1. Mesures d’adaptation de l’agriculture au changement climatique

D’après le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC, 2023[1]), les températures mondiales ont été supérieures de 1.1 °C en moyenne aux niveaux préindustriels ces dix dernières années, et progressent de 0.2 °C par décennie. L’agriculture fait partie des secteurs les plus exposés aux changements météorologiques et aux événements extrêmes qui en découlent, tels que les sécheresses et les inondations. Il est impératif de s’adapter à cet environnement en pleine évolution pour relever le triple défi qui consiste à nourrir une population croissante, à offrir des moyens de subsistance tout au long de la chaîne de valeur alimentaire et à renforcer la durabilité du secteur agricole.

Le changement climatique a d’ores et déjà des répercussions notables sur les rendements et la qualité des produits agricoles. Bien que les rendements des cultures de base aient progressé d’un facteur 2.5 à 3 depuis 1960 grâce au progrès technologique et à de meilleures pratiques de gestion, les rendements mondiaux de cultures telles que le maïs et le soja ont été inférieurs de 4 à 6 % à ce qu'ils auraient pu être en l’absence de réchauffement (GIEC, 2022[2] ; Moore, 2020[3] ; Iizumi et al., 2018[4]). La croissance de la productivité du secteur a, elle aussi, considérablement ralenti : on estime que, depuis 1961, la croissance de la productivité totale des facteurs – qui correspond au niveau de production obtenu pour une quantité d’intrants donnée – a été amputée de 21 % du fait du changement climatique (Ortiz-Bobea et al., 2021[5]).

Par ailleurs, l’agriculture est particulièrement sensible aux phénomènes météorologiques extrêmes, cette dernière étant intrinsèquement dépendante de l’environnement dans lequel elle est pratiquée. Parmi les phénomènes les plus dommageables pour la production agricole figurent les sécheresses, dont la fréquence a presque doublé (passant de 8 par an en 1971-80 à 16 par an en 2011-20), les tempêtes, qui ont plus que triplé (passant de 29 à 103 par an), et les inondations, devenues presque six fois plus fréquentes (passant de 27 à 155 épisodes par an) (CRED, 2023[6])1. Au total, le nombre de catastrophes naturelles relevé à l’échelle mondiale a atteint une moyenne de 372 événements par an entre 2011 et 2020, contre 92 événements par an entre 1971 et 1980 (graphique 1.1). Du point de vue de l’économie, le coût de ces catastrophes, qui était de 1 630 milliards USD en 1980-99, s’est établi à 2 970 milliards USD en 2000-19, sous l’effet de la conjonction de plusieurs facteurs, dont la fréquence accrue de certains types d’événements, l’augmentation de l’exposition et la plus grande vulnérabilité (CRED et UNDRR, 2020[7])2. Quand bien même les pertes économiques sont plus élevées, en valeur absolue, dans les pays développés, les conséquences des catastrophes naturelles sont particulièrement importantes dans les économies en développement, où les secteurs les plus vulnérables sont aussi les moins à même de faire face à ces effets et de s’en remettre (OCDE/FAO, 2021[8]).

Si le changement climatique fait courir des risques considérables à l’agriculture, il peut aussi avoir des effets bénéfiques dans certaines régions, par exemple en permettant la migration géographique de certaines productions agricoles et en ouvrant ainsi de nouvelles perspectives3. Par exemple, les régions septentrionales d’Europe et d’Amérique du Nord vont probablement devenir plus propices à la production agricole à mesure que l’augmentation des températures prolongera la durée de la période végétative. Certaines régions pourraient se prêter davantage à certains types de cultures. Ainsi, certaines provinces d’Espagne offrent un climat de plus en plus adapté à la culture des fruits tropicaux. La production de vin s’est d’ores et déjà étendue vers le nord et se trouve pratiquée au Royaume-Uni, par exemple, ainsi que dans des régions de haute altitude, telles que les zones montagneuses d’Italie. Les pays des latitudes septentrionales s’attendent à une amélioration générale des conditions de culture de produits de base tels que les betteraves sucrières et le maïs. Même dans les pays au climat plus chaud, où la hausse des températures devrait être préjudiciable pour l’agriculture, la raréfaction des gelées devrait profiter à certaines cultures (Cobourn, 2023[9]).

À l’échelle régionale, le changement climatique a des effets variés sur l’agriculture. L'Europe est confrontée à des périodes végétatives plus précoces, ainsi qu’au réchauffement du climat et à des modifications des régimes pluviométriques (GIEC, 2022[10]). On estime que ces changements sont positifs pour les rendements du maïs et des betteraves sucrières, mais négatifs pour ceux du blé et de l’orge. Les pertes de récoltes imputables aux sécheresses et aux vagues de chaleur en Europe ont été multipliées par trois au cours des cinq décennies passées (Brás et al., 2021[11]). Ces dernières années, les hivers froids conjugués aux pluies excessives survenues en automne et au printemps ainsi qu’aux sécheresses estivales ont fait baisser les rendements par rapport aux niveaux prévus sur la base des tendances observées par le passé. La hausse des températures a par ailleurs permis aux ravageurs, aux maladies et aux espèces envahissantes de progresser vers les pôles. Ainsi, la pyrale du maïs s’est déplacée de plus de 1 000 km vers le nord, tandis que la teigne des crucifères a progressé de 800 km vers le nord en Scandinavie par rapport à son ancienne aire de répartition, en Russie. Cette dynamique devrait se poursuivre avec la propagation de la mouche de l’olive vers les régions du nord de l’Italie (Skendžić et al., 2021[12]).

En Asie, le changement climatique est responsable de la modification des pluies de mousson, des températures extrêmes et des oscillations océaniques (GIEC, 2022[13] ; Thirumalai et al., 2017[14]). Du point de vue de la production agricole, le dérèglement climatique retarde les récoltes, nuit aux rendements et à la qualité des cultures, accroît la fréquence des ravageurs et des maladies, ralentit la croissance des animaux d’élevage et fait augmenter la mortalité animale. Le changement climatique influe sur l’ampleur, le calendrier et la configuration des événements imputables au phénomène El Niño, avec des conséquences négatives pour la productivité agricole et la sécurité alimentaire dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure d’Asie du Sud-Est et du Sud (Cai et al., 2014[15]). Ce phénomène est particulièrement important dans le domaine de la riziculture, qui est fortement tributaire des pluies de mousson, lesquelles diminuent lorsque le phénomène El Niño s’intensifie. D’après une étude récente, 13.4 % des zones mondiales de récolte en pâtiraient à l’échelle mondiale, notamment celles situées en Inde, au Viet Nam, aux Philippines, au nord-est de la République populaire de Chine (ci-après « la Chine »), et au Japon (Cao et al., 2023[16]). L'Asie australe a quant à elle été touchée par un certain nombre de sécheresses, de vagues de chaleur et de gel ces dernières années, qui ont eu d’importantes retombées négatives pour l’agriculture (GIEC, 2022[17]). On estime que dans le nord de l’Australie, les pertes de production agricoles atteignent une moyenne de 19 % chaque année, en raison de la sécheresse. En Nouvelle-Zélande, des hivers plus doux permettent d’anticiper la récolte des kiwis (Cobourn, 2023[9]).

L'Amérique du Nord est confrontée à un décalage des saisons végétatives, ainsi qu’à des vagues de chaleur et à des précipitations extrêmes (GIEC, 2022[18]). Aux États-Unis, la part des terres émergées ayant subi des précipitations extrêmes a sensiblement augmenté depuis les années 80, d’où un risque accru de ruissellement de surface, d’érosion des sols et de diminution de la quantité de carbone stockée dans les sols (Gowda et al., 2018[19]). De manière générale, le changement climatique a pour conséquence directe une baisse de la croissance de la productivité totale des facteurs agricoles partout en Amérique du Nord, et ce sont les régions situées aux latitudes les plus basses qui sont les plus touchées (Ortiz-Bobea et al., 2021[5])

La plupart des sous-régions d’Amérique du Sud font face à une intensification et à une fréquence accrue des vagues de chaleur extrême, ainsi qu’à une diminution de celles des vagues de froid (GIEC, 2022[20]). La durée et l’intensité des sécheresses augmentent également, avec la survenue de phénomènes tels que la méga-sécheresse observée dans le centre du Chili, qui correspond à la plus longue sécheresse survenue dans la région depuis mille ans, et la sécheresse pluriannuelle du bassin Parana-La Plata, qui constitue le pire épisode enregistré depuis 1944. Dans l’ensemble de l’Amérique du Sud, la sécheresse a engendré une baisse des récoltes de céréales de l’ordre de 2.6 % en 2020-21 par rapport à l’année précédente (OMM, 2022[21]). Dans l'État mexicain de Zacatecas, la récolte de haricots a atteint son plus bas niveau depuis 20 ans en 2020, toujours en raison de la sécheresse. L'Amérique centrale et le nord de l’Amérique du Sud sont confrontés à des phénomènes pluvieux extrêmes plus intenses et plus fréquents, ainsi qu’à des incendies. En Argentine, ces derniers ont détruit d’importantes zones de pâturage dans la région de Gran Chaco en 2022, mettant à mal leur productivité ainsi que celle des activités d’élevage.

Dans ce contexte, il devient de plus en plus nécessaire d’adopter des mesures d’adaptation afin de limiter et d’anticiper les effets du changement climatique. Les scénarios du GIEC prévoient une hausse des températures, des niveaux élevés de CO2 ainsi que des phénomènes météorologiques à la fois plus fréquents et plus extrêmes (GIEC, 2023[1]). Ces effets resteront source de problèmes pour l’agriculture dans les décennies à venir. Par exemple, l’élévation des températures pourrait faire baisser les niveaux de carbone et d’azote dans les sols ce qui, à son tour, pourra entraîner une baisse de rendement au niveau des cultures (GIEC, 2022[2] ; Basso et al., 2018[22]). Une diminution supplémentaire des rendements pourrait résulter de l’évolution des populations d’insectes nuisibles et des processus métaboliques, qui sont sensibles à la hausse des températures (Deutsch et al., 2018[23] ; GIEC, 2022[2]). Des températures plus hautes feront aussi augmenter le nombre de jours de stress extrême chaque année pour les animaux d’élevage, ce qui pourrait se traduire par des pertes de production plus importantes dans les secteurs bovin et laitier en particulier (Nardone et al., 2006[24] ; GIEC, 2022[2]). La progression des niveaux de CO2, qui tend à réduire l’efficacité des herbicides, devrait se répercuter sur l’établissement, la concurrence, la répartition et la gestion des plantes adventices (GIEC, 2022[2]). L’augmentation des températures aura également pour effet de réduire les ressources en eau disponibles comme suite à la modification du débit des cours d’eau, des réserves d’eau à l’échelle des bassins et du ralentissement de la recharge des nappes souterraines. Tout cela affectera environ 40 % des cultures irriguées dans le monde, et pourrait avoir des conséquences plus importantes encore dans les régions où l’agriculture affronte la concurrence croissante d’autres secteurs (OCDE, 2017[25]).

La fréquence et l’intensité des phénomènes extrêmes devraient également se renforcer (GIEC, 2021[26]). Des phénomènes météorologiques plus réguliers et dévastateurs, comme les sécheresses, les tempêtes et les inondations, donneront lieu à de plus mauvaises récoltes, à une contamination accrue des cultures par les aflatoxines, et porteront atteinte à la viabilité économique de la production animale reposant sur le pâturage. Les inondations et les tempêtes pourraient accroître la vitesse de propagation des maladies liées à l’eau, des micro-organismes et des algues, qui nuisent à la santé des animaux. Ces phénomènes peuvent également endommager des infrastructures essentielles aux récoltes, au transport et à la transformation des produits agricoles. Bien que quelques points de basculement aient déjà été atteints, ou soient sur le point de l’être, un réchauffement supérieur à 1.5 °C est plus susceptible de conduire à des points de basculement climatiques, avec des répercussions irréversibles pour l’agriculture dans certaines régions. Ainsi, l’affaiblissement de la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique devrait avoir des conséquences brutales et irréversibles, dont une modification des systèmes de mousson et une sécheresse généralisée préjudiciables pour les systèmes agricoles actuels (OCDE, 2022[27]).

Les systèmes alimentaires mondiaux sont exposés à des risques, tout comme le sont les producteurs à titre individuel. Il apparaît de plus en plus clairement que la hausse des températures rend plus probables des pertes de rendement simultanées dans les grandes régions productrices (GIEC, 2022[2] ; Gaupp et al., 2019[28] ; Cai et al., 2014[15] ; Perry et al., 2017[29]). Une envolée des prix pourrait alors être observée sur les marchés internationaux en raison d’une réduction de l’offre mondiale. Les pays importateurs auront quant à eux du mal à sécuriser leurs approvisionnements, avec des risques accrus pour la sécurité alimentaire à l’échelle planétaire.

