1. Rôle de la communication publique au Maroc

Dans la continuité des engagements pris par le Maroc en faveur des principes du gouvernement ouvert depuis 2011, le processus de régionalisation avancée entamé en 2015 représente une occasion de faire progresser la bonne gouvernance au niveau infranational. Les collectivités territoriales sont appelées à penser le développement local et les politiques publiques au plus près des citoyens, de façon à ce qu’elles s’accordent au mieux à leurs attentes tout en leur permettant de participer à leur élaboration et mise en place.

Pour répondre aux ambitions des collectivités territoriales en matière de transparence et de participation citoyenne ainsi qu’aux besoins et aspirations des différentes parties prenantes, une communication publique stratégique est nécessaire. Celle-ci contribuerait tout d’abord à renforcer la confiance des citoyens dans l’administration, établie à 29 % en 2019 au Maroc (Kayyali, 2020[1]) en baisse depuis quelques années comme dans de nombreux pays à travers le monde (OCDE, 2019[2]), malgré des écarts entre les pays les plus durement touchés par la crise financière et les pays ayant connu une reprise économique favorable (OCDE, 2019[2]).

Le rapport de l’OCDE « Voix Citoyenne au Maroc : le rôle de la communication et des médias pour un gouvernement plus ouvert » souligne par ailleurs que leur contribution est essentielle dans une démarche d’ouverture de l’administration à tous les niveaux (OCDE, 2019[3]) (voir encadré 1.1). Communiquer activement permet d’informer les citoyens sur les mesures en cours et de mieux les associer à l’élaboration des politiques et services publics. Cela permet en retour d’améliorer la qualité des prestations et d’encourager une plus grande redevabilité par les citoyens, la société civile et les médias à travers une transparence accrue.

Par ailleurs, la crise de la COVID-19 a mis en lumière le rôle crucial que joue la communication pour accompagner les individus et les parties prenantes à respecter les mesures mises en place par les autorités publiques pour lutter contre la pandémie. La pandémie a également souligné son action pour renouer la confiance avec les citoyens et renforcer leur mobilisation, par la diffusion d’informations transparentes, étayées et en temps réel. Les communicants publics ont également eu un rôle essentiel dans la lutte contre la désinformation et la réponse collective à y apporter pour soutenir l’action de l’État (OCDE, 2020[4]).

Dans ce sens, une communication stratégique et transparente est un prérequis au gouvernement ouvert à tous les niveaux. Alors que les citoyens sont dans l’attente de clarté et de proximité, renforcer la communication publique au niveau local est une nécessité dans le processus de régionalisation avancée (OCDE, 2019[3]). Ils souhaitent être informés de ce qui les touche concrètement et participer plus activement à l’élaboration des politiques publiques qui affectent leur vie quotidienne. En outre, leur perception de l’administration publique est souvent façonnée par la qualité des services de proximité fournis et leur interaction plus fréquente avec les fonctionnaires locaux.

Dans la continuité du rapport Voix Citoyenne au Maroc, le présent Scan a pour objectif d’apporter un soutien à l’amélioration de la communication publique au niveau local dans le cadre de la régionalisation avancée au Maroc et de la mise en place des principes du gouvernement ouvert. Il s’appuie sur deux régions pilotes, Beni Mellal-Khénifra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima, sélectionnées en collaboration avec la Direction Générale des Collectivités Territoriales au sein du Ministère de l’Intérieur. Il étudie leurs stratégies, initiatives et pratiques pour communiquer avec les citoyens et les médias. Il identifie en outre des recommandations fondées sur des bonnes pratiques des pays de l’OCDE.

Cette analyse se fonde sur les réponses à un questionnaire des deux régions pilotes. Une mission de revue par les pairs menée en ligne en octobre 2020 les complète grâce aux entretiens menés avec des représentants du Ministère de l’Intérieur, de chaque conseil régional, de la société civile, des médias et d’autres parties prenantes impliquées sur les enjeux couverts par le Scan au sein des régions pilotes.

