3. Céréales

La succession de récoltes exceptionnelles des céréales principales ces dernières années a entraîné une augmentation sensible des stocks et une nette diminution des prix sur les marchés internationaux vers la fin de la dernière décennie. Malgré la nouvelle hausse de production en 2019, les stocks ont diminué. C’est particulièrement vrai pour les réserves de maïs, résultat d’un déstockage progressif en République populaire de Chine (ci-après « la Chine »). Après des récoltes plus faibles qu’habituellement en 2018, la production de blé et d’orge est repartie à la hausse en Fédération de Russie, en Ukraine et dans l’Union européenne. Cela n’a pas été le cas en Australie, où les récoltes ont été catastrophiques après déjà deux mauvaises années. La production mondiale de maïs s’est accrue en 2019 grâce aux bonnes récoltes au Brésil et en Argentine. S’agissant du riz, les mauvaises conditions météorologiques associées aux faibles marges des producteurs se sont traduites par une légère diminution de la production mondiale, après le record jamais égalé de 2018. Les niveaux de stockage sans pareil résultant de la campagne précédente ont toutefois contribué à la hausse de l’offre globale de riz en 2019. Une production plus élevée de blé et de céréales secondaires ainsi que des stocks de céréales importants ont entraîné des prix mondiaux de l’ensemble des céréales pour 2019 inférieurs à ceux de 2018.

Les échanges de maïs en 2019 se maintiennent autour du niveau moyen des deux dernières années, grâce à une augmentation des exportations d’Amérique du Sud alors que la progression des exportations de blé s’est opérée majoritairement en Union européenne, Argentine et Ukraine. Les échanges internationaux de riz ont diminué et atteint leur niveau le plus bas depuis trois ans suite à la baisse de la demande d’importations en Asie (en particulier au Bangladesh, en Chine et en Indonésie). Au vu du niveau élevé des stocks locaux, les exportations chinoises de riz ont encore bien progressé en 2019. Enfin, les échanges des céréales secondaires, peu développés en 2018, ont repris de la vigueur sous l’effet surtout de l’augmentation des exportations d’orge par l’Ukraine.

Ces dix dernières années, la croissance de la production céréalière a surpassé celle de la demande, ce qui a conduit à la constitution de stocks importants et à la diminution des prix. Au cours de la période de projection s’étalant de 2020 à 2029, les prix devraient continuer à baisser en valeur réelle, et remonter légèrement en valeur nominale. La hausse de la production et le déstockage des céréales continueront de faire baisser les prix malgré la relance de la demande. La diminution attendue des prix risque toutefois d’avoir une incidence sur les choix de culture et réduire l’offre future.

La production mondiale de céréales devrait s’accroître de 375 Mt – pour atteindre 3 054 Mt en 2029 –, principalement en raison de l’augmentation des rendements. La hausse la plus forte serait enregistrée par le maïs (+193 Mt), puis le blé (+86 Mt), le riz (+67 Mt) et les céréales secondaires (+29 Mt). Les avancées de la biotechnologie – qui contribueront à l’amélioration des variétés de semences ainsi qu’à l’utilisation accrue d’intrants et à des pratiques agricoles plus efficientes – continueront de pousser les rendements vers le haut ; ces gains pourraient cependant être restreints par l’impact du changement climatique et les contraintes de production qui en résulteront tels le manque d’investissement ou les problèmes fonciers dans les pays en développement. Le rendement moyen des céréales à l’échelle mondiale devrait progresser de 1.1 % par an au cours de la période de projection, soit moins que lors de la précédente décennie (1.9 %), alors que la superficie totale cultivée devrait ne s’accroître que légèrement. Cette évolution sera favorisée par l’augmentation de la rentabilité dans la région de la mer Noire, où les coûts de production sont plus faibles que dans les autres grands pays exportateurs.

À moyen terme, la hausse de la demande globale de céréales devrait être plus modérée qu’au cours de la précédente décennie car la demande d’aliments pour animaux en Chine devrait continuer de ralentir. L’usage industriel des céréales – surtout de l’amidon et des biocarburants – enregistrera sans doute une hausse plus modérée que lors de la précédente décennie. S’agissant de l’alimentation humaine, la consommation par habitant de la plupart des céréales a atteint un niveau de saturation dans beaucoup de pays. La demande globale en matière d’alimentation humaine devrait néanmoins continuer de progresser, poussée par la croissance démographique rapide en Afrique et en Asie, où les céréales demeurent une composante majeure du régime alimentaire. La consommation de blé devrait s’accroître de 86 Mt par rapport à la période de référence, principalement pour l’alimentation humaine. La consommation mondiale de maïs devrait croître de 172 Mt, en grande partie du fait du développement des secteurs de l’élevage en Asie et sur le continent américain. La consommation humaine de maïs devrait augmenter de 23 Mt, en particulier en Afrique subsaharienne où le maïs blanc est un aliment de base important et où la croissance démographique reste forte. La consommation mondiale de riz devrait s’accroître de 69 Mt d’ici à 2029 – l’Asie et l’Afrique représentant la majeure partie de cette hausse –, principalement à destination de l’alimentation humaine. L’utilisation de céréales secondaires devrait augmenter de 30 Mt, avec une hausse de la consommation humaine attendue en Afrique.

