2. Les éléments catalyseurs d’une bonne gouvernance publique

Les défis auxquels sont confrontés les pouvoirs publics sont non seulement devenus plus complexes et pluridimensionnels, mais aussi plus interconnectés en raison de la mondialisation et de l’interdépendance accrue des nations. Changement climatique, migrations, inégalités : les problèmes à résoudre sont désormais caractérisés par une incertitude et une complexité croissantes et par l’interdépendance des processus, des structures et des acteurs. Dans ce contexte imprévisible, les pouvoirs publics font face à des pressions les contraignant à élaborer et mettre en œuvre des politiques et services de meilleure qualité, tout en étant aux prises avec des défis sans précédent de stabilisation budgétaire et des niveaux de confiance inférieurs à ceux observés après la crise financière de 2008. Or, il est difficile de restaurer la confiance lorsque les citoyens ont l’impression que les réformes sont inefficaces et ne prennent pas suffisamment en considération les besoins des perdants au regard des gains obtenus par d’autres (OCDE, 2017[1]).

Il se dégage des enseignements tirés de l’expérience de l’OCDE en matière de soutien aux efforts des pays Membres et Partenaires pour réformer l’action et la gouvernance publiques que les réformes entreprises sont généralement perçues comme un moyen de faire des économies et non comme un outil pour résoudre des problèmes stratégiques. La gouvernance publique est un processus politique, dans lequel les pouvoirs publics ne sont pas nécessairement seuls décisionnaires et où de multiples intérêts entrent en jeu. La façon dont les décisions publiques sont prises, les informations sur lesquelles elles se fondent et les intérêts qui les influencent déterminent les paramètres des réformes de l’action publique et de la gouvernance. En outre, dans un contexte d’interdépendance croissante, il devient plus difficile de cerner les retombées, les arbitrages, les gagnants et les perdants des réformes, ce qui complique considérablement l’efficacité de l’action publique.

Les pouvoirs publics doivent s’adapter aux nouveaux défis qui se posent au secteur public, ce qui les amènera probablement à transformer l’appareil administratif, les dispositifs institutionnels et la culture de la gouvernance en place depuis des décennies (voire des siècles). Certains mettent l’accent sur l’agilité, l’expérimentation, favorisent l’innovation ascendante et les tests avant déploiement à l’échelle, afin de gérer la complexité, l’incertitude, les chevauchements des cycles de l’action publique et l’exigence accrue de points de vue extérieurs. Cependant, la nécessité de nouvelles approches innovantes est simultanée à la nécessité de répondre aux demandes traditionnelles des gouvernements en matière de fourniture de services publics. Dans ce cadre, comment les pouvoirs publics peuvent-ils planifier et mettre en œuvre ce processus de transformation ? Comment les citoyens et les administrations peuvent-ils avoir la garantie que ces transformations sont guidées par une détermination légitime à résoudre ces difficultés ? Et comment les pouvoirs publics peuvent-ils surmonter les défis complexes de l’action publique et entamer plus efficacement un processus de réforme ?

Une réponse catégorique à ces questions n’est pas possible. Les pays sont encore en quête de nouveaux mécanismes pour prendre en compte la complexité et la société civile. Dans le même temps, les citoyens exigent des moyens de représentation et de participation plus efficaces. Certains pays ont toutefois adopté des pratiques clés pour aborder les réformes et transformations avec plus d’efficacité :

  • L’impulsion, au niveau politique et émanant de la fonction publique, est déterminante pour favoriser et encourager le changement à tous les niveaux de l’administration publique et au-delà. Par ailleurs, les réformes sont souvent d’autant plus efficaces qu’elles contribuent à la réalisation d’une vision et d’intérêts communs et qu’elles ne représentent pas des efforts isolés en faveur des mêmes gagnants et des mêmes perdants (OCDE, 2014[30]).

  • Les réformes produisent généralement de meilleurs résultats lorsqu’elles font l’objet d’une détermination soutenue au plus haut niveau politique et d’encadrement du secteur public afin d’en garantir la mise en œuvre efficace et la pérennité.

  • La prise de décision publique doit viser à être équitable et guidée en permanence par la détermination à servir l’intérêt général. À cet effet, un processus décisionnel éclairé par des données concrètes peut jouer un rôle déterminant pour améliorer la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques. Cela signifie également, on l’a vu au chapitre 1, que les pouvoirs publics doivent solliciter spontanément l’avis des parties prenantes à tous les stades décisifs du cycle de l’action publique, afin d’optimiser la redevabilité, la réactivité et l’intégrité de l’État.

  • Une approche intégrée et innovante des réformes impose de surmonter les obstacles administratifs traditionnels qui entravent l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des résultats des mesures pluridimensionnelles prises par les pouvoirs publics ; cette démarche suppose une coordination robuste et suivie à l’échelle de l’ensemble de l’administration entre les différents secteurs de l’action publique, les différentes entités administratives et les différents niveaux d’administration.

  • Pour que les réformes portent leurs fruits, priorité absolue doit être donnée, aux niveaux politique et institutionnel, à l’innovation et à l’expérimentation au service d’une conduite efficace du changement sur la durée, afin de créer des institutions plus agiles et réactives.

De toute évidence, aucune politique publique ni aucun projet de réforme ne résulte d’une mise en œuvre fluide et intégrée de ces pratiques. Les décideurs règlent généralement des questions urgentes au coup par coup, ce qui laisse peu de place à de réelles réunions de coordination, à l’expérimentation ou à l’élaboration de démarches innovantes ou encore à une association durable des parties prenantes. Il n’en demeure pas moins qu’une adoption progressive de ces pratiques peut toutefois contribuer à modifier sensiblement la façon dont les pouvoirs publics abordent le changement. Les futures versions du Cadre viseront à proposer une série d’orientations et de conseils plus spécifiques sur les éléments catalyseurs des réformes, notamment par le biais de boîtes à outils et de modèles de maturité.