Aussi, après avoir présenté le rôle de la communication publique et les initiatives mises en place au niveau régional au Maroc, sa gouvernance, ses structures et son organisation dans les deux régions pilotes est explorée, ainsi que sa contribution aux principes du gouvernement ouvert. Enfin, une étude des objectifs et actions de communication numérique mises en place par les deux régions pilotes est développée.

On entend par "communication publique" toute activité ou initiative menée par des institutions publiques dans l’intérêt général (OCDE, 2020[4]). Celles-ci peuvent comprendre la diffusion d'informations, ainsi que la consultation et le dialogue avec les parties prenantes. Elles peuvent aussi inclure des actions dont le but est de faire comprendre le rôle des institutions, leurs compétences et leur fonctionnement, d’animer la vie démocratique, de rendre compte des politiques publiques, d’informer sur les services publics ou encore d’éclairer sur les enjeux collectifs afin de faire évoluer les comportements (Cap’Com, 2020[5]). La communication publique se distingue ainsi de la communication politique qui concerne le débat politique, les élections ou encore les partis et personnalités politiques.

Le rôle clé de la communication publique pour renforcer la mise en œuvre du gouvernement ouvert est consacré dans la Recommandation du Conseil de l’OCDE sur le Gouvernement Ouvert (OCDE, 2017[6]), à laquelle le Maroc a adhéré en 2018. Elle définit ce dernier comme « une culture de gouvernance qui promeut les principes de transparence, d’intégrité, de redevabilité et de participation des parties prenantes, au service de la démocratie et de la croissance inclusive » et invite notamment les gouvernements à :

communiquer activement sur les stratégies et initiatives en matière de gouvernement ouvert ainsi que sur les résultats, réalisations et impacts correspondants afin de veiller à ce qu’elles soient connues, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de la sphère publique, l’objectif étant de favoriser leur mise en pratique et de susciter l’adhésion des parties prenantes. (OCDE, 2017[6])

La Recommandation reconnaît sa contribution par ailleurs à la mise en œuvre de l’accès à l’information des citoyens (disposition 7), la participation des parties prenantes à la vie publique (disposition 8) et la transition vers un État ouvert (disposition 10) en rappelant le rôle des acteurs non-gouvernementaux, y compris les médias, pour renforcer la transparence et la participation (OCDE, 2017[6]) (voir graphique 1.1).

L’importance et la contribution de ces différentes composantes à un gouvernement plus ouvert fonde le cadre analytique sur lequel s’appuient les revues de la communication publique et le présent Scan (graphique 1.2).

Les évolutions juridiques et institutionnelles récentes ont contribué à donner à la communication publique une place clé dans l’action publique au Maroc. L’adoption de la Constitution en 2011 a été une avancée décisive notamment vers la reconnaissance du droit d’accès à l’information (article 27), réaffirmée à travers une loi dédiée, les dispositions des 3 lois organiques de 2015 relatives aux collectivités territoriales ayant trait à la mise à disposition des informations au profit du public ainsi que via le code de la Presse en 2016 consacrant le rôle de la communication comme levier de renforcement de la transparence.

Dans cette dynamique, un réseau interministériel de communicants publics a été créé en 2017 au niveau national, avec le soutien de l’OCDE et chapeauté par le Ministère de l’Économie, des Finances et de la Réforme de l’administration (MEFRA). Première initiative de ce type dans le pays, il vise à soutenir les responsables en question des départements ministériels dans la mise en place d’une vision commune, l’amélioration de leur contribution aux réformes administratives et de l’efficacité des stratégies sectorielles à travers le partage de bonnes pratiques et la proposition de nouveaux mécanismes.

