Chapitre 5. Utiliser les compétences efficacement dans le cadre professionnel et social

Ce chapitre présente la section du tableau de bord de la Stratégie de l’OCDE sur les compétences consacrée à l’utilisation efficace des compétences, qui permet d’évaluer et comparer les résultats des pays. Il examine ensuite un ensemble de priorités liées à l’utilisation des compétences qui doivent guider l’action des pouvoirs publics : 1) relever le taux d’activité ; 2) encourager la participation sociale ; 3) élargir le vivier de talents disponibles ; 4) favoriser une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel ; 5) réduire les déséquilibres en matière de compétences ; et 6) stimuler la demande de compétences de haut niveau.

    

Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.

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Encadré 5.1 Principaux enseignements concernant l’utilisation efficace des compétences dans le cadre professionnel et dans la vie sociale

Relever le taux d’activité. Le développement des compétences n’aura l’impact souhaité sur l’économie et la société que si ces compétences sont mises à profit sur le marché du travail. Identifier les obstacles au travail et intervenir à un stade précoce pour promouvoir l’égalité des chances. Mettre en place des incitations au travail efficaces, en accompagnant les filets de protection d’une stratégie d’activation efficace. Aider les travailleurs dont l’emploi est supprimé au moyen de mesures de retour à l’emploi intervenant en amont du licenciement, notamment des services de conseil et de recyclage solidement étayés par des informations sur les besoins en compétences.

Encourager la participation sociale. L’acquisition d’un bagage de compétences cognitives, sociales et affectives équilibré augmente les chances des adultes d’obtenir des résultats sociaux positifs et leur permet de participer davantage à la vie de la société. Les pouvoirs publics peuvent sensibiliser les citoyens aux avantages découlant de l’utilisation des compétences dans la société civile. Ils peuvent également mettre en place des dispositifs incitatifs pour réduire les obstacles à l’utilisation des compétences dans la société civile, par exemple la possibilité de s’absenter du travail ou des incitations financières pour faire du bénévolat.

Élargir le vivier de talents disponibles. Attirer les compétences recherchées de l’étranger, améliorer la transparence des compétences et assurer la formation linguistique. Les migrants représentent actuellement à peu près un dixième de la population des pays membres de l’OCDE ; néanmoins, ils sont plus susceptibles d’être surqualifiés, et les immigrés hautement qualifiés ont également un taux d’emploi inférieur à celui des autochtones hautement qualifiés. Les pouvoirs publics devraient collaborer avec les employeurs pour assurer la reconnaissance des qualifications étrangères et faire en sorte que les migrants puissent rapidement acquérir une expérience professionnelle. Les formations en langues sont un moyen de réduire un obstacle important au travail, et devraient dans l’idéal être dispensées sur le lieu de travail.

Aider les employeurs à mieux utiliser les compétences de leurs salariés. Les autorités publiques peuvent aider les entreprises en les sensibilisant aux avantages des pratiques de gestion et des formes d’organisation du travail améliorées, qui rendent l’utilisation des compétences plus efficace – par exemple le travail en équipe, la hiérarchisation des tâches, le mentorat, la rotation des postes, la mise en pratique de nouveaux apprentissages, les primes incitatives et les horaires de travail flexibles. Les autorités peuvent également diffuser les bonnes pratiques, élaborer des outils de diagnostic pour aider les entreprises à évaluer leur marge d’amélioration, encourager le transfert de connaissances et mettre en place des programmes de développement des compétences en gestion. Les interventions devraient être ciblées sur les petites et moyennes entreprises (PME), qui peuvent plus difficilement changer leurs pratiques de gestion et modes d’organisation pour des raisons de coût.

Réduire les déséquilibres des compétences. Faciliter le redéploiement des compétences et de la main-d’œuvre vers les professions, régions et secteurs où la demande est la plus forte, en réduisant les obstacles à la mobilité interne et en rendant les marchés du travail plus flexibles. Les cadres d’exercice des professions fondés sur les compétences peuvent contribuer à une meilleure adéquation des compétences, en rendant celles-ci plus visibles.

Stimuler la demande de compétences de haut niveau. Pour éviter à l’économie de s’enfermer dans une situation d’équilibre fondé sur des emplois peu qualifiés, les politiques publiques peuvent orienter la demande vers les compétences de haut niveau. Combiner soutien public à la recherche-développement et politiques d’éducation et de formation, pour stimuler à la fois la demande et l’offre de compétences adaptées à la production de haute technologie. Le renforcement de la collaboration entre les universités et les entreprises et la suppression des obstacles à l’entrée de nouvelles entreprises peuvent également doper la demande de compétences de plus haut niveau.

Introduction

L’un des objectifs de la Stratégie de l’OCDE sur les compétences était d’élargir le discours relatif aux compétences, en y incluant non seulement l’offre mais aussi la demande de compétences. La mesure dans laquelle les compétences sont utilisées dans l’économie et dans la vie sociale a une profonde incidence sur le rendement que les pays peuvent attendre de leurs investissements dans les compétences. Les interventions portant sur l’offre ne peuvent engendrer les gains de productivité souhaités que si elles s’accompagnent de mesures visant à accroître la demande de compétences et à faire en sorte qu’elles soient utilisées efficacement. À dire vrai, l’incapacité à exploiter pleinement les compétences disponibles peut entraîner un gaspillage des investissements initiaux dans le capital humain et condamner les compétences inutilisées à la dépréciation et à l’obsolescence (Guest, 2006[1]). Plusieurs pays ont conçu des politiques et des méthodes efficaces pour tirer le meilleur parti des compétences disponibles et ainsi soutenir l’économie, encourager l’innovation et la croissance et renforcer la cohésion sociale.

Comme on l’a vu dans le premier chapitre, la Stratégie 2019 sur les compétences reconnaît qu’il existe des interactions entre la mobilisation et l’utilisation des compétences. Combinant ces deux concepts, le présent chapitre énonce les principaux messages sur les mesures propices à une utilisation efficace des compétences dans tous les domaines de la vie professionnelle et sociale.

Ce chapitre commence par présenter un ensemble d’indicateurs quantitatifs permettant de comparer l’efficacité avec laquelle les différents pays utilisent les compétences disponibles. Il passe ensuite en revue un ensemble de priorités pour les politiques, en indiquant les principales difficultés rencontrées par les pays et leurs causes sous-jacentes et en proposant des mesures et des méthodes pour y remédier.

Évaluer les résultats en termes d’utilisation efficace des compétences

Forte de l’expérience acquise au fil des travaux menés avec les pays sur des projets de stratégies nationales en matière de compétences, l’OCDE a constitué un ensemble d’indicateurs clés qui permettent d’évaluer les résultats des pays sur le plan du développement de compétences utiles et de l’utilisation efficace des compétences. Ces résultats sont présentés dans le tableau de bord de la Stratégie de l’OCDE sur les compétences, lequel donne aux pays une première indication des atouts et faiblesses comparés de leurs systèmes de compétences et de faciliter l’analyse des arbitrages ou des synergies que peuvent comporter les politiques liées aux compétences.

Le Tableau 5.1 présente la section du tableau de bord de la Stratégie sur les compétences consacrée à l’utilisation efficace des compétences. Les indicateurs qui figurent dans ce tableau ont été choisis pour former une définition large de « l’utilisation des compétences » sur le marché du travail, prenant en compte le taux d’activité, l’utilisation des compétences dans le cadre professionnel et l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences. L’utilisation des compétences étant aussi un élément important d’une citoyenneté engagée et active, le tableau de bord comporte une mesure de l’utilisation des compétences dans la vie quotidienne. Enfin, il contient des indicateurs du degré d’homogénéité de l’utilisation des compétences entre différentes catégories de population (hommes et femmes, groupes d’âge).

Tableau 5.1. Tableau de bord de la Stratégie sur les compétences : utiliser les compétences efficacement dans le cadre professionnel et social
Tableau 5.1. Tableau de bord de la Stratégie sur les compétences : utiliser les compétences efficacement dans le cadre professionnel et social

1. Pour la Belgique (Flandre) et le Royaume-Uni (Angleterre et Irlande du Nord), le tableau combine données régionales (résultats des enquêtes PISA et PIAAC à l’échelon de la Flandre, de l’Angleterre et de l’Irlande du Nord) et données nationales en fonction des sources utilisées.

Note : Le tableau de bord de la Stratégie sur les compétences met l’accent sur les résultats du système de compétences. Les indicateurs pertinents ont été sélectionnés, agrégés et normalisés de telle sorte qu’une valeur élevée et l’appartenance aux « 20 % supérieurs » correspondent aux meilleurs résultats. Les pastilles de couleur représentent le quintile dans lequel le pays est classé pour l’indicateur considéré. La lettre « x » indique que les données pour les indicateurs sous-jacents sont insuffisantes ou manquantes, et les cercles en pointillés indiquent des données manquantes pour au moins un indicateur sous-jacent. Les données ne sont pas disponibles pour tous les indicateurs agrégés de l’ensemble les pays, notamment ceux qui n’ont pas participé à l’Évaluation des compétences des adultes (PIAAC). On trouvera des explications sur les indicateurs sous-jacents dans l’Annexe A.

Les pays aux marchés du travail inclusifs enregistrent généralement de solides résultats

Presque tous les pays qui font partie des plus performants en termes d’emploi et de taux d’activité affichent de faibles écarts de résultats entre les hommes et les femmes et entre les différents niveaux d’instruction, même après contrôle des caractéristiques pertinentes. Les plus exemplaires à cet égard sont les pays scandinaves, la Nouvelle-Zélande et la Suisse. Cela étant, de bons résultats généraux en termes d’emploi et de taux d’activité ne vont pas systématiquement de pair avec un marché du travail inclusif. Au Japon par exemple, les taux d’emploi et d’activité sont élevés, mais les écarts de taux d’emploi entre les sexes demeurent comparativement marqués. En République tchèque et en Slovénie, les taux d’emploi sont supérieurs aux moyennes de l’OCDE, mais les personnes peu instruites sont moins bien loties. Ces pays gagneraient sans doute beaucoup à encourager toutes les catégories de la population à entrer (ou retourner) sur le marché du travail (voir la section « Relever le taux d’activité : réduire les obstacles au travail et mettre en place des mesures d’activation pour les travailleurs licenciés économiques »).

Les pays enregistrant un niveau de compétence élevé sont généralement ceux où les citoyens utilisent davantage leurs compétences à la maison et dans la vie quotidienne

Dans plusieurs pays dotés d’une population très qualifiée, notamment le Canada, la Nouvelle-Zélande et les pays scandinaves, les adultes font un usage plus intense de leurs compétences dans la vie quotidienne, hors du cadre professionnel, que ce n’est le cas dans la plupart des pays membres de l’OCDE. Par exemple, ils lisent des documents financiers, écrivent des articles et mettent à profit leurs compétences en informatique pour utiliser des services numériques. Inversement, dans les pays où le niveau des compétences est relativement faible comme le Chili, la Grèce, l’Italie et la Turquie, l’utilisation des compétences à la maison est parmi les moins élevées de la zone OCDE. Mais il y a aussi des pays qui combinent haut niveau de compétence et faible utilisation des compétences, en particulier en dehors du cadre professionnel. Au Japon, notamment, l’utilisation des compétences à l’écrit et en TIC en dehors du travail est faible malgré un niveau de compétence moyen élevé. L’utilisation des compétences en dehors du cadre professionnel étant associée à une citoyenneté engagée et active, les autorités des pays devraient encourager les citoyens à utiliser activement leurs compétences dans la vie quotidienne (voir la section « Encourager la participation sociale : faire mieux connaître les avantages de l’engagement citoyen et encourager l’utilisation des compétences dans le cadre social et la vie quotidienne »).

Les pays qui affichent de bons résultats en termes de développement des compétences ne sont pas tous capables d’assurer l’utilisation intensive de ces compétences dans le cadre professionnel

Dans de nombreux pays, un niveau de compétence élevé va de pair avec un niveau élevé d’utilisation des compétences au travail (Graphique 5.1). Certains pays dotés d’une main-d’œuvre relativement peu qualifiée parviennent malgré tout à ce que les compétences disponibles soient utilisées de façon intensive dans le cadre professionnel. Les États-Unis sont le meilleur exemple de cette situation : la main-d’œuvre américaine obtient des résultats moyens ou légèrement inférieurs à la moyenne sur le plan du développement des compétences (dans les enquêtes PISA et PIAAC) mais se situe dans le haut du classement en termes d’utilisation des compétences et affiche par ailleurs de solides résultats d’ensemble au regard du marché du travail. Cela montre que malgré quelques lacunes sur le plan du développement des compétences, l’utilisation intensive de celles-ci est possible, avec à la clé des retombées positives sur la productivité et la rémunération (voir la section « Favoriser une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel : améliorer les méthodes d’organisation et de gestion du travail pour optimiser les compétences des salariés »). À l’inverse, certains pays dotés d’une main-d’œuvre très qualifiée n’utilisent pas les compétences de façon optimale. Au Japon, par exemple, la population adulte est très qualifiée mais l’utilisation des compétences est inférieure à la moyenne et il y a d’importantes pénuries de main-d’œuvre. Une meilleure utilisation des compétences disponibles et un taux d’activité plus élevé procureraient à ces pays des avantages importants en termes de salaires et de productivité.

Graphique 5.1. Niveaux de compétence des adultes et utilisation des compétences en milieu professionnel
Graphique 5.1. Niveaux de compétence des adultes et utilisation des compétences en milieu professionnel

Note : Ce graphique se fonde sur les indicateurs du tableau de bord de la Stratégie de l’OCDE sur les compétences et utilise les scores normalisés des indicateurs agrégés suivants : « Quelle est la solidité des compétences élémentaires des adultes ? » et « Les compétences sont-elles utilisées de façon intensive sur le lieu de travail ? » (à partir des scores obtenus dans l’enquête PIAAC).

Source : Calculs de l’OCDE à partir de (2018[2]), Enquête sur les compétences des adultes (PIAAC) (base de données), 2012/2015, http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932853

L’adoption de pratiques de travail à haut rendement peut être propice à une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel

Plusieurs pratiques de travail sont connues pour avoir un impact positif sur l’efficacité des salariés (Graphique 5.2). Elles comprennent notamment des pratiques liées à la flexibilité du travail, le travail en équipe, la planification par le travailleur de ses propres tâches et diverses pratiques de gestion. Le tableau de bord montre que les pays où l’utilisation des pratiques de travail à haut rendement (PTHR) est répandue se caractérisent aussi en général par un niveau relativement élevé d’utilisation des compétences au travail – c’est le cas en particulier des pays scandinaves, du Royaume-Uni (Angleterre), de l’Australie, du Canada, des États-Unis, de la Nouvelle-Zélande et des Pays-Bas. Ce constat souligne la nécessité de généraliser l’adoption des PTHR pour favoriser l’utilisation efficace des compétences (voir la section « Favoriser une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel : améliorer les méthodes d’organisation et de gestion du travail pour optimiser les compétences des salariés»).

 Graphique 5.2. Pratiques de travail très performantes et utilisation des compétences en milieu professionnel
 Graphique 5.2. Pratiques de travail très performantes et utilisation des compétences en milieu professionnel

Note : Ce graphique se fonde sur les indicateurs du tableau de bord de la Stratégie de l’OCDE sur les compétences et utilise les scores normalisés des indicateurs agrégés suivants : « Est-il fait une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel ? » et « Les entreprises conçoivent-elles des cadres de travail propices à une utilisation efficace des compétences ? » (à partir des scores obtenus dans l’enquête PIAAC).

