copy the linklink copied!Chapitre 2. Un système de financement du développement durable en expansion, caractérisé par la multiplication des acteurs et des ressources

Le système de financement du développement durable s’est profondément modifié ces dernières années, avec la multiplication du nombre des acteurs. Cette expansion conduit à s’interroger sur la répartition des rôles et réclame une nouvelle cartographie des contributions.

Ce chapitre propose divers instantanés du paysage du financement du développement durable, sur la base des volumes de financement versés par différents acteurs – extérieurs, nationaux, publics et privés – et de la répartition des différentes sources au fil du temps. Il brosse un tableau plus détaillé des différents rôles des acteurs et de leurs ressources. Il examine par ailleurs l’impact des évolutions financières et économiques survenues ces dernières années sur les divers types de financement, en mettant l’accent sur le contexte historique et le créneau spécifique à chacun d’entre eux.

    

copy the linklink copied!En bref

Le Programme d’action d’Addis-Abeba (PAAA) élargit les définitions classiques du financement du développement, en exposant les responsabilités et les rôles des acteurs nationaux, internationaux, privés et publics. Ce faisant, il donne beaucoup plus d’ampleur aux ressources potentiellement disponibles pour le financement du développement durable.

Les gouvernements des pays en développement et leurs ressources sont le pilier central du financement dans le paysage du développement durable. Il est pourtant impéératif de mobiliser davantage de recettes publiques.

  • En 2016, les recettes fiscales se sont élevées à 4 300 milliards USD, soit plus du double des flux transfrontaliers.

  • Le ratio recettes fiscales/PIB des pays à faible revenu et des pays moins avancés s’élève toutefois à 14 % en moyenne, et est dans bien des cas très inférieur aux 15 % recommandés comme seuil minimum pour un bon fonctionnement de l’État.

L’investissement intérieur représente une proportion considérable du PIB de la plupart des pays, mais le durcissement des conditions de financement semble avoir entraîné un déclin brutal de l’investissement privé.

  • Hors République populaire de Chine (ci-après la « Chine »), les fusions-acquisitions nationales ont diminué de plus de 60 % entre 2010 et 2017, passant d’un montant de 237 milliards USD à 95 milliards USD.

Le volume des financements transfrontaliers en direction des pays en développement atteint déjà des montants considérables et s’élevait à 1 700 milliards USD au total en 2016.

Ce sont les acteurs du secteur privé qui représentent la plus grande part de ces financements extérieurs, même si leurs apports font appararaître un déclin préoccupant.

  • Les investisseurs commerciaux sont les principaux bailleurs de fonds : l’IDE, les investissements de portefeuille et la dette à long terme s’élevaient à 890 milliards USD en 2016.

  • Entre 2012 et 2016, le manque à gagner pour les pays en développement au niveau de l’IDE se chiffrait entre 400 et 450 milliards USD. En plus de la baisse non négligeable des ressources financières qu’il représente, ce recul peut également réduire les possibilités pour les pays en développement d’accéder aux marchés internationaux et au savoir-faire technique.

Les envois de fonds des émigrés originaires de pays en développement représentent la deuxième source de financement extérieur du développement durable, et la moins volatile.

  • Les envois de fonds se sont élevés à 466 milliards USD en 2017 et peuvent représenter, dans certaines petites économies, près ou plus de 30 % du PIB national – ce dernier cas étant celui du Kirghizistan.

Le secteur public, autrement dit les apporteurs publics, allouent des ressources substantielles aux pays les plus vulnérables, pour lesquels ils peuvent revêtir une importance particulière.

  • Les versements des apporteurs bilatéraux et multilatéraux se sont montés à 311 milliards USD en 2016. Depuis 2000, les financements alloués à des conditions libérales ont augmenté le plus rapidement pour le groupe des pays à faible revenu et celui des pays fragiles ou touchés par un conflit.

Les fondations philanthropiques sont des acteurs clés du secteur de la santé et font parfois œuvre de pionniers en recourant à des solutions de financement innovantes. Leurs apports sont toutefois moindres que ceux d’autres fournisseurs.

  • Sur les 8 milliards USD de dons philanthropiques dont ont bénéficié chaque année les pays en développement entre 2013 et 2015, 3.21 milliards USD en moyenne, soit 40 % du total, ciblaient le secteur de la santé.

