Mesurer la distance à parcourir pour atteindre les cibles des ODD – Suisse

La Suisse a déjà atteint 31 des 121 cibles des ODD pour lesquelles des données comparables sont disponibles et, sur la base des tendances récentes, elle devrait atteindre 5 cibles supplémentaires d'ici à 2030 (Graphique 1). Comme la quasi-totalité des pays de l'OCDE, la Suisse a déjà atteint (ou est sur le point d'atteindre) la plupart des cibles liées à la satisfaction des besoins fondamentaux et à la mise en œuvre des outils et cadres politiques mentionnés dans le Programme 2030 (voir les détails dans le Tableau 1). La Suisse est une économie et une place financière prospères et, malgré un niveau de vie élevé, ses performances environnementales sont relativement bonnes. Pourtant, des défis subsistent. Par exemple, en tant que pays alpin, la Suisse est plus fortement touchée par le changement climatique que d'autres pays.

Cette fiche pays présente un tour d’horizon de certains des points forts et des défis de la Suisse au regard des cibles des ODD. En tant que tel, il diffère des examens nationaux volontaires ou d'autres processus de communication d’informations. Afin d’assurer la comparabilité au niveau international, cette évaluation s’appuie sur le cadre mondial d’indicateurs et sur des données provenant de la base de données mondiale sur les ODD et des bases de données de l'OCDE. Les examens nationaux volontaires utilisent généralement des indicateurs nationaux qui reflètent la situation du pays et sont plus à jour (voir la section Comment lire ce profil pays ? qui fournit quelques informations méthodologiques sur les profils nationaux).

La Suisse est une économie et une place financière prospères. Avant la pandémie, le pays se caractérisait par une croissance économique bien supérieure à la moyenne de l'OCDE (cible 8.1) et un marché du travail attrayant. Le salaire horaire moyen y est parmi les plus élevés de l'OCDE (29 USD PPA par heure en 2018), et le taux de chômage est faible, à 5 % en 2020 l'OCDE (cible 8.5). En 2020, la proportion de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif était de 7 % seulement, soit la moitié de la moyenne de l’OCDE (cible 8.6). Ces résultats étayent, et sont étayés par, de bons résultats en termes de santé (objectif 3) et par un système éducatif performant (objectif 4). Sur le plan de l'industrie et de l'innovation, la Suisse figure également parmi les pays les plus performants : la densité de recherche y est forte, les dépenses de recherche et développement représentent une part importante du PIB (cible 9.5) et l'importance relative de la valeur ajoutée manufacturière par habitant est bien supérieure à la moyenne de l'OCDE (cible 9.2).

Malgré un niveau de vie élevé – et par conséquent une consommation et une utilisation des ressources élevées –, les performances environnementales sont relativement bonnes. L’intensité des émissions de gaz à effet de serre en Suisse est la plus faible parmi les pays de l’OCDE (cibles 9.4 et 13.2). Cela reflète une faible intensité énergétique (cible 7.3) et une part élevée d'énergies renouvelables dans la production d'électricité (cible 7.2, 60 % en 2020). La Suisse est également l'un des pays de l'OCDE les plus performants en termes de consommation intérieure de matières (cibles 8.4 et 12.2). Cependant, les pressions sur l’environnement demeurent importantes, en raison du niveau de vie élevé et de la consommation et de l'utilisation des ressources également élevées qui en résultent. L'exposition moyenne de la population aux PM2.5 dans les villes est légèrement supérieure au niveau cible mais s'améliore (cibles 12.5 et 11.6). En outre, bien que la Suisse ait l'un des taux de valorisation des déchets municipaux les plus élevés, les déchets par habitant sont parmi les plus importants de l'OCDE, et sont plus élevés qu'il y a 15 ans (cible 11.6).