Source : Calculs de l’OCDE à partir de (2018[2]), Enquête sur les compétences des adultes (PIAAC) (base de données), 2012/2015, http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932872

Réduire autant que possible les déséquilibres des compétences suppose non seulement de développer des compétences utiles mais aussi de recruter de nouveaux talents possédant les compétences recherchées et d’améliorer la répartition des travailleurs

Les déséquilibres en matière de compétences renvoient à des décalages entre l’offre et la demande de compétences et peuvent prendre la forme d’une mauvaise adéquation des qualifications mais aussi de pénuries et d’excédents de compétences. Ces déséquilibres en matière de compétences peuvent être une conséquence du dynamisme d’un pays, lorsque les emplois et les besoins en compétences évoluent rapidement. Cependant, toutes choses égales par ailleurs, il est souhaitable de réduire autant que possible les déséquilibres en matière de compétences car ils génèrent un certain nombre de conséquences néfastes, notamment un risque accru de chômage, des salaires plus faibles, une moindre satisfaction professionnelle et une productivité en baisse. Pour autant, il n’existe pas de moyen simple de réduire ces déséquilibres, comme en témoigne l’absence de corrélation solide entre l’indicateur de déséquilibre des compétences et les divers indicateurs de développement des compétences (voir le chapitre 4) et l’utilisation efficace des compétences (le présent chapitre). Les données montrent qu’il faut, pour atténuer ces déséquilibres, adopter une approche pluridirectionnelle permettant, entre autres, de mettre en place un système d’enseignement réactif, de fournir des services d’orientation professionnelle efficaces, de soutenir le développement continu des compétences tout au long de la vie et d’attirer des migrants dotés des compétences recherchées (voir la section « Élargir le vivier de talents disponibles : attirer les bonnes compétences de l’étranger, améliorer la transparence des procédures de reconnaissance des compétences et proposer des formations en langues »), mais aussi de développer les structures et politiques du marché du travail favorisant la mobilité et la flexibilité de la main-d’œuvre (voir la section « Réduire les déséquilibres des compétences : améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences »).

Les politiques de soutien à l’innovation peuvent stimuler la demande de compétences de niveau plus élevé

L’adoption de politiques visant à promouvoir l’innovation (par exemple, dépenses de recherche et développement (R-D), soutien à la recherche, défense des formes de propriété innovantes telles que les brevets, les droits d’auteur et les marques, et soutien à la coopération internationale en matière d’innovation) peut également stimuler la demande de compétences de niveau élevé et, par extension, aider les pays à progresser le long de la chaîne de valeur. Ce constat montre qu’il est important de mettre en cohérence les politiques influant sur l’offre et la demande de compétences afin qu’elles se renforcent mutuellement (voir section « Stimuler la demande de compétences de haut niveau : soutenir les activités d’innovation des entreprises et supprimer les obstacles à la croissance »).

Relever le taux d’activité : réduire les obstacles au travail et mettre en place des mesures d’activation pour les travailleurs licenciés économiques

Le développement des compétences n’aura l’impact souhaité sur l’économie et la société que si ces compétences sont mises à profit sur le marché du travail. Donner aux individus la possibilité de s’insérer sur le marché du travail et de tirer le meilleur parti de leurs compétences dans le cadre professionnel est un moyen d’améliorer le bien-être individuel et de dynamiser la croissance économique. Cette section est consacrée au défi consistant à faire participer l’ensemble des groupes sociaux au marché du travail et recense les bonnes pratiques permettant d’éliminer les obstacles au travail et de mettre en place des mesures d’activation pour les travailleurs ayant perdu leur emploi à cause des changements structurels de l’économie.

Le défi : la persistance, dans certains groupes, d’un taux chômage de longue durée élevé et d’un faible niveau d’activation

Bien que le taux de chômage soit retombé à un niveau inférieur ou à peu près semblable à celui qui prévalait avant la crise dans presque tous les pays, la récession a laissé des stigmates dans de nombreux pays membres de l’OCDE, sous la forme d’un chômage de longue durée élevé et persistant. Les longs épisodes de chômage entraînent découragement et pertes de capital humain et de compétences, rendant les efforts de réintégration d’autant plus difficiles.

De plus, le taux d’activité et l’incidence du chômage de longue durée sont très variables d’une région à une autre et d’un groupe de population à un autre dans les pays membres de l’OCDE. Le chômage élevé qui prévaut dans certains groupes et les liens ténus que ceux-ci entretiennent avec le marché du travail sont dus à divers obstacles au travail ou à la progression professionnelle, et bien souvent au cumul de plusieurs obstacles pour les groupes les plus défavorisés.

Même lorsque les économies n’étaient pas en récession, les changements économiques dus à la transformation numérique, à la mondialisation et au vieillissement démographique ont entraîné la suppression de nombreux emplois (voir chapitre 3 pour une analyse plus détaillée des conséquences de ces mégatendances). Si certains travailleurs dont l’emploi a été supprimé parviennent à retrouver rapidement un travail de qualité identique ou supérieure, d’autres sont confrontés à un déclin durable de leur capacité de gains, dû au chômage de longue durée, à la forte baisse de salaire qui accompagne le retour à l’emploi ou à une combinaison des deux facteurs (OCDE, 2018[3]). En comparaison du salarié moyen, les travailleurs dont l’emploi a été supprimé se caractérisent par le fait qu’ils ont en moyenne moins utilisé les compétences mathématiques, cognitives, interpersonnelles et verbales et davantage les compétences manuelles et physiques dans leurs emplois précédents ; par conséquent, ils ne sont peut-être pas très bien armés pour trouver un emploi dans les secteurs en expansion, où les niveaux de compétence requis sont sans doute plus élevés (Quintini and Venn, 2013[4]). Comme l’explique la nouvelle Stratégie pour l’emploi de l’OCDE (Encadré 5.2), face à la transformation rapide des économies impulsée par les mégatendances, il sera essentiel d’aider les travailleurs à se réorienter des entreprises, secteurs et régions en déclin vers ceux qui présentent un meilleur potentiel de croissance. Les interventions visant à soutenir le dynamisme du marché du travail devront s’accompagner de mesures pour aider les travailleurs privés de leur emploi à maintenir leurs compétences ou à en relever le niveau (OCDE, 2018[5]).

Encadré 5.2. La Stratégie de l’OCDE pour l’emploi de 2018

La Stratégie de l’OCDE pour l’emploi lancée en 1994 avait pour but de définir une série de grandes orientations pour aider les pays membres de l’OCDE aux prises avec un chômage élevé et persistant. Cette stratégie a été révisée une première fois en 2006 puis en 2018. La Stratégie de l’OCDE pour l’emploi de 2018 formule des orientations sur les politiques qui peuvent permettre aux travailleurs et aux entreprises de saisir les opportunités offertes par les nouvelles technologies et les nouveaux marchés, tout en les aidant à s’adapter aux ajustements requis et en assurant un large partage des fruits de la croissance. Elle réitère l’importance de la quantité des emplois, sans laquelle il ne peut y avoir de croissance économique solide et durable, mais reconnaît en parallèle que la qualité des emplois, mesurée par les conditions de travail salariales et non salariales et l’inclusivité du marché du travail, constitue un enjeu prioritaire pour les politiques. Les recommandations politiques s’articulent autour de trois principes.

  • Promouvoir un environnement propice à l’essor d’emplois de qualité. Un marché du travail performant repose sur un cadre macro-économique solide, un environnement favorable à la croissance et des compétences capables d’évoluer en fonction de la demande du marché. Les politiques publiques doivent trouver le bon équilibre entre la flexibilité de l’emploi (nécessaire pour que les ressources puissent être réaffectées aux usages les plus productifs) et la stabilité de l’emploi (nécessaire pour encourager l’apprentissage et l’innovation sur le lieu de travail).

  • Éviter l’exclusion du marché du travail et protéger les individus contre les risques liés au marché du travail. Adopter une approche préventive en matière d’inclusivité du marché du travail en renforçant l’égalité des chances, de sorte que le milieu socio-économique ne soit pas un facteur de réussite décisif sur le marché du travail. S’attaquer aux obstacles qui empêchent les personnes issues d’un milieu défavorisé de suivre des études et d’acquérir des compétences, en intervenant de façon ciblée pendant les années de (pré-) scolarité et au moment de la transition des études au travail. Adapter les conditions de travail aux besoins des travailleurs, qui évoluent au cours de la vie : les mesures visant à faciliter la conciliation de la vie professionnelle et des responsabilités familiales et sociales et à prévenir les problèmes de santé liés au travail renforcent le taux d’activité tout au long de la période de vie active, réduisent les écarts entre hommes et femmes et atténuent le risque de pauvreté et d’exclusion.

  • Préparer la main-d’œuvre à saisir les chances et à relever les défis futurs sur un marché du travail en pleine mutation. Les interventions encourageant la réorientation des travailleurs des entreprises, secteurs et régions en déclin vers ceux qui présentent un meilleur potentiel de croissance devront s’accompagner de mesures adéquates pour aider les individus à maintenir leurs compétences et à en relever le niveau, soutenir les régions retardataires, renforcer les filets de protection sociale et donner au dialogue social plus de poids dans la construction du monde du travail de demain. Lier l’éducation et la formation à la personne plutôt qu’à l’emploi et les rendre plus facilement accessibles, en tenant compte du fait que la fragmentation croissante des processus de production et l’augmentation probable de la fréquence à laquelle les individus changeront d’emploi à l’avenir pourraient dissuader les entreprises et les travailleurs d’investir dans des compétences spécifiques à l’entreprise. S’assurer que les travailleurs resteront protégés contre les risques liés au marché du travail dans un monde où les formes de travail flexibles risquent de gagner du terrain, en garantissant l’accès à la protection sociale et l’application de la réglementation fondamentale des droits du travail pour tous.

Source : OCDE (2018[5]), Good Jobs for All in a Changing World of Work: The OECD Jobs Strategy. https://doi.org/10.1787/9789264308817-en.

Bonnes pratiques

S’attaquer aux obstacles au travail

Pour étoffer l’offre de compétences à long terme, il faut rendre le marché du travail plus inclusif en augmentant la participation des groupes actuellement peu actifs. Ces groupes - notamment les jeunes, les travailleurs âgés (en particulier ceux qui sont peu qualifiés), les personnes ayant des responsabilités familiales (principalement des mères avec enfants), les personnes handicapées, les immigrés et les réfugiés - sont confrontés à des obstacles multiples qui les empêchent d’accéder à des emplois complets et de qualité et d’exploiter leurs compétences sur le marché du travail. Leurs taux d’emploi sont généralement inférieurs à ceux des hommes d’âge très actif (Graphique 5.3). Les obstacles au travail les plus courants sont une formation inadéquate, le manque de compétences et/ou d’expérience professionnelle, les problèmes de santé, les responsabilités familiales et les coûts de garde d’enfant, le manque de moyens de transport, les difficultés sociales et des incitations financières au travail insuffisantes.

La nouvelle Stratégie de l’OCDE pour l’emploi préconise de renforcer l’égalité des chances, de sorte que le milieu socio-économique ne soit pas un facteur de réussite décisif sur le marché du travail. Cela impose de s’attaquer aux obstacles qui empêchent les personnes issues d’un milieu défavorisé de suivre des études et d’acquérir des compétences professionnelles, en intervenant de façon ciblée pendant les années de préscolarité (fréquentation d’établissements préscolaires), les années de scolarité (prévention du décrochage), et au moment de la transition des études au travail ou de l’insertion dans des programmes d’éducation de la deuxième chance pour les personnes qui ont arrêté leur scolarité précocement et qui ne peuvent ou ne veulent pas reprendre des études dans un établissement classique (OCDE, 2018[5]). Les interventions sont plus efficaces quand les divers programmes et services régionaux et locaux – services de l’emploi, organismes d’éducation et de formation professionnelle et organismes de développement économique – sont correctement coordonnés (OCDE, 2016[6]).

Par ailleurs, pour améliorer le caractère inclusif du marché du travail, il importe d’adopter une approche portant l’ensemble du parcours de vie afin d’éviter que les désavantages individuels ne s’accumulent et qu’il ne faille, pour y remédier, engager des interventions coûteuses à un stade ultérieur. Pour réduire le risque que les travailleurs ne restent bloqués dans des emplois de faible qualité ou le non-emploi, il faut qu’ils aient continuellement la possibilité de développer, maintenir et élever leurs compétences en se formant à tout âge, comme on l’a vu dans le chapitre 3. De même, il y a lieu d’adapter les conditions de travail aux besoins des travailleurs, qui évoluent au cours de la vie – par exemple en facilitant la conciliation de la vie professionnelle et des responsabilités familiales et sociales et en prévenant les problèmes de santé liés au travail. Ces mesures peuvent non seulement renforcer le taux d’activité tout au long de la période de vie active, mais aussi réduire les écarts entre hommes et femmes et atténuer le risque de pauvreté et d’exclusion (OCDE, 2018[5]).

En cas de perte d’emploi, les filets de protection sociale tels que l’assurance chômage peuvent éviter au travailleur de tomber dans la pauvreté et le dénuement, qui sont des obstacles à l’emploi futur. Cependant, les systèmes de sécurité sociale actuels sont encore largement fondés sur la relation employeur-salarié, et dans plus de la moitié des pays du G20 pour lesquels des données sont disponibles, les travailleurs indépendants n’ont pas accès aux allocations de chômage (OCDE, 2017[7]). Pour adapter les systèmes de sécurité sociale au nouveau monde du travail, peut-être faut-il changer radicalement de modèle, en liant les droits à prestations non plus à l’emploi mais à la personne et en assurant leur transférabilité d’un emploi à un autre. Aux États-Unis, les comptes de sécurité sociale sont déjà « multi-employeurs ».

Graphique 5.3. Certains groupes sont notablement sous-représentés dans l’emploi
Ratio emploi-population dans certains pays membres de l’OCDE
Graphique 5.3. Certains groupes sont notablement sous-représentés dans l’emploi

Note : Les données concernent les personnes âgées de 25 à 64 ans pour la partie A et les personnes âgées de 15 à 64 ans pour les parties B, C et D.

Source : Partie A : jeu de données de l’OCDE : Niveau de formation et situation au regard de l’emploi, http://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=EAG_NEAC. Partie B : EU-SILC 2012, sauf : Australie : Survey of Disability and Carers 2012, Australian Bureau of Statistics, 4430.0 - Disability, Ageing and Carers, Australia: Summary of Findings, 2012 ; Canada : Enquête canadienne sur l’incapacité, 2012, Statistique Canada. Tableau 115-0005 - Situation d’activité des adultes avec et sans incapacité, par sexe et groupe d’âge, Canada, Provinces et territoires ; Norvège : LFS 2012 Q2, http://www.ssb.no/en/arbeid-og-lonn/statistikker/akutu ; Royaume-Uni : LFS 2012 ; États-Unis : Survey of Income and Program Participation, SIPP 2008 Panel, wave 13, September 2012 to December 2012, http://www.census.gov/programs-surveys/sipp/data/2008-panel.html. Partie C : Base de données de l’OCDE sur la famille, http://www.oecd.org/fr/social/famille/basededonnees.htm. Partie D : jeu de données de l’OCDE : Taux NUP selon le lieu de naissance et le sexe, http://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=MIG_NUP_RATES_GENDER. Parties E et F : jeu de données de l’OCDE : Données sur le marché du travail par sexe et âge - indicateurs, http://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=LFS_SEXAGE_I_R.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932891

Les filets de protection doivent s’accompagner d’une stratégie d’activation efficace, qui combine les objectifs suivants : s’assurer que les personnes sans emploi aient une motivation suffisante à chercher activement du travail et à accepter les offres appropriées (par exemple au moyen de dispositifs incitatifs fiscaux ou portant sur les prestations), faire en sorte que les demandeurs d’emploi soient aiguillés vers des possibilités adéquates (par exemple, aide à la recherche d’emploi, placements directs, emploi aidé) et améliorer l’aptitude à l’emploi des personnes les moins employables (par des programmes de formation et de stage en entreprise ; OCDE (2015[8])).

