-11) comportait deux objectifs stratégiques :

  • Enrayer la perte de la biodiversité, en particulier par le maintien et le rétablissement d’un état de conservation favorable des espèces et des habitats menacés, d’intérêt national ou communautaire.

  • Préserver et rétablir les services et processus écologiques à l’échelle paysagère et nationale.

L’évaluation réalisée par l’Observatoire de l’Environnement naturel soumis en 2017 (PNPN2) concluait qu’un un certain nombre de mesures, même jugées prioritaires n’avaient pas été achevées, ni même commencées. Le déclin de la biodiversité n’a pu être freiné ; l’état de conservation d’une certaine partie des espèces et des habitats menacés n’est guère favorable. L’Observatoire identifiait les points forts et faibles.

Les points forts :

  • Avancées notables dans le cadre législatif

  • Mise en place d’un monitoring des espèces et habitats initié en 2009

  • Établissement d’un cadastre des biotopes

  • Élaboration des plans d’action

  • Atteinte du seuil de 5 000 ha gérés sous contrats biodiversité

Les points faibles :

  • Acquisition insignifiante de terrains pour la conservation de la nature

  • Retards dans la réalisation de renaturations de cours d’eau

  • Réticences à entamer la réforme de la prime à l’entretien des paysages

  • Lenteur des procédures de désignation de zones protégées nationales

  • Progrès peu visibles vers une couverture totale du territoire par des stations biologiques

Le PNPN2 se basa sur les constats de l’Observatoire, une consultation des parties prenantes et les objectifs de la stratégie « Biodiversité 2020 » de l’Union européenne qui couvre la période 2011 à 2020. Il fut adopté formellement en 2017 soit six ans après la fin du PNPN1 alors que l’on se serait attendu à ce qu’un plan soit adopté à la fin du PNPN1 comme le prévoit la loi. De plus, il aurait été préférable que l’évaluation du PNPN1 fusse réalisée avant la fin du plan pour ne pas interrompre les actions positives et pour corriger les moins efficaces.

En 2018, un groupe d’ONG réalisa une évaluation de la mise en œuvre des directives oiseaux et habitats dans 18 pays de l’UE (Birdlife International et al., 2018) et soumettait les observations suivantes :

Les points forts :

  • Gestion des sites protégés.

  • Protection des espèces.

  • Prévention de la détérioration des sites, la perturbation des espèces et mise en œuvre des évaluations appropriées.

  • Connectivité du paysage.

  • Financement et ressources.

  • Surveillance des habitats et des espèces.

  • Espèces non indigènes.

  • Engagement des parties prenantes, participation du public et communication.

Birdlife soulignait aussi la nécessité de la mise en œuvre concrète des directives.

Un rapport à la Commission européenne en vertu des articles 17 de la directive « Habitats » et 12 de la directive « Oiseaux », a été remis en 2019 (AEE, 2019b).

Le Luxembourg a signé et ratifié presque tous les Accords Environnementaux Multilatéraux, y compris la Convention sur la diversité biologique, la Convention de Ramsar sur les zones humides (le Luxembourg a désigné deux zones humides d’importance internationale) ; la Convention de Bonn sur la Conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage ; l’accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie ; l’accord sur la conservation des chauves-souris en Europe ; la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvage menacées d’extinction ; la Commission baleinière internationale ; la Convention de Berne ; et la Convention OSPAR.

Dans le PNPN2, le Luxembourg s’est engagé à augmenter le financement de projets bénéfiques à la biodiversité mondiale ce qui implique d’évaluer l’impact environnemental des actions susceptibles d’avoir des incidences importantes sur la biodiversité à l’international. De plus, la conservation de la biodiversité sera un facteur intégré dans les négociations et dialogues commerciaux avec des pays tiers.

Les projets financés via le FPE comprennent la programmation pluriannuelle des dépenses du PNPN2. En 2018, le budget de l’Administration de la Nature et des forêts était de 42,8 millions EUR (0.3 % du budget de ministère). Une augmentation significative du budget de 94,6 millions EUR a été ajoutée pour la mise en œuvre du PNPN2 (2017-21) incluant les pools compensatoires. Par ailleurs, l’intégration des principes de la conservation de la nature dans des secteurs relevant d’autres ministères implique également une intégration budgétaire transsectorielle épaulant ainsi les budgets dédiés plus spécifiquement à la conservation de la nature.

La participation de l'État au financement de projets conventionnés en matière de gestion et d'entretien de l'environnement naturel réalisé par le secteur communal est de 2.5 millions EUR.

Le PNPN2 vise à mettre en place un programme de surveillance et de monitoring afin de combler une lacune au niveau de séries temporelles de données sur la biodiversité. Cette tâche, confiée au LIST, sert à satisfaire les exigences de rapportage à la CE pour les directives « oiseaux » et « habitats ». En 2019, le Luxembourg devait transmettre, aux autorités européennes, les toutes dernières observations portant sur la période 2013 à 2018. Le LIST effectue aussi des recherches sur les ressources naturelles incluant les désastres naturels.

