Résumé

L’édition 2021 des Perspectives des transports du FIT présente les scénarios retenus pour étudier comment la demande mondiale en transport de voyageurs et de marchandises, tous modes confondus, évoluera au cours des trois prochaines décennies, jusqu’en 2050. Les projections de l'évolution des émissions de CO2 qui y sont détaillées pour différentes conditions donnent une idée des répercussions que les activités de transport de demain pourraient avoir sur le changement climatique.

Le champ de l’analyse inclut notamment l’incidence de la pandémie de Covid-19 sur les systèmes de transport et le rôle de ces derniers dans l'équité sociale et le bien-être humain. Dans les scénarios de modélisation, les changements que la pandémie pourrait entraîner à long terme sont reliés aux facteurs freinant ou favorisant la décarbonation des transports. Enfin, les Perspectives des transports définissent les actions essentielles de la part des pouvoirs publics pour que, dans le sillage de la pandémie, une mobilité durable s’installe de manière efficace et équitable à l’échelle urbaine, régionale et mondiale.

L’exercice de modélisation a porté sur trois scénarios. Recover correspond à l’extrapolation, jusqu’en 2050, des efforts actuellement déployés dans le monde. Reshape repose sur l’hypothèse que les pouvoirs publics engageront d’ambitieuses politiques de décarbonation en complément des mesures en place. Dans le scénario Reshape+, ils s’emploient de surcroît à tirer parti des opportunités de décarbonation des transports créées par la pandémie de Covid-19.

Sur la trajectoire actuelle, l'activité totale des transports aura plus que doublé en 2050 par rapport à 2015. Le volume du transport de voyageurs aura été multiplié par 2.3, et celui de fret par 2.6. La demande totale devrait donc croître plus lentement qu’initialement annoncé dans l’édition précédente des Perspectives, qui prévoyait une multiplication par trois de son volume. Les projections de croissance économique revues à la baisse et les nouveaux engagements de décarbonation pris en 2018/19 en sont la principale explication. Une fois passé la pandémie de Covid-19, l'évolution de la demande de transport suivra le chemin incertain de la reprise, d'où la difficulté d'établir des projections robustes. Néanmoins, la demande est globalement appelée à grimper sous l’effet conjugué de la poursuite du développement des économies et de la croissance démographique.

Les politiques de décarbonation actuellement mises en œuvre dans les transports ne suffiront pas pour orienter le transport de voyageurs et de marchandises sur une voie durable. La réalisation de tous les engagements contractés jusqu’ici n’empêchera pas les émissions de CO2 imputables aux transports de croître de 16 % d'ici à 2050, dans la mesure où les effets des réductions d'émission attendues seront largement atténués par la hausse de la demande de transport.

À l’inverse, des politiques plus ambitieuses de décarbonation des transports pourraient faire diminuer les émissions de près de 70 % par rapport aux niveaux de 2015, ce qui rendrait dès lors possible de limiter à 1.5 °C le réchauffement planétaire, tel que prévu dans l’Accord de Paris. Il s'agirait donc d’intervenir davantage et de façon mieux ciblée pour réduire les déplacements non nécessaires, déplacer l’activité de transport vers des modes plus durables, améliorer l’efficacité énergétique et généraliser rapidement l’utilisation des véhicules électriques et des carburants bas carbone.

Avec d’ambitieux programmes de décarbonation, les villes pourraient abaisser les émissions de CO2 liées à la mobilité urbaine jusqu’à 20 % des niveaux de 2015. Leur forte densité de population de services et d'infrastructures les positionnent en première ligne pour adopter des solutions de transport à émissions limitées ou nulles et instaurer un système efficace de gestion de la demande qui réduirait de 22 % l'activité de transport urbain par rapport au niveau escompté sur la trajectoire actuelle.

Le transport régional et interurbain est difficile à décarboner. Pourtant, avec les bonnes politiques, il serait possible de diviser par deux ses émissions de CO2 d’ici à 2050, par rapport aux niveaux de 2015. La demande en transport aérien, automobile sur longues distances ou ferroviaire régional est plus difficile à contrôler que la demande de mobilité urbaine. Toutes les mesures prises pour la déplacer, lorsque cela est possible, vers des modes durables, des technologies basse consommation et des carburants améliorés doivent contribuer à enrayer la hausse tendancielle des émissions liées au transport non urbain de voyageurs.

S'agissant du transport de marchandises, l’essor de l’activité impose que l’on s'attache davantage à décarboner ce secteur. Avec les politiques en place, il émettra, en valeurs absolues, 22 % de CO2 de plus en 2050 qu’en 2015 et sa part continuera de croître, quoique lentement, dans le total des émissions liées aux transports. À l’inverse, ses émissions pourraient être inférieures de 72 % aux niveaux de 2015 si des mesures étaient prises pour stimuler le groupage de fret, renforcer la collaboration dans les chaînes logistiques, faire avancer la normalisation et promouvoir les technologies bas carbone à l’échelle sectorielle.

Encourager l’évolution des comportements et tirer parti des plans de relance post-pandémie pour accélérer la décarbonation des transports hâtera le passage à une mobilité durable. En couplant la reprise économique avec la décarbonation des transports, on serait en position d'atteindre plus rapidement et de façon plus certaine les objectifs climatiques définis dans l’Accord de Paris.