Le financement des Objectifs de développement durable (ODD) dans les pays en développement ne portera ses fruits que si ces différentes contributions sont bien comprises et pleinement exploitées. Or, si la somme des ressources disponibles offre des perspectives encourageantes pour ce qui est de la prise en charge des besoins de financement du Programme à l’horizon 2030, les financements ne sont pas encore suffisamment ciblés sur des objectifs de développement. Dans les faits, rassembler différents acteurs animés de motivations diverses constitue un défi colossal.

Les lacunes des données, pour ce qui concerne par exemple les acteurs des pays en développement, empêchent de dresser un tableau exhaustif de la situation.

  • À titre d’illustration, le montant des financements alloués à des conditions libérales par la Chine en un an est estimé entre 3 et 7 milliards USD.

  • Dans le même ordre d’idées, si les dépenses publiques nationales et l’investissement privé sont des moteurs importants du financement du développement, les données relatives à leurs volumes et leurs utilisations sont extrêmement limitées.

Le fait que les ODD et le PAAA témoignent d’engagements souscrits par les pays au nom de parties tierces non étatiques jouant également un rôle important dans le financement à l’appui du développement durable est une autre difficulté. Les décisions concernant certains des financements communs les plus importants – investissements transfrontaliers et envois de fonds – sont prises par des acteurs privés, en fonction de considérations qui ne sont pas forcément guidées par les ODD. L’un des principaux défis consiste alors à repérer les possibilités de « gagner sur les deux tableaux », à savoir de répondre aux motivations de ces acteurs privés, tout en contribuant à la réalisation des ODD.

copy the linklink copied!Ressources financières intérieures et moteurs internes

Le PAAA met en avant le fait que tout pays est responsable au premier chef de son propre développement économique et social (paragraphe 9). L’objectif ultime des initiatives en faveur du financement du développement est en effet l’instauration d’un système de financement du développement durable reposant sur des mécanismes nationaux opérationnels, efficaces et intégrés au système mondial. L’efficacité et l’efficience des régimes fiscaux, des systèmes de gestion des finances publiques et de la gouvernance, de même que l’existence de marchés dynamiques et résilients sont autant de facteurs importants à cette fin.

S’il incombe en premier lieu aux acteurs nationaux des pays en développement de veiller à ce que ces moteurs internes fonctionnent correctement et à ce que les ressources intérieures soient utilisées à bon escient, la communauté internationale et les (apports de) ressources extérieures pourraient appuyer leurs initiatives dans ce sens. Les interactions entre les sphères nationale et internationale sont extrêmement élevées dans des domaines tels que la fiscalité et le système financier, ce qui souligne l’importance de l’environnement international et du cadre stratégique pour soutenir les efforts déployés par les pays à titre individuel.

Secteur public national

Les ressources du secteur public national influent sur les Objectifs de développement durable

Les gouvernements sont responsables au premier chef de la mise en oeuvre du Programme 2030, une mission dont ils s’acquittent en allouant des financements directs et en définissant le cadre réglementaire de l’investissement privé étranger et intérieur.

Les recettes fiscales sont la principale source de financement, et dépassent en volume toute autre source extérieure prise séparément. En 2016, les recettes fiscales des pays en développement se sont élevées à 4 300 milliards USD. La part des recettes fiscales dans l’ensemble des financements variait de 42.7 % dans les pays moins avancés et 42.4 % dans les pays à faible revenu à 62.2 % dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et 78.2 % dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure.

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Graphique 2.1. Les différents flux financiers à destination des pays en développement
Milliards USD, 2016
Graphique 2.1. Les différents flux financiers à destination des pays en développement

Note : les estimations ont été établies pour la liste des pays en développement éligibles à l’APD, et excluent un certain nombre de pays et territoires par manque de données sur les recettes fiscales. Sont exclus les pays à faible revenu (PFR) suivants : République populaire démocratique de Corée ; Somalie, qui est aussi un pays moins avancé (PMA) ; et Soudan du Sud (également un PMA).

Les pays et territoires à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) suivants sont exclus : Bhoutan (PMA), Kosovo, Mongolie, Myanmar (PMA), Sri Lanka, République arabe syrienne, Vanuatu (PMA), Cisjordanie et bande de Gaza. Un troisième groupe de pays exclus appartient aux pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS) : Cuba, Fidji, ex-République yougoslave de Macédoine, Libye, Monténégro, Nauru et Venezuela.