Les effets du changement climatique sur l’agriculture s’intensifient considérablement avec chaque degré de réchauffement, d’où l’importance de prendre des mesures d’atténuation afin de limiter les émissions (GIEC, 2022[2]). Selon le scénario d’émissions le plus pessimiste du GIEC, un tiers des terres agricoles actuellement exploitées pourraient devenir impropres à la production animale ou végétale d’ici la fin du siècle en cas d’évolution défavorable des précipitations, de la température et de l’aridité (Kummu et al., 2021[30] ; GIEC, 2022[31]). Cependant, les scénarios plus optimistes tablent eux aussi sur des conséquences considérables pour la production agricole. Dans le cadre d’un scénario à faibles émissions, par exemple, jusqu’à 8 % des terres agricoles actuellement exploitées pourraient ne plus pouvoir accueillir de cultures ou d’activités d’élevage d’ici la fin du siècle.

Le GIEC définit l’adaptation au changement climatique comme étant, pour les systèmes humains, une « démarche d’ajustement au climat actuel ou attendu ainsi qu’à ses conséquences, de manière à en atténuer les effets préjudiciables ou à en exploiter les effets bénéfiques » (Ara Begum et al., 2022[32]). Dans le secteur agricole, l’adaptation peut être autonome ou planifiée. L’adaptation autonome correspond à une démarche qui ne découle ni d'une planification, ni d’une orientation explicites, et qui répond à des changements survenus dans l’environnement ou sur les marchés (Malik, Qin et Smith, 2010[33]). Cette forme d’adaptation s’observe souvent lorsque les agriculteurs adaptent leurs pratiques en réaction à l’évolution des conditions climatiques, en ajustant leurs pratiques d’élevage ou de gestion de l’exploitation, en changeant de variétés ou d’espèces ou en modifiant le calendrier de plantation, le taux de charge animale ou d’autres activités essentielles. À l’inverse, l’adaptation planifiée résulte d'un processus de décision mené expressément à cet effet. Elle est souvent – mais pas systématiquement – entreprise par un groupe d’acteurs ou des entités publiques en prévision d’un changement ou en réponse à celui-ci. Citons par exemple les investissements dans des semences plus résistantes ou des technologies permettant une irrigation plus efficace (Ignaciuk et Mason-D’Croz, 2014[34]).

Les agriculteurs sont souvent les mieux placés pour déterminer quelles mesures prendre pour atténuer les risques climatiques au niveau de leurs exploitations, à condition de disposer de moyens suffisants, d’un accès aux connaissances et de la capacité financière et technique pour s’adapter (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). Souvent, des mesures sont adoptées au niveau des exploitations sans que les pouvoirs publics aient besoin d’intervenir, ou en dépit de mesures entravant l’adaptation, car les agriculteurs réagissent à l’évolution observée ou prévue des conditions climatiques. Dans ces cas-là, les avantages de l’adaptation sont perçus localement et directement mis à profit par les agriculteurs. En d’autres termes, les intérêts personnels constituent une incitation suffisante à prendre des mesures d'adaptation (Ignaciuk, 2015[36]).

Toutefois, même lorsqu’ils peuvent en retirer des avantages à titre privé, les agriculteurs peuvent décider de ne pas s’engager dans une démarche d’adaptation au changement climatique du fait d’un manque d’informations, de restrictions financières ou d’un défaut d’alignement des incitations (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). Dans d’autres cas, les mesures d’adaptation ne peuvent pas être convenablement appliquées au niveau des exploitations en raison de défaillances des marchés, d’externalités et d’asymétries d’information, ou bien parce qu’une transformation plus radicale est nécessaire (Ignaciuk, 2015[36]). Le GIEC (2022[2]) estime qu’en raison de capacités d’adaptation limitées et de facteurs d’insécurité alimentaire non liés au climat, l’adaptation autonome ne suffira pas à atteindre l’objectif de développement durable (ODD) n° 2 défini par l’Organisation des Nations Unies (ONU), consistant à éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable. Il conviendra donc impérativement de mettre en œuvre une adaptation planifiée plus proactive, soutenue par des politiques publiques.

Étant donné que les agriculteurs prennent leurs décisions dans un contexte où les institutions sociales et économiques limitent ou facilitent leur capacité d’adaptation, les politiques publiques ont un rôle évident à jouer dans la mise en place d'un environnement favorable. D’un point de vue économique, des interventions publiques peuvent être justifiées en faveur de mesures d’adaptation comme celles consistant à produire ou à transférer des connaissances, à corriger des externalités, à permettre la mise en commun des risques extrêmes et à lever les obstacles institutionnels, réglementaires ou financiers à l’adaptation (Ignaciuk, 2015[36]).

La planification des stratégies d’adaptation s’accompagne de beaucoup d’incertitudes, qui peuvent conduire à l’échec de ces mesures. Parfois, ces stratégies peuvent aller jusqu’à renforcer la vulnérabilité au changement climatique – ce phénomène est plus connu sous le terme de maladaptation. La maladaptation résulte d’actions ou d’inactions conduisant à une augmentation du risque de conséquences néfastes, à un renforcement de la vulnérabilité ou à une dégradation des conditions de vie dans un contexte de changement climatique, à l’heure actuelle ou dans le futur (GIEC, 2022[2]). Par exemple, les subventions en faveur de systèmes d'irrigation économes en eau peuvent pousser à exploiter davantage les nappes souterraines et à favoriser des cultures plus gourmandes en eau, augmentant ainsi la probabilité et l’ampleur des pertes dues à de futures sécheresses (OCDE, 2017, p. 166[25]). Le soutien que le secteur public accorde à des pratiques ou à des technologies qui ne répondent pas pleinement aux besoins locaux peut également donner lieu à des incitations néfastes ou renforcer des techniques et profils de production existants qui minent les incitations en faveur de l’adaptation autonome. Par ailleurs, il n’est pas exclu que des mesures d’adaptation bien intentionnées mises en œuvre aujourd’hui deviennent un facteur de maladaptation à l’avenir en raison des profondes incertitudes qui entourent les projections relatives à l’évolution du climat. Afin de réduire le risque de maladaptation au minimum, il conviendrait de privilégier des mesures « sans regrets » (c’est-à-dire utiles en tout état de cause), de même que des politiques d’adaptation souples et suffisamment robustes pour répondre à tout un éventail de scénarios de changement climatique, en vue d’améliorer la productivité à long terme (Ignaciuk, 2015[36] ; Antón et al., 2013[37]).

Comme il est difficile pour les décideurs publics de déterminer précisément quelles mesures d'adaptation conviennent au contexte local, on considère généralement qu’ils doivent surtout s’employer à renforcer la capacité d’un système à s’adapter et non privilégier des stratégies d’adaptation particulières (OCDE, 2015[38]). Par conséquent, les politiques d’adaptation visent souvent à renforcer la résilience, c’est-à-dire « la capacité de se préparer, de planifier, d’absorber, de se rétablir, ainsi que de s’adapter et de se transformer de façon plus constructive face aux événements hostiles » (OCDE, 2020[39]). Cette définition intègre la notion de préparation ainsi que trois capacités fondamentales – l’absorption, l’adaptation et la transformation – qui désignent respectivement des mesures à court, moyen et long terme.

Selon OCDE (2020[39]), la capacité d’absorption renvoie à la capacité d’un système à faire face aux conséquences d’un choc à court terme, en mettant notamment en place des systèmes d’alerte précoce permettant aux agriculteurs d’adapter leurs pratiques, ou des dispositifs d’assurance récolte qui les indemnisent en cas de dommages. La capacité d’adaptation désigne quant à elle la capacité d’un système à s’ajuster à moyen terme au travers de changements progressifs des comportements, sans aller toutefois vers une évolution structurelle. Des exemples de changements progressifs des comportements incluent des modifications au niveau des exploitations, des ajustements des dates de semis ou des éventails de cultures pratiquées, ou encore des systèmes d’irrigation. La capacité de transformation, enfin, correspond à la capacité d’un système à se soumettre à une évolution structurelle, qui pourra passer par le déplacement de certaines cultures vers de nouvelles régions de production, la mise au point de nouvelles infrastructures ou la création de nouveaux débouchés commerciaux ou l’abandon pur et simple de l’activité agricole, les cas échéant moyennant une indemnisation4.

Les politiques d’adaptation au changement climatique doivent impérativement soutenir le développement de ces trois capacités afin de faciliter une adaptation effective et d’éviter les cas de maladaptation à long terme. Les mesures uniquement axées sur les conséquences du changement climatique à court terme peuvent en effet aboutir à une maladaptation au fil du temps en absence d’amélioration de la situation (Lankoski, Ignaciuk et Jésus, 2018[40] ; Schipper, 2020[41]). Par exemple, les mesures d’indemnisation ex post peuvent aider les agriculteurs à traverser une période de sécheresse, mais la multiplication des épisodes de sécheresse imputables au changement climatique suppose de mettre en place des outils plus efficaces afin d’aider les agriculteurs à anticiper et à gérer les risques, voire à transformer plus radicalement leurs pratiques à long terme. De même, le fait de se concentrer sur les actions à mener à moyen terme peut reléguer au second plan les investissements dans la capacité de transformation qui devront être réalisés à long terme. Par exemple, le fait d'investir dans l’élaboration de nouveaux cultivars peut reporter la nécessité de passer à une nouvelle culture ou de changer de région de production, même si un changement structurel devra se produire à long terme.

Si les politiques et les investissements agricoles et climatiques constituent les principaux vecteurs de progrès vers une plus grande résilience du secteur agricole, la politique de l’eau peut elle aussi largement encourager l’adaptation au changement climatique, notamment dans les régions exposées à d’importants risques liés à l'eau (encadré 1.1).

Les mesures d'adaptation et d’atténuation sont tout aussi cruciales au vu de l’aggravation des conditions climatiques, et des synergies non négligeables peuvent être obtenues en optant pour des dispositifs qui englobent ces deux dimensions (Bezner Kerr et al., 2022[45]). Par atténuation, on entend les actions ou les activités qui limitent les rejets de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère ou réduisent la concentration de ces gaz dans l’atmosphère (au moyen de puits de carbone, par exemple) (Grubb et al., 2022[46]). Quand bien même des progrès ont été réalisés en la matière, certains effets du changement climatique sont d’ores et déjà devenus inévitables et des efforts d’adaptation seront nécessaires pour parer des pertes et préjudices supplémentaires. Dans ce contexte, il conviendra de mettre en œuvre une approche intégrée de la politique climatique, qui combine atténuation et adaptation, afin de renforcer la résilience au long cours. La transition vers la neutralité en gaz à effet de serre supposera de tirer parti des synergies entre ces deux volets pour élaborer des politiques à la fois efficaces et efficientes (OCDE, 2023[47]).

Bien souvent, les mesures d'adaptation et les mesures d’atténuation se caractérisent par des moteurs, des avantages et des obstacles à l’adoption différents (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). En particulier, les premières peuvent procurer un bénéfice direct aux agriculteurs et aux populations locales, alors que les secondes ont tendance à produire des avantages publics plutôt que privés. De ce fait, l’adoption de mesures d’atténuation nécessite souvent une intervention publique pour créer des incitations. Les incitations telles que les paiements pour services environnementaux et climatiques, les programmes de mise hors culture de terres et les mesures en faveur du boisement et de la recherche-développement (R-D) sont des exemples de dispositifs qui peuvent favoriser la réduction des émissions, même si cela nécessite d’apporter le plus grand soin à leur conception et à leur mise en œuvre (OCDE, 2022[48]). L’une des priorités pour lutter contre le changement climatique est de réformer les politiques de soutien à l’agriculture, et en particulier de mettre progressivement fin au soutien des prix du marché et aux paiements qui risquent fort de nuire à l’environnement et de fausser les marchés et les échanges (OCDE, 2022[48]).

Bien que les mesures d'adaptation puissent s’avérer parfois socialement optimales, il arrive souvent qu’elles échouent par manque de moyens financiers, humains ou techniques. Dans ces cas-là, le rôle des pouvoirs publics consiste surtout à fournir des informations, à donner accès au crédit et à susciter l’engagement (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). Lorsqu’à l’inverse, des changements structurels doivent être entrepris ou les retombées publiques sont considérables, une intervention publique est clairement justifiée sur le plan économique. Les politiques d’adaptation doivent prendre en considération les risques à long terme, tout en tenant compte des incertitudes à venir et en faisant preuve de souplesse pour que des mesures bien intentionnées ne conduisent pas à une situation de maladaptation (Ignaciuk, 2015[36]). La cohérence des politiques publiques est impérative, tout comme le suivi de leur efficacité.

Bien que le rôle des politiques d’atténuation et d’adaptation diffère, il arrive fréquemment qu’un instrument d’action favorise simultanément les deux objectifs, avec des retombées bénéfiques dans ces deux domaines (Bustamante et al., 2014[49]). À titre d’exemple, les mesures visant à renforcer le carbone organique des sols peuvent contribuer à l’atténuation du changement climatique tout en améliorant les rendements des cultures et des pâturages.

En pratique, les mesures d’atténuation et d’adaptation peuvent ne pas aller dans le même sens ni être en phase avec d’autres objectifs (Lankoski, Ignaciuk et Jésus, 2018[40]). À ce sujet, Lankoski, Ignaciuk et Jésus (2018[40]) ont mis en évidence qu’un paiement écologique de retrait des terres peut avoir des retombées positives pour la productivité et l’atténuation, mais des effets négatifs pour l’adaptation. Les conséquences de chaque mesure dépendent très largement du contexte. Les pays vont donc devoir procéder à des évaluations détaillées des effets que pourront avoir les mesures adoptées pour les trois objectifs poursuivis et opter pour une démarche globale visant à relever ce triple défi.