L’OCDE a par ailleurs soutenu le Maroc dans l’élaboration d’un guide de la communication publique qui offre des outils pratiques permettant de renforcer les principes du gouvernement ouvert et de consolider la confiance des citoyens dans l’administration. Finalisé en juillet 2020, le guide a été diffusé en février 2021 au sein de l’administration publique marocaine (Chapitre 2, encadré 2.6).

L’entrée du Maroc au sein du Partenariat pour le Gouvernement ouvert (OGP) en 2018 a également été l’occasion de renforcer la place de la communication comme composante essentielle de la mise en œuvre des principes de transparence, d’intégrité, de redevabilité et de participation citoyenne. En témoignent les engagements ayant trait à ce domaine dans le premier Plan d’Action National du Gouvernement Ouvert au Maroc développé par l’ancien Ministère de la Réforme de l’Administration et de la Fonction Publique pour 2018-2020 (encadré 1.2), dont plusieurs sont déclinés aux niveaux régional et local. Le deuxième Plan d’Action National 2021-2022 est en cours de co-création (Ministère de l'Économie, des Finances et de la Réforme de l'Administration, 2020[7]). Dans le cadre de la consultation menée en octobre 2020 pour la co-création de ce nouveau plan, 10 axes d’intervention ont été ouverts aux propositions dont un sur l’accès à l’information et un sur la démocratie participative (Royaume du Maroc, 2021[8]).

La communication est également un levier d’action pour la mise en œuvre des transformations prévues par le Plan National de la Réforme de l’administration (2018-2021). Il établit la mise en place d’un plan de communication, le renforcement des structures et des capacités matérielles et humaines de l’administration et de la communication interne à tous les niveaux, et ce dans le but d’améliorer l'image de ces institutions et assurer leur interaction positive avec la société (Royaume du Maroc, 2018[10]).

Enfin, le Maroc a lancé récemment le chantier de la déconcentration administrative, avec l’adoption d’une Charte Nationale en décembre 2018 qui vise à accompagner le processus de la régionalisation avancée et à favoriser la mise en œuvre intégrée et complémentaire des politiques publiques au niveau infranational. La Charte prévoit notamment la réorganisation des services de l’État au niveau régions, préfectures et provinces, avec un impact significatif sur l’organisation de la communication publique au sein des départements ministériels. Alors que le gouvernement les a appelés en juillet 2020 à accélérer la mise en œuvre des schémas directeurs de la déconcentration administrative, les communicants ont un rôle important à jouer pour faciliter l’application efficace et informée des mesures et procédures au sein des différents services publics.

Alors que la télévision et la radio demeurent deux des supports favoris d’une partie des Marocains pour recevoir des informations,1 Internet et les réseaux sociaux ont un impact significatif sur les habitudes de consommation de contenus (La Lettre Pro de la Radio, 2020[11]). Au Maroc, le taux de pénétration d’Internet a atteint 71 % en 2019, soit plus de 25 millions d’abonnés (Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications, 2019[12]), et 18 millions de marocains utilisent les réseaux sociaux (DataReportal, 2020[13]), notamment les plus jeunes avec 97% des 15-34 ans qui déclarent s’en servir (UNICEF, 2018[14]).

L’apparition et la croissance de ces moyens de communication ont rendu possible de nouvelles formes d’interaction entre gouvernement, médias et citoyens, en permettant notamment à une plus large diversité de voix et d’acteurs de s’exprimer et de s’engager publiquement.

Ces avancées technologiques ont également entrainé un effet d’immédiateté de l’information. La rapidité à laquelle elle se propage crée par ailleurs un terrain favorable à l’émergence des fausses informations ou de rumeurs, rendant ainsi la communication plus difficile, particulièrement en temps de crise ou d’incertitude (OCDE, 2020[4]).

En vertu de la loi sur l’accès à l’information adoptée en mars 2018 et entrée en vigueur en 2019, les entités publiques marocaines sont désormais tenues de diffuser de manière proactive leurs données, et ce par tous les moyens possibles de publication (Royaume du Maroc, 2018[15]).