La détermination, au plus haut niveau politique correspondant à l’échelle de la réforme entreprise, est essentielle pour que les réformes portent leurs fruits. Sans détermination à réformer exprimée au plus haut niveau politique, les cadres de la fonction publique peinent à trouver la motivation nécessaire pour poursuivre des projets de réforme à moyen terme tout en exerçant leurs responsabilités au quotidien et en réglant des problèmes urgents à court terme.

Les pouvoirs publics peuvent donner un cap dans ce domaine en exprimant une solide détermination politique à améliorer la gouvernance et en faisant preuve d’une volonté politique à approuver et préconiser cette démarche dans des domaines comme la réglementation, l’égalité hommes-femmes dans la vie publique, l’administration numérique et l’intégrité :

  • La Recommandation du Conseil concernant la politique et la gouvernance réglementaires [OECD/LEGAL/0390] recommande aux Adhérents de s’engager au plus haut niveau politique à une politique explicite de qualité de la réglementation qui mobilise l’ensemble des administrations (OCDE, 2012[27]).

  • La Recommandation du Conseil sur l’égalité hommes-femmes dans la vie publique [OECD/LEGAL/0418] propose que les Adhérents garantissent, au niveau politique le plus élevé ainsi qu’à l’échelon d’administration approprié, l’impulsion et l’engagement requis pour assurer l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie à l’échelle de l’ensemble de l’administration en faveur d’une réelle égalité des sexes et d’une prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes (OCDE, 2015[25]).

  • La Recommandation du Conseil sur les stratégies numériques gouvernementales [OECD/LEGAL/0406] recommande aux Adhérents de garantir l’impulsion et l’engagement politique en faveur de la stratégie, par une combinaison d’efforts visant à promouvoir la coordination et la collaboration entre les ministères, à fixer les priorités et à faciliter l’engagement et la coordination des organismes concernés à tous les niveaux d’administration dans la mise en œuvre de l’agenda numérique du gouvernement. (OCDE, 2014[31])

  • La Recommandation du Conseil sur l’intégrité publique [OECD/LEGAL/0435] recommande aux Adhérents de faire preuve d’engagement, aux plus hauts niveaux politiques et de gestion du secteur public, à l’égard du renforcement de l’intégrité publique et de la réduction de la corruption (2017[11]).

Le centre de gouvernement (Encadré 2.1) peut jouer un rôle important dans l’intégration de la réforme au sein de l’administration publique. Dans les pays membres de l’OCDE, le centre de gouvernement joue un rôle de plus en plus important dans l’orientation des priorités stratégiques, en lien étroit avec ses responsabilités croissantes de coordination de l’action publique (voir la section 2.3). Selon l’enquête de l’OCDE sur l’organisation et les fonctions du centre de gouvernement et le rapport correspondant (Centre Stage), le centre de gouvernement joue un rôle majeur en assurant la direction provisoire des réformes sensibles et/ou structurelles de l’administration publique, en particulier à leur stade initial (OCDE, 2018[32]). Cette responsabilité temporaire peut représenter un message d’engagement politique fort tant à l’égard du secteur public que de l’opinion publique. Ce fut le cas dans plusieurs pays de l’OCDE ayant mis en place des stratégies de transformation numérique de l’administration et de réduction des lourdeurs administratives (OCDE, 2014[33]).

La détermination globale d’une administration peut normalement se concrétiser à travers sa vision. Comme l’indique le rapport Centre Stage, Driving Better Policies from the Centre of Government, presque tous les pays membres de l’OCDE disposent, sous une forme ou une autre, d’un document exposant leur vision stratégique. À cet égard, l’expérience acquise par l’OCDE dans le cadre des examens par pays a démontré que les pouvoirs publics parviennent à une meilleure cohérence de leurs activités lorsqu’ils ont la capacité de définir, mettre en œuvre et communiquer leur vision stratégique en interne et à l’extérieur, et de l’utiliser pour guider l'État, la société civile, le secteur privé et les citoyens vers un objectif commun (OCDE, 2011[78]).

La formulation de cette vision et sa traduction sous forme de stratégies spécifiques à moyen et long termes constitue un processus important, en ce sens qu’il contribue à la définition des priorités et des objectifs, mais aussi de la teneur et de l’ampleur des réformes ; il soutient la démarche d’amélioration de la coordination à l’appui de la mise en œuvre de la vision. La prospective stratégique, les projections à long terme et les débats avec les parties prenantes sur les autres scénarios d’avenir possibles constituent les différents outils susceptibles d’aider les pouvoirs publics à élaborer une vision qui intègre les évolutions et scénarios possibles. Un travail d’élaboration de la vision et un processus de planification ouvert prévoyant de solides mécanismes d’association des parties prenantes peuvent légitimer l’action publique et constituer un instrument efficace pour garantir la pérennité des réformes (OCDE, 2016[23]).

Dans ce contexte, le leadership de la fonction publique est également fondamental pour la réussite des réformes en faveur d’une bonne gouvernance publique. Cette notion désigne les hauts fonctionnaires qui prennent des décisions et exercent une influence aux plus hauts niveaux hiérarchiques de la fonction publique. Face à la complexité de l’environnement politique et public actuel, on attend des hauts fonctionnaires qu’ils agissent avec efficacité en dépassant les cloisonnements administratifs et stratégiques, qu’ils prennent des mesures rapides et éthiques face à l’évolution rapide des priorités politiques et qu’ils réagissent avec agilité aux événements imprévisibles. Les hauts fonctionnaires se situant à l’interface entre la stratégie et l’exécution de l’action publique, les administrations doivent investir dans une culture et un leadership de la fonction publique guidés par des valeurs et axés sur l’amélioration des retombées de l’action publique pour la société. Ce leadership peut contribuer à garantir l’efficacité de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques publiques en mettant à profit les connaissances et l’expérience institutionnelles pour contribuer à la prise de décisions fondées sur des observations concrètes1. L’investissement dans le leadership joue un rôle de catalyseur important dans l’efficacité des réformes, quel que soit la thématique ou le domaine d’action. Cette démarche inclut la mise en place de systèmes efficaces de nominations des hauts fonctionnaires et responsables d’institutions par concours et fondées sur le mérite.