Quelle importance les responsables de l’action publique accordent-ils à l’agriculture dans leurs stratégies d’adaptation globales ? D’après Cobourn (2023[9]) et les publications connexes, les rapports transmis par chacun des pays étudiés dans le présent rapport à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) donnent certaines indications sur la manière dont a évolué l’attention accordée par les pouvoirs publics aux questions relatives à l’adaptation du secteur agricole au changement climatique pendant près de trois décennies, du milieu des années 90 à début 20235. Il s’agit notamment des communications nationales que les Parties à la Convention transmettent périodiquement, ainsi que des rapports remis au titre de l’Accord de Paris, à savoir les contributions déterminées au niveau national (CDN) et les communications facultatives relatives à l’adaptation6.

Tous les documents transmis à la CCNUCC abordent l’agriculture, mais ce sont les communications nationales qui s’avèrent être les sources d’informations les plus complètes s’agissant des pays considérés dans le présent rapport, au vu de la fréquence à laquelle l’agriculture y est traitée (graphiques 1.2 et 1.3)7. Les communications relatives à l’adaptation abordent également des questions liées à l’agriculture, mais n'ont pour l’heure été transmises que par 17 des 54 pays examinés dans le présent document. Une analyse de la fréquence à laquelle certains mots-clés apparaissent dans l’ensemble des documents communiqués a été réalisée (voir l’annexe de ce chapitre pour plus de détails), et il en ressort que l’attention accordée à l’agriculture varie considérablement selon les pays. Parmi les pays membres de l’OCDE, par exemple, les termes relatifs à l’agriculture apparaissent 3.3 fois plus souvent dans les communications nationales de la Türkiye que dans celles du Luxembourg. En général, les communications nationales des pays émergents mettent davantage l’accent sur l’agriculture que celles des pays de l’OCDE, avec une fréquence moyenne de référence 1.5 fois plus élevée. Cette différence peut s’expliquer par le poids plus important de l’agriculture dans leur économie ou par des différences en ce qui concerne les risques climatiques prévus du fait de l’évolution des conditions de culture et des phénomènes extrêmes. Cependant, elle peut également provenir de différences de déclaration elles-mêmes liées au fait que les économies émergentes s’appuient sur les documents de la CCNUCC pour justifier leurs besoins de financement dans le domaine de l’adaptation (Pauw, Mbeva et van Asselt, 2019[50]).

Depuis le milieu des années 90, la longueur des documents transmis à la CCNUCC a été multipliée par près de quatre à mesure que les rapports des pays sur le changement climatique, et notamment l’adaptation, se sont étoffés. Au sein de ces documents, la fréquence des références à l’agriculture est restée assez stable d’un cycle de notification à l’autre pour les pays de l’OCDE et les économies émergentes, mais la quantité totale de texte se rapportant à l’agriculture a augmenté au fil du temps, traduisant une plus plus grande profondeur des rapports sur le secteur (voir graphique 1.A.1 en annexe).

Les références à l’agriculture englobent divers sujets liés au changement climatique, dont le rôle de l’agriculture dans l’atténuation, les vulnérabilités du secteur agricole et l’adaptation des systèmes agricoles et alimentaires. La grande majorité des thématiques liées à l’agriculture abordées dans les documents de la CCNUCC concernent la question de l’atténuation, bien que les pays de l’OCDE s’emparent davantage du sujet que les économies émergentes, qui se concentrent plus largement sur le recensement des vulnérabilités ainsi que sur l’adaptation (graphique 1.4).

Au fil du temps, l’atténuation dans le secteur agricole a occupé proportionnellement moins de place d’après le décompte des références textuelles, ces dernières ayant baissé de 27 % dans les rapports des pays de l’OCDE entre le milieu des années 90 et 2023. Par ailleurs, le contenu se focalise moins sur le recensement des vulnérabilités au changement climatique et davantage sur l’adaptation, en particulier dans les pays émergents. Ainsi, entre le premier et le dernier cycles de rapports, les références à l’adaptation du secteur agricole ont été multipliées par 4.9 dans le cas des pays de l’OCDE, et par 6.3 dans celui des économies émergentes. Il convient de noter en particulier qu’une place nettement plus importante a été accordée à l’examen des co-bénéfices entre l’atténuation et l’adaptation dans l’agriculture, même si cette tendance est plus marquée dans les pays de l’OCDE.

Les dirigeants des pays étudiés dans le présent rapport ont mis en place tout un éventail de programmes et d’activités d’adaptation au changement climatique qui peuvent ne pas tous être décrits dans les rapports de la CCNUCC. La section ci-dessous propose une analyse de ces mesures fondée sur les éléments communiqués par les pays examinés dans le présent rapport, qui sont repris ci-après dans les chapitres par pays.

Cette section s’attache plus précisément à évaluer les mesures d’adaptation et à les classer dans l’une des quatre catégories suivantes : (1) mesures infrastructurelles et technologiques (INT) ; (2) mesures comportementales et culturelles (BHC) ; (3) mesures écosystémiques ou fondées sur la nature (ECO) ; et (4) mesures sociales, économiques et institutionnelles (SEI). Ces catégories s'inspirent de la classification de la Global Adaptation Mapping Initiative (GAMI), qui est utilisée dans le 6e rapport du GIEC pour faire le lien entre les possibilités d’adaptation du secteur agricole et les Objectifs de développement durable (ODD) (Bezner Kerr et al., 2022[45])8. Les sous-catégories figurant dans le tableau 1.1 ont été définies par le Secrétariat pour rendre compte de la diversité des activités et des programmes mis en place et présentés par les pays étudiés dans le présent rapport (voir l’annexe de ce chapitre pour plus de détails).

Au total, sur la base des activités notifiées par les pays eux-mêmes, 599 programmes et activités d’adaptation ont été recensés par le Secrétariat dans l’ensemble des pays étudiés dans le présent rapport. La plupart (363, soit 60.6 %) entrent dans la catégorie des SEI et sont représentés en bleu dans le graphique 1.5. Viennent ensuite les catégories ECO avec 112 programmes (18.7 %, en vert), INT avec 68 programmes (11.4 %, en gris) et BHC avec 56 programmes (9.3 %, en orange). Lorsque les programmes ou activités déclarés comportent des volets ou des éléments entrant dans plusieurs catégories ou sous-catégories, ils sont inclus dans chacune d’elles par souci d’exhaustivité9. Les deux sections qui suivent examinent les programmes et activités de chaque catégorie et les illustrent par des exemples provenant de pays membres.

Les activités présentées par les gouvernements nationaux relèvent en majeure partie des approches sociales, économiques et institutionnelles (SEI). Cela n’est en rien surprenant, car cette catégorie englobe les fonctions clés des pouvoirs publics, en particulier l’élaboration de documents de planification stratégique ; le renforcement des capacités via des changements de gouvernance, l’éducation et la sensibilisation ; et la communication d'informations pour étayer la prise de décisions. Sont également inclus dans cette catégorie les programmes d’assurance ciblant les risques climatiques ainsi que la mise en place d’autres mécanismes financiers, tels que les mesures d’aide ex post en cas de catastrophe.

Les mesures appartenant à la catégorie SEI relèvent principalement de la planification (20.7 % de l’ensemble des activités déclarées), du renforcement des capacités (18.0 %) et des services climatologiques (11.4 %). Plus des trois quarts des pays étudiés dans le présent rapport ont déclaré 124 activités de planification en rapport avec l’adaptation de l’agriculture au changement climatique. Il s’agit notamment de documents de planification de haut niveau traitant de l’agriculture, comme le Plan national d'adaptation et d’atténuation du changement climatique à l’horizon 2030 de l’Argentine, la nouvelle stratégie de l’Union européenne pour l'adaptation au changement climatique, intitulée « Bâtir une Europe résiliente », et du premier Plan national d'adaptation de la Nouvelle-Zélande, publié en août 2022 par son gouvernement, qui définit des mesures à prendre face aux risques significatifs et prioritaires que les effets du changement climatique font peser sur le pays10. Un certain nombre de pays font état de mesures de planification d’ampleur régionale, à l’instar du Programme régional de planification de la résilience à la sécheresse (Regional Drought Resilience Planning Program), en vigueur en Australie, et des mesures prises en Grèce pour faire figurer les questions liées à l’adaptation au changement climatique dans les programmes régionaux de développement rural.

La planification passe également par des documents d’orientation propres à une région, un secteur, un type de ressources ou un événement. Parmi les plans visant le secteur agricole, citons la Politique agricole pour l’adaptation au changement climatique et une agriculture bas carbone (Plan ABC+), adoptée au Brésil, le Plan d’adaptation au changement climatique du ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche du Japon, et le Programme d’adaptation au changement climatique dans les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche et de l’aquaculture, appliqué en Allemagne. Les orientations axées sur les ressources concernent la santé des sols avec, par exemple, la Stratégie nationale des sols pour une agriculture durable (ENASAS), au Mexique, les ressources en eau avec, par exemple, le Plan de gestion des bassins hydrographiques en Hongrie, et le développement de l’agriculture biologique avec, par exemple, le Plan d’action national pour le développement de l’agriculture biologique au cours de la période 2023-2030 en Croatie11. Enfin, les orientations relatives aux événements climatiques comprennent le Plan d’action des Pays-Bas contre le stress thermique du bétail, le Plan de lutte contre la sécheresse de la Pologne et le Plan de lutte contre les feux de forêt en vigueur en France.

Les mesures prises pour suivre les progrès réalisés en matière d’adaptation ou la mise en œuvre des plans apparaissent également dans la catégorie des activités de planification, bien que les exemples disponibles soient relativement peu nombreux. Parmi eux figure le Tableau de bord de l’adaptation, outil utilisé en Irlande pour évaluer les progrès réalisés dans l’ensemble des secteurs de manière générale et en fonction de trois ensembles de critères : 1) risque, hiérarchisation et capacité d’adaptation ; 2) mobilisation des ressources et intégration ; et 3) gouvernance, coordination et aspects transversaux. En France, le plan national d'adaptation au changement climatique a fait l’objet d’une évaluation sur la période 2011-15, qui a montré que la mise en œuvre des cinq actions relatives à l’agriculture était terminée ou en cours au moment de l’évaluation12.

Le renforcement des capacités, cité dans 108 activités, comprend un large éventail d’investissements et de mesures visant à accroître la capacité des agriculteurs à s’adapter au changement climatique. Les investissements dans la recherche-développement (R-D) et le transfert de connaissances agricoles sont essentiels pour améliorer la productivité et soutenir la mise au point de nouveaux cultivars, de nouvelles races d’élevage et de nouvelles technologies de production. Les stratégies locales supposent de renforcer les capacités d’adaptation par l’intermédiaire d’approches de proximité, qui peuvent prendre la forme de banques communautaires de semences, d’aliments ou de fourrage pour les animaux ou de pratiques de gestion communautaires des forêts. La mise à profit du savoir local et autochtone, par l’intermédiaire d’une sélection végétale participative, peut favoriser l’adaptation en encourageant les interactions entre les systèmes de connaissances autochtones et la recherche scientifique. Dans les systèmes d’élevage, par exemple, les connaissances des exploitants locaux pratiquant le pastoralisme peuvent venir compléter la recherche scientifique et éclairer la prise de décisions.

La majeure partie des activités de renforcement des capacités déclarées concernent des investissements dans la recherche ou des programmes de financement de la recherche, comme le Centre israélien pour l’adaptation agricole, qui soutient les recherches sur les cultures de plein champ et les légumes, les arbres fruitiers, la protection phytosanitaire et les sciences animales, ainsi que des activités liées à la vulgarisation et à l’information, comme la Mission nationale sur la technologie et la vulgarisation agricoles (National Mission on Agricultural Extension and Technology) en Inde. En Nouvelle-Zélande, la création récente du Centre d’action climatique sur les émissions agricoles vise entre autres à atteindre les objectifs d’accélération de la mise au point de technologies et de pratiques à fort impact pour faire baisser les émissions de gaz à effet de serre13. Cette catégorie englobe aussi le développement de partenariats ainsi que la promotion de la diffusion des connaissances avec, notamment, le Plan « Résilience flamande » mis en place en Belgique, qui consacre 2.8 millions EUR (2.9 millions USD) au renforcement de la coopération entre le secteur agricole et les secteurs de l’entrepreneuriat, de la transformation numérique et du partage des connaissances. Les programmes entrant dans cette catégorie encouragent également les activités de vulgarisation et d’information, à l’instar du Programme Chile Origen Consciente, créé en 2022 au Chili pour donner aux agriculteurs un cadre leur permettant d’intégrer des normes de durabilité dans leurs activités et de s’assurer de leur conformité à la réglementation grâce à des auto-évaluations et des audits indépendants. Plusieurs pays déclarent en outre participer aux efforts internationaux en matière de R-D et de partage des connaissances. On peut citer, par exemple, l’Alliance mondiale de recherche sur les gaz à effet de serre en agriculture, créée en 2009, qui rassemble d’éminents scientifiques, chercheurs et responsables publics de plus d’une soixantaine de pays dans le but de mettre en commun les connaissances et d’améliorer la productivité agricole tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre d’origine agricole. Autre exemple : Israël a rejoint en 2022 le Programme de recherche en collaboration de l’OCDE, qui contribue à l’adaptation au changement climatique (encadré 1.2).