La mise en œuvre du droit d’accès à l’information et la publication de données ouvertes sont de puissants leviers d’action vers une administration plus transparente et inclusive. À ce titre et pour en accroitre davantage l’application, le MEFRA a diffusé en juin 2020 une circulaire incitant les administrations, tant au niveau central que déconcentré, à se conformer au cadre légal (Ministère de l'Économie, des Finances et de la Réforme de l'Administration, 2020[16]). Les administrations peuvent par ailleurs s’appuyer sur une valise de formation développée par le Ministère de l’Intérieur ainsi que sur le guide pratique relatif à la mise en œuvre de la loi élaboré par le MEFRA avec le soutien de l’OCDE (Royaume du Maroc, 2020[17]). Ce guide a pour objectif d’aider les fonctionnaires à mieux comprendre les droits et recours des citoyens en matière d’accès à l’information, de renforcer son application et la diffusion proactive de données.

Plusieurs mesures ont également été adoptées afin de renforcer la mise en œuvre de ce droit à tous les niveaux. Le Ministère de l’Intérieur a évoqué lors de la mission de revue par les pairs avoir désigné un ou plusieurs points focaux au niveau de chaque collectivité territoriale. 1 924 points focaux ont ainsi été nommés sur l’ensemble du territoire marocain. Une convention a également été signée avec la Commission du droit d’accès à l’information (CDAI) pour suivre l’appréhension et la gestion de la loi au niveau infranational. À cela se sont ajoutés également un kit d’instruction sur ce droit et la formation de 16 formateurs. Leur action de dissémination des connaissances auprès de l’ensemble des collectivités territoriales a démarré en décembre 2019 pour s’achever en avril 2021, en parallèle de la publication d’un guide sur la gestion du droit d’accès à l’information au niveau de ces collectivités sur le Portail national y afférent.

Des actions ont aussi été entreprises pour étendre aux collectivités territoriales l’usage de la plateforme Chafafiya,2 auparavant uniquement disponible pour les départements ministériels. Plus de 1 500 collectivités territoriales disposent désormais d’une adresse email pour recevoir les demandes d’accès à l’information formulées en ligne. Des actions de sensibilisation pour les élus sont également prévues.

La communication publique au niveau infranational, portée par l'ensemble des collectivités territoriales et des organismes publics locaux, contribue à la mise en œuvre des principes du gouvernement ouvert sur l’ensemble du territoire marocain et à la confiance des citoyens en l’administration. Elle gagne en importance à mesure que le rôle et les compétences des régions se développent dans le contexte de la régionalisation avancée.

Les conseils régionaux ont un effort de pédagogie substantiel à mener auprès des citoyens et médias au sujet de leurs compétences et actions sur un vaste éventail de politiques publiques tel que défini par le processus de régionalisation avancée.

Ce dernier a créé un nouveau découpage régional et modifié les compétences propres, transférées et partagées des différentes collectivités territoriales nouvellement refondées (pour celles des conseils de régions, voir tableau 1.1).

Dans ce cadre, le conseil régional est aujourd’hui un échelon privilégié de la participation citoyenne via de nouveaux outils et mécanismes de concertation et de mobilisation (instances consultatives, ouverture des sessions du conseil régional au public, planification territoriale participative). La mise en place et le fonctionnement de ces outils passent notamment par une communication efficace auprès des différentes parties prenantes.

La régionalisation avancée reste cependant un processus récent et en cours d’ancrage. Comme souligné au cours des échanges avec les représentants des régions et de la société civile, les conseils régionaux sont des institutions récemment créées dont le rôle, les compétences, l’organisation et le fonctionnement sont mis en place pour la première fois, ce qui nécessite un temps d’adaptation pour toutes les parties prenantes. De plus, le manque de clarté dans la définition de certaines compétences des Régions, par exemple dans le cas de la gestion des organismes de formation de l’ANAPEC,3 constitue un défi dans le transfert et la mise en place des compétences des conseils de région (OCDE, 2019[18] ; Al Mountada, 2019[19]).