Reconnaissant le rôle décisif de ces acteurs clés, la Recommandation de l’OCDE sur le leadership et les aptitudes de la fonction publique (2019[9]) [OECD/LEGAL/0445] recommande en particulier aux Adhérents de renforcer les aptitudes des dirigeants de la fonction publique. Les recommandations qu’elle formule invitent les gouvernements à :

  • Préciser les attentes qui pèsent sur les hauts responsables publics en tant que dirigeants politiquement impartiaux d’entités publiques, jugés dignes de confiance pour donner corps aux priorités des autorités politiques et pour défendre et incarner les plus hautes qualités d’intégrité, sans avoir à craindre de représailles d’ordre politique. Cette préconisation souligne la nécessité d’inscrire ces attentes dans la loi et de veiller à ce qu’elles soient respectées et fassent l’objet d’un suivi régulier. De même, les problèmes de conflits d’intérêts doivent être signalés systématiquement et gérés au moyen de procédures claires.

  • Sélectionner et désigner les candidats appropriés à ces postes en appliquant des critères liés au mérite et des procédures transparentes et leur demander de répondre des résultats obtenus par les moyens appropriés. Cette préconisation souligne la nécessité d’étudier les mécanismes de gestion des performances des hauts responsables et l’intégration de ces mécanismes dans le système de gouvernance.

  • Assurer aux hauts responsables publics le mandat, les compétences et les conditions nécessaires pour formuler des avis impartiaux fondés sur des données probantes et pour tenir un langage de vérité aux dirigeants politiques.

  • Renforcer les aptitudes de leadership des hauts responsables publics actuels et potentiels.

  • La Recommandation du Conseil sur l’intégrité publique (2017[11]) [OECD/LEGAL/0435] suggère également d’investir dans le leadership en matière d’intégrité pour démontrer l’attachement d’une entité du secteur public à l’intégrité.

  • Lorsqu’ils définissent et mènent un projet de réforme prioritaire, les pouvoirs publics font-ils preuve d’une détermination durable aux plus hauts niveaux politique et d’encadrement de la fonction publique en prenant des mesures institutionnelles explicites ?

  • Que peut faire l’administration pour relayer cet attachement à la qualité de la gouvernance publique à l’intérieur et à l’extérieur de l’administration ?

  • Les pouvoirs publics ont-ils défini une vision et des objectifs à moyen ou long termes et prévu des mandats institutionnels clairs et des ressources financières pour les mettre en œuvre ?

  • Les dirigeants sont-ils aux premiers plans de la gestion des performances individuelles et collectives ? L’administration investit-elle dans le développement des compétences pour renforcer les aptitudes des dirigeants de la fonction publique ?

  • Votre administration utilise-t-elle des instruments ou des mécanismes de coordination transversale afin d’assurer la concordance des actions et décisions de ses différents services avec les principaux objectifs des pouvoirs publics, et de renforcer ainsi la cohérence de son action ?

L’action publique ne se résume pas à la prise de décisions techniques. Elle suppose généralement d’opérer des arbitrages entre des valeurs sociales contradictoires et des intérêts divergents (Parkhurst, 2017[35]). Cela étant, une gestion efficace et efficiente de l’action publique et du processus décisionnel au service de l’intérêt général est au cœur d’une bonne gouvernance publique. La façon dont les décisions sont prises, les intérêts qui les sous-tendent ainsi que leurs objectifs déterminent les paramètres de l’élaboration et de la mise en œuvre des réformes en faveur d’une bonne gouvernance publique. Malgré la disparité des systèmes politiques et de leur dynamique, la prise de décision publique doit être guidée en permanence par la détermination à servir l’intérêt général – d’où la notion d’action publique équitable.

Lorsque les processus décisionnels pêchent par manque de transparence et d’intégrité, les activités de lobbying et les autres pratiques ayant vocation à exercer une influence sont parfois utilisées pour détourner les politiques publiques de l’intérêt général. Des groupes d’intérêts puissants peuvent exercer une pression considérable sur la prise de décision publique, en déterminant comment et pour qui fonctionne notre société. Les politiques sont alors partiales et insatisfaisantes et compromettent tout progrès réel qui permettrait de relever les principaux défis de l’action publique de manière équitable et dans le respect de l’intérêt général. Il peut s’agir d’un obstacle majeur à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD). Pour éviter ces risques, il faut corriger ce processus décisionnel faussé.

Pour garantir l’équité du processus décisionnel il est fondamental d’empêcher que des intérêts particuliers exercent une influence abusive. Si les pouvoirs publics prennent des décisions favorisant un groupe d’intérêts ou un individu donné au détriment de l’intérêt général, l’ensemble du processus de réforme est compromis : ces politiques privilégieront un petit nombre de citoyens ; les données concrètes perdront de leur crédibilité et les citoyens se méfieront des institutions. Des conditions offrant des chances égales à tous peuvent faire naître un plus large consensus et donner plus de légitimité aux décisions. Cette démarche suppose un accès équitable à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques, ainsi que le renforcement de la transparence et de l’intégrité des processus décisionnels. L’équité du processus décisionnel est renforcée lorsqu’une diversité d’acteurs, dispositifs et espaces institutionnels à l’appui, encouragent, et œuvrent collectivement et dans un souci de représentativité, en faveur de l’intérêt général. Cela suppose des institutions solides et représentatives, comme les partis politiques, les organisations syndicales ou les associations professionnelles, qui représentent les différents intérêts de la société. D’autres institutions comme les organismes associatifs ou des organisations thématiques peuvent également compenser toute influence excessive et rendre les conditions plus équitables. Cette démarche suppose également de mobiliser les nouveaux médias et canaux de représentation qui permettent de réduire les coûts et de renforcer l’impact de l’action collective.