Les services publics de l’emploi se fondent de plus en plus les compétences, plutôt que sur les qualifications et l’expérience professionnelle, pour apparier demandes et offres d’emploi. Les qualifications et l’expérience professionnelle ne rendent pas parfaitement compte des compétences du travailleur (Quintini, 2011[9]; OCDE, 2013[10]), et les méthodes d’appariement fondées sur les compétences peuvent se révéler à la fois plus inclusives et plus efficaces. Elles sont plus inclusives au sens où elles offrent des débouchés aux travailleurs qui n’ont pas de qualification formelle mais ont cependant acquis des compétences utiles en suivant une formation informelle en cours d’emploi. Elles peuvent aussi être plus efficaces, en permettant aux employeurs d’indiquer précisément les compétences qu’ils recherchent sans recourir à des substituts de piètre qualité de ces compétences, tels que les qualifications ou l’expérience professionnelle. En Flandre (Belgique), les services publics de l’emploi utilisent la base de données Competent pour apparier demandeurs d’emploi et offres d’emploi en fonction des compétences (Encadré 5.3).

Encadré 5.3. Pratiques nationales: une méthode d’appariement des offres et des demandes d’emploi fondée sur les compétences

En Belgique, le service public de l’emploi flamand (VDAB) utilise la base de données Competent pour apparier les demandes et les offres d’emploi en fonction des compétences et non pas sur la base d’exigences de qualification et d’expérience professionnelle comme c’est le cas habituellement. Les employeurs qui ont des postes à pourvoir saisissent dans l’outil d’appariement numérique les informations pertinentes – localisation du poste, qualifications requises, mais aussi compétences requises. De leur côté, les demandeurs d’emploi inscrits auprès du VDAB remplissent leur profil en ligne, en sélectionnant les compétences qu’ils possèdent. Les demandeurs d’emploi et les employeurs reçoivent une liste d’offres/demandeurs d’emploi qui correspondent à 80 % au moins de leurs exigences respectives. La base de données Competent est fréquemment actualisée pour rester en phase avec l’évolution des besoins en compétences sur le marché du travail.

Le VDAB lancera prochainement une nouvelle version de l’outil d’appariement numérique (Projectfiche Constructiv), qui devrait être encore plus pratique à utiliser. Grâce à la technologie sémantique, l’outil va s’exercer à « lire » les offres d’emploi et les CV téléchargés, à reconnaître les similitudes et à extraire les informations pertinentes. Il sera ainsi en mesure de produire une liste de qualifications et d’expériences professionnelles, qu’il traduira en compétences requises à l’aide de la base de données Competent. Cela simplifiera la saisie des compétences offertes par les demandeurs d’emploi et recherchées par les employeurs.

Source : OCDE (2019[11]), OECD Skills Strategy Flanders: Assessment and Recommendations, https://doi.org/10.1787/9789264309791-en.

Mettre en place des mesures d’activation en direction des travailleurs licenciés économiques

L’une des différences cruciales entre les travailleurs licenciés économiques (c’est-à-dire qui perdent leur emploi pour des raisons économiques) et la plupart des autres groupes réside dans le fait qu’il est souvent possible de mettre en place des services de retour à l’emploi au cours de la période de préavis qui précède le licenciement (par exemple, installation d’un bureau de placement temporaire dans une usine qui va bientôt fermer). Ces services d’intervention rapide semblent être assez efficaces. En Australie, les salariés touchés par la vague de fermetures d’usines automobiles ont bénéficié de mesures de soutien précoce, de sorte qu’au moment de la fermeture de la dernière usine en 2017, 84 % des anciens salariés déclaraient avoir retrouvé un emploi ou avoir pris leur retraite (Encadré 5.4).

Néanmoins, le recours à ces services d’intervention rapide n’est pas aussi étendu qu’il le faudrait et se limite souvent aux travailleurs touchés par un licenciement collectif. Dans certains pays, des services sont mis en place dans les régions ou secteurs frappés de plein fouet par le changement structurel. Aux Pays-Bas, suivant les recommandations de l’OCDE (2017[12]), les autorités ont modifié l’utilisation des fonds de formation sectoriels pour encourager la réorientation de la main-d’œuvre des secteurs en déclin vers les secteurs en expansion. L’Encadré 5.4 donne d’autres exemples de pays qui offrent des services d’intervention rapide à l’ensemble des travailleurs dont l’emploi est supprimé, y compris ceux travaillant dans de petites entreprises.

Encadré 5.4. Pratiques nationales : des mesures d’activation en direction des travailleurs licenciés économiques

L’Initiative pour les compétences et la formation (Skills and Training Initiative) en Australie relève du Fonds pour la croissance (Growth Fund), un instrument doté de 155 millions de dollars australiens qui soutient les entreprises et les régions touchées par l’arrêt de l’industrie automobile australienne. Elle est cofinancée par l’État et l’industrie. Les fermetures des usines ayant été annoncées longtemps à l’avance, des centres de transition ont pu être installés sur place pour informer les salariés de leurs possibilités d’orientation professionnelle, les aider à faire reconnaître leurs acquis et leur proposer des reconversions dans les professions et secteurs en demande. Ces services ont également été proposés aux salariés des équipementiers. De plus, avant sa fermeture, la dernière usine en exploitation a convié des employeurs à visiter ses locaux pour leur montrer les tâches effectuées par le personnel et faciliter le retour de celui-ci à l’emploi. Selon une enquête, 84 % des anciens salariés de l’usine avaient retrouvé du travail ou pris leur retraite au moment de la fermeture de l’usine.

Intervenant dans le cadre des conventions collectives conclues entre les partenaires sociaux à l’échelon des secteurs ou des professions, les Conseils pour la sécurité de l’emploi (Trygghetsrådet, TRR) en Suède participent activement au processus de restructuration. Ils conseillent et consultent employeurs et syndicats à un stade précoce du processus et fournissent également des services d’aide à la transition (conseils individuels, planification de carrière et aide à la recherche d’emploi) aux travailleurs licenciés. Les activités des TRR sont financées par les cotisations patronales (généralement 0.3 % de la masse salariale). Les TRR répartissent les risques et les coûts de la restructuration entre leurs membres et rendent leurs services accessibles au personnel des petites et moyennes entreprises. Environ 80 % des bénéficiaires des TRR trouvent une solution (emploi ou recyclage) en l’espace de sept mois, un taux élevé qui a pu être maintenu durant la crise de 2008-10.

Au Danemark, un service temporaire pour l’emploi peut être établi dans une entreprise, quelle que soit sa taille, à l’aide des fonds dits d’alerte. Le service est administré par les travailleurs sociaux de l’agence locale pour l’emploi, qui fournissent aux travailleurs de l’entreprise une aide à la recherche d’emploi et des conseils pour l’élaboration d’une stratégie personnelle d’emploi. Ces services de conseil interviennent pendant la période de préavis, pour préparer les travailleurs avant leur licenciement. Des fonds d’alerte supplémentaires peuvent être mobilisés pour accompagner les travailleurs licenciés après leur période de préavis, au moyen de modules d’orientation et d’information sur les options de carrière (jusqu’à deux semaines), de programmes travail-études (stages et cours) ou de cours de langues (jusqu’à huit mois). Les travailleurs peuvent également bénéficier d’un soutien à la mise à niveau des compétences, axé sur les compétences qui sont actuellement recherchées ou qui le seront à l’avenir (déterminées par l’autorité régionale du marché du travail). La mise à niveau des compétences doit être programmée dans les 14 jours qui suivent le licenciement, commencer au plus tard trois mois après le licenciement, et se terminer au minimum six mois après le licenciement.

Source : OCDE (2018), (2018[13]), Getting Skills Right: Australia, https://doi.org/10.1787/9789264303539-en ; OCDE (2015[14]), Back to Work: Sweden: Improving the Re-employment Prospects of Displaced Workers, https://doi.org/10.1787/9789264246812-en ; OCDE (2016[15]), Back to Work: Denmark: Improving the Re-employment Prospects of Displaced Workers, Back to Work, https://doi.org/10.1787/9789264267503-en ; OCDE (2017[16]), OECD Skills Strategy Diagnostic Report: The Netherlands 2017, https://doi.org/10.1787/9789264287655-en.

Pour que ces services soient efficaces, il est préférable que le licenciement soit précédé d’une longue période de préavis. Une collaboration active avec les partenaires sociaux, associée à la mise au point et l’utilisation de scénarios d’anticipation des compétences reposant par exemple sur la prévision et la prospective (voir chapitre 4), peuvent permettre de détecter rapidement des baisses de la demande dans les professions, secteurs ou régions.

Recommandations politiques en vue de relever le taux d’activité

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à renforcer le taux d’activité (Encadré 5.5).

Encadré 5.5. Recommandations politiques : relever le taux d’activité
  • Intervenir rapidement pour contrer les obstacles au travail. Promouvoir l’égalité des chances pour éviter que le milieu socio-économique ne détermine les résultats professionnels futurs en ayant une influence sur l’acquisition des compétences professionnelles requises ou en constituant une source de discrimination. Les travailleurs devraient avoir continuellement la possibilité de développer, maintenir et élever leurs compétences en se formant à tout âge, pour éviter l’accumulation des désavantages au fil du temps.

  • Créer des incitations adéquates au travail. Fournir des filets de protection adéquats, accompagnés d’une stratégie d’activation efficace qui combine les objectifs suivants : s’assurer que les personnes sans emploi aient une motivation suffisante à chercher activement du travail et à accepter les offres appropriées, faire en sorte que les demandeurs d’emploi soient aiguillés vers des possibilités adéquates et améliorer l’aptitude à l’emploi des personnes les moins employables par le biais de la formation. L’utilisation d’outils d’appariement fondés sur les compétences devrait être envisagée pour aiguiller les demandeurs d’emploi vers des offres d’emploi appropriées.

  • Aider les travailleurs pendant la période de transition qui précède leur licenciement. La réaffectation des travailleurs dont l’emploi est supprimé vers d’autres entreprises, secteurs ou régions devrait s’accompagner de mesures d’intervention rapide et d’aide au retour à l’emploi comprenant des services de conseil et de reconversion. De longs délais étant nécessaires pour assurer le succès des interventions, il convient d’instaurer une collaboration active avec les partenaires sociaux, associée à la mise au point et l’utilisation de scénarios d’anticipation des compétences.

Encourager la participation sociale : faire mieux connaître les avantages de l’engagement citoyen et encourager l’utilisation des compétences dans le cadre social et la vie quotidienne

Outre qu’elles impriment leur marque sur l’économie et les marchés du travail, les tendances mondiales précédemment mentionnées sont à l’origine de profondes évolutions sociétales. Par exemple, l’émergence des plates-formes numériques a polarisé notre utilisation des médias, de sorte que, de plus en plus, nous sommes amenés à côtoyer des personnes avec lesquelles nous avons des intérêts, des antécédents et des points de vue communs. L’apparition de nouvelles formes de travail flexibles, l’automatisation progressive de certaines tâches et de certains emplois et les changements démographiques pourraient également contribuer à creuser les inégalités sociales, avec un clivage des opportunités entre personnes jeunes et âgées, travailleurs très et peu qualifiés, et adultes actifs et exclus du marché du travail.

Ces tendances ne sont pas sans conséquences pour la cohésion sociale, dont différents signes montrent qu’elle mise à rude épreuve partout dans les pays membres de l’OCDE. Par exemple, de nombreux pays assistent depuis une décennie à une érosion de la confiance dans le gouvernement, un déclin du soutien social (mesuré par la proportion de personnes qui déclarent pouvoir s’appuyer sur un ami ou un proche en cas de besoin) et une baisse de la participation électorale (OCDE, 2018[17]).

Les compétences peuvent grandement contribuer à améliorer la cohésion sociale. Ainsi, l’acquisition d’un bagage équilibré de compétences cognitives, sociales et affectives augmente les chances des adultes d’obtenir des résultats sociaux positifs. Pour concrétiser pleinement le potentiel social des investissements dans les compétences, celles-ci doivent être activement utilisées dans la vie quotidienne et dans la société civile.

Le défi : accroître l’utilisation des compétences dans la vie quotidienne et la société civile

Un corpus abondant de données montre que l’éducation et les compétences ont des effets positifs sur les résultats sociaux (OCDE, 2016[18]; OCDE, 2016[19]) et que ces effets sont encore plus marqués lorsque les citoyens utilisent activement leurs compétences à la maison, au travail et en société. Le Graphique 5.4 montre qu’au-delà de l’effet de la maîtrise des compétences à l’écrit, l’utilisation de ces compétences dans la vie de tous les jours – par exemple pour lire des livres et des journaux ou rédiger des articles et des rapports – est associée à une confiance sociale, une participation au bénévolat, une efficacité politique et une santé affermis. De plus, les résultats sociaux positifs se renforcent entre eux. Par exemple, la probabilité d’avoir confiance dans les autres augmente de 5 points de pourcentage parmi les personnes qui effectuent du bénévolat (calculs fondés sur les résultats de l’Enquête sur les compétences des adultes (PIAAC) (OCDE, 2018[2])).

Graphique 5.4. L’effet de l’utilisation des compétences sur les résultats sociaux positifs
Accroissement en points de pourcentage de la probabilité de résultats positifs associé à une utilisation intensive des compétences en lecture au travail et à la maison, après contrôle de la maîtrise des compétences à l’écrit
Graphique 5.4. L’effet de l’utilisation des compétences sur les résultats sociaux positifs

Note : Régression tenant compte de la maîtrise des compétences à l’écrit, du niveau de formation, du sexe, du niveau de formation des parents et de l’âge. Seuls les adultes âgés de 25 à 64 ans sont inclus dans les régressions, et seules les personnes occupées sont incluses dans les régressions sur l’utilisation des compétences en lecture dans le cadre professionnel. Pour les indicateurs sociaux, les définitions suivantes ont été utilisées : une confiance élevée implique un désaccord (profond) avec l’affirmation selon laquelle le déclarant ne fait confiance qu’à un petit nombre de personnes ; le bénévolat régulier est défini par la participation à des activités bénévoles au moins une fois par mois ; et l’efficacité politique se traduit par un désaccord (profond) avec l’affirmation selon laquelle le déclarant pense n’avoir aucune influence.

Source : Calculs de l’OCDE à partir de OCDE (2012, 2015), Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (base de données), http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932910

D’autres études apportent des éclairages supplémentaires sur la façon dont l’utilisation des compétences sociales dans le cadre professionnel et dans la vie quotidienne retentit sur les perceptions et comportements sociaux. Par exemple, le travail en équipe et le partage des informations entre collègues sont associés à une perception plus favorable de la société et une confiance accrue envers autrui (Borgonovi and Burns, 2015[20]). Qui plus est, l’utilisation des compétences peut avoir un effet positif indirect sur la société en influant sur le développement des autres individus, notamment les enfants. Les enfants à qui leurs parents lisent des livres et racontent des histoires ont une probabilité accrue d’acquérir des compétences plus solides, associées à de meilleurs résultats sociaux (OCDE, 2012[21]).

Au-delà des externalités positives liées à l’utilisation des compétences dans la vie quotidienne, les chances de voir émerger une société active et engagée dépendent également de la mesure dans laquelle les compétences sont mises à profit dans la vie civique, sociale et associative. La participation sociale peut revêtir différentes formes, parmi lesquelles la participation à des organisations formelles et informelles telles que les groupes religieux, les clubs sportifs et de loisirs et les partis politiques. Les données révèlent une diversité considérable entre les pays sur le plan du niveau de participation sociale, du type d’organisation dans lequel les citoyens s’engagent et de l’intensité de leur participation (adhésion passive ou active) (OCDE, 2015[22]).