Les échanges lors de la mission de revue par les pairs soulèvent une nécessité de poursuivre les efforts entamés pour que les responsabilités de la wilaya de Région,4 soit l’administration déconcentrée de l’État, et du conseil régional, collectivité territoriale décentralisée soient bien comprises des citoyens (OCDE, 2020[20]). Bien que leurs rôles et compétences respectifs soient explicitement définis par le cadre légal et réglementaire (tableau 1.1), les citoyens peuvent en avoir une compréhension plus confuse notamment lorsque les administrations déconcentrées et décentralisées agissent sur un même territoire et sur des compétences partagées (tableau 1.1).

Poursuivre les efforts mis en œuvre tant par les échelons déconcentrés que décentralisés pour clarifier la mise en œuvre de ces responsabilités auprès du public via une communication fluide et transparente est essentiel (OCDE, 2020[20]), tout comme dans de nombreux pays à l’image de la France (encadré 1.3). Bien que des efforts soient déjà engagés en ce sens, une pédagogie sur les principaux projets menés demeure à exploiter afin de sensibiliser les citoyens à l’importance de cet échelon.

Un autre défi mis en avant par les interlocuteurs rencontrés lors de la mission de revue par les pairs dans la mise en œuvre effective de la régionalisation avancée concerne le manque de ressources financières et techniques (OCDE, 2017[22]). Cela affecte la mise en place d’une communication publique efficace et cohérente au niveau des conseils de région notamment. Les réponses au questionnaire et la mission de revue par les pairs soulignent que les personnes chargées de la communication du conseil régional manquent souvent de l’expérience nécessaire à leur fonction. Ces difficultés d’organisation mais aussi les ressources financières, humaines et techniques sont abordées plus en détail dans la suite de ce Scan.

Si les ressources restent à consolider au sein des deux conseils régionaux pilotes, il existe cependant un réseau informel d’échange d’informations et de bonnes pratiques entre les communicants travaillant au sein des régions. Le partage d’expérience peut aider, à moindre coût, à répondre à certains besoins. Les discussions ont lieu dans le cadre des réunions de l’Association des Régions du Maroc (ARM), par emails ou messages instantanés entre présidents et directeurs généraux des services.

Le Scan se fonde sur les expériences de deux régions pilotes du Maroc qui présentent des caractéristiques socio-économiques distinctes et sont à des stades différents dans leur approche du gouvernement ouvert. Néanmoins, le taux d’analphabétisme qui demeure élevé dans les deux régions et la fracture numérique qui existe entre milieu urbain et milieu rural représentent des défis importants pour ces deux conseils régionaux dans leur communication avec les citoyens.

En effet, située au centre du Maroc, la région de Béni Mellal-Khénifra (7 % de la population totale du pays) comptait, en 2018, 49 % de sa population en milieu rural. Avec un taux de chômage de 6 %, en deçà de la moyenne nationale (10 %) et une population particulièrement jeune (29 % des habitants ayant moins de 15 ans (Royaume du Maroc, 2019[23])), Béni-Mellal-Khénifra enregistre par ailleurs le taux d’analphabétisme le plus élevé du pays avec 39 %, contre 32% en moyenne (Royaume du Maroc, 2017[24]). Bien que ce taux soit en baisse, il reste élevé, notamment en milieu rural, pour les femmes (62 % des femmes en milieu rural et 50 % en milieu urbain) et les tranches d’âge les plus élevées (72 % chez les plus de 50 ans) (Royaume du Maroc, 2017[25]).

La région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima (11 % de la population marocaine) est essentiellement urbaine ou périurbaine, bien qu'une part importante de la population (39 %) soit rurale (Royaume du Maroc, 2019[23]). Le taux de chômage dans la région atteint 8 %. 45 % de la population a moins de 24 ans, une répartition démographique similaire à celle de l’ensemble du pays, mais avec un taux d’analphabétisme inférieur à la moyenne nationale (31 %) (Royaume du Maroc, 2017[25]).