À l’horizon 2029, les échanges mondiaux de céréales devraient croître de 96 Mt pour atteindre 517 Mt. La Fédération de Russie rejoint le devant de la scène internationale et s’est élevée ces dernières années au premier rang des exportateurs de blé, supplantant en 2016 l’Union européenne. Elle devrait conserver la première place tout au long de la période de projection et représenter 21 % des exportations mondiales en 2029. L’Ukraine se maintiendra au cinquième rang des exportations de blé et ne cessera de gagner des parts de marché, pour finalement réaliser 12 % des exportations mondiales à la fin de la période de projection. S’agissant du maïs, les États-Unis resteront le plus gros exportateur, même si leur part sur le marché mondial évoluera à la baisse à mesure que le Brésil, l’Argentine, l’Ukraine et la Fédération de Russie augmenteront la leur. L’Union européenne, l’Australie et le Bélarus devraient se maintenir aux premiers rangs des exportations de céréales secondaires (principalement d’orge et de sorgho). Néanmoins, la hausse de ces exportations sera limitée par l’intensification de la concurrence du maïs sur les marchés des aliments pour animaux ainsi que par les préférences des consommateurs en Afrique pour les variétés locales de millet et de sorgho. En ce qui concerne le riz, les principaux fournisseurs mondiaux resteront l’Inde, la Thaïlande, le Viet Nam et le Pakistan, mais le Cambodge et le Myanmar devraient occuper une place de plus en plus importante. Quant aux exportations de la Chine, elles se maintiendront au-dessus des faibles niveaux enregistrés entre 2010 et 2016.

Compte tenu des efforts de la Chine pour réduire ses stocks de maïs et, dans une moindre mesure, de riz, les réserves mondiales de céréales devraient diminuer au cours de la période de projection. Cela entraînera une baisse du ratio stocks/consommation à l’échelle mondiale, de 32 % pendant la période de référence à 26 % en 2029. Alors qu’en principe la diminution des stocks devrait favoriser en principe une augmentation des prix, dans les faits les réserves mondiales de céréales vont généralement se maintenir à un niveau élevé sur toute la période de projection, voire même s’accroître pour le blé, les céréales secondaires et le riz. La demande chinoise d’aliments pour animaux, ainsi que le niveau global de l’offre intérieure et les effets connexes sur les stocks, figureront parmi les principales incertitudes durant la période considérée.

L’offre mondiale de céréales est dominée par un petit nombre d’acteurs. Le Graphique 3.2. Les acteurs des marchés mondiaux des céréales en 2029

représente les parts prévues des cinq plus grands producteurs, consommateurs et exportateurs du monde en 2029. Si la production, la consommation et les exportations seront concentrées entre ces cinq pays/régions, les importations seront généralement plus largement réparties, sauf pour le blé. Les exportations des quatre céréales représentées seront particulièrement concentrées, les cinq principaux exportateurs représentant entre 72 % et 89 % du total. Cela dit, la concentration des marchés des céréales a considérablement diminué au fil des ans, que ce soit du côté de la production ou, plus encore, des exportations. Par rapport à d’autres produits agricoles comme le soja, le marché des céréales est moins concentré.

L’offre future de céréales dépendra dans une large mesure de la capacité à accroître les rendements. Ces derniers dépendront à leur tour de plusieurs facteurs tels que les investissements dans de meilleures pratiques culturales, la sélection des semences, les avancées de la biotechnologie, les changements structurels en faveur des exploitations de plus grande taille, les améliorations des méthodes de culture, ainsi que la capacité à adapter les technologies et à opérer des transferts de connaissances entre les régions. L’extension des superficies récoltées jouera un rôle mineur car la compétitivité des céréales par rapport aux cultures alternatives ne s’améliore pas. S’agissant des surfaces cultivées, leur expansion devrait être limitée par les restrictions imposées à la conversion de forêts ou de prairies en terres arables, ou par l’urbanisation en cours. La présente édition des Perspectives prévoit qu’en dépit des difficultés dues aux restrictions environnementales et aux préoccupations à l’égard de la durabilité, la hausse de la productivité dans le domaine des céréales demeurera supérieure à celle de la demande et entraînera une baisse des prix en valeur réelle.

Les marchés des céréales continueront d’être influencés par les mesures de soutien à la production mises en place par les pouvoirs publics. Comme les présentes Perspectives ne prévoient aucun changement des politiques en cours les aides à la production ne changeront pas non plus au cours de la période de projection pour la plupart des pays. Il est important de citer la récente mise en place au Mexique d’un programme visant à permettre aux petits producteurs (moins de 2.5 ha) d’être autosuffisants. Les producteurs adhérant au programme reçoivent une subvention mensuelle s’ils consacrent leurs terres à des cultures multiples. Dans la mesure où les petits exploitants représentent au Mexique une part importante des surfaces récoltées de maïs (20 %), ce programme pourrait réduire la croissance de la demande d’importations du pays pour cette céréale, ce qui risquerait d’avoir des répercussions sur les marchés des autres céréales.

La hausse de la production mondiale de céréales devrait avoir lieu majoritairement en Asie, Amérique latine, Afrique et Europe de l’Est, où les politiques nationales d’autosuffisance alimentaire et les investissements réalisés par les pays qui exportent soutiendront la production. Par le passé, ces politiques – qui incluaient des subventions aux intrants, le soutien des prix, des paiements directs, des prêts agricoles, une assurance à taux préférentiel, l’accès à de meilleures variétés de semences et des services de vulgarisation – avaient un effet en matière de hausse de la production. Le problème est que leur succès dépendait en grande partie de leur chronologie et de leur mise en œuvre.