Un exemple concret de participation sociale est le bénévolat. Dans les pays membres de l’OCDE, seule une part relativement faible de la population adulte déclare participer régulièrement à des activités bénévoles. De surcroît, la participation est étroitement liée aux caractéristiques individuelles, les chômeurs et les personnes peu qualifiées affichant des niveaux de participation particulièrement faibles. En moyenne, 14 % des chômeurs prennent part à des activités bénévoles, contre 17 % des personnes occupées et 22 % des retraités (calculs fondés sur l’enquête PIAAC (OCDE, 2018[2]). Si les adultes possédant un niveau élevé de compétences à l’écrit sont les plus enclins à participer régulièrement à des activités bénévoles, la proportion d’adultes très qualifiés qui effectuent régulièrement du bénévolat n’est supérieure à 40 % dans aucun pays membre de l’OCDE (Graphique 5.5). Cela signifie que les individus pourraient faire un usage nettement accru de leurs compétences, pour le bénéfice de la société.

Graphique 5.5. Participation à des activités bénévoles au moins une fois par mois, par niveau de compétence en littératie
Graphique 5.5. Participation à des activités bénévoles au moins une fois par mois, par niveau de compétence en littératie

Source : Calculs de l’OCDE à partir de OCDE (2018[2]), Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (base de données), http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932929

Les tendances mondiales pourraient rendre l’utilisation des compétences hors du cadre professionnel plus importante pour la cohésion sociale. Non seulement les tendances démographiques entraînent une augmentation de la part de la population inactive (augmentation du nombre de retraités), mais avec l’automatisation et la flexibilisation du travail, il se peut que davantage d’adultes passent davantage de temps hors du travail. Les politiques qui encouragent l’engagement dans la vie civique, sociale et associative peuvent contribuer à maximiser le rendement social des investissements dans les compétences.

Bonnes pratiques

Sensibiliser l’opinion à l’intérêt d’utiliser les compétences en dehors du cadre professionnel, dans la vie quotidienne et sociale

Pour améliorer l’engagement social et citoyen, les pouvoirs publics peuvent organiser des campagnes de sensibilisation et diffuser des informations sur les avantages de la participation à la vie de la société. S’il est nécessaire de renforcer l’engagement citoyen dans tous les groupes, ces initiatives devraient cibler en priorité les groupes les moins bien classés au regard des indicateurs d’engagement social et citoyen, par exemple les chômeurs et les personnes peu qualifiées. En outre, comme l’ont montré les données de l’enquête PIAAC, l’utilisation des compétences dans la vie quotidienne contribue à améliorer les résultats sociaux. Il faudrait donc encourager les individus à lire des livres et des journaux et à écrire des articles et des rapports, le cas échéant en organisant des campagnes pour promouvoir ces activités (voir les exemples décrits dans l’Encadré 5.6).

Il est important de sensibiliser les individus dès leur jeune âge aux avantages de l’utilisation des compétences dans la vie quotidienne et la vie sociale, dans la mesure où l’apprentissage précoce renforce les résultats futurs (OCDE, 2016[18]). Par exemple, les adultes devraient savoir que lire des histoires à un enfant a un impact important sur son développement, et dans les établissements scolaires, il est possible d’encourager la culture de l’engagement en faisant participer les élèves à des activités collectives et en organisant des débats sur des questions politiques ou sociales. L’importance de l’apprentissage précoce est examinée plus en détail dans le chapitre 4.

Faciliter et encourager l’utilisation des compétences dans la vie de la société

Les pouvoirs publics peuvent également faciliter l’utilisation des compétences dans la vie sociale en éliminant certains obstacles rencontrés par les adultes dans ce domaine. Le travail et les obligations familiales ou sociales empêchent de nombreux adultes d’utiliser leurs compétences plus activement dans la vie civique. Les politiques du marché du travail qui accordent plus de flexibilité aux salariés peuvent atténuer ces obstacles, par exemple en leur donnant la possibilité de s’absenter du travail pour faire du bénévolat (Do-it Trust, 2016[23]). En Angleterre et au Pays-de-Galles (Royaume-Uni), par exemple, tous les agents du secteur public et les personnes qui travaillent dans des entreprises d’au moins 250 salariés ont droit à trois jours de congés payés par an pour se consacrer à des activités bénévoles (Heywood, 2015[24]).

La participation sociale et citoyenne peut aussi être encouragée par des incitations financières, notamment des subventions ou des déductions fiscales au titre des dépenses ou du temps consacrés à des activités sociales (par exemple, coûts d’adhésion à des associations ou déductibilité des dons définis comme étant « d’utilité publique », comme c’est le cas aux États-Unis), ou des prestations complémentaires pour les personnes actuellement sans emploi qui prennent part à ce type d’activité (par exemple, complément d’aide sociale pour les demandeurs d’emploi qui font du bénévolat auprès d’un organisme caritatif ou sans but lucratif). Les autorités publiques peuvent aussi encourager la participation sociale en centralisant les informations disponibles sur les possibilités de bénévolat (Encadré 5.6).

Encadré 5.6. Pratiques nationales : encourager la participation sociale

Organisée sous les auspices de l’Union européenne, l’initiative EUread réunit des organisations qui œuvrent pour la promotion de la lecture. Fondée en 2000, elle vise à promouvoir les échanges de connaissances, d’expériences et d’idées entre les organisations et à élaborer des stratégies conjointes pour encourager la lecture. Son objectif est de sensibiliser l’opinion à l’importance de mettre en place un cadre structurel solide pour promouvoir la lecture à l’échelon national et européen. Elle regroupe des institutions de Belgique, du Royaume-Uni, de République tchèque, d’Allemagne, d’Italie, des Pays-Bas, de Norvège, de Finlande, de Suisse, d’Autriche, de Pologne, du Danemark et du Portugal. Les membres mènent des activités de natures diverses, notamment des campagnes d’information, des remises de prix et de distinctions et l’organisation de concours et d’autres manifestations.

Source : https://www.euread.com/.

Aux Pays-Bas, la base de données en ligne des initiatives citoyennes (bewonersinitatieven) MAEX donne des informations sur les initiatives volontaires et les entreprises sociales. Elle est administrée par une fondation et bénéficie du soutien financier des municipalités. MAEX répertorie sur son site Web l’ensemble des initiatives locales existantes, en indiquant dans leur profil ce qu’elles font, ce qu’elles apportent au public cible, qui peut les aider, etc. En outre, MAEX facilite les transactions entre les initiativews d’une part et les fonds, les organisations bénévoles, les entreprises, les administrations publiques et les institutions liées au savoir d’autre part. Par exemple, la plateforme peut être utilisée directement pour faire des dons ou se mettre en contact avec les initiatives répertoriées, offrant aux entreprises et aux particuliers un moyen efficace d’investir dans une initiative.

Source : https://maex.nl/.

Au Canada, pour encourager le bénévolat, l’Agence du revenu du Canada a mis en place des crédits d’impôt pour les bénévoles. Ces crédits s’appliquent non seulement aux dons versés à des organismes caritatifs, mais aussi au temps consacré à des activités bénévoles. Par exemple, les volontaires des services d’urgence tels que la protection contre les incendies peuvent bénéficier d’une déduction de 1 000 dollars canadiens. Pour bénéficier de cette déduction, les volontaires doivent néanmoins satisfaire certaines conditions, notamment ne pas être employé par la même administration publique pour des fonctions semblables.

Source : EURead (2019[25]), « About us », https://www.euread.com/about-us/ ; MAEX (n.d.[26]), « Homepage », https://maex.nl/ ; Gouvernement du Canada (2018[27]), « Volontaires des services d’urgence », https://www.canada.ca/fr/agence-revenu/services/impot/entreprises/sujets/retenues-paie/retenues-paie-cotisations/cas-particuliers/volontaires-services-urgence.html.

Les établissements scolaires peuvent encourager la culture de l’engagement citoyen en imposant aux élèves de participer à des activités collectives et en organisant des débats sur des questions politiques ou sociales. Les programmes d’apprentissage par le service obligatoire comportent une participation active à des activités bénévoles. Des données montrent que les programmes d’apprentissage par le service peuvent augmenter la probabilité que les recrues effectuent du bénévolat à l’âge adulte, qu’ils s’engagent plus activement dans la vie politique et qu’ils adoptent un regard plus positif sur la participation à la vie de la société. (Griffith, 2010[28]; Astin et al., 2006[29])

La participation aux processus démocratiques est de nature à renforcer les attitudes positives vis-à-vis du système politique et la conviction de pouvoir peser individuellement sur les décisions politiques. Dans de nombreux pays membres de l’OCDE, le taux de participation aux élections et l’intérêt général pour la politique sont faibles (OCDE, 2015[30]). Les mesures qui réduisent les obstacles au vote et celles qui encouragent la participation politique, par exemple en facilitant les campagnes en ligne et les débats publics, peuvent inciter les adultes à exploiter leurs compétences dans la société civile.

Recommandations politiques en vue d’encourager la participation sociale

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à encourager la participation sociale (Encadré 5.7).

Encadré 5.7. Recommandations politiques : encourager la participation sociale
  • Encourager l’utilisation des compétences en dehors du cadre professionnel. Compte tenu des retombées sociales positives de l’utilisation des compétences en dehors du cadre professionnel, les autorités publiques devraient adopter des mesures pour encourager ces comportements (campagnes de promotion de la lecture par exemple).

  • Sensibiliser l’opinion aux avantages de l’engagement citoyen. Sensibiliser les individus dès leur jeune âge aux avantages d’une citoyenneté active et engagée. Les autorités peuvent organiser des campagnes promotionnelles, centraliser les informations relatives aux possibilités de bénévolat et diffuser des informations sur les bienfaits de l’utilisation des compétences dans la vie civique et sociale (bénévolat, dons, investissement dans la vie locale, etc.).

  • Encourager l’apprentissage par le service dans les établissements scolaires. En faisant de la participation à des activités bénévoles une composante obligatoire des programmes scolaires, on encouragerait les individus à utiliser leurs compétences dans la vie quotidienne dès leur jeune âge.

  • Réduire les obstacles et inciter les adultes à utiliser leurs compétences dans la société civile. Il est possible de réduire les obstacles à la participation par différentes mesures et pratiques, notamment en accordant davantage de flexibilité aux salariés, de sorte par exemple qu’ils puissent s’absenter du travail pour faire du bénévolat. Les incitations financières devraient être ciblées sur les personnes actuellement sans emploi, qui sont confrontées à des contraintes financières plus sévères et pourraient, en participant à ces activités, éviter à leurs compétences de se déprécier.

Élargir le vivier de talents disponibles : attirer les bonnes compétences de l’étranger, améliorer la transparence des procédures de reconnaissance des compétences et proposer des formations en langues

Dans le cadre des efforts mis en œuvre pour encourager l’utilisation des compétences, il y a lieu également de tirer le meilleur parti possible des compétences des migrants, qui représentent aujourd’hui un dixième environ de la population des pays membres de l’OCDE (OCDE/UE, 2019[31]). Dans certains pays membres de l’OCDE (Canada, Israël, Luxembourg, Nouvelle-Zélande et Suisse), les migrants sont même encore plus nombreux puisqu’ils représentent une personne sur cinq ou moins (OCDE, 2019[32]). La part des étrangers dans l’emploi total a fortement augmenté durant la dernière décennie dans la plupart des pays membres de l’OCDE. Au cours de cette période, les nouveaux immigrés ont représenté entre un quart et la moitié des nouveaux arrivants sur le marché du travail dans bon nombre de pays (Graphique 5.6). Ces dernières années ont été marquées par un afflux record de demandeurs d’asile et de réfugiés dans les pays membres de l'OCDE, le nombre total de réfugiés dans la zone OCDE ayant triplé entre 2013 et 2017 (OCDE, 2019[33]). Les migrations de travail sont un phénomène courant dans tous les pays membres de l’OCDE. Il s’agit d’un canal d’immigration relativement restreint, qui ne représente pas plus d’un tiers de l’ensemble des migrations permanentes à l’échelon des pays individuels de l’OCDE et compte pour 10 % à 13 % du total (OCDE, 2018[34]). Les migrants temporaires, rapidement mobilisables, permettent aux pays de satisfaire leurs besoins de main-d’œuvre à différents niveaux de qualification. En 2016, environ 2.6 millions de travailleurs temporaires étrangers ont été admis dans les pays membres de l’OCDE (hors travailleurs détachés dans l’Union européenne).

Compte tenu de l’importance des immigrés qualifiés pour l’offre de compétences dans les pays membres de l’OCDE, cette section examine les meilleurs moyens d’attirer cette main-d’œuvre et d’utiliser ses compétences de façon optimale.

Graphique 5.6. Depuis une décennie, les nouveaux immigrés représentent une part importante de l’accroissement de la population active dans certains pays membres de l’OCDE
Composantes de la croissance de la population active, 2005-15.
Graphique 5.6. Depuis une décennie, les nouveaux immigrés représentent une part importante de l’accroissement de la population active dans certains pays membres de l’OCDE

Source : OCDE (2019[35]), Recruiting Immigrant Workers: Korea, https://doi.org/10.1787/9789264307872-en.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932948

Le défi : attirer les bonnes compétences de l’étranger et les mettre pleinement à profit sur le marché du travail

Pour relever les défis associés au vieillissement démographique, à l’inadéquation des compétences et à la construction d’une société fondée sur le savoir, il est important que les pays puissent attirer des migrants disposant des qualifications requises. L’un des défis fondamentaux pour les pays membres de l’OCDE est de tirer le meilleur parti des compétences des migrants en dépit des obstacles que sont, entre autres, la barrière de la langue et le manque de reconnaissance des diplômes étrangers.

En moyenne, les immigrés faiblement qualifiés ont des taux d’emploi à peu près comparables à ceux de leurs pairs nés dans le pays. En revanche, dans presque tous les pays membres de l’OCDE, les taux d’emploi des immigrés hautement qualifiés sont inférieurs à ceux des autochtones hautement qualifiés. Et lorsqu’ils trouvent un travail, les immigrés ont presque 50 % de chances de plus que leurs pairs nés dans le pays d’être surqualifiés pour leur emploi. Ces difficultés sont particulièrement aiguës pour les personnes qui ont acquis leurs qualifications à l’étranger (Graphique 5.7).

Graphique 5.7. Taux d’emploi des personnes hautement qualifiées nées à l’étranger et nées dans le pays, à l’exclusion de celles qui suivent encore des études, 15-64 ans, par pays d’obtention du diplôme, 2015/16
Graphique 5.7. Taux d’emploi des personnes hautement qualifiées nées à l’étranger et nées dans le pays, à l’exclusion de celles qui suivent encore des études, 15-64 ans, par pays d’obtention du diplôme, 2015/16

Source : OCDE/UE (2019[31]), Settling In 2018: Indicators of Immigrant Integration, https://doi.org/10.1787/9789264307216-en.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932967

Ainsi, les pays membres de l’OCDE n’exploitent pas pleinement le potentiel des immigrés qualifiés, et les qualifications et expériences professionnelles acquises à l’étranger – en particulier dans des pays non membres de l’OCDE – sont largement sous-évaluées. Cette situation s’explique notamment par le fait que la plupart des immigrés ont acquis leur expérience professionnelle dans une langue et sur des marchés du travail autres que ceux du pays d’accueil. De même, leurs qualifications peuvent avoir été délivrées par des systèmes éducatifs moins performants que ceux du pays d’accueil – ou perçus comme tels par les employeurs. Du reste, les qualifications obtenues à l’étranger sont associées à des compétences plus faibles d’après les résultats des tests d’évaluation des compétences (Card and Dinardo, 2002[36]; Bonfanti and Xenogiani, 2014[37]; OCDE, 2007[38]; Sharaf, 2013[39]; Li and Sweetman, 2013[40]).

