15. Indonésie

En Indonésie, le soutien à l’agriculture ne représentait plus que 8 % des recettes agricoles brutes en 2020-22, contre 26.2 % à son plus haut niveau, en 2015. Sa composante majoritaire est le soutien des prix du marché (SPM) perçus par les producteurs, conformément à la politique du gouvernement, qui met l’accent sur la souveraineté alimentaire et l’autosuffisance. Les prix perçus par les agriculteurs étaient en moyenne 4 % supérieurs aux prix des marchés mondiaux. Pour les produits de base visés par les programmes d’autosuffisance (sucre, maïs, volaille, riz et œufs, par exemple), les transferts au titre d’un seul produit étaient particulièrement élevés et représentaient au moins 22 % des recettes agricoles brutes.

La part des transferts aux producteurs susceptibles de créer le plus de distorsions s’est élevée à 93 % en 2020-22, ce qui reflète le poids du SPM dans la panoplie de mesures de l’Indonésie (notamment un important soutien négatif des prix lié à l’augmentation des droits d’exportation frappant l’huile de palme), mais aussi des paiements au titre de l’utilisation d’intrants variables non assortie de contraintes (en particulier les engrais).

Le programme d’aide alimentaire de l’Indonésie (BPNT) soutient les consommateurs pauvres en leur distribuant des bons d’achat électroniques. Toutefois, ce transfert budgétaire est inférieur aux transferts des consommateurs aux producteurs découlant des mesures de soutien des prix. Les consommateurs sont donc pénalisés par la politique agricole, avec une estimation du soutien aux consommateurs représentant -14.2 % des dépenses de consommation, mesurée au départ de l’exploitation.

Les dépenses au titre des services d’intérêt général (estimation du soutien aux services d’intérêt général, ESSG) sont principalement consacrées aux infrastructures d’irrigation et au stockage public, et sont d’un faible niveau par rapport au soutien aux producteurs, puisqu’elles ne représentent que 10 % de l’estimation du soutien total (EST). L’ESSG représente 1.1 % de la valeur de la production agricole, en deçà des autres économies émergentes telles que la Chine ou l’Inde. L’EST a diminué, passant de 1.5 % à 1.1 % du produit intérieur brut (PIB) au cours des vingt dernières années. Toutefois, ce déclin s’explique par une augmentation du SPM négatif pour certains produits (en particulier l’huile de palme), alors que le soutien positif au secteur est passé de 1.8 % à 2.2 % du PIB au cours de la même période.

En réaction à la hausse mondiale des prix, le gouvernement a adapté son programme de subventions aux engrais. Cette politique a pour objectif d’aider les agriculteurs pauvres et d’augmenter la productivité, mais elle a entraîné un écart de prix croissant entre les engrais subventionnés et les engrais non subventionnés, remettant en question son application. Le seuil de prix maximum pour les engrais subventionnés a été relevé, en partie pour suivre la tendance des marchés mondiaux. En outre, le programme de subventions, qui concernait l’ensemble des engrais et 70 produits jusqu’en 2021, a été restreint à seulement trois types d’engrais et neuf produits en 2022. L’allocation et la distribution des engrais subventionnés font l’objet d’un contrôle plus strict de la part des organismes répressifs, qui luttent également contre les engrais de contrefaçon.

Dans une lettre portant sur le renforcement de la sécurité alimentaire et sur l’utilisation de la production intérieure, le ministère de l’Agriculture confirme le rôle stratégique attribué à l’autosuffisance en vue d’assurer la sécurité alimentaire. Il y justifie et promeut la protection douanière à des fins de sécurité alimentaire. Dans la même optique, l’Agence nationale de l’alimentation créée récemment a promulgué une nouvelle réglementation exigeant des réserves alimentaires de l’État qu’elles couvrent 5 % de la consommation intérieure pour 11 produits de base, soit deux fois plus que la cible précédente (2.5 %).

En mai 2022, après plus de 30 ans sans fièvre aphteuse dans le pays, une épidémie s’est déclarée dans la province de Java oriental. Une nouvelle équipe spéciale sur la fièvre aphteuse met en place des mesures de lutte contre l’épidémie, telles que la décontamination, la vaccination et la surveillance renforcée des zones non infectées.

  • Afin de contribuer à la résilience et à l’adaptation du secteur agricole, la nouvelle Agence nationale pour la recherche et l’innovation devrait accorder la priorité à des stratégies d’adaptation de l’agriculture au changement climatique. Il existe déjà des politiques en faveur de l’adoption de nouvelles technologies, mais plutôt que de promouvoir des pratiques particulières, celles-ci devraient aider les agriculteurs à renforcer le plus possible leur capacité d’adaptation, afin que chacun soit incité et apte à rechercher les solutions les mieux adaptées à sa situation. Il conviendrait notamment de renforcer les capacités et les connaissances d’organismes tels que l’Agence de recherche et de développement agricoles, afin de faciliter la collaboration entre chercheurs, consultants et agriculteurs.