La résilience face aux catastrophes naturelles doit être améliorée. En tant que pays alpin, la Suisse est plus fortement touchée par le changement climatique que d'autres pays. Selon le Conseil fédéral, les températures moyennes annuelles ont augmenté d'environ 2°C depuis le début des mesures en 1864, soit deux fois plus que la moyenne mondiale. Pourtant, la Suisse n'a pas atteint le score maximal concernant l'adoption et la mise en œuvre de stratégies nationales de réduction des risques de catastrophe (RRC) conformes au Cadre de Sendai, et seule la moitié des administrations locales ont adopté et mis en œuvre des stratégies locales de RRC (cibles 1.5, 11.b et 13.1). Les catastrophes naturelles peuvent entraîner des décès et perturbent toujours les activités socio-économiques et les moyens de subsistance. Bien que les comparaisons entre pays doivent être effectuées avec précaution, l'impact humain des catastrophes (pour la dernière année disponible) est bien supérieur à la moyenne de l'OCDE, les catastrophes touchant directement près de 4 000 personnes pour 100 000 habitants et causant 9 décès (et disparitions) pour 100 000 habitants.

Les déterminants non médicaux de la santé peuvent compromettre les perspectives d'avenir. La population suisse bénéficie d'un bon accès aux soins de santé grâce à une assurance maladie privée obligatoire qui garantit une couverture universelle des soins de santé. Alors que les prestataires d'assurance maladie fixent des primes d'assurance standard par personne, indépendamment du revenu, et que le gouvernement s'appuie sur les subventions publiques pour atténuer les effets régressifs des primes non liées au revenu, certains ménages doivent toutefois débourser des sommes importantes (cible 3.8). De plus, comme dans presque tous les pays de l’OCDE, les facteurs de risque comportementaux – notamment une mauvaise alimentation, le tabagisme, l'inactivité physique et la consommation d'alcool – sont parmi les principaux facteurs de morbidité et de mortalité. En Suisse, la consommation de tabac et d'alcool (ainsi que les troubles liés à la consommation d'alcool), bien qu'en baisse, est supérieure à la moyenne de l'OCDE (cibles 3.5 et 3.a). À l'inverse, l'obésité reste inférieure à la moyenne de l'OCDE, mais elle est en augmentation (cible 2.2). Néanmoins, le taux de mortalité attribué aux maladies cardiovasculaires, au cancer, au diabète ou aux maladies respiratoires chroniques reste bien inférieur à la moyenne de l'OCDE, ce qui témoigne de l'efficacité des politiques de prévention (cible 3.4).

La lutte contre l'inégalité des chances exige davantage d’efforts. Il est possible d'améliorer le cadre juridique visant à favoriser l'égalité entre les sexes (cibles 5.1 et 5.3), et les femmes sont sous-représentées dans les sphères publiques et économiques (cibles 5.5 et 16.7) – environ un tiers des postes de cadres supérieurs et intermédiaires sont occupés par des femmes. En Suisse, les femmes consacrent toujours plus de temps que les hommes aux tâches familiales et domestiques non rémunérées, bien que l'écart soit inférieur à la moyenne de l'OCDE d'une demi-heure (cible 5.4). Au-delà de l'inégalité entre les sexes, l’impact du milieu socio-économique semble être plus étroitement lié à la réussite scolaire qu'il ne l'est dans de nombreux autres pays de l'OCDE (cible 4.5). La redistribution des revenus par le biais des impôts et des transferts reste limitée, mais le taux d'emploi élevé et les courtes périodes de chômage permettent à la Suisse de bénéficier d'un taux de pauvreté monétaire inférieur à la moyenne de l'OCDE. Au-delà des frontières nationales, l'aide publique au développement de la Suisse reste inférieure à l'objectif de 0.7 % du RNB, mais elle est supérieure à la moyenne de l'OCDE (cible 17.2). Comme dans de nombreux pays de l'OCDE, les coûts élevés de transaction des envois de fonds effectués par les immigrés limite leur plein potentiel sur les pays bénéficiaires (cible 10.c).

