3. Traitement fiscal des organismes philanthropiques

Les organismes philanthropiques peuvent être classés en deux catégories : les fonds et les organismes d'intérêt général (OIG). Aux fins de ce rapport, les fonds sont les organismes tels que les fondations, les associations et les trusts qui détiennent des actifs et les utilisent pour appuyer les OIG dans la réalisation de leurs objectifs sociaux. Le terme OIG désigne quant à lui les organismes qui fournissent des biens et des services dans un but d'intérêt général. D'un point de vue fiscal, les organismes philanthropiques peuvent bénéficier de différents avantages. En règle générale, les organismes dont le statut philanthropique est reconnu peuvent recevoir des dons ouvrant droit à des avantages fiscaux pour les bienfaiteurs, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers, ou se voir accorder directement des allégements fiscaux au titre de leur activité (p. ex. des exonérations en matière d’impôt sur les bénéfices, d’impôt sur le patrimoine, de TVA1, etc.). Pour pouvoir prétendre à ce statut (fonds ou OIG), l’organisme doit répondre à trois types de critères :

  • les critères liés au but non lucratif ;

  • les critères liés à la cause défendue ;

  • et les critères liés à l'intérêt général.

Ils doivent en outre satisfaire à un certain nombre d’obligations administratives servant à vérifier s’ils remplissent bien lesdits critères. Pour ce qui est du contrôle de ces critères et de leur sévérité, les pays varient dans leur approche. Dès lors qu’il satisfait à l’ensemble des conditions, l’organisme philanthropique peut bénéficier du traitement fiscal préférentiel accordé à la philanthropie (comme recevoir des dons assortis d’avantages fiscaux et bénéficier d’exemptions, totales ou partielles, de l’impôt sur les revenus ou sur les plus-values, ou de la TVA).

En imposant ces critères aux organismes, les pouvoirs publics peuvent s’assurer un suivi et un contrôle plus efficaces des dépenses fiscales liées au soutien de la philanthropie. Le critère du but non lucratif a pour but d’assurer que les organismes bénéficiant d’avantages fiscaux au titre de leur activité philanthropique ont pour objectif premier de servir l'intérêt général (et non de réaliser des bénéfices). Sans pour autant leur interdire de dégager un excédent, le critère du but non lucratif est généralement assorti d’une obligation de non distribution, à savoir que cet excédent ne peut être distribué sous forme de dividendes ou de bénéfices qui ne serviraient pas la cause défendue. Le critère de la noble cause permet à l’État d’orienter ses dépenses fiscales ainsi que les ressources des organismes philanthropiques de façon à favoriser (et, potentiellement, écarter) certains objectifs sociaux. Le critère de l'intérêt général garantit que les dépenses fiscales serviront à encourager des activités qui profitent à une part suffisamment importante et inclusive du public. La taille et l’aspect ouvert du cercle des bénéficiaires dépendent des pays et seront abordés plus loin dans ce rapport. Enfin, les obligations administratives peuvent aider à garantir que l’État dispose (et continuera de disposer) de toutes les informations nécessaires pour déterminer si l’organisme remplit bien tous les critères, en particulier lorsque l’approbation et l’évaluation de la conformité sont confiées à un organe administratif.

Les principaux enseignements de ce chapitre sont les suivants :

  • Les pays ont tendance à retenir les critères de but non lucratif, de noble cause noble et d’intérêt général pour déterminer l’éligibilité à des avantages fiscaux. Le bien-être social, l’éducation, la recherche scientifique et la santé sont considérés comme des nobles causes dans la plupart des pays. S’agissant du critère de l'intérêt général, les pays stipulent généralement que les avantages doivent être ouverts à tous, qu’ils peuvent être réservés à des groupes de personnes présentant certaines caractéristiques, ou que les caractéristiques utilisées pour déterminer les bénéficiaires doivent être liées à la cause défendue par l'organisme.

  • Dans la grande majorité des pays couverts par ce rapport, les organismes philanthropiques doivent suivre une procédure de demande spécifique pour bénéficier d’un traitement fiscal préférentiel. Les pays retiennent généralement l'une de ces trois approches : confier l’accréditation à l’administration fiscale ; confier cette responsabilité à l’administration fiscale et à une autre autorité, par exemple une commission indépendante ; ou la confier à un service distinct de l’administration fiscale.

  • En ce qui concerne les allégements fiscaux portant sur les revenus des organismes philanthropiques, deux méthodes sont couramment adoptées : la première consiste à exonérer tous les revenus ou certains revenus spécifiques, la seconde à prendre en compte toutes les catégories de revenus imposables, mais en autorisant les organismes à réduire leur base d’imposition en réinvestissant (immédiatement ou ultérieurement) ces revenus au service de la cause qu’ils défendent. Les pays qui ont opté pour la première méthode excluent généralement de la base d’imposition les revenus non commerciaux (dons ou subventions reçus). La façon dont sont traités les activités commerciales et les revenus provenant de ces activités diffère selon les pays. Il est fréquent que les revenus commerciaux liés à la noble cause poursuivie par l’organisme soient exonérés, tandis que les revenus commerciaux sans rapport avec cette cause restent imposés.

  • Enfin, les pays qui accordent aux organismes philanthropiques un traitement de faveur en matière de TVA les dispensent généralement de collecter la TVA sur une partie (ou la totalité) des biens ou services fournis. Toutefois, cette dispense pouvant créer pour ces organismes une charge fiscale sur les intrants, certains pays ont mis en place des mécanismes leur permettant de récupérer une partie de la taxe acquittée sur ces intrants.

Ce chapitre s’articule comme suit. Le point 3.2 ci-après présente les critères de but non lucratif, de noble cause et d'intérêt général ainsi que les autres exigences applicables dans les différents pays. Le point 3.3 offre un aperçu des obligations administratives et des procédures de demande instaurées par les pays pour s’assurer que toutes les exigences sont satisfaites. Le point 3.4 aborde le traitement fiscal des revenus des organismes philanthropiques. Le point 3.5 examine le traitement des OIG en matière de TVA suivant les pays. Le point 3.6 s'intéresse à d’autres types d’impôts et d’allégements fiscaux appliqués aux organismes philanthropiques par certains pays. Enfin, le point 3.7 étudie les risques potentiels de fraude et d’évasion fiscales impliquant les organismes philanthropiques.

Selon le premier critère, l'organisme doit être à but non lucratif. Auparavant, le qualificatif utilisé se limitait aux termes « non lucratif » puis, ces dix dernières années, celui de « but non lucratif » a commencé à s’imposer pour rendre compte du fait que l’organisme pouvait générer un excédent, mais que cela ne devait pas être son but. Ce critère n'interdit donc pas en soi aux organismes à but non lucratif de mener une activité commerciale ou de générer un excédent (tant que cet excédent n’est pas distribué sous forme de dividendes, ou de rémunérations ou paiements excessifs). Néanmoins, les pays peuvent faire le choix de limiter la mesure dans laquelle les organismes philanthropiques bénéficiant d’allégements fiscaux peuvent s’engager dans une activité commerciale. Dans un certain nombre de pays, les organismes philanthropiques sont en outre tenus de réinvestir l’excédent dégagé dans des activités dont l'objectif est de servir la cause qu’ils défendent. Si l’activité commerciale d'un organisme philanthropique dépasse une certaine mesure, ou si l’organisme ne réinvestit pas ses bénéfices au service de cette cause, le pays peut décider d’imposer l'activité commerciale ainsi que le surplus de bénéfices, voire priver purement et simplement l'organisme de son statut préférentiel.

L’exercice d'une activité commerciale par des organismes philanthropiques bénéficiant d'un traitement fiscal préférentiel peut susciter des inquiétudes quant à la loyauté de la concurrence, si les biens et services qu’ils procurent sont également fournis par des organismes non philanthropiques. Pour pallier ce problème, les pays peuvent limiter l’importance de l'activité commerciale, la soumettre à une imposition, restreindre les activités dans lesquelles ils peuvent s’engager, ou plafonner les avantages fiscaux accordés au titre de l’activité commerciale qui fausse la concurrence. Ce critère sera présenté plus en détail au point 3.4 ci-dessous consacré aux revenus des organismes philanthropiques.

De manière générale, une cause noble est une cause dont l’État estime qu’elle mérite d’être soutenue par les dons de bienfaiteurs et les ressources d'un fonds ou d'un OIG. Cette caractéristique est subjective et peut être déterminée par les donateurs ou les organismes philanthropiques qui choisissent la cause qu'ils souhaitent soutenir. Toutefois, aux fins de ce rapport, la notion de cause noble recouvre un ensemble de causes que les organismes philanthropiques éligibles à des avantages fiscaux peuvent défendre. Cela signifie que, pour qu'un organisme philanthropique bénéficie d'un traitement fiscal préférentiel, il doit servir une cause que l’État (le législateur ou l’administration fiscale) considère comme noble. Dans certains pays (comme l’Allemagne ou les États-Unis), les OIG doivent consacrer leurs ressources aux causes qu'ils ont mentionnées dans leur demande de statut spécifique. Ils ne peuvent donc pas changer d’objectif et adopter une autre des causes admissibles sans suivre une nouvelle procédure administrative. En Allemagne par exemple, l’OIG qui souhaite changer de cause ou en ajouter une doit en informer l’administration fiscale.

Le Tableau 3.1 présente une liste non exhaustive des catégories de causes que les pays soutiennent en accordant des allégements fiscaux aux organismes philanthropiques qui les défendent. Aux fins de la comparaison du critère de la noble cause suivant les pays, les catégories sont désignées par des termes génériques qui recouvrent les causes connexes. La catégorie du bien-être, par exemple, comprend aussi bien les organismes qui procurent un toit aux sans-abris que les banques alimentaires qui distribuent de la nourriture aux nécessiteux. Celle de la culture peut inclure les musées ou des cinémas particuliers, mais aussi s'appliquer de manière plus générale à des organismes de protection du patrimoine ou soutenant les arts par le biais de subventions. Les catégories de causes qui sont le plus souvent considérées comme nobles par les pays sont le bien-être (37), l’éducation (35), la recherche scientifique (34), et la santé (34).

Le bien-être constitue une noble cause dans tous les pays cités hormis la Bulgarie, qui fait figure d’exception en ce qu’elle n’accorde de traitement fiscal préférentiel qu’à la Croix Rouge bulgare. Néanmoins, la Bulgarie octroie des allégements fiscaux aux entreprises et aux particuliers qui effectuent des dons à d’autres organismes qu'à la Croix Rouge bulgare (pour plus d'informations, se reporter au chapitre 4). Parmi les pays énumérés, la Bulgarie et Malte sont les deux seuls à exclure l’éducation de leur liste de causes éligibles. Tous les pays du tableau 3.1, à l’exception du Chili, de l’Indonésie, de Malte et de la Bulgarie, incluent la santé dans leurs nobles causes. L'Afrique du Sud, Malte et la Bulgarie sont les seuls pays à ne pas intégrer la recherche scientifique. D'un autre côté, la protection des consommateurs (22), la protection civile (28), la protection animale, (28), le sport amateur (29) et les cultes (29) sont moins souvent reconnus comme causes nobles dans les pays étudiés.

Le tableau 3.1 montre également que certains pays ont adopté des définitions larges de la noble cause, tandis que d'autres en ont une définition plus restrictive. Ainsi, toutes les catégories énumérées peuvent être considérées comme des causes nobles en République tchèque, en Estonie, en Allemagne, en Grèce, en Irlande, en Israël, en Lituanie, en Nouvelle-Zélande, en Norvège, au Portugal, en Roumanie, en République slovaque, en Slovénie et aux États-Unis. En revanche, l’Argentine, la Bulgarie, le Chili, l’Indonésie, Malte et l’Afrique du Sud ont une acception plus étroite de la noble cause.

Dans la majorité des pays, les fonds et les OIG remplissant les critères de la noble cause et de l’intérêt général qui permettent de recevoir des dons subventionnés sont également éligibles au traitement fiscal préférentiel direct et inversement, alors que ce n’est pas le cas en Australie, en Bulgarie, au Canada, en Allemagne, en Nouvelle-Zélande, en Norvège, en Suède, en Afrique du Sud et aux États-Unis.

Dans des pays comme la Bulgarie, le critère de la noble cause qui ouvre droit à des incitations fiscales pour les dons est moins restrictif que les obligations que doivent satisfaire les fonds ou les OIG pour prétendre à un soutien fiscal direct. En Bulgarie, les fonds et les OIG servant une cause éligible peuvent recevoir des dons assortis d’avantages fiscaux, mais seule la Croix Rouge bulgare peut bénéficier directement d’un traitement fiscal préférentiel.

Au Canada, les conditions de la noble cause pour recevoir des dons ouvrant droit à un avantage fiscal ne sont pas les mêmes que celles applicables aux fonds ou OIG qui prétendent à un soutien fiscal direct. Au Canada, les dons ouvrant droit à des avantages fiscaux peuvent être versés aux fonds et OIG qui servent l'une des causes énumérées au Tableau 3.1 ainsi que : aux organisations journalistiques ; aux organismes municipaux ou publics qui remplissent une fonction gouvernementale au Canada ; aux universités situées à l’étranger qui accueillent des étudiants canadiens ; aux fonds et OIG enregistrés situés à l'étranger qui ont reçu un don de Sa Majesté ; ainsi qu’à l’Organisation des Nations Unies et à ses organismes. Néanmoins, au Canada, de manière générale, il est plus compliqué pour un organisme d’obtenir le statut d'organisme de bienfaisance enregistré ouvrant droit à des dons subventionnés que d’être considéré comme organisme à but non lucratif.

Inversement, en Norvège, en Suède et en Afrique du Sud, les conditions pour recevoir des dons subventionnés sont plus restrictives que pour bénéficier directement d’un soutien fiscal. Ainsi, en Norvège, seul un sous-ensemble spécifique d'organismes philanthropiques éligibles à des exonérations d'impôt remplissent les conditions stipulées pour recevoir des dons ouvrant droit à une déduction d'impôt pour le bienfaiteur. Pour être éligible, l’organisme destinataire doit servir une cause entrant dans l’une des catégories suivantes : la santé, les activités à destination des enfants et des jeunes engagés dans la culture ou le sport amateur, les cultes, les droits de l’Homme, l'aide au développement, le secours d’urgence, et la préservation de l’environnement et de la culture. En Afrique du Sud, les fonds et les OIG ne peuvent recevoir des dons assortis d'avantages fiscaux que s’ils servent une des causes suivantes : la santé, le bien-être et l’éducation.

Pour qu'un organisme soit reconnu comme philanthrope, sa noble cause doit être poursuivie dans l’intérêt général. Globalement, cela signifie que la noble cause d'un fonds ou d'un OIG doit profiter au public dans son ensemble ou à une part suffisante du public. Dans le cas contraire, la cause n’est défendue que dans l'intérêt privé de quelques individus et ne remplit donc pas les critères applicables pour que l’organisme soit reconnu comme méritant un traitement fiscal préférentiel.

