2. Responsabilités et perception de l’impôt

La mission première de l’administration fiscale est de percevoir des recettes fiscales au nom des citoyens afin de financer les services publics, mais avec le temps, les services fiscaux ont également été investis, dans de nombreux pays, d’autres responsabilités. Le présent chapitre propose un aperçu des recettes fiscales nettes perçues ainsi que quelques autres chiffres clés relatifs aux performances des administrations fiscales, et une analyse du rôle joué, de façon plus générale, par l’administration fiscale dans la dynamique du changement à l’échelle de l’ensemble de l’administration.

La confiance dans la capacité avérée de l’administration fiscale à mettre en œuvre des processus administratifs complexes à grande échelle a sans aucun doute été un facteur essentiel ayant incité l'État, dans de nombreux pays, à confier à l’administration fiscale des responsabilités supplémentaires pendant la crise du COVID-19. Étant donné que la version 2021 de l’Enquête internationale sur l’administration des recettes (ISORA) ne comportait pas de questions détaillées sur les responsabilités supplémentaires attribuées aux administrations fiscales, les lecteurs intéressés souhaiteront peut-être consulter le chapitre 2 de la série Tax Administration 2021 (OCDE, 2021[1]) où ils trouveront un panorama plus détaillé des missions de plus large portée assumées par les administrations fiscales pendant la pandémie.

Il en ressort que beaucoup de ces responsabilités nouvelles ont souvent dépassé le cadre des fonctions normalement exercées par l’administration fiscale et, généralement, elles se sont concrétisées par :

  • une aide financière, destinée aux citoyens ou aux entreprises, qu’elle soit distribuée de façon très ciblée ou accessible au plus grand nombre ;

  • la fourniture de services, par les agents ou les services de l’administration fiscale, pour accompagner les mesures prises par l’ensemble de l’administration en réponse à la crise du COVID-19 ; et

  • une assistance en matière d’information, reposant sur le partage d’informations ou l’utilisation des capacités de l’administration en matière d’analyse des données, qui a été utile aux pouvoirs publics.

Les raisons qui ont incité à se tourner vers l’administration fiscale pour répondre à la crise du COVID-19 tiennent au fait que celle-ci :

  • dispose d’un réseau préexistant de relations étroites avec les citoyens et les entreprises ;

  • a de longue date l’expérience de la conduite d’activités à cette échelle ;

  • peut s’appuyer sur des agents qualifiés et spécialisés qui interagissent quotidiennement avec les citoyens ;

  • possède de vastes séries de données ainsi que des moyens d’analyse et une solide expérience du traitement et du partage de données.

Si un grand nombre de mesures de soutien restent en vigueur, les regards doivent désormais se tourner vers l’après-pandémie. Il s’agit d’envisager d’intégrer dans les pratiques courantes les nombreuses méthodes de travail expérimentées à l’occasion de la mise en œuvre accélérée des programmes de soutien pendant la pandémie. Les administrations fiscales indiquent que cet épisode a entraîné un certain nombre de mutations durables dans leur façon d’organiser leurs activités.

Comme indiqué précédemment, les informations tirées de l’enquête qui ont été analysées pour rédiger ce chapitre font apparaître les premiers effets de la pandémie de COVID-19 sur les recettes perçues, lesquelles ont reculé dans plus des trois quarts des pays (voir tableau 2.1). Les raisons de cette baisse sont notamment :

  • la baisse de l’activité économique : face au COVID-19, de nombreux pays ont instauré des mesures de confinement ; la fermeture forcée d’un grand nombre d’entreprises, qui a eu des répercussions négatives sur le chiffre d’affaires et sur le bénéfice imposable d’un grand nombre d’entre elles, répercussions qui pourraient entraîner une augmentation temporaire du nombre de cas d’insolvabilité et de faillites ;

  • la hausse du chômage : le repli de l’activité économique peut aussi avoir eu des conséquences sur les niveaux d’emploi du fait que les entreprises licencient du personnel ou cessent de recruter ;

  • les mesures de soutien gouvernementales : pour soutenir la consommation et le système de santé, de nombreux pays ont opté pour des réductions temporaires des taux normaux et réduits de TVA ; (OCDE, 2020[2])

  • les mesures de soutien administratives : beaucoup d’administrations fiscales ont pris des mesures pour alléger le fardeau pesant sur les contribuables et pour aider les entreprises et les personnes physiques confrontées à des problèmes de liquidités ou éprouvant des difficultés à se conformer à leurs obligations fiscales. Parmi les mesures adoptées, figurent l’allongement des délais de paiement, les reports d’échéance, un accès facilité à des échéanciers et la prolongation de la durée de ces échéanciers.1 Si, dans de nombreux cas, il peut en résulter des décalages dans le calendrier de la perception des impôt dus, dans certaines situations, la dette supplémentaire accumulée peut devenir irrécupérable.