Les services climatologiques, dont il est question dans 68 programmes, peuvent contribuer à l’adaptation via la production, la traduction, la communication et l’utilisation d’informations relatives au climat dans le processus de décision. La transmission d’informations personnalisées aux décideurs peut conduire à une augmentation des rendements et encourager les agriculteurs à modifier leurs pratiques. L’amélioration des prévisions météorologiques, de la surveillance des cultures et des systèmes d'alerte précoce peut aider les agriculteurs à se préparer aux phénomènes météorologiques extrêmes, à gérer les risques correspondants et à réduire les pertes.

Les activités présentées reposent sur la collecte et la diffusion de données en vue d’accompagner la prise de décisions. Il s’agit notamment d’activités de prévision, à l’instar des prévisions des risques d’incendie à un mois et à sept jours publiées aux États-Unis dans le cadre du National Significant Wildland Fire Potential Outlook, et d’outils d’aide à la décision, comme la plateforme en ligne My Climate View de l’Australie, qui donne la possibilité aux agriculteurs, aux entreprises et aux populations d’anticiper les conditions climatiques futures, de faire des comparaisons avec la situation météorologique récente, d’analyser les conséquences pour la production et de se préparer aux sécheresses à venir. Les outils élaborés par les pays ne portent pas uniquement sur le climat et l’adaptation à son dérèglement, ils favorisent également une plus grande durabilité de la production, à l’image du Projet Big Data lancé par l’Estonie en 2022 afin d’encourager des pratiques de fertilisation de précision et l’équilibre nutritif via un outil gratuit et accessible au public, et du Plan pour une cartographie des sols à l’échelle nationale, que la Suisse a adopté pour encourager une utilisation durable des terres dans un contexte de changement climatique.

Les mécanismes d’assurance ciblant les risques liés au climat sont cités dans 26 programmes par 24 des pays étudiés dans le présent rapport. À titre d’exemple, l’Indonésie a créé, en partenariat avec la compagnie PT Jasindo, des produits d’assurance à destination des riziculteurs (AUTP) et des éleveurs de bovins et de buffles (AUTS/K), qui permettent aux exploitants de se prémunir contre les risques liés aux inondations, aux sécheresses, aux ravageurs et aux maladies. En Slovénie, le ministère de l’Agriculture cofinance les primes d’assurance à hauteur de 55 %, afin d’encourager les agriculteurs à assurer leurs récoltes contre les catastrophes naturelles et de se prémunir contre les risques de mortalité animale liée aux maladies. De la même manière, la Suisse encourage le développement du marché de l’assurance récolte via des contributions fédérales destinées à protéger les cultures contre les risques de grande ampleur.

Parmi les autres mécanismes financiers, on retrouve le financement de la reprise des activités après un sinistre, ainsi que les paiements pour services environnementaux. Les instruments de marché consistant à rémunérer les agriculteurs en contrepartie de la préservation de la biodiversité ou d’autres améliorations de l’environnement peuvent aider à renforcer les capacités de transformation en développant des sources de revenus nouvelles et diversifiées. Les autres mécanismes financiers, évoqués dans 32 programmes, correspondent le plus souvent à des dispositifs d’accompagnement après la survenue d'un phénomène climatique. C’est le cas, par exemple, du cadre Agri-relance au Canada et, aux États-Unis, du Programme sur les catastrophes touchant le fourrage (Livestock Forage Disaster Program, LFP) et du Programme d’aide d’urgence pour les animaux d’élevage, les abeilles et les poissons élevés dans les exploitations (Emergency Assistance for Livestock, Honey Bees, and Farm-raised Fish Program, ELAP). Entre la mi-2021 et le début de 2023, la Nouvelle-Zélande a subi pour la première fois en si peu de temps six événements climatiques qui ont nécessité une réponse dans le cadre du Programme de reprise du secteur primaire (Primary Sector Recovery Policy) : grâce aux 1.5 million NZD (0.95 million USD) de fonds publics débloqués par le ministère des Industries primaires durant l’exercice budgétaire se terminant en juin 2022, les coopératives rurales de soutien ont pu renforcer l’accompagnement psychosocial, organiser des sessions d’information et coordonner les efforts locaux de relance. Cette catégorie comprend aussi des instruments tels que le Fonds de transition (Transitiefonds landelijk gebied en natuur), dans le cadre duquel les Pays-Bas prévoient de consacrer 24.3 milliards EUR (25.6 milliards USD) à la réduction des conséquences néfastes des activités agricoles pour l’environnement entre 2022 et 2034, en mettant l’accent sur les émissions d’ammoniac ainsi que sur d’autres préoccupations environnementales.

Bien que les approches fondées sur les écosystèmes (ECO) soient citées dans un nombre bien plus restreint de programmes, il s’agit de la deuxième catégorie d’actions mise en avant le plus fréquemment : on dénombre ainsi 112 références à des mesures visant à développer globalement l’agroécologie (7.0 % de l’ensemble des références) ou ciblant certains services écosystémiques par le biais de l’amélioration de la santé des sols (5.5 %), de la diversification (3.8 %) ou de la qualité de l’eau (2.3 %).

L’agroécologie, qui forme une sous-catégorie de la classification GAMI, comprend les mesures et les programmes qui visent à développer les systèmes agroécologiques : production biologique, conservation des terres, mise hors production de terres, etc.14 L’agroécologie peut favoriser une résilience accrue tout en fournissant d’importants co-bénéfices par l’atténuation du changement climatique et les services écosystémiques, en augmentant la teneur en matières organiques des sols, en améliorant la conservation des sols et de l’eau et en contribuant à la diversification des systèmes alimentaires. Dans cette logique, la France a opté pour une approche holistique consistant à renforcer la résilience de l’agriculture en investissant dans les sols, la diversification et les infrastructures agroécologiques. Aux États-Unis, l’Agence de services agricoles mène un programme de protection de la santé des sols et des revenus (Soil Health and Income Protection Program, SHIPP) qui vise à renforcer la conservation des sols et de l’eau. Le développement des méthodes de production biologique constitue l’un des axes de l’action publique dans cette catégorie de mesures. Citons, par exemple, les paiements de soutien accordés par le Costa Rica aux producteurs durant la période de transition vers des pratiques agricoles biologiques et durables certifiées, et le Projet de développement de la chaîne de valeur biologique conduit dans le Nord-Est de l’Inde, qui soutient l’achat d'intrants agricoles tels que des semences, des engrais biologiques et des pesticides biologiques liquides.

Les mesures relatives à la santé des sols mettent en avant des pratiques visant à limiter l’érosion, à améliorer la fertilité et à renforcer le stockage du carbone. Cette sous-catégorie englobe également des programmes visant l’érosion des sols, la régénération des terres ou la lutte contre la désertification. Au Kazakhstan, par exemple, le Centre scientifique et méthodologique républicain des activités agrochimiques propose aux propriétaires terriens de mesurer la teneur en éléments nutritifs des sols pour pouvoir formuler des recommandations ciblées en vue d’accroître leur fertilité. Dans l’Union européenne, l’Observatoire européen des sols (EUSO) fait la synthèse des données sur les sols afin de recenser les zones dans lesquelles ils sont vulnérables à la dégradation15.

La diversification des systèmes agricoles peut permettre une plus grande résilience au changement climatique, tout en créant des synergies importantes avec les objectifs socio-économiques et environnementaux. Les mesures prises dans ce domaine peuvent consister à accroître la diversité génétique des plantes cultivées ou des races sélectionnées pour l’élevage, ou bien à faire évoluer la composition entre productions végétales et animales. Elles comprennent aussi des modifications des aménagements spatiaux et temporels, qui peuvent se traduire par des cultures associées, une rotation des cultures et des systèmes intégrés associant productions végétales, élevage et agroforesterie. La diversification peut également conduire à un renforcement des services écosystémiques tels que la lutte contre les ravageurs, la fertilité des sols et la pollinisation, et à réguler les situations extrêmes en matière d’eau et de températures, pour permettre des rendements plus stables et réduire les risques de pertes (Tibi et al., 2022[51]). Certaines pratiques, telles que l’agroforesterie, peuvent atténuer les émissions de GES tout en améliorant la sécurité alimentaire et la stabilité des rendements.

Ces mesures reposent le plus souvent sur l’agroforesterie, l’adoption de systèmes de production intégrés ou une plus grande diversité des paysages. Au Brésil, le Programme ABC+ s’éloigne des techniques de culture traditionnelles au profit de systèmes intégrés culture-élevage-sylviculture. Au Royaume-Uni, le Programme de protection des espaces ruraux (Countryside Stewardship Scheme, CS) prévoit des incitations destinées à accroître la biodiversité, améliorer les habitats et étendre les zones boisées. Un petit nombre de projets ciblent plus particulièrement la dégradation de la qualité de l’eau. En Espagne, par exemple, les apports de matières nutritives sont réglementés, de manière à réduire les émissions de GES et d’ammoniac et à éviter ainsi la pollution de l’eau, tout en préservant la fertilité des sols et la productivité agricole. La Suisse applique un programme en faveur d’un meilleur usage des sols et de l’eau comportant un volet axé sur la diversification, qui prévoit notamment la conception et la mise à l’essai de systèmes de gestion intégrée conjuguant rotation des cultures, choix des variétés, travail du sol et d’autres mesures.

La catégorie approches infrastructurelles et technologiques comporte 68 mesures ou programmes, soit 11.4 % de l’ensemble des programmes référencés. Dans ce domaine, la majeure partie des programmes vise soit l’irrigation et le drainage (5.2 % des projets cités), soit les technologies utilisées pour les cultures et l’élevage (4.0 %). Un nombre relativement faible de programmes porte sur les infrastructures hydrauliques régionales (2.2 %).

Les infrastructures d'irrigation et de drainage peuvent permettre une utilisation plus efficiente de l’eau à l’échelle du bassin hydrographique ainsi qu’une plus grande productivité au niveau des exploitations, et atténuer ainsi en partie les conséquences négatives du changement climatique en aidant les agriculteurs à faire face à la hausse des températures et aux sécheresses. En investissant dans des systèmes de stockage des eaux de pluie, les agriculteurs peuvent alléger les pressions exercées sur les réserves d’eau en dehors des exploitations. Les programmes centrés sur l’irrigation encouragent généralement l’adoption de technologies plus efficientes afin d’aider les agriculteurs à s’adapter à une disponibilité des ressources plus variable, bien que leur impact sur la consommation d’eau dépende de l’existence de politiques efficaces en matière de demande d’eau (Grafton et al., 2018[52] ; OCDE, 2016[43]). En Chine, le Programme de construction d’infrastructures d’irrigation au sein des terres agricoles octroie des paiements pour la mise en place de petites installations d’irrigation, de collecte des eaux de pluie, d’aspersion et de goutte à goutte, de pompes et de petites centrales hydroélectriques. Au Royaume-Uni, la deuxième mouture de la Prime de gestion de l’eau (Water Management Grant) subventionne les biens d’équipement permettant une utilisation plus rationnelle de l’eau d'irrigation et encourage la construction de réservoirs au sein des exploitations pour stocker l’eau prélevée ou l’eau de pluie. Les pays qui devraient être confrontés à des excédents d’eau en raison du changement climatique, comme le Danemark, la Norvège et la Suède, ont investi dans l’installation et la rénovation de systèmes de drainage.

Les investissements dans les technologies liées à la production végétale ou animale peuvent faciliter l’adaptation des exploitations au changement climatique, comme l'installation d’une couverture destinée à limiter les risques climatiques grandissants auxquels est exposée la production arboricole. Des stratégies reposant sur l’ombrage, l’installation de ventilateurs électriques dans les étables, la baignade des animaux plusieurs fois par jour ou l’installation de systèmes de ventilation et de climatisation, peuvent favoriser l’adaptation des systèmes d’élevage en les soulageant du stress thermique. Il existe aussi des programmes ciblant les investissements au niveau des exploitations agricoles dans des technologies de culture et d’élevage adaptées. En Autriche, par exemple, des prêts sont accordés au titre de l'investissement agricole dans des technologies telles que les systèmes de chauffage à la biomasse et les équipements de gestion des effluents d’élevage. En Lituanie, le Fonds de modernisation, créé en 2022 moyennant une enveloppe de départ de 1 million EUR, soutient le développement des technologies non liées aux cultures afin de réduire les coûts liés au carburant et aux engrais minéraux, préserver les puits de carbone dans le sol et réduire le risque de sécheresse printanière. Dans leur programme phare d’adaptation et d’atténuation en agriculture, les Philippines cherchent, par le biais d'une démarche adaptée aux villages, à stimuler le déploiement de techniques d’amélioration de la productivité comme le paillage à base de coque de noix de coco dans la zone agroécologique des hautes terres. Au travers des Initiatives climato-compatibles pour l’adaptation au changement climatique et la durabilité des systèmes de production agricole prioritaires (CSICAP), la Colombie cherche à développer, à valider et à déployer à plus grande échelle des technologies en faveur d’une agriculture bas carbone plus résiliente.