Certaines causes sont généralement considérées comme servant le public dans son ensemble parce que leurs bienfaits ne se limitent pas à des personnes remplissant un critère particulier. Parmi ces causes, citons par exemple la protection de l’environnement, les découvertes scientifiques, ou la protection animale. D’autres causes, en revanche, ont tendance à profiter à un cercle défini d’individus ; dans ce cas, les pays réglementent le nombre de bénéficiaires et/ou les critères retenus pour les définir. Par exemple, la noble cause défendue par un groupe de soutien aux handicapés spécifie ses bénéficiaires. En règle générale, les pays considèrent qu’un cercle de bénéficiaires qui est défini par sa situation de nécessité constitue une part suffisante du public.

Mais certains organismes déterminent leur cercle de bénéficiaires à l'aide de caractéristiques comme l’âge, le handicap, le genre, l’orientation sexuelle, la race, la nationalité, l’état de grossesse ou la religion. Pour réglementer la notion d’intérêt général, les pays retiennent généralement l'une des trois approches suivantes : interdire purement et simplement aux organismes philanthropiques d'utiliser des caractéristiques individuelles pour définir les bénéficiaires ; établir une liste de caractéristiques (parfois nommées « caractéristiques protégées ») que les organismes philanthropiques sont autorisés à utiliser pour définir les bénéficiaires ; ou autoriser les organismes à réserver leurs avantages à des personnes présentant certaines caractéristiques si ces dernières ont un lien avec la cause défendue (par exemple, un OIG œuvrant pour la santé et le bien-être des femmes enceintes peut utiliser la grossesse comme caractéristique pour restreindre le cercle des bénéficiaires, mais ne peut pas préciser que seuls les adeptes d'une religion donnée peuvent bénéficier de ses services).

Certains pays (comme l’Autriche, la France ou la Slovénie) stipulent que le cercle des bénéficiaires doit être l’ensemble du public, sans possibilité de le restreindre par des caractéristiques spécifiques comme le genre, le sexe, la religion ou l’origine. En Autriche, le cercle des bénéficiaires doit également être le public dans son ensemble, sachant toutefois que l’activité doit servir l'intérêt général dans un domaine intellectuel, culturel ou matériel. En outre, le cercle des bénéficiaires d'activités menées dans l’intérêt général ne peut pas être limité par des caractéristiques spécifiques comme le sexe ou le genre. La Slovénie ne prévoit pas de nombre minimal, et le bénéfice des avantages ne peut pas être restreint par des caractéristiques individuelles comme les compétences, le genre, la religion, la nationalité ou l’origine.

En France, les OIG sont appelés associations d’intérêt général et peuvent à ce titre délivrer des reçus fiscaux à leurs donateurs afin qu'ils bénéficient de l'avantage fiscal. Pour pouvoir prétendre à ce statut et remplir le critère de l'intérêt général, l’association ne doit pas mener ses activités au profit d'un petit cercle de personnes. De plus, les avantages et activités de l’association d'intérêt général doivent pouvoir profiter à tous, sans être limités par un quelconque critère (comme la race, le sexe, la profession ou la religion). Ensuite, une association d'intérêt général peut être reconnue comme association d’utilité publique. Le statut d’association d'utilité publique permet de recevoir, en sus des dons auxquels ont droit tous les OIG, des donations et des legs. Pour être reconnue d'utilité publique, l'association doit remplir des conditions supplémentaires tenant à l'intérêt général, notamment avoir une influence et un rayonnement dépassant le cadre local ainsi qu’un nombre minimal de membres qui est fixé à 200.

Certains pays autorisent les organismes philanthropiques à restreindre le cercle des bénéficiaires au moyen de certaines caractéristiques (c’est le cas du Chili, de la Colombie, de la Grèce, d’Israël, de la Lituanie, de Malte, du Mexique, de la Norvège, de la Roumanie, de Singapour, de la République Slovaque, de l’Afrique du Sud et de la Suisse). Ainsi, en Colombie et en Suisse, les organismes peuvent réserver leurs avantages à un genre, mais ne peuvent pas utiliser d'autres caractéristiques pour limiter le cercle des bénéficiaires. Au Mexique, les restrictions tenant à l’origine, à la religion ou à la nationalité sont prohibées, tandis que les restrictions fondées sur le genre et d'autres caractéristiques éventuelles sont autorisées. Par exemple, les organismes philanthropiques peuvent limiter leur soutien aux mères célibataires tant qu’ils poursuivent effectivement leur objectif spécifique.

En Israël, les organismes philanthropiques peuvent cibler un genre et préciser l'origine ou la nationalité. En Lettonie, la cause défendue peut concerner des groupes précis comme les enfants, les jeunes, les individus souffrant de la pauvreté et les handicapés, mais l’activité philanthropique doit s’adresser à ces groupes sans distinction de compétences, d'origine, de religion ou de nationalité.

En Lituanie, aucune règle n’interdit aux organismes de sélectionner leurs bénéficiaires en se fondant sur le genre ou les compétences, à condition que l'activité soit conforme à la loi lituanienne sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes. Les activités philanthropiques des organismes doivent en outre être accessibles aux personnes sans distinction d’origine, de religion ou de nationalité. En Roumanie, les organismes ne peuvent pas privilégier un genre, mais ils peuvent restreindre le cercle des bénéficiaires à l’aide d'autres caractéristiques individuelles comme les compétences, la religion ou la nationalité. Singapour autorise les organismes à cibler un genre si leurs activités peuvent également profiter au public dans son ensemble. Par exemple, les OIG Boys Brigade et Girls Brigade mènent des activités qui profitent à l’ensemble de la communauté. Le Chili, la Grèce, Malte et la République slovaque n’ont pas de règles concernant la possibilité ou non de réserver leur activité philanthropique à des individus présentant des caractéristiques particulières.

Enfin, un certain nombre de pays (Australie, Belgique, Canada, Estonie, Allemagne, Inde, Japon, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Portugal, Afrique du Sud, la Suède et les États-Unis) n’autorisent les organismes philanthropiques à restreindre le cercle des bénéficiaires à des personnes présentant des caractéristiques particulières que si la cause qu'ils servent le justifie.

En Australie, les organismes philanthropiques doivent servir une cause qui profite à l’ensemble ou à une part suffisante du public. Le critère de la part suffisante du public est évalué lors de l’enregistrement de l'organisme. Certains OIG sont présumés servir l’intérêt général, notamment ceux qui sont engagés dans la lutte contre la pauvreté. Les OIG peuvent limiter les bénéficiaires à un genre si cette restriction est liée à la cause noble. Par exemple, un organisme caritatif qui vient en aide aux victimes de violences conjugales peut réserver ses services aux femmes, tandis qu’un organisme œuvrant dans le domaine de la santé peut se limiter aux personnes souffrant de troubles mentaux. De même, un OIG exempté d’impôt peut promouvoir une religion spécifique ou proposer ses services à des personnes qui ont émigré en Australie en provenance d'un pays spécifique.

La législation belge interdit toute discrimination fondée sur l’âge, l'orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, le patrimoine, les convictions religieuses, philosophiques ou politiques, l’état de santé actuel ou futur, le handicap, les caractéristiques physiques ou génétiques, ou l'origine sociale. Néanmoins, si l'OIG est accrédité pour une cause au bénéfice d’une catégorie donnée de personnes (par ex., les personnes handicapées), il peut limiter son action à cette part du public. Parmi ces OIG figurent des associations qui défendent spécifiquement les droits des femmes dans le but de promouvoir l’égalité des sexes. En ce qui concerne le rayonnement géographique des activités de l'organisme, le ministère des Finances comme l’autorité compétente ont établi des critères spéciaux énumérés ci-après.

  • Recherche scientifique : les organismes doivent mener leurs activités à l’échelle nationale ou régionale et ne pas se limiter à l’échelle locale.

  • Culture : les organismes doivent opérer sur l’ensemble du territoire national, ce qui exclut l’échelle locale, et les activités d’enseignement qui relèvent de la responsabilité du ministère de l’Éducation ne sont pas autorisées.

  • Protection de la nature et de l’environnement : les organismes doivent démontrer que leur activité est continue et durable, et que leur influence s’étend au-delà d'une seule municipalité.

  • L'assistance aux victimes de guerre, aux handicapés, aux personnes âgées, aux mineurs d’âge protégé et aux indigents : les organismes doivent être actifs sur l’ensemble du territoire national et pas seulement à l’échelle locale.

  • Aide aux victimes de catastrophes naturelles reconnues en Belgique, aide aux pays en développement, assistance aux victimes d’accidents industriels majeurs et développement durable : les organismes doivent œuvrer sur l’ensemble du territoire national ou régional et pas seulement à l’échelle locale.

  • Les dons à des associations qui viennent en aide aux personnes atteintes d'un handicap peuvent ne profiter qu’à ces personnes et pas à leur famille.

  • S’agissant des associations culturelles, les activités doivent être menées dans trois provinces différentes. Les associations locales sont exclues. Les organismes doivent produire un calendrier des activités ainsi qu’un rapport d’activité pour l’année écoulée.

Au Canada, un organisme qui profite à un seul genre peut être reconnu comme OIG et bénéficier d'un traitement fiscal préférentiel s’il peut démontrer que cette restriction répond à une nécessité. Toute limitation de l’accès peut priver un organisme de la reconnaissance du statut d’OIG, mais à des degrés différents. Un organisme qui désire fortement restreindre un bénéfice ou encore exclure des personnes de ses services aura bien plus de difficultés à établir la preuve de l’intérêt général qu’un organisme qui entend simplement concentrer son attention sur un groupe particulier tout en permettant à l’ensemble du public d'accéder aux services. Si l’OIG envisage de restreindre d'une façon ou d'une autre le cercle des bénéficiaires d'une activité, la nature de la restriction doit être clairement liée au bénéfice proposé. Ainsi, une œuvre religieuse peut limiter l'accessibilité aux personnes de la religion concernée, mais cette restriction ne sera pas acceptable pour un organisme qui vient en aide à des personnes atteintes d'un handicap. De manière générale, un organisme qui restreint excessivement l’accès à ses services ou à ses programmes ne remplira pas le critère de l'intérêt général, sauf à démontrer que les restrictions sont pertinentes quant à la cause défendue.

Le critère de l’intérêt général comporte plusieurs sous-critères. Généralement, le bénéfice doit être concret ; les bénéficiaires doivent être constitués de l’ensemble du public ou d’une part suffisante du public déterminée en fonction de la cause défendue ; l’organisme ne doit pas servir des intérêts privés, sauf sous certaines conditions restrictives ; sauf exception, l'organisme ne peut pas être constitué pour servir les intérêts de ses membres ; enfin, l'organisme ne peut pas facturer pour ses services des frais qui auraient pour effet d’exclure indûment des membres du public.

En Estonie, les bénéfices procurés par l’activité philanthropique doivent être identifiables et justifiables, mais n’ont pas à être quantifiables. Les activités philanthropiques ne peuvent pas cibler des individus selon des caractéristiques spécifiques et doivent profiter à une part suffisante du public. Si la limitation à un genre peut être justifiée par la cause défendue par l’organisme, la part du public pourra être considérée comme suffisante. La cause noble ne doit pas profiter à un nombre fixe de personnes. Si l'organisme à but non lucratif dispose de membres, ces derniers doivent être deux ou plus.

En Allemagne, la cause noble doit être au bénéfice du public dans son ensemble et avoir un objet altruiste. En 2017, la Cour fédérale des finances allemande a jugé qu'un OIG ne pouvait pas servir l’intérêt général s'il excluait les femmes de ses adhérents sans justification pertinente. Cette décision a fait débat. Les organismes basés sur l’adhésion de membres sont éligibles à un traitement fiscal préférentiel et doivent comprendre au moins sept membres pour être enregistrées en tant qu’associations. Toutefois, les associations non enregistrées peuvent également être éligibles au traitement fiscal préférentiel.

En Inde, les organismes philanthropiques ne peuvent pas servir une cause religieuse ou être constitués en trust « au service d'une communauté religieuse ou d'une caste spécifiques ». Les activités peuvent s’adresser aux femmes, aux enfants et à des catégories sociales vulnérables. De même, au Japon, les bénéficiaires peuvent être désignés par des caractéristiques comme le genre, la religion ou les capacités, tant que ces critères ont un lien pertinent avec la cause défendue. Ainsi, un organisme de défense des droits des femmes peut cibler ses bénéficiaires en fonction du genre, un organisme religieux en fonction de la religion, et un organisme à visée éducative en fonction des compétences ou des capacités.

En Italie, la plupart des organismes philanthropiques sont ouverts à tous, sans restrictions quant aux bénéficiaires. Toutefois, certains types d'organismes peuvent limiter le bénéfice de leurs activités à des groupes présentant des caractéristiques liées à la cause défendue (comme les organismes philanthropiques qui aident les personnes défavorisées à trouver un emploi).

Les Pays-Bas n'ont pas de définition de l'intérêt général. La législation comme la jurisprudence présentent cette notion avec neutralité, de sorte que les avis peuvent diverger quant au fait que l’organisme sert ou non l'intérêt général. Le cercle des bénéficiaires peut être restreint par l’organisme ; si, par exemple, sa cause est de promouvoir l’égalité de traitement des hommes et des femmes, il peut se concentrer uniquement sur ces dernières. Toutefois, l'objectif et les activités de l'organisme philanthropique ne doivent pas enfreindre la constitution ou les traités internationaux, qui interdisent toute discrimination fondée sur (notamment) le genre, la race et la religion.

En Nouvelle-Zélande, l’activité philanthropique doit profiter à une part suffisante du public. L'organisme peut subordonner l’accès à ses services à des frais, à condition qu'ils soient raisonnables. Par exemple, en n’accordant l’accès aux avantages qu’à des membres d'un certain groupe (cas d’une bourse pour les étudiants maoris). Les limitations de l’accès au public doivent être raisonnables et appropriées. Si les membres de l’organisme peuvent également bénéficier de ses services, les conditions d’adhésion doivent être raisonnables au regard du critère du bénéfice pour le public. Ainsi, un groupement de médecins destiné à améliorer les pratiques médicales peut raisonnablement réserver la qualité de membre à des médecins qualifiés, parce que le bénéfice réel qu’en retirera le public au sens large tient à l’amélioration de la santé publique.

En Suède, les organismes basés sur une adhésion sont éligibles s'ils sont ouverts au public. Néanmoins, ils sont autorisés à définir certaines restrictions (comme l’âge pour un club de tir, la capacité à jouer d'un instrument pour un orchestre, etc.). De même, leurs activités peuvent ne s’adresser qu’à un genre si ce critère présente un lien manifeste avec l’objectif de l’organisme.

