3. Évolution récente de la législation sur la protection de l’emploi

La réglementation relative à l’embauche et au licenciement de travailleurs – soit la législation sur la protection de l’emploi (LPE) – est l’un des volets des politiques du marché du travail qui suscite le plus d’attention. Il s’agit d’un domaine d’intervention clé des pouvoirs publics sur le marché du travail, puisqu’elle touche habituellement tous les salariés et toutes les entreprises, contrairement aux mesures axées sur un seul secteur ou une seule région par exemple. Elle est aussi déterminante, car elle influe sur la sécurité de l’emploi des travailleurs (le risque d’être licencié et les probabilités de trouver un emploi) et sur la capacité d’adaptation des entreprises (la marge de manœuvre dont elles disposent pour réagir rapidement à l’évolution de la demande de sorte à rester résilientes en période de récession et à s’adapter aux nouvelles technologies). Le fait de perdre son emploi et le fait de trouver du travail représentent deux moments clés dans la vie des individus : à ce titre, le régime de protection de l’emploi constitue un déterminant clé du bien-être individuel.

Au côté des mesures financées sur fonds publics, en particulier les allocations de chômage, l’aide à la recherche d’emploi et les programmes actifs du marché du travail, la protection de l’emploi est le pilier des actions menées par les pouvoirs publics afin d’assurer la sécurité des travailleurs (chapitres 1 et 2). Une réglementation bien pensée en matière de licenciements a pour objectif de protéger les travailleurs contre les licenciements abusifs et de faire endosser une partie des coûts sociaux associés au licenciement aux entreprises qui se séparent de leurs salariés (en particulier des coûts financiers, psychologiques et de santé) (Pissarides, 2010[1]; Scarpetta, 2014[2]). Parallèlement, les dispositions relatives aux licenciements tendent à préserver les emplois existants plutôt qu’à aider les travailleurs à évoluer vers des emplois de meilleure qualité ; elles vont donc à l’encontre du principe souvent prôné selon lequel l’action publique doit « protéger les travailleurs, et non les emplois ». Un autre élément à prendre en compte est l’interaction entre la réglementation des contrats de travail réguliers et celle des contrats temporaires, qui détermine qui peut accéder à un emploi stable. Ces multiples éléments et interactions compliquent sensiblement l’élaboration de la législation sur la protection de l’emploi.

Ce chapitre fournit un tour d’horizon complet de la législation sur la protection de l’emploi dans les pays de l’OCDE et des réformes récentes menées dans ce domaine. Il s’appuie sur des travaux antérieurs menés par l’OCDE à ce sujet, afin de les enrichir (Grubb and Wells, 1993[3]; OCDE, 1999[4]; OCDE, 2004[5]; OCDE, 2013[6]; Venn, 2009[7]). Ce sont ces travaux qui étayent la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi et les projets de recherche connexes. Pouvoirs publics, organisations et chercheurs se sont largement appuyés sur les indicateurs de l’OCDE pour établir des comparaisons internationales dans leurs rapports, études et articles. Ils ont été mis à jour pour la dernière fois en 2013, et l’analyse fournie dans ce chapitre permet d’enrichir de six années la base de données, afin de la porter à 2019.

Le chapitre s’articule comme suit : la section 3.1 passe en revue les modalités d’influence de la protection de l’emploi sur le fonctionnement du marché du travail. La section 3.2 décrit les indicateurs de l’OCDE sur la protection de l’emploi, et explique comment ils reflètent les principales dimensions de la protection de l’emploi. Elle présente également les principaux aspects des modifications apportées à ces indicateurs, qui s’imposaient pour rendre compte des mutations en cours sur le marché du travail depuis la dernière révision de 2008. La section 3.3 décrit la législation sur la protection de l’emploi dans l’ensemble des 37 pays de l’OCDE. La section 3.4 examine les réformes de la protection de l’emploi dans la zone OCDE entre 2013 et 2019, et leur prise en compte dans les indicateurs. Les nouvelles données peuvent être téléchargées gratuitement sur le site http://oe.cd/epl.

La réglementation des licenciements s’inscrit dans une double logique : protéger les travailleurs contre les licenciements abusifs et faire endosser une partie des coûts sociaux associés au licenciement aux entreprises (Cahuc, Carcillo and Zylberberg, 2014[8]). La protection des travailleurs contre les licenciements arbitraires est particulièrement de mise lorsque l’offre de main-d’œuvre est supérieure à la demande des entreprises, qui pourraient être tentés de proposer des conditions d’emploi moins avantageuses et de menacer de se séparer des travailleurs mécontents. La réglementation des licenciements empêche par ailleurs les entreprises de procéder à des licenciements éventuellement abusifs sans tenir compte des conséquences de la perte d’emploi sur les recettes et les dépenses budgétaires (due à la diminution des revenus du travail et à l’augmentation des indemnités de chômage). Elle peut aussi pousser les employeurs à internaliser les conséquences sanitaires des licenciements (Bassanini and Caroli, 2015[9]) et la destruction de capital humain causée par la perte d’emploi et le chômage (Neal, 1995[10]). La réglementation des licenciements, et en particulier l’obligation de préavis, trouve une justification de plus dans le fait qu’elle facilite, éventuellement avec le soutien en amont des services publics de l’emploi, la transition des travailleurs vers un autre emploi (OCDE, 2019[11]).

Cette double motivation de la réglementation, à savoir protéger les travailleurs contre les licenciements abusifs et faire endosser une partie du coût des licenciements aux entreprises, a pour effet recherché de limiter la fréquence des compressions d’effectif. Selon la théorie économique, la réglementation des licenciements limite également l’embauche du fait que les entreprises anticipent le coût supérieur d’un licenciement dès le recrutement, et parce que le coût d’opportunité d’un changement d’emploi est plus élevé pour les travailleurs. Différents modèles concluent que la réglementation des licenciements diminue à la fois les embauches et les suppressions d’emplois et, partant, les flux d’emplois et de main-d’œuvre (Bentolila and Bertola, 1990[12]; Garibaldi, 1998[13]; Mortensen and Pissarides, 1994[14]; Nickell, 1978[15])1. Un certain freinage de l’embauche et des compressions d’effectif en conséquence de la réglementation des licenciements est souhaitable pour éviter les renouvellements excessifs de main-d’œuvre, sachant toutefois qu’une réglementation trop stricte peut causer un ralentissement inefficace.

Un grand nombre d’études empiriques, portant sur un seul ou plusieurs pays, confirment que la réglementation des licenciements limite les flux d’emplois et de main-d’œuvre (Autor, Donohue and Schwab, 2006[16]; Boeri and Jimeno, 2005[17]; Gielen and Tatsiramos, 2012[18]; Haltiwanger, Scarpetta and Schweiger, 2014[19]; Marinescu, 2009[20]; Micco and Pagés, 2006[21]; Millán et al., 2013[22]; OCDE, 2010[23]; Salvanes, 1997[24]). La réglementation des licenciements est un concept multidimensionnel ; facteur qui sera pris en compte dans la conception des indicateurs de l’OCDE sur la protection de l’emploi présentés ici. On constate que, des divers éléments qui constituent la protection de l’emploi, le cadre réglementaire entourant les licenciements abusifs est celui qui entrave le plus la fluidité du marché du travail (Bassanini and Garnero, 2013[25]). S’agissant de la réglementation relative aux licenciements abusifs, les longues périodes d’essai et les règles strictes de réintégration semblent être les éléments les plus déterminants.

La réglementation des licenciements freine donc à la fois la création et la destruction d’emplois. Elle semble par ailleurs allonger la durée du chômage puisque la majorité des études, y compris celles qui s’appuient sur des expériences naturelles bien identifiées, constatent que la protection contre le licenciement applicable aux travailleurs réguliers n’a aucun effet ou un effet négatif négligeable sur l’emploi et qu’elle ne retentit que très peu sur le chômage. Telles sont les conclusions de la Stratégie de l’OCDE pour l’emploi (OCDE, 2019[26]) et de plusieurs analyses bibliographiques (Boeri, 2011[27]; Martin and Scarpetta, 2012[28]; OCDE, 2013[6]). L’emploi peut baisser quand le degré de protection augmente avec l’ancienneté (fortement à certains niveaux d’ancienneté particuliers), ce qui peut encourager les entreprises à anticiper des licenciements avant qu’ils ne deviennent trop coûteux (Cahuc, Malherbet and Prat, 2019[29]; García Pérez and Osuna, 2014[30])2. Qui plus est, dans des secteurs en déclin, une protection rigoureuse de l’emploi peut sauvegarder des postes sans vraiment avoir d’effet sur l’embauche (Messina and Vallanti, 2007[31]) tandis que l’assouplissement de la réglementation des licenciements en situation de crise macroéconomique peut plomber l’emploi, au moins temporairement (Bassanini and Cingano, 2019[32]; OCDE, 2016[33]).

Une réglementation des licenciements excessivement rigoureuse a comme principal inconvénient, en réduisant les flux d’emplois et de main-d’œuvre, de rendre les marchés moins adaptables aux changements économiques : mouvements insuffisants de travailleurs des secteurs en crise vers les secteurs en tension, et réduction des entrées et sorties d’entreprises. Plusieurs études empiriques confirment qu’une réglementation rigoureuse des licenciements restreint les possibilités de redéploiement de travailleurs des entreprises à faible productivité vers celles à forte productivité (Andrews and Cingano, 2014[34]; Bottasso, Conti and Sulis, 2017[35]; Bravo-Biosca, Criscuolo and Menon, 2016[36]), ce qui peut avoir comme effet de tirer la croissance de la productivité du travail vers le bas et de ralentir le développement économique.

La croissance de la productivité du travail à l’échelle macroéconomique est déterminée non seulement par le redéploiement de travailleurs, mais aussi par la croissance de la productivité interne des entreprises, tributaire de l’investissement et de l’effort d’innovation consentis. En principe, la réglementation des licenciements peut doper ou plomber l’investissement et l’innovation. L’investissement et l’innovation peuvent être plombés parce que les coûts réels et prévisionnels de la reconversion sont plus élevés pour les entreprises, mais l’investissement peut être dopé si les entreprises remplacent par des capitaux plus flexibles une main-d’œuvre moins flexible. L’innovation pourrait elle aussi être accrue dans la mesure où, en réduisant le risque de mise à pied, la réglementation des licenciements multiplie les chances qu’ont les salariés à l’esprit innovateur d’en récolter les fruits. Les données empiriques sur les effets de l’investissement sont en demi-teinte (Autor, Kerr and Kugler, 2007[37]; Bai, Fairhurst and Serfling, 2020[38]; Cingano et al., 2010[39]; Cingano et al., 2016[40]), alors que la majorité des études constatent un lien entre la rigueur excessive de la réglementation des licenciements et tant le manque d’innovation que la plus faible croissance de la productivité totale des facteurs ( (Bartelsman, Gautier and De Wind, 2016[41]; Bassanini, Nunziata and Venn, 2009[42]; Bjuggren, 2018[43]; Griffith and Macartney, 2014[44]; Murphy, Siedschlag and McQuinn, 2017[45])3.

En résumé, les effets de la réglementation des licenciements considérés jusqu’ici sont les suivants : une réglementation rigoureuse a tendance à entraîner la réduction des licenciements, qui est un résultat direct de l’effet recherché, à savoir l’augmentation du coût du licenciement. Elle a également tendance à réduire les embauches, du fait que les entreprises prennent en considération dès le recrutement le coût plus élevé d’un licenciement éventuel. Par conséquent, la réglementation des licenciements réduit les flux d’emploi dans les deux sens (créations et destructions). Elle ne semble pas avoir d’effet marqué sur les chiffres globaux d’emploi et de chômage. Des flux d’emplois réduits vont de pair avec un moindre risque de perte de postes, un résultat qui peut s’apprécier dans la mesure où il compense un taux de licenciement par ailleurs trop élevé. Or, une trop forte protection de l’emploi nuira vraisemblablement à l’efficacité de l’allocation des emplois et à l’innovation. Par conséquent, une réglementation excessivement rigoureuse a tendance à réduire la croissance de la productivité et à augmenter la durée du chômage.

Une forte protection de l’emploi qui plombe la croissance de la productivité limite aussi les possibilités d’augmentation des salaires étant donné que l’évolution des salaires est déterminée, au moins à un certain degré, par celle de la productivité. Le coût plus élevé des licenciements peut également peser sur les niveaux de salaire, car il fait grimper le coût total attendu de la main-d’œuvre pour les entreprises qui savent qu’elles licencieront des travailleurs. Une réglementation rigoureuse des licenciements est capable de compenser ces effets négatifs sur les salaires et leur relèvement en augmentant le pouvoir de négociation des travailleurs et, par conséquent, la part du travail dans le revenu des facteurs – voir les éléments concrets dégagés d’analyses et d’expériences en laboratoire internationales (Ciminelli, Duval and Furceri, 2018[46]; Falk, Huffman and Macleod, 2015[47]). Les travaux publiés font par ailleurs apparaître une distinction entre les nouvelles recrues et les travailleurs en place : une réglementation rigoureuse des licenciements abaisse le niveau de salaire des premières (Leonardi and Pica, 2013[48]) tout en élevant celui des derniers (Martins, 2009[49]; van der Wiel, 2010[50]). La question se pose alors pour les chercheurs de savoir si une réglementation plus rigoureuse des licenciements influe sur le rythme de l’automatisation, qui retentit à son tour sur la croissance de la productivité et des salaires.

Une distinction importante est à opérer entre les travailleurs titulaires de contrats permanents et les titulaires de contrats temporaires ; les premiers bénéficiant habituellement d’une plus forte protection de l’emploi que les travailleurs temporaires. On observe que plus la différence de protection de l’emploi entre ces deux formes de contrat de travail est prononcée, plus les entreprises ont recours aux contrats temporaires (Centeno and Novo, 2012[51]; Hijzen, Mondauto and Scarpetta, 2017[52]; Kahn, 2010[53]). Les jeunes, les femmes et les travailleurs peu qualifiés ont tendance à être les catégories de population les plus concernées par les relations de travail temporaires. Une incidence élevée du travail temporaire peut amplifier la hausse du chômage en période de baisse de l’activité économique (OCDE, 2017[54]). Parallèlement, une réglementation rigoureuse des licenciements de travailleurs réguliers a tendance à favoriser la résilience du marché du travail dans un premier temps, mais peut brider la création d’emplois pendant la phase de redressement.

Le lien entre une forte dualité du marché du travail – dans le sens d’une segmentation entre travailleurs réguliers très protégés et travailleurs temporaires peu protégés – et des taux inférieurs de productivité et de croissance est établi (Bassanini, Nunziata and Venn, 2009[42]; Cahuc, Charlot and Malherbet, 2016[55]; Damiani, Pompei and Ricci, 2016[56]; Dolado, Ortigueira and Stucchi, 2016[57]; Hijzen, Mondauto and Scarpetta, 2017[52]). Entre autres explications, le manque de possibilités de progression dans l’entreprise a tendance à démotiver les personnes employées à titre temporaire, qui investissent dès lors moins dans l’acquisition de connaissances et de compétences spécifiques4. On peut en outre envisager que cette dualité donne lieu à une proportion excessive de travailleurs temporaires dont la période d’emploi est trop brève pour exploiter toutes les possibilités productives de l’entreprise.

