6. Canada

Depuis la fin des années 80, le Canada a considérablement réduit le soutien à l’agriculture. Le soutien aux producteurs en pourcentage des recettes agricoles brutes a été diminué de moitié entre 1986-88 et 2000-02, en grande partie parce que le soutien des prix du marché (SPM) à l’industrie céréalière a cessé en 1995. Le soutien aux producteurs a été de nouveau divisé par deux entre 2000-02 et 2018-20, et représente maintenant 9 % des recettes agricoles brutes – environ la moitié de la moyenne OCDE.

Malgré les réductions passées, le soutien des prix du marché est prédominant dans le soutien aux producteurs (même s’il est limité aux secteurs du lait, de la volaille et des œufs, où l’offre reste régulée), les prix étant maintenus au-dessus des cours mondiaux par des droits de douane, des quotas de production et des mécanismes de fixation des prix intérieurs. Le lait, en particulier, bénéficie de transferts au titre d’un seul produit élevés, qui représentent 34 % des recettes agricoles brutes qu’il engendre. En moyenne, les prix perçus par les agriculteurs en 2018-20 étaient supérieurs de 5 % à ceux du marché mondial, tandis que les prix des produits de base non soumis à la gestion de l’offre coïncidaient avec les niveaux mondiaux.

Les paiements fondés sur l’utilisation sans contraintes de divers intrants, notamment l’énergie, font aussi partie de ceux qui peuvent créer les distorsions les plus importantes. Avec le soutien des prix du marché, ils représentaient 60 % des transferts bruts cumulés aux producteurs en 2018-20, soit 5 % des recettes agricoles brutes. Le reste du soutien budgétaire apporté aux producteurs individuellement était axé sur la gestion des risques.

Le soutien aux services d’intérêt général (indiqué par l’ESSG) a diminué par rapport à la taille du secteur, ce qui montre que la hausse des dépenses n’a pas suivi la croissance de ce dernier. Il s’est élevée à 5.1 % de la valeur ajoutée agricole au cours de la période 2018-20, contre 7.6 % au début du siècle. En termes de composition, les deux priorités majeures du Canada sont invariablement les connaissances et l’innovation agricoles et les systèmes d’inspection et de contrôle, chacune représentant, ces dernières années, environ 40 % des dépenses comptabilisées dans l’ESSG. Cependant, alors que la part des connaissances et de l’innovation agricoles dans l’ESSG est restée relativement stable depuis la fin des années 80, celle des systèmes d’inspection et de contrôle a augmenté de 17 points de pourcentage au cours de la même période.

Dans l’ensemble, le coût du soutien total au secteur agricole a diminué. L’estimation du soutien total représentait 0.3 % du PIB du Canada en 2018-20, contre 1.6 % en 1986-88 et 0.7 % en 2000-02, soit beaucoup moins que la moyenne de l’OCDE. Sur ce total, 72 % sont allés aux agriculteurs eux-mêmes ces trois dernières années, et presque tout le reste aux services généraux.

Le 11 décembre 2020, le gouvernement du Canada a publié son plan pour « Un environnement sain et une économie saine ». Dans ce cadre, il prévoit de soutenir le secteur agricole en menant les actions suivantes : 1) investir, sur une période de sept ans, à l’appui du développement de technologies propres porteuses de transformations et de l’adoption des technologies propres disponibles sur le marché ; 2) fixer un objectif national de réduction des émissions dues aux engrais de 30 % par rapport aux niveaux de 2020 ; et 3) stimuler l’agriculture intelligente face au climat dans le cadre de l’actuel Partenariat canadien pour l’agriculture.

Le 15 juillet 2020, de nouvelles exigences relatives à l’octroi de licences, aux contrôles préventifs et à la traçabilité ont été appliquées aux entreprises fabriquant certains produits alimentaires, en vertu du règlement sur la salubrité des aliments au Canada. Toutefois, en raison de la pandémie de COVID-19, l’Agence canadienne d’inspection des aliments n’a pas donné priorité à la mise en conformité avec ces nouvelles exigences.

L’Accord Canada – États-Unis – Mexique est entré en vigueur le 1er juillet 2020, remplaçant l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Il maintient l’accès en franchise de droits de la plupart des produits agricoles, étend l’accès aux marchés à des produits supplémentaires et prévoit de nouvelles règles concernant les biotechnologies agricoles et les mesures sanitaires et phytosanitaires. Le Canada et le Royaume-Uni ont signé l’Accord de continuité commerciale Canada-Royaume-Uni le 9 décembre 2020 pour assurer la poursuite des échanges entre les deux pays après la période de transition du Brexit.

L’essentiel des efforts consentis en 2020 par les pouvoirs publics canadiens a porté sur les conséquences de la crise du COVID-19 sur la production agricole, la chaîne alimentaire et les consommateurs. Sur la scène internationale, le Canada a plaidé en faveur d’un commerce ouvert et prévisible des produits agricoles et agroalimentaires1, 2. Sur le plan intérieur, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ont mis en œuvre plusieurs mesures pour soutenir le secteur dans divers domaines :

  • Afin d’alléger la pression financière exercée sur les agriculteurs et les producteurs d’aliments, les autorités fédérales et provinciales ont ajusté et renforcé des dispositions ciblées, dont le report de remboursement d’emprunts pour les agriculteurs éligibles, dans le cadre de Financement agricole Canada et du programme de paiement anticipé, ainsi qu’un certain nombre de paramètres et de dates limites des programmes de gestion des risques de l’entreprise.