Aux États-Unis, les organismes doivent soutenir une « classe caritative » (charitable class) et ne pas servir des intérêts privés de manière substantielle. La qualification de classe caritative n’est pas déterminée par un ordre de grandeur ; elle doit être suffisamment importante pour que les bénéficiaires potentiels ne puissent pas être identifiés individuellement, ou suffisamment large pour que la communauté dans son ensemble, et non un groupe prédéfini de personnes, en retire des avantages. Les clubs et les associations qui ne sont pas des œuvres caritatives sont éligibles à un traitement fiscal préférentiel limité, et aucun nombre minimal de membres n’est imposé.

Pour s’assurer que les organismes bénéficiant d'avantages fiscaux remplissent les différents critères de l’intérêt général, de la noble cause et du but non lucratif, la grande majorité des pays couverts par ce rapport imposent aux organismes philanthropiques de suivre une procédure de demande spécifique pour se voir accorder le traitement fiscal préférentiel. L’autorité chargée de l’évaluation doit donc approuver les organismes préalablement à l'octroi du traitement de faveur. Dans certains pays (comme le Canada, la France, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, la Colombie et l’Allemagne), les organismes peuvent effectuer leur demande avant le début de leur activité. L'intérêt de cette solution pour les organismes est qu’elle leur permet de corriger d’éventuelles lacunes en amont et donc de réduire le risque de se voir refuser le bénéfice du traitement préférentiel une fois qu'ils ont débuté leur activité. En revanche, pour les pays, elle présente le risque d’octroyer le statut fiscal préférentiel à des organismes sans pouvoir ensuite contrôler leurs performances ou leurs activités. Pour y remédier, les pays peuvent assurer un suivi de l'organisme une fois le statut préférentiel accordé. Ainsi, dans les trois ans qui suivent l’octroi du statut, l’administration fiscale allemande vérifie que l’organisme respecte bien les obligations liées au traitement fiscal préférentiel. En France, l’administration fiscale dispose d’un délai de six mois pour répondre à compter de la date de réception de la demande. Passé ce délai, sans notification d’accord de l’administration, l’association d'intérêt général est admise au bénéfice du traitement fiscal préférentiel. En cas de réponse négative, l’administration fiscale doit motiver sa décision. Si l'organisme d'intérêt général ne partage pas l'avis de l’administration, il peut demander un nouvel examen dans les deux mois.

D'autres pays (comme la Belgique, la Roumanie et l’Argentine) exigent des organismes qu’ils exercent depuis un certain temps avant de pouvoir faire leur demande. Ainsi, en Belgique, les OIG doivent fournir un rapport d'activité pour l’année écoulée ainsi qu'une déclaration détaillée des projets de l’année en cours. En Argentine, les organismes qui demandent à bénéficier du statut d’OIG ouvrant droit à un traitement fiscal préférentiel doivent justifier d'un capital social initial (très symbolique au vu des récents taux d'inflation) de 1 000 ARS, ou de 200 ARS si la cause défendue par l’organisme a trait à la promotion des droits économiques, sociaux et culturels de groupes vulnérables et/ou de communautés ethniques vulnérables ou souffrant de la pauvreté. Pour les fondations, le montant minimal du capital social est de 80 000 ARS. En Roumanie, les organismes doivent être en exercice depuis au moins trois ans et avoir atteint une partie de leurs objectifs philanthropiques pour pouvoir demander à bénéficier d’avantages fiscaux.

Dans certains pays (comme la Norvège et la Lituanie), les organismes philanthropiques n’ont aucune demande à faire pour bénéficier de certains avantages fiscaux. Cette absence de formalités présente l’intérêt de réduire la charge administrative à la fois des organismes et de l’organe d’évaluation, mais elle peut susciter des préoccupations quant à la responsabilisation des organismes. La Norvège par exemple ne prévoit pas de procédure de demande pour les organismes philanthropiques qui souhaitent bénéficier d’avantages fiscaux directs. Néanmoins, les fonds et les OIG qui veulent recevoir des dons ouvrant droit à des avantages fiscaux doivent en faire la demande à l’administration fiscale et satisfaire à des obligations comptables et à fins de contrôle. De même, en Lituanie, les organismes philanthropiques peuvent bénéficier de la majorité des avantages fiscaux sans aucune formalité mais, s'ils souhaitent recevoir des parrainages, ils doivent déposer une demande en ce sens.

Afin de s’assurer que les organismes philanthropiques remplissent les conditions pour bénéficier du traitement fiscal préférentiel, les pays chargent l’administration fiscale, un autre de leurs services, ou des commissions indépendantes, de missions d’accréditation et de surveillance. Le Tableau 3.2 indique que dans la majorité des pays (16), l’administration fiscale et/ou le ministère des Finances disposent d’un service ou d’une unité dédié au secteur philanthropique. Ces pays sont parfois dotés d'un autre service ou d’un organe indépendant chargé de la surveillance des fonds et OIG. Pour s’assurer que les avantages fiscaux sont efficacement conçus, l’organe de surveillance doit pouvoir vérifier que l'organisme sert réellement sa noble cause. Pour les OIG à vocation culturelle par exemple, cette appréciation peut nécessiter une palette de compétences très différentes de celles qui seront requises pour un objectif comme le bien-être social ou la protection de l’environnement.

Le tableau 3.3 indique l’organe responsable de la procédure administrative d'accréditation et de surveillance des organismes philanthropiques au sein de l’État. Les pays retiennent généralement l'une de ces trois approches : confier l’accréditation à l’administration fiscale ; confier cette responsabilité à l’administration fiscale et à une autre autorité ; ou la confier à un service distinct de l’administration fiscale.

Dans la majorité des pays, la responsabilité de l’accréditation incombe à l’administration fiscale (voir Tableau 3.3). C’est le cas, par exemple, en Argentine, en Autriche, en Colombie, en Estonie, en Finlande, en Inde, en Israël, au Mexique, aux Pays-Bas, en Norvège, en République Slovaque, en Afrique du Sud, en Suède et en Suisse. Dans tous ces pays, les organismes qui souhaitent bénéficier d’un traitement fiscal préférentiel doivent adresser leur demande directement à l’administration fiscale, qui se charge alors d’examiner les documents fournis et de statuer sur l’éligibilité. La majorité des pays qui ont adopté cette approche (Argentine, Australie, Estonie, Inde, Israël, Mexique, Pays-Bas, République slovaque, Afrique du Sud, et Suède) disposent d'un service ou d'une unité au sein de l’administration fiscale qui est dédié à la philanthropie (voir Tableau 3.2). Pour ces pays en particulier, cette approche présente l'intérêt de centraliser le processus de surveillance. En revanche, elle peut contraindre l’administration fiscale à consacrer des ressources importantes à des organismes qui échappent en grande partie, voire totalement, à l’impôt. Suivant le contexte politique, cela peut donner lieu à des pressions visant à privilégier les activités générant des revenus plutôt que la gestion des avantages fiscaux accordés aux fonds et aux OIG. Dans ce cas, l’intervention d'autres composantes des pouvoirs publics peut présenter certains avantages.

La Colombie a pour sa part adopté une approche unique en ce qu’elle permet au public de participer au processus d’accréditation. Comme le montre la figure 3.1 ci-dessous, une fois la demande et l’enregistrement en ligne effectués de manière satisfaisante, les informations sur l’organisme sont publiées sur Internet ; les citoyens ont alors de cinq jours ouvrables pour faire part de leurs commentaires. Puis, l’administration fiscale colombienne dispose de quatre mois pour approuver ou rejeter la demande de l’entité qui souhaite être reconnue comme organisme philanthropique bénéficiant du régime fiscal spécial (voir figure 3.1 pour plus de détails sur le déroulement de la procédure).

Dans plusieurs pays (p.ex. en Australie, en Belgique, au Canada, au Chili, en France, en Allemagne, en Grèce, en Indonésie, en Irlande, au Japon, en Lettonie, à Malte, au Portugal, en Slovénie et aux États-Unis), les prérogatives administratives sont partagées entre l’administration fiscale et d'autres autorités. Souvent, l’éventail des activités dans lesquelles les organismes philanthropiques peuvent s’engager est très large, et il peut se révéler difficile d'évaluer et de surveiller correctement les organismes actifs dans des domaines dont l’administration fiscale ou le ministère des Finances ne sont pas spécialistes. Dans les pays qui ne disposent pas d'un service ou d'une unité dédié à la gestion administrative des organismes philanthropiques (voir Tableau 3.2), il peut être judicieux de faire appel aux ressources et aux compétences d'une autre autorité. Certains pays (comme la Belgique, la France, la Slovénie, le Portugal, et le Chili) ont pris le parti de confier cette gestion à une autorité compétente qui vient seconder l’administration fiscale dans la surveillance des organismes philanthropiques. Par exemple, la demande de statut d’OIG d'un organisme de défense du patrimoine culturel sera traitée conjointement par l’administration fiscale et le ministère de la Culture. En France, les associations d'intérêt général doivent être déclarées auprès de l’administration fiscale, tandis que celles qui souhaitent être également reconnues d'intérêt public adressent leur demande au ministère de l'Intérieur.

Une autre approche consiste à confier les missions d'accréditation et de surveillance à une commission d’experts indépendante (c’est le cas en Australie, en Irlande, en Lettonie et en Nouvelle-Zélande), ce qui peut permettre de s’affranchir des contraintes institutionnelles des administrations fiscales. Le but premier de l’administration fiscale est de collecter les recettes fiscales pour le compte des citoyens afin de financer les missions de l’État (OCDE, 2019[1]). Or, la gestion d'un secteur philanthropique peu imposé risque de rogner les ressources déjà limitées dont elle dispose pour les activités qui, elles, génèrent des recettes fiscales. Tandis que les commissions dédiées sont généralement en mesure de collecter et d’analyser les données, d’acquérir l’expérience nécessaire concernant les organismes philanthropiques et de publier des rapports ; elles peuvent en outre constituer un interlocuteur clair pour les fonds et les OIG.

Cela dit, les administrations fiscales ont une connaissance précieuse des règles fiscales applicables et de leurs interactions avec le système fiscal général du pays. Par conséquent, les pays qui ont fait le choix de commissions décident généralement de faire intervenir l’administration fiscale dans le processus de surveillance en retenant l’une des deux solutions suivantes. La première, choisie par la Lettonie, consiste à inclure des représentants de l’administration fiscale dans les commissions. La seconde, adoptée par l’Australie, l’Irlande et la Nouvelle-Zélande, est de concevoir une procédure en deux phases, les organismes philanthropiques devant demander l’accréditation à la fois à une commission dédiée et à l’administration fiscale.

Ainsi, en Lettonie, la demande des organismes est examinée par une commission qui est un organe collégial consultatif composé en nombre égal de représentants agréés du ministère des Finances, du ministère de l’Éducation et des Sciences, du ministère de la Culture, du ministère de l’Action sociale, du ministère de la Justice et du ministère de l’Environnement et du Développement régional, et de représentants compétents de fonds et d’OIG qui disposent de l’expérience requise dans l’un des domaines caritatifs.

En Irlande, pour se voir octroyer le statut d’organisme philanthropique, les œuvres caritatives doivent adresser une première demande à une commission indépendante dédiée. Ensuite, elles peuvent se tourner vers l’administration fiscale pour demander à bénéficier du traitement fiscal préférentiel. En Nouvelle-Zélande, pour prétendre aux allégements fiscaux, les organismes caritatifs doivent d’abord s’enregistrer auprès des Charities Services (un groupe rattaché au ministère de l’Intérieur et doté d'un comité indépendant d’enregistrement des œuvres caritatives composé de trois membres). Au cours de la procédure d’enregistrement, les organismes doivent indiquer aux Charities Services s’ils mènent ou envisagent de mener des activités à l’étranger. Les informations sont ensuite transmises à l’administration fiscale, qui apprécie l’éligibilité de l’organisme aux allégements de l’impôt sur les revenus et à recevoir des dons assortis d'avantages fiscaux. La Nouvelle-Zélande comprend d'autres OIG qui peuvent être totalement exemptés de l’impôt sur les bénéfices sans être considérés comme des œuvres caritatives en Nouvelle-Zélande (p. ex. les clubs de sport amateur, ou les « friendly societies »). Ces OIG doivent s’adresser directement à l’administration fiscale et joindre une copie des statuts de la société, ce qui permet de vérifier, avant de leur accorder l’exemption, que leurs ressources ne peuvent être utilisées que pour la cause qu’elles défendent. Certains clubs et associations qui ne sont pas éligibles à l’exemption totale de l’impôt sur les revenus doivent également fournir à l'administration fiscale une copie de leurs statuts pour pouvoir bénéficier d’une déduction d'impôt plafonnée à 1 000 NZD ; en outre, contrairement aux œuvres caritatives enregistrées, ils sont tenus d’établir une déclaration fiscale.

En Australie, l'organe chargé de toutes les décisions d’enregistrement et de radiation du registre des œuvres caritatives est l’Australian Charities and Not-for-profits Commission (ACNC). Les organismes caritatifs doivent être enregistrés auprès de l’ACNC pour avoir droit à l’exonération de l’impôt sur les revenus ainsi qu’à d'autres allégements fiscaux. Pour être exemptés de l'impôt sur les revenus, ils doivent en outre être agréés par l’administration fiscale. Un organisme qui souhaite recevoir des dons déductibles doit lui aussi être agréé par l’administration fiscale, à moins qu'il ne soit désigné spécifiquement par la législation fiscale. En règle générale, le délai pour obtenir l’agrément de l’administration fiscale ne dépasse pas 28 jours.

Tous les pays n’ont pas fait le choix de confier les missions de surveillance à l’administration fiscale. En Lituanie par exemple, l'organe chargé d’examiner la demande aux fins de bénéficier de parrainages est le Centre des registres, qui dépend du ministère de l’Économie et de l’Innovation de la République de Lituanie. Au Luxembourg, un OIG (comme n’importe quelle société) doit transmettre ses comptes annuels au Registre de commerce et des sociétés, qui sont ensuite soumis au contrôle et à l’approbation d’un auditeur indépendant. Les OIG ne peuvent détenir que des biens ou bâtiments nécessaires à l’exécution de leur mission. En Roumanie, l'organe d’évaluation est le Secrétariat général du Gouvernement. En Bulgarie, c’est l’Agence des registres, placée sous le contrôle du ministère de la Justice, qui est chargée de l’accréditation des organismes philanthropiques leur permettant de recevoir des dons subventionnés.