On observe par ailleurs qu’un fossé plus profond entre travailleurs réguliers et travailleurs temporaires va de pair avec de moins bonnes conditions de travail, une moindre stabilité de l’emploi et des inégalités salariales plus prononcées (García-Pérez, Marinescu and Vall Castello, 2018[58]; OCDE, 2012[59]; OCDE, 2014[60]). Les conséquences négatives de cette situation peuvent se répercuter d’une génération à l’autre : les résultats d’études indiquent une plus forte probabilité de décrochage scolaire et de chômage chez les enfants dont le père est titulaire d’un contrat de travail temporaire que chez les enfants d’un travailleur régulier (Ruiz-Valenzuela, 2020[61]).

Un grand nombre des publications citées dans la section précédente s’appuient sur des versions antérieures de la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi. Les indicateurs ont été utilisés pour étudier les effets de la protection de l’emploi sur les flux de travailleurs, l’emploi, la croissance de la productivité, les salaires, l’investissement, la résilience aux crises, l’incidence du travail temporaire, les inégalités salariales, la sécurité de l’emploi subjective et certains aspects de l’économie politique. Ils ont en outre servi de variable de contrôle ou d’outil descriptif dans de nombreuses autres études. Denk et Georgieff (forthcoming[62]) font le tour des travaux universitaires utilisant la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi. Ils font également référence à quelques-uns des nombreux rapports d’orientation qui s’appuient sur les indicateurs – ceux de l’OCDE (p. ex. les Perspectives économiques et les Études économiques de l’OCDE), des administrations nationales et des organes et institutions supranationaux (p. ex. la Commission européenne et le Fonds monétaire international). L’usage répandu de la base de données souligne son importance pour éclairer et influencer la réglementation des licenciements et de l’embauche.

Outre la législation, les indicateurs de l’OCDE quantifient les pratiques effectives, en tenant compte des décisions de justice et des conventions collectives. La principale distinction opérée dans la base de données concerne les indicateurs sur la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers et ceux sur la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires. Cette section s’intéresse à la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers en première partie et à la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires en deuxième partie5. Il est important de noter que les indicateurs de l’OCDE quantifient le coût du licenciement et de l’embauche pour les employeurs, et non pas le degré de protection des travailleurs.

Les trois séries chronologiques annuelles en existence jusqu’à ce jour (versions 1 à 3) s’achèvent toutes en 2013. La version 1 commence en 1985 et les deux suivantes cherchent à mieux rendre compte des dispositifs de protection de l’emploi. La version 2 commence en 1998 et couvre en partie le licenciement collectif (en plus du licenciement individuel) de travailleurs réguliers. La version 3 commence en 2008 et couvre certains aspects de la mise en application de la législation pour les travailleurs réguliers, ainsi que quelques aspects de la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires. La présente analyse s’inscrit dans le prolongement des versions 1 à 3 pour préserver la dimension chronologique de la base de données. Cependant, s’agissant des travailleurs réguliers, le chapitre développe et s’appuie principalement sur la nouvelle version, c’est-à-dire la version 4 (2013 à 2019). Les indicateurs relatifs aux travailleurs temporaires restent inchangés dans leur conception.

Les indicateurs utilisent les informations sur la protection de l’emploi de manière détaillée, mais aussi pragmatique : ils tiennent compte des conventions collectives à l’échelon national et sectoriel, mais pas à l’échelon de l’entreprise. Ils portent sur le secteur privé, plutôt que sur le secteur public, et évaluent la réglementation applicable aux moyennes et grandes entreprises, plutôt qu’aux petites entreprises, et à leurs employés6. Lorsqu’il existe des différences en fonction de la taille de l’entreprise, la note correspond à la moyenne des valeurs pour une entreprise de 35, 150 et 350 salariés. Lorsqu’il existe des différences entre les catégories de travailleurs (p. ex. travailleurs manuels et travailleurs intellectuels), la note correspond à la moyenne des valeurs pour chaque catégorie. Cette harmonisation est nécessaire à la lumière des informations disponibles. Il faut aussi tenir compte de la conception de l’échelle de notation qui, depuis la création de la base de données, se veut un outil de comparaison quantitative de la rigueur des réglementations. En raison de la nature des indicateurs, qui convertissent des informations principalement qualitatives en données quantitatives, la prudence est de mise dans l’interprétation des petites différences de notes entre les pays et dans le temps.

La nouvelle version (version 4) des indicateurs de l’OCDE sur la protection de l’emploi des travailleurs réguliers (contrats à durée indéterminée) rend mieux compte des différences entre les pays et dans le temps, et ce, de quatre façons : i) en améliorant le niveau de granularité de certains éléments de la réglementation en matière de protection de l’emploi déjà pris en compte dans les indicateurs ; ii) en ajoutant d’importants éléments de la réglementation en matière de protection de l’emploi jusqu’ici absents des indicateurs ; iii) en élargissant l’évaluation de la réglementation des licenciements collectifs de manière à l’aligner sur celle des licenciements individuels ; et iv) en modifiant les critères de prise en compte des seuils de licenciement dans l’indicateur sur la réglementation des licenciements collectifs.

Tous les indicateurs sur la protection de l’emploi dont il est question dans ce chapitre concernent les licenciements sans faute, c’est-à-dire sans qu’il y ait comportement répréhensible de la part du travailleur (p. ex. vol, faute professionnelle ou absence non autorisée). Les indicateurs, dans le cas des licenciements individuels et collectifs, tiennent compte de quatre critères de la réglementation des licenciements (Tableau 3.1) : les contraintes de procédure, le préavis et les indemnités de licenciement, le cadre réglementaire pour les licenciements abusifs et la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs. Les deux premières de ces catégories se décomposent en deux sous-critères et les deux dernières, en quatre sous-critères. Les quatre grandes catégories déterminent, à poids égal, la note globale. À poids égal également, les sous-critères déterminent les notes pour les quatre grandes catégories7. En présence de différences entre les licenciements pour motif personnel et les licenciements pour motif économique, la note correspond à la moyenne des deux valeurs. Une explication plus complète de la méthodologie et de l’échelle de notation est donnée dans l’Annex 3.A.

Les contraintes de procédure sont les démarches qu’une entreprise doit entreprendre avant ou au moment de notifier un travailleur de son licenciement. Elles se décomposent en deux éléments : les procédures de notification et le délai avant la notification. Les procédures de notification déterminent si la notification de licenciement doit être motivée, sa valeur légale et si elle doit être précédée d’une procédure d’avertissement, d’un entretien avec le travailleur et de la consultation ou de l’autorisation d’une tierce partie (p. ex. l’organe administratif concerné). Ce sous-critère relatif aux procédures de notification, déjà présent dans les précédentes versions des indicateurs, est modifié dans la nouvelle version pour mieux rendre compte des différences de procédure liées aux divers types d’obligation de notification. Par ailleurs, dans la nouvelle version, l’échelle de notation pour le délai avant la notification est alignée sur l’échelle appliquée à la durée du délai de préavis pour quatre ans d’ancienneté, de telle sorte que les jours, les semaines et les mois ont le même poids dans ces deux sous-critères.

La deuxième catégorie prend en considération la durée de la période de préavis et le montant des indemnités de licenciement, les deux éléments de la réglementation des licenciements qui sont souvent les premiers à venir à l’esprit. À l’instar des versions antérieures, les deux correspondent à la moyenne des trois valeurs à trois niveaux d’ancienneté : 9 mois, 4 ans et 20 ans.

La troisième catégorie, c’est-à-dire le cadre réglementaire pour les licenciements abusifs, porte sur le champ de la définition du licenciement légitime et du licenciement abusif, ainsi que sur la rigueur des réparations exigées par les tribunaux lorsqu’un licenciement est jugé abusif. Elle tient compte de quatre aspects : la définition du licenciement abusif, la durée de la période initiale (ou d’essai) pendant laquelle le salarié n’est pas protégé contre le licenciement abusif, l’indemnisation monétaire du travailleur à la suite d’un licenciement abusif et la possibilité de réintégration après un licenciement abusif8.

La nouvelle version élargit sensiblement le critère relatif à la définition du licenciement légitime et du licenciement abusif en opérant une distinction entre les licenciements pour motif économique et les licenciements pour motif personnel9. Dans la catégorie des licenciements abusifs pour motif économique, sont évaluées la liberté de décision des juges, les restrictions imposées à l’entreprise sur la sélection des travailleurs à licencier et les obligations de l’employeur en matière d’offres de reclassement et de formation, sans lesquelles le licenciement est jugé abusif. Le critère sur la durée de la période d’essai a lui aussi été légèrement revu. Les valeurs sont désormais plus élevées lorsque la réglementation relative au licenciement de travailleurs avant la fin de la période d’essai est plus rigoureuse au regard du préavis et des indemnités de licenciement.

La nouvelle version des indicateurs sur la protection de l’emploi pour les travailleurs réguliers fait une plus large place à la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs. Trois nouveaux critères ont été introduits : i) le partage ou non de la charge de la preuve entre employeur et salarié lorsque ce dernier engage un recours pour licenciement abusif ; ii) la limitation ou non de l’étendue des recours pour licenciement abusif par la validation préalable du licenciement ; et iii) l’existence ou non d’un mécanisme de rupture de contrat à l’amiable qui, en ouvrant droit aux indemnités de chômage, offre une alternative au licenciement intéressante pour le salarié.

Dans la majorité des pays, la charge de la preuve dans les affaires de licenciement abusif n’incombe pas uniquement au salarié. Ce principe, bien qu’il augmente le coût et l’incertitude de pouvoir prouver la légitimité du licenciement (Boeri, Garibaldi and Moen, 2017[63]), traduit le fait que l’entreprise est celle des deux parties qui connaît le motif du licenciement. La validation du licenciement en tant que contrôle préventif est étroitement liée au critère relatif aux procédures de notification dans la première catégorie (contraintes de procédure). Si l’on se place du côté de l’entreprise, la validation a tendance à alourdir les procédures, mais elle présente l’avantage de limiter le risque que le licenciement soit jugé abusif par la suite. Les mécanismes de rupture de contrat à l’amiable (la rupture d’un contrat de travail d’un commun accord ou par démission) ouvrent droit aux indemnités de chômage dans un grand nombre de pays de l’OCDE (parfois avec sanctions). L’introduction en France en 2008 d’un régime formel de rupture conventionnelle ouvrant droit aux indemnités de chômage, par exemple, a entraîné une augmentation des flux de travailleurs (Batut and Maurin, 2019[64]).

L’intégration des questions de mise en application de la réglementation dans les indicateurs de l’OCDE demeure limitée du fait qu’ils ne tiennent pas compte de certains aspects du fonctionnement du système judiciaire, comme l’accès aux tribunaux du travail ou la longueur des recours. Ces éléments de complexité des procédures judiciaires entrent en compte dans la décision de l’entreprise de licencier ou non un salarié (Espinosa, Desrieux and Ferracci, 2018[65]; Gianfreda and Vallanti, 2017[66]), mais ils peuvent aussi influencer la décision du salarié d’engager ou non un recours (Campolieti and Riddell, 2020[67]; Espinosa, Desrieux and Wan, 2017[68]; Fraisse, Kramarz and Prost, 2015[69]). Leurs effets sur les coûts supportés par l’employeur demeurant donc ambigus, ils peuvent difficilement être pris en compte dans les indicateurs. Il faut par ailleurs savoir que l’intégration de statistiques sur les procédures judiciaires dans les indicateurs serait compliquée par le manque de données et par une mauvaise comparabilité des pays, mais aussi qu’elle soulève des questions concernant l’endogénéité des résultats judiciaires par rapport à la réglementation et à la situation du marché du travail (Ichino, Polo and Rettore, 2003[70]).

Les indicateurs sur la protection globale de l’emploi des travailleurs réguliers accordent un poids de 5/7 aux licenciements individuels et de 2/7 aux licenciements collectifs. Ici, un licenciement est dit « collectif » lorsque l’entreprise se sépare de plusieurs travailleurs plus ou moins en même temps. Plus précisément, l’indicateur relatif aux licenciements collectifs dans la version 4 évalue, pour chaque critère, la moyenne pour des licenciements de 10, 45 et 120 travailleurs par une entreprise en l’espace d’un mois, au lieu d’inclure un critère individuel sur les seuils de licenciement comme auparavant10. Dans tous les pays dotés d’une législation spécifique sur les licenciements collectifs (et les tailles d’entreprises considérées par l’indicateur), celle-ci s’applique toujours aux licenciements de 120 travailleurs ou plus en un mois, appelés « licenciements de masse » dans le reste de ce chapitre11. Qui plus est, à l’inverse des licenciements individuels, le seul motif recevable pour les licenciements collectifs est le motif économique. Par conséquent, alors que les indicateurs sur les licenciements individuels accordent le même poids aux motifs personnel et économique, un poids de presque deux tiers est donné aux licenciements pour motif économique dans les indicateurs agrégés.

Les indicateurs de l’OCDE sur la protection de l’emploi relatifs à l’embauche de travailleurs temporaires opèrent une distinction entre les contrats à durée déterminée et les contrats d’intérim. Ils sont axés sur les restrictions à l’embauche plutôt que sur la réglementation des licenciements, contrairement aux indicateurs concernant les travailleurs réguliers. Cette distinction va de soi dans une certaine mesure, étant donné la relative rareté des ruptures en cours de contrat temporaire et leur facilité en fin de contrat, alors que, dans de nombreux pays, la législation a pour but d’éviter un recours excessif aux contrats temporaires. Cela étant dit, les travailleurs temporaires peuvent être licenciés et, dans certains cas, les indemnités de licenciement ou autres dispositifs prévus par la réglementation en la matière protègent ces travailleurs à l’expiration de leur contrat. Le travail futur est planifié au-delà des restrictions à l’embauche pour les travailleurs en contrat à durée déterminée, en tenant compte également de la réglementation relative aux licenciements de ces travailleurs et à l’expiration des contrats à durée déterminée.

Les deux catégories de réglementation de l’embauche, relatives aux contrats à durée déterminée et aux contrats d’intérim (Tableau 3.2), contribuent à parts égales à la note totale. Il convient de ne pas perdre ce fait de vue sachant que, dans tous les pays de l’OCDE, les contrats à durée déterminée sont plus répandus que les contrats d’intérim (OCDE, 2014[60]). Les trois premiers sous-critères ont la même fonction pour les deux types de contrats temporaires : rendre compte des contraintes qui empêchent de faire facilement appel à ces contrats plutôt qu’aux contrats à durée indéterminée. Le quatrième sous-critère, sur l’autorisation et les obligations d’information, concerne principalement les contrats d’intérim dans la pratique. Le dernier, sur l’égalité de traitement des travailleurs réguliers et des travailleurs intérimaires dans l’entreprise utilisatrice concerne à la fois la rémunération et les conditions de travail. On trouvera l’échelle de notation complète dans l’Annex 3.A.