Aucune administration n’est à l’abri de tentatives visant à exercer une influence excessive. Compte tenu des intérêts économiques et politiques en jeu, la sphère publique est toujours exposée aux tentatives de récupération de la part d’un ou plusieurs groupes d’intérêts. Cette situation peut se répercuter sur l’un des principes de base de la démocratie — l’égalité des droits politiques — et se traduire par un processus décisionnel inéquitable et influencé par des intérêts particuliers. L’influence exercée par des individus ou des groupes au service de leurs propres intérêts n’est pas illégale, elle fait partie du processus démocratique. Elle pose problème lorsque tous les citoyens n’ont pas les mêmes possibilités de voir leurs intérêts pris en compte dans le processus décisionnel. Les raisons peuvent être les suivantes :

  • pression disproportionnée et accès privilégié aux responsables publics via des activités de lobbying

  • financement excessif de partis politiques et des campagnes électorales des candidats

  • communication de données techniques ou spécialisées manipulées ou frauduleuses

  • mobilisation de relations personnelles donnant lieu à des conflits d’intérêts.

La captation de l’action publique peut intervenir à toutes les étapes du cycle de l’action publique. Au cours des dernières décennies, les pays membres de l’OCDE ont donc mis en œuvre différentes mesures pour l’éviter. Les structures de gouvernance doivent prévoir des moyens pour faire en sorte que les décisions en matière de politique publique et de réforme soient prises le plus équitablement possible, notamment par la promotion d’une culture d’intégrité, d’ouverture, d’inclusivité et de respect de l’état de droit (voir le chapitre 1), consistant, par exemple, à :

  • Associer les parties prenantes au processus décisionnel dès que possible ce qui constitue un outil essentiel pour harmoniser les règles du jeu, faire naître un plus large consensus et donner plus de légitimité aux décisions relatives aux politiques publiques.

  • Renforcer les cadres d’intégrité des institutions représentatives, y compris celles qui représentent un intérêt unique ; par exemple, au moyen de réglementations spécifiques qui fixent le cadre général de leur représentativité du point de vue de l’intégrité publique.

  • Assurer une communication stratégique, la transparence et l’accès à des informations complètes et actualisées afin de permettre à la société civile et à toutes les parties prenantes de disposer des mêmes informations, données et éléments probants lorsqu’elles participent à des discussions politiques.

  • Favoriser la redevabilité par l’intermédiaire des autorités de la concurrence, des instances réglementaires et des institutions supérieures de contrôle.

  • Repérer et atténuer les facteurs de risque de captation de l’action publique par le biais de politiques d’intégrité adaptées aux spécificités des différentes institutions publiques.

En outre, les données de l’OCDE indiquent que les pays adoptent des outils clés pour contrebalancer les capacités des parties prenantes à influencer les décideurs dans un sens contraire à l’intérêt général, notamment :

  • limitations et supervision efficace du financement politique

  • exercice d’un droit de regard et analyse de l’action publique, de façon ouverte, transparente et accessible à tous

  • mise en place de contrôles efficaces des activités de lobbying, notamment par la définition d’un statut de transparence des lobbyistes ou gestionnaires d’intérêts ou par la publication des dons reçus et des voyages effectués par une autorité (Encadré 2.3).

L’utilisation de données probantes dans l’élaboration des politiques, en particulier la manière dont ces éléments concrets sont collectés, appliqués et intégrés dans le processus décisionnel relatif aux enjeux sociaux, politiques et économiques du moment, est un élément clé — et complémentaire — susceptible de déterminer la teneur et l’impact des réformes (Parkhurst, 2017[35]). Une action publique éclairée par des données concrètes peut jouer un rôle de premier plan dans l’amélioration de la conception, la mise en œuvre et l’évaluation de toutes les politiques publiques, et garantir une bonne gouvernance, notamment une égalité d’accès à des services publics de qualité, réactifs et axés sur les citoyens.

Le recueil d’éléments probants peut représenter un défi particulier pour les décideurs, surtout lorsque l’autorité de la science est remise en question. Les éléments probants ne sont pas toujours disponibles aisément et peuvent présenter des conclusions contradictoires, en particulier dans des domaines politiques complexes. En outre, il convient d’évaluer la crédibilité et la fiabilité des informations, données et éléments factuels (notamment en vérifiant leur reproductibilité, en multipliant les sources, en procédant à des validations indépendantes, etc.) utilisés pour prendre des décisions. Lorsque les institutions publiques ne sont pas les productrices des données, mais en sont consommatrices, les éléments concrets produits par des parties prenantes extérieures peuvent faire l’objet d’évaluations internes au regard de leur crédibilité et de leur fiabilité. En outre, une gestion rigoureuse du stock d’éléments probants, à l’aide de solides processus de gestion des connaissances et la mobilisation totale des données administratives, contribuent à prévenir une conception partiale des politiques publiques, à éviter les doublons, à faire en sorte que les ressources rares soient affectées aux domaines qui en ont le plus besoin et que les services soient élaborés et fournis sur la base d’éléments concrets démontrant ce besoin. Les administrations n’ont pas toujours les capacités nécessaires pour ce faire; il est donc crucial qu’elles développent des compétences utiles pour commander la collecte, comprendre et utiliser les éléments concrets. Il s’agit de la meilleure solution pour élaborer des politiques qui bénéficieront aux citoyens, éviteront les biais institutionnels et serviront de garde-fous contre tout intérêt particulier à maintenir le statu quo.