Les infrastructures hydrauliques régionales, telles que les ouvrages de lutte contre les inondations ou les réservoirs ou canaux, peuvent jouer un rôle important en matière d’adaptation, en complément des politiques de l’eau (OCDE, 2016[43]). L’impact du changement climatique sur les infrastructures nécessaires à l’agriculture étant appelé à s’amplifier, il est essentiel de veiller à ce que les infrastructures hydrauliques régionales soient en mesure de résister aux dommages causés par les aléas naturels liés au climat. Parallèlement, tous les investissements ne favoriseront pas l’adaptation : en effet, les projets d’irrigation à grande échelle ou fondés sur l’exploitation des eaux souterraines non accompagnés de mesures efficaces de gestion de la demande, y compris de tarification de l’eau, pourront conduire à une maladaptation, qui se traduira par une augmentation de la consommation d’eau et un épuisement des eaux de surface ou des eaux souterraines durant les périodes de sécheresse (OCDE, 2015[42] ; OCDE, 2016[43])16.

Une poignée de programmes ciblent l’atténuation des risques liés aux inondations, à l’instar des mesures prises par la Hongrie pour mettre en place un système de stockage temporaire des eaux de crue dans les régions agricoles du bassin de la Moyenne-Tisza, ou du Programme d’urgence de protection des bassins hydrographiques (Emergency Watershed Protection Program, EWP) mis en place aux États-Unis. D’autres programmes, principalement dans les économies émergentes, visent à développer les infrastructures d’approvisionnement en eau : c’est le cas en Chine, où des dépenses sont engagées pour soutenir de grands projets d’irrigation, et au Viet Nam, où des projets de planification et d’approvisionnement en eau sont conduits dans le delta du Mékong.

Les approches comportementales et culturelles sont citées à 56 reprises, soit dans 9.3 % des programmes examinés. Ces derniers portent principalement sur la sélection animale ou l’amélioration végétale (3.3 %), l’exploitation ou la gestion des élevages (2.3 %), la gestion des ravageurs, des maladies et des espèces envahissantes (2.2 %), et l’exploitation ou la gestion des cultures (1.5 %).

L’amélioration des cultivars constitue un moyen efficace de lutter contre le changement climatique. L’adaptation via des techniques de sélection traditionnelle montre des progrès encourageants, mais devra évoluer rapidement pour rester en phase avec les changements qui surviendront au niveau des températures et de l’environnement. Le GIEC affirme avec certitude que l’utilisation des biotechnologies dans le domaine de la sélection végétale permettra une adaptation à grande échelle des producteurs. Cela dit, des facteurs socio-économiques et politiques pourraient restreindre l’adoption de cultures résilientes face au changement climatique (Bezner Kerr et al., 2022[45]). Le séquençage des génomes peut contribuer à déterminer quelles sont les caractéristiques agronomiques à prendre en considération face au changement climatique et à élaborer des variétés résilientes au stress imputable aux ravageurs, aux maladies ainsi qu’aux phénomènes extrêmes liés aux températures et à l’eau. Le secteur de l’élevage dispose de tout un éventail de solutions d’adaptation, comme la sélection d’espèces réputées pour leur tolérance au stress thermique, les croisements et l’adoption d’espèces plus résistantes à la chaleur et aux sécheresses.

Les programmes de sélection animale et d’amélioration végétale mettent l’accent sur le développement et l’adoption de variétés adaptées aux défis climatiques particuliers. Le projet BREEDCAFS (Breeding Coffee for Agroforestry Systems), coordonné par la France via le Cirad et financé par l’Union européenne, a été mené de 2017 à 2021 dans le but de créer des variétés de café Arabica adaptées à la production en agroforesterie, ce qui réduit les températures dans les plantations de caféiers, préserve la biodiversité des sols et améliore le rendement. Ainsi, l’Inde, l’Indonésie et le Viet Nam expérimentent des variétés de riz tolérant une salinité accrue. Au Costa Rica, le Projet de renforcement des capacités dans le domaine de la production de semences pour une agriculture évolutive et résiliente encourage les petites exploitations familiales à utiliser des semences adaptées, gages d’une meilleure productivité. En 2023, proclamée année internationale du mil par l’ONU, l’Inde, qui assurait la présidence du G20, a encouragé la production et la consommation de ce produit à la fois nutritif et résistant aux sécheresses. Un dispositif spécial a également été mis en place en 2023 dans le cadre du Système de semences de l’OCDE pour faciliter les échanges de semences de mil à chandelle et de sorgho (encadré 1.3). Le Royaume-Uni cherche quant à lui à produire des races bovines plus efficientes sur le plan environnemental au travers du Programme sur la génétique des ruminants (Ruminant Genetics Programme) conduit en Irlande du Nord.

La modification des techniques de gestion et d’exploitation des cultures peut induire des changements au niveau des calendriers de plantation ou des sites de production. Si le déplacement des sites de culture peut représenter une stratégie d’adaptation prometteuse, il peut être entravé par des obstacles climatiques, culturels, institutionnels et économiques, dont les paiements de soutien qui enferment les exploitants dans certains systèmes de production et les dissuadent de s’adapter. Modifier les pratiques de gestion et d’exploitation des élevages suppose de prendre des mesures pour adapter le taux de charge en fonction de la disponibilité des aliments, de gérer la qualité de l’alimentation, d’assurer la rotation des pâturages et d’adapter les méthodes de production animale et de gestion des effluents, notamment.

Si les pouvoirs publics tendent à ne pas préconiser de stratégie d’adaptation particulière afin d’encourager le développement des capacités d’adaptation, quelques programmes soutiennent l’adoption de méthodes de production animale ou végétale ayant fait leurs preuves dans un contexte de changement climatique. Au Royaume-Uni, par exemple, le Programme de développement de la filière viande rouge (Red Meat Development Programme) (pour l’élevage ovin) et le Programme d’amélioration de la filière laitière au Pays de Galles (Dairy Improvement Programme of Wales) ciblent la gestion des troupeaux. En Australie, le Programme de subventions en faveur de la vulgarisation et de l’adoption de pratiques agricoles résilientes face à la sécheresse (Extension and Adoption of Drought Resilience Farming Practices Grants Program) encourage l’adoption de telles pratiques à grande échelle (au niveau de plusieurs exploitations, de régions, de secteurs d’activité...), au moyen de subventions comprises entre 100 000 AUD (69 000 USD) et 3 millions AUD (2.1 millions USD).

La gestion des ravageurs, des maladies et des espèces envahissantes est primordiale pour atténuer le risque d’aggravation de leurs répercussions sur la production agricole sous l’effet du changement climatique. Quelques programmes s’attaquent aux risques liés aux ravageurs et aux maladies, soit de manière générale, soit en réaction à des menaces précises, et consistent le plus souvent en un renforcement de la surveillance. Cette catégorie de programmes englobe également ceux qui visent à réduire les effets néfastes de l’application de pesticides chimiques par la transition vers d’autres produits ou systèmes de lutte contre les ravageurs. La Croatie, par exemple, a modernisé son Système d’information phytosanitaire (FIS) et adopté une nouvelle loi imposant aux agriculteurs de se rapprocher du FIS et de se former à la manipulation sûre et à l’application correcte des pesticides. Au Japon, la stratégie MIDORI vise à faire baisser l’utilisation de pesticides chimiques (pondérée en fonction des risques) de 10 % d’ici à 2030 et de 50 % d’ici à 2050, en facilitant la transition vers la lutte intégrée contre les organismes nuisibles.

La section ci-dessus s’intéressait aux mesures adoptées par les pays dans le but spécifique de permettre au secteur agricole de s'adapter au changement climatique. Or, certains dispositifs de soutien à l’agriculture peuvent involontairement améliorer ou au contraire réduire la capacité d'adaptation des individus. Comme indiqué dans le chapitre 2, en 2020-22, le soutien apporté à l’agriculture dans 54 pays s’est chiffré au total à 851 milliards USD par an, dont 630 milliards USD sous forme de transferts aux producteurs à titre individuel. Le reste était réparti entre le soutien aux services d'intérêt général (106 milliards USD) et les transferts budgétaires aux consommateurs (115 milliards USD). Certaines économies émergentes ont également taxé implicitement les producteurs, et ce à hauteur de 179 milliards USD par an en moyenne. La présente section examine les mécanismes en vertu desquels les politiques actuelles de soutien peuvent avoir un impact sur l’adaptation au changement climatique et les éventuelles conséquences.

Les dispositifs de soutien couplé à la production figurent parmi les formes les plus courantes d'aide à l’agriculture (environ 65 % du soutien positif aux producteurs). En faussant les signaux envoyés à la production, ces mesures peuvent accroître la vulnérabilité face aux risques climatiques via divers mécanismes (Ignaciuk, 2015[36]). Les dispositifs de hausse du prix perçu par le producteur (autrement dit le soutien positif des prix du marché, ou SPM), qui représentent la part la plus importante des aides aux producteurs, incitent à produire, à intensifier l’utilisation d’intrants, à étendre la surface des cultures aidées et à affecter plus de terres au secteur agricole, autant de facteurs qui peuvent réduire la capacité de l’agriculture à s’adapter au changement climatique. D'autres types de soutien direct à la production, dont les paiements couplés, ont le même effet que le SPM positif. Ces effets peuvent être en partie atténués si le soutien est subordonné au respect de prescriptions environnementales. Inversement, le soutien négatif des prix du marché d’un produit donné entraîne une baisse des ressources consacrées à sa production, ce qui peut conduire à privilégier un ensemble de produits qui n’est pas optimal compte tenu du marché et des conditions climatiques. Les mesures qui provoquent une distorsion des flux commerciaux peuvent nuire à la résilience : les échanges jouent un rôle essentiel au regard de l’adaptation au changement climatique et de la stabilité en permettant les flux de produits des régions excédentaires vers les régions déficitaires, et en contribuant à l’absorption des crises de l’offre aux niveaux local et régional (Adenäuer, Frezal et Chatzopoulos, 2023[53] ; OCDE, 2017[25] ; OCDE, 2015[38]). Dans la mesure où la production a tendance à être plus irrégulière sur les marchés intérieurs que sur les marchés mondiaux, et où les chocs intérieurs deviennent plus fréquents sous l’effet du changement climatique, les échanges seront de plus en plus importants pour atténuer les fluctuations de l’offre intérieure et renforcer la sécurité alimentaire mondiale.

La plupart des mesures de soutien ont également pour effet de favoriser la production de certains produits plutôt que d’autres17. Appelés ici « transferts au titre d’un seul produit » (TSP), ces dispositifs peuvent faire obstacle à l’adoption d'un autre système de production – autrement dit à l’abandon des produits subventionnés –, voire empêcher les agriculteurs d’ajuster leur production en fonction du changement climatique (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35] ; OCDE, 2017[54] ; OCDE, 2015[38]). Selon les produits concernés et les conditions ou dispositions réglementaires qui accompagnent ces paiements, les TSP peuvent avoir pour effet de réduire les incitations à se tourner vers des cultures plus résilientes ou à diversifier la production, ou d’encourager des pratiques plus risquées ou la conduite d’activités dans des zones plus exposées. Par exemple, le soutien apporté à la production de cultures gourmandes en eau comme le coton ou le riz peut exposer les producteurs à des risques de perte plus importants en cas de sécheresse (OCDE, 2015[42] ; Wreford, Moran et Adger, 2010[55]). La modélisation laisse à penser que le retrait de certaines formes de TSP pourrait favoriser l’adaptation en facilitant la réorientation de la production vers les régions présentant un avantage comparatif, ainsi que l’augmentation des flux commerciaux à destination des régions touchées par le changement climatique (Guerrero et al., 2022[56]). Les transferts au titre d’un seul produit occupent une place importante : les 54 pays examinés dans le présent rapport en ont versé 380 milliards USD, tandis que la taxation implicite s’est élevée à 179 milliards USD.

Les autres formes de paiements directs ciblés peuvent aussi favoriser certains types de produits, et en définitive nuire à l’adaptation. Ainsi, le soutien aux céréales ou aux ruminants, classé dans la catégorie des transferts au titre d’un groupe de produits (TGP), constitue lui aussi un obstacle à l’adaptation en ce qu’il limite la capacité des agriculteurs à modifier leur production en fonction de l’évolution des conditions climatiques. En fin de compte, l’impact des mesures de soutien sur la capacité d’adaptation dépend dans une large mesure du contexte, c’est-à-dire de l’instrument utilisé, du produit subventionné et des conditions ou dispositions réglementaires auxquelles sont subordonnés les paiements.