Cela étant, même les jeunes gens issus de l’immigration qui ont grandi et suivi leurs études dans le pays d’accueil éprouvent indéniablement des difficultés d’intégration dans les pays membres de l’OCDE. C’est plus spécialement le cas en Europe (OCDE, 2010[41]), et tout particulièrement pour les personnes dont les parents sont peu instruits (OCDE, 2017[42]; OCDE, 2018[43]). Il y a donc plusieurs autres facteurs qui entrent en jeu – des contacts réduits avec les employeurs potentiels, un accès limité aux réseaux par le biais desquels de nombreux postes sont pourvus, et le manque de connaissances sur le fonctionnement du marché du travail, en particulier pour les postes très qualifiés (OCDE, 2007[44]; OCDE, 2009[45]). Les programmes de mentorat peuvent aider à surmonter ces obstacles, et certains ont été couronnés de succès. Il ne faut cependant pas négliger le rôle des discriminations : les données montrent que les demandeurs d’emploi dont le nom a une consonance étrangère doivent généralement envoyer deux fois plus de candidatures que ceux qui ont des qualifications et une expérience professionnelle comparables mais un nom à consonance « nationale » (OCDE, 2013[46]).

Bonnes pratiques

Faire venir les bonnes compétences de l’étranger

Pour de nombreux pays, la migration complète l’offre locale de compétences et peut être un bon moyen de corriger les inadéquations des compétences et de remédier aux pénuries de compétences. Ceci étant posé, diverses mesures permettent d’attirer et de retenir les migrants qui possèdent les compétences recherchées sur le marché du travail local.

Certains pays éprouvent des difficultés pour attirer un nombre de candidats suffisant et ont recours à des initiatives de promotion et de sensibilisation pour susciter l’intérêt à l’étranger. Les dernières années ont vu fleurir un nombre considérable de sites Web qui présentent les possibilités de carrière pour les candidats qualifiés étrangers, comme par exemple « Make it in Germany » ou « Work in Sweden ». Sur certains de ces sites, l’utilisateur a la possibilité de vérifier directement s’il est admissible aux programmes de visas. C’est le cas par exemple du « calculateur de points » autrichien, qui s’adresse aux professionnels étrangers qualifiés. Les employeurs étant parfois réticents à recruter du personnel étranger, même en cas de pénurie aiguë de compétences dans les entreprises (OCDE, 2013[47]), un certain nombre de pays ont mis en place des initiatives pour expliquer aux employeurs comment faciliter l’intégration des travailleurs étrangers dans les milieux professionnels qui ne sont guère habitués à leur présence. Par exemple, les autorités japonaises proposent régulièrement des séances d’information et de formation aux entreprises, généralement en marge de salons de l’emploi à destination des talents étrangers, organisées par le biais des Centres de service à l’emploi pour les étrangers (OCDE/ADBI/OIT, 2015[48]).

Au-delà de la sensibilisation, un deuxième moyen d’attirer les talents étrangers consiste à leur offrir des conditions de séjour favorables, notamment le droit de faire venir les membres de leur famille, le droit pour ces derniers de travailler, l’acquisition rapide d’un titre de séjour permanent et, le cas échéant, la nationalité. Au cours de la dernière décennie, la concurrence s’est intensifiée entre pays membres de l’OCDE pour offrir des conditions favorables aux travailleurs étrangers les plus qualifiés. Des systèmes de traitement préférentiel des migrants qualifiés fondés sur des barèmes de points ont été mis en place en Corée en 2010, en Autriche en 2011 et au Japon en 2012. Cependant, la capacité des pays à attirer les travailleurs mobiles très qualifiés par des politiques favorables comporte des limites ; d’autres facteurs tels que l’environnement commercial, le revenu et les débouchés et les perspectives d’installation jouent un rôle plus important (OCDE, 2014[49]).

Certains pays participent activement à la formation des migrants internationaux dans le cadre de Partenariats pour la mobilité des compétences. Ils espèrent qu’une partie des bénéficiaires à ces formations choisiront de rester dans le pays au lieu de migrer, en tablant sur le fait que ceux qui resteront seront plus faciles à employer et plus productifs. Par exemple, dans le cadre de programmes pilotes récents, l’aide publique au développement (APD) sert à financer des formations dans le pays d’origine, assorties d’une option d’embauche future dans le pays de destination. Cette version modernisée des programmes traditionnels de travailleurs invités a été utilisée dans le cadre de partenariats entre l’Espagne et le Maroc, ainsi qu’en Italie et en Moldavie. De même, dans le cadre des programmes de recrutement de personnel infirmier de la Finlande, de la Norvège, de l’Allemagne et de l’Italie, le pays de destination travaille de concert avec les institutions partenaires du pays d’origine ou les recruteurs pour former les candidats à des exigences spécifiques. Les études à l’étranger sont l’une des formes les plus courantes de partenariat pour la mobilité des compétences, puisqu’il y a dans les pays membres de l’OCDE plus de 3 millions d’étudiants internationaux. Les taux de rétention dans les pays de destination sont de l’ordre de 30 à 35 %, ce qui signifie que de nombreux étudiants partent ensuite dans d’autres pays ou rentrent dans leur pays d’origine. Ceux qui restent peuvent représenter une importante source de compétences ; ainsi, en France, ils comptent pour une part élevée des premiers permis de travail délivrés (OCDE, 2017[50]). Dans les pays où le système d’enseignement et de formation professionnelle (EFP) est bien développé, il peut être dans l’intérêt des employeurs d’investir dans la formation professionnelle de stagiaires étrangers, cette démarche leur apportant des garanties sur la qualité des enseignements dispensés et permettant aux participants d’apprendre la langue dans un cadre professionnel. C’est ce qu’a fait l’Allemagne avec le programme MobiPro, mis en œuvre dans le contexte de la mobilité intracommunautaire.

Dans les pays attractifs qui peuvent sans difficulté recruter un nombre suffisant de candidats qualifiés, ou dans les professions pour lesquelles il existe un abondant réservoir de main-d’œuvre qualifiée dans le monde, le défi est plutôt de limiter, filtrer et sélectionner les candidats admis à entrer dans le pays. Les pays disposent d’un certain nombre d’outils pour s’assurer l’accès aux compétences requises tout en protégeant l’emploi national (OCDE, 2014[51]). Ils peuvent notamment constituer des listes de professions et secteurs pour lesquels le recrutement à l’étranger est autorisé (listes de pénuries de main-d’œuvre, comme en Espagne) ou interdit (listes non admissibles, comme en Irlande). Une autre option consiste à soumettre chaque demande à un examen de la situation du marché du travail, pour vérifier que les compétences requises ne sont pas disponibles localement. Ces examens sont pratiqués dans la plupart des pays membres de l’OCDE : généralement, lorsqu’un employeur cherche à recruter un travailleur étranger, une annonce d’offre d’emploi doit être publiée pendant une période déterminée. Dans des pays comme le Canada, les employeurs doivent décrire en détail les méthodes qui ont été utilisées pour pourvoir le poste vacant et la raison pour laquelle il n’a pas été possible de former du personnel. Dans d’autres pays, sont acceptés les recrutements qui respectent certains critères salariaux (comme dans certains programmes aux États-Unis). Lorsqu’il existe des listes de pénuries de main-d’œuvre, les employeurs peuvent être dispensés de satisfaire ces exigences, comme en Lettonie par exemple. En Suède, les employeurs sont libres de recruter un travailleur étranger pour n’importe quel poste dès lors que le salaire est conforme à la convention collective (OCDE, 2011[52]).

L’établissement de quotas est un moyen assez rudimentaire de limiter l’entrée des migrants, qui repose généralement sur l’utilisation d’indicateurs quantitatifs combinés à des évaluations et à la consultation des parties prenantes. Lorsque les créneaux disponibles font l’objet d’un surnombre de demandes, les pays doivent trouver une méthode pour délivrer les permis, en procédant de manière aléatoire ou en s’appuyant sur un système de classement à points. Là encore, les listes de pénuries de compétences peuvent faciliter la hiérarchisation des postulants, comme c’est le cas au Royaume-Uni. La Nouvelle-Zélande a inventé une procédure de sélection en deux étapes appelée « manifestation d’intérêt », que l’Australie et le Canada ont adoptée à leur tour pour gérer et sélectionner les migrants économiques permanents (Encadré 5.8). Les autorités coréennes ont également recours à cette méthode pour sélectionner les candidats les plus adaptables admis à participer à un programme de recrutement de travailleurs peu qualifiés (OCDE, 2019[35]).

Encadré 5.8. Pratiques nationales : le système des manifestations d’intérêt

La Nouvelle-Zélande a inauguré le premier système de manifestations d’intérêt (MDI) en 2003, dans le contexte d’une révision plus large de son système d’immigration permanente fondé sur l’offre. En adoptant le dispositif MDI en deux étapes, la Nouvelle-Zélande est passée d’une politique qui consistait à accepter passivement les demandes de permis de séjour à une politique de recrutement plus actif de migrants qualifiés (Merwood, 2008[53]).

Le dispositif MDI est une procédure de sélection en deux étapes : 1) sélection dans un « vivier » et 2) appel à faire acte de candidature (Graphique 5.8). Les candidats potentiels manifestent leur intérêt à migrer en Nouvelle-Zélande et sont admis à intégrer un « vivier » s’ils remplissent certains critères, qui visent à maximiser la contribution économique des migrants. Une fois dans le vivier, ils peuvent être sélectionnés et recevoir une invitation à faire acte de candidature. Les candidats qui ne reçoivent pas d’invitation à se porter candidat pour un programme d’immigration spécifique sont retirés du vivier après une certaine période.

Avant l’adoption du MDI, les demandes étaient traitées selon le principe du « premier arrivé, premier servi », générant de longues files d’attente qui frustraient les employeurs et empêchaient de satisfaire la demande à court terme. Les plafonds étaient rapidement atteints au début de la période de recrutement, et les candidats obtenant une note plus élevée mais arrivés plus tard devaient prendre leur tour dans la liste d’attente.

Graphique 5.8. Le processus de sélection dans le modèle MDI
Graphique 5.8. Le processus de sélection dans le modèle MDI

Source : Analyse fondée sur le site web Immigration Nouvelle-Zélande.

Améliorer la transparence des procédures de reconnaissance des compétences et proposer des formations en langues

Une fois arrivés dans le pays, il est important que les migrants aient la possibilité d’utiliser leurs compétences dans un cadre professionnel. Pour intégrer les immigrés adultes, il y a lieu avant toute chose d’évaluer leurs qualifications et leurs compétences. D’après les données disponibles, les systèmes qui permettent aux travailleurs étrangers de faire reconnaître leurs qualifications et de les convertir dans la qualification équivalente du pays d’accueil sont appréciés des employeurs et associés à de meilleurs résultats sur le marché du travail. Or, peu d’immigrés obtiennent la reconnaissance de leurs qualifications. L’une des raisons en est que les procédures utilisées sont peu transparentes et font intervenir un grand nombre d’acteurs, en particulier dans les professions très réglementées. Pour pallier ce problème, plusieurs pays membres de l’OCDE ont établi des points de contact auprès desquels les postulants peuvent se renseigner sur la démarche à suivre (OCDE, 2017[54]). Mais dans la plupart des pays, le manque de transparence demeure un problème. Les migrants qui ne parviennent pas à convertir leurs qualifications acquises à l’étranger en diplôme du pays d’accueil de niveau équivalent devraient pouvoir bénéficier d’une aide pour combler l’écart entre les qualifications qu’ils possèdent et les qualifications requises (Encadré 5.9).

Si les immigrés possèdent de nombreuses compétences qui sont sous-évaluées, il leur faut également acquérir de nouvelles compétences – et tout particulièrement apprendre la langue du pays d’accueil. Les immigrés qui font état de difficultés linguistiques affichent des taux de surqualification supérieurs de 25 points de pourcentage à ceux des immigrés de profil similaire qui maîtrisent mieux la langue (Damas de Matos and Liebig, 2014[55]). Fait qui n’a rien de surprenant, les pouvoirs publics dépensent davantage pour la formation linguistique que pour n’importe quel autre volet de la politique d’intégration des immigrés. Cependant, pour être efficaces, ces formations doivent prendre en compte les besoins de compétences individuels et favoriser l’intégration sur le marché du travail. L’un des moyens d’y parvenir est de donner une orientation professionnelle à la formation linguistique, dans l’idéal en dispensant les cours sur le lieu de travail (Encadré 5.9). Malgré le coût élevé de ce type de formation, il semble que l’investissement soit rentable (OCDE, 2014[56]).

Les réfugiés et les immigrés admis pour des raisons humanitaires doivent surmonter des obstacles plus importants que les autres catégories d’immigrés pour faire reconnaître leurs compétences et s’intégrer sur le marché du travail, dans la mesure où ils ont un niveau de formation moins élevé et où leur transition vers l’emploi est moins rapide (OCDE, 2019[33]). Les initiatives déployées pour aider les réfugiés à trouver un emploi et à le garder – en simplifiant les procédures à suivre pour accéder au marché du travail, faire reconnaître ses compétences et apprendre la langue du pays d’accueil – sont déterminantes pour leur intégration et leur aptitude à contribuer de manière productive à l’offre de compétences.

Encadré 5.9. Exemples nationaux : améliorer la transparence des procédures de reconnaissance des compétences et proposer des formations en langues

Améliorer la transparence des procédures de reconnaissance des compétences

L’Autriche offre aux nouveaux arrivants différents types d’aide relatifs à la reconnaissance des qualifications acquises à l’étranger – points de contact, portail d’information en ligne, et bourses individuelles pour la reconnaissance des qualifications.

En Allemagne (Francfort), le programme « Einsteigen, Umsteigen, Aufsteigen » (« démarrer, changer, monter en puissance ») s’adresse aux femmes migrantes très qualifiées, à qui il offre les services d’un mentor personnel. Pendant un an, le mentor partage avec sa stagiaire ses connaissances, son expérience et ses réseaux. En parallèle avec les activités de mentorat, le programme dispense également des conseils professionnels, une mise à niveau des compétences, des formations interculturelles et une aide à la reconnaissance des compétences. En un an, la moitié environ des participantes ont décroché un emploi correspondant à leurs qualifications.

Assurer des formations en langue

En Belgique (Flandre), lors de la troisième étape du programme d’intégration des immigrés, les participants sont orientés vers le service flamand de l’emploi (VDAB), qui propose des cours de langue axés sur le monde du travail, dont « Dutch in the Workplace ».

Au Portugal, des cours de langue professionnelle sont dispensés dans le cadre du programme de formation « le portugais pour tous », accessible gratuitement aux immigrés. Ces formations sont disponibles dans les secteurs suivants : commerce de détail, hôtellerie, soins cosmétiques, bâtiment et génie civil. Des cours de langue professionnelle sont également proposés dans le cadre du Programme d’intervention pour les travailleurs immigrés sans emploi.

Source : OCDE (2017[54]), Making Integration Work: Family Migrants, Making Integration Work, https://doi.org/10.1787/9789264279520-en ; OCDE (2014[56]), Perspectives des migrations internationales 2014, https://doi.org/10.1787/migr_outlook-2014-fr ; OCDE (2014[57]), OECD Skills Strategy Diagnostic Report: Austria 2014, https://doi.org/10.1787/9789264300255-en ; OCDE (2018[58]), Skills Strategy Implementation Guidance for Portugal: Strengthening the Adult-Learning System, https://doi.org/10.1787/9789264298705-en.

Recommandations politiques en vue d’élargir le vivier de talents disponibles

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à élargir le vivier de talents disponibles (Encadré 5.10).

Encadré 5.10. Recommandations politiques : élargir le vivier de talents disponibles
  • Améliorer les mécanismes de recrutement de travailleurs migrants. Inscrire les migrations de travail dans un cadre clair qui permette de s’adapter avec souplesse aux changements de la demande de main-d’œuvre. Examiner les possibilités d’établir des partenariats pour la mobilité des compétences, qui lient la formation aux possibilités de migration. Travailler en étroite concertation avec les employeurs pour s’assurer qu’ils ont confiance dans les certifications délivrées et que celles-ci sont adaptées à leurs besoins.

