Santé mentale
Une bonne santé mentale est essentielle pour mener une vie saine et productive (OCDE, 2021[19]). Au moment de la crise du COVID-19, lorsque les habitants des pays de l’OCDE ont dû radicalement changer de mode de vie et modifier leurs façons d’apprendre et de travailler, on a observé des effets non négligeables sur la santé mentale (voir le chapitre 2 pour une analyse plus approfondie des conséquences du COVID-19 sur la santé mentale). En mars et avril 2020, les niveaux d’anxiété et de dépression enregistrés dans la population générale étaient plus élevés dans presque tous les pays par rapport aux années précédentes (Graphique 3.19, Graphique 3.20). La progression des troubles émotionnels n’a toutefois pas été constante pendant la crise sanitaire, ni homogène pour toutes les catégories de la population. Dans des pays tels que le Canada, la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, où l’état de santé mentale de la population a fait l’objet d’un suivi tout au long de la pandémie, les résultats se sont améliorés entre juin et septembre 2020, ce qui coïncide avec une baisse des taux d’attaque du COVID-19 et un assouplissement des mesures d’endiguement (OCDE, 2021[20]). Les personnes qui étaient au chômage ou qui connaissaient des difficultés financières ont signalé des taux d’anxiété et de dépression plus élevés que la population générale pendant la crise du COVID-19 ; cette tendance datait d’avant la crise, mais elle se serait accélérée dans certains pays (OCDE, 2021[20]). La santé mentale des jeunes a aussi particulièrement pâti de la pandémie, la prévalence des symptômes d’anxiété et de dépression ayant fortement augmenté, en particulier à la fin de 2020 et au début de 2021 (OCDE, 2021[21]).
En l’absence d’assistance ou de traitement efficaces, les problèmes de santé mentale peuvent avoir des répercussions catastrophiques sur la vie des personnes qui en sont atteintes. Des raisons sociales et culturelles complexes sont à l’origine des comportements suicidaires, mais les troubles mentaux augmentent aussi le risque de décès par suicide (OCDE, 2021[19]). Le taux de décès par suicide variait par un facteur de 6 dans les pays de l’OCDE, en 2019, les taux les plus faibles étant observés en Turquie (4.4 pour 100 000 habitants) et en Grèce (4.7 pour 100 000 habitants). Entre 2000 et 2019, les décès par suicide ont diminué de 29 % dans l’ensemble (Graphique 3.21). Le taux de décès par suicide pour 100 000 habitants a diminué ou est resté relativement stable dans tous les pays de l’OCDE sauf cinq (Grèce, Mexique, Portugal, États-Unis et Corée). En Lituanie et en Corée, où les taux de suicide étaient les plus élevés (21.6 pour 100 000 habitants en Lituanie et 24.6 pour 100 000 habitants en Corée), l’évolution des décès par suicide a été très différente. Entre 2000 et 2019, en Corée, les décès par suicide ont augmenté de 46 %. En Lituanie, en revanche, ils ont diminué de 55 % sur la même période. Comme dans de nombreux pays voisins, le taux de suicide en Lituanie a augmenté pendant la période de profonds changements sociaux et économiques qui a suivi la chute de l’Union soviétique, atteignant un niveau record de 51.0 décès pour 100 000 habitants en 1996. Le gouvernement lituanien met tout en œuvre pour réduire encore le taux de suicide par le biais de campagnes de prévention et de mesures visant à renforcer le système de santé mentale (OCDE/Observatoire européen des systèmes et des politiques de santé, 2019[22]). À ce jour, aucune évolution significative du taux de décès par suicide n’a été observée depuis le début de la crise du COVID-19 dans les pays de l’OCDE.
Les pays de l’OCDE ont considérablement étoffé leurs dispositifs d’aide à la santé mentale depuis le début de la crise du COVID-19. La plupart a créé de nouveaux supports d’information sur la santé mentale et/ou de nouveaux services d’assistance téléphonique, afin d’indiquer aux populations comment tenir le coup, et certains ont ouvert plus largement l’accès aux services de santé mentale et/ou accru les moyens financiers alloués à ces derniers (OCDE, 2021[20]). Par exemple, le Canada a mis en place, en avril 2020, le dispositif « Espace mieux-être Canada », qui propose des services gratuits par SMS ou par téléphone pour autoévaluer son niveau de bien-être et obtenir des conseils ou de l’aide, tandis que l’Australie a multiplié par deux le nombre de séances remboursées avec un thérapeute. En 2021, le Chili – qui n’a consacré en 2018 que 2.1 % des dépenses publiques de santé à la santé mentale – a annoncé que le budget alloué à la santé mentale augmenterait de 310 % (OCDE, 2021[19]). Malgré les effets considérables de la mauvaise santé mentale sur le plan social comme sur le marché du travail, les stratégies d’aide à la santé mentale ne font toujours pas partie intégrante des politiques de protection sociale, du travail et de la jeunesse. Conformément à la Recommandation de l’OCDE sur une politique intégrée de la santé mentale, des compétences et de l’emploi, une approche de la santé mentale à l’échelle de l’ensemble de la société s’impose (OCDE, 2015[23]).
La déclaration d’un suicide est une procédure complexe qui est influencée par divers éléments, notamment le mode de vérification de l’intention de passage à l’acte, les personnes chargées d’établir le certificat de décès, et les aspects culturels, dont les préjugés entourant le suicide. La prudence est donc de mise lorsque l’on compare les taux de suicide entre pays. Les taux de mortalité standardisés par âge sont calculés par le nombre de décès divisé par les effectifs de la population correspondante. Les données utilisées sont issues de la Base de données de l’OMS sur la mortalité ; les suicides correspondent aux codes X60 à X84 et Y870 de la CIM-10.
Le Graphique 3.19 et le Graphique 3.20 utilisent des sources de données nationales sur plusieurs années, qui risquent de ne pas être directement comparables d’un pays à l’autre. Les instruments d’enquête utilisés pour mesurer la dépression et l’anxiété varient selon les pays et, de ce fait, risquent de ne pas se prêter à des comparaisons directes ; certaines enquêtes d’autre part ont parfois été réalisées auprès d’échantillons de taille restreinte ou non représentatifs de la population nationale. Toutes les populations ne sont pas prêtes à évoquer leur santé mentale de la même façon, ce qui nuit également à la comparabilité entre les pays. Dans la mesure du possible, pour évaluer la prévalence de la dépression, les enquêtes retenues ont été réalisées à l’aide du questionnaire sur la santé des patients (PHQ-9). Dans la mesure du possible, pour évaluer l’anxiété, les enquêtes retenues ont été réalisées à l’aide de l’outil de dépistage de l’anxiété généralisée (GAD-7). Les données concernant la période antérieure à la crise du COVID-19 varient en fonction de la disponibilité ; le choix s’est porté sur les plus récentes, jusqu’à l’année 2019. Pour toutes les sources de données nationales, voir OCDE (2021[20]). Des données actualisées ou complémentaires ont été utilisées en ce qui concerne le Canada (Enquête ECSM de Statistique Canada), et le Royaume-Uni (ONS Statistical Bullletin – Coronavirus and depression in adults, mai 2021 ; ONS Statistical Bullletin – Personal and economic well-being in Great Britain: May 2020).