À quelques exceptions près, les pays ont centralisé la collecte des impôts directs et (de la plupart) des impôts indirects au sein d’un seul et même service de l’administration fiscale. (Voir tableau 2.1. pour connaître les catégories de recettes dont les administrations fiscales couvertes par la présente publication assument la responsabilité.)

Cependant, comme on l’a vu dans les éditions précédentes de la série sur les administrations fiscales, les États ont assigné aux administrations fiscales d’autres domaines de compétence (y compris des responsabilités partagées dans certains domaines), en dehors de leurs fonctions traditionnelles en matière fiscale.

Ceux-ci consistent en règle générale à procurer des avantages financiers aux contribuables (assimilables à des prestations sociales, par exemple) ou à recouvrer des sommes dues au Trésor public au titre de prêts consentis par l'État ou de créances détenues par l'État (prêts étudiants ou allocations pour enfant à charge par exemple). Dans d’autres situations, il s’agit de missions/fonctions moins directement liées au système fiscal, comme par exemple la surveillance de certaines activités de jeu ou la tenue de registres concernant la population. Certaines administrations fiscales indiquent que, dans le sillage la mise en œuvre concluante des programmes de soutien instaurés durant la pandémie de COVID-19, des responsabilités supplémentaires leur sont confiées de façon plus permanente.

La présente section porte sur les recettes nettes perçues par les administrations fiscales ainsi que sur un certain nombre d’autres chiffres clés concernant leurs activités.

Dans sa base de données des Statistiques des recettes publiques mondiales (OCDE, 2022[3]), l’OCDE s’efforce généralement de publier des données internationalement comparables sur les recettes fiscales perçues par ses membres et par un certain nombre d’autres juridictions à tous les niveaux d’administration. Comme les informations contenues dans la base de données des Statistiques des recettes publiques mondiales reposent sur des données notifiées au niveau d’un pays, et non au niveau d’une administration, les administrations fiscales ont été invitées, dans le cadre de l’enquête ISORA, à fournir toute une série d’informations sur leurs activités de perception de recettes. Celles-ci montrent bien l’importance de l’administration fiscale pour l’économie de chaque pays.

En 2020, les recettes nettes perçues par les administrations fiscales figurant dans le présent rapport représentent, en pourcentage du produit intérieur brut (PIB), entre moins de 10 % et plus de 30 % dans le cas de la Croatie, de la Norvège, des Pays-Bas, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Slovénie, de l’Estonie, du Danemark et de la Suède. En moyenne, elles représentent 21 % du PIB (voir graphique 2.1.).

Dans 41 pays, les recettes nettes perçues par l’administration fiscale représentent plus de 50 % du montant total des recettes publiques en 2020, ce qui fait de l’administration fiscale le premier organisme public de recouvrement des recettes publiques dans plus des deux tiers des juridictions couvertes par le présent rapport. En moyenne, les recettes nettes moyennes perçues par les administrations dans les pays couverts par ce rapport représentent 61 % des recettes totales du pays (voir graphique 2.2.).

La taxe sur la valeur ajoutée et l’impôt sur le revenu des personnes physiques représentent respectivement 29 % et 27 % des recettes nettes perçues et constituent les principales catégories d’impôts collectés pour environ 40 % des administrations fiscales couvertes par le présent rapport. L’impôt sur les bénéfices des sociétés (17 %) et les cotisations sociales (10 %) constituent les autres grandes sources de recettes, comme le montre le graphique 2.3. Dans de nombreux pays, les cotisations sociales ne sont pas perçues par les administrations fiscales et sont donc sous-représentées dans les chiffres des recettes nettes moyennes de tous les pays couverts par la présente publication. Lorsqu’elles sont perçues par l’administration fiscale, elles constituent souvent la principale source de recettes fiscales (voir tableau D.2).