  • Améliorer la reconnaissance des qualifications étrangères. Travailler avec les partenaires sociaux pour élaborer des procédures d’évaluation et de reconnaissance des qualifications et des compétences étrangères. Faire de ces procédures le point de départ des programmes d’intégration, et communiquer sur leurs avantages. Élargir l’accès aux formations de mise à niveau pour les immigrés qui possèdent des qualifications étrangères.

  • Aider les immigrés à trouver du travail. Mettre les immigrés en contact avec les employeurs pour les aider à acquérir rapidement une expérience professionnelle. S’assurer que les immigrés peuvent bénéficier des politiques actives généralistes du marché du travail. Identifier et supprimer les obstacles au recrutement d’immigrés dans le secteur public. Recourir au mentorat pour aider les immigrés à comprendre le fonctionnement du marché du travail dans le pays d’accueil.

  • Combattre les préjugés délétères. Combattre les stéréotypes et les idées fausses en diffusant des informations concrètes sur les questions migratoires. Faire participer les employeurs à des initiatives sur la diversité et mesurer les résultats. Lutter contre les discriminations au moyen de dispositifs juridiques accessibles et sensibiliser l’opinion.

  • Améliorer la maîtrise de la langue du pays d’accueil. Mettre en place des programmes de formation linguistique et d’accueil, tout en veillant à ce qu’ils ne retardent pas l’entrée des immigrés dans l’emploi. Lorsque c’est possible, mettre l’accent sur la formation linguistique professionnelle et dispenser des cours de langue dans le cadre professionnel.

  • Insister sur l’éducation de la petite enfance. Encourager les immigrés à inscrire leurs enfants dans des structures d’accueil de la petite enfance à partir de trois ans. Encourager les immigrés qui ont des enfants à les faire venir dans le pays d’accueil dès que possible. Éviter la concentration d’enfants d’immigrés peu instruits dans les établissements scolaires.

Favoriser une utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel : améliorer les méthodes d’organisation et de gestion du travail pour optimiser les compétences des salariés

L’utilisation des compétences au travail peut se définir comme le niveau de compétence observé dans l’emploi actuel du travailleur. Fondamentalement, l’utilisation des compétences renvoie à la façon dont les employeurs utilisent les compétences de leurs salariés sur le lieu de travail et à l’adéquation entre les compétences des travailleurs et la demande et les exigences des employeurs (OCDE/OIT, 2017[59]). L’utilisation des compétences dépend à la fois de la mesure dans laquelle un travailleur mobilise ses compétences au travail – paramètre qui dépend à son tour des incitations qui lui sont proposées et de sa motivation intrinsèque – et des compétences requises pour effectuer une tâche spécifique. Certains individus possèdent des compétences surnuméraires qu’ils n’exploitent pas complètement dans leur travail ; d’autres ont des compétences de niveau plus faible mais les exploitent au maximum, soit parce qu’ils sont intrinsèquement plus motivés soit parce qu’ils puisent un surcroît de motivation dans la façon dont leur travail est organisé et géré.

La mesure dans laquelle les compétences sont utilisées dans le cadre professionnel est importante pour les individus, les entreprises et les pays. Pour les travailleurs, une meilleure utilisation des compétences est associée à un salaire plus élevé et une satisfaction professionnelle accrue, au-delà de l’effet de la maîtrise des compétences. Dans les entreprises, une meilleure utilisation des compétences est associée à une productivité plus élevée et un taux de rotation du personnel plus faible. L’utilisation des compétences en lecture et en écriture est aussi étroitement associée à la productivité du travail et à la croissance économique inclusive au niveau des pays. À l’échelon des pays, une adéquation étroite entre les compétences et les qualifications que possèdent les travailleurs et celles exigées par l’emploi est également associée à une productivité du travail plus élevée (Adalet McGowan and Andrews, 2015[60]).

Le défi : la maîtrise des compétences ne garantit pas leur utilisation

L’existence d’un vaste vivier de travailleurs très compétents ne garantit pas que leurs compétences soient utilisées efficacement au travail. Le Graphique 5.9 montre que les pays n’occupent pas le même rang dans le classement par maîtrise des compétences et le classement par utilisation des compétences au travail1. Seuls quelques pays sont placés au même rang dans les deux classements. Une fois prises en compte la profession du travailleur et les caractéristiques de l’entreprise, la maîtrise des compétences n’explique qu’une faible part des variations de l’utilisation des compétences.

Graphique 5.9. Maîtrise des compétences et utilisation des compétences dans les pays couverts par l’enquête PIAAC de l’OCDE
Scores moyens de compétences et utilisation moyenne des compétences au travail parmi la population occupée âgée de 16 à 65 ansa
Graphique 5.9. Maîtrise des compétences et utilisation des compétences dans les pays couverts par l’enquête PIAAC de l’OCDE

Note : Pour l’indicateur relatif à la lecture au travail (utilisation des compétences), l’échelle est comprise entre 1 "Jamais" et 5 "Tous les jours". Les scores de compétence vont de 0 à 500.

Source : OCDE (2018[2]), Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (base de données), 2012/2015, http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933932986

Les travailleurs amenés à utiliser plus fréquemment les compétences clés en traitement de l’information – écrit, mathématiques, résolution de problèmes et compétences en technologies de l’information et de la communication (TIC) – perçoivent généralement des salaires plus élevés. Le Graphique 5.10 montre qu’après contrôle du niveau de formation et de la maîtrise des compétences, les travailleurs qui utilisent ces compétences plus fréquemment dans le cadre professionnel perçoivent un salaire plus élevé. Cette relation positive est observée pour chaque type de compétence, mais elle est particulièrement étroite pour l’utilisation des compétences en TIC et en lecture.

Une utilisation plus efficace des compétences est par ailleurs associée à des niveaux accrus de satisfaction professionnelle et de bien-être du salarié (OCDE, 2016[61]). Pour cette raison, un lien étroit est parfois établi entre utilisation des compétences et qualité de l’emploi (voir par exemple Green et al. (2013[62]), cette association se répercutant à son tour à la satisfaction générale à l’égard de l’existence ainsi qu’à une meilleure santé. Les données de l’enquête PIAAC montrent que l’utilisation des compétences est liée à la probabilité d’être extrêmement satisfait de son travail, après contrôle de la maîtrise des compétences, du niveau de formation, du salaire horaire brut et d’autres caractéristiques sociodémographiques (OCDE, 2016[61]).

Graphique 5.10. Rendement salarial de l’éducation, maîtrise des compétences et utilisation des compétences
Pourcentage de variation du salaire associé à une augmentation d’un écart type1 de la maîtrise des compétences, de l’utilisation des compétences au travail et du nombre d’années d’études2
Graphique 5.10. Rendement salarial de l’éducation, maîtrise des compétences et utilisation des compétences

Note :

1) Un écart type correspond à : 2.9 années d’études ; 47 points sur l’échelle de littératie ; 53 points sur l’échelle de numératie ; 44 points sur l’échelle des capacités de résolution de problèmes dans des environnements à forte composante technologique ; 1 pour l’utilisation de la lecture au travail ; 1.2 pour l’utilisation de l’écriture et la numératie au travail ; 1.1 pour l’utilisation des TIC au travail ; et 1.3 pour la résolution de problèmes au travail.

2) Estimations issues de régressions MCO utilisant le logarithme du salaire comme variable dépendante.

Source : OCDE (2018[2]), Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (base de données), 2012/2015, http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933933005

À l’échelon de l’entreprise, une meilleure utilisation des compétences est associée à une productivité plus élevée (UKCES, 2014[63]) et à une rotation du personnel plus faible, certains auteurs arguant qu’elle contribue de surcroît à renforcer l’investissement, la motivation des salariés et l’innovation (Wright and Sissons, 2012[64]). La publication de l’OCDE (2013[10]) montre que l’utilisation des compétences en lecture dans le cadre professionnel est fortement corrélée avec la production par heure travaillée, un résultat robuste à l’inclusion de variables contrôlant la maîtrise des compétences.

Les caractéristiques sociodémographiques et les caractéristiques de l’entreprise sont des déterminants importants de l’utilisation des compétences (Quintini, 2014[65]). Le Graphique 5.11 montre que les femmes sont moins susceptibles d’utiliser les compétences en traitement de l’information au travail que les hommes, même en tenant compte des caractéristiques du poste de travail et de la maîtrise des compétences. En comparaison des travailleurs d’âge très actif (25-54 ans) et des travailleurs âgés (55-65 ans), les jeunes (16-24 ans) sont ceux qui utilisent le moins les compétences en traitement de l’information – y compris les TIC – au travail2.

Graphique 5.11. Utilisation des compétences en traitement de l’information en milieu professionnel : différences en fonction des caractéristiques
Différence dans les indicateurs relatifs à l’utilisation des compétences, moyenne OCDE
Graphique 5.11. Utilisation des compétences en traitement de l’information en milieu professionnel : différences en fonction des caractéristiques

Note : Pour la lecture, l’écriture, la numératie et les compétences en TIC, l’indicateur d’utilisation des compétences est une échelle allant de 1 « jamais » à 5 « tous les jours ». L’utilisation des compétences en résolution de problèmes est mesurée par la réponse des déclarants à la question « À quelle fréquence êtes-vous généralement confronté à des problèmes plus complexes, dont la résolution prend au moins 30 minutes ? ». L’éventail des réponses possibles est le même, allant de 1 « jamais » à 5 « tous les jours ».

Source : OCDE (2018[2]), Évaluation des compétences des adultes (PIAAC) (base de données), 2012/2015, http://www.oecd.org/skills/piaac/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933933024

Bonnes pratiques

Comme indiqué ci-dessus, l’utilisation des compétences dépend en partie de la mesure dans laquelle un travailleur mobilise ses compétences au travail – paramètre qui dépend à son tour des incitations qui lui sont proposées et de sa motivation intrinsèque (Granados and Quintini, à paraître[66]). Mais il existe d’autres facteurs, certains internes d’autres externes à l’entreprise, qui peuvent contribuer à améliorer l’utilisation des compétences, comme par exemple l’organisation du travail et la conception des tâches professionnelles, les stratégies utilisées sur les marchés de produits, les relations professionnelles et, plus généralement, les cadres institutionnels et relatifs au marché du travail (OCDE/OIT, 2017[59]). S’agissant des facteurs externes à l’entreprise, la délocalisation peut avoir une incidence sur les compétences requises dans l’emploi, le sens de cet effet dépendant de la nature des tâches qui sont délocalisées. Les résultats laissent provisoirement penser que la délocalisation des tâches de faible niveau technologique est liée positivement à l’utilisation des compétences en traitement de l’information dans le cadre professionnel, tandis que la délocalisation des tâches de niveau technologique élevé peut pénaliser l’utilisation des compétences de haut niveau dans le pays (OCDE, 2016[61]).

Améliorer les modes d’organisation du travail et les pratiques de gestion

Les pratiques internes de l’entreprise - c’est-à-dire la façon dont le travail est organisé et dont les tâches professionnelles sont conçues, ainsi que les modes de gestion adoptés par l’entreprise - sont un déterminant clé de l’utilisation des compétences. Plus particulièrement, la mise en œuvre de ce que l’on appelle les pratiques de travail à haut rendement (PTHR) peut améliorer l’utilisation des compétences. Ces pratiques recouvrent des aspects liés à l’organisation du travail et à la conception des tâches professionnelles, par exemple le travail en équipe, l’autonomie, la flexibilité dans l’organisation du travail, le mentorat, la rotation des postes et la mise en pratique de nouveaux apprentissages, et des pratiques de gestion telles que la participation du personnel, les primes incitatives, les pratiques de formation et les horaires de travail flexibles (Johnston et al., 2002[67]). D’après les données recueillies dans le cadre du PIAAC, les PTHR expliquent une part élevée de la variation de l’utilisation des compétences entre les individus, qui s’échelonne entre 14 % pour la résolution de problèmes et 27 % pour la lecture. Les PTHR sont ainsi le premier facteur explicatif de la variation de l’utilisation des compétences, se plaçant généralement devant la taille de l’entreprise, la maîtrise des compétences, le secteur d’activité, la profession3 ou les effets pays.

Cela étant dit, les PTHR sont surtout mises en œuvre dans les grandes entreprises. Pour les petites et moyennes entreprises (PME), l’adoption de ces pratiques peut se révéler ardue en l’absence de service de gestion des ressources humaines (Osterman, 2008[68]). Par ailleurs, de faibles compétences en gestion peuvent freiner l’innovation dans le cadre professionnel, raison pour laquelle il peut être utile de compléter les politiques de promotion des PTHR par des programmes de développement des compétences en gestion. Des précautions s’imposent donc à qui souhaite promouvoir les PTHR en tant que stratégie viable pour améliorer l’utilisation des compétences dans le cadre professionnel (OCDE/OIT, 2017[59]).

De nombreux pays ont lancé des initiatives pour améliorer l’utilisation des compétences via l’octroi d’aides financières ou l’organisation de campagnes de sensibilisation. Certaines font clairement référence aux PTHR, mais la plupart évoquent le changement d’organisation du travail en termes plus généraux. L’Encadré 5.11 présente quelques exemples de bonnes pratiques.

Encadré 5.11. Pratiques nationales : améliorer les modes d’organisation du travail et les pratiques de gestion

En Finlande, le Programme national de développement sur le lieu de travail a été mis en œuvre entre 1996 et 2010. Sous-tendu par l’idée que la piètre croissance de la productivité était liée à une mauvaise utilisation des compétences, le programme avait pour but de diffuser des modes d’organisation et de gestion, des modèles, des outils et des processus de travail innovants, et d’instiller une culture de « l’organisation de l’apprentissage ». Plus de 1 800 projets de développement menés dans des entreprises finlandaises ont bénéficié du soutien du programme. D’après les évaluations qualitatives, ces programmes ont obtenu des résultats positifs en termes d’encouragement à l’innovation et à la productivité sur le lieu de travail.

Dans le cadre du Programme de formation en entreprise établi à Singapour en 2013, les employeurs peuvent soumettre une demande de subvention publique afin de financer des projets d’amélioration de l’utilisation des compétences. Ces projets peuvent consister, par exemple, à renforcer les systèmes de ressources humaines pour mieux relier l’acquisition des compétences et les trajectoires professionnelles ; à recruter des consultants pour examiner les structures de rémunération et évaluer ainsi la capacité de l’entreprise à retenir les travailleurs qualifiés ; ou à recruter des consultants pour évaluer les besoins de formation de l’entreprise et mettre à mettre à profit leur connaissance du système de qualification, de la conception des formations et des contenus des programmes pour adapter les formations disponibles aux besoins spécifiques de l’entreprise.

La Nouvelle-Zélande considère que l’utilisation médiocre des compétences dans le cadre professionnel constitue un enjeu majeur pour les politiques publiques et que l’adoption des PTHR sera une condition déterminante de l’amélioration de la productivité du travail. Les autorités se sont employées à mieux faire connaître les PTHR et à démontrer qu’elles peuvent procurer des avantages aux salariés comme aux employeurs. Les ressources financières consacrées à ces mesures sont néanmoins limitées, venant pour la majeure partie du ministère du Travail.

Source : OCDE/OIT (2017[59]), Better Use of Skills in the Workplace: Why It Matters for Productivity and Local Jobs, https://doi.org/10.1787/9789264281394-en ; OCDE (2016[61]), Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2016, https://doi.org/10.1787/empl_outlook-2016-fr.