Les mesures d’aide à la gestion des risques sont une forme courante de soutien aux producteurs. L'intérêt pour cette forme de soutien va en s'accroissant du fait des incertitudes liées au changement climatique, comme en témoignent les actions et les programmes d’adaptation consacrés à l’assurance (4.4 % des programmes figurant sur le graphique 1.5) ainsi que d’autres mécanismes financiers (5.5 % des programmes). Les polices d'assurance agricole subventionnées sont couramment utilisées pour gérer les risques, et les marchés de l’assurance peuvent être utiles pour transférer et mutualiser les risques. Ils peuvent améliorer la résilience face à la multiplication des événements extrêmes en permettant aux producteurs d’accroître leur capacité à absorber des chocs et à s’en relever (Cobourn, 2023[9]). Les programmes de subvention des assurances par l’État peuvent jouer un rôle important en garantissant le bon fonctionnement des marchés de l'assurance qui permettent aux petites et moyennes exploitations agricoles de gérer les risques encourus. Sans subventions, les programmes d’assurance peuvent en effet s'avérer non viables économiquement pour les assureurs en raison du coût élevé qu’ils représentent en termes de gestion, suivi et règlement des sinistres, qui explique que la demande soit faible (Glauber et al., 2021[57]).

Cela étant, le fait de subventionner les assurances peut par ailleurs modifier le comportement des producteurs et nuire à l’adaptation en encourageant les agriculteurs à adopter des stratégies de production plus risquées et non durables (Ignaciuk, 2015[36] ; OCDE, 2016[43]). Les assurances couvrant le risque individuel de perte de rendement peuvent engendrer un problème d’aléa moral si elles incitent un producteur à engager moins d'activités permettant d'atténuer les risques pour au contraire prendre plus de risques en s'abstenant de diversifier sa production (OCDE, 2012[58] ; Antón et al., 2012[59]). À titre d’exemple, les cultures de maïs et de soja qui sont assurées s’avèrent nettement plus sensibles aux phénomènes de chaleur extrême que les cultures non assurées, ce qui semble indiquer que les agriculteurs sont dans ce cas moins enclins à prendre des mesures d’adaptation pour atténuer ces risques (Annan et Schlenker, 2015[60]). Les subventions pourraient avoir un effet de distorsion moindre si, par exemple : elles s'appliquaient uniquement aux assurances qui couvrent les risques de catastrophe – et non les risques ordinaires liés à l’activité d'une exploitation ; le choix des cultures était libre ; une franchise était retenue sur les demandes de prise en charge ; le montant de la subvention versée pour chaque prime d'assurance était communiqué en toute transparence (Glauber et al., 2021[57] ; OCDE/FAO, 2021[8]). De même, l’affectation des aides sur une base indicielle – grâce notamment aux technologies numériques et satellitaires – plutôt qu’en fonction des pertes individuelles peut réduire le problème d’aléa moral ainsi que les coûts de gestion (Sumner et Zulauf, 2012[61]). Toutefois, le montant des indemnités risque dans ce cas de ne pas être à la hauteur des pertes subies, ce qui peut s'avérer inintéressant pour les exploitants.

Les programmes d'aide en cas de catastrophe sont un autre dispositif courant d'aide à la gestion des risques. Ils prennent généralement la forme de paiements versés à la suite d'une catastrophe naturelle. Dans la plupart des cas, les producteurs ne savent pas qu'ils bénéficieront d'une protection avant que la catastrophe ait lieu et que l’indemnité soit annoncée. Il arrive pourtant (par exemple aux États-Unis, dans le cadre du Programme sur les catastrophes touchant le fourrage) que les conditions d’indemnisation soient connues à l’avance. L'anticipation joue un rôle important dans le contexte des aides en cas de catastrophe, les producteurs pouvant renoncer à d'autres formes de gestion des risques s'ils peuvent raisonnablement penser que les pouvoirs publics vont les indemniser en cas de pertes. Cette aide doit donc se limiter à la fourniture d'une protection face aux risques de catastrophe ou non assurables, de manière à ne pas dissuader les producteurs de prendre des mesures d'atténuation des risques telles que la diversification, l'investissement dans l’irrigation ou l’assurance (Glauber et al., 2021[57]). Une approche optimale consisterait à mettre l’accent sur les capacités dont les agriculteurs ont besoin pour s’adapter ou se transformer en réponse aux risques climatiques, y compris en quittant complètement le secteur. Investir dans des biens publics comme la production d’informations météorologiques et climatologiques, la recherche-développement et la diffusion de connaissances, renforcera la résilience des producteurs et leur capacité à prévoir les événements indésirables, à s’y préparer, à les absorber, à s’en relever et à s’y adapter.

Les mesures d’aide àl’agriculture peuvent aussi être conçues pour inciter directement à l’adaptation, en conditionnant les paiements à la fourniture de biens et services environnementaux comme la préservation des paysages ruraux, la résilience aux catastrophes naturelles, la création d’habitats et la lutte contre les espèces envahissantes. Les paiements pour services écosystémiques peuvent permettre de gérer certains risques climatiques à l’aide de solutions fondées sur la nature, tout en produisant des avantages connexes en termes d'atténuation du changement climatique et de protection de l’environnement. À titre d’exemple, les paiements au titre de la restauration et de la protection des zones humides réduisent le risque d’inondation en permettant de stocker les excédents d’eau, mais assurent également un habitat pour les animaux et la séquestration du carbone. Pourtant, en 2020-22, 1.6 milliard USD seulement – sur les 297 milliards du soutien aux producteurs prévu au budget des 54 pays examinés – étaient affectés exclusivement aux paiements au titre de la fourniture de biens publics environnementaux (autrement dit les paiements au titre de produits spécifiques autres que des produits de base, tels que figurant dans les données sur l’ESP). Le programme de protection des zones rurales (Countryside Stewardship programme) du Royaume-Uni et les paiements directs pour la préservation des terres instaurés par la Corée sont deux exemples de ces types d'aides. Certains pays exigent en outre, pour le versement d'autres types de paiements, que certaines normes environnementales soient respectées.

Le financement public de l’innovation et de la production de connaissances agricoles demeure relativement faible, bien que l’investissement dans ce domaine soit souvent cité comme l’un des rôles les plus importants que peuvent jouer les pouvoirs publics pour aider le secteur agricole à s'adapter au changement climatique et à améliorer sa résilience (Ignaciuk, 2015[36] ; Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35] ; OCDE, 2020[39]). En 2020-22, le financement des programmes de production de connaissances agricoles équivalait à 0.4 % de la valeur de la production agricole des 54 pays examinés, tandis que celui des programmes de transfert de connaissances en représentait 0.2 %.

Le rôle de la R-D publique est clairement de fournir des informations précises et détaillées qui permettent aux acteurs privés de prendre des décisions avisées au regard de l’adaptation. Le constat issu de la modélisation est que l’innovation dirigée a permis de compenser pas moins de 20 % de la perte de valeur éventuelle des terres agricoles liée à l’évolution dramatique du climat aux États-Unis depuis les années 60 (Moscona et Sastry, 2022[62]). Un autre volet tout aussi important est le soutien à la recherche sur l'évaluation des risques et de la vulnérabilité. Un certain nombre de pays fournissent déjà des services permettant aux producteurs de mieux évaluer leur vulnérabilité aux risques climatiques et leurs besoins d’adaptation, comme le montrent les 66 actions et programmes dédiés aux services climatiques. Cela inclut par exemple un outil de test de résistance au risque climatique (Pays-Bas), une cartographie de la vulnérabilité aux risques climatiques (Philippines), un portail d'information sur le climat (Portugal) et des plateformes sur le climat (Climate Hubs, États-Unis).

Les prévisions météorologiques ou les systèmes d'alerte précoce sont également des outils importants pour préparer les producteurs à agir de façon anticipée pour réduire au maximum les effets néfastes des événements extrêmes. Certains pays fournissent déjà des financements ou sont en train de développer ces types de services : c’est le cas notamment de l’Australie avec son système d’alerte sécheresse précoce, de l’Autriche au travers de sa contribution à une base de données mondiale sur les températures au sol et sous la surface, de la France avec les services agroclimatiques de Météo France, de l’Irlande avec son système d'évaluation des risques de feux de forêt, de la Nouvelle-Zélande avec son outil haute résolution de prévision des sécheresses (NIWA35) et des États-Unis avec leur système de surveillance de la sécheresse. Ces types de services fournissent aux producteurs les informations nécessaires pour comprendre les dangers à court et moyen terme du changement climatique et opérer plus facilement une adaptation autonome sans provoquer de distorsion de la production ni altérer les signaux du marché. Lors de la conception de programmes de production de connaissances, il est important de prendre en considération les mesures dites « sans regret », qui sont celles qui aident les exploitants à faire face à un large éventail de scénarios d’aggravation du changement climatique, tels que ceux examinés plus haut.

Les programmes de transfert de connaissances axés sur l’adaptation sont également très importants pour renforcer la capacité du secteur agricole à aborder le changement climatique futur. Les déficits de connaissances peuvent contribuer à entraver la mise en œuvre par les exploitants agricoles d'actions d’adaptation et d’autres pratiques respectueuses du climat (Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). Un meilleur accès aux informations permet aux producteurs et autres acteurs privés de surmonter ces obstacles et de prendre des décisions rationnelles au regard des actions d’adaptation. Les mesures de renforcement des capacités sont parmi les plus couramment utilisées par les pays examinés dans le présent rapport ; à titre d’exemple, le programme de résilience des entreprises agricoles en Australie, le programme « Solutions agricoles pour le climat – Laboratoires vivants » au Canada et les sessions d'information en ligne au niveau régional aux Pays-Bas sont autant de moyens contribuant à créer du lien entre les exploitants afin qu'ils échangent les bonnes pratiques face au changement climatique.

La mise en place d’infrastructures sera souvent nécessaire pour réduire les obstacles à l’adoption de pratiques respectueuses du climat dans l’agriculture. Dans le contexte de ce rapport, les dépenses d’infrastructure sont incluses dans le soutien aux services d'intérêt général affecté à des biens publics, tandis que les subventions versées aux producteurs pour la construction d'infrastructures sur les exploitations sont enregistrées au titre des paiements aux producteurs pour la formation de capital fixe. Sur la période 2020-22, les dépenses d'infrastructure ont atteint un total de 49 milliards USD dans les 54 pays examinés, soit 1.1 % de la valeur de la production agricole.

Les exploitants agricoles utilisent – directement ou indirectement – les infrastructures publiques, dont la disponibilité aura une influence sur leur capacité à faire face au changement climatique (Ortiz-Bobea, 2021[63] ; Wreford, Ignaciuk et Gruère, 2017[35]). Les besoins d’infrastructures sont très localisés et il est important que chaque projet fasse l’objet d'une évaluation à long terme de sa viabilité pour établir sa pertinence. Ainsi, les infrastructures d’irrigation seront très utiles pour faire face aux effets du changement climatique dans certaines régions, mais dans d’autres, faute de politiques adéquates de gestion de l’eau, elles peuvent devenir un facteur de maladaptation et décourager le passage à des systèmes de production moins gourmands en eau et moins émetteurs qui permettraient de rendre la région globalement plus résiliente. Face à l’incertitude de la viabilité des projets d’adaptation à long terme, la littérature économique préconise généralement de mettre en œuvre des mesures « sans regret », c’est-à-dire qui permettent de renforcer la résilience au risque dans un large éventail de scénarios futurs et qui procureront des avantages au secteur même en l’absence de chocs (OCDE/FAO, 2021[8] ; OCDE, 2020[39] ; Mullan et al., 2013[64] ; Hallegatte, 2009[65] ; Antón et al., 2013[37]).

Dans le contexte du changement climatique, les ravageurs et les maladies seront une source croissante de risque pour les exploitants agricoles (Skendžić et al., 2021[66]). Certains de ces risques sont généralement gérés par l’emploi de pesticides, de pratiques culturales, d’antibiotiques et autres procédés de gestion. Or, tous ne peuvent pas être contrôlés individuellement par les producteurs. Les flambées épidémiques dans les exploitations peuvent nuire directement aux producteurs en leur infligeant des pertes de récoltes et de bétail ; dans d'autres cas, elles peuvent aussi avoir un effet préjudiciable si elles entraînent l’arrêt des échanges ou la modification des préférences des consommateurs. Il en résulte que les pouvoirs publics ont également un rôle clair à jouer en continuant d’œuvrer pour le bien de tous par la prévention et la gestion de ces risques. Dans de nombreux pays, les autorités publiques mettent en place à l'échelle nationale des systèmes de biosécurité qui utilisent des dispositifs d’inspection et de contrôle pour prévenir les maladies et leur propagation dans les zones agricoles. En 2020-22, ces mesures se sont chiffrées à 8 milliards USD dans les 54 pays examinés dans le présent rapport, ce qui représente 0.2 % de la valeur de la production agricole.

Des activités plus prospectives sont également à envisager, notamment les systèmes permettant d’anticiper l’apparition de nouveaux ravageurs et maladies, la mise au point de plans d'intervention et les dispositifs de notification anticipée qui aident les producteurs et autres acteurs à réagir en cas de menace. Les programmes de vulgarisation et de transfert des connaissances ont aussi de l’importance pour informer sur les bonnes pratiques à adopter pour gérer les ravageurs et les maladies. Par exemple, dans le cadre de sa stratégie « De la ferme à la table », l’Union européenne a lancé entre 2020 et 2022 un programme pilote intitulé Farmer’s Toolbox for Integrated Pest Management (boîte à outils à l’intention des exploitants agricoles pour la lutte intégrée contre les organismes nuisibles), dont l’objectif est de fournir des connaissances de base sur les méthodes les plus prometteuses pour permettre aux producteurs de réduire leur dépendance aux pesticides.