Quelle que soit l’autorité qui examine l’éligibilité des organismes à des avantages fiscaux, elle exige généralement que les fonds et OIG lui communiquent un certain nombre d’informations qui lui permettront d’apprécier s’ils remplissent, lors de la demande et ultérieurement, les conditions ouvrant droit au statut préférentiel et au traitement fiscal associé. Le niveau d’exigence diffère selon les pays, qui cherchent le juste équilibre entre requérir de nombreuses informations détaillées, ce qui crée une charge administrative importante, ou seulement des informations minimales, au risque de nuire à l’efficacité de la surveillance et d’accroître le risque d’abus. Les obligations imposées peuvent être classées en plusieurs catégories : la tenue de registres (afin de pouvoir contrôler efficacement les organismes) ; les déclarations annuelles (qui aident l’organe administratif à vérifier que les critères de noble cause, d'intérêt général et de but non lucratif continuent d’être respectés) ; les obligations tenant aux statuts (pour assurer la conformité des règles de l'organisme avec la réglementation fiscale) ; et la production d’un programme d'activités (pour permettre à l’organe de contrôle d’apprécier les projets de l’organisme pour l’avenir).

Les obligations relatives à la tenue de registres sont imposées aux fins de l’efficacité des contrôles. Ainsi, l'administration fiscale canadienne réalise chaque année des audits d’organismes philanthropiques sélectionnés pour vérifier qu’ils continuent de remplir les exigences liées à leur enregistrement et qu'ils respectent les règles applicables (les contrôles de l'administration fiscale couvrent environ 1 % des organismes). Les fonds et les OIG ont l'obligation de tenir des registres comptables visant à prouver que leurs ressources ont bien été utilisées pour la cause qu’ils défendent et à vérifier que des reçus officiels ont été remis pour les dons. Pour que les organismes aient à leur disposition toutes les informations nécessaires lors d'un éventuel contrôle, les OIG et fonds enregistrés au Canada sont tenus de :

  • conserver la direction et le contrôle de l'utilisation de leurs ressources ;

  • respecter les exigences annuelles en matière de dépenses (contingent des versements) ;

  • tenir des registres comptables fiables et exhaustifs ;

  • remettre des reçus officiels de dons complets et exacts (se reporter au chapitre 4 pour plus d'informations sur les obligations concernant les reçus de dons).

En Belgique, les OIG doivent présenter un budget pour l'année fiscale en cours, ainsi que les comptes des deux derniers exercices. Ils doivent en outre s’engager formellement à limiter les frais de gestion à moins de 20 % et les frais de publicité à moins de 30 %, et à ne pas réaliser de bénéfices. La durée minimale du processus d’accréditation est de trois mois. En Irlande, la demande en vue d'obtenir le statut ouvrant droit à une exonération d'impôt doit être accompagnée de l’ensemble des états financiers récents ; de l’acte constitutif ; d’un programme d'activités pour l'année à venir ; et d’un certificat d’enregistrement du statut d’OIG ou de fonds auprès d'une commission indépendante chargée des œuvres caritatives.

Aux Pays-Bas, les organismes philanthropiques doivent tenir une comptabilité permettant de vérifier les points suivants :

  • la nature et l’étendue des indemnités pour frais et/ou des jetons de présence accordés aux différents membres du conseil d'administration ;

  • la nature et l’étendue des activités de gestion ainsi que les autres dépenses engagées par l'organisme ; et

  • la nature et l’étendue des revenus et des actifs détenus par l'organisme.

En Lituanie, les organismes philanthropiques habilités à recevoir des parrainages doivent tenir une comptabilité séparée pour les parrainages reçus ainsi que pour les dons et/ou les services fournis. En outre, ils doivent transmettre des rapports mensuels ou annuels à l’administration fiscale. Si, depuis le début de l’année civile, le montant total reçu d'un seul parraineur excède 15 000 EUR, l’organisme doit produire un rapport mensuel.

En Colombie, les organismes doivent joindre à leur demande les informations suivantes :

  • une description de la cause défendue par l’organisme ;

  • le montant et la destination des excédents ou bénéfices nets réinvestis, s’il y a lieu ;

  • le montant et la destination des affectations permanentes effectuées au cours de l’année fiscale ;

  • les noms des personnes habilitées à gérer, diriger ou contrôler l'organisme ;

  • le salaire des membres de l'organe directeur de l’organisme ;

  • les noms des fondateurs ;

  • le montant des capitaux propres au 31 décembre de l’année précédente ;

  • l'identification des donateurs, le montant et la destination des dons, ainsi que la date prévisionnelle de la dépense ou de l’investissement (s'il y a lieu) ;

  • un rapport annuel des résultats contenant des informations sur les projets en cours et achevés, les revenus, les contrats conclus, les subventions et contributions reçues, ainsi que les buts d'intérêt général atteints ;

  • les états financiers de l’organisme ;

  • un certificat du représentant légal ou du contrôleur, ainsi que la déclaration de revenus démontrant que l’entité est à jour de toutes ses obligations pour l’année fiscale.

En France, les OIG bénéficiant d'un traitement fiscal de faveur sont soumis à des contrôles de la Cour des comptes. Les organismes qui perçoivent plus de 153 000 EUR de subventions ou plus de 153 000 EUR de dons philanthropiques doivent, tous les ans, faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes indépendant.

Au Luxembourg, les OIG doivent identifier leurs bénéficiaires effectifs et les déclarer au registre des bénéficiaires effectifs. Cette déclaration s’effectue au moyen d’un formulaire proposant de compléter les informations demandées par la loi (dans la majorité des cas, il s’agit des membres du conseil d’administration).

Certains pays prévoient des obligations déclaratives annuelles (comme l’Australie, la Colombie, l’Estonie, la Lituanie et Singapour). En règle générale, les déclarations annuelles aident l'organe d’évaluation à contrôler les activités de l’organisme et à vérifier qu’il continue de remplir les conditions applicables. Ainsi, en Australie, les organismes enregistrés doivent transmettre des rapports annuels (une déclaration d’information annuelle et, pour les moyens et grands organismes, des états financiers) à l’ACNC. Les organismes philanthropiques exonérés de l’impôt sur le revenu ne sont pas tenus d’établir une déclaration de revenus, sauf demande expresse de l’administration fiscale. Toutefois, s'il y a lieu, ils peuvent avoir à produire des déclarations relatives à la TVA. De même en Colombie, pour conserver leur statut d’organisme philanthropique, les fonds et OIG bénéficiant du régime fiscal préférentiel doivent transmettre annuellement des informations légales et financières à l’administration fiscale. En outre, tous les organismes bénéficiant du régime de faveur doivent remplir chaque année une déclaration de revenus.

Certains pays exigent des fonds et des OIG qu'ils rendent leurs informations publiques. C’est le cas des Pays-Bas, où les organismes philanthropiques doivent publier des informations concernant l'organisme sur leur propre site Internet ou sur le site partagé d’une organisation professionnelle. Cette approche peut permettre de renforcer la confiance du public dans le secteur philanthropique.

Dans certains pays, les organismes philanthropiques doivent produire une déclaration de revenus, qu'ils soient imposables ou non. Ainsi, en Allemagne, les fonds et les OIG bénéficiant d’un traitement fiscal préférentiel peuvent procéder par auto-évaluation mais doivent établir des déclarations fiscales même s'ils ne sont pas imposables. De même, en Slovénie, les fonds et les OIG peuvent s’évaluer eux-mêmes mais restent tenus de remplir une déclaration fiscale. En revanche, pour bénéficier d'un traitement fiscal préférentiel en République slovaque, la seule condition est de fonder une entité servant une cause noble. L'organisme philanthropique ne devra produire de déclaration fiscale que si une partie de ses revenus n’est pas exonérée.

Aux États-Unis, les organismes philanthropiques (autres que les églises) doivent s’adresser à l’administration fiscale pour être exemptés d'impôt et bénéficier du statut préférentiel. Une fois ce statut accordé, les organismes (autres que les églises) doivent remplir une déclaration annuelle des revenus, qui est rendue publique. En outre, s'ils s’engagent dans une activité commerciale ou professionnelle non liée, les organismes philanthropiques (autres que les églises) doivent établir une déclaration de revenus distincte, qui est également mise à la disposition du public.

Certains pays (p. ex. l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, l’Estonie, le Mexique et les Pays-Bas) imposent aux organismes de communiquer leurs statuts, leur acte constitutif ou leur règlement à l’administration afin de s’assurer qu'ils respectent les critères ouvrant droit au traitement fiscal préférentiel. Ainsi, pour qu'un organisme philanthropique soit reconnu comme fonds ou OIG aux Pays-Bas, ses statuts doivent stipuler que, en cas de liquidation, les actifs restants seront transmis à un organisme philanthropique défendant une cause similaire ou à un organisme philanthropique étranger qui œuvre (exclusivement ou presque) en faveur de l’intérêt général ou d’une cause similaire. En Nouvelle-Zélande, les clubs et associations qui ne sont pas éligibles à l’exemption totale de l’impôt sur les revenus doivent fournir à l'administration fiscale une copie de leur règlement car ils peuvent être éligibles à la déduction fiscale plafonnée à 1 000 NZD ; ils sont également censés remplir une déclaration fiscale. Au Mexique, les fonds et les OIG doivent joindre à leur demande les statuts actuels de l’organisme ainsi qu'une preuve de la nature de leurs activités.

Dans quelques pays (comme la Belgique, l’Irlande, la Colombie, l’Estonie et la Roumanie), les organismes doivent fournir à l’organe administratif un programme d'activités. L'intérêt de cette approche est qu’elle permet aux pays d’apprécier si les organismes ont progressé vers leurs objectifs, mais également de les avertir préalablement d’éventuels obstacles à l’éligibilité. Ainsi, la Belgique demande aux organismes de produire un calendrier des activités et un rapport d'activité pour l'année précédente, ainsi qu'une déclaration détaillée de leurs projets pour l'année en cours.

Pour bénéficier du traitement fiscal préférentiel en Estonie, les organismes philanthropiques doivent présenter une demande conforme aux exigences de l’administration fiscale. La demande doit décrire les activités de l’association pour l’année en cours (avec les activités prévues), expliquer les activités philanthropiques menées dans l’intérêt général, décrire la vision de l’organisme pour le futur, et fournir certains renseignements sur ses fondateurs. En sus de cette demande, l’administration fiscale examine les objectifs mentionnés dans les statuts de l’organisme et dans le rapport annuel.

En Roumanie, les organismes philanthropiques doivent présenter un rapport d'activité accompagné des états financiers annuels, des déclarations de revenus requises et des budgets de dépenses pour les trois années précédant la demande. Ils doivent en outre produire des justificatifs de contrats de collaboration et de partenariat avec des institutions publiques, des associations ou des fondations, nationales ou étrangères. Enfin, ils doivent être en mesure de démontrer qu'ils ont réalisé des progrès significatifs dans la défense de leur cause noble ou présenter des lettres de recommandation d’autorités compétentes.

À Singapour, les organismes qui souhaitent être enregistrés en tant qu'œuvre caritative doivent s’adresser au Commissioner of Charities, qui procède à l’examen de la demande. Une fois enregistré, l’organisme est tenu de présenter tous les ans des documents au Commissioner of Charities, dont un rapport annuel (ainsi que des états financiers et une liste à cocher concernant la gouvernance).

Les organismes philanthropiques peuvent générer des revenus commerciaux et non commerciaux, mais cette distinction n’est pas toujours très claire et varie d’un pays à l’autre. En général, les revenus non commerciaux désignent les revenus provenant de dons à caractère philanthropique (abordés au chapitre 4) et de subventions publiques ou, dans le cas des OIG, de dons provenant de fonds de soutien. Les revenus issus de dons philanthropiques incluent les dons de particuliers et d’entreprises ainsi que les legs de personnes physiques. En ce qui concerne ces legs, dans les pays qui lèvent un impôt sur la succession et non sur la masse successorale, c’est au bénéficiaire de l’acquitter ; par conséquent, l’avantage fiscal éventuellement lié à l'impôt successoral profitera à l'organisme philanthropique qui reçoit le legs.

Les revenus commerciaux recouvrent, dans l’ensemble, les revenus générés par la fourniture de biens ou de services en contrepartie d’une rémunération sous une forme ou une autre. Lorsqu'une société effectue un paiement à un organisme philanthropique au titre d'un parrainage (en contrepartie d’une publicité), ce paiement peut, dans certains pays, être considéré comme un revenu commercial. En effet, dans la mesure où la publicité résultant du parrainage de l'organisme philanthropique constitue un service, ce revenu pourra être considéré comme commercial.

Quant aux allégements fiscaux portant sur les revenus des organismes philanthropiques, deux approches sont couramment adoptées : la première consiste à exonérer tous les revenus ou certains revenus spécifiques (p. ex. les revenus issus de dons philanthropiques), tandis que la seconde tient compte de toutes les catégories de revenus imposables, mais en autorisant les organismes à réduire leur assiette en réinvestissant (immédiatement ou ultérieurement) ces revenus dans l’objectif de servir leur cause. Le tableau 3.4 montre que la plupart des pays retiennent plutôt la première approche. La Colombie, l’Indonésie, la Lituanie et l’Irlande ont toutefois adopté la seconde et considèrent tous les revenus (y compris les dons philanthropiques) comme imposables, à moins qu'ils ne soient réinvestis dans le but de servir la cause noble (voir Tableau 3.5 pour une présentation détaillée de l’imposition des revenus des organismes philanthropiques en Colombie).

Les pays excluent généralement les revenus non commerciaux (tels que les revenus provenant de dons philanthropiques ou de subventions publiques) de la base d’imposition et ne les considèrent pas comme des revenus imposables. Les pays qui lèvent un impôt sur la succession ont tendance à dispenser les organismes philanthropiques de payer cet impôt sur les legs qu'ils reçoivent (la Belgique et la France appliquent un impôt sur les successions à taux réduit aux revenus issus de legs).

Les approches qui consistent à imposer les revenus issus d’activités commerciales divergent. Le premier point ci-dessous traite du petit nombre de pays qui exonèrent tous les revenus commerciaux des organismes philanthropiques. Le second point dresse un panorama des pays qui exemptent totalement les organismes philanthropiques d'impôt sur les revenus et limitent les activités qu'ils peuvent mener. Le troisième s’intéresse aux pays qui souhaitent que les organismes philanthropiques paient un impôt sur une partie de leurs revenus et distinguent donc, généralement, les revenus liés à la cause qu'ils défendent et ceux qui ne le sont pas (également désignés par revenus commerciaux liés et non liés). Le quatrième point s’intéresse aux pays qui imposent les revenus commerciaux au-delà d'un certain plafond. Notons que les pays qui imposent purement et simplement les revenus commerciaux ne sont pas couverts par les points ci-après (c’est le cas de la Grèce, du Luxembourg et de la Slovénie, où les revenus issus d'activités commerciales sont imposés).