Source : FMI (2017[1]), World Revenue Longitudinal Data, https://data.world/imf/world-revenue-longitudinal-dat ; et OCDE (2018[2]) (2018[3]), Base de données mondiale des statistiques des recettes publiques, https://stats.oecd.org/index.aspx?DataSetCode=REV ; OCDE (2018[2]), Système de notification des pays créanciers, https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=crs1 ; Banque mondiale (2018[3]), Migration and Remittances Data, http://www.banquemondiale.org/fr/ topicmigrationremittancesdiasporaissues/brief/migration-remittances-data ; FMI (2017[4]), Balance of Payments Statistics 2017, http://www.imf.org/external/datamapper/datasets/BOP pour les données sur l’investissement privé.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974066

À des ressources publiques plus importantes sont associées des dépenses plus élevées destinées aux ODD, notamment à ceux liés à la santé (ODD 3) et l’éducation (ODD 4)1. Les ressources publiques intérieures peuvent contribuer à la lutte contre les inégalités (ODD 10) en redistribuant la richesse d’une manière acceptable par la société dans son ensemble. Si les données relatives à l’effet redistributif des systèmes fiscaux dans les pays en développement restent limitées, il a récemment été confirmé que les systèmes fiscaux des pays en développement et des pays développés peuvent réduire les inégalités et favoriser une croissance inclusive (Encadré 2.1).

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Encadré 2.1. Les politiques budgétaires peuvent contribuer à atténuer les inégalités

Il ressort de l’expérience des pays développés que des politiques budgétaires saines peuvent jouer un rôle essentiel pour atténuer les inégalités tout en favorisant une croissance durable. La plupart des pays ont vu les inégalités de revenu et de patrimoine se creuser au cours des dernières décennies, mais à un rythme différent et dans une mesure variable. La gestion des ressources publiques, la réglementation des marchés de capitaux, la législation du travail et les politiques fiscales, par exemple les efforts visant à prévenir la fraude fiscale, sont autant d’éléments qui influent considérablement sur la dynamique des inégalités (Alvaredo et al., 2018[5]). L’expérience des pays développés concernant les inégalités et les politiques fiscales a montré le potentiel de la fiscalité progressive, de transferts bien ciblés et de dépenses de qualité au bénéfice des pauvres pour assurer une redistribution efficiente. De fait, les études fondées sur des analyses de régression, menées pour l’essentiel dans des économies développées, laissent penser qu’il est possible de réduire les inégalités en consacrant plus de dépenses aux prestations sociales et en recourant davantage à la fiscalité directe (FMI, 2016[6]).

La structure de la fiscalité a son importance dans les effets qu’elle peut avoir sur les inégalités. Les impôts indirects sont généralement régressifs car les populations pauvres consacrent une plus forte proportion de leurs revenus à la consommation. Les impôts directs prélevés sur les revenus du travail, du capital, sur le patrimoine ou sur l’héritage ont plus de chances d’être progressifs et, par là même, d’agir sur les inégalités, s’ils sont conçus de manière à appliquer des taux d’imposition plus élevés aux particuliers dont la capacité contributive est supérieure (Alvaredo et al., 2018[5]).

De même que les impôts, les dépenses sociales peuvent réduire les inégalités. Les dépenses consacrées aux systèmes éducatifs et aux systèmes de santé, qui concernent de vastes pans de la population, peuvent faire naître de meilleures perspectives d’emploi, induire une plus large participation au processus politique et améliorer le bien-être, en favorisant par là même une plus grande égalité des chances (OCDE, 2008[7]). Les filets de sécurité sociale que constituent l’indemnisation du chômage ou le versement de pensions de l’aide sociale peuvent renforcer la résilience des ménages face aux chocs économiques et, de ce fait, aider à sortir les plus vulnérables de la pauvreté (Banque mondiale, 2018[8]).

La composition des dépenses peut être aussi importante que le volume des ressources publiques disponibles, et les dépenses de redistribution peuvent contribuer à rééquilibrer les aspects régressifs du système fiscal. La conception des mesures budgétaires, si elle va dans le sens de la justice fiscale, peut à elle seule favoriser une réduction des inégalités. Les dépenses sociales exprimées en pourcentage du PIB dans la plupart des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire représentent à peine la moitié des dépenses sociales moyennes des pays à revenu élevé. Selon une étude en cours portant sur 28 pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire, il est indiscutable que les politiques budgétaires réduisent les inégalités et renforcent l’égalité des revenus. Elles ont également une incidence sur la réduction de la pauvreté dans la plupart des pays (Lustig, 2017[9]).

