Résumé

Avec la participation de 58 juridictions représentant environ 90 % du PIB mondial, la dixième édition 2022 de la série de l’OCDE sur l’administration fiscale donne une vue complète de la situation des administrations fiscales en 2020. Ce rapport, qui présente des informations comparatives sous la forme de 76 tableaux portant sur les performances des administrations fiscales et leurs données de profil, a vocation à aider les administrations fiscales à déterminer les domaines dans lesquels de nouvelles améliorations sont possibles et à mieux faire comprendre au grand public les dimensions et la nature changeante de l’administration de l’impôt à l’échelle mondiale. L'édition 2022 tente également de mettre en évidence, à partir des données recueillies grâce à l’Enquête internationale sur les administrations fiscales (ISORA) et d’exemples, plus d’une centaine, communiqués par plus de 35 administrations fiscales, les changements les plus importants auxquels celles-ci doivent faire face. L'accent est placé en particulier sur l’intérêt de plus en plus vif porté par les administrations fiscales aux solutions envisageables pour adopter des approches plus volontaristes en matière d’incitation à la discipline fiscale et de gestion de la conformité, ainsi que sur les défis à relever pour s’adapter à l’évolution des besoins en ressources.

En complément des données de l’enquête ISORA, cette édition utilise également des données tirées de l’Inventaire multipartenaires des initiatives sur l’utilisation de la technologie à des fins fiscales (ITTI) (OCDE, 2022[6]) qui a été récemment lancé et qui livre des informations sur les outils technologiques et les solutions de transformation numérique mises en œuvre par plus de 75 administrations fiscales. Les données de cet Inventaire sont recueillies au moyen d'une enquête mondiale sur la transformation numérique et donnent un éclairage supplémentaire sur certains thèmes couverts par l’enquête ISORA.

C’est la première édition de la série qui montre l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les administrations fiscales. Le graphique 1 ci-dessous illustre l’impact significatif que la pandémie a eu sur les recettes nettes et les arriérés d'impôt. Il sera très intéressant de suivre ces indicateurs dans les éditions futures de cette série afin de déterminer s’ils se rétablissent et à quel rythme.

La pandémie de COVID-19 a bouleversé les modèles de fonctionnement des administrations fiscales, et d’importants changements se sont produits dans leurs modalités d’interaction avec les contribuables, avec par exemple une chute de 55 % des rencontres en personne et une hausse de 30 % des contacts numériques. Les administrations fiscales se sont montrées résilientes face à ces défis et, comme le montrent les exemples décrits dans cette édition, ont continué d’innover et d’offrir des services de qualité élevée aux contribuables. En parallèle, de nombreuses administrations fiscales ont pris en charge de nouvelles tâches dans le cadre des programmes de soutien mis en place par les États pendant la crise du COVID-19. Il peut s'agir d’une accélération de la tendance observée dans les éditions antérieures de cette série, consistant pour les administrations à assumer de nouvelles responsabilités, fortes de leur grande expertise de l’offre de services aux contribuables et du traitement de vastes ensemble de données complexes.

Les innovations mises en lumière dans cette édition du rapport révèlent également de quelle manière la pandémie a accéléré l’essor des services en ligne et de la transformation numérique, et a conduit plus généralement à réfléchir à de nouvelles méthodes de travail. De nombreuses administrations fiscales indiquent qu’elles font actuellement le bilan de leur expérience pendant la pandémie afin d’en tirer des enseignements pour l’avenir, tant pour leurs agents que pour les contribuables.

Les éditions précédentes de la série ont montré une tendance marquée à se tourner vers l’administration électronique, se concrétisant par un recours de plus en plus fréquent aux déclarations en ligne, au paiement en ligne et, dans de nombreuses juridictions, aux déclarations fiscales entièrement ou partiellement pré-remplies. L'édition 2022 révèle que cette tendance s’est poursuivie et a été accélérée par la pandémie, les canaux numériques occupant désormais une place prépondérante dans les échanges avec les contribuables. Par exemple, les administrations fiscales ont signalé qu’en 2020, environ 1.3 milliard de communications s’étaient effectuées via les espaces en ligne des contribuables, soit une hausse annuelle de 27 %.

Ce rapport souligne également que les administrations fiscales s’orientent vers la transformation numérique, et le graphique 2 révèle qu’environ 75 % des administrations ont mis en place une stratégie en ce sens.

Les administrations fiscales indiquent que ces stratégies les aident à offrir des services numériques « plus intelligents », permettant aux contribuables d'accomplir en ligne des tâches de plus en plus complexes, de façon plus efficace et 24 heures sur 24. Cette évolution contribue également à améliorer sensiblement le respect de leurs obligations par les contribuables, et les signes indiquant que le rythme de la transformation numérique va continuer de s’accélérer se multiplient. Cette édition de la série met en lumière deux grands thèmes de la transformation numérique concernant respectivement les relations avec les contribuables et la gestion du risque de non-respect des obligations fiscales.

