12. Union européenne

Les réformes menées par l’Union européenne (UE)1 dans les années 1990 et au début des années 2000 ont entraîné une baisse significative du soutien à l’agriculture, avec des mesures moins susceptibles de fausser la production et les échanges. Depuis 2010, le soutien de l’UE aux producteurs représente une part stable des recettes agricoles brutes : 16 % en 2020-22, proche de la moyenne OCDE.

Bien que plusieurs secteurs continuent de bénéficier de mesures de protection commerciale (notamment à travers des licences d’importation et d’exportation, des contingents tarifaires et des clauses de sauvegarde spéciale), les transferts susceptibles de fausser le marché ont nettement reculé au cours des vingt dernières années. En 2020-22, le soutien des prix du marché (SPM) représentait 16 % du soutien aux producteurs, loin des 46 % de 2000-02.

La majeure partie du soutien aux producteurs est de nature budgétaire, principalement sous la forme de paiements directs découplés. En moyenne, près de la moitié du soutien budgétaire accordé en 2020-22 était fondée sur les droits antérieurs, environ 29 % sur le niveau effectif des superficies cultivées ou sur le nombre d’animaux en élevage, et 20 % sur l’utilisation d’intrants. De plus, 61 % des paiements aux producteurs étaient subordonnés au respect d’obligations environnementales, et 12 % ont été versés au titre de la participation volontaire à des dispositifs agroenvironnementaux dépassant les exigences obligatoires.

En 2020-22, les dépenses consacrées aux services d’intérêt général (estimation du soutien aux services d’intérêt général, ESSG) dans le secteur équivalaient en moyenne à 12.9 % du soutien total, ou 2.8 % de la valeur de la production agricole, un chiffre en baisse par rapport à 2000-02 et inférieur à la moyenne OCDE. Au cours des vingt dernières années, les dépenses consacrées aux systèmes de connaissances et d’innovation agricoles ont augmenté et leur part dans l’ESSG est passée de 42 % en 2000-02 à 52 % en 2020-22. Leur valeur en pourcentage de celle de la production s’est maintenue à 1.5 %, ce qui est supérieur à la moyenne de l’OCDE. La part des dépenses de commercialisation et promotion a également augmenté, contrairement à celle du soutien au développement et à l’entretien des infrastructures et du stockage public, qui a diminué au cours de la même période.

Le soutien total au secteur a diminué en pourcentage durant les deux dernières décennies. En 2020-22, il était estimé à 0.6 % du produit intérieur brut (PIB), contre 1 % en 2000-02.

La Politique agricole commune (PAC) 2023-27 est entrée en vigueur au mois de janvier 2023. La nouvelle PAC s’accompagne d’un nouveau modèle de mise en œuvre qui offre aux États membres davantage de souplesse que les précédentes réformes de la PAC. La PAC 2023-27 s’articule autour de dix objectifs spécifiques, qui servent de base aux États membres de l’UE pour élaborer leurs Plans stratégiques nationaux (PSN PAC). En 2022, le processus d’approbation des PSN PAC a concentré l’essentiel de l’action publique dans le secteur agricole. Après une série de consultations bilatérales entre la Commission européenne et chacun des États membres, les 28 PSN PAC2 ont été examinés et officiellement approuvés entre août et décembre 2022. Dans son PSN PAC, chaque pays propose des interventions correspondant aux deux piliers de la PAC et s’engage à consacrer 32 % des fonds publics reçus (soit près de 98 milliards EUR ou 103 milliards USD au total) à l’obtention de retombées environnementales positives dans les domaines du climat, de l’eau, des sols, de l’air, de la biodiversité et du bien-être des animaux.