Le MNHN joue aussi un rôle important dans le maintien de collections scientifiques, des bases de données et réalise des travaux de recherche et dans tous les domaines du patrimoine naturel pour contribuer à sa conservation. Il participe en tant que nœud national du Luxembourg au Global Biodiversity Information Facility, une structure internationale de données qui les rend accessibles sur un portail unique. Le Musée est aussi un partenaire du projet Barcode of Life, une base de données sur les séquences de références d’ADN pour chaque espèce sur terre.

L’Observatoire de l’environnement naturel fait le suivi du PNPN. Il effectue des recherches sur différents aspects de la conservation de la biodiversité et rédige tous les deux ans un rapport circonstancié sur la politique en matière d'environnement naturel et sur la mise en œuvre de cette politique au niveau étatique et communal.

Un projet de recherche important prévu au PNPN2 est d’accroître la connaissance sur l’état des écosystèmes, notamment le réseau Natura 2000, et de leurs services. Cette nouvelle connaissance servira à valoriser socio-économiquement les services écosystémiques d’ici 2020.

Des progrès notables sont constatés au niveau de la recherche concernant le milieu naturel depuis l’examen de 2008. Un rattrapage était à faire et il faut continuer les projets menés par les différentes institutions de recherche en place. Toutefois, dans le contexte mondial où les écosystèmes sont de plus en plus reliés entre eux et menacés par des risques systémiques comme les changements climatiques et la perte de biodiversité, il serait indiqué d’entreprendre des recherches sur un axe différent. Ces nouveaux axes de recherche analyseraient comment l’effet des changements climatiques combinés au déclin accéléré de la biodiversité (Chapitre 1) peut affecter l’environnement, la société et l’économie du Luxembourg. Ces travaux permettraient de développer des approches pour accroître la résilience du pays face à ces enjeux systémiques et de mettre en place des infrastructures vertes pour adapter l’environnement naturel à pallier les déficiences d’un environnement de plus en plus transformé par notre mode de développement. Cette approche prospective est un élément essentiel pour une meilleure gestion du risque face à ces enjeux systémiques.

Le Luxembourg mène une politique active de protection et de conservation de la nature et a progressé dans la mise en œuvre des recommandations du dernier examen de l’OCDE. Des progrès ont été fait en particulier dans la protection de sites spécifiques, entre autres par le réseau Natura 2000, et dans l’observation et la restauration d’écosystèmes.

Mais malgré l’existence d’un cadre institutionnel, législatif, financier et stratégique approprié, les progrès ont été lents, du retard a été pris dans la mise en œuvre concrète des plans d’action sur le terrain ou dans la restauration d’écosystèmes, et les retours positifs de efforts du Luxembourg tardent à se concrétiser. Les pressions sur la biodiversité sont fortes, avec une artificialisation des sols et une fragmentation des habitats élevées. L’objectif du PNPN1 (2007-11) d’enrayer le déclin de la biodiversité était ambitieux; il n’a pas été atteint. L’évaluation finale du PNPN2 (2017-21) devrait donner le même résultat. L’état de conservation des espèces est majoritairement défavorable. On observe aussi une dégradation continue depuis quatre décennies des habitats riches en biodiversité. À cela s’ajoutent de nouveaux enjeux: les changements climatiques et l’apparition d’espèces exotiques envahissantes qui engendrent une perte du capital naturel et une réduction de ses dividendes – les services écosystémiques essentiels à la qualité de vie humaine.

Pour améliorer sa performance, le Luxembourg doit accélérer la mise en œuvre des interventions à un rythme plus rapide que le déclin de la biodiversité. Il doit terminer la mise en œuvre des plans de gestion pour les sites Natura 2000 et les espèces menacées. Il doit faire fonctionner efficacement les comités de pilotage et leur fournir des ressources adéquates avant la fin de PNPN2. Il faudra aussi sans retard initier la préparation du PNPN3 pour la période 2022-27. Ce 3e plan devrait se baser sur les évaluations des directives nature soumises à la Commission Européenne en 2019 et sur des scénarios prospectifs d’impact des changements climatiques et du déclin de la biodiversité sur les services écosystémiques. Il faudra aussi veiller à ce que les questions de biodiversité soient pleinement intégrés dans les politiques agricoles, d’aménagement du territoire et les autres politiques sectorielles (climat, logement, transports, etc.) avec une bonne coordination entre le niveau national et local et un engagement fort des communes. Cela devra aller de pair avec un réexamen des coûts et des bénéfices des différents instruments économiques utilisés dans la gestion de la biodiversité et dans les activités sectorielles qui ont un impact sur la biodiversité (contrats de biodiversité, éco-points, aides agricoles, etc.

Références

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