Efficacité politique interne et externe
Les attitudes politiques sont une composante décisive des systèmes de croyance des individus et se rapportent à un sentiment persistant ou à un état d’esprit ou un état émotionnel durables avec lesquels les individus abordent les problèmes ou les situations politiques. Avec la confiance, l’efficacité politique est l’un des indicateurs les plus pertinents de l’état général des régimes démocratiques. Plus les individus se sentent en mesure de comprendre la politique et de faire entendre leur voix, plus ils sont susceptibles de suivre des pratiques démocratiques.
L’efficacité politique a trait au « sentiment selon lequel l’action politique a, ou peut avoir, une incidence réelle sur le processus politique ». Cette définition couvre deux aspects : l’efficacité interne, à savoir la perception qu’a un individu de sa propre capacité ou compétence à comprendre les processus politiques et à y participer ; et l’efficacité externe, à savoir le sentiment qu’ont les citoyens d’avoir leur mot à dire sur l’action gouvernementale.
L’efficacité interne est généralement vue comme un facteur expliquant la participation politique. De plus, le sentiment d’efficacité personnelle et d’implication des citoyens permet de prédire la confiance dans les pouvoirs publics et le parlement, ainsi que la satisfaction à l’égard de la démocratie. Selon les données de l’enquête sociale européenne (ESS), en 2018, 35 % seulement de la population, en moyenne, ont déclaré se sentir confiants dans leur capacité à participer à la vie politique dans 22 pays de l’OCDE. La situation varie toutefois selon les pays, les pourcentages s’échelonnant de 60 % en Norvège, un pays avec une solide réputation en termes de participation démocratique, à 14 % en République tchèque, une démocratie plus récente. La moyenne de l’OCDE a légèrement augmenté entre 2016 et 2018 (2 points de pourcentage). Les hausses les plus marquées sont intervenues en Pologne (5.2 points de pourcentage) et aux Pays-Bas (4.6 points de pourcentage), les replis les plus prononcés en Hongrie (6.3 points de pourcentage) et en France (2.9 points de pourcentage) (graphique 13.4).
L’efficacité externe est déterminante en ce qui concerne la légitimité des institutions publiques car elle évalue dans quelle mesure les citoyens jugent le système réactif à leurs demandes. Les données des enquêtes ESS et World Values Survey (WVS) montrent qu’en moyenne moins de la moitié des citoyens (40 %) de 26 pays de l’OCDE estiment que le régime politique national permet « aux personnes comme elles » de se prononcer sur l’action gouvernementale, chiffre en progression de 1.7 points par rapport à 2016. Les résultats varient considérablement selon les pays, ce taux étant compris entre 74 % environ en Suisse et 15 % à peine en Italie. Au cours de la période 2016-18, le pourcentage de personnes jugeant avoir leur mot à dire sur l’action gouvernementale a accusé ses plus fortes hausses (11.2 points de pourcentage) en Pologne, qui a vécu une alternance au pouvoir après 8 ans, et en Estonie (10.7 points de pourcentage). À l’inverse, les reculs les plus sensibles du niveau d’efficacité externe ont été enregistrés au Royaume-Uni (4.6 points de pourcentage) et en Allemagne (2.5 points de pourcentage) (graphique 13.5).
L’efficacité externe est étroitement associée à la satisfaction à l’égard de la démocratie et à la confiance envers les institutions publiques (González, 2020). Une réactivité faible ou décroissante du système pourrait donner à penser que celui-ci fonctionne dans l’intérêt de quelques-uns, alimentant ainsi le désenchantement et le cynisme politique. De fait, selon les données de l’Enquête sociale européenne pour 22 pays de l’OCDE, la corrélation entre l’efficacité externe et la satisfaction à l’égard de la démocratie est forte et positive (Graphique 13.6). Les pays qui affichent les niveaux d’efficacité externe les plus élevés sont ceux où la majorité de la population se déclare satisfaite de la façon dont la démocratie fonctionne, comme la Suisse ou la Norvège. Au contraire, dans des pays comme l’Italie, la Slovénie ou la Lettonie, de faibles niveaux d’efficacité externe vont de pair avec un taux de satisfaction à l’égard de la démocratie globalement inférieur (graphique 13.6).
L’Enquête sociale européenne (ESS) est une enquête internationale conduite depuis 2001. Elle se déroule tous les deux ans sous forme d’entretiens en face à face de manière à obtenir un échantillon de taille réelle de 1 500 personnes au moins. Pour les petits pays (moins de 2 millions d’habitants), ce chiffre est ramené à 800.
L’enquête World Value Survey (WVS) a été créée en 1981. Sa 7e vague est menée à l’échelle mondiale de 2017 à 2021, et comporte les mêmes questions relatives à l’efficacité politique externe que l’ESS. Les échantillons utilisés sont des échantillons aléatoires représentatifs de la population adulte. La taille d’échantillon courante est de 1 300 personnes. Les pays dont la population est plus importante et diversifiée utilisent des échantillons comptant entre 1 500 et 5 000 personnes. Dans les pays de moins de 2 millions d’habitants, l’échantillon est de 1 000 personnes.
Pour en savoir plus
González, S. (2020), « Testing the evidence, how good are public sector responsiveness measures and how to improve them? », OECD Working Papers on Public Governance, n° 38, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/c1b10334-en.
Prats, M. et A. Meunier (2021), « Political efficacy and participation: an empirical analysis in European countries », OECD Working Papers on Public Governance, n° 46 Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/4548cad8-en.
Notes relatives aux graphiques
13.4 Les scores pour 2016 et 2018 rendent compte du pourcentage d’enquêtés ayant répondu « assez confiant », « très confiant » ou « tout à fait confiant » à la question : « Dans quelle mesure êtes-vous confiant dans votre capacité à participer à la vie politique ? ». Les réponses « pas du tout confiant » et « peu confiant » ne sont pas présentées.
13.5 Les scores correspondent au pourcentage de personnes ayant répondu « un peu », « beaucoup » ou « complètement » à la question : « Dans quelle mesure diriez-vous que le système politique en [pays] permet aux personnes comme vous d’avoir leur mot à dire sur ce que fait le gouvernement ? ». Les données pour l’Australie, la Colombie, le Japon, le Mexique et la Nouvelle-Zélande sont issues de l’enquête WVS. Les moyennes sont établies à partir des données de l’ESS.
13.6 Les données se réfèrent au pourcentage de personnes ayant répondu 5 ou plus sur une échelle allant de 0 (extrêmement insatisfait) à 10 (extrêmement satisfait) à la question : « Dans l’ensemble, dans quelle mesure êtes-vous satisfait du fonctionnement de la démocratie dans votre pays ? ».