Dans la mesure où la principale utilisation du maïs et des céréales secondaires est l’alimentation animale, et où la demande supplémentaire d’éthanol produit à partir de ces céréales sera faible, le facteur de progression de la demande le plus important au cours de la prochaine décennie sera le développement du secteur de l’élevage. D’après la présente édition des Perspectives, la demande mondiale de viande continuera de croître, mais à un rythme légèrement plus faible que lors de la période de référence. S’agissant du blé et du riz, le moteur de la demande au cours de la prochaine décennie sera l’alimentation humaine. La demande par habitant de ces céréales stagne au niveau mondial, la hausse de la consommation de blé et de riz dans les régions à faible revenu étant contrebalancée par sa baisse dans les régions à haut revenu, où ces aliments de base perdent de l’importance. Par conséquent, le principal facteur de développement des marchés du blé et du riz restera la croissance démographique.

Les stocks mondiaux de céréales devraient se maintenir à un niveau élevé au cours de la période de projection, hormis pour le maïs dont les réserves temporaires en Chine seraient vraisemblablement écoulées dans les années à venir (Encadré 3.2). Par voie de conséquence, le ratio mondial stocks/consommation du maïs diminuera d’environ 31 % pendant la période de référence à quelque 17 % en 2029, son niveau en Chine égalant celui des autres principaux pays. La part des stocks dans la consommation totale devrait s’accroître pour le blé et le riz, et se maintenir au même niveau qu’actuellement pour les céréales secondaires.

Les mesures prises par les gouvernements nationaux pour favoriser ou entraver les échanges peuvent jouer un rôle important dans le développement du commerce futur de céréales. Ainsi, les taxes à l’exportation mises en place par l’Argentine auront pour effet de réduire la capacité du pays à exporter davantage de céréales. D’un autre côté, les droits d’importation, qui ont récemment acquis un certain succès, entraîneront la diminution de la demande de la part des pays importateurs. En revanche, l’accord commercial entre les États-Unis et la Chine – en particulier l’engagement par les Américains d’accroître leurs importations – pourrait stimuler les échanges futurs de céréales. Au cours des dix dernières années, les contingents tarifaires chinois n’ont été utilisés qu’à 40 % environ pour le maïs et le blé et à 75 % pour le riz. D’après les prévisions, les contingents des deux premières céréales seront atteints à partir de 2021 (ce qui se traduira par une majoration des échanges mondiaux de maïs de 3 Mt et de ceux de blé de 6.3 Mt), et les exportations chinoises de riz augmenteront d’environ 1.4 Mt. Ces quantités ne représentent toutefois qu’une faible part des exportations mondiales et ne modifieront donc pas la physionomie des marchés internationaux de céréales.

Le blé est la première source de protéines végétales et de calories à l’échelle mondiale. Il entre également dans la composition de nombreux produits alimentaires tels que le pain, les pâtes, les pâtisseries, les nouilles, la semoule, le boulgour et le couscous. C’est aussi la culture vivrière qui couvre la plus grande surface cultivée au niveau mondial (quelque 14 %) et qui représente la part la plus élevée des échanges de produits alimentaires dans le monde. Toutefois, ses rendements étant nettement plus faibles que ceux du maïs, la production de blé se situe à la deuxième place après cette céréale (752 Mt pendant la période de référence). Les principaux producteurs sont l’Union européenne, la Chine et l’Inde.

La production mondiale de blé devrait atteindre 839 Mt à l’horizon 2029, avec un rythme de croissance plus modéré que lors de la décennie précédente. Dans le monde développé, c’est dans l’Union européenne que la hausse de cette production devrait être la plus forte, avec des rendements élevés, des prix compétitifs et des céréales de qualité. La production de blé devrait s’accroître de 50 Mt à l’horizon 2029 dans les pays développés, et de 36 Mt dans les pays en développement, ce qui représente une augmentation minime de la contribution de ces pays à la production mondiale. L’Inde, troisième producteur mondial de blé, devrait accroître sa production, en grande partie grâce à sa politique du prix de soutien minimum, qui garantit aux agriculteurs un revenu stable. Dans la Fédération de Russie et en Ukraine, l’accroissement de la production s’explique par l’utilisation de semences hybrides et d’engrais produits domestiquement, les faibles coûts de l’énergie, l’existence de grandes exploitations commerciales et la qualité des sols.

La consommation de blé devrait croître surtout dans les cinq pays/régions les plus demandeurs (Chine, États-Unis, Fédération de Russie, Inde et Union européenne), qui représenteront conjointement 55 % de la consommation mondiale de cette céréale. La consommation humaine de blé, qui devrait rester stable aux alentours des deux tiers de la consommation totale, devrait atteindre 60 % de l’augmentation totale de la demande, alors que la consommation par habitant ne bougera pas à l’échelle mondiale. En raison du ralentissement de la production animale mondiale et de la plus grande compétitivité des aliments pour animaux à base de maïs, la consommation animale de blé devrait s’accroître plus modestement que lors de la précédente décennie. La production mondiale d’éthanol à base de blé devrait augmenter de seulement 0.6 Mt, sous l’effet des efforts déployés par la Chine pour produire plus d’éthanol. Dans l’Union européenne – qui fut pendant la précédente décennie un gros utilisateur de blé aux fins de la production d’éthanol –, les politiques en matière de biocarburants ne devraient plus favoriser la poursuite de la croissance des biocarburants de première génération. La production mondiale de blé étant globalement plus élevée que sa consommation pendant toute la période de projection, le ratio stocks/consommation à l’échelle mondiale devrait atteindre 37 % en 2029, soit une progression de 3.5 points de pourcentage par rapport à la période de référence.