  • Pour améliorer la contribution du secteur agricole à la lutte contre le changement climatique, le gouvernement devrait étudier la possibilité d’appliquer à ce secteur la récente loi sur la taxe carbone et les mécanismes de droits d’émission visant les centrales à charbon. L’Indonésie pourrait réduire les émissions du secteur de l’agriculture, de la foresterie et des autres affectations des terres (AFAT) en prenant des mesures favorisant les pratiques agricoles climato-intelligentes, comme celles recensées dans la stratégie à long terme pour la sobriété carbone et la résilience climatique. Une meilleure gestion des terres agricoles permettrait de réduire les émissions en évitant le brûlage et en adoptant des mesures actives de reboisement. Les obligations d’incorporation et les subventions concernant les biocarburants devront être évaluées du point de vue de leurs répercussions négatives potentielles sur l’utilisation des terres et l’accès aux denrées alimentaires.

  • La politique agricole indonésienne mise sur l’autosuffisance et les mesures commerciales pour assurer l’autonomie alimentaire. Cela engendre d’importants écarts de prix entre le marché intérieur et les marchés internationaux pour des produits importés tels que le maïs, la volaille et le riz. L’effet produit ira probablement à l’encontre des objectifs qui sous-tendent la loi sur l’alimentation de 2012, notamment l’accessibilité financière des produits pour les consommateurs pénalisés par un SPM positif, et la diversification de la production et de l’alimentation, compromise par la concentration du soutien sur un nombre limité de produits de base.

  • Les restrictions à l’exportation d’huile de palme brute devraient être progressivement supprimées, car elles entraînent une baisse des prix perçus par les producteurs nationaux, notamment les petits exploitants, et nécessitent des ajustements fréquents. Ce changement de stratégie devrait s’accompagner d’un renforcement de la réglementation contre la déforestation. En 2022, la modification régulière des droits d’exportation et des obligations relatives au marché intérieur a abouti à une incertitude sur les marchés, à l’envoi de signaux contradictoires aux agriculteurs et à la création de goulets d’étranglement dans la chaîne d’approvisionnement.

  • Le système de distribution de bons d’alimentation par voie électronique BPNT, en place depuis 2019, constitue une amélioration notable de l’efficacité du programme d’aide alimentaire. D’autres mesures pourraient être adoptées pour renforcer la sécurité alimentaire, en particulier en combinant la distribution de bons d’achat et la réduction du SPM positif pour les produits de base, qui a des effets néfastes sur les consommateurs nets de produits alimentaires.

  • Les subventions aux engrais sont coûteuses et peuvent favoriser une utilisation inefficace. Pour être efficace et ne pas avoir d’effets préjudiciables sur l’environnement, l’utilisation d’engrais doit être adaptée aux sols et aux conditions de production au niveau local. Le programme de subventions aux engrais n’est pas viable dans un contexte d’augmentation des prix mondiaux des engrais qui entraîne une hausse des coûts budgétaires et peut favoriser la thésaurisation et la contrefaçon. La transformation de ces subventions en versements par unité de surface rendrait le soutien plus efficient en termes de transfert de revenus aux agriculteurs.

  • L’action publique devrait stimuler l’investissement dans les infrastructures et l’innovation. Les économies réalisées grâce à la réduction des subventions aux intrants pourraient être réinvesties dans le système d’innovation agricole indonésien. L’investissement dans le transfert de connaissances et dans l’accompagnement des agriculteurs permettrait d’améliorer les décisions d’affectation d’intrants comme les engrais pour répondre aux besoins locaux de production. L’accompagnement des agriculteurs pourrait se concentrer sur le renforcement de leurs compétences en matière de gestion de la production et des ressources naturelles de leur exploitation, contribuant ainsi à l’augmentation de la productivité agricole et à la réduction de la pauvreté à long terme.

  • En Indonésie, les importations de produits agroalimentaires sont soumises à des exigences administratives de plus en plus nombreuses, qui portent sur la sécurité des aliments, la mise en quarantaine, les normes applicables aux produits et l’étiquetage. Conjuguées à une application inégale de la réglementation et à un manque de transparence dû à l’évolution des règles, ces exigences entraînent une augmentation des coûts commerciaux. L’Indonésie devrait clarifier et consolider les fondements scientifiques de ces exigences et améliorer la cohérence de leur mise en œuvre ainsi que la coordination avec d’autres pays, notamment dans la région de l’ASEAN.

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