  • Pour pallier le déficit de main-d’œuvre dans le secteur agroalimentaire, le gouvernement du Canada a désigné comme essentiels les travailleurs de la filière alimentaire ; il a autorisé des étrangers à venir travailler temporairement dans le pays, sous réserve qu’employés et employeurs respectent les règles en matière de santé et de sécurité publiques (dont une quarantaine obligatoire de 14 jours à l’arrivée, pendant laquelle les salaires sont payés) ; et il a réduit les démarches administratives que doivent accomplir les employeurs. De plus, le gouvernement du Canada a créé le programme des travailleurs étrangers temporaires et le programme d’aide pour l’isolement obligatoire des travailleurs étrangers temporaires et a doté de fonds supplémentaires le programme d’emploi et de compétences des jeunes de l’AAC.

  • Afin de renforcer la capacité des entreprises agroalimentaires à s’adapter et à se rétablir après la crise, le gouvernement fédéral a investi dans le Fonds d’urgence pour la transformation, de manière à aider les entreprises à mettre en œuvre des changements visant à préserver la santé et la sécurité des travailleurs et à améliorer, automatiser et moderniser leurs installations.

  • À l’appui des services essentiels d’inspection des aliments, un financement a été accordé à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA). Celle-ci a temporairement suspendu certaines activités d'inspection visant des risques modérés, afin de réaffecter son personnel à des activités plus prioritaires.

  • Afin de fournir une aide alimentaire aux populations vulnérables, le gouvernement du Canada a financé des banques alimentaires et d’autres organismes nationaux de secours alimentaire par le biais du Fonds d’urgence pour la sécurité alimentaire, et il a lancé le programme de récupération de surplus alimentaire.

  • L’accord-cadre Partenariat canadien pour l’agriculture (2018-23) continue de mettre l’accent sur le soutien aux services d’intérêt général utiles au secteur par le biais de programmes qui visent la recherche-développement menée par la filière, l’adoption de l’innovation et les systèmes d’inspection et de contrôle. Il convient de maintenir cette orientation, afin d’améliorer la compétitivité et la durabilité à long terme du secteur.

  • Bien que le soutien aux producteurs, en proportion des recettes agricoles brutes, ait été nettement inférieur à la moyenne de l’OCDE ces dernières années, les transferts susceptibles d’entraîner les plus fortes distorsions demeurent sa principale composante, en particulier ceux qui découlent du soutien des prix du marché dans le secteur laitier. Les prix intérieurs de la plupart des produits de base correspondent exactement aux cours mondiaux, mais les filières lait, volaille et œufs continuent d’être protégées de la concurrence internationale et de bénéficier d’un soutien des prix du marché, ce qui fausse la production et les échanges. Dans la perspective d’abandonner progressivement la gestion de l’offre de ces produits, il conviendrait d’accroître les quotas en vigueur et de réduire le soutien des prix dans les filières en question. Cela encouragerait une plus grande réactivité aux conditions du marché, favoriserait l’innovation (afin de gagner en efficience et de diversifier la production en privilégiant les produits à plus grande valeur ajoutée), et diminuerait la rente des quotas.

  • Le système agroalimentaire canadien a continué de fonctionner à peu près correctement pendant la pandémie de COVID-19. Toutefois, la crise a mis en lumière des vulnérabilités, liées par exemple à l’offre de main-d’œuvre et à l’insécurité alimentaire, qui doivent être abordées de manière cohérente (Arrell Food Institute et Institut canadien des politiques agroalimentaires, 2021[1]). Elle offre des enseignements sur lesquels on peut s’appuyer pour améliorer la résilience et la durabilité du système alimentaire.

  • Le cadre stratégique pour l’agriculture 2018-23 met à la disposition des agriculteurs un ensemble d’outils de gestion des risques. L’approche canadienne en la matière a évolué au fil du temps : elle vise à moins dépendre de l’intervention au cas par cas des pouvoirs publics, pour s’orienter vers un cadre d’action plus proactif. Néanmoins, une évaluation globale de la performance des instruments de gestion des risques et le déploiement de programmes supplémentaires de renforcement de la résilience pourraient permettre l’adoption à plus grande échelle des dispositifs les plus efficaces, stimuler l’élaboration d’outils basés sur le marché et encourager les agriculteurs à chercher de meilleurs moyens de gérer les risques au niveau de leur exploitation. Par ailleurs, l’étude des liens entre programmes de gestion des risques commerciaux et résultats environnementaux, ainsi que des arbitrages effectués entre eux, pourrait être propice à une amélioration de la résilience à long terme du secteur (OCDE, 2020[2]).

  • Le plan « Un environnement sain et une économie saine » est une étape prometteuse dans la réduction des externalités environnementales négatives de l’agriculture et dans le renforcement de la durabilité du secteur. Toutefois, il est essentiel d’assurer le suivi de sa mise en œuvre et d’évaluer ses effets pour que ses ambitions aboutissent.

Références

[1] Arrell Food Institute et Institut canadien des politiques agroalimentaires (2021), Conclusions from Agri-Food Community Consultations (Growing Stronger project), https://capi-icpa.ca/wp-content/uploads/2021/01/Growing-stronger-final-report.pdf.

[2] OCDE (2020), « Resilience to natural disasters in Canada », dans Strengthening Agricultural Resilience in the Face of Multiple Risks, Editions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/d1b84788-en.

Notes

← 1. Au Canada, le terme « agroalimentaire » comprend généralement les activités en amont, en sus de l’agriculture et de l’aval de la filière. Dans ce chapitre, l’analyse des mesures publiques liées au secteur « agroalimentaire » en tient compte.

← 2. Le Canada a été à l’origine d’une déclaration conjointe avec un groupe de membres de l’OMC intitulée « Faire face à la pandémie de COVID-19 avec un commerce ouvert et prévisible des produits agricoles et alimentaires » https://docs.wto.org/dol2fe/Pages/SS/directdoc.aspx?filename=r:/WT/GC/208R2.pdf&Open=True).

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