Le prix international du blé – dont la référence est le prix f.a.b. du blé rouge d’hiver de catégorie n° 2, ports des États-Unis – devrait atteindre 214 USD/t en moyenne en 2019, soit la première baisse après deux années consécutives de hausse. Le prix international du blé devrait reculer en termes réels durant la période couverte par les projections, mais légèrement augmenter par rapport à la période de référence, pour atteindre 258 USD/t en 2029 (Graphique 3.1). Cette baisse est le résultat des prix en termes réels du pétrole supposés faibles (et stationnaires), des prévisions de récolte moyennes et d’une croissance des exportations modérée.

Le blé étant la céréale la plus commercialisée dans le monde, ses échanges au niveau mondial (Graphique 3.6. Volumes des échanges mondiaux de céréales par produit

) devraient s’accroître au cours de la période de projection environ autant que lors de la précédente décennie. Cette hausse s’explique à la fois par l’évolution des rendements et les changements de politiques. L’Égypte, qui est le plus gros importateur de blé au monde, a récemment déclaré une préférence pour le blé de la mer Noire à teneur en protéines plus faible, soutenant la croissance future des exportations de cette région. Au cours de la précédente décennie, l’offre des principaux pays producteurs de blé de cette région – la Fédération de Russie, le Kazakhstan et l’Ukraine – avait été irrégulière, principalement à cause des fluctuations des rendements, ce qui s’était traduit par l’irrégularité des exportations également. La production s’est toutefois accrue plus vite que la consommation en moyenne, en raison de l’adoption de variétés de semences améliorées.

Par voie de conséquence, une hausse de la production est attendue dans ces pays, ce qui entraînera une augmentation de leurs parts dans les exportations mondiales de blé. La Fédération de Russie a supplanté l’Union européenne au premier rang des exportations en 2016, à la faveur de la compétitivité de ses prix et de sa proximité géographique avec les principaux pays importateurs du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. La Fédération de Russie devrait se maintenir à la première place d’ici à 2029 – avec une part d’environ 20 % dans les exportations mondiales de blé. La part des exportations de l’Union européenne augmentera légèrement en raison de la compétitivité des prix de l’UE, de la qualité de ses céréales et de sa proximité avec ses principaux marchés en Afrique et en Asie. Les importations de blé devraient se répartir entre un plus grand nombre de pays, les cinq premiers – Égypte, Indonésie, Algérie, Brésil et Philippines – représentant une part cumulée d’environ 26 % à l’horizon 2029.

Le maïs est l’une des plus anciennes plantes cultivées par l’homme. Les États-Unis en sont le principal producteur, consommateur et exportateur. Le succès de cette céréale est dû en partie à sa grande productivité et à son exceptionnelle adaptabilité géographique. Il en existe généralement deux grandes catégories : le jaune et le blanc. Le premier représente la majorité du marché mondial du maïs. Il est cultivé dans la plupart des pays de l’hémisphère nord et est surtout utilisé dans l’alimentation animale. Le maïs blanc, destiné à la consommation humaine, est produit en Afrique australe, Amérique latine et Asie du Sud dans des conditions climatiques très disparates. Les prix sont globalement plus élevés pour le blanc que pour le jaune, car les consommateurs le jugent de meilleure qualité.

La production mondiale de maïs devrait s’accroître de 193 Mt à 1 315 Mt au cours de la prochaine décennie, les plus fortes augmentations étant enregistrées en Chine, aux États-Unis, au Brésil, en Argentine et en Ukraine. Selon les projections, en Chine, la production de cette céréale progressera plus lentement (2.1 % par an) que durant les dix précédentes années (3.1 % par an) car les nouvelles mesures prises par les pouvoirs publics en 2016 ont mis fin au soutien des prix du maïs et au programme concomitant d’accumulation des stocks ; ces dispositions ont été remplacées par des subventions agricoles directes et des achats obéissant à la logique du marché. Par conséquent, sur le court terme, la Chine va délaisser la production de maïs pour se tourner vers d’autres céréales comme le soja et le blé, mais elle pourrait revenir au maïs dans quelques années lorsque les stocks seront redescendus à des niveaux plus viables. Aux États-Unis, la superficie plantée en maïs restera stable et l’augmentation de la production sera due surtout à la hausse des rendements. Au Brésil et en Argentine, la production augmentera sous l’effet de la légère expansion des surfaces plantées et de la hausse de la productivité, toutes deux favorisées par des politiques intérieures incitatives (par exemple des prêts à taux préférentiel) et par la dépréciation de leurs monnaies respectives. En Ukraine, la hausse de la production sera due à la culture de variétés indigènes à haut rendement et à un système de culture pluviale.

La consommation mondiale de maïs devrait augmenter à un rythme plus mesuré qu’au cours des dix dernières années, en adéquation avec la production. L’explication vient d’un ensemble de facteurs dont la demande d’aliments pour animaux, les politiques en matière de biocarburants et la consommation humaine. L’alimentation animale devrait représenter la plus grande part (68 %) de la hausse de la consommation de maïs. Durant la période de projection, une plus grande efficience de l’alimentation animale et un ralentissement de la croissance du cheptel vont modérer la demande d’aliments pour animaux. Par ailleurs, la hausse de la consommation de maïs pour la production de biocarburant devrait être limitée car les politiques actuelles en matière de biocarburants n’encourageront sans doute pas les gros pays producteurs à produire davantage. La consommation humaine de maïs devrait progresser de 23 Mt, sous l’effet à la fois de la croissance démographique et de l’augmentation de la consommation mondiale par habitant. C’est en Afrique subsaharienne, où le maïs blanc est un aliment de base important et où la croissance démographique est rapide, que la progression de la consommation humaine devrait être la plus forte (+14 Mt).