Comme dans de nombreux autres pays de l'OCDE, la disponibilité des données reste un obstacle lorsqu'il s'agit de mesurer les distances par rapport aux cibles (voir le chapitre de synthèse pour plus de détails). Pour la Suisse, les données disponibles au niveau des différents indicateurs permettent de couvrir 121 des 169 cibles. Comme indiqué dans le Graphique 2, la couverture des indicateurs est inégale selon les 17 objectifs. Si la plupart des cibles de six objectifs (dans les catégories Peuples, Planète et Prospérité) sont couvertes (avec une couverture des indicateurs supérieure à 80 %), la couverture est plus faible pour l'objectif 11 sur les villes et l'objectif 13 sur l'action climatique, avec seulement 60 % des cibles couvertes, et pour l'objectif 14 sur la vie aquatique – la Suisse étant un pays enclavé, certaines cibles de l'objectif 14 ne s'appliquent pas. Les lacunes dans les données sont plus flagrantes en ce qui concerne les indicateurs de performance, à l'exclusion de ceux qui fournissent des informations contextuelles. Dans ce cas, la couverture ne dépasse 80 % que pour deux objectifs, à savoir l'objectif 3 sur la santé et l'objectif 10 sur la réduction des inégalités. En outre, pour sept objectifs, principalement dans la catégorie Planète (objectifs 12, 13, 14 et 15) mais aussi pour les objectifs 5 sur l'égalité des sexes, 11 sur les villes, 16 sur la paix et 17 sur les partenariats, les données sont insuffisantes pour suivre les avancées accomplies pour plus de deux cibles sur trois.

Si certaines cibles des ODD sont, en moyenne, sur le point d'être atteintes, les performances sont très inégales entre les 17 Objectifs du Programme 2030 pour le développement durable. Le Tableau 1 présente une vue d'ensemble des progrès de la Suisse vers les cibles, sur la base des données disponibles pour chacun des 17 Objectifs. Il montre que les distances par rapport aux cibles et les tendances dans le temps diffèrent considérablement, même si l'on considère un objectif spécifique.

Le rapport de l’OCDE Mesurer la distance à parcourir pour atteindre les cibles des ODD évalue la distance que les pays de l'OCDE doivent parcourir pour atteindre les cibles des ODD pour lesquelles des données sont actuellement disponibles. Il cherche également à déterminer si les pays se rapprochent ou s'éloignent des cibles, et s'ils sont susceptibles de respecter leurs engagements d'ici à 2030, sur la base d'une analyse des tendances récentes et de la volatilité observée des différents indicateurs.

Comme la plupart des auteurs et des organisations internationales, ce rapport adopte un modèle de croissance géométrique plutôt simple pour évaluer la direction et le rythme des changements récents dans le contexte des ODD. Cependant, plutôt que de faire des estimations directes de la valeur de l'indicateur d'ici à 2030, il modélise la probabilité d'atteindre un niveau donné en utilisant une simulation de Monte-Carlo.

Si le rapport propose une vue d'ensemble de la situation actuelle des pays de l'OCDE dans leur ensemble, les profils par pays fournissent quant à eux plus de détails sur les performances et la disponibilité des données pour chaque pays.

Pour progresser vers la réalisation des ODD, il est indispensable d'appréhender parfaitement les points forts et les points faibles des pays au regard des 169 cibles du Programme 2030. Le Graphique 1 montre la progression actuelle (cercle intérieur ; plus la barre est longue, plus la distance qui reste à parcourir est courte) et indique en outre si les pays de l’OCDE sont en bonne voie (ou progressent tout du moins) pour accomplir leurs engagements d’ici 2030 (cercle extérieur).

La longueur de chaque barre indique le niveau actuel de progression vers chaque cible. Comme indiqué dans l’annexe méthodologique, la distance des pays par rapport à la cible est mesurée comme « l’écart normalisé » entre la situation actuelle d’un pays et la cible à atteindre. Pour chaque indicateur, l’unité de mesure normalisée correspond à l’écart-type observé entre les pays de l’OCDE au cours de l’année de référence (c’est-à-dire l’année la plus proche de 2015). Par conséquent, plus la barre est longue, plus la distance restant à parcourir pour atteindre la cible d'ici 2030 est courte. Les couleurs des barres se rapportant aux différentes cibles font référence aux objectifs auxquels elles se rapportent.