Avec la dématérialisation croissante des services, les moyens par lesquels les administrations fiscales communiquent avec les contribuables évoluent. Deux principaux facteurs contribuent à faire du numérique un vecteur de communication efficace :

  • Identification et vérification numériques sécurisées : alors que les administrations fiscales assurent de plus en plus de services par des moyens numériques, la sécurité, la vérification et l’identité numériques prennent de plus en plus d'importance. Les administrations fiscales mettent à profit leur expertise et les séries de données dont elles disposent pour donner aux contribuables un plus large accès en libre-service non seulement aux options qu’elles proposent, mais aussi aux systèmes de tiers et d'autres administrations publiques. L’existence d’identités numériques communes est essentielle au bon fonctionnement de ces programmes.

  • Collaboration avec des prestataires de services tiers : l’intégration des services et des processus dans les systèmes traditionnels utilisés tant par les contribuables dans leur vie quotidienne que par les entreprises est une tendance qui s’affirme dans l’ensemble des administrations fiscales. Si elle concourt à l’amélioration de la discipline fiscale, elle contribue aussi à alléger la charge administrative pesant sur les entrepreneurs et à leur dégager du temps qu’ils peuvent consacrer au développement de leur entreprise. Ces modes de collaboration devenant plus répandus et plus sophistiqués, les administrations fiscales commencent à adopter des approches stratégiques pour gérer le recours à des prestataires de services et faciliter le travail de ces derniers. Cela peut passer par des activités de co-création, mais aussi par des échanges directs de données par le biais d’interfaces de programmation d’applications (API).

Il existe depuis de nombreuses années des dispositifs conçus d’emblée pour favoriser le respect de leurs obligations fiscales par les salariés soumis à l'impôt sur le revenu des personnes physiques : ils prennent la forme de retenues à la source et de déclarations établies par les employeurs. Ces dispositifs systémiques, adoptés par la quasi-totalité des administrations fiscales, ont contribué à optimiser le respect de la législation pour cette fraction importante de la base d’imposition. Le fait que les données soient de plus en plus accessibles et partagées permet à présent de les étendre à d’autres sources de revenu et à d’autres catégories de contribuables, notamment en proposant des déclarations pré-remplies pour l’impôt sur les bénéfices des sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée. Les stratégies de collaboration avec des tiers mises en lumière ci-dessus contribuent aussi au déploiement à grande échelle des approches fondées sur le principe de la conformité dès la conception.

Les technologies numériques offrent également aux administrations fiscales la possibilité d’aborder plus en amont la gestion des risques. C’est ce que l’on peut déceler à travers :

  • L’utilisation courante de séries de données à la fois vastes et intégrées. Le traitement et la gestion de données font désormais partie intégrante des fonctions d’une administration fiscale, et le recours aux outils et techniques d'analyse est intégré dans tous les domaines d’intervention d’une administration fiscale. Environ 90 % des administrations fiscales déclarent se servir de la science des données et des outils d’analyse pour faciliter l’utilisation des données dans tous les aspects de leurs travaux.

  • L’utilisation croissante de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage automatique. Alors que les administrations fiscales savent de mieux en mieux gérer de vastes ensembles de données et que la puissance de calcul augmente, l’utilisation de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage automatique ouvre la voie à de nouvelles approches de la gestion des risques. Le graphique 3 révèle que plus de 70 % des administrations fiscales indiquent déjà recourir à des techniques d'avant-garde pour exploiter les données selon des modalités qui permettent de détecter des avoirs dissimulés ou d’identifier de nouveaux risques.

Des contraintes budgétaires continuent de peser sur les administrations fiscales. Si la majorité d’entre elles déclarent accroître leurs dépenses de fonctionnement en valeur absolue, cette information n’est peut-être pas à prendre au pied de la lettre car elles se voient investies de compétences élargies et soumises aux pressions résultant du changement technologique et de l’évolution de la structure de leur personnel. Le montant des dépenses de fonctionnement et d’investissement consacrées aux technologies de l’information et des communications est aussi très variable. Si ces variations trouvent souvent leur origine dans des différences entre les approches suivies en matière d’approvisionnement et de stratégie, se pose aussi la question de savoir si, dans certains cas, les niveaux de dépenses ne sont pas un peu faibles pour répondre à la demande de services plus sophistiqués, à la transformation numérique en cours et à la nécessité d’être plus résilient pour faire face aux crises futures.

La technologie aide les administrations fiscales à répondre à ces contraintes budgétaires, et l’utilisation croissante de la robotisation des processus automatisés (RPA), dans laquelle des machines sont employées pour accomplir des tâches répétitives, produit d’excellents résultats. Les exemples présentés dans ce rapport montrent que la RPA a non seulement pour avantage d'accroître sensiblement l’efficacité opérationnelle, mais aussi d’améliorer la satisfaction des agents qui peuvent désormais se consacrer à des tâches plus complexes et plus intéressantes.