En 20 ans, les organisations et centres de recherche internationaux ont redoublé d’efforts pour créer des indicateurs sur les institutions du marché du travail, y compris sur la législation en matière de protection de l’emploi12. Le nombre de pays couverts par les indicateurs de l’OCDE sur la protection de l’emploi a lui-même été augmenté en 2013 pour inclure, par exemple, plusieurs pays d’Amérique latine et des Caraïbes non membres de l’OCDE, dans le cadre d’un partenariat avec la Banque interaméricaine de développement. Outre les indicateurs de l’OCDE, l’EPLex de l’Organisation internationale du Travail, le Labour Regulation Index du Centre for Business Research (CBR-LRI) de l’université de Cambridge et l’indicateur Employing Workers du rapport Doing Business de la Banque mondiale comptent parmi les plus connus13. Bien que ces trois bases de données présentent quelques similarités avec les indicateurs de l’OCDE14, d’importantes différences demeurent. Dans l’ensemble, les indicateurs de l’OCDE continuent d’être les plus largement utilisés pour les comparaisons entre pays dans les rapports d’orientation et les travaux universitaires (Denk and Georgieff, forthcoming[62]).

Les trois autres bases de données portent sur un plus grand nombre de pays que les indicateurs de l’OCDE (de 100 pays dans le cas de l’EPLex, à 190 pays dans celui de Doing Business), mais donnent une vue d’ensemble moins complète de la réglementation en matière de protection de l’emploi15. En particulier, les trois autres bases de données ne prennent pas en compte la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs, et l’EPLex et Doing Business ne couvrent pas l’emploi en intérim. Par ailleurs, la base de données CBR-LRI et Doing Business évaluent de manière moins approfondie les licenciements collectifs et le cadre réglementaire qui entoure les licenciements abusifs (par exemple, ils ne donnent aucune information sur les indemnités à la suite d’un licenciement abusif). Quelques aspects de la protection de l’emploi ne sont pas pris en compte dans les indicateurs de l’OCDE, mais le sont dans certaines des autres bases de données (par exemple, les motifs de licenciement interdits, comme la discrimination dans l’EPLex). Deux autres différences distinguent l’EPLex des indicateurs de l’OCDE : l’EPLex est plus descriptive que quantitative et couvre une plus courte période puisque la série commence en 2009, alors que les indicateurs de l’OCDE sont disponibles à partir de 1985. Par ailleurs, les trois autres bases de données ne tiennent que peu ou pas compte des conventions collectives sectorielles et de la jurisprudence.

Cette section compare la législation sur la protection de l’emploi dans les pays de l’OCDE, en s’appuyant pour cela sur la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi. Elle commence par un examen détaillé de la composition de la réglementation des licenciements, puis présente un état des lieux de la réglementation globale des licenciements individuels et collectifs des travailleurs réguliers, ainsi que de la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires. Ces indicateurs de la réglementation des licenciements et de l’embauche reposent sur la méthodologie dont les grandes lignes sont exposées dans la section précédente.

Cette partie porte sur les éléments individuels de la réglementation des licenciements relative aux travailleurs réguliers, par pays, dans l’ordre des quatre grandes catégories de l’indicateur : contraintes de procédure avant notification, préavis et indemnités de licenciement, cadre réglementaire pour les licenciements abusifs et mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs.

Les contraintes de procédure pour le licenciement individuel de travailleurs réguliers varient sensiblement d’un pays à l’autre (Graphique 3.1), en raison principalement de différences de procédures de notification plutôt que de différences de délai avant notification, l’autre élément de réglementation dans cette catégorie.

L’employeur est normalement tenu d’informer le salarié du motif du licenciement, au moins à la demande du travailleur. Cette notification se fait généralement sous forme d’avis de licenciement écrit. Certains pays exigent, au moins dans certains cas, un avertissement (Australie, Autriche, Canada [Québec], Danemark, Estonie, Grèce, Irlande, Lituanie, Nouvelle-Zélande, Portugal, République slovaque et République tchèque), un entretien avec le salarié (Australie, Colombie, France, Irlande, Islande, Luxembourg, Slovénie et Turquie) ou la consultation d’une tierce partie (Finlande, Israël, Norvège, Pologne, République slovaque, République tchèque et Suède). Ce n’est qu’au Canada (à l’exception du Québec) et dans la majorité des États américains que l’entreprise n’est jamais tenue de motiver sa décision, que ce soit avant ou au moment du licenciement. En revanche, les procédures sont particulièrement rigoureuses aux Pays-Bas, où un licenciement est impossible sans l’autorisation du service public de l’emploi ou du tribunal de sous-district. En Allemagne et en Suède, le licenciement peut être mis en suspens jusqu’à la décision définitive du tribunal s’il y a opposition de la part du comité d’entreprise (Allemagne) ou du travailleur (Suède).

Les procédures de notification pour les licenciements collectifs sont plus homogènes et plus rigoureuses que celles applicables aux licenciements individuels pour motif économique (Denk and Georgieff, forthcoming[62]). Tous les pays, hormis certaines provinces canadiennes, le Chili et les États-Unis, exigent une consultation, voire une autorisation, avant qu’un licenciement soit possible à partir d’un certain nombre de travailleurs. En particulier, au-delà du seuil en question, un licenciement n’est jamais possible sans l’autorisation de l’administration en Colombie et en France (pour les entreprises de plus de 50 salariés). En Belgique, si le comité d’entreprise et le travailleur s’opposent au licenciement, celui-ci peut être mis en suspens jusqu’à ce que l’employeur ait prouvé le respect des procédures de notification et de consultation. Au Mexique, les licenciements pour motif économique sont autorisés à condition uniquement que plusieurs travailleurs soient concernés et que l’autorisation du tribunal du travail ait été obtenue.

Dès lors qu’une entreprise décide de supprimer un emploi, il est rare qu’elle puisse le faire sans en informer le travailleur concerné à l’avance (c’est-à-dire sans respecter un délai de préavis) et sans verser des indemnités de licenciement. Pour l’entreprise, le délai de préavis et les indemnités de licenciement représentent un coût. Pour le travailleur, ils atténuent les conséquences économiques et éventuellement psychologiques de la suppression d’emploi en empêchant une perte soudaine de revenus du travail. Le salarié continue normalement de travailler pour l’entreprise pendant la période de préavis bien que, dans certains cas, les salariés notifiés ne soient pas tenus au délai de préavis et ceux qui continuent de travailler pendant cette période de préavis aient tendance à être moins motivés. Une estimation globale du coût pour l’entreprise et des avantages pour le travailleur d’un délai de préavis et d’indemnités de licenciement est ainsi calculée en fonction du nombre de mois de délai de préavis et du montant des indemnités de licenciement (en mois de travail).

La base de données recueille des informations sur le délai de préavis et les indemnités de licenciement à trois niveaux d’ancienneté : 9 mois, 4 ans et 20 ans. À 4 ans d’ancienneté, l’indemnisation (délai de préavis et indemnités de licenciement) en cas de licenciement individuel varie considérablement d’un pays de l’OCDE à l’autre, de l’absence totale d’indemnisation aux États-Unis à six mois de salaire en Turquie (Graphique 3.2). Cette demi-année de salaire en Turquie correspond à un huitième des quatre années de revenus du travail jusqu’à la date du licenciement. Le coût pour l’entreprise et les avantages pour les travailleurs licenciés sont également élevés en Israël et en Lituanie, où une prime de plus de 10 % des revenus du travail jusqu’à la date de la suppression d’emploi est versée à titre d’indemnisation. Les délais de préavis sont généralement plus répandus que les indemnités de licenciement : deux pays seulement n’imposent pas de délai de préavis, tandis que 12 pays ne prévoient pas d’indemnités de licenciement. Cela étant dit, les pays qui imposent le plus haut niveau d’indemnisation totale se distinguent par des indemnités de licenciement très élevées. Les différences d’indemnités de licenciement entre les pays sont plus prononcées que les différences de délai de préavis.

Tant le délai de préavis que les indemnités de licenciement ont tendance à augmenter avec l’ancienneté. Plus les travailleurs ont d’années de présence auprès d’une entreprise, plus leur emploi a tendance à être stable. Cette plus grande stabilité de l’emploi peut aussi contribuer à la plus faible mobilité professionnelle des travailleurs ayant plus d’ancienneté, qui sont souvent d’un âge plus avancé. Dans tous les pays de l’OCDE, le délai de préavis et les indemnités de licenciement augmentent, ou tout du moins ne diminuent pas, à trois niveaux d’ancienneté dans la base de données : 9 mois, 4 ans et 20 ans. En moyenne dans les pays de l’OCDE, le délai de préavis et les indemnités de licenciement confondus sont sept fois plus élevés à 20 ans d’ancienneté qu’à 9 mois (Graphique 3.3).

Les indemnités de licenciement augmentent davantage avec l’ancienneté que le délai de préavis. En moyenne dans les pays de l’OCDE, les indemnités de licenciement sont inférieures au délai de préavis à 9 mois d’ancienneté, mais supérieures à 20 ans d’ancienneté. À 9 mois d’ancienneté, deux tiers des pays de l’OCDE n’imposent pas d’indemnités de licenciement. À 20 ans d’ancienneté, les travailleurs de neuf pays de l’OCDE – Belgique, Chili, Espagne, France, Israël, Luxembourg, Mexique, Pays-Bas et Turquie – ont droit à des indemnités de licenciement égales à au moins un an de salaire. Il est relativement plus fréquent que le délai de préavis soit le même aux trois niveaux d’ancienneté.

Les délais de préavis sont similaires dans les cas de licenciement pour motif personnel et de licenciement pour motif économique. Ils le sont également dans les cas de licenciement individuel et de licenciement collectif, à l’exception de quelques pays dans lesquels ils sont plus longs pour les licenciements collectifs. Par exemple, aux États-Unis, les travailleurs licenciés ont droit à deux mois de préavis pour les licenciements de masse et fermetures de grandes usines. Au Canada, le préavis qui doit être notifié à un salarié concerné par un licenciement collectif est souvent plus long que pour une rupture de contrat de travail individuel. Au Luxembourg et au Royaume-Uni, dans le cas d’un licenciement de grande ampleur, un plus long délai de préavis est imposé entre la notification à l’autorité du travail et la date effective du licenciement, ce qui prolonge de fait le délai de préavis des salariés ayant peu d’ancienneté.

S’agissant des indemnités de licenciement, des différences plus prononcées sont constatées entre licenciements pour motif économique et licenciements pour motif personnel, ainsi qu’entre licenciements individuels et licenciements collectifs. À 20 ans d’ancienneté, les indemnités sont plus élevées dans le cas des licenciements pour motif économique en Australie, en Estonie, en Irlande, en Pologne, en République slovaque, en République tchèque et au Royaume-Uni. À ce niveau d’ancienneté, aucun pays ne prévoit d’indemnités plus élevées dans les cas de licenciement pour motif personnel. Ce degré de sécurité en moyenne quelque peu inférieur en cas de licenciement pour motif personnel pourrait être motivé par le fait que les travailleurs assument eux-mêmes une plus grande part de la responsabilité (p. ex. insuffisance professionnelle). S’agissant de la comparaison entre licenciements individuels et licenciements collectifs, des indemnités supplémentaires peuvent souvent être accordées au-delà d’un certain nombre de travailleurs concernés, généralement à l’issue de la consultation avec les délégués syndicaux.

Dès lors que l’on accorde le même poids au nombre de mois de préavis et aux indemnités de licenciement, comme dans l’analyse présentée dans cette section, une simplification est inévitable. Pour l’entreprise comme pour le travailleur, les délais de préavis sont souvent relativement moins coûteux et protègent plus que les indemnités de licenciement : le travailleur est tenu de continuer de travailler pendant son délai de préavis et les délais de préavis suffisamment longs permettent aux services de l’emploi d’intervenir en amont du licenciement, ce qui facilite le reclassement. C’est pourquoi l’OCDE conseille, dans les pays où les délais de préavis sont courts et les indemnités de licenciement élevées, d’envisager l’allongement des délais et la réduction des indemnités, tout en activant des interventions en amont pour faciliter le reclassement des travailleurs sans augmenter les coûts pour les employeurs (OCDE, 2019[11]).

Dans presque tous les pays de l’OCDE, un licenciement n’entrant pas dans le champ des motifs autorisés (ou « légitimes ») peut, s’il est contesté en justice, pousser l’employeur à verser une indemnité spécifique aux travailleurs, voire à les réintégrer aux mêmes postes. La catégorie « cadre réglementaire pour les licenciements abusifs » englobe la définition du licenciement abusif, la durée de la période d’essai pendant laquelle tout licenciement est légitime, et les règles d’indemnisation et de réintégration à la suite d’un licenciement abusif (Graphique 3.4). Les motifs de licenciement légitimes sont généralement d’ordre opérationnel (par exemple, difficultés économiques ou évolutions technologiques) ou d’ordre personnel lié aux travailleurs concernés (par exemple, insuffisance professionnelle, inaptitude). Au Canada (à l’exception du Québec) et aux États-Unis, un licenciement peut être légitime sans être motivé, à condition que la cause ne soit pas interdite16. À l’inverse, le Chili interdit les licenciements pour insuffisance professionnelle et inaptitude et le Mexique autorise les licenciements pour motif économique uniquement si plusieurs travailleurs sont concernés.

Les possibilités de licenciement légitime pour motif économique dépendent largement de la liberté de décision des juges. Dans environ la moitié des pays de l’OCDE (y compris l’Allemagne, l’Espagne, la Finlande, la Pologne et le Royaume-Uni), les licenciements pour motif économique ne peuvent être contestés que si ledit motif est faux ou manifestement irrationnel. En revanche, dans l’autre moitié des pays (dont l’Australie, le Chili, l’Italie, le Japon, la Norvège et les Pays-Bas), les juges peuvent mettre en doute la validité opérationnelle de la décision de licenciement. Dans certains pays, lorsque la compression de personnel pourrait concerner plusieurs travailleurs occupant des postes similaires, l’employeur est tenu de sélectionner les salariés à licencier selon des critères objectifs autres que la performance. L’ancienneté peut faire partie de ces critères, comme en France, en Lettonie, au Portugal et en Suède, par exemple17. En Italie, si le licenciement concerne cinq salariés ou plus sur une période de 120 jours, les juges ne peuvent pas mettre en cause la validité opérationnelle du licenciement et l’entreprise doit observer les critères sociaux et économiques de sélection des travailleurs à licencier.

Environ deux tiers des pays de l’OCDE entourent le licenciement pour motif économique de conditions de fond, par exemple de reclassement des travailleurs, éventuellement avec reconversion. Ces conditions peuvent également exiger que les travailleurs concernés soient prioritaires à la réembauche (Finlande et France) ou que des services d’aide au reclassement leur soient proposés (Belgique). D’autres pays (Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Grèce, Hongrie, Islande, Israël, République tchèque, Royaume-Uni, Slovénie, Suisse et Turquie) n’imposent pas de conditions, au moins pour les licenciements individuels. Le Canada, le Danemark, l’Espagne, la Grèce, la Slovénie, la Suisse et la Turquie imposent toutefois d’autres conditions à partir d’un certain nombre de travailleurs licenciés. Il s’agit généralement de la mise en place d’un plan social, c’est-à-dire une série de mesures de réemploi, de reconversion, de reclassement et, dans quelques cas, d’une indemnisation monétaire supplémentaire pour les travailleurs.

Le licenciement pour motif personnel existe dans la majorité des pays. Les employeurs peuvent licencier des travailleurs qui ne sont plus aptes pour le poste (pour des raisons médicales ou de qualifications) ou dont les résultats professionnels ne sont plus suffisants. Dans certains pays, cependant, l’insuffisance professionnelle, sans problème d’aptitude, n’est pas un motif légitime de licenciement (Chili, Espagne, Finlande, France, Mexique, Norvège, Portugal et Suède). Il peut être obligatoire de tenter d’autres solutions en cas de licenciement pour motif personnel. Par exemple, le reclassement doit être tenté en cas de licenciement pour raison médicale en Belgique et en France, ainsi que pour tous types d’inaptitude en Finlande et en Italie. En Espagne et au Japon, les travailleurs doivent être reconvertis pour éviter le licenciement pour cause de qualifications insuffisantes.