En termes numériques, s’il n’existe pas de statistiques au niveau régional, l’enquête de l’Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (ANRT) montre qu’en 2018, seulement 57 % des ménages marocains en milieu rural avaient accès à Internet (ANRT, 2019[26]), pour un total d’environ 20 millions d’utilisateurs marocains (pour une population estimée à 36 millions d’habitants en 2018) (Royaume du Maroc, 2019[23]).

En outre, un certain retrait de l’engagement politique a également été souligné par les acteurs de la société civile de la région de Béni-Mellal Khénifra lors de la mission de revue par les pairs, illustré par un taux de participation de 30 %, inférieur à la moyenne nationale constatée, dans les deux régions lors des élections législatives de 2016 (Jeune Afrique, 2016[27]). Cette baisse de mobilisation a été constatée à l’échelle nationale, mais les résultats définitifs nationaux s’établissaient à 43 % (6.8 millions d’électeurs sur 15.7 millions de personnes habilitées à voter) contre 53 % lors des élections régionales et communales de 2015 (Le Monde, 2015[28]) et 45 % aux législatives de 2011 (APCE, 2016[29]).

La région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima est engagée depuis plusieurs années dans une dynamique de renforcement du gouvernement ouvert au niveau infranational. Elle est ainsi la première collectivité territoriale du pays à avoir candidaté au PGO local et à l’avoir intégré en novembre 2020. Par ailleurs, la région bénéficie du programme « TASHAROC »5 (2017-2021), qui vise notamment à accompagner le développement et la mise en œuvre d’une stratégie de communication comme levier pour le développement régional ainsi qu’à former les agents régionaux.

La région de Béni Mellal-Khénifra a lancé plusieurs initiatives et projets dans le cadre du plan d’action national du gouvernement ouvert et cherche aujourd’hui à renforcer la mise en œuvre des principes connexes à l’échelle de son territoire. Selon les dernières informations recueillies auprès des représentants de la région lors de la mission de revue par les pairs, celle-ci a récemment entamé le processus de co-création de sa candidature au PGO pour 2021. Le conseil régional doit désormais déterminer les principaux thèmes et partenaires de la société civile qui feront partie de cette candidature.

Dans les deux régions, on observe globalement des efforts récents de renforcement de la communication publique avec les citoyens, en lien avec les engagements pris aux niveaux national et régional en matière de gouvernement ouvert. Des défis subsistent cependant et sont explorés dans les chapitres suivants. En effet, alors qu’une prise de conscience de son importance est manifeste parmi l’ensemble des acteurs rencontrés, la communication publique peut être exploitée plus pleinement comme levier stratégique pour l’élaboration et la mise en œuvre de politiques publiques. Cela se traduira dans les faits à mesure que des ressources humaines et financières et des stratégies se renforceront et que la professionnalisation en cours s’ancrera (Chapitre 2). Si les deux conseils de région utilisent divers canaux pour informer les citoyens et les médias, la mise en place de lignes directrices permettrait de mieux engager et inclure les citoyens plus efficacement, notamment via les outils numériques et réseaux sociaux (Chapitre 3).

Références

[12] Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (2019), Le Memo: Analyse de l’évolution du secteur des télécommunications au Maroc, https://www.anrt.ma/sites/default/files/publications/2019_t4_tb_analyse-fr.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[19] Al Mountada (2019), La Régionalisation Avancée au Maroc, https://almountada.ma/pdf/al_mountada_publication_regionalisation_avancee_maroc.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[26] ANRT (2019), Enquête de collecte des indicateurs TIC aurpès des ménages et des individus au niveau national au titre de l’année 2018 : Résultats, https://www.anrt.ma/sites/default/files/publications/enquete-tic-2018.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[29] APCE (2016), Doc. 14201 rev (2016) - Observation des élections législatives au Maroc (7 octobre 2016), https://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-fr.asp?fileid=23193&lang=fr (consulté le 30 novembre 2020).