Si les avis concordent généralement sur la nécessité qu’il y a à disposer d’éléments probants, les démarches éclairées par des données concrètes ne permettent pas pour autant de se passer du discernement et de la détermination en politique ; elles permettent toutefois de faire en sorte que tous les choix et arbitrages stratégiques soient pleinement visibles. Dans un contexte où le rôle des médias sociaux prend de l’ampleur et permet un accès direct sur le web à divers éléments concrets dont les sources sont de qualité inégale, et face aux préoccupations croissantes suscitées par les fausses informations, la nécessité d’un processus décisionnel éclairé par des données concrètes prend une importance accrue.

Cette démarche implique de boucler le cycle de mise en œuvre dès le départ afin de faire en sorte que les réformes proposées puissent être mises en œuvre et le soient bel et bien. Des études sur la mise en œuvre (y compris les données d’observation sur la performance) peuvent faire toute la différence entre la mise en œuvre satisfaisante d’une mesure et son inefficacité, voire sa dangerosité potentielle, et offrent aux chercheurs et responsables publics les moyens de suivre la mise en œuvre des politiques publiques, et de veiller à ce qu’elles produisent les effets attendus par les décideurs et les citoyens. Pour ce faire, il faut que le secteur public puisse recourir à l’expérimentation, créer des politiques publiques expérimentales et pilotes, et bénéficier d’une volonté d’innover, et d’un soutien et des capacités pour le faire.

Pour boucler le cycle de mise en œuvre, l’évaluation des politiques publiques (chapitre 5) peut contribuer à déterminer si ces politiques améliorent réellement les résultats. De solides éléments concrets sur l’efficacité des politiques publiques et le rapport coût-efficacité des initiatives sont une garantie pour comprendre « ce qui fonctionne, pourquoi, pour qui et dans quelles circonstances ».

L’expérience confirme cependant la difficulté de parvenir à cette situation. Même dans les systèmes les plus développés, le lien entre les éléments concrets et le processus décisionnel reste difficile à établir :

  • La fonction publique a besoin des compétences appropriées pour commander la collecte des éléments probants, les comprendre et les utiliser. Cela implique un renforcement des capacités au niveau individuel et un soutien à l’adoption de procédures, de mesures incitatives et de ressources pour renforcer l’utilisation des éléments concrets.

  • L’action publique éclairée par des données concrètes exige également une structure institutionnelle de soutien et une infrastructure dotée d’un cadre clair et transparent de production et d’utilisation des données concrètes. Cette approche peut comprendre un contrôle de la qualité et des mécanismes de garantie pour vérifier la fiabilité et la solidité des éléments concrets recueillis avant leur utilisation effective.

  • Les données concrètes, quelles que soient leur pertinence et leur solidité, ne peuvent constituer qu’une partie du processus décisionnel : elles seront toujours utilisées à l’appui d’un processus qui fait appel à l’intuition et au discernement pour formuler la décision politique finale.

  • Des mécanismes sont-ils en place pour permettre aux décideurs d’associer régulièrement et volontairement aux processus décisionnels des parties prenantes représentant (et déclarant) différents intérêts ?

  • Existe-t-il dans votre pays des règles permettant d’établir de façon formelle et transparente, les liens existant entre les groupes d’intérêt et les décideurs dans le cadre de la prise de décision publique ?

  • En ce qui concerne les institutions non gouvernementales représentant des intérêts particuliers, comme les partis politiques, les organisations syndicales et les associations professionnelles, existe-t-il des lois ou règlements fixant le cadre général de leur gouvernance et de leur représentativité du point de vue de l’intégrité publique (élections pluralistes des responsables, processus décisionnel démocratique ; transparence financière et obligations de contrôle ; règles sur le financement électoral ; etc.) ?

  • La fonction publique dispose-t-elle des connaissances, compétences et capacités pour garantir l’utilisation appropriée d’éléments concrets dans l’action publique ?

  • La haute fonction publique dispose-t-elle de connaissances stratégiques sur le rôle de l’action publique éclairée par des données concrètes et pour faire en sorte que les décideurs possèdent les éléments probants appropriés en temps voulu et sous la forme adaptée ?

  • Le secteur public dispose-t-il de processus et d’une structure institutionnelle permettant d’intégrer des éléments concrets dans l’action publique ?

  • Les décideurs utilisent-ils les éléments concrets en respectant les exigences de transparence et d’intégrité ? Le recueil d’éléments concrets observe-t-il des exigences/critères particuliers pour garantir sa validité ?

Au cours des dernières décennies, la coordination des politiques en vue d’une plus grande cohérence a acquis une pertinence particulière dans bon nombre de pays Membres et Partenaires de l’OCDE, principalement en raison de l’émergence de défis transversaux, pluridimensionnels et de l’éparpillement des structures administratives qui en a résulté, comme l’illustre la croissance exponentielle des organismes et autres organes autonomes (Beuselinck, 2008[37]; Alessandro, Lafuente et Santiso, 2013[34]). Ce constat concerne aussi bien la coordination horizontale entre les entités administratives (ministères, organismes) que la coordination verticale entre niveaux d’administration (Encadré 2.5).