L’une des principales mutations provoquées par la pandémie est la progression du travail à distance, et les administrations fiscales réfléchissent aujourd’hui aux moyens d'adapter leurs pratiques de travail pour tirer parti des avantages qui peuvent découler de modalités d’emploi plus souples. La transformation numérique joue un rôle pivot pour inscrire le travail à distance dans la durée. Comment les exemples l’illustrent, elle est utilisée dans les processus de gestion des ressources humaines, comme le recrutement, la formation et la gestion des performances du personnel, afin de maintenir le niveau de performance des administrations et de les préparer aux défis à venir.

Le développement continu de la coopération internationale, de sa portée comme de son intensité, est au centre d’une grande partie des activités des administrations fiscales, et le partage des connaissances entre administrations fiscales compte plus que jamais à l’heure où les pays mettent en œuvre d’importants changements. Ce rapport fait partie du programme de partage de connaissances entre les membres du Forum de l’OCDE sur l’administration de l’impôt (FAI), qui aide les administrations fiscales à apprendre les unes des autres. En outre, des outils pratiques tels que le modèle de maturité du FAI sur la transformation numérique (OCDE, 2021[7]) aident les juridictions à cerner leurs forces et leurs faiblesses, ce qui permet de mieux cibler la collaboration.

La coopération internationale vient aussi appuyer l’évolution nationale vers un usage sophistiqué des données, en donnant accès à des ensembles de données issues d’initiatives telles que la déclaration pays par pays, l’échange de renseignements sur les décisions fiscales et la Norme commune de déclaration de l’OCDE et du G20. Ces initiatives procurent aux administrations fiscales d’importants volumes de données sur les activités transnationales, ce qui ajoute une dimension supplémentaire aux activités nationales existantes, y compris les processus d'évaluation des risques.

En outre, les administrations fiscales ont acquis une grande expérience de la collaboration pour la mise en œuvre effective d’initiatives internationales complexes telles que le paquet BEPS de l’OCDE et du G20 et le Programme international multilatéral de l’OCDE pour le respect des obligations fiscales dans le cadre duquel contribuables et administrations fiscales s’emploient, en coopération et dans un cadre multilatéral, pratiquement en temps réel, à évaluer les risques et à trouver des parades face aux principaux risques fiscaux internationaux. À mesure que les administrations fiscales progressent dans leur processus de transformation numérique, le prochain défi sera de déterminer comment appliquer les enseignements nationaux à l'échelle internationale, utiliser la nouvelle technologie pour favoriser l’échange international de renseignements en temps réel et garantir aux contribuables des résultats plus fluides et une sécurité juridique précoce. Ces avancées pourraient contribuer à assurer la mise en œuvre efficace et efficiente de nouvelles initiatives, telles que la « solution reposant sur deux piliers pour relever les défis fiscaux soulevés par la transformation numérique de l’économie » (OCDE, 2021[8]).

Bibliographie

[1] Banque asiatique de développement (2020), A Comparative Analysis of Tax Administration in Asia and the Pacific: 2020 Edition, Banque asiatique de développement, Manille, https://doi.org/10.22617/TCS190240.

[2] Crandall, W., E. Gavin et A. Masters (2021), ISORA 2018: Understanding Revenue Administration, Fonds monétaire international, Washington, D.C., https://www.imf.org/en/Publications/Departmental-Papers-Policy-Papers/Issues/2021/11/03/Understanding-Revenue-Administration-464865 (consulté le 13 May 2022).

[3] Díaz de Sarralde, S. (2019), Overview of Tax Administrations: structure; income, resources and personnel; operation and digitalization. ISORA, Centre inter-américain des administrations fiscales (CIAT), Panama, https://www.ciat.org/Biblioteca/Estudios/2019_Overview_AT-ISORA_sarralde.pdf (consulté le 13 May 2022).

[5] OCDE (2022), Inventory of Tax Technology Initiatives, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/tax-technology-tools-and-digital-solutions/ (consulté le 13 May 2022).

[6] OCDE (2022), Inventory of Tax Technology Initiatives, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/tax-technology-tools-and-digital-solutions/ (consulté le 13 May 2022).

[8] OCDE (2021), Déclaration sur une solution reposant sur deux piliers pour résoudre les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie, https://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/declaration-sur-une-solution-reposant-sur-deux-piliers-pour-resoudre-les-defis-fiscaux-souleves-par-la-numerisation-de-l-economie-octobre-2021.pdf (consulté le 13 May 2022).

[7] OCDE (2021), Modèle de maturité de transformation numérique, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/publications-and-products/modele-de-maturite-transformation-numerique.pdf (consulté le 13 May 2022).

[4] OCDE (2019), Tax Administration 2019: Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/74d162b6-en.

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