Dans presque tous les pays de l’OCDE, la réglementation relative aux licenciements abusifs ne s’applique pas pendant une période initiale (ou d’essai) au début d’une relation d’emploi. La Belgique, le Chili, la Grèce, Israël, le Japon et la Pologne sont les seules exceptions, bien que les contrats temporaires soient parfois utilisés à la place de la période d’essai18. La période d’essai moyenne est de trois mois ; elle est la plus longue au Royaume-Uni (24 mois) et en Irlande (12 mois).

Lorsque les juges estiment que le licenciement (après la période d’essai) est abusif, le versement d’indemnités ou la réintégration du travailleur au même poste peut être ordonné. L’indemnisation versée à la suite d’un licenciement abusif est particulièrement importante en Italie. La réintégration est toujours proposée au salarié en Autriche, en Corée, en Lettonie, en République tchèque et en Turquie. À l’inverse, sauf dans le cas des licenciements pour motif interdit, la réintégration ne peut pas être imposée à l’employeur en Belgique, en Colombie, en Espagne, en Estonie, aux États-Unis, en Finlande, en France (pour les licenciements individuels), en Islande, en Lituanie, au Luxembourg, en Suède et en Suisse. En France, en cas de licenciement de plus de dix travailleurs dans une entreprise de plus de 50 salariés, l’absence (ou l’insuffisance) d’un plan social peut entraîner la nullité de la procédure de licenciement économique ; dans ces cas, le juge peut ordonner la réintégration des travailleurs qui en font la demande. Dans l’ensemble, la réintégration est plus répandue dans les pays qui entourent les licenciements abusifs d’un cadre réglementaire plus rigoureux (Corée, Grèce, Lettonie, Norvège, Portugal et Turquie).

Les indicateurs sur la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs prennent en considération le délai maximum pour engager un recours, la charge de la preuve, la validation préalable du licenciement et les mécanismes de rupture de contrat à l’amiable (Graphique 3.5). Comme nous l’avons vu dans la section 3.2.1, cela signifie qu’ils brossent un tableau incomplet des questions de mise en application de la réglementation puisque, pour diverses raisons, ils ne tiennent pas compte de certains aspects du fonctionnement du système judiciaire, dont l’accès aux tribunaux du travail ou la longueur des procédures.

La durée médiane du délai pendant lequel un salarié peut engager un recours pour licenciement abusif est de deux mois dans la zone OCDE. Dans certains pays (Autriche, Danemark, Hongrie, Lituanie, Slovénie, Suisse et Turquie), le délai maximum est si court que, dans la pratique, les recours doivent être engagés avant que le licenciement soit effectif. À l’inverse, le salarié dispose de plus de deux ans en Colombie, aux États-Unis (où le délai varie selon l’État)19, en Islande, en Israël et au Japon.

Dans la majorité des pays, en cas de recours pour licenciement abusif, il incombe à l’employeur, au moins en partie, de prouver la légitimité du licenciement. La charge de la preuve est un aspect important de la motivation d’une entreprise à licencier un travailleur et de celle d’un salarié à engager un recours. Les seuls pays où la charge de la preuve pèse uniquement sur le salarié dans les cas de licenciement abusif (hors motifs interdits) sont l’Australie, la Colombie, le Danemark, les États-Unis, Israël, la Pologne, la République slovaque, la République tchèque et la Suisse.

La validation du licenciement en tant que contrôle préventif a tendance à alourdir les procédures pour l’entreprise, mais elle présente l’avantage de limiter le risque que le licenciement soit jugé abusif par la suite. Ce n’est qu’en Autriche et aux Pays-Bas que tous les licenciements doivent faire l’objet d’une validation préalable qui restreint l’étendue des recours pour licenciement abusif. Ils doivent être approuvés par le comité d’entreprise en Autriche, et par le service national de l’emploi ou le tribunal de sous-district aux Pays-Bas. La validation garantit le licenciement pour l’employeur, mais seulement à partir d’un nombre précis de postes supprimés en Belgique (dans certains cas), en Colombie, en Espagne, en France, en Grèce et au Mexique.

La démission et la rupture de contrat de travail à l’amiable, parce qu’elles ouvrent droit aux indemnités de chômage dans de nombreux pays (parfois avec sanctions), sont souvent préférées au licenciement. Dans plusieurs pays, elles donnent droit aux indemnités de chômage aux mêmes conditions que dans le cas d’un licenciement. Il en est ainsi en Autriche, au Chili, en Colombie, en Corée, en Lituanie, au Mexique (où les indemnités de chômage n’existent pas), aux Pays-Bas et en République slovaque. Dans d’autres pays, la démission et la rupture de contrat à l’amiable ouvrent droit aux indemnités de chômage, mais avec de longs délais de carence (Immervoll and Knotz, 2018[71]). À l’inverse, la démission et la rupture de contrat à l’amiable n’ouvrent jamais droit aux indemnités de chômage (par opposition aux licenciements) au Canada, en Espagne, aux États-Unis (dans la majorité des États et dans le cas d’une rupture de contrat individuelle), en Grèce, en Italie, au Luxembourg, en Slovénie et en Turquie20. Ces pays font partie de ceux pour lesquels le niveau global de mise en application est particulièrement élevé.

Cette partie évalue la réglementation des licenciements relative aux travailleurs réguliers en regroupant les éléments individuels dont il est question dans la section précédente. Elle commence par les licenciements individuels, puis s’intéresse aux licenciements collectifs et, enfin, aux deux types licenciements réunis.

Les indicateurs de l’OCDE font apparaître d’importantes différences au plan de la rigueur de la réglementation des licenciements individuels de travailleurs réguliers (Tableau 3.3). Cinq des dix pays affichant la plus faible réglementation mesurée sont dotés d’un système juridique qui trouve son origine dans la common law britannique : les États-Unis, le Canada, l’Australie, le Royaume-Uni et l’Irlande (dans l’ordre). La réglementation est également évaluée comme étant faible en Suisse, en Autriche, en Hongrie, au Danemark et en Estonie. À l’autre extrémité, parmi les pays ayant une réglementation relativement stricte, se trouvent la République tchèque, Israël, le Portugal, les Pays-Bas, la Turquie, la Belgique, l’Italie, la Lettonie, la Grèce et le Luxembourg. Les pays situés entre les deux catégories sont ceux dans lesquels les politiques semblent accorder une importance plus égale à l’adaptabilité de l’entreprise et à la sécurité de l’emploi.

La note globale est déterminée par les quatre catégories de réglementation : contraintes de procédure, préavis et indemnités de licenciement, cadre réglementaire pour les licenciements abusifs et mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs. La question se pose de savoir si, dans les pays où les licenciements sont très réglementés dans l’ensemble, ils le sont dans les quatre catégories ou dans certaines seulement. La réponse est recherchée statistiquement, par le biais de corrélations entre les quatre catégories de réglementation des licenciements et leur corrélation avec la note globale. Cette analyse indique que la quatrième catégorie, à savoir la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs, joue un rôle différent de celui des trois autres, soulignant l’importance de son inclusion dans les indicateurs pour obtenir une image plus complète des réglementations. Les contraintes de procédure, le préavis et les indemnités de licenciement et le cadre réglementaire pour les licenciements abusifs sont positivement corrélés, indiquant qu’ils ont tendance à être complémentaires plutôt qu’à se substituer l’un à l’autre.

La note synthétique n’est que faiblement corrélée avec la mise en application de la réglementation des licenciements abusifs21. Certains pays affichant un faible niveau global de protection réglementaire enregistrent une note élevée pour la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs, notamment le Canada et les États-Unis. Le Canada est l’un des pays où seul le licenciement ouvre droit aux indemnités de chômage et qui n’offrent donc aucune autre forme de rupture de contrat qui serait rendue intéressante par le droit à ces indemnités. Aux États-Unis, le délai pour engager un recours pour licenciement abusif est long (au cas où des restrictions applicables aux licenciements seraient présentes dans le contrat ou le « contrat implicite », dans lequel l’employeur donne certaines garanties d’emploi continu pour créer une sorte de contrat). En revanche, la note des Pays-Bas, un pays à forte protection réglementaire dans l’ensemble, est basse : le service public de l’emploi ou le tribunal de sous-district sont chargés de la validation préalable des licenciements et la rupture de contrat à l’amiable ouvre droit à des indemnités de chômage sans sanctions.

Les comparaisons par paires font ressortir une corrélation négative entre la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs et les trois autres catégories22. Entre autres raisons, ce constat peut s’expliquer par le fait que, dans les pays où les salariés ont peu de droits en cas de licenciement abusif (le cadre réglementaire qui entoure les licenciements abusifs est moins rigoureux), un plus haut degré de mise en application de la réglementation en la matière présente un moindre intérêt. La conception des indicateurs est une autre raison : en règle générale, la validation préalable d’un licenciement par une tierce partie contribue négativement à l’indicateur dans la catégorie « mise en application » du fait que ce type de validation réduit les chances que le licenciement soit jugé abusif ; elle contribue positivement à l’indicateur dans la catégorie « contraintes de procédure » puisqu’elle renforce la rigueur de la procédure de notification23.

La nouvelle version des indicateurs (version 4) n’évalue pas la rigueur de la réglementation des licenciements dans plusieurs pays de la même manière que la version 3. Dans la version 4, la protection de l’emploi contre les licenciements individuels, par exemple, est moins rigoureuse en Autriche, en France, en Allemagne et aux Pays-Bas, et plus rigoureuse au Canada, aux États-Unis et en Irlande. L’Encadré 3.1 mentionne quelques raisons de la nouvelle évaluation, en s’appuyant sur l’analyse dans Denk and Georgieff (forthcoming[62]). Au plan conceptuel, trois raisons expliquent les différences de notation : i) la révision des catégories « contraintes de procédure » et « cadre réglementaire pour les licenciements abusifs » ; ii) l’ajout de la catégorie « mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs » ; et iii) la réduction du poids des trois catégories contribuant déjà à l’indicateur. Comme l’illustrent les exemples donnés dans l’encadré, les modifications apportées à la conception des indicateurs permettent de meilleures comparaisons globales entre les pays, parce que les indicateurs rendent ainsi mieux compte des coûts occasionnés par différents aspects de la réglementation et supportés par les entreprises.

Les périodes de difficultés économiques, dues par exemple à une baisse persistante de la demande ou à une mutation technologique obligatoire, peuvent pousser les entreprises à restructurer leur effectif et, à cette fin, à licencier un nombre important de travailleurs en relativement peu de temps. Il n’est pas rare qu’une réglementation spécifique s’applique à ce type de situation. Jusqu’à présent, ces restrictions particulières sur les licenciements collectifs n’étaient prises en compte qu’au regard de certains aspects de la réglementation des licenciements, et en complément seulement des informations concernant les licenciements individuels. Les nouvelles données de l’OCDE présentent, pour la première fois, des indicateurs sur la protection contre les licenciements collectifs calculés selon le même principe que les indicateurs sur la protection contre les licenciements individuels. La section présente des indicateurs distincts pour les licenciements individuels pour motif économique, étant entendu que les licenciements collectifs sont normalement motivés par des raisons économiques, et les indicateurs de l’OCDE sur les licenciements individuels décrits ci-dessus rendent compte à la fois des licenciements pour motif personnel et des licenciements pour motif économique.

Certes intrinsèquement importante, une évaluation complète de la réglementation des licenciements collectifs est rendue doublement intéressante par les évolutions des dix dernières années. La multiplication des « entreprises zombies » (qui ont des difficultés à remplir leurs obligations financières) (Andrews, Adalet McGowan and Millot, 2017[72]) dans le sillage de la crise financière et économique mondiale n’est peut-être pas sans rapport avec la réglementation des licenciements collectifs. Qui plus est, la marge dont disposent les entreprises en difficulté pour ajuster les salaires plutôt que leur effectif s’est contractée face à la rigidité à la baisse des salaires nominaux, à la faible inflation et à la croissance au ralenti des salaires nominaux. Il est également probable que les tendances à la transformation numérique et à la mondialisation pousseront davantage d’entreprises à restructurer leur main-d’œuvre.

Comme indiqué dans la section 3.2.1, est considéré comme « collectif » dans les indicateurs un licenciement de plusieurs travailleurs en l’espace d’un mois, et donc indépendamment de l’existence ou non d’une réglementation spécifique. Plus précisément, les indicateurs calculent la moyenne des valeurs pour 10, 45, et 120 licenciements en un mois. Dans certains pays, une réglementation spécifique s’applique à partir de 10 travailleurs licenciés ou moins ; dans d’autres, le nombre de travailleurs concernés doit être plus important. Dans tous les pays dotés d’une réglementation spécifique, le seuil des licenciements collectifs est de moins de 120 travailleurs. Ainsi, les indicateurs relatifs aux licenciements collectifs illustrent à la fois la rigueur de la réglementation, lorsqu’une réglementation spécifique est applicable en cas de licenciements multiples, et la portée de la réglementation, exprimée par le seuil de licenciements.

Tous les pays de l’OCDE –Chili, Corée, Israël, Mexique et Nouvelle-Zélande exceptés – imposent des restrictions plus sévères sur les licenciements collectifs que sur les licenciements individuels (Graphique 3.7)24. Le Chili, la Corée, Israël et la Nouvelle-Zélande appliquent la même réglementation aux licenciements collectifs et aux licenciements individuels. Le Mexique est un cas à part du fait que la législation n’autorise pas le licenciement individuel pour motif économique et interdit le licenciement collectif pour motif autre qu’économique. La protection contre les licenciements collectifs est supérieure de 10 à15 % à la protection contre les licenciements individuels dans la zone OCDE, en moyenne, en raison principalement des contraintes de procédure plus rigoureuses avant la notification – voir la section 3.3.1 et Denk et Georgieff (forthcoming[62]). L’usage répandu de restrictions spécifiques sur les licenciements collectifs témoigne probablement des difficultés plus grandes associées aux licenciements collectifs sur le plan économique. Il n’en reste pas moins que le regroupement de plusieurs licenciements individuels en un licenciement collectif peut, dans certains cas, alléger la charge administrative de l’entreprise25.

Dans les pays dotés d’une réglementation des licenciements individuels rigoureuse, la réglementation des licenciements collectifs a tendance à être rigoureuse du fait que, dans la pratique, la première définit souvent les minima pour la seconde. Six des dix pays affichant le plus faible et le plus fort degré de réglementation des licenciements individuels affichent aussi, respectivement, le plus faible et le plus fort degré de réglementation des licenciements collectifs. Tous pays confondus, il n’existe pas de rapport significatif entre les restrictions supplémentaires sur les licenciements collectifs (la différence de réglementation entre licenciements individuels et licenciements collectifs) et la rigueur de la réglementation des licenciements individuels. Par conséquent, le degré de réglementation spécifique applicable aux licenciements collectifs semble être davantage le choix des pouvoirs publics et des pays qu’une conséquence naturelle de la réglementation des licenciements individuels.