Le changement climatique a de plus en plus d’incidence sur les systèmes agricoles et alimentaires mondiaux : ralentissement de la hausse de la productivité agricole, dégradation de la qualité des cultures et des pâturages ainsi que de la stabilité des récoltes, et perturbations des services écosystémiques terrestres. La hausse des températures et l’augmentation de la fréquence des sécheresses, des inondations et des catastrophes naturelles ont des effets néfastes sur la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance notamment des pertes brutales de la production survenant de plus en plus fréquemment, une diminution de la disponibilité des aliments et une hausse des prix de l’alimentation. Le changement climatique devrait rendre certaines zones impropres à la production alimentaire, ce qui entraînera une augmentation du nombre de personnes exposées au risque de famine, de malnutrition et de mortalité liée à l’alimentation (Bezner Kerr et al., 2022[45]). Le secteur agricole est confronté à un formidable défi : il doit s'adapter au changement climatique tout en réduisant les émissions de GES, préserver la biodiversité et la qualité environnementale, assurer la sécurité alimentaire et la nutrition, et garantir un revenu et des moyens de subsistance aux populations rurales.

Les autorités publiques adoptent déjà des mesures importantes pour faciliter l’adaptation au changement climatique de leurs secteurs agricoles : les rapports à la CCNUCC rendent compte d'une attention accrue à l’adaptation de l’agriculture et aux avantages connexes de l’adaptation et l’atténuation au fil du temps, tandis qu’un inventaire des mesures fait état de 587 programmes et activités d'adaptation dans les 54 pays examinés. Cela dit, une forte proportion des activités en question concernent la planification, 120 documents de planification stratégique ayant été comptabilisés dans les trois quarts des pays faisant l'objet de l’étude. Il est impératif de passer de la planification à la mise en œuvre pour aider les systèmes de production agricole à s'adapter au changement climatique. Bien qu’il y ait de plus en plus de données probantes montrant que de nombreux plans sont mis à exécution, on sait peu de choses sur l’ampleur de la mise en œuvre ou sur les résultats des programmes. Il est indispensable que les pays continuent d’assurer la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des mesures et des programmes d’adaptation, le but étant d’accroître la résilience en renforçant les capacités d’absorption, d’adaptation et de transformation.

La plupart des mesures de soutien aux exploitants agricoles n’ont pas été conçues pour répondre aux objectifs d’adaptation au changement climatique. Si certaines peuvent favoriser l’adaptation, la majorité ne facilitent pas vraiment – voire entravent – les efforts déployés dans ce sens par les producteurs. En 2020-22, le soutien aux producteurs à titre individuel s’est élevé à 630 milliards USD par an, dont 380 milliards USD sous forme de soutien lié à la production de certains produits, qui dissuade de procéder à des ajustements de la production. Les pouvoirs publics devraient réduire et réformer le soutien des prix du marché (SPM) ainsi que les paiements au profit de certains produits qui encouragent les producteurs à maintenir des systèmes préexistants et ne les incitent guère à abandonner progressivement la production de produits subventionnés pour faire face à l’évolution des conditions climatiques. La suppression des dispositifs qui provoquent la distorsion des échanges et empêchent la transmission des prix peut en outre réduire les fluctuations de l’offre en permettant le transfert des produits des régions excédentaires vers les régions déficitaires, ce qui aide à gérer les pénuries alimentaires que connaissent certains pays à cause des sécheresses, inondations et autres événements catastrophiques. Pour faciliter cette évolution, il peut être nécessaire de prendre des mesures à court terme qui ne faussent pas les échanges. Le soutien des prix du marché et les paiements liés à la production ou à l’utilisation sans contrainte d’intrants variables sont les politiques qui risquent le plus d’accroître les émissions de GES et d’amplifier les efforts d’adaptation requis (OCDE, 2022[48]). Leur réforme contribuerait à la lutte contre le changement climatique et libérerait des ressources pouvant être affectées à l’adaptation au changement climatique. À cet égard, il importe d’élaborer des politiques cohérentes faisant intervenir l’ensemble des organismes disposant de leviers d’action, afin que les synergies et les arbitrages soient bien compris.

S'ils fonctionnent bien, les marchés de l’assurance peuvent améliorer la résilience au changement climatique en permettant aux producteurs agricoles d’accroître leur capacité d'absorption de façon à surmonter les chocs. Si les risques idiosyncrasiques de faible et moyenne intensité peuvent être gérés au niveau des exploitations et à l’aide d’outils de stabilisation des marchés tels que l’assurance, la politique agricole a toujours un rôle à jouer en couvrant les risques systémiques de grande ampleur qui ne peuvent être pris en charge par les producteurs eux-mêmes ou les marchés du risque, en particulier compte tenu du nombre croissant de phénomènes météorologiques extrêmes et de catastrophes. Les paiements d’aide en cas de catastrophe peuvent entraîner une maladaptation si ils ne ciblent pas les risques de catastrophe et sont mal conçus. Les pouvoirs publics doivent s'assurer que les subventions versées aux compagnies d'assurance et les aides en cas de catastrophe n’engendrent pas un aléa moral et ne font pas obstacle à l’adaptation des exploitations agricoles ; il faut également que les dispositifs mis en place soient bien conçus et n’entravent pas les initiatives du secteur privé. Des données plus détaillées et de meilleure qualité sur le climat et les risques peuvent permettre de réduire les incertitudes liées au changement climatique et favoriser l’élaboration de solutions locales et de stratégies au niveau des exploitations qui sont optimales. L’offre de régimes d’assurance indicielle pour les risques cessibles peut aider à réduire l’aléa moral et rendre la couverture plus abordable pour les petits producteurs.

De manière générale, les mesures de soutien à l’agriculture ont tendance à être mal ciblées et inégalement réparties, avec souvent pour conséquence de profiter substantiellement à des bénéficiaires non prévus au départ tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Cela s’avère extrêmement coûteux, non seulement pour les consommateurs et les contribuables, mais aussi pour les producteurs du fait de la faible efficience du transfert de revenu permis par les mesures de soutien. Le but de ces mesures devrait être d'offrir aux ménages agricoles plusieurs pistes d’adaptation possibles : améliorer la productivité de façon durable, diversifier les sources de revenus entre les membres des ménages et, si nécessaire, faciliter la reconversion dans un autre secteur.

Mieux cibler le soutien à l’agriculture peut faciliter l’adaptation autonome et libérer une partie des ressources budgétaires limitées en vue de les utiliser pour accompagner les initiatives d’adaptation planifiées ou fournir une aide à la transition. Les investissements dans la recherche-développement, les services de vulgarisation, les compétences entrepreneuriales, le capital humain et l'adoption de technologies favorisant l’amélioration de la résilience peuvent accroître la capacité de résilience des exploitations et réduire l’exposition des exploitants aux risques liés au changement climatique sur le long terme. Il est aussi possible de subordonner les paiements à la fourniture de services écosystémiques comme la préservation des paysages, la conservation de la biodiversité et la lutte contre les espèces envahissantes – même s’il convient d’être très attentif dans la conception et la mise en œuvre des dispositifs pour garantir l’effectivité des avantages environnementaux. Cela dit, sur les 297 milliards USD de transferts budgétaires versés annuellement aux producteurs en 2020-22, seul 1.6 milliard USD était exclusivement lié à la fourniture de biens publics environnementaux (autrement dit, des paiements au titre de produits particuliers autres que les produits de base).

Les investissements dans l’innovation, l’infrastructure et la biosécurité peuvent jouer un rôle essentiel dans l’adaptation de l’agriculture au changement climatique. Or le soutien apporté à ces services d’intérêt général et autres est faible. Sur la période 2020-22, 106 milliards USD seulement y ont été consacrés, ce qui correspond à 2.5 % à peine de la valeur de la production agricole et à 12.5 % du soutien total au secteur. Le fait d’affecter une plus grande part des dépenses de R-D à l’adaptation peut contribuer à améliorer l’évaluation des risques et de la vulnérabilité, favoriser la prise de décisions plus avisées, faciliter l’émergence de nouvelles technologies et pratiques de production adaptées à l’évolution du climat, et renforcer les capacités grâce aux programmes de transfert de connaissances. Les investissements dans l’infrastructure devraient être résilients face au changement climatique, c’est-à-dire qu’ils doivent être planifiés, conçus, construits et exploités de manière à s’adapterà l'évolution des conditions climatiques. Ils peuvent aussi favoriser la mise en place, à l’échelle du paysage, de solutions fondées sur la nature pouvant contribuer simultanément à la réalisation des objectifs liés à l’adaptation, à l’atténuation et à d’autres services écosystémiques. Les mesures de conservation de la biodiversité devraient être renforcées afin de permettre aux exploitants agricoles de se prémunir contre les nouvelles menaces liées aux ravageurs et aux maladies, d'y faire face et de s’en relever.

Les partenariats public-privé sont un moyen d’attirer les investissements dans l’innovation et l’infrastructure en permettant aux entités publiques et privées de partager les risques et les coûts associés aux projets. Ils peuvent être particulièrement efficaces pour les projets d’infrastructure de grande ampleur s'étendant sur le long terme, ou dans les domaines où le secteur privé est peut-être moins actif. Il est important que les investissements soient conçus avec soin, de manière à éviter la maladaptation : pour citer un exemple, la mise en place d’infrastructures d'irrigation ou de technologies permettant une utilisation plus efficiente de l’eau devrait être complétée par des mesures visant à dissuader les exploitants de choisir des cultures gourmandes en eau ou d'étendre l'activité agricole à des zones trop arides qui risquent de devenir impropres à la production à longue échéance.

Dans un avenir lointain, les exploitants agricoles se verront dans l’obligation de procéder à des changements transformateurs. Ce sera particulièrement nécessaire dans le contexte des points de basculement, qui risquent de produire des effets irréversibles sur l’agriculture dans certaines régions, le maintien des systèmes actuels devenant alors intenable. Les politiques devraient avoir pour finalité de faciliter l’ajustement structurel et de favoriser l’émergence de sources de revenus nouvelles et variées en complément des revenus tirés des cultures et de l’élevage traditionnels, comme la production d'énergie renouvelable ou les paiements au titre de la conservation de la biodiversité, de la réduction des émissions ou d'autres services écosystémiques, ou encore la conversion à une activité en dehors de l’exploitation agricole.

Les mesures visant à encourager l’adaptation au changement climatique dans l’agriculture peuvent susciter d’importantes synergies avec les objectifs d’atténuation du changement climatique et d'autres objectifs ayant trait au système alimentaire, et cela passe obligatoirement par une approche cohérente de l’élaboration des politiques publiques faisant intervenir toutes les sphères de l’action gouvernementale. Pour être bénéfiques, les actions d’adaptation doivent être efficaces (prises en anticipation ou ayant pour effet tangible de réduire le risque climatique), faisables (possibles et souhaitables dans un certain contexte) et justes. L'utilisation de cadres de suivi et d'évaluation robustes peut permettre d'évaluer l’efficacité des mesures d’adaptation, de prévenir la maladaptation et d'assurer la cohérence avec les objectifs d’atténuation du changement climatique et les autres finalités plus générales relatives aux systèmes alimentaires. En 2022, les signataires de la Déclaration ministérielle de l’OCDE18 se sont engagés « à promouvoir l’élaboration et la mise en œuvre de pratiques agricoles propres à conserver, à utiliser de manière durable et à restaurer la biodiversité, à traiter les effets négatifs de la conversion de terres en terres agricoles sur la biodiversité, à améliorer les services écosystémiques, la santé des sols et la qualité de l’air et de l’eau, notamment en adoptant des approches agroécologiques et d’autres approches innovantes et adaptées au contexte ».

Références

[53] Adenäuer, M., C. Frezal et T. Chatzopoulos (2023), « Mitigating the impact of extreme weather events on agricultural markets through trade », Documents de l’OCDE sur l’alimentation, l’agriculture et les pêcheries n° 198, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/aa584482-en.

[60] Annan, F. et W. Schlenker (2015), « Federal Crop Insurance and the Disincentive to Adapt to Extreme Heat », American Economic Review, vol. 105/5, pp. 262-266, https://doi.org/10.1257/aer.p20151031.

[37] Antón, J. et al. (2013), « Agricultural risk management policies under climate uncertainty », Global Environmental Change, vol. 23/6, pp. 1726-1736, https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2013.08.007.

[59] Antón, J. et al. (2012), « A Comparative Study of Risk Management in Agriculture under Climate Change », Documents de l’OCDE sur l’alimentation, l’agriculture et les pêcheries, n° 58, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/5k94d6fx5bd8-en.

[32] Ara Begum, R. et al. (2022), Point of Departure and Key Concepts, Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni et New York, NY, États-Unis, https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg2/downloads/report/IPCC_AR6_WGII_Chapter01.pdf.

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Chaque Partie à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) est tenue de soumettre des communications nationales en respectant les directives énoncées et adoptées par la Conférence des Parties (COP). La CCNUCC définit trois grands groupes de pays : ceux de l’Annexe I, qui englobent les pays membres de l’OCDE en 1992 plus les économies en transition ; ceux de l’Annexe II, qui englobent les pays membres de l’OCDE en 1992 à l’exclusion des économies en transition et de la Türkiye ; et, enfin, les pays non visés à l’Annexe I. Cette distinction a son importance, car les obligations de déclaration diffèrent selon les groupes, de même que les attentes en matière de financement climatique.