Le prix international du maïs – dont la référence est le prix f.a.b. du maïs jaune de catégorie n° 2, ports des États-Unis – devrait s’élever en moyenne à 167 USD/t en 2019, soit un niveau inchangé depuis 2018. La diminution des stocks mondiaux de maïs, la hausse présumée des prix de l’énergie et des intrants, ainsi que le ralentissement anticipé de la hausse de la demande des exportations par rapport à la précédente décennie auront pour effet de limiter l’augmentation en termes réels du prix international du maïs. Par conséquent, alors que le prix nominal devrait croître à 201 USD/t d’ici à 2029, cette hausse restera inférieure à l’inflation, ce qui signifie que le prix réel sera en baisse (Graphique 3.1).

À l’horizon 2029, les échanges mondiaux de maïs devraient croître de 36 Mt pour atteindre 194 Mt. Selon les prévisions, les cinq principaux exportateurs – États-Unis, Brésil, Ukraine, Argentine et Fédération de Russie – représenteront quelque 89 % du total en 2029. Bien que les États-Unis devraient conserver la première place du classement, leur part des exportations sera en baisse (de 34 % à 31 %) car les acheteurs d’Asie du Sud-Est manifestent des préférences pour le maïs d’Amérique du Sud en raison de leur perception de son niveau d’humidité et de la dureté du grain. Dans son ensemble, l’Amérique latine devrait voir sa part dans les exportations mondiales passer de 38 % pendant la période de référence à 40 % en 2029, du fait de politiques intérieures (par exemple, des prêts à taux préférentiel) favorisant la production et de la dépréciation des monnaies locales. Selon les prévisions, l’Ukraine et la Fédération de Russie enregistreront une hausse de leurs exportations de maïs, car leur offre augmentera plus vite que la consommation intérieure et les excédents seront écoulés sur le marché mondial.

Les cinq premiers pays importateurs de maïs resteront le Mexique, l’Union européenne, le Japon, l’Égypte et le Viet Nam. Ce dernier, qui enregistre un accroissement régulier de ses importations de maïs depuis 2012, devrait remplacer la Corée au quatrième rang mondial, sous l’impulsion du développement de ses secteurs de l’élevage et de l’aviculture. La Malaisie devrait voir ses importations augmenter du fait de la croissance ininterrompue de son secteur de l’élevage.

Le riz est cultivé dans une grande partie du monde, principalement comme une plante annuelle, même s’il peut aussi faire l’objet d’une culture pérenne. Il pousse principalement dans des terres inondées, qui facilitent la fertilisation et réduisent l’apparition des mauvaises herbes et des ravageurs. La majorité de la production mondiale de riz se trouve en Asie, de nombreux pays de la région ayant plusieurs récoltes par campagne. Plus de la moitié de la production a lieu en Chine et en Inde. L’évolution des systèmes de production dans les pays en développement d’Asie a d’importantes répercussions sur les marchés mondiaux, la hausse des rendements entraînant par exemple une augmentation de la disponibilité et des échanges à l’échelle internationale.

La production mondiale de riz devrait se porter à 582 Mt en 2029. Pendant la période de projection, la production mondiale supplémentaire sera attribuable en majeure partie à l’Asie, qui contribuera pour 61 Mt à l’augmentation. La progression la plus importante devrait avoir lieu en Inde, le deuxième plus gros producteur de riz au monde. Dans ce pays, l’augmentation de la production devrait être liée à la hausse des rendements favorisée par les mesures gouvernementales promouvant l’utilisation de nouvelles variétés de semences ainsi que l’extension et l’entretien des systèmes d’irrigation. Le maintien d’un prix minimum de soutien pendant la période de projection devrait inciter à planter du riz en Inde, comme cela s’est fait en Chine. Dans ce pays, cependant, la production devrait croître à un rythme plus lent qu’au cours de la précédente décennie car les actions visant à stopper les cultures dans les terres les moins productives vont se poursuivre, l’objectif général étant d’améliorer la qualité de la production. En Thaïlande et au Viet Nam, l’augmentation de la production dépendra principalement de l’amélioration des rendements, étant donné les prévisions de prix sur la période de projection et à supposer que les efforts des pouvoirs publics pour promouvoir une évolution vers des cultures alternatives porteront leurs fruits.

Outre les impacts liés à l’infrastructure et aux intrants, la production future de riz dépendra dans une large mesure de la structure variétale des plantations et de l’utilisation de souches de semences améliorées. Dans les pays développés, la production devrait diminuer en dessous du niveau de la période de référence en Corée et au Japon, mais augmenter aux États-Unis et dans l’Union européenne, sans toutefois dépasser le record de 2010 pour les premiers ni celui de 2009 pour la seconde. Les pays d’Asie les moins avancés – Myanmar, Cambodge, République démocratique populaire lao et Bangladesh – devraient continuer à accroître leurs niveaux de productivité à mesure qu’ils adopteront des variétés à plus haut rendement et amélioreront leurs pratiques agricoles. Bien que l’on estime que la production de riz va s’accroître dans de nombreux pays africains, les présentes Perspectives prévoient une hausse limitée du fait de la pratique d’une culture à sec, de la faible utilisation d’intrants et d’une infrastructure agricole inadaptée.