Il ne faut pas que les politiques de décarbonation pèsent exagérément sur certains citoyens. Il est essentiel de les mettre en œuvre avec soin afin d'éviter tout effet redistributif néfaste. En effet, ce sont surtout les groupes et les régions les moins bien lotis qui font les frais du changement climatique et qui pâtissent des choix de mobilité opérés par les segments les plus aisés de la population. L'action menée contre le changement climatique doit renforcer l'équité sociale, et non aggraver le sort des personnes vulnérables. C’est en s’employant davantage à améliorer l’accessibilité que l’on réussira à la fois à rendre la mobilité plus efficace, et partant moins polluante, et à faciliter l’accès des citoyens aux ressources.

Au sortir de la pandémie, les politiques de transport devraient répondre à un objectif triple : soutenir la reprise économique, réduire les atteintes à l’environnement et garantir le caractère juste et équitable des résultats sociétaux. Ainsi, l’adhésion du public à ces interventions importantes pourra être obtenue, et l’exécution sera en outre plus rentable, facile et rapide. La sortie de la crise liée au Covid-19 procure une chance unique de conjuguer développement économique, transformation des comportements de mobilité et utilisation à grande échelle des technologies bas carbone, tout en augmentant les possibilités offertes à nos citoyens. La saisir implique d'améliorer la situation en matière d'accès grâce à de meilleures solutions de mobilité.

Avec les politiques en place, les émissions de CO2 liées aux transports continueront immanquablement de croître. Sous l’effet conjugué de la croissance démographique mondiale et du développement de la prospérité, la demande de transport progressera plus vite que les réductions d’émissions prévisionnelles. Avec les bonnes politiques, il est néanmoins possible de rompre le lien entre croissance économique et émissions des transports. En effet, il convient d’instaurer les incitations nécessaires pour éviter les déplacements non indispensables, reporter la mobilité vers des modes durables et perfectionner les technologies des véhicules et les carburants de substitution. Lorsqu’en 2021, les États réviseront leurs Contributions Déterminées au niveau National au titre de l’Accord de Paris, ils devront se fixer des objectifs chiffrés ambitieux, les assortir de mesures concrètes et les consolider en accélérant et en approfondissant la décarbonation des transports à la faveur des plans de relance post-Covid-19.

Chaque composante du secteur des transports nécessite sa propre stratégie de décarbonation et applique différemment les principes « éviter, changer, améliorer ». Ainsi, dans le transport urbain de voyageurs, il est possible de fortement réduire les émissions en raccourcissant les trajets, en proposant des modes non motorisés et en portant à des niveaux élevés la fréquentation des transports en commun. Dans le cas des transports régionaux et interurbains, en revanche, la décarbonation devra reposer davantage sur les évolutions technologiques, en prenant en compte les difficultés entourant la gestion du transport non urbain. Dans le transport de marchandises, la réduction de la demande et des émissions passera par les technologies bas carbone, le groupage, le raccourcissement des chaînes logistiques, la révolution numérique et la normalisation des procédés et technologies.

Les progrès technologiques sont indispensables pour réellement décarboner les transports, en particulier dans les domaines où l’exercice est particulièrement ardu. Abaisser la consommation d’énergie associée aux déplacements motorisés suppose d'investir dans des véhicules et carburants moins polluants. Un renchérissement des transports à forte intensité de carbone facilitera un glissement vers les solutions bas carbone. L’investissement dans les infrastructures de recharge des véhicules routiers renforcera le crédit accordé aux véhicules à émission zéro, de même que les primes à l’achat peuvent accélérer la transition en mettant la mobilité propre à la portée de toutes les bourses. L’innovation par le numérique permettra de gagner en efficacité dans l’exploitation des transports publics, les autres services de mobilité partagée et les activités de logistique de marchandises.

En s'attachant principalement, non plus à accroître la mobilité, mais à améliorer l’accessibilité, les pouvoirs publics obtiendront un bilan plus satisfaisant concernant différents objectifs (par exemple, atténuation du changement climatique, développement durable et bien-être). Les planificateurs des transports ont tendance à confondre capacités accrues et accessibilité améliorée. Or, ce n’est pas parce que les trajets se multiplient et s'allongent que les destinations deviennent pour autant faciles à atteindre. Pour être utile aux citoyens, la planification des transports doit tenir compte des destinations privilégiées et s’intéresser en premier lieu à la qualité de la connectivité.

La décarbonation des transports est indissociable de l’évolution des autres secteurs. Surtout, la mobilité ne peut être durable qu’en présence d'une production d’énergie propre. Sans système de production d’énergie vert, les véhicules électriques seront toujours à l’origine d’émissions. De même, l’existence de transports bas carbone est fondamentale pour rendre les échanges et le tourisme durables. La transformation numérique des services de transport permet d'organiser le trafic de manière plus efficace, de mutualiser les actifs et de disposer de données plus utiles à la prise de décisions. Afin que les nouveaux services de mobilité produisent un maximum de bienfaits sociaux pour des coûts externes minimums, il est impératif que les pouvoirs publics et les acteurs privés coopèrent étroitement sur ces nouveaux marchés. Enfin, en associant intimement les décisions foncières avec la planification des transports, il est possible d'amoindrir la demande en transports tout en améliorant l'accessibilité citoyenne.

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