Les ressources publiques intérieures ne sont toujours pas suffisantes pour concrétiser les ambitions aux niveaux mondial et national

Les pays peuvent opter pour différentes approches du financement du développement compatibles avec de faibles ratios impôts/PIB. Diverses dimensions du développement, telles que la fragilité, la vulnérabilité économique et le développement du capital humain peuvent peser sur la capacité à collecter des recettes2. Si le ratio recettes fiscales/PIB idéal n’existe pas, un ratio de 15 % est de plus en plus recommandé comme seuil minimum pour un bon fonctionnement de l’État (FMI, OCDE, ONU, Banque Mondiale, 2016[10]) ; (Gaspar, Jaramillo and Wingender, 2016[11]). Comme le montre le Graphique 2.2, les pays à faible revenu et les pays moins avancés n’atteignent pas ce ratio, en dépit d’une légère amélioration depuis 2005. Le ratio moyen dans les pays à revenu intermédiaire est supérieur à 15 % mais reste bien au-dessous de la moyenne de l’OCDE qui s’établissait à 34.3 % en 20163, ce qui donne à penser qu’il existe une bonne marge de manœuvre pour augmenter encore les recettes fiscales afin de financer le développement durable. Cette hausse deviendrait plus impérieuse encore si les possibilités de financer les dépenses publiques par l’emprunt venaient – sous l’effet de la hausse des niveaux d’endettement dans les pays en développement – à s’amenuiser (Chapitre 5).

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Graphique 2.2. Ratio recettes fiscales/PIB par catégorie de pays
% du PIB
Graphique 2.2. Ratio recettes fiscales/PIB par catégorie de pays

Note : les ratios sont calculés pour les pays figurant sur la liste des pays en développement bénéficiaires de l’APD établie par l’OCDE.

Source : FMI (2017[1]), World Revenue Longitudinal Data, https://data.world/imf/world-revenue-longitudinal-dat; OCDE (2018[12]), Statistiques des recettes publiques (base de données), https://stats.oecd.org/index.aspx?DataSetCode=REV.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974085

L’aptitude et la capacité des pays à accroître leurs recettes fiscales est très variable. La mobilisation de recettes fiscales supplémentaires n’est en outre pas toujours souhaitable, en raison des coûts d’opportunité qu’elle implique. Les estimations de l’effort fiscal évaluent le rapport entre les recettes et les recettes potentielles compte tenu, entre autres, du PIB et du niveau de développement d’un pays. Si les recherches dans ce domaine sont relativement peu nombreuses, une étude de Fenochietto et Pessino (2013[13]) a révélé que l’effort fiscal des pays à revenu élevé était supérieur (77 %) à celui des pays à faible revenu (65 %) et des pays à revenu intermédiaire (64 %). Ces catégories sont toutefois loin d’être homogènes, et un grand nombre de pays en développement semblent fonctionner à un niveau proche de leur potentiel. À l’échelon régional, c’est l’Afrique qui se classe au deuxième rang en termes d’effort fiscal (71 %), précédée uniquement par l’Europe (77 %) et loin devant l’Asie et le Pacifique (59 %).

Dans les pays où l’effort fiscal est déjà élevé, la hausse des recettes, souvent, ne dépend pas uniquement d’un changement de la politique fiscale ou d’améliorations administratives, mais elle est également tributaire de la croissance et des évolutions structurelles de l’économie. Il est en conséquence fondamental d’œuvrer au développement du secteur privé national, un point qui est examiné plus en détail dans la suite du présent chapitre. De nombreux pays en développement sont également dotés de secteurs informels très vastes et d’économies souterraines dans lesquelles les transactions en espèces ne laissent aucune trace comptable pouvant être utilisée à des fins fiscales. Les revenus, mêmes lorsqu’ils sont déclarés, sont souvent largement sous-estimés. De nombreux pays en développement se heurtent en outre à d’autres difficultés pour faire croître leurs recettes fiscales, telles que des administrations fiscales défaillantes et une médiocre gouvernance. Or, des choix stratégiques résolus peuvent faire la différence, comme l’illustre le Point de vue consacré à la réforme fiscale en Indonésie (« Il est primordial de réformer la fiscalité et de veiller à la qualité des dépenses pour rendre l’économie plus durable et plus inclusive »).