En 2022, les politiques de l’UE visaient également à atténuer les effets de l’augmentation des prix alimentaires et du coût des intrants pour les agriculteurs et les consommateurs, qui était amplifiée par la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Ainsi, l’UE a pris une série d’initiatives, notamment des mesures d’assouplissement de la PAC, des mesures de marché exceptionnelles, des mesures de soutien direct et la mise en place de deux cadres temporaires successifs relatifs aux aides d’État. En outre, chaque État membre de l’UE a adopté ses propres mesures, notamment sous la forme d’avantages fiscaux, d’aide à l’investissement et d’allocations versées aux consommateurs et aux ménages d’agriculteurs, en vue d’aider ces derniers ainsi que les entreprises agroalimentaires à faire face aux conséquences financières de la crise. Enfin, à la suite de l’expérience récente du COVID-19 et de la guerre en Ukraine, la Commission européenne et les gouvernements nationaux ont adopté un certain nombre de mesures visant à renforcer la résilience générale du secteur agricole et alimentaire face aux crises éventuelles. En outre, dans le cadre de ses initiatives de solidarité avec l’Ukraine, l’UE a adopté des mesures destinées à favoriser les échanges et accueilli une part importante des exportations céréalières ukrainiennes, ce qui a aussi posé quelques problèmes de mise en œuvre dans certains États membres voisins du fait de la hausse du volume des échanges.

Les négociations visant à mettre en place un accord commercial exhaustif et ambitieux avec la Nouvelle-Zélande et un accord d’association modernisé avec le Chili ont abouti en 2022. Il s’agit des deux premiers accords à comporter une section consacrée aux systèmes alimentaires durables.

  • En 2021, l’adoption par l’UE d’une stratégie pour l’adaptation au changement climatique a marqué une étape dans l’amélioration des connaissances relatives aux conséquences du changement climatique et dans l’élaboration de solutions d’adaptation à l’échelle de l’UE. Contrairement au cadre d’action pour l’atténuation, cette stratégie n’impose aucune cible ou exigence d’adaptation aux États membres, ce qui rend difficile le suivi des initiatives. Il convient de chercher d’éventuelles synergies entre les diverses politiques en vigueur au sein de l’UE (comme celles relatives à la gestion des risques d’inondation) et les politiques agricoles. Les mesures d’adaptation prises dans l’UE tendent à profiter directement aux entreprises agricoles (soutien à des systèmes d’irrigation plus économes en eau, par exemple) et mériteraient d’être axées sur la préparation en général et la recherche de bénéfices publics (par exemple, des pratiques de gestion des terres susceptibles de réduire les risques d’inondation).

  • Si les mesures de la PAC contiennent peu de références explicites à l’adaptation au changement climatique, plusieurs d’entre elles peuvent contribuer à l’adaptation du secteur agricole. Pour que la PAC réponde plus efficacement aux enjeux de l’adaptation, il conviendrait d’accorder la priorité à des mesures de soutien ciblant le transfert de connaissances et la restauration préventive des écosystèmes, en accord avec les grands défis identifiés dans la stratégie de l’UE pour l’adaptation au changement climatique.

  • Des efforts ont été déployés pour améliorer l’équité et mieux répartir les paiements directs entre les producteurs. Toutefois, ces paiements ne ciblent pas les ménages agricoles à faible revenu et ne constituent pas toujours l’outil le plus efficace pour atteindre les objectifs socioéconomiques et de productivité. Les objectifs de soutien des revenus devraient être atteints au moyen de paiements ciblant davantage les ménages agricoles modestes, non seulement dans un souci d’efficacité accrue, mais aussi afin de libérer davantage de fonds pour financer les paiements facultatifs au titre des services environnementaux et l’investissement dans l’innovation et la résilience.

  • Afin de garantir l’adoption de pratiques agricoles durables par les agriculteurs de l’UE, les paiements directs sont soumis à un certain nombre de conditions environnementales. Toutefois, certains aspects de leur conception et de leur mise en œuvre, comme les carences dans le suivi et les nombreuses dérogations, limitent l’efficacité des mécanismes qui visent à promouvoir la fourniture de biens publics ou à réduire les externalités environnementales. Des efforts devraient être déployés pour améliorer le ciblage des mesures en faveur de la durabilité environnementale. Pour renforcer l’efficacité des politiques et offrir aux agriculteurs des sources de revenus supplémentaires, les dispositifs fonctionnant sur la base du volontariat devraient être remplacés par des paiements pour services environnementaux pluriannuels et liés aux résultats.