Le licenciement de masse est une forme extrême de licenciement collectif qui, dans ce chapitre, concerne les licenciements d’au moins 120 travailleurs en l’espace d’un mois. Cette définition fait en sorte que le seuil applicable aux réglementations spécifiques pour une série de licenciements individuels soit dépassé dans tous les pays de l’OCDE dotés de législation en la matière. Le degré mesuré de réglementation est généralement le même pour les licenciements de masse et pour les suppressions d’emplois à plus petite échelle dépassant le seuil applicable aux réglementations spécifiques. Par conséquent, plus ce seuil est élevé et plus les restrictions supplémentaires sont nombreuses par comparaison avec les licenciements individuels, plus la différence entre les indicateurs de rigueur de la réglementation des licenciements de masse et des licenciements collectifs est prononcée.

Dans un tiers des pays de l’OCDE, le seuil applicable aux licenciements collectifs soumis à une réglementation spécifique est de 10 travailleurs (ou l’équivalent) ou moins en un mois. Dans ces pays, la réglementation est identique pour les licenciements de masse et les licenciements collectifs (Graphique 3.8). Le seuil de licenciements est parfois plus élevé, en particulier en Australie, en Colombie, aux États-Unis et au Japon, ce qui explique le niveau relativement élevé de restrictions supplémentaires sur les licenciements de masse dans ces pays.

La rigueur de la réglementation globale des licenciements individuels et collectifs de travailleurs réguliers, telle qu’elle est évaluée avec les indicateurs synthétiques, est proche de celle de la réglementation des licenciements individuels et des licenciements collectifs compte tenu de leur forte corrélation (Graphique 3.9). Une interprétation littérale des indicateurs donne à penser que, dans les pays les plus réglementés, la réglementation des licenciements est près de deux fois plus rigoureuse que dans les pays les moins réglementés.

Les données font ressortir assez clairement les différences internationales entre les marchés du travail et les modèles sociaux. Trois des quatre pays les moins réglementés sont anglo-saxons : les États-Unis, le Canada et l’Australie. Géographiquement, les pays de l’OCDE en Amérique du Nord et en Australasie sont dotés d’une réglementation évaluée au-dessous de la moyenne de l’Organisation26. À l’inverse, la réglementation dans la majorité des pays de l’OCDE qui sont également membres de l’Union européenne dépasse la moyenne de l’OCDE. Quatre des cinq pays les plus réglementés sont membres de l’UE : la République tchèque, les Pays-Bas, le Portugal et l’Italie. Les pays anglophones se distinguent par des coûts bas pour les entreprises et relativement peu de protection pour les travailleurs, tandis que le coût des licenciements et la sécurité de l’emploi pour les travailleurs réguliers sont relativement élevés dans un grand nombre de pays de l’UE.

La réglementation de la protection de l’emploi ne repose pas uniquement sur la législation ; elle est également tributaire de conventions collectives et de la jurisprudence, ce dont tiennent compte les indicateurs de la protection de l’emploi.

Les conventions collectives peuvent retentir sur la protection de l’emploi des travailleurs réguliers, par exemple en modifiant les délais de préavis (Australie, Danemark, France, Islande, Italie, Suède), la période d’essai (Danemark, France, Hongrie, Islande, Italie, Suède, Turquie), les indemnités de licenciement (Australie, Danemark, France) ou les critères de sélection des travailleurs à licencier (Finlande, Norvège, Suède)27. L’Encadré 3.2 examine de plus près le rôle de la négociation collective nationale et sectorielle en France, Italie et Suède, trois pays affichant une forte proportion de travailleurs protégés par des conventions collectives. Dans certains pays, les conventions collectives d’entreprise peuvent déroger à la loi ou à des conventions de niveau supérieur, limitant ainsi l’effet contraignant de la réglementation. Cet aspect n’entre toutefois pas dans le champ des indicateurs.

La jurisprudence importe elle aussi pour évaluer des aspects peu pris en compte ou ignorés dans la législation, dont la liberté de décision des juges ou la valeur légale de l’avis écrit précisant le ou les motifs de licenciement. Elle peut en outre influer sur l’interprétation de la législation, comme dans le cas des obligations de reclassement et des options de réintégration en Italie, ou encore du délai maximum pour engager un recours pour licenciement abusif en France.

Tous les indicateurs de l’OCDE dans ce chapitre portent sur la réglementation applicable aux moyennes et grandes entreprises, qui emploient généralement le plus grand nombre de personnes dans les économies de l’OCDE. Par exemple, en 2013, les entreprises de 20 salariés ou plus employaient 77 % de toutes les personnes occupées au Canada, 47 % en Corée, 89 % aux États-Unis, 69 % en Israël, 70 % au Mexique et 73 % en Turquie28. Dans certains pays, cependant, les petites entreprises sont soumises à une réglementation moins stricte, qui n’entre pas dans le champ des indicateurs. En Australie, par exemple, les entreprises de moins de 15 salariés n’ont pas d’indemnités de licenciement à verser. En Autriche, les entreprises de moins de 5 salariés ne sont pas obligées d’avoir, et donc d’informer, un comité d’entreprise. En Allemagne, la réglementation sur les licenciements (sauf dans les cas de licenciement discriminatoire et arbitraire) ne s’applique pas aux entreprises de 10 salariés ou moins. En Corée, seules les règles concernant le préavis ou l’indemnisation équivalente concernent les entreprises de 4 salariés ou moins. Au Portugal, en cas de licenciement abusif, les entreprises de moins de 10 salariés peuvent demander au tribunal d’être dispensées de l’obligation de réintégration. En Espagne, pour les entreprises de 25 salariés ou moins, la durée maximum de la période d’essai est de trois mois au lieu de deux (sauf pour les travailleurs justifiant d’un niveau d’instruction supérieur) et le Fonds de garantie salariale verse une partie des indemnités de licenciement économique (sauf si le licenciement est jugé abusif). En Turquie, en cas de licenciement abusif, les entreprises de moins de 30 salariés ne sont pas obligées de réintégrer ni d’indemniser les travailleurs et d’acquitter les arriérés. Enfin, les entreprises de moins de 20 salariés sont dispensées des obligations applicables aux licenciements collectifs en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en Hongrie, en Islande, en République tchèque et en Suisse.

Un aspect important de la réglementation en matière de protection de l’emploi réside dans la différence entre travailleurs réguliers et travailleurs temporaires. Il est plus difficile pour les entreprises de licencier des travailleurs réguliers que de ne pas renouveler des contrats temporaires (OCDE, 2014[60]). Pour combattre l’abus éventuel des contrats temporaires par les entreprises, les pouvoirs publics imposent généralement des restrictions sur leur utilisation. Comme nous l’avons vu dans la section 3.2.2, la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi réunit également des indicateurs sur la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires. Elle opère une distinction entre la réglementation des contrats à durée déterminée et celle des contrats d’intérim, en accordant un poids égal aux deux.

Les différences entre les pays de l’OCDE au regard des restrictions réglementaires sur l’embauche de travailleurs temporaires, mesurées par les indicateurs (Graphique 3.11), sont encore plus prononcées que les différences de restrictions sur le licenciement des travailleurs réguliers. En moyenne, on constate que les deux types de contrats temporaires sont généralement plus réglementés, même si de nombreuses situations singulières sont recensées. La tendance géographique est proche de celle observée dans le cas de la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers. Tous les pays de Common Law de l’OCDE (Australie, Canada, États-Unis, Irlande, Israël, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni) se situent au bas, ou près du bas la répartition de ce type de réglementation. Quatre des cinq pays les plus réglementés sont des pays de l’UE, à savoir le Luxembourg, l’Italie, la France et l’Espagne.

La corrélation entre les deux principaux indicateurs de la base de données (licenciement de travailleurs réguliers et embauche de travailleurs temporaires) est très positive (Graphique 3.12). Dans les pays où le licenciement de travailleurs réguliers est fortement réglementé, il en est généralement de même pour l’embauche de travailleurs temporaires. Un petit nombre de pays (dont en particulier Israël, les Pays-Bas et la République tchèque) semblent se démarquer de la norme en réglementant relativement peu les contrats temporaires compte tenu de leur forte réglementation des contrats permanents.

La corrélation globalement positive entre la réglementation des contrats permanents et des contrats temporaires s’explique probablement par les différences de réglementation des premiers et par le désir des responsables publics de limiter l’utilisation des derniers. Dans les pays qui réglementent peu les contrats permanents, les entreprises ont peu avantage à les remplacer par des contrats temporaires et le besoin de restreindre l’utilisation de ces derniers ne se présente donc pas. Dans les pays qui réglementent fortement le licenciement de travailleurs réguliers, une réglementation rigoureuse des contrats temporaires peut faire obstacle à leur usage abusif. À l’exemple des Pays-Bas, du Portugal et de la Suède (OCDE, 2014[60]), une relativement faible réglementation des contrats temporaires parallèlement à une réglementation rigoureuse des contrats permanents peut causer une forte segmentation involontaire du marché du travail entre travailleurs réguliers (très protégés) et travailleurs temporaires (peu protégés). La section 3.4 cherchera à savoir si les récentes réformes de la protection de l’emploi ont creusé ou comblé cet écart de réglementation entre les deux catégories de travailleurs.

L’analyse des réformes de la protection de l’emploi proposée dans cette section porte sur la période entre 2013 – année de la précédente publication des indicateurs de la protection de l’emploi de l’OCDE – et 2019 – année de la plus récente prise en compte dans la base de données. Cette période succède au lendemain immédiat de la crise financière mondiale, marqué dans plusieurs pays (Grèce, Portugal et plusieurs autres membres de l’UE) par l’assouplissement d’une réglementation rigoureuse des licenciements de travailleurs réguliers dans le but de réduire la dualité du marché du travail.

Entre 2013 et 2019, 21 pays de l’OCDE ont engagé au moins une réforme, constat dont témoigne un changement de note selon l’indicateur de l’OCDE sur la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers ou la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires. Cette section porte exclusivement sur les réformes ayant eu une incidence sur les indicateurs. Elle décrit leurs principaux éléments et leur impact sur le niveau de protection de l’emploi, évalué par les indicateurs. Certaines des réformes sont traitées de manière plus approfondie dans les rapports par pays (Carcillo et al., 2019[74]; OECD, 2018[75]).

Ces réformes récentes se déclinent en trois catégories : premièrement, les pays ayant assoupli les restrictions sur le licenciement de travailleurs réguliers ; deuxièmement, ceux qui ont modifié leurs restrictions sur l’utilisation de l’emploi temporaire, dans certains cas pour réduire la dualité du marché ; et troisièmement, les pays (Belgique et Pays-Bas) ayant cherché à rendre la réglementation plus équitable et à la simplifier en normalisant la protection des travailleurs réguliers contre différents types de licenciements. Les pays réformateurs sont plus nombreux à avoir assoupli la réglementation des licenciements qu’à l’avoir durcie, tandis qu’ils sont aussi nombreux à avoir durci qu’à avoir assoupli la réglementation relative à l’embauche de travailleurs temporaires.

L’analyse présentée dans cette section repose sur trois graphiques. Le Graphique 3.13 décrit l’évolution de l’indicateur sur la réglementation des licenciements individuels et collectifs de travailleurs réguliers et celle de l’indicateur sur la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires entre 2013 et 2019. Les deux graphiques suivants (Graphique 3.14 et Graphique 3.15) décomposent ces évolutions en fonction des principaux aspects de la réglementation.

Plusieurs pays ont mis en œuvre des réformes cherchant à assouplir la réglementation des licenciements, parfois en allégeant en même temps les restrictions sur le recours à l’emploi temporaire. De grandes réformes (ou séries de réformes) touchant plusieurs aspects de la réglementation ont été engagées en France, en Italie, en Lituanie et en Slovénie. Quatre autres pays de l’OCDE ont voté des allègements plus spécifiques de la réglementation relative au licenciement de travailleurs réguliers, qui ont eu des effets notables sur les indicateurs de la protection de l’emploi.

Entre juin 2013 et décembre 2017, la France a voté plusieurs réformes assouplissant la réglementation des licenciements. Parmi les principales mesures adoptées, la Loi Travail d’août 2016 clarifiait la définition du licenciement pour motif économique. Une baisse significative (dépassant un certain seuil) d’au moins un des indicateurs économiques répertoriés dans la loi, par exemple des commandes ou du chiffre d’affaires, doit désormais être considérée comme un motif légitime par le tribunal. Les difficultés économiques et les mutations technologiques peuvent toujours être évoquées (comme avant la réforme) même si la baisse n’atteint pas le seuil. Par la suite, dans la deuxième moitié de 2017, les ordonnances Macron ont fixé un barème d’indemnisation du licenciement « sans cause réelle et sérieuse » et mis en place un dispositif de rupture conventionnelle collective. Elles ont également précisé la définition du « vice de procédure », beaucoup moins pénalisé que le licenciement sans cause réelle et sérieuse. En particulier, l’irrégularité de la notification ne prive plus le licenciement de cause réelle et sérieuse. Le délai de recours a également été réduit, de cinq ans en 2013 à 12 mois en 2018. S’agissant des licenciements collectifs plus particulièrement, la Loi relative à la sécurisation de l’emploi de 2013 limitait le risque qu’un licenciement soit classé comme étant sans cause réelle et sérieuse en exigeant la validation du plan social par l’administration avant le licenciement (pour les entreprises de plus de 50 salariés), bien que cette mesure ait complexifié la procédure de notification.

Dans l’ensemble, les réformes ont eu un impact modéré sur la protection de l’emploi des travailleurs réguliers, mesurée par l’indicateur synthétique (Graphique 3.13, partie A). La baisse s’explique principalement par la moindre valeur légale de la cause évoquée dans la lettre de licenciement, qui a considérablement simplifié la procédure de notification en cas de licenciement individuel. Le raccourcissement du délai de recours pour faire appliquer la réglementation relative aux licenciements abusifs intervient lui aussi (Graphique 3.14, parties A et D)29. La précédente version (version 3) des indicateurs de l’OCDE ne rendait pas compte de la valeur légale de la lettre de licenciement pour les travailleurs réguliers. Par conséquent, la France est un bon exemple pour illustrer en quoi la version 4 donne une meilleure représentation des réformes de la réglementation des licenciements. Voir l’Encadré 3.3 pour en savoir plus sur ces améliorations.

En Italie, le « Jobs Act » de mars 2015 a considérablement réduit la protection des travailleurs réguliers contre les licenciements individuels. L’une des principales mesures de cette loi supprime la possibilité de réintégration (dans les entreprises de plus de 15 salariés) en cas de licenciement individuel pour motif économique, pour la majorité des licenciements collectifs et dans certains cas de licenciement pour motif personnel30. Le « Jobs Act » a également remplacé la phase de conciliation obligatoire, avant tout licenciement individuel pour motif économique, et avant tout licenciement pour motif personnel à la demande du salarié, par une procédure de conciliation ex post. Ces deux changements ont considérablement réduit l’indicateur de protection de l’emploi des travailleurs réguliers (Graphique 3.13, partie A) en limitant les conséquences des licenciements abusifs, qu’ils soient individuels ou collectifs, et en simplifiant la procédure de licenciement individuel (Graphique 3.14, parties A, C et F).