Les politiques fiscales internationales ont également un impact non négligeable sur les recettes fiscales, notamment en réduisant la capacité des entreprises multinationales à transférer leurs bénéfices à l’étranger et à se soustraire à l’impôt sur les sociétés dans le pays où elles mènent leurs activités. Cet aspect revêt une importance particulière pour les pays en développement, pour lesquels la fiscalité internationale des entreprises a des retombées particulièrement prononcées et utiles (FMI, 2014[14]).

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Encadré 2.2. Point de vue : Il est primordial de réformer la fiscalité et de veiller à la qualité des dépenses pour rendre l’économie plus durable et plus inclusive, par Sri Mulyani Indrawati, Ministre des Finances, Indonésie

Il est indispensable de réformer la fiscalité pour assurer le recouvrement des recettes et promouvoir l’équité

Conscient du fait que l’existence d’un système fiscal solide est un paramètre essentiel pour favoriser le développement durable, le gouvernement indonésien a récemment mis en place un programme d’amnistie fiscale. Lancé en 2016, ce programme a permis de recueillir auprès de 973 400 contribuables des recettes représentant au total 115 900 milliards IDR (soit environ 8.5 milliards USD) au titre de régularisations, et d’obtenir que soient déclarés à l’administration fiscale indonésienne des avoirs se chiffrant à 4 865 700 milliards IDR (soit environ 366 milliards USD) : l’objectif visé par les pouvoirs publics a été dépassé.

Dans le prolongement du programme d’amnistie fiscale, le gouvernement indonésien a également engagé une réforme d’envergure de la fiscalité destinée à en renforcer la progressivité et à rationaliser des incitations et exonérations trop généreuses et inefficaces. La simplification du processus de collecte de l’impôt permettra d’améliorer la discipline fiscale à brève échéance. Pour que cette évolution s’inscrive dans la durée, l’éducation fiscale sera intégrée dans les programmes d’enseignement classiques. L’utilisation des technologies de l’information facilitera l’amélioration de la gestion des bases de données fiscales et la surveillance exercée par l’administration fiscale.

La qualité des dépenses est l’un des vecteurs de la dynamique du développement durable et inclusif

L’Indonésie a réagi à la hausse des cours mondiaux du pétrole en commençant en 2015 à réformer son dispositif de subventions à l’énergie afin de se donner une marge de manœuvre budgétaire supplémentaire et de réduire les distorsions induites par des subventions mal ciblées. Des subventions à l’énergie se chiffrant à plus de 180 000 milliards IDR ont été redéployées vers des emplois plus productifs tels que le financement d’infrastructures, l’enveloppe correspondante ayant été portée de 154 700 milliards IDR en 2014 à 410 400 milliards IDR en 2018.

La suppression des subventions à l’énergie a également servi à accroître les dotations budgétaires allouées à d’autres secteurs prioritaires comme la santé, l’éducation et l’aide sociale. En outre, le gouvernement s’attache actuellement à donner un coup d’accélérateur aux programmes en faveur des services sociaux et à accroître les transferts au profit des administrations infranationales et des villages pour que le développement économique soit plus équilibré, inclusif et durable.

L’OCDE a un rôle important à jouer

Si l’on se réfère à l’expérience de l’Indonésie, il apparaît que le rôle joué par l’OCDE dans le financement du développement peut recouvrir des initiatives destinées à aider les pays en développement à combler les lacunes que présente l’action publique menée en vue d’instaurer un développement durable et inclusif tout en les rapprochant d’un système reposant sur l’équité des règles du jeu. Il faut pour cela privilégier le renforcement des capacités qui passe par des examens des politiques menées au niveau des pays et par des analyses comparatives, à l’échelle mondiale, des politiques publiques et des résultats obtenus. De plus, l’OCDE peut contribuer à moduler et améliorer la mise en œuvre des initiatives et des programmes en produisant des études et des évaluations des progrès accomplis, en mettant en lumière les problèmes rencontrés et en formulant des recommandations d’action aux niveau national, régional et mondial. Par ailleurs, et compte tenu des travaux menés à l’échelon des pays, l’Organisation peut dispenser des conseils sur la manière de raccorder les initiatives régionales et mondiales aux priorités nationales, de façon à renforcer l’appropriation par les pays et la mobilisation de ces derniers.