En ce qui concerne la coordination à l’échelle de l’ensemble de l’administration, selon l’enquête de l’OCDE sur le Centre de gouvernement, la plupart des pays examinés (59 %) ont déclaré que le nombre d’initiatives interministérielles augmente depuis 2008 (OCDE, 2014[33]). Pour renforcer la cohérence de l’action des ministères, des organismes publics et autres entités administratives, la plupart (67 %) des pays membres de l’OCDE interrogés dans le cadre de la mise à jour en 2017 de l’enquête de 2014 ont indiqué avoir renforcé les capacités institutionnelles et financières de leur centre de gouvernement, dont le mandat a progressivement évolué, passant du soutien administratif à la coordination de l’action publique (OCDE, 2018[32]).

Malgré la grande diversité des structures institutionnelles du centre de gouvernement dans les pays Membres de l’OCDE, les enquêtes de 2014 et 2017 sur le centre de gouvernement (OCDE, 2014[33] ; OCDE, 2018[32]) font apparaître plusieurs similitudes dans les fonctions et responsabilités en matière de coordination à l’échelle de l’ensemble de l’administration (Graphique 2.2), qui s’articulent autour des grands domaines suivants :

  • Piloter la prise de décision fondée sur des données concrètes, inclusive et en temps opportun par le Chef du gouvernement :

    • Dans la plupart des pays, le chef de l’exécutif est assisté d’un cabinet qui organise les activités quotidiennes et apporte ponctuellement des renseignements politiques et un appui consultatif. Les réunions régulières du cabinet demeurent la principale enceinte de la discussion politique.

    • La conformité juridique, la qualité réglementaire et l’estimation appropriée des coûts sont trois fonctions techniques importantes à l’appui de la prise de décision qui peuvent être coordonnées par le centre de gouvernement.

  • Coordonner l’action des administrations, qui implique de plus en plus de mener des stratégies prioritaires transversales et pluridimensionnelles :

    • L’un des critères de l’efficacité du centre de gouvernement réside dans sa capacité à jouer un rôle de médiation en cas de désaccords entre les ministères.

    • Le centre de gouvernement joue un rôle de leadership à l’égard des priorités stratégiques, y compris en ce qui concerne des questions sensibles de l’action publique, élabore des plans d’action en coopération avec les services concernés et dirige la gestion de projets.

    • Plusieurs centres de gouvernement apportent un soutien technique et consultatif aux ministères sectoriels afin de les aider à s’adapter et à répondre aux exigences supplémentaires des projets horizontaux. Les principales mesures d’incitation utilisées par le centre pour favoriser les activités horizontales sont les objectifs de performance individuels ou collectifs ainsi que l’évaluation.

  • Assurer la planification stratégique à moyen terme de l’ensemble de l’administration :

    • La plupart des pays membres de l’OCDE adoptent des documents stratégiques ayant un horizon temporel relativement court, proche de celui d’un mandat électoral unique.

    • Trois modèles de planification sont usuels dans les pays membres de l’OCDE : (i) un groupe de haut niveau proche du Chef du gouvernement et lui rendant compte directement ; (ii) un système de réunions stratégiques impliquant plusieurs services, coordonné par le centre de gouvernement ; (iii) une unité spécifique dédiée à l’analyse prospective.

  • Suivre les effets et résultats de la mise en œuvre des politiques publiques :

    • Le suivi peut revêtir diverses formes : rapports réguliers remis par le centre de gouvernement, réunions du cabinet pour examiner la réalisation d’objectifs spécifiques, et mécanismes de gestion des performances plus spécifiques qui peuvent inclure les dépenses de planification, les indicateurs relatifs aux moyens et aux résultats.

  • Assurer la communication stratégique : le centre de gouvernement joue également un rôle croissant dans la communication stratégique tant sur le plan interne qu’avec le public, y compris pour la gestion des stratégies de médias sociaux du gouvernement.

  • Piloter la planification de la transition : Les centres de gouvernement sont également plus souvent appelés à gérer le soutien stratégique apporté aux nouveaux gouvernements à la suite d’élections générales afin de faciliter la transition et le transfert de pouvoirs entre les responsables publics, et par conséquent de préserver la stabilité de l’ensemble du cycle électoral.

  • Votre pays a-t-il développé les capacités de la fonction publique au sein l’administration afin d’organiser et de conduire la réflexion et la planification stratégiques à haut niveau ?

  • Existe-t-il des dispositifs de coordination des initiatives interministérielles, comme des groupes ou commissions de coordination de l’action publique ?

  • Existe-t-il dans votre pays des incitations en faveur de la coordination entre les ministères et les organismes publics, notamment des objectifs de résultats financiers, individuels ou collectifs ?

  • Votre pays a-t-il mis en place des mécanismes clairs comme des plans de travail bien définis pour la mise en œuvre du programme gouvernemental, des objectifs de performance ou des instruments de suivi pour garantir la mise en œuvre des priorités de l’action publique ?

Dans le secteur public, l’innovation consiste avant tout à adopter et mettre en œuvre de nouvelles idées dont l’impact contribue à favoriser et améliorer la bonne gouvernance publique en renforçant l’agilité stratégique et les capacités anticipatrices de l’État. Elle consiste à déterminer de quelle manière introduire des changements sporadiques, et comment y répondre, tout en favorisant des approches centrées sur les citoyens dans la conception et la mise en œuvre des services publics.

  • Ces changements peuvent aller du plus progressif (changement significatif ou introduction d’un processus entièrement nouveau) au plus radical (manière totalement nouvelle d’appréhender le monde).

  • Le changement peut se traduire par un bouleversement (ex. : une nouvelle technologie et les modèles opérationnels correspondants), une transformation (passage des processus analogiques aux interactions numériques) ou par la définition et la poursuite de priorités et d’ambitions stratégiques qui n’existaient pas jusque-là.