La diminution de l’indicateur sur les licenciements collectifs (Graphique 3.14, partie F) ne s’explique pas seulement par le « Jobs Act », mais aussi, et surtout, par une réforme antérieure des indemnités de licenciement qui n’est entrée en vigueur qu’en janvier 2017. Auparavant, en cas de licenciement collectif, un salarié justifiant d’au moins 12 mois d’ancienneté avait droit à une « indemnité de mobilité » qui remplaçait les indemnités de chômage, et l’employeur devait contribuer à cette indemnité à raison de deux à sept mois de salaire31. Cette indemnité ayant été supprimée, l’obligation de contribution de l’employeur est désormais la même que pour les licenciements individuels, c’est-à-dire moins d’un mois de salaire dans la majorité des cas.

En Lituanie, le nouveau Code du travail, entré en vigueur en juillet 2017, fait bénéficier les employeurs d’une plus grande souplesse au regard à la fois du licenciement de travailleurs réguliers et de l’utilisation de formes d’emploi temporaire.

La réforme a réduit le délai de préavis et les indemnités de licenciement, et soumis la réintégration à l’accord de l’employeur. Une indemnisation spécifique (plafonnée à six mois de salaire) est toutefois obligatoire à défaut de réintégration. Le nouveau Code du travail prévoit par ailleurs une procédure spéciale pour les licenciements à discrétion de l’employeur, selon laquelle un salarié peut être licencié à très bref délai (trois jours) et moyennant des indemnités élevées (six mois de salaire), quel que soit le motif. Cette nouvelle procédure et la suppression de l’obligation de réintégration ont considérablement diminué l’indicateur de protection de l’emploi des travailleurs réguliers (Graphique 3.13, partie A) en limitant à la fois la définition et les conséquences d’un licenciement abusif (Graphique 3.14, partie C)32.

Le nouveau Code du travail a par ailleurs facilité l’emploi temporaire. Toutes les restrictions sur les cas légitimes de recours aux contrats à durée déterminée ont été levées, à condition qu’ils ne représentent pas plus de 20 % de tous les contrats de travail. Le nombre de contrats à durée déterminée pouvant être enchaînés n’est pas limité, mais ils ne peuvent être utilisés que pendant un maximum de deux ans un salarié au même poste, et un maximum de cinq ans à des postes différents. En conséquence de ces assouplissements, la Lituanie enregistre la plus forte baisse dans l’indicateur sur l’emploi temporaire entre 2013 et 2019 (Graphique 3.13, partie B).

En Slovénie, la nouvelle loi sur les relations d’emploi entrée en vigueur en avril 2013 a considérablement réduit la protection des travailleurs réguliers contre les licenciements et assoupli les règles concernant le recours aux contrats d’intérim.

À la suite de cette réforme, les syndicats ne peuvent plus empêcher une procédure de licenciement, le délai de préavis et les indemnités de licenciement sont réduits et un licenciement peut être jugé légitime même si l’employeur n’a pas tenté de reconvertir ou de reclasser le travailleur. Ces trois aspects de la réforme se sont fait ressentir sur l’indicateur relatif à l’emploi régulier (Graphique 3.14, parties A, B et C) et l’impact global sur la protection des travailleurs réguliers est considérable (Graphique 3.13, partie A).

S’agissant de la réglementation des contrats temporaires, la même loi a supprimé la limitation à 12 mois de contrats d’intérim successifs et l’obligation pour les agences d’intérim de présenter des rapports annuels. Elle a par ailleurs limité la part de contrats d’intérim à 25 % des contrats de travail de l’entreprise. Ces changements diminuent l’indicateur relatif à l’emploi temporaire (Graphique 3.13, partie B).

Les indicateurs font apparaître que quatre autres pays ont assoupli la protection de l’emploi des travailleurs réguliers, sans modifier les restrictions sur le recours à l’emploi temporaire. La Finlande a prolongé la période d’essai de quatre à six mois en janvier 2017. En Grèce, les licenciements collectifs ne nécessitent plus l’accord de l’administration depuis 2017. Au Portugal, deux lois d’août 2013 ont réduit les indemnités de licenciement de 20 à 12 jours par année d’ancienneté et créé une « caisse d’indemnisation » pour leur financement33. En 2013, le Royaume-Uni a réduit de moitié le délai minimum entre la notification d’un licenciement collectif à l’administration et le licenciement proprement dit, de 90 à 45 jours.

Les changements réglementaires en Finlande, en Grèce et au Royaume-Uni, qui étaient soit de faible ampleur, soit limités aux licenciements collectifs, ne modifient pas beaucoup le degré évalué de protection de l’emploi. Le degré d’impact de la réforme portugaise des indemnités de licenciement et de leur financement est comparable à celui des grandes réformes menées en France, en Italie, en Lituanie et en Slovénie (Graphique 3.13, partie A).

Dans la grande majorité des cas, la réforme de la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers s’est traduite par un assouplissement. Seules l’Espagne et la Hongrie ont évolué dans le sens d’un durcissement (Graphique 3.13, partie A), aux côtés de la Belgique et des Pays-Bas où ce durcissement est davantage une conséquence de l’harmonisation de la protection des travailleurs contre différents types de licenciements (Section 3.4.3). En Hongrie, le nouveau Code de procédure civile, entré en vigueur en janvier 2018, a fait basculer la charge de la preuve sur l’employeur dans les affaires relevant du droit du travail34. En Espagne, les employeurs ne peuvent plus, depuis janvier 2019, embaucher sous « contrat de soutien aux entrepreneurs », un contrat jusqu’alors réservé aux entreprises de moins de 50 travailleurs qui prévoyait une période d’essai d’un an au lieu de quatre mois35. Les modifications de la réglementation des licenciements en Grèce et en Hongrie sont prises en compte dans la nouvelle version des indicateurs (version 4), plus pointue que la version 3 qui n’aurait indiqué aucun changement (Encadré 3.3).

L’évaluation de la protection de l’emploi dans ce chapitre est d’autant plus pertinente au vu de la crise sanitaire et économique du COVID-19 qui sévit à l’heure actuelle et qui a fortement accru le risque de licenciement pour un grand nombre de salariés du secteur privé. La protection contre le licenciement, conjuguée avec des dispositifs efficaces de chômage partiel, a vraisemblablement préservé des emplois dans les pays lourdement touchés par la crise36. Comme le montre l’Encadré 3.4, face à la crise, quelques pays de l’UE ont renforcé la protection contre les licenciements. Les priorités de l’action publique en matière de protection de l’emploi dans les mois à venir dépendront de l’évolution de la pandémie, des restrictions de l’activité économique et de l’évolution de la situation du marché du travail. Elles exigeront probablement un changement de cap, c’est-à-dire s’éloigner du besoin immédiat de protéger les emplois et les revenus existants pour renforcer le soutien à la mobilité des travailleurs entre les entreprises, à la lumière également des changements structurels impulsés par la crise dans le marché du travail (par exemple, la demande accrue de travailleurs dans les secteurs de la santé, des prestations en ligne et des services de livraison).

En Lituanie et en Slovénie, comme nous l’avons vu, l’un des axes d’une réforme plus globale du marché du travail consistait à faciliter l’emploi temporaire. Cinq autres pays ont mené des réformes spécifiques pour assouplir les restrictions du recours à l’emploi temporaire, dont témoigne l’indicateur. Plusieurs pays ont quant à eux durci les restrictions sur les contrats de travail temporaire. Certaines réformes ont introduit une durée cumulée maximum de contrats ou missions successifs, tandis que l’Italie et, dans une moindre mesure le Danemark, ont mis en œuvre des restrictions sur le recours à ces formes d’emploi.

En France, l’embauche sous contrat temporaire a été facilitée en août 2015 par l’augmentation du nombre maximum de contrats à durée déterminée successifs de deux à trois, exprimée par la diminution correspondante dans l’indicateur sur les contrats temporaires (Graphique 3.13, partie B). La possibilité de dérogation aux restrictions sur le recours à l’emploi temporaire dans le cas des conventions collectives, introduite par les ordonnances de 2017, pourrait encore faciliter le recours aux contrats à durée déterminée à l’avenir, à mesure de la signature et de la prolongation de nouvelles conventions.

Quatre autres pays ont allégé les restrictions sur l’embauche de travailleurs temporaires. En Norvège, depuis juillet 2015, les entreprises peuvent utiliser des contrats à durée déterminée sans restrictions sur les raisons, pour un maximum de 12 mois et à condition que ces contrats ne concernent pas plus de 15 % de l’effectif. La Turquie, où le travail en intérim était interdit, a introduit cette forme de travail en 2016 dans des secteurs particuliers et pour des raisons particulières. La Belgique et l’Espagne ont étendu l’utilisation des contrats d’intérim en 2013. Les réformes menées en Norvège et en Turquie ont considérablement allégé les restrictions sur le travail temporaire, comme en témoigne l’indicateur, tandis que la Belgique et l’Espagne n’enregistrent qu’une faible diminution du degré évalué de restrictions sur l’emploi temporaire (Graphique 3.13, partie B).

Plusieurs pays ont introduit une durée cumulée maximum légale des contrats à durée déterminée ou des missions d’intérim : 33 mois pour les contrats à durée déterminée en Pologne (février 2016), 18 mois pour les missions d’intérim en Allemagne (avril 2017) et 24 mois pour les missions d’intérim en République slovaque (mars 2015). Au Japon, la révision de 2013 de la loi sur les contrats de travail a permis aux travailleurs sous contrat à durée déterminée depuis au moins cinq ans de le faire passer en contrat permanent. Ces évolutions ont entraîné des augmentations modestes, mais visibles dans l’indicateur (Graphique 3.13, partie B)37.

En Italie, les réformes ont initialement assoupli, puis durci, les restrictions sur l’emploi temporaire. Le décret Poletti de mars 2014 supprimait l’obligation de justifier le recours aux contrats à durée déterminée et autorisait cinq renouvellements successifs (à condition que ces contrats ne dépassent pas 20 % du nombre de contrats à durée indéterminée dans les entreprises de plus de cinq travailleurs). Le décret autorisait aussi le recours aux contrats d’intérim sans justification. La réforme de juillet 2018 a toutefois rétabli, voire renforcé, l’obligation de justifier le recours à un contrat à durée déterminée pendant plus de 12 mois. Des renouvellements (trois au maximum) ne pouvant pas dépasser 24 mois sont autorisés pour répondre à des besoins temporaires et objectifs ou pour remplacer certains travailleurs. Le recours aux contrats d’intérim a été soumis aux mêmes conditions quant aux motifs et à la durée. Ces changements d’orientation expliquent pourquoi, de tous les pays, l’Italie affiche la plus forte hausse des restrictions sur l’emploi temporaire pendant la période de 2013 à 2019 (Graphique 3.13, partie B). Les restrictions de l’utilisation de contrats à durée déterminée et de contrats d’intérim expliquent cette augmentation (Graphique 3.15, parties A et B).

Le Danemark a mis en œuvre des restrictions comparables en juillet 2013, en conditionnant l’emploi temporaire à des raisons objectives. Cependant, cette réforme concerne exclusivement les renouvellements de contrats d’intérim et se traduit donc par une augmentation modeste dans l’indicateur (Graphique 3.13, partie B).

La Belgique et les Pays-Bas ont engagé de grandes réformes de la protection de l’emploi pour harmoniser la réglementation, soit entre les différentes catégories de travailleurs (manuels et intellectuels en Belgique) soit entre les différents types de licenciements (par le biais du service public de l’emploi ou du tribunal du travail aux Pays-Bas).

La réforme de janvier 2014 en Belgique a introduit un statut unique pour abolir les différences de réglementation entre travailleurs manuels et travailleurs intellectuels, jugées discriminatoires et donc anticonstitutionnelles par la Cour constitutionnelle.

En harmonisant la durée du délai préalable à la prise d’effet du licenciement (délai avant notification et délai de préavis) et les indemnités de licenciement, la réforme a renforcé la protection des ouvriers manuels tout en réduisant celle des travailleurs intellectuels. Elle a également harmonisé la définition d’un licenciement abusif individuel, ainsi que le déroulement et les conséquences de la procédure en cas de licenciement abusif. En particulier, la charge de la preuve est invariablement partagée entre les parties (elle pesait autrefois sur le salarié dans les cas de licenciement de travailleurs intellectuels) et l’indemnisation accordée pour un licenciement abusif est désormais alignée sur celle, moindre, précédemment accordée aux travailleurs manuels. Par ailleurs, la cause du licenciement doit désormais être indiquée à la demande du salarié. La réforme a également aboli la période d’essai et élargi l’utilisation des régimes d’accompagnement (services fournis par l’employeur pour aider les travailleurs licenciés à trouver un nouvel emploi) à la suite d’un licenciement individuel, autrefois réservés aux travailleurs ayant atteint un certain âge. Depuis décembre 2016, le nouveau « programme de réintégration » poursuit la tendance au renforcement de la protection, en veillant à ce que les travailleurs ayant une invalidité de longue durée soient reclassés à des postes adaptés.

Ces modifications de la réglementation ont considérablement durci les règles applicables aux licenciements, mesurée par les indicateurs (Graphique 3.13, partie A). Ce constat s’explique principalement par la nouvelle obligation de motiver un licenciement dans la procédure de notification, ainsi que par l’élimination de la période d’essai pendant laquelle les travailleurs ne disposaient d’aucun recours légal contre les licenciements abusifs. Le basculement partiel de la charge de la preuve vers l’employeur dans les cas de licenciement abusif de travailleurs intellectuels entre lui aussi en jeu (Graphique 3.14, parties A, C et D).

La loi sur le travail et la sécurité aux Pays-Bas comporte plusieurs réformes du marché du travail pour simplifier la législation relative aux licenciements. Depuis juillet 2015, les employeurs ne peuvent plus choisir la procédure de licenciement (par le biais du service public de l’emploi ou du tribunal de sous-district) ; elle est désormais déterminée par la motivation du licenciement (le service public de l’emploi prend en charge les licenciements pour motif économique ou invalidité de longue durée). Ces deux procédures sont par ailleurs désormais plus proches l’une de l’autre : le délai de préavis est étendu à la rupture de contrat par le biais du tribunal de sous-district et les indemnités de licenciement (l’« indemnité de transition ») à la rupture de contrat par le biais du service public de l’emploi, y compris pour les licenciements collectifs.

L’élargissement du délai de préavis et des indemnités de licenciement à toutes les procédures de licenciement, et celui des indemnités de licenciement aux licenciements collectifs, expliquent en grande partie l’augmentation sensible dans l’indicateur pour les travailleurs réguliers (Graphique 3.13, partie A et Graphique 3.14, parties A, B, E et F)38. La loi sur le travail et la sécurité durcit également les restrictions sur l’emploi temporaire en réduisant la durée maximum cumulée des contrats à durée déterminée successifs, de trois à deux ans, entraînant une légère augmentation dans l’indicateur pour les travailleurs temporaires (Graphique 3.13, partie B).

Les réformes de la protection de l’emploi peuvent réduire la dualité du marché du travail entre emplois stables et emplois précaires en diminuant l’intérêt pour les entreprises de remplacer les contrats réguliers par des contrats temporaires. Il en est ainsi, par exemple, des réformes qui limitent les cas légitimes de recours à l’emploi temporaire, comme en Italie en 2018. Les mesures de politique publique visant à réduire la dualité du marché ne s’arrêtent pas à l’imposition de restrictions sur le recours à l’emploi temporaire. En particulier, elles supposent souvent l’harmonisation des contributions sociales et des conditions de travail entre contrats temporaires et contrats permanents. Ces changements, pour la plupart, n’entrent pas dans le champ des indicateurs39. Par exemple, la nouvelle loi sur les relations d’emploi en Slovénie a introduit des indemnités de licenciement et des contributions de sécurité sociale supplémentaires pour les contrats à durée déterminée. Un autre exemple est celui des Pays-Bas, où la loi sur l’équilibre du marché du travail, entrée en vigueur en janvier 2020, a augmenté la part de la cotisation d’assurance chômage à la charge de l’employeur pour les contrats à durée déterminée40.