En Australie, les organismes philanthropiques sont totalement exemptés de l'impôt sur les revenus tant commerciaux que non commerciaux. À cet égard, une étude du système fiscal australien portant sur la période 2008-2010 s’est penchée sur la question de l'imposition des revenus commerciaux non liés des organismes philanthropiques. L’étude est parvenue à la conclusion que les organismes exonérés n’étaient pas incités à casser les prix par rapport à leurs concurrents à but lucratif et que, par conséquent, les allégements fiscaux portant sur l’impôt sur les revenus n’étaient pas contraires au principe de neutralité concurrentielle et devaient donc être maintenus (Henry et al., 2009[2]). Les organismes peuvent également avoir droit au remboursement de crédits d'affranchissement (voir encadré 3.1 pour plus d'informations).

La Nouvelle-Zélande applique un dispositif similaire : les organismes philanthropiques sont exemptés de l’impôt sur leurs revenus non commerciaux, de même que sur leurs revenus commerciaux si l’organisme philanthropique respecte le critère du but non lucratif et ne mène pas d'activités à l’étranger. La question de la neutralité concurrentielle soulevée par l’exemption d'impôt dont bénéficient les organismes philanthropiques sur leurs revenus commerciaux a récemment fait l’objet d'une étude par le Groupe de travail sur la fiscalité de la Nouvelle-Zélande. Le rapport a conclu que la mesure dans laquelle les organismes philanthropiques affectaient leur excédent à leurs activités servant leur cause noble, dans l’intérêt général, pouvait être source de préoccupations. En conséquence, le Groupe de travail a recommandé au Gouvernement de vérifier régulièrement l'utilisation faite par le secteur philanthropique des dépenses fiscales afin de s’assurer que les résultats sociaux visés étaient effectivement atteints (Tax Working Group, 2019[3]). À Malte également, les organismes philanthropiques sont exemptés d'impôt sur l’ensemble de leurs revenus.

Au Canada, les organismes philanthropiques éligibles sont exemptés de l’impôt sur les revenus. Les OIG ne sont autorisés à mener des activités commerciale que si elles sont liées à la cause noble défendue par l'organisme, ou si l’organisme fonctionne presque exclusivement avec une main d'œuvre bénévole. Les organismes philanthropiques ne peuvent pas mener eux-mêmes des activités commerciales non liées et peuvent faire l'objet de sanctions financières voire d'une radiation en cas de non-respect de cette interdiction. Néanmoins, un organisme philanthropique peut exercer des activités commerciales par l’intermédiaire de sociétés distinctes ou de trusts, à condition que des séparations adéquates soient mises en place entre l’organisme philanthropique et l'autre entité. L'organisme philanthropique est également soumis à des obligations tenant à ses dépenses : si la valeur moyenne des biens qui n'ont pas été directement utilisés pour les activités de bienfaisance (au cours des 24 mois précédant le début de l'exercice) dépasse 100 000 CAD, le contingent des versements de l'organisme de bienfaisance sera égal à 3,5 % de la valeur moyenne des biens.

En Belgique, les organismes philanthropiques sont soumis à l’impôt des personnes morales (IPM). L’IPM n’est pas spécifique aux organismes philanthropiques et s’applique à toutes les personnes morales qui ne sont pas soumises à l’impôt des sociétés. Un organisme philanthropique peut s’engager dans une activité économique si elle ne constitue pas son activité principale mais une activité complémentaire dont les bénéfices sont réinvestis dans la cause défendue par l’organisme. Les organismes philanthropiques passibles de l’OIG ne sont pas imposés sur le montant total de leurs revenus nets annuels mais uniquement sur :

  • leurs revenus immobiliers ;

  • leurs revenus de capitaux mobiliers et biens mobiliers, ce qui inclut la première tranche de 1 880 EUR des revenus de dépôts d’épargne et la première tranche de 190 EUR de dividendes provenant de sociétés coopératives ou de sociétés à finalité sociale ;

  • des revenus divers.

Par conséquent, les revenus issus de dons sont exonérés de l’IPM, mais les legs peuvent être soumis à l'impôt régional sur les successions.2

L’IPM est retenu à la source. Si l'organisme philanthropique perçoit des revenus mobiliers ou des revenus divers d'origine mobilière mais que la retenue n’est pas effectuée à la source, l’impôt est dû par le bénéficiaire des revenus. Dans les cas suivants, certains revenus doivent être déclarés :

  • certains revenus immobiliers, comme les revenus nets des terrains et constructions situés en Belgique et loués, sont soumis à un impôt de 20 % ;

  • les plus-values sur immeubles bâtis ou non bâtis sont imposables au taux de 16,5 % ou 33 % ;

  • les plus-values sur cessions de participations importantes, sont imposées au taux de 16,5 % dans les conditions applicables en matière d'impôt sur les revenus des personnes physiques ;

  • les dépenses et avantages financiers ou de toute nature non justifiés sont imposables selon les mêmes modalités que celles prévues pour l'impôt des sociétés (cotisation de 100 % sur les commissions secrètes et de 50 % s’il peut être établi que le bénéficiaire de ces dépenses, avantages financiers ou avantages de toute nature est une personne morale) ;

  • les cotisations pour pensions et les pensions qui sont considérées comme des dépenses non admises à l’impôt des sociétés, les avantages financiers ou de toute nature, ainsi que le montant équivalent à 17 % de l’avantage de toute nature résultant de l’utilisation à des fins personnelles d’un véhicule de société, sont soumis à un impôt de 33 % ;

  • les associations intercommunales exploitant un hôpital ou une institution qui assiste des victimes de la guerre, des personnes handicapées, etc. sont imposables sur les dividendes attribués à d’autres personnes morales à l’exclusion des pouvoirs publics. Le taux de cet impôt est de 25 % et la majoration pour absence ou insuffisance de versements anticipés s’applique selon les mêmes modalités que celles prévues pour l’impôt des sociétés.

En Lettonie, les organismes philanthropiques ne sont pas soumis à l’impôt sur les revenus des sociétés s’ils n’ont pas été constitués dans le but de réaliser des bénéfices ou d’augmenter le capital au profit de leurs membres, d’organisations religieuses, de syndicats et de partis politiques. En outre, l’aide financière perçue d’un organisme d'intérêt général en vue de couvrir les frais d'un traitement médical (y compris en vue d’assurer le transport du patient et d'un accompagnateur vers une institution de soins médicaux) n’est pas incluse dans les revenus annuels imposables et est donc exonérée de l’impôt sur le revenu des personnes physiques.

Au Japon, les revenus des OIG (qui remplissent le critère du but non lucratif) sont exonérés d’impôt. Les activités commerciales que ces OIG sont autorisés à mener sans perdre leur statut privilégié sont précisées par le ministère le plus compétent en la matière (à savoir, en fonction de la cause défendue). En outre, si la moitié ou plus des personnes employées aux fins de l’activité commerciale sont atteintes d'un handicap et que l’OIG contribue améliorer leurs conditions de vie, l’activité ne sera pas considérée comme une activité lucrative et ne sera donc pas imposable.

À Singapour, les revenus de tous les organismes philanthropiques enregistrés au titre de la loi sur les œuvres caritatives sont exemptés de l'impôt sur les revenus. Les OIG peuvent mener des activités commerciales dans le but de générer des revenus supplémentaires ou de fournir des biens ou services à leurs membres ou à leurs clients aux fins de leur cause noble. Néanmoins, ces activités commerciales ne doivent pas nuire à l’objectif de l’organisme philanthropique et le détourner de la cause exclusive qu'il défend. Les conseils d’administration des organismes doivent en outre veiller à ne pas exposer les actifs de l'organisme à un risque important. Les activités commerciales susceptibles de comporter un tel risque doivent être menées par une filiale. Les filiales créées par les organismes philanthropiques sont soumises au même traitement que toute autre société, et leurs revenus sont assujettis à l’impôt sur les revenus.

En Argentine, les organismes philanthropiques sont exemptés de l’impôt sur les revenus des sociétés. En Suisse, les OIG sont exemptés de l’impôt sur les revenus et de l’impôt sur la fortune. En Israël, les donations, les legs, les subventions publiques et les revenus passifs sont exonérés d'impôt. Au Chili, les OIG peuvent être exemptés de l’impôt sur les sociétés sur décision du Président de la République. Cet avantage ne peut être réclamé que par les OIG dont l’objet principal et effectif est de procurer une aide directe aux individus qui disposent de ressources limitées et ne peuvent subvenir à leurs besoins essentiels.

L'Autriche distingue trois types d'activités commerciales : nécessaires, liées, et non liées. L’activité commerciale est réputée nécessaire si la cause noble de l’organisme philanthropique ne peut être servie sans cette activité et que l’organisme exempté ne concurrence pas de manière significative les entreprises qui exercent une activité commerciale similaire. Les revenus générés par les activités commerciales nécessaires (p. ex. la vente de billets d’entrée pour un musée) sont totalement exonérés d’impôt. L’activité commerciale est considérée comme liée si elle constitue un moyen de servir la cause défendue sans pour autant pouvoir être qualifiée de nécessaire. Les revenus générés par les activités commerciales liées sont passibles de l’impôt sur les revenus des sociétés, avec toutefois un abattement de 10 000 EUR. Les organismes philanthropiques qui exercent des activités commerciales non liées sont susceptibles d’être déchus purement et simplement de leur statut ouvrant droit à l’exemption fiscale. Toutefois, si le revenu généré sur l’année fiscale par ces activités est inférieur au seuil de 40 000 EUR, l’organisme peut conserver son statut privilégié. Certaines plus-values réalisées par les OIG sont également exonérées d'impôt. C’est le cas des plus-values sur les cessions d'actions (et des intérêts des actifs financiers) dont il peut être établi qu'elles sont réinvesties dans la cause défendue ; ces plus-values sont exonérées d'impôt si la société est liée à l’OIG.

En Finlande, les organismes philanthropiques sont passibles d’un impôt sur les revenus issus d'une activité commerciale ainsi que d'un impôt de 6,26 % sur les revenus immobiliers utilisés à une fin autre que la cause noble éligible. Pour ces organismes, les revenus générés par les activités ci-dessous ne sont pas considérés comme issus d'une activité commerciale et sont donc exonérés d'impôt :

  • revenus provenant de l'organisation de loteries, de foires, de compétitions sportives, de spectacles de danse, de bingos et d’autres événements de divertissement, ainsi que les revenus issus de buffets, de ventes et autres activités similaires ;

  • revenus tirés de magazines de membres et d’autres publications servant directement la cause de l’organisme ;

  • revenus provenant de collectes de fonds par le biais de la vente de cartes souvenirs, badges, cartes, girouettes et autres produits de ce type ;

  • revenus provenant de la vente de biens ou services fabriqués ou produits à des fins thérapeutiques, ou d’activités d’enseignement dans des hôpitaux, des hôpitaux psychiatriques, des institutions pénales, des maisons de travail, des résidences pour personnes handicapées ou âgées, et des institutions de prise en charge similaires.

Les revenus imposables peuvent être entièrement ou partiellement exonérés d'impôt par l’administration fiscale si cette exonération est justifiée au regard de l’avantage procuré à la société par l’organisme. Pour le déterminer, l'administration examine notamment la proportion des biens et revenus de l’organisme utilisés pour la noble cause dont la société tire avantage. Elle évalue également les risques de distorsion de la concurrence induits par l’exonération de l’activité de l'organisme.

En Allemagne, les revenus générés par des activités liées à la cause noble sont exonérés de l’impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle. Les revenus issus d’activités commerciales qui ne sont pas liées à la cause déclarée ne sont soumis à l'impôt sur les sociétés ou à la taxe professionnelle que si leur montant annuel, TVA incluse, dépasse 35 000 EUR. En outre, les revenus d’actifs financiers des organismes philanthropiques sont exonérés de la retenue à la source applicable aux placements de capitaux.

En Bulgarie, les organismes philanthropiques ne sont pas imposés sur leurs revenus non commerciaux (par exemple les revenus issus de subventions ou de dons) qui contribuent à la réalisation de leur objet principal ; en revanche, tous les organismes philanthropiques à l’exception de la Croix Rouge bulgare sont assujettis à l’impôt sur les sociétés pour leurs revenus provenant d'activités commerciales.

De même, en Grèce, les revenus des organismes philanthropiques liés à la défense de leur cause (cotisations de membres, subventions publiques ou privées, dons, etc.) sont exonérés de l’impôt sur les revenus. En revanche, les revenus d’activités commerciales/économiques (intérêts de placements, événements publics, etc.) sont toujours imposables, qu'ils soient réinvestis ou non dans la cause défendue par l'organisme.

Au Portugal, les revenus des organismes philanthropiques issus de dons ne sont pas imposables ni, en principe, les revenus générés par les activités servant la cause de l’organisme. D’autres sources de revenus, comme les activités commerciales non liées, les actifs financiers et les placements, sont considérées comme imposables.

En Suède, comme dans la plupart des pays, les OIG sont exemptés de l’impôt sur les revenus issus de dons, de subventions, de placements et d’activités servant leur cause. Sont également exonérés les revenus tirés des activités philanthropiques, dont certaines sont menées sous contrat avec l’État, ce qui suggère que les revenus d'activités non liées sont, eux, imposables.

Aux États-Unis, les OIG sont généralement exemptés de l'impôt sur les sociétés. En revanche, les revenus d'activités commerciales non liées (à savoir les activités qui ne sont pas liées de manière substantielle à la cause ouvrant droit à l’exemption) sont imposables au taux de l’impôt sur les sociétés. De fait, ils sont imposés au taux maximal mais bénéficient d’un abattement de 1 000 USD. Les revenus liés à la cause qui ouvre droit à l’exemption sont généralement exonérés de l’impôt sur les revenus. Pour ce qui est des revenus issus de missions sous-traitées, les règles varient en fonction du mode de sous-traitance. Si l’organisme paie une entreprise de gestion pour exercer une activité, et que la totalité des revenus est reversée à l’organisme, ces revenus seront assimilés à des revenus commerciaux non liés et imposables en tant que tels. De même, si l'organisme est partie à un partenariat et que ce partenariat mène l’activité en question, les revenus seront imposables. En revanche, si les revenus proviennent d'une entreprise qui ne fait que verser un loyer à l’OIG, ils ne seront en principe pas imposables. Il en va de même pour les revenus passifs, comme les redevances ou les dividendes.

Comme nous l’avons mentionné plus haut, l’Autriche, l’Allemagne et les États-Unis appliquent des seuils et distinguent entre les revenus commerciaux liés et non liés. En Autriche, dès lors que les revenus commerciaux liés ou non liés dépassent le plafond qui leur est respectivement applicable, l’organisme philanthropique peut être déchu de son statut d’exemption. En revanche, en Allemagne et aux États-Unis, les revenus commerciaux non liés qui dépassent un certain seuil deviennent imposables. Plusieurs autres pays (la France, la Hongrie, le Mexique, les Pays-Bas, la Norvège, la République slovaque et l’Afrique du Sud) ont recours à des plafonds pour déterminer l'imposition des revenus des organismes philanthropiques.