Le prix international du riz (riz moyen complètement blanchi de Thaïlande, f.a.b. Bangkok) a diminué jusqu’à 426 USD/t en 2019. Au cours de la période de projection, la demande d’importations de riz en Afrique subsaharienne (qui connaît une croissance démographique rapide) devrait être forte. Cependant, les importantes hausses de production – favorisées par l’action publique – dans les principaux pays importateurs d’Asie vont sans doute limiter l’augmentation des importations mondiales de riz à moins de la moitié du pourcentage enregistré lors de la précédente décennie. Par conséquent, alors que le prix nominal devrait croître à 476 USD/t d’ici à 2029, cette hausse restera inférieure à l’inflation, ce qui signifie que le prix réel sera en baisse (Graphique 3.1).

Le riz reste principalement destiné à la consommation humaine directe. Un déterminant majeur de la consommation mondiale de riz est l’augmentation de la demande des pays en développement d’Asie et d’Afrique. La consommation mondiale devrait s’accroître de 69 Mt d’ici à 2029, le riz demeurant un aliment de base important en Asie, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes. La consommation supplémentaire attendue sera presque entièrement due à la hausse de la demande alimentaire dans les pays en développement (Graphique 3.4. Consommation de céréales dans les pays développés et en développement

). Dans certains pays asiatiques, où la majorité de la production est destinée à la consommation intérieure, la demande est projetée à la baisse. En Inde, en revanche, la consommation annuelle par habitant va s’accroître de 4 kg au cours des dix prochaines années, en partie sous l’effet de la politique sociale du gouvernement visant à améliorer la sécurité alimentaire des ménages défavorisés par la distribution publique de céréales alimentaires. En Afrique, où le riz acquiert une place de plus en plus importante parmi les aliments de base, la consommation par habitant devrait croître d’environ 4 kg au cours de la période de projection. Avec une augmentation de la consommation de riz légèrement plus rapide que l’offre mondiale, le ratio stocks/consommation mondial va quelque peu diminuer, passant de 35 % pendant la période de référence à 31 % en 2029.

Le riz est un produit agricole peu échangé par rapport à d’autres céréales (Graphique 3.6. Volumes des échanges mondiaux de céréales par produit

). Les échanges mondiaux devraient s’accroître de 2.8 % par an au cours de la période de projection, soit une hausse des volumes échangés de 15 Mt, à 62 Mt en 2029. L’Inde restera le premier exportateur de riz au monde, la demande de ses marchés traditionnels d’Afrique et du Proche-Orient assurant la hausse des exportations. La Thaïlande, dont le riz proposé à l’exportation est toujours majoritairement de qualité supérieure, devrait se maintenir au deuxième rang mondial des exportations. Au Viet Nam, l’augmentation prévue des exportations sera due en partie aux efforts engagés par le pays pour diversifier la composition variétale de l’offre de riz, qui pourrait entraîner un accroissement de ses livraisons au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie de l’Est. Globalement, les cinq principaux exportateurs de riz – Inde, Thaïlande, Viet Nam, Pakistan et États-Unis – devraient voir leur part des exportations diminuer légèrement par rapport à la précédente décennie. Les livraisons chinoises devraient rester un peu en dessous de leur niveau de 2019, malgré leur nette récupération par rapport au creux des années 2010 à 2016. Au Cambodge et au Myanmar, où l’on prévoit de larges excédents exportables, les exportations devraient continuer à progresser, passant d’un total d’environ 4 Mt pendant la période de référence à 7 Mt en 2029. La plus forte hausse des importations devrait avoir lieu dans les pays africains, où la demande – stimulée par la hausse des revenus, l’urbanisation et la croissance démographique rapide – devrait continuer de dépasser la production. Cela porterait la part de l’Afrique dans les importations mondiales de riz de 37 % à 51 %, et la région deviendrait la première destination des flux mondiaux de cette céréale.

Les autres céréales secondaires sont un groupe hétérogène de céréales incluant l’orge, l’avoine, le seigle, le sorgho et le millet. Leur production est faible dans les régions qui n’ont pas de système d’irrigation. Peu d’amélioration des semences a eu lieu en Afrique et en Asie, d’où une disponibilité peu importante de sorgho et de millet dans ces régions. La hausse de la production est plus facile dans les régions qui sont naturellement adaptées à ces types de cultures et où la technologie s’améliore, en particulier en Europe et sur le continent américain. Bien que leurs coûts de production soient plus élevés que ceux du blé et du maïs, les autres céréales secondaires devraient continuer à être intéressantes dans les régions où les conditions météorologiques et la technologie facilitent les cultures multiples, et où les systèmes de rotation permettent d’accroître les rendements à l’hectare.

Selon les prévisions, la production mondiale d’autres céréales secondaires sera en hausse, pour s’établir à 319 Mt en 2029. Les surfaces plantées devraient être en baisse, la croissance de la production devrait être le fait de l’augmentation des rendements, estimée à environ 0.9 % par an. L’Afrique devrait représenter presque un tiers de la production supplémentaire mondiale (+10 Mt), avec une progression annuelle des rendements de 1.7 %. Les rendements absolus restent faibles par rapport à d’autres régions, principalement parce que le continent africain produit des variétés indigènes de millet et de sorgho. En Europe, les gains de production les plus élevés seront enregistrés dans les pays membres de l’Union européenne, en Ukraine et dans la Fédération de Russie. Globalement, la surface plantée en Europe devrait diminuer sous l’effet de la moindre rentabilité de l’orge par rapport à d’autres céréales comme le maïs et le blé. Les gains de production seront donc favorisés par l’augmentation des rendements. Ils devraient par exemple s’accroître de 1.5 % par an en Ukraine grâce à l’intensification de la rotation des cultures, l’amélioration des pratiques agricoles et l’abandon des terres non productives. En Asie, c’est en Chine que la croissance de la production sera la plus forte. En Inde, la production devrait décliner du fait de la diminution de la superficie récoltée, non compensée par une hausse des rendements. Bien que le millet soit inclus dans le dispositif de distribution publique mis en place par la loi indienne de 2013 sur la sécurité alimentaire, les effets ont été limités, notamment en raison de la non-participation des petits producteurs, de la pauvreté des sols et de la disponibilité limitée des ressources en eau.