La législation sur la protection de l’emploi fait largement débat et, comme l’a montré ce chapitre, les administrations des pays de l’OCDE adaptent continuellement leur réglementation en la matière. Entre 2013 et 2019, 21 des 37 pays de l’OCDE ont mené une ou plusieurs réformes de la protection de l’emploi, dont témoigne l’évolution des indicateurs de l’OCDE dans ce domaine. Les politiques publiques relatives aux licenciements et à l’embauche supposent un compromis fondamental entre sécurité de l’emploi des actifs occupés et adaptabilité des entreprises aux variations de la demande ou aux progrès technologiques. En comparant la législation en matière de protection de l’emploi dans les pays de l’OCDE, ce chapitre fait ressortir l’importance relative que les différents systèmes attachent à ces deux aspirations. Les données descriptives présentées dans ce chapitre et les nouveaux indicateurs dans la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi peuvent être utilisés pour approfondir l’analyse comparative de l’efficacité des modèles de protection de l’emploi41.

Le chapitre donne une description détaillée de la réglementation des licenciements de travailleurs réguliers et de la réglementation de l’embauche de travailleurs temporaires dans les pays de l’OCDE, deux sujets d’un intérêt particulier dans le contexte actuel, face au risque élevé de licenciement et aux faibles chances d’embauche. Des travaux ultérieurs s’intéresseront de plus près à la réglementation appliquée aux licenciements de travailleurs sous contrats à durée déterminée et à l’expiration de ces contrats, étudieront le sort des travailleurs temporaires pendant la crise du COVID-19 et étendront la mise à jour de la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi à plusieurs pays non membres de l’OCDE. En couvrant un plus grand nombre de pays et en améliorant les comparaisons de la protection de l’emploi des travailleurs réguliers, de la protection de l’emploi des travailleurs temporaires et des différences entre les deux, l’Organisation ambitionne de faire de ce travail la ressource la plus utile pour les responsables publics et les citoyens au moment de décider de la forme à donner à la protection de l’emploi pour les années à venir.

Références

[81] Acharya, V., R. Baghai and K. Subramanian (2014), “Wrongful discharge laws and innovation”, Review of Financial Studies, Vol. 27/1, pp. 301-346.

[72] Andrews, D., M. Adalet McGowan and V. Millot (2017), “Confronting the zombies  : Policies for productivity revival”, OECD Economic Policy Papers, No. 21, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/f14fd801-en.

[34] Andrews, D. and F. Cingano (2014), “Public policy and resource allocation: Evidence from firms in OECD countries”, Economic Policy, Vol. 29/78, pp. 253-296.

[16] Autor, D., J. Donohue and S. Schwab (2006), “The costs of wrongful-discharge laws”, Review of Economics and Statistics, Vol. 88/2, pp. 211-231.

[37] Autor, D., W. Kerr and A. Kugler (2007), “Does employment protection reduce productivity? Evidence from US states”, Economic Journal, Vol. 117/521, pp. F189-F217.

[38] Bai, J., D. Fairhurst and M. Serfling (2020), “Employment protection, investment, and firm growth”, Review of Financial Studies, Vol. 33/2, pp. 644-688.

[41] Bartelsman, E., P. Gautier and J. De Wind (2016), “Employment protection, technology choice, and worker allocation”, International Economic Review, Vol. 57/3, pp. 787-826.

[9] Bassanini, A. and E. Caroli (2015), “Is work bad for health? The role of constraint versus choice”, Annals of Economics and Statistics 119/120, pp. 13-37.

[32] Bassanini, A. and F. Cingano (2019), “Before it gets better: The short-term employment costs of regulatory reforms”, Industrial and Labor Relations Review, Vol. 72/1, pp. 127-157.

[25] Bassanini, A. and A. Garnero (2013), “Dismissal protection and worker flows in OECD countries: Evidence from cross-country/cross-industry data”, Labour Economics, Vol. 21/C, pp. 25-41.

[42] Bassanini, A., L. Nunziata and D. Venn (2009), “Job protection legislation and productivity growth in OECD countries”, Economic Policy, Vol. 24/58, pp. 349-402.

[64] Batut, C. and E. Maurin (2019), “From ultima ratio to mutual consent: The effects of changing employment protection doctrine”, IZA Discussion Papers, No. 12440.

[12] Bentolila, S. and G. Bertola (1990), “Firing costs and labour demand: How bad is Eurosclerosis?”, Review of Economic Studies, Vol. 57/3, pp. 381-402.

[43] Bjuggren, C. (2018), “Employment protection and labor productivity”, Journal of Public Economics, Vol. 157(C), pp. 138-157.

[27] Boeri, T. (2011), “Institutional reforms and dualism in European labor markets”, Handbook of Labor Economics, Card, D. and O. Ashenfelter (eds.), North Holland, Amsterdam.

[63] Boeri, T., P. Garibaldi and E. Moen (2017), “Inside severance pay”, Journal of Public Economics, Vol. 145/C, pp. 211-225.

[17] Boeri, T. and J. Jimeno (2005), “The effects of employment protection: Learning from variable enforcement”, European Economic Review, Vol. 49/8, pp. 2057-2077.

[76] Boeri, T. and J. van Ours (2013), The Economics of Imperfect Labor Markets, Princeton University Press, Princeton.

[35] Bottasso, A., M. Conti and G. Sulis (2017), “Firm dynamics and employment protection: Evidence from sectoral data”, Labour Economics, Vol. 48(C), pp. 35-53.

[36] Bravo-Biosca, A., C. Criscuolo and C. Menon (2016), “What drives the dynamics of business growth?”, Economic Policy, Vol. 31/88, pp. 703-742.

[8] Cahuc, P., S. Carcillo and A. Zylberberg (2014), Labor Economics, MIT Press, Cambridge, MA.

[55] Cahuc, P., O. Charlot and F. Malherbet (2016), “Explaining the spread of temporary jobs and its impact on labor turnover”, International Economic Review, Vol. 57/2, pp. 533-572.

[29] Cahuc, P., F. Malherbet and J. Prat (2019), “The detrimental effect of job protection on employment: Evidence from France”, IZA Discussion Papers, No. 12384.

[67] Campolieti, M. and C. Riddell (2020), “Does mediation-arbitration reduce arbitration rates? Evidence from a natural experiment”, Industrial and Labor Relations Review, Vol. 73/1, pp. 211-235.

[82] Campos, N. and J. Nugent (2018), “The dynamics of the regulation of labour in developing and developed countries since 1960”, The Political Economy of Structural Reforms in Europe, Campos, N., P. De Grauwe and Y. Ji (eds.), Oxford University Press, Oxford.

[74] Carcillo, S. et al. (2019), Assessing recent reforms and policy directions in France : Implementing the OECD Jobs Strategy, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/657a0b54-en.

[51] Centeno, M. and Á. Novo (2012), “Excess worker turnover and fixed-term contracts: Causal evidence in a two-tier system”, Labour Economics, Vol. 19/3, pp. 320-328.

[46] Ciminelli, G., R. Duval and D. Furceri (2018), “Employment protection deregulation and labor shares in advanced economies”, IMF Working Papers, No. 18/186.

[80] Ciminelli, G. and D. Furceri (2020), “A new database of employment protection legislation”, Unpublished manuscript.

[40] Cingano, F. et al. (2016), “Employment protection legislation, capital investment and access to credit: Evidence from Italy”, Economic Journal, Vol. 126/595, pp. 1798-1822.

[39] Cingano, F. et al. (2010), “The effects of employment protection legislation and financial market imperfections on investment: Evidence from a firm-level panel of EU countries”, Economic Policy, Vol. 25/61, pp. 117-163.

[56] Damiani, M., F. Pompei and A. Ricci (2016), “Temporary employment protection and productivity growth in EU economies”, International Labour Review, Vol. 155/4, pp. 587-622.

[62] Denk, O. and A. Georgieff (forthcoming), “The 2019 OECD Employment Protection Legislation indicators: New insights on job dismissal regulation in OECD countries”, OECD Social, Employment and Migration Working Papers, forthcoming, OECD Publishing, Paris.

[57] Dolado, J., S. Ortigueira and R. Stucchi (2016), “Does dual employment protection affect TFP? Evidence from Spanish manufacturing firms”, SERIEs: Journal of the Spanish Economic Association, Vol. 7/4, pp. 421-459.

[78] Duval, R. et al. (2018), “A narrative database of major labor and product market reforms in advanced economies”, IMF Working Papers, No. 18/19.

[65] Espinosa, R., C. Desrieux and M. Ferracci (2018), “Labor market and access to justice”, International Review of Law and Economics, Vol. 54, pp. 1-16.

[68] Espinosa, R., C. Desrieux and H. Wan (2017), “Fewer courts, less justice? Evidence from the 2008 French reform of labor courts”, European Journal of Law and Economics, Vol. 43/2, pp. 195-237.

[47] Falk, A., D. Huffman and W. Macleod (2015), “Institutions and contract enforcement”, Journal of Labor Economics, Vol. 33/3, pp. 571-590.

[69] Fraisse, H., F. Kramarz and C. Prost (2015), “Labor disputes and job flows”, Industrial and Labor Relations Review, Vol. 68/5, pp. 1043-1077.

[30] García Pérez, J. and V. Osuna (2014), “Dual labour markets and the tenure distribution: Reducing severance pay or introducing a single contract”, Labour Economics, Vol. 29, pp. 1-13.

[58] García-Pérez, J., I. Marinescu and J. Vall Castello (2018), “Can fixed-term contracts put low skilled youth on a better career path? Evidence from Spain”, Economic Journal, Vol. 129/620, pp. 1693-1730.

[13] Garibaldi, P. (1998), “Job flow dynamics and firing restrictions”, European Economic Review, Vol. 42/2, pp. 245-275.

[66] Gianfreda, G. and G. Vallanti (2017), “Institutions’ and firms’ adjustments: Measuring the impact of courts’ delays on job flows and productivity”, Journal of Law and Economics, Vol. 60/1, pp. 135-172.

[18] Gielen, A. and K. Tatsiramos (2012), “Quit behavior and the role of job protection”, Labour Economics, Vol. 19/4, pp. 624-632.

[44] Griffith, R. and G. Macartney (2014), “Employment protection legislation, multinational firms, and innovation”, Review of Economics and Statistics, Vol. 96/1, pp. 135-150.

[3] Grubb, D. and W. Wells (1993), “Employment regulation and patterns of work in EC countries”, OECD Economic Studies, Vol. 21, pp. 7-58, http://www.oecd.org/economy/growth/33942847.pdf.

[19] Haltiwanger, J., S. Scarpetta and H. Schweiger (2014), “Cross country differences in job reallocation: The role of industry, firm size and regulations”, Labour Economics, Vol. 26/C, pp. 11-25.

[52] Hijzen, A., L. Mondauto and S. Scarpetta (2017), “The impact of employment protection on temporary employment: Evidence from a regression discontinuity design”, Labour Economics, Vol. 46, pp. 64-76.

[70] Ichino, A., M. Polo and E. Rettore (2003), “Are judges biased by labor market conditions?”, European Economic Review, Vol. 47/5, pp. 913-944.

[83] Ichino, A. and R. Riphahn (2005), “The Effect of Employment Protection on Worker Effort: Absenteeism during and after Probation”, Journal of the European Economic Association, Vol. 3/1, pp. 120-143, https://doi.org/10.1162/1542476053295296.

[79] ILO (2015), Employment Protection Legislation: Summary Indicators in the Area of Terminating Regular Contracts (Individual Dismissals), International Labour Office, Geneva.

[71] Immervoll, H. and C. Knotz (2018), How demanding are activation requirements for jobseekers, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/2bdfecca-en.

[53] Kahn, L. (2010), “Employment protection reforms, employment and the incidence of temporary jobs in Europe: 1996-2001”, Labour Economics, Vol. 17/1, pp. 1-15.

[48] Leonardi, M. and G. Pica (2013), “Who pays for it? The heterogeneous wage effects of employment protection legislation”, Economic Journal, Vol. 123/573, pp. 1236-1278.

[20] Marinescu, I. (2009), “Job security legislation and job duration: Evidence from the United Kingdom”, Journal of Labor Economics, Vol. 27/3, pp. 465-486.

[28] Martin, J. and S. Scarpetta (2012), “Setting it right: Employment protection, labour reallocation and productivity”, De Economist, Vol. 160/2, pp. 89-116.

[49] Martins, P. (2009), “Dismissals for cause: The difference that just eight paragraphs can make”, Journal of Labor Economics, Vol. 27/2, pp. 257-279.

[31] Messina, J. and G. Vallanti (2007), “Job flow dynamics and firing restrictions: Evidence from Europe”, Economic Journal, Vol. 117/521, pp. F279-F301.

[21] Micco, A. and C. Pagés (2006), “The economic effects of employment protection: Evidence from international industry-level data”, IZA Discussion Papers, No. 2433.

[22] Millán, A. et al. (2013), “How does employment protection legislation influence hiring and firing decisions by the smallest firms?”, Economics Letters, Vol. 121/3, pp. 444-448.

[14] Mortensen, D. and C. Pissarides (1994), “Job creation and job destruction in the theory of unemployment”, Review of Economic Studies, Vol. 61/3, pp. 397-415.

[45] Murphy, G., I. Siedschlag and J. McQuinn (2017), “Employment protection and industry innovation”, Industrial and Corporate Change, Vol. 26/3, pp. 379-398.

[10] Neal, D. (1995), “Industry-specific human capital: Evidence from displaced workers”, Journal of Labor Economics, Vol. 13/4, pp. 653-677.

[15] Nickell, S. (1978), “Fixed costs, employment and labour demand over the cycle”, Economica, Vol. 45/180, pp. 329-345.

[26] OCDE (2019), Des emplois de qualité pour tous dans un monde du travail en mutation : La stratégie de l’OCDE pour l’emploi, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/4e6a92fa-fr.

[11] OCDE (2019), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2018, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/g2g9ed68-fr.

[54] OCDE (2017), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2017, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2017-fr.

[33] OCDE (2016), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2016, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2016-fr.

[60] OCDE (2014), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2014, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2014-fr.

[6] OCDE (2013), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2013, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2013-fr.

[59] OCDE (2012), Toujours plus d’inégalité : Pourquoi les écarts de revenus se creusent, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264119550-fr.

[23] OCDE (2010), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2010 : Sortir de la crise de l’emploi, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2010-fr.

[5] OCDE (2004), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2004, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2004-fr.

[4] OCDE (1999), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 1999 : juin, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-1999-fr.

[75] OECD (2018), OECD Reviews of Labour Market and Social Policies: Lithuania, OECD Reviews of Labour Market and Social Policies, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264189935-en.

[1] Pissarides, C. (2010), “Why do firms offer ‘employment protection’?”, Economica, Vol. 77/308, pp. 616-636.

[61] Ruiz-Valenzuela, J. (2020), “Intergenerational effects of employment protection reforms”, Labour Economics, Vol. 62.