En France, les OIG qui mènent une activité commerciale de manière régulière ou occasionnelle sont exemptés des impôts appliqués aux entreprises (TVA, impôt sur les sociétés, cotisation foncière des entreprises), à condition que l’activité lucrative ne concurrence pas le secteur commercial et que les recettes encaissées au cours de l'année civile pour cette activité ne dépassent pas 72 000 EUR. Les OIG exemptés de l'impôt sur les sociétés restent soumis à cet impôt à des taux réduits pour les revenus provenant de la gestion d'actifs tels que :

  • les revenus issus de la location d’immeubles bâtis ou non bâtis dont l'association est propriétaire (taux d’IS de 24 %) ;

  • les bénéfices provenant d’exploitations agricoles ou forestières (taux d’IS de 24 %) ;

  • les dividendes (taux d’IS de 15 %) ;

  • les revenus d’autres valeurs mobilières (taux d’IS de 10 % ou 24 %).

En Hongrie, les OIG sont exemptés de l’impôt sur les sociétés si leurs revenus issus d’activités commerciales (dont la gestion de biens immobiliers) ne dépassent pas 15 % du montant total des revenus. En Inde, les organismes philanthropiques qui ne sont pas engagés dans une des activités philanthropiques définies mais qui figurent parmi les organismes œuvrant pour procurer un autre avantage d’intérêt général peuvent tirer 20 % de leurs revenus d’activités professionnelles, commerciales ou lucratives, à condition que ces revenus soient générés au cours d’activités servant à l’avancement de leur cause.

Au Mexique, sont exonérés de l'impôt sur les revenus les dons, les subventions publiques, la vente de biens meubles ou immeubles, les cotisations de membres, les frais de recouvrement, les intérêts, les revenus de la propriété intellectuelle, l'utilisation ou la jouissance temporaire d’un bien immobilier, et les rendements d'actions ou autres instruments financiers, à condition qu'ils soient utilisés aux fins pour lesquelles ils ont été autorisés. En outre, les organismes philanthropiques peuvent tirer des revenus d'activités qui ne servent pas les fins qui leur ont valu leur statut, à condition qu'ils ne dépassent pas 10 % du montant total des revenus.

Aux Pays-Bas, les organismes philanthropiques ne sont assujettis à l'impôt sur les sociétés que si : 1) ils participent à l’économie de marché avec de la main d'œuvre et du capital et réalisent des bénéfices par ce biais, ou (2) leurs activités concurrencent le secteur commercial, ou (3) aucune exonération n’est applicable. L’exonération s’applique si l’excédent de l’organisme est inférieur à 15 000 EUR pour l'année, ou à 75 000 EUR cumulés au cours des quatre années précédentes.

En Norvège, les organismes philanthropiques ne sont pas soumis à l'impôt sur les revenus pour les dons, legs et subventions reçus. Il en va de même pour les revenus générés par toute activité commerciale qui ne contribue pas à la réalisation de son objectif noble, à condition que leur montant annuel ne dépasse pas 140 000 NOK. Sont assimilées à ces revenus les plus-values résultant de l’activité économique. En revanche, les plus-values réalisées dans le cadre d'activités exonérées parce que liées à la cause noble ne sont pas soumises à l’impôt.

En République slovaque, les revenus des organismes philanthropiques sont en principe exonérés d'impôt, à l’exception des revenus commerciaux et des revenus d'origine immobilière (loyers) ou publicitaire, ou provenant de la vente d'actifs ou de cotisations de membres au-delà de 20 000 EUR par an.

En Afrique du Sud, seules les activités servant le bien-être social, l’éducation, la santé et la conservation peuvent donner droit à une déduction de l'impôt sur les revenus. Les autres causes (voir tableau 3.1) ne sont exonérées que des droits de donation. En outre, les revenus commerciaux des organismes philanthropiques sont exonérés à hauteur de 15 %, les montants au-delà de ce pourcentage étant soumis au taux normal de l'impôt sur les sociétés.

Dans les pays qui ont fait le choix de la seconde méthode (exonération des revenus s'ils sont réinvestis dans la cause noble), la destination des revenus prime le plus souvent sur leur source. Cela signifie que tant que l’excédent de l’organisme philanthropique est réinvesti dans la cause noble au cours d'une période donnée, les revenus sont exonérés d'impôt. Si, en revanche, l’organisme décide de différer le réinvestissement, de mettre l’excédent en réserve ou de l'investir ailleurs que dans la cause défendue, cet excédent pourra être imposé.

En Colombie, le traitement fiscal des revenus des organismes philanthropiques varie suivant que le bénéfice net, ou l’excédent, est réinvesti et, le cas échéant, suivant la façon dont il est réinvesti. D'autres pays couverts par ce rapport exonèrent automatiquement les revenus non commerciaux (et ne les considèrent donc par comme imposables). En revanche, en Colombie, toutes les formes de revenus sont considérées comme imposables ; l’avantage fiscal permet en fait à l’organisme d’affecter son bénéfice net ou son excédent (généré par le revenu en question) à la réalisation de son objectif social.

En Indonésie, les dons et les subventions perçus par les organismes philanthropiques constituent des revenus non imposables. Un organisme œuvrant pour l’éducation ou la recherche et le développement qui dégagerait un excédent ne sera exempté que si cet excédent est réinvesti dans une cause noble (l’éducation ou la recherche et le développement) dans un délai de quatre ans à compter de la perception des revenus en question. De même, en République tchèque, l’exonération de l’impôt sur les sociétés ne s’applique aux revenus de l’OIG que s'ils sont utilisés ou destinés à être utilisés pour des causes nobles spécifiques.

En Irlande, l’enregistrement de l'organisme philanthropique auprès de la commission des œuvres caritatives n’emporte pas automatiquement son exemption. Ainsi que nous l'avons vu au début de ce chapitre, pour être exemptés d’impôt, les organismes doivent adresser une demande distincte à l’administration fiscale. Une fois le statut d’exemption accordé, les organismes sont également exonérés de l'impôt sur les plus-values et de l’impôt sur les revenus commerciaux, à condition que ces revenus soient employés aux fins de la cause qu'ils défendent. Les organismes philanthropiques bénéficient également d'un dispositif d’abondement des dons qui est décrit plus en détail au chapitre 4.

En Lituanie, les organismes philanthropiques sont assujettis à l’impôt sur les sociétés. Les règles de calcul du bénéfice imposable sont celles qui s’appliquent à leurs homologues du secteur commercial. Néanmoins, un traitement fiscal préférentiel leur permet de réduire le bénéfice imposable calculé selon les règles du régime général des sociétés en déduisant les fonds affectés directement à une cause noble lors de l’exercice en cours ou des deux exercices suivants. Si le montant des fonds directement affectés au financement d’activités servant la noble cause lors de l'année fiscale en cours excède le montant des bénéfices imposables calculés pour cette période, l'organisme peut reporter le montant excédentaire afin de diminuer le montant des bénéfices imposables calculé pour les deux exercices suivants. Les dons en numéraire provenant d’un même donateur et excédant 9 750 EUR pour la période fiscale retenue ainsi que les dons qui ne sont pas utilisés à des fins d'intérêt général sont en principe imposés au taux habituel de l'impôt sur les sociétés, soit 15 %.

Le traitement préférentiel en matière de TVA peut s'appliquer aux intrants (achats) de l'organisme ainsi qu’à ses extrants (fournitures - ventes ou aliénations). En ce qui concerne les intrants, les organismes philanthropiques acquittent la TVA sur leurs achats (sauf pour les biens ou services exonérés). Les organismes qui ne sont pas enregistrés à la TVA peuvent être assimilés au consommateur final et ne pas pouvoir, par conséquent, récupérer la TVA payée sur leurs intrants sans un dispositif fiscal spécifique. Il en va de même pour les organismes enregistrés à la TVA mais qui ne génèrent pas de ventes imposables. Il est également possible qu’un organisme philanthropique ne puisse pas réaliser des ventes imposables parce que les biens ou services qu'il fournit (extrants) bénéficient d'une exonération, ou parce qu’ils n’entrent pas dans le champ d'application de la TVA. À l’inverse, les organismes philanthropiques qui facturent la TVA sur leurs ventes (y compris celles de biens ou services imposés à taux zéro) pourront récupérer la TVA acquittée sur leurs intrants.

En conséquence, les pays peuvent décider de dispenser les organismes philanthropiques de facturer la TVA sur leurs extrants (ou prévoir un plafond applicable aux revenus tirés de ces extrants), mais cela peut créer pour ces organismes une charge fiscale sur les intrants. Certains pays octroient donc des allégements fiscaux aux organismes philanthropiques qui ne sont pas en mesure de récupérer la TVA payée sur leurs intrants (ou ne peuvent en récupérer qu'une partie).

Or, les exonérations de TVA, les taux réduits ou les taux zéro peuvent induire une concurrence déloyale, notamment si les biens ou services exonérés que fournit l’organisme philanthropique sont également proposés par des entreprises qui facturent la TVA sur leurs ventes. Certains pays refusent donc d’exonérer de la TVA une partie des biens ou services fournis par les organismes philanthropiques afin de parer à toute concurrence déloyale (c’est le cas du Canada et de l’Irlande). La Belgique, le Chili, la Colombie, l’Estonie, l’Indonésie, l’Italie et la République Slovaque ne prévoient pas de traitement préférentiel en matière de TVA pour les organismes philanthropiques et leur appliquent le régime général de la TVA. Toutefois, en Italie, où les organismes philanthropiques ne bénéficient pas de traitement préférentiel en matière de TVA, les OIG sont dispensés de l'obligation de produire des justificatifs de leurs ventes tels que des factures et des reçus.

Les organismes (ou les activités des organismes) peuvent être exemptés de la TVA au titre de leur statut d’OIG (c’est le cas en France), parce que leurs activités n’entrent pas dans le champ d’application de la TVA, ou parce qu’elles sont en-deçà du seuil d’assujettissement.

En Argentine, les services des organismes philanthropiques qui présentent un lien direct avec leur objectif principal sont exonérés de la TVA. Les dons de tiers, les cotisations de membres et les frais facturés aux membres pour des activités statutaires spécifiques sont donc totalement exonérés de la TVA. Pour d'autres transactions, les OIG sont soumis au régime général.

L'Australie prévoit un plafond de revenus plus élevé pour l’assujettissement à la TVA des organismes philanthropiques. Les organismes éligibles ne sont pas tenus de s’enregistrer à la TVA tant que leur chiffre d’affaires reste inférieur à 150 000 AUD (sachant que les autres organismes sont assujettis à la TVA à compter de 75 000 AUD). Dans certains cas, les OIG peuvent choisir le traitement qui sera appliqué à leurs activités. Ainsi, un OIG (une association de parents par exemple) qui gère la cantine scolaire d'une école primaire ou secondaire pourra choisir d’être exonéré de la TVA, et n'aura donc pas à récupérer la TVA sur ses ventes de nourriture. Mais dans ce cas, la cantine scolaire ne pourra pas réclamer de crédits de TVA pour ses achats. Dès lors que l’OIG choisit d’être exempté de la TVA (et donc de payer la taxe sur ses intrants), il ne peut pas revenir sur sa décision avant 12 mois. De même, tous les organismes philanthropiques peuvent choisir d’exonérer de TVA les événements qu'ils organisent en vue de collecter des fonds ; dans ce cas, ils devront acquitter la taxe sur les intrants et ne pourront pas réclamer de crédits de TVA. Cette solution présente l'intérêt de réduire la charge administrative.

En Autriche, tous les organismes philanthropiques ne sont pas exemptés de la TVA. Les OIG dont la cause est « culturelle » ou tient à la « promotion du sport », ceux qui dirigent des établissements de soins ou de prise en charge, ou encore ceux qui procurent un hébergement et de la nourriture aux jeunes de moins de 27 ans en formation professionnelle, ne sont pas assujettis à la TVA. Les autres organismes philanthropiques sont soumis au régime général.

En Grèce, sous certaines conditions, les organismes philanthropiques peuvent être dispensés de facturer la TVA sur certains biens et services, comme la fourniture aux personnes engagées dans le sport ou l’éducation physique de services présentant un lien étroit avec le sport ; la fourniture de services à leurs membres par les organismes philanthropiques et autres organisations à vocation religieuse, philosophique ou caritative ; la fourniture de services culturels ou éducatifs par les organismes philanthropiques à vocation culturelle ou éducative (et notamment la fourniture de services aux visiteurs de musées, de monuments, de sites archéologiques et similaires, ainsi que l’organisation d’événements, d’expositions et de conférences artistiques) ; et les services fournis par les organismes susmentionnés dans le cadre d’événements qu'ils organisent afin de lever des fonds.

En Israël, les OIG acquittent la TVA sur les biens et services qu'ils achètent et qu'ils utilisent dans le cadre de leur activité philanthropique. Cette TVA payée par les OIG sur les intrants n’est pas déductible puisque les biens et services fournis par les OIG dans le cadre de leur activité philanthropique ne sont pas assujettis à la TVA. Si l’OIG mène une activité commerciale, celle-ci est assujettie à la TVA ; par conséquent, la TVA acquittée sur les intrants affectés à l’activité commerciale est déductible de la TVA collectée au titre de cette activité.

En Lettonie, les activités non commerciales des OIG sont en principe exclues du champ d'application de la TVA, tandis que les activités commerciales des OIG sont soumises au régime normal de la TVA. Cependant, le traitement de l’OIG en matière de TVA est évalué au cas par cas. Ainsi, la TVA payée sur les intrants affectés à l’activité philanthropique n’est pas déductible, contrairement à la TVA payée sur les intrants utilisés pour l’activité commerciale. Mais si l’OIG « vend » des biens et des services dans le cadre de son activité philanthropique, cette vente sera assimilée à une transaction imposable. Le montant imposable de cette transaction correspond au prix d'achat des biens ou au coût total de la fourniture de ces services par l’OIG.

Au Mexique, les organismes philanthropiques sont exemptés de la TVA sur la vente de biens, la fourniture de services et l'utilisation ou la jouissance temporaires de biens dans le cadre de leurs activités. En revanche, ils ont l'obligation de payer et de retenir la TVA lorsqu'ils reçoivent des biens ou services personnels indépendants fournis par des particuliers.