  • Malgré d’importants progrès en matière de réformes, les modalités d’aide susceptibles d’entraîner le plus de distorsions constituent encore près du quart du soutien aux producteurs. Bien que prometteuses, les nouvelles approches et priorités de la PAC 2023-27 ne suffiront pas à atteindre les objectifs ambitieux du pacte vert pour l’Europe. Ce dernier nécessite des réformes plus poussées, telles que la suppression progressive des derniers dispositifs de soutien des prix du marché et des paiements présentant un risque important de dégradation de l’environnement et de distorsion des marchés et des échanges.

  • La croissance de la productivité agricole reste limitée et l’innovation représente encore une faible part des dépenses de la PAC, bien que certaines évolutions récentes témoignent de l’importance grandissante de l’innovation et de l’échange de connaissances. Parmi les avancées positives, on peut notamment citer la création de nouveaux partenariats européens ayant trait à l’agriculture et aux systèmes alimentaires dans le cadre du programme Horizon Europe, ainsi que l’ajout de sections spécifiquement consacrées aux systèmes de connaissances et d’innovation agricoles dans l’ensemble des PSN PAC pour 2023-27. Néanmoins, le secteur profiterait sans doute d’une panoplie de mesures agricoles accordant une plus grande place au soutien à l’innovation, ainsi que d’initiatives d’innovation agricole davantage axées sur la durabilité environnementale.

  • L’UE et ses États membres ont agi rapidement pour lutter contre les conséquences économiques négatives de la guerre en Ukraine sur le secteur agroalimentaire européen. Pour l’essentiel, leurs mesures de soutien ont pris la forme de paiements directs aux agriculteurs destinés à amortir le choc, mais ils ont aussi adopté certaines dispositions pour renforcer la résilience à long terme des chaînes d’approvisionnement alimentaire de l’UE. On peut notamment citer la cartographie des risques et des vulnérabilités, entreprise par le mécanisme européen permanent de préparation et de réaction aux crises de sécurité alimentaire (EFSCM), ainsi que le soutien à l’investissement dans les exploitations accordé par les États membres de l’UE pour réduire la dépendance des entreprises agricoles à des intrants tels que l’énergie et les engrais. Alors que la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a placé la sécurité alimentaire au premier rang des priorités politiques, l’UE devrait s’assurer que les dérogations aux règles environnementales ne deviennent pas une solution permanente et ne contreviennent pas aux objectifs environnementaux.

  • Les crises récentes mettent en lumière la nécessité d’assurer un suivi des chaînes d’approvisionnement et des marchés des États membres, ainsi que de coordonner les initiatives à long terme. Les panoplies de mesures adoptées devraient être équilibrées et tenir compte des objectifs ayant trait au système alimentaire de l’UE dans son ensemble. Elles devraient aller au-delà des mesures d’urgence et inciter les entreprises agroalimentaires à s’adapter et à se transformer pour renforcer leur résilience face aux chocs à venir.

Notes

← 1. Pour 2020, les estimations comprennent le Royaume-Uni. Bien que le pays soit sorti de l’Union européenne le 31 janvier 2020, les dépenses agricoles britanniques de 2020 ont été encore en grande partie financées par la Commission européenne, et le Royaume-Uni a continué de faire partie du marché commun en 2020.

← 2. Chacun des 27 États membres de l’UE possède un PSN PAC, sauf la Belgique où la Région flamande et la Région wallonne ont chacune le leur, d’où le nombre total de 28 plans.

Mentions légales et droits

Ce document, ainsi que les données et cartes qu’il peut comprendre, sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de tout territoire, ville ou région. Des extraits de publications sont susceptibles de faire l'objet d'avertissements supplémentaires, qui sont inclus dans la version complète de la publication, disponible sous le lien fourni à cet effet.

© OCDE 2023

L’utilisation de ce contenu, qu’il soit numérique ou imprimé, est régie par les conditions d’utilisation suivantes : https://www.oecd.org/fr/conditionsdutilisation.