Le cercle extérieur montre les performances des pays de l'OCDE dans le temps et la probabilité qu'ils atteignent les différentes cibles d'ici à 2030, en se fondant sur les tendances observées pour les différents indicateurs. Il utilise les couleurs des feux de signalisation pour classer la progression vers la cible :

  • sont désignés en vert les pays qui (en fonction de l’évolution récente des différents indicateurs) devraient atteindre la cible en 2030 s’ils maintiennent leur rythme de progression actuel (ce qui signifie que plus de 75 % des projections (aléatoires) pointent vers une cible atteinte) ;

  • sont désignés en jaune les pays dont le rythme de progression actuel est insuffisant pour atteindre la cible d’ici à 2030 (ce qui signifie que moins de 75 % des projections aléatoires atteignent la cible, tandis que le coefficient de corrélation entre l’indicateur et l’année est élevé et statistiquement significatif, ce qui donne à penser qu’une tendance pourrait être dégagée) ; et

  • sont désignés en rouge les pays qui ont stagné dernièrement ou qui se sont éloignés de la cible (ce qui signifie que moins de 75 % des projections aléatoires atteignent la cible, et que le coefficient de corrélation entre l’indicateur et l’année est faible ou non statistiquement significatif, donnant à penser qu’aucune tendance statistique ne peut être dégagée).

Afin d'aider ses pays membres à s'orienter dans le Programme 2030 et à fixer leurs propres priorités d'action, ce rapport s'appuie sur une méthodologie unique pour mesurer la distance que les pays de l'OCDE doivent parcourir pour atteindre les cibles des ODD. L'identification des principaux points forts et défis proposés ici repose uniquement sur les performances actuelles :

  • Une cible est considérée comme un point fort lorsque la distance par rapport à la valeur finale de la cible est inférieure à 0.5 unité normalisée (c’est-à-dire que la distance est considérée comme faible), ou lorsque le pays est plus proche de la cible que la moyenne de l’OCDE. Par exemple, alors que la distance de la Corée par rapport à la cible 2.2 sur la malnutrition est de 1.4 unité normalisée (c'est-à-dire classée dans la catégorie des distances moyennes), la distance moyenne de l'OCDE est de 2.5 unités normalisées. Par conséquent, la cible 2.2 est considérée comme un point fort pour la Corée.

  • Une cible est considérée comme un défi lorsque la distance à la cible est supérieure à 1.5 unité normalisée (c’est-à-dire que la distance est considérée comme grande), ou lorsque le pays est plus loin de la cible que la moyenne de l’OCDE. Par exemple, la distance de l’Estonie par rapport à la cible 4.2 sur l’éducation préscolaire est de 1.1 unité normalisée (soit une distance moyenne), ce qui est supérieur à la distance moyenne de l’OCDE, à 0.24 unité normalisée. La cible 4.2 est donc considérée comme un défi pour la Corée.

Le manque de séries chronologiques cohérentes empêche souvent une évaluation exhaustive des tendances, mais celles-ci sont néanmoins étudiées lorsqu'elles sont disponibles et pertinentes, pour nuancer l'évaluation des performances actuelles.

Au total, ce rapport s'appuie sur 537 séries de données pour 183 des 247 indicateurs énumérés dans le cadre mondial d'indicateurs (ou pour de proches substituts de ces indicateurs). Ces indicateurs couvrent 134 des 169 cibles des ODD. Cependant, la couverture des cibles est inégale selon les 17 objectifs et les pays membres de l’OCDE.

Le Graphique 2 résume la disponibilité des données :

  • Les barres bleu foncé indiquent la part des cibles pour lesquelles au moins un indicateur (y compris les indicateurs fournissant des informations contextuelles) est disponible.

  • Les barres bleu clair indiquent la part des cibles pour lesquelles il existe, dans le ou les indicateur(s) disponible(s), des indicateurs ayant une orientation normative claire (c'est-à-dire permettant de distinguer les bonnes et les mauvaises performances), qui sont les seuls utilisés pour mesurer les distances par rapport aux cibles.

  • Les barres bleu moyen indiquent la part des cibles pour lesquelles les progrès dans le temps peuvent être évalués (c'est-à-dire qu'au moins trois observations sont disponibles sur une période de cinq ans).

Tous les concepts et méthodes sont présentés plus en détail dans l’annexe méthodologique.

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