Au Portugal, les organismes philanthropiques sont dispensés de facturer la TVA sur les biens et services liés à :

  • la santé ainsi que la protection et l’assistance sociales (à condition de ne percevoir aucune rémunération) ;

  • l’éducation, ce qui inclut les garderies, les jardins d’enfants, les centres de loisirs, les établissements dédiés aux enfants et aux jeunes qui ne bénéficient pas d'un environnement familial normal, les établissements pour enfants et jeunes handicapés, et les centres d'insertion des handicapés ;

  • le sport, les arts et la culture, y compris les activités artistiques, sportives, récréatives, d’éducation physique, et culturelles (ex. : visites de musées, de galeries d'art, de châteaux) ;

  • les activités civiques (ex. : politiques, syndicales) ;

  • les activités religieuses ;

  • et les activités humanitaires.

Les événements de collecte de fonds (ex. : vente de billets d’entrée, frais d'inscription, buffets, buvettes, locations de stands, revenus publicitaires, etc.) sont également exonérés de la TVA dès lors qu’ils sont occasionnels, organisés au seul bénéfice de l’organisme (et qu’ils n’induisent pas une concurrence déloyale), et limités au nombre de huit.

En Roumanie, certaines activités au profit du public sont exonérées de la TVA. Parmi ces activités figurent la fourniture de services étroitement liés au sport et à l’éducation physique par des OIG s'adressant aux individus pratiquant un sport, ainsi que la fourniture de services culturels par des OIG à vocation culturelle reconnus par le ministère de la Culture.

En Afrique du Sud, les OIG doivent faire une demande distincte pour être exemptés de la TVA. Toutefois, en règle générale, les OIG n'ont pas à s’enregistrer à la TVA en tant que fournisseur car leurs activités ne peuvent pas être à dominante commerciale. En matière de TVA, la Suisse prévoit un seuil de 150 000 CHF pour les fournitures. En Finlande, les organismes philanthropiques ne sont assujettis à la TVA que pour leurs activités commerciales.

Aux Pays-Bas, la TVA n’étant pas applicable aux activités non commerciales, la TVA acquittée sur les intrants n’est pas déductible. Ensuite, parmi les activités commerciales, certaines sont assujetties à la TVA tandis que d'autres en sont exonérées. Si l'activité est exonérée, la TVA payée sur les intrants ne sera pas déductible. Si l’OIG est établi aux Pays-Bas et que ses ventes ne dépassent pas le seuil de 20 000 EUR par an, il peut, comme toute petite entreprise, opter pour le régime en franchise de TVA, mais ne pourra pas, dans ce cas, déduire ou récupérer la TVA payée sur ses intrants.

À Singapour, les OIG sont soumis au régime général de la TVA. À cet égard, ils peuvent être considérés comme exerçant des activités commerciales et non commerciales. Les activités non commerciales comprennent la fourniture gratuite de services financés par des subventions, des dons ou des parrainages. Les OIG doivent s’enregistrer à la TVA si le montant annuel de leurs fournitures imposables issues d'activités commerciales dépasse un plafond fixé à 1 000 000 SGD. Dès lors, ils sont tenus de facturer et de déclarer la TVA, notamment, sur les biens et services imposables qu'ils fournissent dans le cadre d’activités commerciales (ex. frais de scolarité ou d’enseignement, frais de garderie) ainsi que les services subventionnés proposés dans le cadre de leurs activités philanthropiques ou religieuses (ex. frais de dialyse, frais de consultation médicale). Comme toute autre entreprise assujettie au régime général de la TVA, les OIG sont autorisés à récupérer la TVA acquittée sur les intrants s’ils sont utilisés pour la fourniture de biens et services imposables dans le cours normal ou pour la poursuite de leur activité. La TVA acquittée sur les intrants dans le cadre d'activités à but exclusivement non lucratif et aux fins de la fourniture de biens et services exonérés ne peut pas être récupérée ; la TVA acquittée dans le cadre d'activités subventionnées (pour partie commerciales et pour partie non commerciales) fait l’objet d'une ventilation, à savoir que l’OIG ne pourra récupérer que la fraction de TVA afférente à la fourniture de biens et services eux-mêmes soumis à la TVA.

L’exemption des organismes ou de certaines activités en matière de TVA pouvant amener les organismes à acquitter la TVA sur leurs intrants, certains pays ont mis en place des mécanismes leur permettant de récupérer une partie de cette TVA.

Au Canada, la majorité des services et une partie des biens fournis par des œuvres de bienfaisance et d’autres OIG assujettis sont exonérés de la TVA. C’est le cas des fournitures d’aliments et de logements dans le but de soulager la pauvreté ou la détresse ; des repas à domicile ; des programmes récréatifs proposés à des enfants et à des personnes handicapées ou défavorisées ; des droits d’adhésion à des organismes ne procurant pas un avantage significatif à certains de leurs membres ; et des cotisations professionnelles obligatoires ainsi que des cotisations syndicales. Toutefois, la TVA est généralement appliquée à certains biens et services fournis par les organismes de bienfaisance similaires à ceux fournis par des organismes non caritatifs. Ainsi, les droits d’entrée dans des lieux de divertissement (comme un cinéma) sont soumis à la TVA, même s'ils sont fournis par un organisme philanthropique. Si la totalité ou la quasi-totalité (90 %) des fournitures de l’organisme philanthropique (extrants) sont taxables, l’organisme peut en principe demander un crédit de taxe égal à 100 % de la TVA payée sur ses intrants utilisés pour les fournitures taxables. Quant à la TVA acquittée sur les intrants qui n'ouvrent pas droit à un crédit de taxe, les organismes philanthropiques sont éligibles à un remboursement partiel. Celui-ci est généralement de 50 %, à moins que l’OIG ne soit également un hôpital public, ou une école, un collège ou une université à but non lucratif, auquel cas ce taux peut être plus élevé. Les organismes de bienfaisance enregistrés qui produisent ou offrent tant des fournitures (extrants) taxables que des fournitures exonérées appliquent une méthode rapide de calcul de leurs obligations en matière de TVA : ainsi, ils conservent généralement 40 % de la TVA qu’ils collectent sur leurs fournitures (extrants) imposables et demandent un remboursement au titre de la TVA payée sur la majorité de leurs intrants ; dans ce cas, pour ces intrants, ils n'auront pas droit aux crédits de taxe.

En Irlande, les activités des OIG peuvent être passibles de la TVA, exclues du champ d’application de la TVA ou exonérées. Si son activité est exclue du champ d’application ou exonérée de la TVA, l’OIG n’est ni tenu ni autorisé à s’enregistrer aux fins de la TVA et à déclarer la TVA sur les revenus issus de ces activités. Toutefois, s’il est considéré que l’activité concurrence celle d’entreprises commerciales, l'OIG pourra être tenu de s’enregistrer et de déclarer la TVA afférente à ces activités. De même si, sur une période de douze mois, l’OIG acquiert ou est susceptible d’acquérir auprès d’autres États membres de l’UE des biens d'une valeur supérieure à 41 000 EUR, il devra s’enregistrer et déclarer la TVA au titre de ces acquisitions intra-communautaires. D’une manière générale, c’est le statut des activités de l’OIG au regard de la TVA qui déterminera le régime applicable à l’ensemble des revenus générés ainsi que la possibilité qui en résulte de déduire la TVA des dépenses associées à ces revenus. En d’autres termes, pour déterminer le régime de TVA de l’OIG, ses activités vont être examinées au cas par cas.

En vertu de la législation irlandaise, les OIG ne peuvent récupérer la TVA sur leurs dépenses que s'ils réalisent des ventes imposables, s'ils sont inscrits à la TVA, et s'ils facturent la TVA sur leurs ventes (ce qui inclut les ventes imposées à taux zéro). Si l’OIG fournit des biens ou des services imposables, il peut réclamer la TVA acquittée sur ses intrants. En revanche, si ses fournitures sont exonérées ou exclues du champ d’application de la TVA, il ne pourra pas récupérer la TVA. Si l’OIG génère à la fois des revenus exonérés, des revenus assujettis, et des revenus hors du champ d’application de la TVA, il peut récupérer la TVA acquittée sur les coûts directs de production de ses ventes imposables ainsi qu'une fraction de la TVA acquittée sur ses frais généraux selon un principe de proportionnalité. L’Irlande s’est en outre dotée d'un régime de compensation de la TVA spécifique aux OIG, qui est expliqué plus en détail dans l’encadré 3.2. Enfin, l’Irlande octroie des allégements de la TVA pour les OIG, les biens et les services suivants :

  • les OIG exerçant dans le transport de personnes atteintes d'un handicap physique lourd et permanent : un remboursement du montant de TVA acquitté peut être réclamé pour l'achat et l’adaptation des véhicules utilisés par des organismes agréés pour le transport de ces personnes ;

  • les radios à destination des aveugles : le remboursement de la TVA acquittée peut être demandé si l'OIG a pour objet principal l’amélioration de la condition des aveugles et si les radios sont destinées à être utilisées par ces derniers ;

  • les appareils à destination des handicapés : le remboursement de la TVA acquittée peut être demandé pour certains dispositifs et appareils achetés par des personnes handicapées ou pour leur compte en vue de les aider dans l’exécution de tâches quotidiennes essentielles ou dans la pratique d'une activité ;

  • embarcations et équipements de sauvetage : le remboursement de la TVA acquittée peut être demandé au titre de l’achat de certaines petites embarcations de sauvetage, de leurs équipements connexes et d’aménagements spéciaux, ainsi qu’au titre des frais de location, de réparation et de maintenance de ces embarcations, si l’OIG assure un niveau suffisant de services de sauvetage et d’assistance en mer et sur les voies de navigation intérieures ;

  • biens humanitaires destinés à l’exportation : un remboursement de la TVA peut être accordé pour les biens achetés à des fins d’exportation par des organismes philanthropiques et destinés à des activités humanitaires, caritatives ou d’enseignement à l’étranger, par ex. sociétés apostoliques, Chernobyl Children Projects, etc. ;

  • dons de matériel médical : un remboursement de la TVA peut être demandé par un hôpital ou un donateur au titre de l’achat de certains instruments et appareils médicaux neufs financés par des dons privés. Le remboursement ne peut être réclamé que par celui, de l'hôpital ou du donateur, qui a acquitté la TVA ;

  • dons d’équipements de recherche : les instituts de recherche, les universités, les écoles et les établissements scolaires similaires engagés dans la recherche médicale en laboratoire peuvent demander un remboursement de la TVA acquittée sur les achats ou les importations d’instruments ou d’appareils neufs (à l’exclusion du moyen de transport) financés par des dons privés.

En Nouvelle-Zélande, les OIG fournissant des biens ou des services imposables dont le montant excède 60 000 NZD par an sont tenus de s’enregistrer aux fins de la TVA. Les OIG qui sont en-deçà du seuil d’enregistrement peuvent faire le choix d’être assujettis à la TVA dès lors qu’ils fournissent des biens ou services imposables. Les règles ne distinguent pas suivant le type d’activités. Les OIG qui fournissent des biens ou des services imposables peuvent récupérer la TVA sur les intrants autres que ceux utilisés pour la fourniture de biens ou services exonérés (ex. location de logement ou services financiers). À ce titre, ils peuvent récupérer la TVA acquittée sur les intrants qui ne sont pas effectivement utilisés pour la fourniture de biens ou de services. Ce régime est plus généreux que les règles de déduction d'impôt sur les intrants applicables aux autres organismes enregistrés, ces derniers ne pouvant, en principe, réclamer la déduction que si l’intrant est utilisé pour la fourniture de biens ou de services imposables. Tous les biens et services vendus par les OIG, autres que les fournitures exonérées, sont soumis à la TVA. Aux fins de la TVA, peu importe que les biens et les services soient vendus dans le cadre d'une activité commerciale ou philanthropique.

Les États-Unis n’appliquent pas de TVA à l’échelle fédérale ; toutefois, les États et les autorités locales ont mis en place des taxes sur les ventes au détail. Les règles spécifiques relatives à l’exonération de ces taxes sont établies par les États et sont variables. Les organismes philanthropiques sont généralement dispensés du paiement de ces taxes sur leurs achats ainsi que de leur collecte au titre des activités commerciales liées, sous réserve qu’ils satisfassent aux conditions prévues par l’État en question, comme la production d’un certificat ou une demande d’éligibilité.

L'Allemagne se démarque en ce qu’elle applique un taux de TVA réduit à certains biens et services fournis par les organismes philanthropiques, tandis que d'autres sont exonérés (p. ex., certains services médicaux). Les organismes peuvent récupérer la TVA payée sur les intrants utilisés pour les fournitures soumises à un taux de TVA réduit. Si les activités de l’OIG ne constituent pas une activité commerciale et qu’elles remplissent les critères de la noble cause et de l’intérêt général, l’organisme est assujetti à un taux de TVA réduit qui s’élève à 7 %.

Les organismes philanthropiques sont parfois propriétaires de biens immobiliers qu'ils utilisent pour réaliser leurs objectifs sociaux ou comme source de revenus. Dans certains pays, les organismes qui utilisent ces biens aux fins de leur cause, par exemple comme espaces de bureaux, ou pour exercer leurs activités philanthropiques, à savoir en les utilisant comme centre de traitement ou de distribution, ou comme infrastructure sportive, ou encore pour organiser des événements, peuvent être exemptés des impôts fonciers. Les organismes philanthropiques qui utilisent leurs biens immobiliers comme source de revenus sont généralement passibles des impôts fonciers sur ces biens, si de tels impôts existent dans leur juridiction.

Au Canada, les organismes philanthropiques peuvent être exemptés de l’impôt foncier sous certaines conditions. Toutefois, ces impôts étant le plus souvent levés à l’échelle municipale, les exonérations, les remboursements et les crédits varient d'une province et d'une municipalité à l'autre. En Allemagne, les biens immobiliers utilisés par les OIG à des fins caritatives sont exonérés de la taxe foncière, qui est un impôt local. En Irlande, les biens résidentiels appartenant à un OIG et utilisés à la seule fin de fournir un logement résidentiel pour faciliter les activités récréatives sont exemptés de la taxe foncière. Cette exemption concerne les organismes philanthropiques dont les biens sont utilisés pour loger leurs membres dans le cadre d’activités récréatives. En Italie, les autorités locales (municipalités et régions) peuvent exempter les organismes philanthropiques des impôts locaux (dont l’impôt foncier). La Roumanie exonère de la taxe sur les immeubles les structures appartenant aux organismes établis par voie de testament dans le but de maintenir, développer ou aider des institutions culturelles nationales, ou à soutenir des actions humanitaires, sociales et culturelles, ou fondés dans l’un de ces buts conformément à la législation. Les organismes philanthropiques dont les immeubles sont utilisés aux fins de la fourniture de services sociaux peuvent se voir accorder des exonérations ou des réductions de cet impôt par les conseils locaux. À Singapour, les OIG sont exemptés de l’impôt foncier sur les biens immobiliers qui sont exclusivement utilisés pour des cultes publics, comme école publique, à des fins caritatives, ou pour promouvoir le progrès social à Singapour.