Pour que la situation change dans les entreprises, les employeurs doivent être convaincus des avantages qu’il y a à mettre en avant et développer les ressources humaines et s’y investir pleinement (OCDE/OIT, 2017[59]). Si les interventions publiques peuvent inciter les employeurs à passer à l’action, les changements les plus bénéfiques et les plus durables à l’échelon de l’entreprise interviennent souvent sous l’impulsion des instances sectorielles, en particulier les groupes d’employeurs ou les chambres de commerce. En outre, l’amélioration de l’utilisation des compétences nécessite de tenir compte de tout un écheveau de facteurs locaux et propres à l’activité qui sortent généralement du champ d’application traditionnel des politiques publiques. Dès lors, il peut être utile de travailler avec un organisme « focal » ou un intermédiaire (par exemple un établissement d’éducation et de formation professionnelle, un conseil sectoriel ou un cabinet de conseil en ressources humaines) capable d’offrir aux employeurs des connaissances techniques spécialisées sur l’organisation du travail, la conception des tâches professionnelles et le développement des ressources humaines (OCDE/OIT, 2017[59]). À Singapour, comme indiqué dans l’Encadré 5.11, des subventions sont accordées aux employeurs pour leur permettre d’étudier, avec des cabinets de conseil, les moyens de mieux aligner les formations disponibles sur les besoins spécifiques de leur entreprise .

Avec de bonnes capacités d’organisation et de gestion, il est possible d’améliorer l’adéquation des travailleurs aux tâches spécifiques à leur emploi et, ce faisant, d’améliorer l’utilisation de leurs compétences. Par ailleurs, les gestionnaires qualifiés sont en général plus conscients de l’importance des compétences et de l’innovation pour la réussite d’une entreprise (Le Mouel and Squicciarini, 2015[69]).

Les mesures qui facilitent la diffusion et l’adoption des bonnes pratiques de gestion sont en conséquence utiles, tout comme celles qui renforcent les capacités d’organisation des entreprises. Les cadres doivent maîtriser tout un éventail de compétences qui va des compétences cognitives de base aux compétences propres à leur fonction – réseautage, gestion et communication, planification commerciale et financière, ou encore capacité à présenter un plan d’activité à des investisseurs. Il faut faire en sorte de cibler la formation sur les lacunes des connaissances et des compétences et sur les besoins locaux. Dans ce contexte, la collaboration entre les organisations professionnelles, les syndicats, les universités et les organismes de formation peut accroître l’efficacité des programmes de formation destinés aux cadres et aux chefs d’entreprise.

Les individus qui aspirent à devenir entrepreneurs ont également besoin de compétences en gestion pour créer de nouvelles entreprises et les faire prospérer. Pour autant que les compétences entrepreneuriales puissent s’enseigner, le système éducatif peut fournir les bases nécessaires au développement de la créativité, de la capacité d’identifier les opportunités et de la résilience face aux épreuves.

Recommandations politiques en vue de favoriser l’utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à favoriser l’utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel (Encadré 5.12).

Encadré 5.12. Recommandations politiques : favoriser l’utilisation intensive des compétences dans le cadre professionnel
  • Aider les entreprises à adopter des pratiques de gestion et des modes d’organisation du travail améliorés. Les pouvoirs publics peuvent aider les entreprises à adopter des pratiques de gestion et des modes d’organisation du travail de nature à influencer l’utilisation des compétences dans le cadre professionnel. Ils peuvent notamment attirer l’attention sur les avantages d’une meilleure utilisation des compétences, faire connaître les bonnes pratiques, élaborer des outils de diagnostic pour aider les entreprises à évaluer leur marge d’amélioration, encourager le transfert de connaissances et mettre en place des programmes de développement des compétences en gestion. Les interventions devraient être ciblées sur les PME, qui peuvent plus difficilement adopter les PTHR pour des raisons de coût.

  • Opter pour une approche intégrée de l’amélioration de l’utilisation des compétences. Pour renforcer l’utilisation des compétences, il peut être utile d’adopter une approche intégrée englobant la formation, l’emploi et les priorités en matière de développement économique. Les organismes de formation devraient travailler en étroite concertation avec les employeurs pour s’assurer de l’utilité professionnelle des compétences développées. Les services de l’emploi, de leur côté, pourraient évaluer la qualité et la quantité des appariements entre l’offre et la demande d’emploi, en ajustant les systèmes de gestion de la performance. Quant aux organismes de développement économique, ils devraient prêter attention à la qualité des emplois dans leurs efforts pour attirer les investissements étrangers, et ne pas négliger les innovations marginales qui peuvent être introduites sur le lieu de travail à la faveur de grands projets de R-D.

Réduire les déséquilibres des compétences : améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences

Un déséquilibre en matière de compétences est un défaut d’alignement entre la demande et l’offre de compétences dans une économie ; il recouvre les inadéquations des compétences mais aussi les pénuries et les excédents de compétences. L’inadéquation des compétences décrit une situation dans laquelle les compétences des travailleurs sont supérieures ou inférieures aux exigences de l’emploi aux conditions actuelles du marché (Shah and Burke, 2005[70]) (OCDE, 2017[71]). L’inadéquation peut être mesurée selon différents critères, notamment les compétences, les qualifications et le domaine d’études. Les pénuries de compétences sont des situations de déséquilibre dans lesquelles la demande pour un type de compétence particulier excède l’offre de cette compétence au salaire pratiqué sur le marché (Junankar, 2009[72]).

Le défis : les déséquilibres entre l’offre et la demande de compétences peuvent être coûteux

L’inadéquation des compétences est préjudiciable aux travailleurs, qu’elle expose à un risque de chômage plus élevé, des salaires plus bas, une moindre satisfaction professionnelle et des perspectives de carrière plus limitées. Il apparaît que les travailleurs surqualifiés gagnent 20 % de moins environ que les travailleurs qui ont des qualifications similaires mais sont en situation d’adéquation avec leur poste (Quintini, 2011[9]). Si l’inadéquation en matière de domaine d’études induit également des coûts pour les individus en raison de la sous-utilisation d’une partie de leur capital humain, les personnes qui exercent un emploi sans rapport avec leurs études ne sont généralement pénalisées sur le plan salarial que si elles doivent accepter un autre emploi exigeant un niveau de qualification inférieur (Montt, 2015[73]).

Pour les entreprises, l’impact de l’inadéquation des compétences est plus ambigu. Des données anciennes indiquent que la surqualification a un effet négatif sur la productivité des entreprises [voir par exemple Tsang (1987[74])]. Des données plus récentes laissent néanmoins penser que la surqualification peut avoir des effets bénéfiques sur la productivité des entreprises dans certains environnements de travail – les entreprises des secteurs de haute technologie ou à forte intensité de connaissances, celles qui comptent une proportion plus élevée d’emploi très qualifiés et celles qui opèrent dans un environnement économique plus incertain (Mahy et al., 2015[75]). L’effet constaté de la sous-qualification sur la productivité des entreprises est généralement négatif.

Au niveau des économies, à en juger par les données de l’OCDE, une inadéquation des compétences plus marquée est associée à une productivité du travail plus faible en raison de la mauvaise affectation des travailleurs aux emplois (Adalet McGowan and Andrews, 2015[60]). L’inadéquation du domaine d’études peut également nuire à la productivité de l’économie : en effet, les travailleurs en inadéquation avec leur poste peuvent ne pas être aussi productifs que les travailleurs en situation d’adéquation, étant donné qu’il leur manque certaines compétences propres à un domaine qu’ils n’ont pas étudié ou qu’il leur faut plus de temps pour acquérir ces compétences.

Les pénuries de compétences alourdissent les coûts d’embauche et réduisent la productivité, les postes à pouvoir restant vacants plus longtemps et les entreprises étant obligées de faire appel à des travailleurs moins productifs (Haskel and Martin, 1993[76]; Bennett and McGuinness, 2009[77]). Par ailleurs, les entreprises en butte à une pénurie de compétences sont limitées dans leur capacité à innover et à adopter les nouvelles technologies, ce qui peut nuire à leur productivité.

D’après la base de données de l’OCDE sur les compétences pour l’emploi, 17 % des travailleurs sont surqualifiés pour leur emploi, et 32 % travaillent dans un domaine différent de celui sur lequel portaient leurs études (Graphique 5.12). Et selon l’enquête PIAAC, seuls 10 % environ des travailleurs sont trop qualifiés par rapport à l’emploi qu’ils occupent.

Graphique 5.12. Inadéquation des qualifications, du domaine d’études et des compétences en littératie
Pourcentage des travailleurs en situation d’inadéquation avec leur poste, par type d’inadéquation
Graphique 5.12. Inadéquation des qualifications, du domaine d’études et des compétences en littératie

Source : Parties A et B : OCDE (2018[78]), Base de données sur les compétences pour l’emploi, www.oecdskillsforjobsdatabase.org ; partie C : OCDE (2016[79]), The Survey of Adult Skills: Reader’s Companion, https://doi.org/10.1787/9789264258075-en ; OCDE (2013[10]), Perspectives de l’OCDE sur les compétences 2013 : Premiers résultats de l’Évaluation des compétences des adultes, https://doi.org/10.1787/9789264204096-fr

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933933043

Les causes des inadéquations sont nombreuses. Le fait que le taux de surqualification soit beaucoup plus élevé que le taux de surcompétence donne à penser que bien souvent, les personnes qui ont un niveau de formation supérieur à celui exigé par leur emploi possèdent des compétences en adéquation avec les besoins de leur emploi. Cela peut être dû, par exemple, à la qualité variable des établissements d’enseignement, à la fois entre et dans les pays, et à la qualité variable des étudiants dans une même filière d’études. L’inadéquation constatée en matière de domaine d’études pourrait signifier que les individus n’acquièrent pas les compétences qui sont recherchées sur le marché du travail. Mais elle pourrait également traduire le fait que de nombreuses compétences sont transférables entre domaines et entre professions.

L’inadéquation n’est pas toujours le symptôme d’un grave problème : ce peut être simplement le signe que le marché du travail est flexible et le taux de mobilité élevé. Dans bien des cas, elle traduit également le fait que les personnes choisissent leurs domaines d’études et leur travail en fonction de facteurs autres que les résultats sur le marché du travail, notamment leur intérêt personnel et leurs responsabilités familiales. Cependant, l’inadéquation peut également indiquer que les systèmes de compétences ne sont pas suffisamment flexibles et réactifs à l’émergence de besoins en compétences.

Les déséquilibres de compétences sont étroitement liés aux concepts de déficit et de surplus de compétences. Par exemple, si une compétence donnée est en déficit (la demande de cette compétence au taux de rémunération en vigueur est supérieure à l’offre sur le marché du travail), alors les employeurs auront tendance à recruter plus de travailleurs sous-compétents ou sous-qualifiés. La base de données de l’OCDE sur les compétences pour l’emploi livre également des informations sur les types de compétences qui font défaut ou qui sont au contraire excédentaires selon les pays. Dans la zone OCDE en moyenne, les pénuries les plus aiguës concernent les connaissances en éducation et formation, services de santé et mathématiques et sciences (Graphique 5.13). On observe également des pénuries de compétences transversales telles que la littératie et la numératie (compétences de base), les compétences systémiques, la résolution de problèmes complexes et les aptitudes verbales. Les excédents concernent la connaissance de l’industrie manufacturière et de la production, et les aptitudes routinières et physiques telles que l’endurance, la force physique et la force et la souplesse. L’intensité des pénuries et excédents de compétences s’est accentuée au cours de la dernière décennie, mettant en question la capacité des individus et des économies à s’adapter à l’évolution des besoins en compétences (OCDE, 2018[80]).

Graphique 5.13. Pénuries et excédents de compétences dans les pays membres de l’OCDE (2015)
Graphique 5.13. Pénuries et excédents de compétences dans les pays membres de l’OCDE (2015)

Note : La valeur un correspond à la pénurie de compétences maximale observée parmi les pays membres de l’OCDE et les différentes dimensions des compétences. Une valeur positive correspond à une pénurie de compétences et une valeur négative à un excédent. Les compétences sont classées selon le degré d’intensité des pénuries.

Source : OCDE (2018[78]), base de données de l’OCDE sur les compétences pour l’emploi, www.oecdskillsforjobsdatabase.org.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933933062

Bonnes pratiques

Bon nombre des pratiques qui peuvent contribuer à améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences ont déjà été abordées dans d’autres chapitres de ce rapport : créer des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie (chapitre 4) ; développer les processus d’évaluation et d’anticipation des compétences pour pouvoir recueillir des informations de qualité sur les besoins en compétences et les appliquer dans le cadre de l’élaboration des politiques (chapitre 4) ; améliorer l’accès aux renseignements utiles sur le marché du travail (chapitres 4 et 6) ; rendre les compétences visibles grâce à la reconnaissance des acquis (chapitre 4) ; assurer la réactivité des systèmes éducatifs en créant des liens avec les entreprises et les mécanismes de financement (chapitre 4) ; veiller à ce que les individus soient incités à investir dans l’acquisition de compétences recherchées sur le marché du travail (chapitre 4) ; et faciliter la transition des études au travail pour les jeunes en développant l’apprentissage en milieu professionnel (chapitre 4).

Les politiques qui facilitent la mobilité de la main-d’œuvre et la flexibilité des marchés du travail ainsi que les efforts déployés pour mettre en correspondance les exigences liées aux professions et les exigences en matière de compétences, peuvent aussi contribuer à améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences.

Faciliter la mobilité de la main-d’œuvre et la flexibilité des marchés du travail

Les initiatives visant à faciliter la mobilité de la main-d’œuvre dans un pays et à rendre le marché du travail plus flexible peuvent favoriser le redéploiement des compétences et de la main-d’œuvre vers les régions, secteurs et professions où elles sont les plus recherchées. Divers facteurs peuvent freiner la mobilité interne de la main-d’œuvre, notamment la langue, le logement, les coûts de transport, le manque de reconnaissance des compétences et des diplômes et la variation des exigences en matière de permis. Les mesures qui atténuent ces obstacles peuvent améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de compétences.

Par exemple, deux régions de Belgique, la Wallonie et la Flandre, ont récemment conclu un accord qui a pour objectif de faciliter la mobilité de la main-d’œuvre en réduisant les barrières linguistiques. Le service public de l’emploi (SPE) flamand va développer des cours et des modules de néerlandais axés sur le monde professionnel que les Wallons francophones pourront suivre sur leur lieu de travail ; il va par ailleurs sensibiliser les employeurs flamands à l’intérêt de recruter du personnel en Wallonie (OCDE, 2019[11]).

Les marchés du travail peu flexibles, qui grèvent les coûts de recrutement et de licenciement pour les employeurs, sont un autre frein à l’allocation optimale des compétences dans l’économie. La réduction de ces obstacles, dans toute la mesure où elle est possible, peut contribuer à améliorer l’adéquation entre la demande et l’offre de compétences. Comme l’a souligné la Stratégie pour l’emploi de l’OCDE (2018[5]), les politiques publiques doivent trouver le bon équilibre entre flexibilité et stabilité de l’emploi.

Mettre en correspondance les exigences liées aux professions et les exigences liées aux compétences

La plupart des pays font, d’une manière ou d’une autre, une évaluation approximative des exigences en matière de compétences compte tenu de la difficulté d’obtenir des indicateurs directs. Les valeurs indicatives couramment utilisées pour exprimer les besoins en compétences sont le niveau de qualifications, le domaine d’études ou la profession. Toutefois, les diplômes ne correspondent pas nécessairement aux compétences utilisées dans le cadre professionnel et les individus titulaires d’un même diplôme n’auront pas tous le même degré de compétence (Quintini, 2011[9]). De même, pour une profession donnée, les compétences et les tâches exigées changent au fil du temps avec l’évolution des technologies et de l’organisation, les attentes des clients et l’offre de main-d’œuvre (OCDE, 2013[10]).