La demande totale d’autres céréales secondaires devrait s’accroître de 30 Mt d’ici à 2029 ; près de la moitié sera destinée à la consommation animale (+14 Mt), suivie par l’alimentation humaine (+10 Mt) et l’usage industriel (+6 Mt). D’après les prévisions, la demande d’aliments pour animaux restera soutenue – bien qu’en baisse – en Europe, l’orge représentant une source fiable de protéines et d’énergie pour nourrir les élevages. Cette céréale devrait en particulier être un aliment important dans l’alimentation du cheptel laitier. Globalement, l’intensification attendue des secteurs du lait et de la viande favorisera l’alimentation animale d’origine industrielle, dont le maïs et le soja sont les principaux ingrédients, ce qui entraînera une croissance plus faible de la consommation d’aliments à base d’autres céréales secondaires. La demande d’aliments pour animaux devrait s’accroître en Chine, poussée par le secteur de la viande. Il en sera de même en Afrique du Nord, en Iran, en Turquie et en Arabie saoudite. Dans ces trois derniers pays, où les systèmes de production auront pourtant été améliorés, l’orge devrait rester un aliment très prisé pour les animaux, en particulier les ruminants tels que les chameaux, les moutons et les chèvres. La demande d’autres céréales secondaires pour la consommation humaine ne devrait augmenter qu’en Afrique mais, ramenée au nombre d’habitants, elle sera de nouveau en baisse comme cela avait déjà été observé lors de la précédente décennie.

Le prix sur le marché mondial des autres céréales secondaires, mesuré par le prix de l’orge fourragère (France, prix f.a.b. Rouen), est reparti à la hausse pour s’établir à 186 USD/t en 2019. Au cours de la précédente décennie, la principale cause du maintien des prix de ces céréales avait été la consommation animale, particulièrement en Chine où les prix intérieurs du maïs étaient élevés. Sur la période de projection, le prix du maïs devrait rester compétitif et entraîner une baisse de la demande de ses substituts (comme l’orge et le sorgho). Les prix nominaux pourraient s’accroître et atteindre 234 USD/t d’ici à 2029.

Pour ce qui concerne les exportations mondiales des autres céréales secondaires, leur progression devrait les amener à environ 48 Mt en 2029. La majorité des exportations supplémentaires serait à mettre sur le compte de l’Ukraine, suivie par la Fédération de Russie, l’Australie, l’Union européenne, le Kazakhstan et l’Argentine. Le plus gros exportateur resterait cependant l’Union européenne, suivie par l’Australie, la Fédération de Russie, l’Ukraine et le Canada. À l’horizon 2029, même si la Chine devrait se maintenir à la tête des pays importateurs d’autres céréales secondaires – avec 11.4 Mt en 2029 –, la hausse des importations sera faible. La présente édition des Perspectives prévoit que les protocoles phytosanitaires convenus par la Chine avec les principaux exportateurs seront maintenus, ce qui facilitera les échanges. Les autres grands importateurs sont les pays du Moyen-Orient, où les conditions météorologiques et la disponibilité des ressources en eau ne permettent généralement qu’une seule récolte par année civile. Ces pays se concentrent par conséquent sur la production de céréales destinées à l’alimentation humaine (le blé) plutôt qu’à l’alimentation animale (qui est la destination finale du sorgho et de l’orge au Moyen-Orient). L’Afrique subsaharienne devrait devenir un importateur net d’ici à 2029, même si les importations seront contraintes par les préférences des consommateurs et la structure du marché. Les autres céréales secondaires seront surtout consommées et produites par les paysans autosuffisants, au point que la consommation de millet ou de sorgho importés sera limitée aux zones urbaines.

La pandémie de COVID-19 en 2020 ne modifiera pas la situation générale d’abondance de l’offre de céréales et de perspectives de bonnes récoltes pour les prochaines campagnes de commercialisation. Les risques à court terme liés à cette pandémie résident surtout dans les problèmes de distribution et d’approvisionnement que connaîtront les pays faisant appel à des travailleurs saisonniers. Si la production de céréales est fortement mécanisée dans les pays développés, elle dépend dans certains pays en développement de travailleurs saisonniers qui pourraient ne pas être disponibles en raison des restrictions de déplacement de la main-d’œuvre. C’est le cas en particulier en Afrique, en Inde et dans certains pays d’Asie du Sud-Est. L’ampleur des effets de la pandémie dépendra des mesures adoptées par chaque pays pour la contrôler. La pandémie pourrait avoir deux types d’impacts sur la demande de céréales, et chacun d’eux aura des répercussions différentes sur les prix. D’une part, l’actuel ralentissement de la croissance économique pourrait conduire à une baisse supplémentaire de la demande de céréales, ce qui pourrait entraîner une diminution de leurs prix à court terme. D’autre part, dans le contexte des restrictions de déplacement des populations, la consommation hors du domicile risque de diminuer et de causer l’augmentation de la demande d’aliments de base (comme les pâtes et la farine, et pas seulement dans une réaction de panique), donc une hausse potentielle des prix.