Aux États-Unis, les règles de l’impôt foncier sont établies par les États. Les terrains et les bâtiments des églises en sont généralement exonérés, même si certains États limitent la surface éligible (par exemple à un hectare). En règle générale, les terrains et bâtiments des autres organismes à but non lucratif sont également exonérés de cet impôt, bien que cette exonération soit parfois réservée à certains types d’organismes à but non lucratif. En Suède, les OIG sont exemptés de l’impôt foncier si le bien est principalement utilisé pour des activités servant leur noble cause.

Enfin, certains pays octroient aux organismes philanthropiques des avantages propres à leur législation fiscale. Ainsi, en Norvège, les organismes philanthropiques sont exemptés des cotisations patronales de sécurité sociale sur les salaires liés à leur activité d'intérêt général. Cette exemption est plafonnée à un montant total de salaires de 800 000 NOK et à 80 000 NOK par employé. Tant l’Australie que la Nouvelle-Zélande lèvent une taxe FBT (Fringe Benefits Tax) relative aux avantages en nature, mais accordent un traitement fiscal préférentiel aux organismes philanthropiques (voir encadré 3.3).

Au Portugal, les OIG sont exemptés des taxes sur les véhicules utilisés pour l’exercice de leurs activités philanthropiques. Aux Pays-Bas, les OIG (dont les églises) peuvent, sous certaines conditions, bénéficier du remboursement de la moitié de la taxe énergétique qu’ils acquittent. En France, les OIG équipés d’un téléviseur au 1er janvier de l'année fiscale sont redevables de la contribution à l’audiovisuel public. Toutefois, les organismes qui hébergent des personnes en sont généralement exemptés. En Italie, les organismes philanthropiques sont exemptés du droit de timbre et du droit de licence qui sont en principe applicables à la certification de documents et aux procédures d’autorisations administratives. Les États-Unis ont récemment adopté de nouvelles taxes qui s’appliquent aux organismes exemptés de l'impôt sur les revenus (voir encadré 3.4).

Il y a abus des avantages fiscaux octroyés aux organismes philanthropiques lorsque le statut fiscal privilégié d’un fonds ou d'un OIG est utilisé indûment par l’organisme lui-même, des contribuables ou des donateurs, voire par des tiers, comme dans le cas de fraudeurs qui se feraient passer pour un organisme philanthropique, ou de professionnels de l’établissement de déclarations fiscales qui falsifieraient des déclarations afin d'escroquer l’État (OCDE, 2009[4]). L'abus d'avantages fiscaux et le détournement de fonds destinés à des fins publiques qui font l'objet de ce chapitre se concentrent sur les organismes eux-mêmes. Les abus peuvent prendre les formes suivantes :

  • le versement de salaires et de rémunérations excessifs aux administrateurs et aux employés d’OIG et de fonds ;

  • le détournement de fonds destinés à des fins publiques en vue de servir des intérêts privés, par exemple l’utilisation des ressources de l'organisme à des fins personnelles comme l'achat de voitures, de locaux, ou l’embauche de membre de la famille non qualifiés ;

  • l’usurpation de la qualité d’OIG par un organisme à but lucratif pour bénéficier d'avantages fiscaux ;

  • un investissement par un organisme philanthropique dans des sociétés détenues ou contrôlées par des employés de l’organisme ;

  • la liquidation d'un OIG avec distribution du boni de liquidation à des personnes physiques au mépris des règles fiscales ;

  • des emplois salariés déguisés en bénévolat (avec défaut de déclaration des salaires ou rémunérations) ;

  • un organisme non inscrit à la TVA qui exerce des activités imposables.

Au Canada, les mécanismes impliquant des transactions entre des organismes philanthropiques et des personnes et entités présentant un lien de dépendance sont une source de préoccupation constante. Parmi ces transactions figurent par exemple des investissements réalisés par un organisme de bienfaisance dans une société détenue par des personnes physiques qui contrôlent cet organisme, ou des prêts à taux bas ou à taux zéro accordés à ces personnes ou sociétés. Ces montants présentent souvent un risque important de défaut de remboursement. La conclusion de contrats instituant des montants bien supérieurs à la juste valeur du marché entre des organismes de bienfaisance et des personnes physiques ou des sociétés qui contrôlent l'organisme s’analyse également en une transaction avec lien de dépendance. Il en va ainsi du versement de rémunérations, du paiement de dépenses personnelles et de l'octroi d'avantages en nature excédant la juste valeur du marché. En Colombie, plusieurs mécanismes de fraude ont été mis au jour, comme la constitution d’organismes philanthropiques fictifs afin de bénéficier d’avantages fiscaux tels que ceux prévus par le régime fiscal spécial des organismes à but non lucratif. Par exemple, la société M verse des fonds à l’OIG X, un organisme jouissant d’un traitement fiscal préférentiel. La société M bénéficie ainsi d’un crédit d'impôt correspondant à 25 % du montant du don, tandis que l’OIG X affecte le don reçu à des programmes dont la société M est un sous-traitant, cette dernière récupérant par conséquent le montant initialement versé sous forme de revenu. Pour faire obstacle à ces mécanismes, certains pays ont mis en place des politiques spécifiques, et notamment des règles strictes en matière de contrepartie pour le donateur, qui sont traitées au chapitre 4.

D'après un rapport de l’OCDE de 2009 consacré aux abus des organismes de bienfaisance à des fins de blanchiment d'argent et d’évasion fiscale, plusieurs pays ont identifié des mécanismes d’évasion fiscale liés aux organismes philanthropiques. Le Canada, la République tchèque et les États-Unis ont ainsi observé des stratagèmes consistant à créer un organisme philanthropique de manière à recevoir l’autorisation nécessaire pour émettre des reçus de dons, mais qui ne mène pas les activités servant la cause affichée, les auteurs du montage utilisant au contraire les fonds de l'organisme dans leur intérêt personnel (OCDE, 2009[4]). Selon le rapport, l’autorité fiscale canadienne a en outre constaté que les organismes de bienfaisance et les préparateurs de déclarations fiscales dont l’implication dans l’émission de faux reçus avait été établie n’avaient pas mis fin à leurs pratiques. À l’époque, le rapport de 2009 avait conclu que les suspicions de falsification de déclarations et de reçus s’étaient intensifiées avec les progrès des technologies d'impression. Les activités les plus douteuses semblaient impliquer des préparateurs de déclarations fiscales et le recours à des services électroniques.

Autre enseignement de taille livré par le rapport de l’OCDE de 2009 : même si c’est rarement le cas, il arrive que le secteur philanthropique soit exploité à des fins terroristes. Par conséquent, les pays doivent rester vigilants face à certains risques et vulnérabilités. Aux États-Unis, les efforts de détection, les enquêtes et les poursuites visant les organismes philanthropiques ont démontré que l’exploitation des organismes philanthropiques à des fins terroristes était une réalité.

L'Australian Charities and Not-for-profits Commission (ACNC, 2020[5]) a rendu publics quelques-uns des mécanismes identifiés qu’utilisent les organisations terroristes pour exploiter les organismes philanthropiques aux fins de lever des fonds et de les affecter à leurs activités :

  • un OIG résident partenaire d’une organisation située à l’étranger qui utilise ses fonds pour financer le terrorisme ;

  • des organisations terroristes utilisant les actifs d’un organisme philanthropique (ex. véhicules, entreposage, etc.) ;

  • des organisations terroristes tentant d’usurper le nom et le statut d'un organisme philanthropique pour lever des fonds à l'insu de l'organisme ;

  • des organisations terroristes tentant d'infiltrer l'organisme philanthropique afin de détourner des fonds pour financer des fins terroristes ;

  • une organisation terroriste montant et enregistrant un organisme philanthropique en dissimulant ses véritables intentions.

Pour lutter contre la fraude aux avantages fiscaux destinés aux organismes philanthropiques (ainsi que les mécanismes d’évasion fiscale et de financement du terrorisme), les pays doivent veiller à ce que les exigences administratives (notamment la procédure de demande, ainsi que les obligations déclaratives annuelles le cas échéant) permettent à l'organe de contrôle d’identifier et de surveiller les activités et les organismes suspects. Mais les organismes philanthropiques ont également un rôle à jouer pour limiter ces abus. Ainsi que nous l’avons vu, certains stratagèmes se déroulent à l'insu de l'organisme. C’est pourquoi il est important que les organismes eux-mêmes mènent régulièrement des enquêtes et des audits internes et fassent preuve d’une vigilance accrue avant de financer certains projets ou de s’associer à d'autres organisations.

Du côté de l'organe de contrôle de l’État, des vérifications poussées lors du traitement de la demande de statut ou de renouvellement de statut devraient permettre de détecter certains abus. En Belgique, l’administration fiscale vérifie notamment que l’organisme respecte les exigences relatives à l’établissement et la remise de reçus fiscaux, même si l'organisme a déjà été agréé par le passé (OCDE, 2009[4]).

Dans certains pays, les autorités fiscales enquêtent sur les cas de fraude dans le secteur philanthropique en conjonction avec d'autres autorités répressives. L’échange de bonnes pratiques et de renseignements entre les administrations fiscales et les autorités répressives permet aux pays de détecter et de surveiller plus efficacement les mécanismes de fraude fiscale.

Il est également important d’informer le public, et notamment les donateurs, sur les mécanismes mettant en cause des organismes philanthropiques. D’après le rapport de l’OCDE de 2009 consacré aux abus portant sur les organismes caritatifs, certains pays comme le Canada et les États-Unis ont réalisé des campagnes de sensibilisation pour alerter le public sur les risques associés à ces abus (OCDE, 2009[4]). Ainsi, le Canada et les États-Unis publient des alertes fiscales sur leurs sites Internet afin d'informer sur des stratagèmes relatifs aux dons (notamment les abris fiscaux) et sur les fraudes portant sur les dons aux organismes de bienfaisance qui sont organisées par certains intermédiaires (comme les préparateurs de déclarations fiscales). Au Canada, les contribuables peuvent consulter en ligne la liste des organismes de bienfaisance et s'informer sur les organismes enregistrés, les organismes nouvellement enregistrés, ceux dont le statut a été révoqué ou suspendu, ceux dont le statut a été définitivement annulé et ceux qui ont fait l'objet de pénalités. Les citoyens peuvent également accéder aux déclarations de renseignements annuelles remplies par les organismes enregistrés.

Les organismes philanthropiques sont généralement soumis à une obligation de non-distribution tant que l’organisme est en activité. Mais la question de savoir si le paiement des salaires aux employés enfreint cette notion de non-distribution peut parfois se poser. En général, l’obligation ne fait pas obstacle au paiement d'une rémunération « raisonnable » en contrepartie de services (ou de la fourniture de biens). Certains pays prévoient des restrictions sur ce point, tandis que d'autres sont moins exigeants. La mise en place d’obligations de divulgation peut réduire les risques de rétributions excessives.

Pour éviter que les revenus non imposés et les dons reçus d’organismes philanthropiques ne servent les intérêts personnels d’individus associés à l'organisme, certains pays ont établi des règles strictes en matière de rémunération et de dépenses totales d’emploi. Au Canada par exemple, les administrateurs des OIG ont droit à une rémunération raisonnable pour les services rendus. Cette rémunération inclut des indemnités de présence et le remboursement des frais, mais ne peut constituer à proprement parler un salaire au titre de la fonction d’administrateur. En Suisse, les membres des comités ou des conseils de fondation (ou d’administration) travaillent bénévolement et n’ont en principe droit qu’au remboursement de leurs dépenses effectives ainsi que de leurs frais et débours. Toutefois, les membres du conseil de fondation (ou d’administration) qui fournissent des services spéciaux peuvent bénéficier d'une rémunération adéquate.

En Colombie, le budget destiné à l’indemnisation, à la rémunération ou au paiement, en numéraire ou en nature, au titre de salaires, de frais ou de commissions, des personnes occupant des postes de gestion ou de direction au sein d'un organisme philanthropique ne peut dépasser 30 % des dépenses annuelles totales de l'organisme. En cas de dépassement, l’organisme peut être déchu de son droit au régime fiscal spécial.

En Irlande, les membres du conseil d'administration et les trustees d'un OIG ne peuvent accepter de percevoir un salaire ou de bénéficier d’une quelconque contrepartie au seul titre de leur fonction. En revanche, ils peuvent se faire rembourser les dépenses raisonnables qu'ils engagent dans l’exercice de leur mission. De même, en Australie, les membres du conseil d'administration ne sont en principe pas rémunérés, mais ils peuvent être remboursés de leurs frais.

En Suède, les administrateurs ont droit à une rémunération, à condition que l’OIG utilise la majeure partie de ses revenus aux fins de la cause qu'il défend. Aux Pays-Bas, les OIG peuvent recourir à des bénévoles, qui peuvent percevoir une modique indemnisation au titre de leur travail. Si l’indemnisation correspond au prix du marché, le bénévole sera considéré comme un employé et sera soumis au régime général des employés. En Afrique du Sud, les employés et les membres du conseil d'administration des organismes philanthropiques ont droit à une rémunération qui est imposée comme leur revenu personnel. De plus, 75 % de l’ensemble des dons reçus par les organismes philanthropiques doivent être affectés annuellement à la cause qu’ils défendent. Les 25 % restants peuvent être utilisés pour la rémunération des employés et des personnes intervenant dans l’entité ainsi que pour les autres dépenses. Les États-Unis appliquent un impôt de 21 % aux rémunérations excessives (supérieures à 1 000 000 USD) pour les cinq employés les mieux payés des organismes exemptés (voir encadré 3.4 pour plus de précisions).

Références

[5] ACNC (2020), Governance Toolkit: Financial Abuse, https://www.acnc.gov.au/for-charities/manage-your-charity/governance-hub/governance-toolkit/governance-toolkit-financial.

[2] Henry, K. et al. (2009), Australia’s Future Tax System, https://treasury.gov.au/review/the-australias-future-tax-system-review.

[1] OECD (2019), Tax Administration 2019: Comparative Information on OECD and Other Advanced and Emerging Economies, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/74d162b6-en.

[4] OECD (2009), Report on abuse of charities for money-laundering and tax evasion, http://oecd.org/dataoecd/30/20/42232037.pdf.

[3] Tax Working Group (2019), Future of Tax: Final Report, Tax Working Group, https://taxworkinggroup.govt.nz/resources/future-tax-final-report-vol-i.

Notes

← 1. Dans ce rapport, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les taxes équivalentes frappant les biens et les services dans certains pays sont regroupées sous l'acronyme « TVA ».

← 2. Dans la région de Bruxelles Capitale par exemple, un taux réduit de 7% est appliqué aux legs (biens mobiliers et immobiliers).

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