Les données concrètes montrent que la promotion de l’innovation dans le secteur public est une priorité absolue pour promouvoir une bonne gouvernance publique dans bon nombre de pays membres de l’OCDE. Si les forces du marché, notamment la concurrence, influent sur les performances du secteur privé, le secteur public, lui, doit mettre en œuvre une série de mécanismes qui soutiennent une capacité de changement dynamique et radicale (ou, à tout le moins, en créent les conditions) de façon à permettre aux pouvoirs publics de servir mieux et plus efficacement les citoyens et les entreprises dans un monde en évolution rapide. L’administration doit maintenant composer avec plusieurs facteurs qui impliquent une approche plus structurée et cohérente de la gestion de l’évolution et de la promotion de l’innovation :

  • Évolution des fonctions – Dans un contexte de changement, l’administration doit également faire évoluer son mode de fonctionnement.

  • Courir pour rester sur place – Dans une économie en évolution, l’administration doit modifier les cadres d’action ne serait-ce que pour maintenir les résultats.

  • Pas de place pour les spectateurs – Pour rester des décideurs efficaces, les responsables publics doivent avoir une connaissance réelle de l’innovation. Ils ne peuvent pas se permettre d’attendre qu’on leur apporte des réponses.

  • Des attentes croissantes – De nombreux responsables politiques, citoyens et fonctionnaires veulent et s’attendent à ce que les choses changent.

  • Risque de décalage – Une administration qui n’innove pas risque d’être toujours en retard, toujours dans la réaction et toujours décevante.

  • L’innovation en tant que compétence de base – Le besoin d’innovation peut se survenir n’importe où, tout le monde doit donc être prêt et capable de jouer son rôle.

Il reste encore beaucoup à apprendre sur la meilleure façon de créer les conditions de l’innovation et de déployer les compétences, aptitudes, outils et ressources nécessaires pour la conduire avec succès. L’expérience des pays Membres de l’OCDE indique que l’innovation s’opère à tous les niveaux d’administration. Le rôle de l’administration centrale consiste à créer les conditions pour qu’elle voie le jour. D’après les études, les principaux vecteurs de l’innovation dans l’administration résident dans les facteurs liés à la gestion du capital humain, au bon fonctionnement des règles internes, aux possibilités d’innovation permises par les budgets, et à la capacité à concevoir des pratiques de gestion de projet permettant de gérer les risques et à ménager des espaces destinés à l’expérimentation (laboratoires et unités d’innovation).

Toutefois, s’ils sont pris en compte isolément, ces facteurs n’offrent qu’une vision partielle des domaines dans lesquels l’innovation est le plus souhaitable ou nécessaire et cette façon d’aborder les choses peut conduire à ce que les blocages se déplacent d’une partie du système vers une autre. La Déclaration de l’OCDE sur l’innovation dans le secteur public (2019[40]) [OECD/LEGAL/0450] a pour objet d’aider les administrations et les organismes publics à miser sur l’innovation pour relever différents défis et saisir les opportunités. Elle énonce cinq principes associés à des mesures susceptibles de soutenir l’innovation et sa gestion :

  • Soutenir et favoriser l’innovation au sein du secteur public

  • Encourager tous les agents publics à innover et leur en donner les moyens

  • Cultiver de nouveaux partenariats et faire entendre des points de vue différents

  • Promouvoir l’exploration, l’itération et la réalisation de tests

  • Diffuser les enseignements et mettre en commun les bonnes pratiques

En outre, une perspective systémique peut renforcer les capacités et aptitudes de la fonction publique à définir, élaborer et appliquer, selon les besoins, de nouvelles approches, tant pour répondre aux mandats actuels qu’aux nouvelles menaces et opportunités2. L’OCDE a identifié quatre domaines dans lesquels les administrations doivent concentrer leurs efforts si elles veulent faire de l’innovation une ressource cohérente et fiable pour l’action publique :

  • Clarté – Envoie-t-on un signal clair aux acteurs publics au sujet de l’innovation et de son articulation avec d’autres priorités ?

  • Parité – L’innovation a-t-elle la même importance que d’autres considérations en ce qui concerne les plans d’action proposés ?

  • Pertinence – Les capacités, les systèmes et l’infrastructure sont-ils adaptés aux options disponibles ?

  • Normalité – L’innovation est-elle considérée comme une partie intégrante plutôt que comme un écart occasionnel toléré par rapport à la norme ?

En 2017, l’Observatoire sur l’innovation dans le secteur public de l’OCDE a publié un modèle beta de compétences pour promouvoir et favoriser l’innovation dans les organisations du secteur public (OCDE, 2017[41]). Le modèle beta de compétences pour l’innovation dans le secteur public s’articule autour de six domaines de compétences « essentielles » qui permettent aux fonctionnaires de soutenir des niveaux d’innovation accrus dans le secteur public.

  • Élaboration itérative : Élaboration expérimentale et progressive de politiques, produits et services.

  • Maîtrise des données : Faire en sorte que les décisions soient guidées par des données et que les données ne soient pas prises en considération après-coup.

  • Focalisation sur l’utilisateur : Les services publics doivent être axés sur les solutions et réponses aux besoins des utilisateurs.

  • Curiosité : Faire émerger et tester de nouvelles idées ou méthodes de travail.

  • Mise en récit : Expliquer l’évolution de manière à susciter l’adhésion.

  • Sens critique : Défier le statu quo et collaborer avec des partenaires inhabituels.

L’innovation et la conduite du changement sont deux éléments catalyseurs importants, mais distincts, d’une réforme efficace. La conduite du changement consiste généralement à évoluer vers un état ou un résultat connu et désiré, alors que l’innovation relève d’un processus exploratoire d’apprentissage dans un contexte complexe et incertain. Toutes deux sont essentielles pour gouverner efficacement, mais exigent différents types de soutien et de conditions préalables pour être menées à bien.