La sécurisation de l’offre alimentaire intérieure est pourtant l’un des principaux sujets de préoccupation des gouvernements dans le cadre de cette crise. Les politiques d’entrave aux échanges, comme les restrictions des exportations pour garantir l’approvisionnement intérieur, sont souvent envisagées dans ce contexte. Elles risquent toutefois de menacer la disponibilité des produits dans les pays dépendant des importations, ainsi que de bouleverser les marchés internationaux et les échanges de céréales au niveau mondial.

Sur le moyen terme, une fois que les perturbations de la chaîne d’approvisionnement auront été résolues, l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les marchés de céréales devrait être limité, à moins que les pays s’orientent vers un objectif d’autosuffisance accrue à longue échéance ou d’augmentation durable des niveaux de stocks. De même, si l’économie mondiale ne repart pas sur la même trajectoire que ces dernières années, la demande de céréales dans dix ans pourrait être inférieure aux projections des présentes Perspectives.

Bien que les hypothèses climatiques donnent lieu à des perspectives de production positives pour les principales régions céréalières, les ravageurs, les maladies des végétaux et les aléas météorologiques accentués par le changement climatique pourraient entraîner une plus grande volatilité des rendements des cultures, avec des conséquences sur l’offre et les prix au niveau mondial. Par le passé, les variations du rendement des cultures ont été plus marquées en Australie, au Kazakhstan, dans la Fédération de Russie et en Ukraine. Les rendements en Amérique du Sud – notamment en Argentine, au Brésil, au Paraguay et en Uruguay – ont affiché également une variabilité élevée. Ces dernières années, la participation accrue de la région de la mer Noire aux marchés mondiaux des céréales a atténué certains des risques associés à l’insuffisance des récoltes dans les pays qui sont traditionnellement les plus gros exportateurs. Cependant, compte tenu de la forte variabilité des rendements dans cette région, l’approvisionnement des marchés mondiaux devient plus irrégulier, ce qui risque de provoquer des fluctuations plus marquées des prix à l’échelle internationale à l’avenir. Par ailleurs, la survenue de maladies (comme celle causée par la chenille légionnaire d’automne) dans les grands pays producteurs et exportateurs pourrait avoir un impact considérable sur les marchés mondiaux. Enfin, dans de nombreux pays africains, la production repose sur la culture pluviale et résiste donc mal aux événements météorologiques extrêmes.

La demande d’aliments pour animaux en Chine, ainsi que le niveau global de l’offre intérieure et les effets connexes sur les stocks, font planer une grande incertitude sur les marchés mondiaux de céréales. S’appuyant sur le troisième recensement agricole national datant de 2018, les autorités chinoises ont revu leurs estimations de la production végétale, avec une nette évolution de la production de maïs (+266 Mt) au cours des dix dernières années. En revanche, les chiffres des stocks et de l’alimentation animale n’ont pas été fournis et ne sont donc que des estimations. Pour autant, malgré cette révision, la production de maïs en Chine est en baisse depuis trois ans sous l’effet du changement de politique introduit en 2016 – qui a remplacé le dispositif de soutien des prix du marché par un programme de subvention directe pour le maïs. On suppose que cette nouvelle disposition entraînera, au cours de la période de projection, un écoulement des stocks accumulés par la Chine. Toutefois, si le niveau des stocks descend en fait très en dessous des estimations actuelles, il est possible que la Chine devienne plus tôt que prévu un gros importateur de maïs si elle modifie ses politiques en matière d’importations. Cela pourrait avoir une grande influence sur les évolutions futures des marchés mondiaux des céréales. L’Encadré 3.2 fournit une analyse de ces points d’incertitude.

Les prix des céréales pourraient être affectés par la possibilité d’un nouveau ralentissement de la croissance économique des grands importateurs et exportateurs, ainsi que par une baisse des prix de l’énergie. En outre, le renforcement des critères de sécurité alimentaire et de durabilité dans la réforme des politiques relatives aux biocarburants et dans leur élaboration (Union européenne, Brésil ou États-Unis) peut aussi avoir des effets sur la demande de céréales.

En plus des incertitudes liées à la gestion politique de la pandémie de COVID-19 – qui pourrait avoir des impacts à court terme –, les changements intervenant dans le contexte du commerce international des céréales (en rapport avec les différends commerciaux et l’évolution des accords régionaux) risquent aussi d’influer sur les flux commerciaux. Outre la protection des échanges, la résolution des tensions ou des différends en cours (par exemple entre la Chine et l’Australie sur la question de l’orge) et la perspective de nouveaux accords commerciaux au niveau régional pourront changer la physionomie des échanges de céréales.

Le Brexit ne devrait pas avoir d’impact sévère sur les marchés de céréales, car les flux commerciaux peuvent généralement être réorientés assez facilement. Cela dit, le Royaume-Uni est le plus gros producteur mondial d’avoine, même si une grande partie de sa production est destinée à la consommation intérieure. En revanche, les produits transformés à base d’avoine (comme le porridge) sont exportés vers d’autres pays européens ; selon l’accord commercial qui sera finalement conclu, cela pourrait avoir une incidence sur les marchés futurs du Royaume-Uni pour cette céréale.

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