[77] Saint-Paul, G. (2014), Frictions and Institutions, Bookboon, London.

[24] Salvanes, K. (1997), “Market rigidities and labour market flexibility: An international comparison”, Scandinavian Journal of Economics, Vol. 99/2, pp. 315-333.

[2] Scarpetta, S. (2014), “Employment protection”, IZA World of Labor, No. 12.

[73] Söderqvist, F. and M. Lindberg (2019), “A technical note on improving the granularity and scope of the OECD EPL Index”, Paper presented at the OECD Expert Workshop on employment protection legislation, Paris, 27 June 2019.

[84] Turrini, A. et al. (2015), “A decade of labour market reforms in the EU: Insights from the LABREF database”, IZA Journal of Labor Policy, Vol. 4/12.

[50] van der Wiel, K. (2010), “Better protected, better paid: Evidence on how employment protection affects wages”, Labour Economics, Vol. 17/1, pp. 16-26.

[7] Venn, D. (2009), “Legislation, Collective Bargaining and Enforcement : Updating the OECD Employment Protection Indicators”, OECD Social, Employment and Migration Working Papers, No. 89, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/223334316804.

Notes

← 1. On trouvera des synthèses des principaux cadres théoriques dans divers ouvrages scientifiques, dont Boeri et van Ours (2013[76]), Cahuc, Carcillo et Zylberberg (2014[8]) et Saint-Paul (2014[77]).

← 2. La protection de l’emploi en fonction de l’ancienneté a toutefois tendance à être efficace dans le cas d’emplois demandant un investissement continu particulier à l’entreprise de la part des travailleurs (Boeri, Garibaldi and Moen, 2017[63]).

← 3. À l’exception notable d’Acharya, Baghai et Subramanian (2014[81]) qui mettent en évidence que, dans le cas des États-Unis, l’adoption de lois pour empêcher les licenciements abusifs a stimulé l’innovation.

← 4. On observe néanmoins que les contrats à durée déterminée motivent les travailleurs à s’investir davantage s’ils pensent avoir de fortes chances de passer d’un contrat à durée déterminée à un contrat à durée indéterminée (Ichino and Riphahn, 2005[83]).

← 5. Les informations et les données recueillies pour la Base de données de l’OCDE sur la protection de l’emploi sont le fruit d’une importante collaboration entre les ministères du Travail des pays de l’OCDE et le Secrétariat de l’OCDE. Ce dernier demeure toutefois seul responsable des indicateurs. Le projet a également bénéficié des observations et suggestions perspicaces d’un groupe d’universitaires et d’experts du domaine.

← 6. Il serait intéressant, dans le cadre de recherches futures, d’évaluer la protection de l’emploi dans le secteur public et de la comparer à la protection de l’emploi dans le secteur privé.

← 7. La seule exception est la catégorie « préavis et indemnités de licenciement », dans laquelle les indemnités de licenciement pèsent légèrement plus (4/7) que le préavis (3/7). La raison en est que les travailleurs peuvent encore contribuer à la production de l’entreprise pendant leur période de préavis. Par conséquent, le coût net d’un mois d’indemnités de licenciement est plus élevé pour l’entreprise que le coût d’un mois de préavis. Pourtant, le préavis peut mieux protéger les travailleurs que les indemnités de licenciement, en particulier si un dispositif d’accompagnement rapide des services publics de l’emploi est en place (OCDE, 2019[11]).

← 8. La durée de la période d’essai est prise en compte uniquement dans l’indicateur sur la protection de l’emploi concernant les licenciements individuels, et pas dans l’indicateur concernant les licenciements collectifs, car les périodes d’essai sont toujours associées à un travailleur individuel.

← 9. Cela n’est pas le cas pour l’indicateur sur la protection de l’emploi dans le cas des licenciements collectifs, parce que seul le motif économique est recevable dans le cas des licenciements collectifs.

← 10. Comme indiqué, en présence de différences en fonction de la taille de l’entreprise, la valeur enregistrée correspond à la moyenne des valeurs pour une entreprise de 35, 150 et 350 salariés. L’indicateur relatif aux licenciements collectifs est basé sur la moyenne des trois tailles d’entreprise pour 10 licenciements, des deux plus grandes tailles d’entreprise pour 45 licenciements et de la plus grande taille d’entreprise pour 120 licenciements.

← 11. Étant donné que 120 est un chiffre qui dépasse le seuil de licenciements dans tous les pays dotés d’une législation spécifique sur les licenciements collectifs (mais pas 10 et 45), les différences réglementaires entre les licenciements individuels et collectifs sont intégrées dans l’indicateur relatif aux licenciements collectifs et un poids minimum d’environ un tiers leur est accordé.

← 12. D’autres ont choisi de se concentrer sur les réformes de la protection de l’emploi. Duval et al. (2018[78]) compilent une base de données des grandes réformes dans ce domaine avec une variable de réforme de 0-1, qui porte sur 26 économies avancées pendant la période de 1970 à 2015. La base de données sur les réformes du marché du travail (LABREF) de la Commission européenne est axée sur le suivi qualitatif des réformes de la protection de l’emploi dans les 27 pays de l’UE depuis 2000 (Turrini et al., 2015[84]).

← 13. D’autres chercheurs ont élaboré leur propre base de données, dont Campos et Nugent (2018[82]) et Ciminelli et Furceri (2020[80]).

← 14. OIT (2015[79]) fait ressortir une forte corrélation entre l’indicateur de l’OCDE sur la protection des travailleurs réguliers contre les licenciements individuels et l’EPLex (coefficient de corrélation de 0.81). Les calculs de l’OCDE indiquent une corrélation significative, bien que moindre, avec un indicateur CBR-LRI construit axé sur la réglementation des licenciements (0.66).

← 15. Les indicateurs CBR-LRI et ceux de Doing Business vont bien plus loin que la protection de l’emploi, qui n’est que l’un des axes d’examen de la couverture institutionnelle de ces bases de données.

← 16. Les États-Unis enregistrent un nombre croissant de cas dans lesquels les salariés engagent un recours pour licenciement abusif en faisant valoir que le licenciement est basé sur un « contrat implicite » d’emploi continu (malgré l’absence de contrat officiel), parce que certaines assurances d’emploi continu ont été formulées. La probabilité de réussir à faire valoir l’existence d’un « contrat implicite » augmente avec l’ancienneté et sera probablement extrêmement faible ou nulle pour les salariés n’ayant que quelques années d’ancienneté.

← 17. En Suède, la règle stricte du dernier embauché, premier licencié s’applique sauf conventions collectives contraires (voir Encadré 3.2).

← 18. Par exemple, il existe en Pologne un type particulier de contrat à durée déterminée qui, dans la pratique, sert de période d’essai. La Belgique autorise l’utilisation du travail en intérim pour l’« insertion », c’est-à-dire l’embauche en contrat à durée indéterminée pour le même emploi après la mission.

← 19. Aux États-Unis, le délai de prescription dans une situation de « contrat implicite » dépend de l’État, mais il est généralement très long (par exemple, quatre ans en Californie et six ans à New York).

← 20. Aux États-Unis, lorsqu’un employeur propose des départs volontaires, mais a l’intention d’imposer des licenciements en cas de nombre insuffisant de volontaires, les salariés qui optent pour le départ volontaire peuvent avoir droit aux indemnités de chômage.

← 21. Dans les régressions internationales de l’indicateur synthétique sur les quatre grandes catégories (individuellement), la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs est en corrélation positive avec l’indicateur synthétique, mais pas de manière statistiquement significative. La corrélation positive entre les trois autres catégories et l’indicateur synthétique est statistiquement significative au seuil de 1 %. La valeur estimée est aussi nettement plus basse pour la mise en application de la réglementation relative aux licenciements abusifs que pour les trois autres catégories.

← 22. Les corrélations négatives dans les comparaisons par paires ne sont pas statistiquement significatives. Dans le droit fil des raisons données, la corrélation négative est plus prononcée entre la mise en application et les catégories « contraintes de procédure » et « cadre réglementaire relatif aux licenciements abusifs ».

← 23. Cela n’est le cas qu’aux Pays-Bas et, dans une certaine mesure, en Allemagne et en Suède s’agissant des licenciements individuels, mais d’autres pays exigent eux aussi une autorisation préalable pour les licenciements collectifs, qui peut servir de validation en aval.

← 24. Bien que des notifications supplémentaires soient obligatoires en Israël (au bureau des services de l’emploi) et en Corée (au ministère du Travail), elles n’imposent pas d’importantes contraintes supplémentaires aux entreprises et n’apparaissent donc pas dans les indicateurs.

← 25. Les indicateurs évaluent la réglementation des licenciements collectifs en fonction du degré de rigueur qui serait applicable à un travailleur si ce dernier était licencié dans le cadre d’un licenciement collectif. Cette définition ignore la répartition des coûts (en particulier de procédure) fixes sur plusieurs travailleurs, mais il reste à savoir comment les indicateurs pourraient être conçus de sorte à tenir compte, de manière pragmatique, du possible élément de coût fixe que représentent certains aspects liés à la réglementation des licenciements.

← 26. Il s’agit du Canada et des États-Unis pour l’Amérique du Nord, et de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande dans le cas de l’Australasie.

← 27. Elles peuvent aussi intervenir dans les restrictions sur le recours aux contrats temporaires (France, Italie, Pays-Bas, Suède).

← 28. Ces calculs correspondent à l’ensemble de l’économie des entreprises et reposent sur la Base de données de l’OCDE des Statistiques structurelles et démographiques des entreprises.

← 29. À l’inverse, la définition plus précise des causes économiques légitimes du licenciement pour motif économique n’a eu qu’un effet négligeable ; elle limite la liberté des juges de déclarer un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais cela ne représente qu’un sixième de la note pour le sous-critère « Définition du licenciement abusif ». Par ailleurs, le nouveau barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse ne réduit pas suffisamment les indemnités pour être traduit dans les indicateurs. Enfin, l’introduction de la rupture conventionnelle collective n’a pas non plus modifié les indicateurs, dans la mesure où elle ne fait que formaliser les plans de départ volontaire en place, qui ouvraient déjà droit aux indemnités de chômage.

← 30. Initialement, le « Jobs Act » fixait un barème d’indemnisation de deux mois de salaire par année d’ancienneté en cas de licenciement abusif dans ces catégories. La Cour constitutionnelle a toutefois rejeté ce barème dans une décision de novembre 2018. Les indicateurs ne rendent pas compte de ce changement temporaire, car il est difficile d’évaluer dans quelle mesure le barème a été appliqué et pendant combien de temps. Ils traduisent toutefois la nouvelle fourchette d’indemnités possibles, qui se situent désormais entre 6 et 36 mois de salaire, à comparer avec 12 et 24 mois avant le « Jobs Act ». La hausse correspondante dans les indicateurs atténue l’effet baissier exercé par le « Jobs Act ».

← 31. La contribution de l’employeur était plus élevée dans le cas de l’utilisation de la Cassa Integrazione Guadagni (le régime italien de travail de courte durée) avant le licenciement collectif.

← 32. Les changements de délai de préavis et d’indemnités de licenciement causés par les différentes mesures de réforme, y compris l’introduction du licenciement à discrétion de l’employeur, se compensent parfaitement dans les indicateurs, de telle sorte qu’aucune évolution n’apparaît pour le critère « préavis et indemnités de licenciement » (Graphique 3.14, Partie B).

← 33. En mai 2014, les obligations de tentative de reclassement avant licenciement et de respect des critères du Code du travail pour la sélection de travailleurs à licencier ont été réintroduites (elles avaient été levées en août 2012), en conséquence de la décision de la Cour constitutionnelle de septembre 2013. Les indicateurs ne rendent pas compte de ces changements temporaires, dont l’application est difficile à évaluer.

← 34. En particulier, c’est à l’employeur qu’il incombe de présenter la teneur de toute convention collective ou de tout document interne requis pour se prononcer sur le litige.

← 35. Par ailleurs, une aide aux indemnités de licenciement accordée en cas de licenciements légitimes dans des entreprises de moins de 25 salariés a été supprimée en décembre 2013 (OCDE, 2016[33]).

← 36. En l’absence de dispositifs efficaces de chômage partiel, une protection de l’emploi excessivement rigoureuse risque cependant d’entraîner des faillites et, par conséquent, de ne pas protéger les emplois.

← 37. L’indicateur sur les contrats temporaires au Portugal augmente en raison de l’arrivée à expiration d’un régime extraordinaire de renouvellements applicable aux CDD jusqu’à décembre 2016. Une autre augmentation, de 2.46 à 2.58 s’explique par la réduction de la durée cumulée maximum des CDD entrée en vigueur en septembre 2019.

← 38. Le délai de préavis ne peut commencer qu’à la fin du mois. Par conséquent, l’élargissement du délai de préavis à toutes les procédures de licenciement allonge également le délai avant notification.

← 39. Les indicateurs comportent néanmoins un critère sur l’égalité de traitement des travailleurs réguliers et des intérimaires, qui permet de rendre partiellement compte de ces évolutions. Par exemple, au Québec (Canada), depuis juin 2018, les employeurs ne peuvent plus fixer des salaires différents pour les travailleurs en fonction uniquement de leur statut, et les agences d’intérim sont empêchées de verser des salaires inférieurs à ceux des salariés réguliers à tâches égales. De même, en Islande, depuis 2013, les travailleurs intérimaires doivent recevoir au moins la même rémunération et bénéficier des mêmes dispositifs que les salariés permanents. Aux Pays-Bas, la possibilité de dévier du salaire de base pendant les 26 premières semaines d’une mission d’intérim a été supprimée de la convention collective pour les travailleurs intérimaires. Ces changements expliquent la hausse dans les indicateurs sur le travail en intérim dans ces pays (Graphique 3.15, partie B).

← 40. La loi sur l’équilibre du marché du travail a également facilité les licenciements (les employeurs peuvent désormais combiner des causes personnelles de licenciement qui sont insuffisantes individuellement), harmonisé les indemnités de licenciement des travailleurs permanents et des travailleurs temporaires, modifié les règles de calcul de ces indemnités et al.longé la durée cumulée maximum des contrats à durée déterminée. La réforme est sans effet sur l’indicateur de protection des travailleurs réguliers, parce que celui-ci ne rend pas compte de la possibilité de combiner plusieurs motifs individuellement insuffisants et parce que les changements d’indemnités de licenciement à l’ancienneté s’annulent mutuellement. La réforme a toutefois fait baisser l’indicateur pour les travailleurs temporaires de 1.48 à 1.23.

← 41. Ce chapitre s’intéresse aux évolutions depuis 2013. Les chercheurs et autres utilisateurs intéressés par une série chronologique complète des données et informations disponibles depuis 1985 les trouveront sur le site dédié (http://oe.cd/epl). À partir de ces données, Denk et Georgieff (forthcoming[62]) décrivent des séries chronologiques longues pour la protection de l’emploi.

Mentions légales et droits

Ce document, ainsi que les données et cartes qu’il peut comprendre, sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de tout territoire, ville ou région. Des extraits de publications sont susceptibles de faire l'objet d'avertissements supplémentaires, qui sont inclus dans la version complète de la publication, disponible sous le lien fourni à cet effet.

© OCDE 2020

L’utilisation de ce contenu, qu’il soit numérique ou imprimé, est régie par les conditions d’utilisation suivantes : http://www.oecd.org/fr/conditionsdutilisation.