Les Parties visées à l’annexe I doivent transmettre une communication nationale tous les quatre ans, la dernière en date – du 31 décembre 2022 – étant la 8e. Les Parties ne figurant pas à l’annexe I sont tenues de transmettre leur première communication nationale dans les trois ans qui suivent leur adhésion à la Convention, puis tous les quatre ans. Pour les pays de l’annexe I, la COP a adopté des directives établissant un format de communication standardisé, qui inclut un chapitre spécialement consacré à l’évaluation des vulnérabilités au changement climatique et aux mesures d’adaptation. Pour les pays autres que ceux de l’annexe I, les directives sont plus souples, mais il est recommandé que les communications nationales incluent des sections détaillant les programmes qui facilitent l’adaptation au changement climatique et les obstacles à la mise en œuvre de mesures d’adaptation, ainsi que des informations sur la façon dont les programmes de soutien déployés par l’intermédiaire de la Convention aident à répondre aux besoins d’adaptation.

Un élément clé de l’Accord de Paris est la préparation par chaque Partie d'une contribution déterminée au niveau national (CDN) qui incarne « les efforts déployés par chaque pays pour réduire ses émissions nationales et s’adapter aux effets du changement climatique » (CCNUCC, 2022[67]). Chaque Partie a pour obligation de soumettre une mise à jour de sa CDN tous les cinq ans à partir de 2020, chaque CDN représentant une progression par rapport à la précédente et reflétant « l’ambition la plus élevée possible » du pays concerné. En octobre 2021, les 191 Parties à l’Accord avaient soumis au moins une CDN à la CCNUCC.

Outre les CDN, les Parties sont encouragées à fournir des informations sur les effets du changement climatique et, dans le cadre de la communication relative à l’adaptation, à faire état des progrès en la matière. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une obligation formelle, l’article 7 de l’Accord de Paris suggère que chaque Partie soumette une communication actualisée sur l’adaptation de manière à : « a) en savoir plus sur l’adaptation et la façon dont elle se met en place, ainsi que son équilibre avec l’atténuation ; b) renforcer les actions d’adaptation et le soutien à l’égard des pays en développement ; c) fournir des informations pour le bilan mondial ; d) améliorer l’apprentissage et la compréhension des besoins en matière d’adaptation et des actions menées en la matière » (CCNUCC, 2022[68]).

Alors que l’établissement des CDN est obligatoire dans le cadre de l’Accord de Paris, rendre compte des mesures d'adaptation ne l’est pas. Si les communications relatives à l'adaptation ne sont pas impératives, il faut en revanche que leur contenu porte exclusivement sur ce sujet. Le format qu’elles peuvent prendre est en outre très libre. Un peu plus de la moitié des communications de ce type soumises jusqu’à ce jour sont des documents uniques. Les autres reprennent la même forme que la CDN, le plan national d'adaptation (PNA) ou la communication nationale ayant été soumis le plus récemment à la CCNUCC. Les communications relatives à l'adaptation sont relativement nouvelles, leur première version datant de la période 2020-22.

L’analyse de la fréquence des mots clés qui figure dans ce chapitre tient compte de toutes les versions des communications nationales, des CDN et des communications relatives à l’adaptation ayant été soumises à la CCNUCC avant le 1er février 2023 par 38 pays membres de l’OCDE, l’Union européenne en tant qu’institution, 5 États membres de l’UE non membres de l’OCDE et les 11 économies émergentes incluses dans ce rapport. Au total, l’analyse a porté sur 413 documents (329 communications nationales, 67 CDN et 17 communications relatives à l’adaptation). Les documents examinés sont répertoriés dans le Tableau 1.A.1.

L'approche utilisée pour analyser les mots clés employés repose sur la méthode de l’analyse des contenus, mise au point dans les sciences sociales pour analyser les textes. À la base, l'analyse des contenus considère les mots et le contexte dans lequel ils sont utilisés comme des données (Hsieh et Shannon, 2005[69]). Une méthode mixte est ensuite utilisée, avec une combinaison d’approches quantitatives et qualitatives. L’analyse commence par la mesure de la fréquence de l’emploi des mots, qui fournit une indication de l’intérêt, ou de l’importance, accordé à certains mots, sans tenir compte de leur sens dans le contexte (Potter et Levine-Donnerstein, 1999[70]). Pour citer un exemple, le nombre d’occurrences des mots clés ayant trait à l’agriculture dans les documents soumis à la CCNUCC peut informer sur le degré d'attention accordé aux conséquences du changement climatique pour le secteur (Gagnon-Lebrun et Agrawala, 2006[71]). L’analyse prend ensuite un tour qualitatif avec l’examen du contexte dans lequel les mots clés recherchés sont employés. Cette seconde étape consiste à examiner le texte qui entoure un mot clé pour déterminer, par exemple, si les termes relatifs à l’agriculture font référence aux vulnérabilités, à l’atténuation ou à l’adaptation.

L’analyse qualitative des mots clés est réalisée à l’aide du logiciel NVivo (version 1.7). La fréquence des mots clés est quant à elle analysée en établissant une liste des termes qui décrivent le concept à l’étude. Dans la présente analyse, les mots clés ayant trait à l’agriculture sont notamment « agriculture », « alimentation », « exploitation agricole », « culture », « élevage » et leurs variantes (par exemple : agricole, exploitant, cultural). Les mots clés employés dans le contexte de l’atténuation sont notamment « atténuation », « émissions », « carbone », « effet de serre », « gaz », « entérique », « fermentation » et « déchets alimentaires » ; ceux relatifs à l’adaptation sont par exemple « adaptation » et « résilience » ; enfin, ceux qui expriment la vulnérabilité incluent « vulnérabilité », « impact » et « pression ». Pour chaque catégorie, la liste des mots clés inclut leurs variantes en anglais, ainsi que leurs équivalents en espagnol et en français. Pour cerner le contexte dans lequel s’inscrivent les mots clés sur l’agriculture, l’analyse a recherché leur intersection avec les différents sujets abordés (atténuation, adaptation et vulnérabilité). Le codage de chaque extrait de texte a ensuite été vérifié manuellement.

Les résultats de la recherche de mots clés sont présentés en pourcentage du nombre total de mots publiés, ce qui permet de tenir compte des différences de longueur entre les différents types de documents (les CDN sont généralement plus courtes que les communications relatives à l’adaptation ou les communications nationales) et de la classification des pays au regard de la CCNUCC (les CDN des pays « Non annexe I » ont tendance à être plus longues que celles des pays de l’annexe I).

Cet inventaire des programmes et activités d'adaptation de l’agriculture au changement climatique qui sont en cours s'appuie sur les informations recueillies par le Secrétariat auprès de chacun des pays examinés – figurant dans les chapitres consacrés à chaque pays – ainsi que sur des recherches complémentaires concernant les initiatives de soutien à l’adaptation. La liste des activités recensées ici n’est pas exhaustive, mais donne un aperçu des thèmes privilégiés dans les programmes et des investissements réalisés par les pays faisant l’objet de l’étude.

Chacun des programmes et activités déclarés par les pays membres au Secrétariat a fait l’objet d’un premier examen manuel pour garantir qu’il s’agissait d’une activité ciblant expressément l’adaptation (et non d’un programme général qui traite accessoirement d’adaptation), puis a été examiné et classé en fonction des catégories et sous-catégories de l’initiative GAMI telles que définies dans le tableau 1.1. Lorsqu’une action relève de plusieurs catégories ou sous-catégories, elle est répertoriée dans chacune d’elles. Chaque action a été codée par au moins deux opérateurs afin d’assurer une cohérence dans la classification des programmes. Parmi les actions engagées par les pouvoirs publics, un grand nombre relèvent non d'une intervention directe pour faciliter l’adaptation, mais de la création d’institutions pour accompagner la prise de décisions d’adaptation à titre individuel ou collectif. Dans la plupart des cas, ces actions d'accompagnement sont classées dans la catégorie des mesures sociales, économiques et institutionnelles (SEI). Ainsi, un outil d'aide à la décision fournissant des informations sur d’éventuelles modifications à apporter aux pratiques culturales en raison du changement climatique sera classé dans la catégorie « Services climatologiques » et non « Gestion et exploitation des cultures ». Les programmes dont la mise en œuvre est prévue, mais pas encore effective, ont été classés dans la catégorie et la sous-catégorie SEI les mieux adaptées au vu des informations disponibles les concernant.

Notes

← 1. La fréquence accrue de ces événements peut aussi s’expliquer en partie par l’amélioration de l’enregistrement et du signalement des catastrophes depuis les années 80. Pour plus d’informations, voir les documents/publications et la base de données du CRED.

← 2. Les montants sont exprimés en dollars des États-Unis (USD) de 2019.

← 3. Il est prouvé que l’augmentation des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère favorise la croissance de la biomasse et la résistance à la sécheresse, avec des effets potentiellement positifs pour le rendement des cultures et la croissance des pâturages. Toutefois, elle pourrait aussi favoriser la croissance des plantes adventices et des espèces envahissantes. La hausse de la concentration atmosphérique de CO2 est par ailleurs associée à la baisse de la teneur en nutriments de nombreuses productions végétales, ce qui pourrait atténuer certains des avantages potentiels découlant de l’accroissement de la végétation. D’après les constatations du GIEC, les effets négatifs du changement climatique sont susceptibles de l’emporter sur ses effets positifs dans la plupart des régions (GIEC, 2022[10]).

← 4. Le rythme de la transformation peut être variable, mais l’évolution structurelle sous-jacente du secteur correspond généralement à la notion économique du long terme, dans lequel les coûts fixes deviennent variables.

← 5. L’analyse des documents transmis par chacun des pays couverts dans le présent rapport repose sur les travaux de l’OCDE (2023[9]), de Gagnon-Lebrun et Agrawala (2006[71]), de Mullan et al. (2013[64]), de Pauw et al. (2019[50]), et de Crumpler et al. (2021[75]). Les détails de cette analyse sont présentés dans l’annexe du chapitre.

← 6. Comme expliqué dans l’annexe, les communications nationales contiennent un chapitre consacré aux vulnérabilités et à l’adaptation. Les CDN des parties visées à l’Annexe I de la CCNUCC font une large place à l’atténuation, tandis que celles des parties non visées à l’Annexe I contiennent de très nombreuses informations sur l’adaptation. Les communications relatives à l’adaptation portent uniquement sur cette dernière.

← 7. Ces documents portent sur de nombreux secteurs et thématiques, et ne répertorient donc pas de manière exhaustive les mesures d’adaptation mises en œuvre par les pays étudiés ici.

← 8. La classification GAMI regroupe les mesures d’adaptation autonome et planifiée. De ce fait, une intervention publique n’est pas forcément pertinente ni souhaitable dans tous les domaines couverts, et ces derniers ne s’appliquent par ailleurs pas tous nécessairement à l’alimentation et à l’agriculture.

← 9. Les activités concernées sont comptabilisées dans chaque catégorie, et c’est pourquoi les mesures et programmes synthétisés ici sont plus nombreux que ceux réellement déclarés.

← 10. La plateforme européenne d’adaptation au changement climatique Climate-ADAPT favorise le partage d’informations sur les stratégies d’adaptation au changement climatique mises en œuvre en Europe (https://climate-adapt.eea.europa.eu/).

← 11. D’après les éléments disponibles, les systèmes de production biologique présentent un bilan mitigé en matière d’adaptation et d’atténuation. Ils se caractérisent certes par une consommation moindre d'intrants et semblent renforcer la séquestration du carbone dans les sols, mais ils affichent aussi des rendements moindres et peuvent donc nécessiter de produire davantage ailleurs. D’après Smith et al. (2019[73]), au niveau national, le passage à l’agriculture biologique entraîne ainsi une hausse des émissions nettes.

← 12. https://igedd.documentation.developpement-durable.gouv.fr/documents/Affaires-0009000/010178-01_rapport.pdf

← 13. Le Centre est constitué de deux entités : AgriZeroNZ ou Centre for Climate Action Joint Venture, chargé du financement de l’innovation à parité entre les pouvoirs publics et le secteur privé, et le centre de recherche NZAGRC (New Zealand Greenhouse Gas Research Centre).

← 14. Les mesures ou programmes agroécologiques renvoient globalement aux systèmes de production agricole durables. Diverses approches et pratiques peuvent entrer dans cette catégorie, comme l’agriculture régénératrice, l’agriculture de conservation et l’agriculture circulaire.

← 15. https://esdac.jrc.ec.europa.eu/esdacviewer/euso-dashboard/

← 16. Les investissements publics ne doivent pas non plus empêcher l’autofinancement, les pays devant s’efforcer d’assurer la récupération complète des coûts d’approvisionnement en eau d’irrigation (OCDE, 2010[76]).

← 17. C’est ce qui se passe avec le SPM et les paiements au titre de la production, mais aussi avec des dispositifs comme les paiements par tête de bétail ou ceux versés pour certaines cultures en particulier.

← 18. OCDE (2022[77]), Déclaration sur des solutions transformatrices pour des systèmes agricoles et alimentaires durables, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0483.

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