Tous les pays membres de l’OCDE vont être amenés à mettre au point des indicateurs approximatifs plus sophistiqués des exigences en matière de compétences. Cette approche n’est pas encore répandue, mais plusieurs pays relient déjà les exigences d’ordre professionnel et les exigences en termes de compétences à l’aide de normes professionnelles exhaustives ou de descriptions des compétences requises pour chaque profession (Encadré 5.13). Les cadres professionnels axés sur les compétences facilitent une meilleure reconnaissance des compétences et contribuent ainsi à harmoniser l’offre et la demande de compétences sur le marché du travail. En décrivant les professions en termes de compétences requises, ces cadres peuvent constituer un outil utile pour les personnes qui souhaitent changer de profession en s’appuyant sur leurs acquis. Ce type d’outil peut être particulièrement utile pour faciliter la reconversion de travailleurs âgés, qui n’ont pas toujours les certifications formelles nécessaires et préfèrent chercher un nouvel emploi sur la base des compétences recherchées. Face à l’évolution rapide des besoins en compétences, il convient d’actualiser ces cadres régulièrement.

Encadré 5.13. Pratiques nationales : mettre en correspondance les exigences liées aux professions et les exigences liées aux compétences

Le gouvernement des États-Unis finance O*NET (Occupational Information Network), une base de données qui contient des informations détaillées sur les connaissances, les compétences et les aptitudes requises dans plus de 800 professions. Ces informations indiquent l’importance de telle ou telle compétence dans une profession particulière, ainsi que le niveau de compétence requis pour l’exercer. La base O*NET est financée par le Département du travail et de l’emploi des États-Unis et l’Administration de l’emploi et de la formation (USDOL/ETA). Initialement constituée avec des données fournies par les analystes des professions, elle est maintenant continuellement mise à jour à partir d’enquêtes sur les personnes exerçant un emploi et des données des experts et analystes des professions.

Suivant le même modèle qu’O*NET, l’Italie réalise une enquête (dans le cadre du domaine d’analyse Professioni, Occupazione e Fabbisogni) pour déterminer les compétences, les connaissances, les valeurs et les attitudes requises dans 800 professions. Un outil d’orientation professionnelle en ligne informe les utilisateurs sur les perspectives d’emploi de chaque profession et les types de compétences et de connaissances qui sont requis sur le marché du travail et le seront à l’avenir.

La base de données européenne ESCO (Classification européenne des aptitudes/compétences, certifications et professions) établit des correspondances entre les professions et les connaissances, compétences et aptitudes qu’il est nécessaire ou souhaitable d’avoir pour exercer une profession spécifique. Contrairement à O*NET, ESCO ne fournit pas d’informations sur l’importance de telle ou telle compétence dans des professions particulières ni sur le niveau de compétence exigé.

Source : OCDE (2016[81]), Getting Skills Right: Assessing and Anticipating Changing Skill Needs, https://doi.org/10.1787/9789264252073-en ; OCDE (2017[71]), Getting Skills Right: Skills for Jobs Indicators, https://doi.org/10.1787/9789264277878-en.

Recommandations politiques en vue de réduire les déséquilibres en matière de compétences

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à réduire les déséquilibres en matière de compétences (Encadré 5.14).

Encadré 5.14. Recommandations politiques : réduire les déséquilibres en matière de compétences
  • Comme on l’a vu dans les précédents chapitres, créer des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie (chapitre 4) développer les processus d’évaluation et d’anticipation des compétences pour pouvoir recueillir des informations de qualité sur les besoins en compétences et les appliquer dans le cadre de l’élaboration des politiques (chapitre 4), améliorer l’accès aux renseignements utiles sur le marché du travail (chapitres 4 et 6), rendre les compétences visibles grâce à la reconnaissance des acquis (chapitre 4), assurer la réactivité du système éducatif en créant des liens avec les entreprises et les mécanismes de financement (chapitre 4), veiller à ce que les individus soient incités à investir dans l’acquisition de compétences recherchées sur le marché du travail (chapitre 4), et faciliter la transition des études au travail pour les jeunes en développant l’apprentissage sur le lieu de travail (chapitre 4).

  • Promouvoir la mobilité de la main-d’œuvre et la flexibilité des marchés du travail. Réduire les obstacles à la mobilité de la main-d’œuvre par la mise en place de formations en langues, le défraiement des frais de transport et de logement associés, l’harmonisation des exigences en matière de permis et la reconnaissance des acquis. Dans la mesure du possible, réduire les coûts de recrutement et de licenciement pour favoriser l’allocation optimale des compétences dans l’économie.

  • Faciliter la reconnaissance des compétences en adoptant des cadres d’exercice des professions fondés sur les compétences. Poursuivre les efforts pour créer une classification des professions axée sur les compétences afin de faciliter les reconversions sur la base des exigences en matière de compétences.

Stimuler la demande de compétences de haut niveau : soutenir les activités d’innovation des entreprises et supprimer les obstacles à la croissance

Une bonne adéquation entre les compétences disponibles et les besoins du marché du travail n’est pas toujours positive : la population active peut être composée d’adultes peu qualifiés qui sont en adéquation avec leur emploi (situation d’équilibre fondé sur des emplois peu qualifiés). L’équilibre fondé sur des emplois peu qualifiés freine la croissance et le développement économique et rend les économies vulnérables face aux chocs économiques et technologiques, tels que ceux liés aux chaînes de valeur mondiales ou à la transformation numérique.

L’innovation, le développement technologique et le changement organisationnel ne peuvent avoir lieu que s’il existe des personnes dotées de compétences cognitives et non cognitives adéquates, capables de mettre en œuvre ces changements. Parallèlement, les changements technologiques à l’œuvre ont une incidence sur les types de tâches effectués par la main-d’œuvre et les compétences qu’elles requièrent.

Pour stimuler l’innovation et la croissance, il est donc impératif de coordonner les politiques en matière d’éducation et de compétences et les politiques industrielles et d’innovation. En alignant les interventions portant sur l’offre et sur la demande, les décideurs peuvent améliorer l’adéquation entre la demande et l’offre de compétences et, ce faisant, renforcer l’innovation et améliorer les résultats économiques.

Le défi : soutenir davantage l’évolution vers des activités à plus forte valeur ajoutée et à haute intensité d’innovation

Lorsque les politiques en matière de compétences sont harmonisées avec les politiques industrielles et d’innovation, les employeurs peuvent se procurer les compétences dont ils ont besoin pour faire évoluer leur entreprise vers des activités à plus forte valeur ajoutée et à haute intensité d’innovation. L’innovation – c’est-à-dire la création, le développement et la diffusion de nouveaux produits et procédés – nécessite de solides compétences en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM), ainsi que des compétences non techniques et des compétences entrepreneuriales (OCDE, 2011[82]). L’adoption d’une approche intégrée combinant politiques industrielle, d’innovation et de développement des compétences garantit aux employeurs que les compétences dont ils ont besoin seront disponibles au moment voulu. Ce type d’approche présente aussi l’avantage de limiter le nombre de chômeurs et de réduire la durée des épisodes de chômage.

Inversement, lorsque ces politiques ne sont pas harmonisées entre elles, les pays et les régions peuvent tomber dans le piège de l’équilibre fondé sur des emplois peu qualifiés. Ce type d’équilibre présente les caractéristiques suivantes : une population active composée d’adultes peu qualifiés qui sont peu incités à améliorer leurs compétences puisqu’ils savent qu’il leur sera difficile de trouver un emploi récompensant leurs efforts ; et des employeurs qui ne peuvent pas évoluer vers des activités à plus forte valeur ajoutée en raison du faible niveau de compétence de la main-d’œuvre.

Pour permettre à l’économie de s’orienter vers des activités à plus forte valeur ajoutée et à haute intensité d’innovation, les politiques en matière d’éducation et d’apprentissage tout au long de la vie et les politiques du marché du travail doivent s’accompagner d’une politique de soutien à l’innovation des entreprises et à l’entrepreneuriat, et de mesures visant à uniformiser les règles du jeu pour les entreprises et à éliminer les obstacles à la croissance.

Bonnes pratiques

Soutenir les activités d’innovation des entreprises

Les investissements dans la R-D favorisent le développement des connaissances et des compétences, stimulent l’innovation et renforcent la capacité des entreprises à absorber et exploiter le corpus de connaissances disponibles (Cohen and Levinthal, 2000[83]), dopant la demande de compétences adaptées à la production de haute technologie. Le Graphique 5.14 montre que le soutien public aux dépenses de R-D des entreprises a contribué à accroître l’intensité de R-D dans les économies de l’OCDE (OCDE, 2018[84]). Entre 2006 et 2015, les pays où le soutien public a le plus augmenté ont également connu une croissance plus soutenue de l’intensité de R-D, la variation des aides publiques comptant pour environ 17 % de la variation observée de l’intensité de R-D des entreprises. En Chine et en Corée, cependant, l’intensité de R-D a crû à un rythme plus rapide que celui auquel on aurait pu s’attendre compte tenu de la variation du soutien public mesuré. L’initiative italienne Industria 4.0 montre également comment une réforme gouvernementale associant investissements dans la R-D et réforme des politiques en matière d’éducation et de formation peut stimuler tout à la fois la demande et l’offre de compétences adaptées à la production de haute technologie (Encadré 5.15).

En marge du soutien public, les initiatives qui encouragent la collaboration entre l’université et les entreprises peuvent également donner un coup de pouce aux activités d’innovation des entreprises. L’établissement de liens plus étroits entre la science et l’industrie permet aux entreprises de découvrir de nouvelles technologies, renforce les transferts et les externalités de connaissances et facilite l’accès des entreprises aux experts dont elles ont besoin pour s’orienter vers des activités à plus forte valeur ajoutée (Ankrah and Al-Tabbaa, 2015[85]; Scandura, 2016[86]). C’est à l’échelon local que ces interventions sont le plus aisément mises en œuvre, dans la mesure où les parties prenantes des secteurs public, privé et universitaire peuvent y être directement associées. Par exemple, confrontée au tournant technologique radical opéré par l’industrie de la téléphonie mobile, la région de Tampere (Finlande) est parvenue à s’extraire de la crise en adoptant une approche ouverte en matière d’innovation, qui a renforcé le système d’innovation et resserré les liens entre les diverses parties prenantes de la région, notamment les secteurs scientifiques et industriels.

Les mesures mises en œuvre pour renforcer la collaboration entre les entreprises et entre les entreprises et les universités et instituts de recherche devront prêter une attention particulière à la participation des PME, généralement moins enclines à collaborer (OCDE, 2018[87]).

Graphique 5.14. Variation de l’aide publique aux dépenses de R-D des entreprises et des dépenses totales de R-D des entreprises, 2006-2015
Variation absolue annualisée des montants en pourcentage du PIB
Graphique 5.14. Variation de l’aide publique aux dépenses de R-D des entreprises et des dépenses totales de R-D des entreprises, 2006-2015

Note : DRDE signifie « dépenses de R-D des entreprises ».

Source : OCDE (2018[87]), Science, technologie et industrie – Tableau de bord de l’OCDE 2017: la transformation numérique, https://dx.doi.org/10.1787/9789264268821-fr, d’après OCDE (2018[84]), base de données sur les incitations fiscales en faveur de la R-D, http://oe.cd/rdtax.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933933081

Encadré 5.15. Pratiques nationales : conjuguer investissement dans la R-D et politique d’éducation et de formation

En 2016, le gouvernement italien a adopté un programme de politique industrielle ambitieux, Industria 4.0, dont l’objectif est d’appuyer la transition de l’économie vers des activités à plus forte intensité technologique et, plus généralement, à plus forte valeur ajoutée. Les interventions proposées misent sur la participation des agents publics et privés pour amplifier les investissements dans trois domaines clés de la transformation numérique : infrastructure numérique (extension des connexions haut débit et par fibre), innovation (encouragement à l’investissement dans la R-D et d’autres actifs incorporels, essentiellement par le biais de crédits d’impôt d’un montant de 13 milliards d’euros) et capital humain (développement des compétences requises pour la production de pointe). Pour renforcer les compétences nécessaires à la transformation numérique, le gouvernement va : intensifier la formation des étudiants et des cadres dans les domaines liés à Industria 4.0 ; accroître le nombre d’étudiants dans les filières d’EFP complémentaires de la production de haute technologie ; et établir des centres nationaux de compétences qui proposeront des formations et encourageront la collaboration dans le domaine de la recherche et les transferts de technologies. La Stratégie de l’OCDE sur les compétences fait valoir que pour porter ses fruits, l’initiative Industria 4.0 devra être étroitement intégrée avec d’autres programmes d’investissement privé et public en faveur des compétences (par exemple les politiques actives du marché du travail).

Source : OCDE (2018[88]), OECD Skills Strategy Diagnostic Report: Italy, https://doi.org/10.1787/9789264298644-en.

Éliminer les obstacles à la croissance

Supprimer les barrières à l’entrée et donner aux entreprises la possibilité de monter en puissance sont également de nature à stimuler la demande de compétences de plus haut niveau et l’accroissement de la productivité. Les start-ups font connaître les nouvelles technologies de production et contribuent à améliorer l’efficience allocative en poussant vers la sortie les entreprises en place qui ne sont pas aussi productives ou innovantes. Pour des résultats optimaux, les pouvoirs publics devraient concentrer leurs efforts sur les start-ups les plus prometteuses. Par exemple, les déductions fiscales peuvent être réservées aux jeunes start-ups innovantes, qui font partie des entreprises qui généralement contribuent à la création de connaissances et font entrer les innovations les plus radicales sur le marché (Henderson and Clark, 1990[89]). La loi italienne sur les start-ups, par exemple, contient des dispositions sur les investissements de démarrage dans les start-ups et prévoit l’octroi de garanties publiques à l’appui des prêts bancaires pour les entreprises prometteuses. Les banques étant parfois réticentes à financer des investissements relativement risqués, la mise à disposition de nouvelles formes de financement, telles que le capital-risque et le capital-investissement, peut stimuler l’entrepreneuriat, la création de start-ups et l’investissement dans les actifs incorporels plus généralement.

Recommandations politiques en vue de stimuler la demande de compétences de haut niveau

Au vu des constatations et pratiques ci-dessus, les recommandations politiques suivantes peuvent aider les pays à stimuler la demande de compétences de haut niveau (Encadré 5.16).

Encadré 5.16. Recommandations politiques : stimuler la demande de compétences de haut niveau
  • Aligner les politiques en matière d’éducation et de compétences sur les politiques liées à la demande. Renforcer la demande et l’offre de compétences au moyen d’une politique industrielle adéquate, comprenant notamment un soutien aux investissements dans la R-D et autres actifs fondés sur le savoir, et encourager en parallèle une collaboration accrue entre les organismes publics, les instituts de recherche et le secteur privé.

  • Éliminer les obstacles à l’entrée et soutenir la montée en puissance des start-ups prometteuses. La mise en place de déductions fiscales ou d’autres formes d’aide pour les start-ups innovantes peut les aider à grandir et, par ce biais, favoriser l’adoption de nouvelles technologies, accroître la productivité et stimuler la demande de compétences de haut niveau.

Références

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Notes

← 1. Le Graphique 5.9 montre que pour les compétences à l’écrit, le classement des pays diffère selon que l’on considère la maîtrise des compétences ou l’utilisation des compétences au travail. La situation est la même pour les compétences en mathématiques (voir (OCDE, 2016[61])).

← 2. Contrairement à l’idée reçue selon laquelle les jeunes sont de plus fervents utilisateurs des TIC, dans tous les pays participants, l’utilisation des TIC est moins fréquente chez les jeunes que parmi les travailleurs d’âge très actif en moyenne. En revanche, de façon systématique, les jeunes utilisent davantage les TIC à la maison qu’au travail, alors que c’est l’inverse pour les travailleurs d’âge très actif et les travailleurs âgés.

← 3. L’utilisation des compétences en TIC fait exception à cette règle : dans leur cas, la profession explique une plus large part de la variation de l’utilisation des compétences que les PTHR.

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