Les changements et les réformes peuvent être parfois impopulaires ou prendre du temps pour produire des résultats. L’un des principaux défis auxquels sont confrontées les administrations dans la conduite du changement consiste à maintenir sa légitimité tout en renforçant l’adhésion aux réformes malgré les obstacles ou blocages politiques. Une conduite efficace du changement consiste à maintenir l’élan de la réforme tout en surmontant l’opposition au changement, qu’elle s’exprime de l’intérieur ou dans l’opinion publique. Dans le secteur public, cette démarche est particulièrement difficile, car les processus de changement sont souvent concomitants. Le rapport de l’OCDE « Réussir la réforme » (2010[83]) indique que la réussite de la conduite du changement dépend souvent de l’existence d’un mandat électoral, d’une communication efficace, d’institutions appropriées et d’une volonté politique, de la hiérarchisation et de l'enchaînement des réformes et de l’efficacité avec laquelle les décideurs dialoguent avec les adversaires de la réforme.

Si la conduite du changement dans le secteur public constitue un objectif et une activité à long terme, les administrations des pays de l’OCDE cherchent de plus en plus à adopter une approche institutionnelle élaborée des questions et stratégies de conduite du changement. Elles ont commencé à délaisser les processus directifs de conduite du changement pour adopter une vision plus large, qui implique l’intégration des activités de la base au sommet et inversement, notamment la description systématique des problèmes, la production d’idées, la sélection des solutions possibles et leur mise en œuvre.

Les prochaines versions du Cadre d’action présenteront les pratiques nationales de conduite du changement, domaine important, bien qu’encore émergent, de la gouvernance publique et apporteront ainsi des exemples concrets de conduite du changement réussie et de démarches efficaces entreprises dans ce domaine pour améliorer les résultats pour les citoyens.

  • Le secteur public a-t-il la capacité d’assimiler les nouvelles tendances, de gérer les changements de tendance sous-jacents et de suivre l’évolution potentielle des attentes et des besoins des citoyens ?

  • Comment votre administration tire-t-elle les enseignements des pratiques émergentes et les applique-t-elle aux pratiques fondamentales ?

  • Votre administration soutient-elle (conseil, orientation et ressources) les organismes, les fonctionnaires et les parties prenantes au niveau local afin de leur permettre de tester et d’appliquer de nouvelles manières de créer de la valeur pour le public ?

Instruments juridiques de l’OCDE :

Autres instruments pertinents de l’OCDE:

References

[34] Alessandro, M., M. Lafuente and C. Santiso (2013), The Role of the Center of Government A Literature Review, Institutions for Development , Washington, DC, http://www.iadb.org (consulté le 4 octobre 2019).

[37] Beuselinck, E. (2008), Shifting public sector coordination and the underlying drivers of change: a neo-institutional perspective, Katholieke Universiteit Leuven.

[40] OCDE (2019), Déclaration sur l’innovation dans le secteur public, https://legalinstruments.oecd.org/en/instruments/OECD-LEGAL-0450 (consulté le 4 octobre 2019).

[39] OCDE (2019), Effective Public Investment Across Levels of Government: Implementing the OECD Principles, Centre for Entrepreneurships, SMES, Regions and Cities, https://www.oecd.org/effective-public-investment-toolkit/ (consulté le 4 octobre 2019).

[79] OCDE (2019), Policy Coherence for Sustainable Development 2019: Empowering People and Ensuring Inclusiveness and Equality, Editions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/a90f851f-en.

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[32] OCDE (2018), Centre Stage 2, Centres de gouvernement de l’OCDE, Éditions OCDE, Paris.

[41] OCDE (2017), Core Skills for Public Sector Innovation, Observatory of Public Sector Innovation, Éditions OCDE, Paris.

[38] OCDE (2017), Multi-level Governance Reforms: Overview of OECD Country Experiences, OECD Multi-level Governance Studies, Editions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264272866-en.

[1] OCDE (2017), Panorama des administrations publiques 2017, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/gov_glance-2017-en.

[36] OCDE (2017), Preventing Policy Capture: Integrity in Public Decision Making, OECD Public Governance Reviews, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264065239-en.

[11] OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur l’intégrité publique.

[2] OCDE (2017), Systems Approaches to Public Sector Challenges: Working with Change, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264279865-en.

[23] OCDE (2016), Gouvernement ouvert : contexte mondial et perspectives, Éditions OCDE, Paris.

[25] OCDE (2015), Recommandation du Conseil sur l’égalité hommes-femmes dans la vie publique

[30] OCDE (2014), Centre Stage: Driving Better Policies from the Centre of Government.

[31] OCDE (2014), Recommandation du Conseil sur les stratégies numériques gouvernementales.

[33] OCDE (2014), Vision, Leadership, Innovation: Driving Public Sector Performance.

[27] OCDE (2012), Recommandation du Conseil concernant la politique et la gouvernance réglementaires

[78] OCDE (2011), Estonia: Towards a Single Government Approach, OECD Public Governance Reviews, Editions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264104860-en.

[83] OCDE (2010), Making Reform Happen: Lessons from OECD Countries, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264086296-en.

[35] Parkhurst, J. (2017), The politics of evidence: from evidence-based policy to the good governance of evidence, Abingdon: Routledge, http://eprints.lse.ac.uk/68604/1/Parkhurst_The Politics of Evidence.pdf (consulté le 4 octobre 2019).

Notes

← 1. http://www.oecd.org/gov/pem/performanceandleadership.htm.

← 2. Une approche systémique « analyse les différents éléments du système qui sous-tendent un problème d’action publique, ainsi que la dynamique et les interactions de ces éléments qui produisent un résultat précis. L’expression « approche systémique » fait référence à un ensemble de processus, méthodes et pratiques qui visent à affecter l’évolution des systèmes » (OCDE, 2017[2]).

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