Les mécanismes de prélèvement à la source peuvent s’inscrire dans le cadre d’approches fondées sur le principe de la conformité dès la conception qui favorisent la discipline fiscale en général tout en allégeant sensiblement la charge pesant sur un grand nombre de contribuables dans la mesure où ceux-ci s’engagent à se plier à toute régularisation qui pourrait se révéler nécessaire après le paiement (lorsque la retenue à la source donne lieu à un trop-perçu ou au contraire à un moins-perçu). Contrairement à ce qui se passe dans un système de déclaration spontanée suivie du paiement de l’impôt, dans le mécanisme du prélèvement à la source, l'impôt est payé directement à l’administration fiscale, généralement par un tiers qui verse un revenu net au bénéficiaire (comme par exemple quand la retenue à la source est prélevée par l’employeur sur le salaire versé à un employé), ou par un intermédiaire se situant entre le payeur et le client. Le dispositif de prélèvement à la source le plus répandu dans le monde concerne l’imposition des revenus du travail. Les autres exemples sont notamment les retenues à la source sur les intérêts, dividendes ou redevances. Selon le régime fiscal sous-jacent et la nature des paiements, la retenue à la source peut se décliner en une palette de dispositifs allant d’un système simple d’imposition à un taux fixe universel à un système plus complexe adapté à la situation plus globale du contribuable2.

Outre qu'ils permettent d’alléger les formalités, les systèmes de prélèvement à la source peuvent aussi favoriser la diminution du nombre de déclarations inexactes et de trop-perçus du fait que les tiers ou les intermédiaires chargés de collecter les impôts pour l’administration n’ont aucun droit sur les montants prélevés. Les défaillances restent certes possibles dans un tel système en cas d’erreur dans l’application des règles ou d’erreurs commises par les tiers ou les intermédiaires, sachant que ce sont eux qui fournissent les informations alimentant le système. Cependant, l’automatisation accrue, les méthodes plus perfectionnées de recoupement des données et les approches à l’échelle de l’ensemble de l’administration sont autant de moyens de lutter contre ces risques.

Pour permettre de comprendre l’importance de la retenue à la source dans le cas de l’imposition des revenus des personnes physiques, les administrations ayant pris part à l’enquête ont été invitées à estimer le pourcentage du total de l’impôt sur le revenu des personnes physiques faisant l’objet d’une retenue à la source effectuée par des tiers et versée ultérieurement à l’administration. Les administrations qui ont été en mesure de fournir ces informations estiment qu’environ 80 % du total des recettes de l’impôt sur le revenu des personnes physiques ont été retenus à la source en 2020 (voir tableau 2.3).

Compte tenu de l’importance de ces impôts dans le calcul du taux global de recouvrement, les administrations fiscales investissent dans des solutions nouvelles et novatrices qui peuvent permettre d’alléger les formalités pour les contribuables, notamment grâce aux déclarations préremplies à l’aide des données existantes provenant de sources diverses, et d’utiliser parallèlement des outils d’analyse sophistiqués pour déceler les risques de non-respect des obligations fiscales. C’est un thème qui revient fréquemment dans la présente édition de la série et qui est traité de façon plus détaillée dans les chapitres suivants.

Bibliographie

[5] CIAT/IOTA/OCDE (2020), « Réponses de l’administration fiscale au COVID-19 : Mesures prises pour soutenir les contribuables », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/69d26e77-fr.

[3] OCDE (2022), Base de données mondiale des statistiques des recettes publiques, https://www.oecd.org/fr/fiscalite/politiques-fiscales/base-de-donnees-mondiale-des-statistiques-des-recettes-publiques.htm (consulté le 13 May 2022).

[1] OCDE (2021), Administration fiscale 2021 : Informations comparatives sur les pays de l’OCDE et autres économies avancées et émergentes, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/a1b690b6-fr.

[2] OCDE (2020), Tax policy responses to COVID-19; table with measures takes by countries, http://www.oecd.org/tax/covid-19-tax-policy-and-other-measures.xlsm (consulté le 13 May 2022).

[4] OCDE (2019), Tax Administration 2019: Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/74d162b6-en.

Notes

← 1. Pour une description détaillée des mesures de soutien prises par l’administration fiscale, voir la note publiée en 2020 sous le titre Réponses de l’administration fiscale au COVID-19 : Mesures prises pour soutenir les contribuables (CIAT/IOTA/OCDE, 2020[5]).

← 2. Pour de plus amples informations sur les systèmes de retenue à la source mis en place dans les juridictions, voir Tax Administration 2019, Tableaux A.73 et A.74.

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