[5] Cap’Com (2020), Infographie de la communication publique, https://www.cap-com.org/infographie-de-la-communication-publique (consulté le 27 novembre 2020).

[13] DataReportal (2020), Digital 2020: Morocco, https://datareportal.com/reports/digital-2020-morocco?rq=morocco (consulté le 27 novembre 2020).

[21] Epiceum et Harris Interactive (2018), « Baromètre de la Communication Locale - Octobre 2018 », vol. 5/Octobre 2018.

[27] Jeune Afrique (2016), Législatives au Maroc : fermeture des bureaux de vote, taux de participation faible à 17 heures – Jeune Afrique, https://www.jeuneafrique.com/363832/politique/legislatives-maroc-fermeture-bureaux-de-vote-taux-de-participation-faible-a-17-heures/ (consulté le 30 novembre 2020).

[1] Kayyali, A. (2020), The Arab World’s Trust in Government and the Perils of Generalization – Arab Barometer, https://www.arabbarometer.org/2020/06/the-arab-worlds-trust-in-government-and-the-perils-of-generalization/ (consulté le 27 novembre 2020).

[11] La Lettre Pro de la Radio (2020), Kantar dévoile les résultats de l’Africascope Maghreb 2019, https://www.lalettre.pro/Kantar-devoile-les-resultats-de-l-Africascope-Maghreb-2019_a23025.html (consulté le 27 novembre 2020).

[28] Le Monde (2015), Au Maroc, bons résultats du parti islamiste aux élections locales, https://www.lemonde.fr/international/article/2015/09/06/au-maroc-bons-resultats-du-parti-islamiste-aux-elections-locales_4747146_3210.html (consulté le 30 novembre 2020).

[16] Ministère de l’Économie, des Finances et de la Réforme de l’Administration (2020), Circulaire de Monsieur le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’administration n°05/2020 relative à la mise en œuvre du droit d’accès à l’information, https://www.mmsp.gov.ma/uploads/documents/CirculaireDAI_05-2020_17062020.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[7] Ministère de l’Économie, des Finances et de la Réforme de l’Administration (2020), Cocréation du plan d’action national 2021-2022, http://www.gouvernement-ouvert.ma/co-creation.php?lang=fr (consulté le 27 novembre 2020).

[9] Ministère de l’Économie, des Finances et de la Réforme de l’Administration (2018), Portail du gouvernement ouvert, http://www.gouvernement-ouvert.ma/axes.php?lang=fr (consulté le 27 novembre 2020).

[20] OCDE (2020), La modernisation de l’administration locale dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, OCDE, Paris, http://www.oecd.org/mena/governance/modernisation-administration-locale-dans-la-region-de-tanger-tetouan-al-hoceima.pdf (consulté le 16 décembre 2020).

[4] OCDE (2020), « Transparence, communication et confiance : Le rôle de la communication publique pour combattre la vague de désinformation concernant le nouveau coronavirus », Les réponses de l’OCDE face au coronavirus (COVID-19), Éditions OCDE, Paris, pp. 1-14, https://doi.org/10.1787/1d566531-fr.

[18] OCDE (2019), Le gouvernement ouvert à Salé au Maroc, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/dbb8859a-fr.

[2] OCDE (2019), Panorama des administrations publiques 2019, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/8be847c0-fr.

[3] OCDE (2019), Voix citoyenne au Maroc : Le rôle de la communication et des médias pour un gouvernement plus ouvert, Examens de l’OCDE sur la gouvernance publique, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264306608-fr.

[22] OCDE (2017), Accompagner les réformes de la gouvernance locale au Maroc : Guide de bonnes pratiques, OCDE, Paris, https://www.oecd.org/mena/governance/accompagner-les-reformes-de-la-gouvernance-locale-au-maroc.pdf.

[6] OCDE (2017), Recommandation du Conseil sur le Gouvernement Ouvert, OCDE, Paris, https://legalinstruments.oecd.org/fr/instruments/OECD-LEGAL-0438 (consulté le 27 novembre 2020).

[8] Royaume du Maroc (2021), Cocréation du plan d’action national 2021-2023, https://www.gouvernement-ouvert.ma/co-creation.php?lang=fr (consulté le 19 mars 2021).

[17] Royaume du Maroc (2020), Le droit d’accès à l’information : Guide relatif à la loi no 31.13, https://www.mmsp.gov.ma/uploads/documents/Guide_DAI_VersionFrancaise.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[23] Royaume du Maroc (2019), Le Maroc en Chiffres 2019, http://www.bmcebank.ma (consulté le 13 mars 2021).

[15] Royaume du Maroc (2018), Loi 31-13 relative au droit d’accès à l’information, https://www.ilo.org/dyn/natlex/docs/ELECTRONIC/107094/131706/F-985611108/MAR-107094.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[10] Royaume du Maroc (2018), Plan National de la Réforme de l’Administration 2018-2021.

[25] Royaume du Maroc (2017), Monographie régionale Béni Mellal-Khénifra 2017, Haut Commissariat au Plan, https://www.hcp.ma/region-drta/docs/Publications/Monographie%20R%20gionale%20BMK%202017.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

[24] Royaume du Maroc (2017), « Note d’information du Haut-Commissariat au Plan à l’occasion de la journée internationale de l’alphabétisation du 8 septembre 2017 ».

[14] UNICEF (2018), Les enfants, les jeunes et les médias au Maroc, https://www.unicef.org/morocco/media/1401/file/les%20enfants,%20les%20jeunes%20et%20les%20médias.pdf (consulté le 27 novembre 2020).

Notes

← 1. En 2019, 86 % de la population marocaine utilisait quotidiennement la télévision et 65 % de la population marocaine écoutait chaque jour la radio selon l’étude Africascope Maghreb 2019.

← 2. Le portail d’accès à l’information Chafafiya permet aux citoyens de déposer des demandes d’accès à certaines informations auprès de différentes administrations. Le dépositaire d’une demande peut ensuite suivre sa demande depuis le dépôt jusqu’à la réception de sa réponse finale, et recevoir des notifications à chacune des étapes.

← 3. L’Agence Nationale de Promotion de l’Emploi et des Compétences (ANAPEC) est l’agence publique marocaine qui contribue à l'organisation et à la mise en œuvre des programmes de promotion de l'emploi qualifié décidés par les pouvoirs publics.

← 4. Au Maroc, une wilaya correspond à la division administrative déconcentrée de l’État qui existe en parallèle du Conseil de région (collectivité territoriale). Le wali qui la dirige est nommé par le roi.

← 5. TASHAROC est un programme financé par le gouvernement britannique et mis en œuvre par « DAI Europe » en partenariat avec « l’Institut National Démocratique » (NDI) et « Golden Resources Solutions ». Le programme apporte un appui dédié à la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima, visant à renforcer le processus de décentralisation, de la bonne gouvernance, et de la démocratie participative dans l’élaboration, la mise en œuvre, et l’évaluation des politiques publiques au niveau régional, et ce à travers : (1) Le renforcement des capacités des acteurs régionaux – principalement le Conseil de la Région Tanger – Tétouan – Al Hoceima - afin qu’ils puissent s’acquitter au mieux du rôle qui leur a été attribué dans le cadre de la loi organique 111.14 ; (2) La consolidation et le renforcement des mécanismes de collaboration, de concertation, et de participation citoyenne entre le conseil de la région et les acteurs régionaux, notamment la société civile et les instances consultatives ; (3) Le développement et la mise en œuvre d’une stratégie de communication susceptible de servir comme levier pour le succès du développement régional.

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