Des initiatives internationales sont nécessaires pour intensifier la mobilisation des ressources intérieures

Les partenaires internationaux doivent réfléchir aux moyens les plus efficaces d’aider les pays en développement à atteindre leur potentiel en matière de mobilisation de recettes intérieures. Pour la plupart des pays, les mesures les plus efficaces consisteront à associer coopération pour le développement et cohérence des politiques. Les pays donneurs signataires de l’Initiative d’Addis-Abeba partagent ce constat et se sont collectivement engagés à doubler leurs dépenses allouées au développement des capacités fiscales entre 2015 et 2020, et à améliorer la cohérence des politiques à l’appui du développement sur les questions fiscales.

S’il est important d’engager des ressources à l’appui du renforcement des capacités, il convient en parallèle de veiller à ce que ces ressources aient un réel impact. Même multipliée par deux, l’APD affectée à la mobilisation des ressources nationales ne s’élèvera qu’à 445 millions USD, soit à peine environ 0.3 % de l’APD, il est donc essentiel d’en retirer un rendement maximum. Dans ces conditions, il est fondamental de s’assurer de l’impact des ressources, et l’adoption de nouvelles approches en matière de renforcement des capacités peut être nécessaire à cette fin. L’une des approches envisageables est celle mise en œuvre dans le cadre de l’initiative Inspecteurs des impôts sans frontières, qui fait appel à des contrôleurs fiscaux expérimentés pour travailler avec les autorités fiscales des pays sur des cas réels. Elle a permis de mobiliser jusqu’à présent 414 millions USD de recettes fiscales supplémentaires. Son retour sur investissement est ainsi supérieur à 100:1.

L’alignement des politiques intérieures dans les pays développés peut en outre concourir à la mobilisation des recettes nationales dans d’autres pays. L’adoption de nouvelles normes internationales sur l’échange de renseignements et d’une nouvelle fiscalité des entreprises multinationales, assortie de mesures à l’appui de leur mise en œuvre, est le moyen le plus évident de favoriser cet alignement. Ces normes impliquent en effet pour les pays un engagement à coopérer, qui renforce de fait leur capacité collective à augmenter leurs recettes (Chapitre 5). L’échange automatique de renseignements permet aux autorités fiscales de recevoir automatiquement des renseignements sur les comptes financiers détenus par leurs contribuables à l’étranger. Plus de 100 pays et territoires se sont pour l’heure engagés à pratiquer cet échange. Amener un nombre plus important de pays en développement à rejoindre ce réseau offre des perspectives considérables, ainsi qu’en témoigne l’expérience de l’Indonésie décrite à l’Encadré 2.2. Le projet de l’OCDE et du Groupe des 20 (G20) sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) propose une série d’outils pour faire face aux stratégies les plus couramment utilisées par les entreprises multinationales en vue de transférer leurs bénéfices à l’étranger. Les 117 pays et territoires membres du Cadre inclusif sur le BEPS se sont en outre engagés à respecter les quatre standards minimums portant sur des problématiques transfrontalières. L’échange de renseignements et tout comme les actions prévues par le BEPS ont pour effet d’augmenter fortement le volume de renseignements et l’offre de solutions à la disposition des pays en développement pour mettre en place une fiscalité efficace des activités transfrontalières. Afin de concrétiser pleinement ce potentiel, il importe que les outils soient conçus de manière à être adaptés à leur objectif et, en particulier, à tenir compte des capacités limitées des pays en développement. À cet égard, la mise en place du Cadre inclusif sur le BEPS est une évolution majeure, en ce qu’elle intègre, sur un pied d’égalité, les pays en développement aux processus internationaux d’établissement de normes sur la fiscalité.

Les initiatives visant à accroître les recettes fiscales doivent s’accompagner d’un soutien au renforcement des systèmes de gestion des finances publiques. Le rôle des pouvoirs publics n’est pas uniquement de mobiliser des ressources mais également d’utiliser ces dernières de manière à promouvoir un développement durable. Les améliorations du système fiscal qui ne s’accompagnent pas d’améliorations de la façon dont les ressources sont utilisées ont peu de chances d’aboutir aux résultats escomptés en matière de développement. Afin de veiller à ce que les ressources soient utilisées de manière efficace et durable, il importe d’ancrer les approches à l’appui de la mobilisation des ressources nationales dans des cadres plus vastes de gouvernance budgétaire.

Secteur privé national

L’investissement intérieur, pourtant la principale source de formation du capital, semble en perte de vitesse

L’investissement intérieur privé peut prendre la forme de l’investissement consenti par les entreprises privées qui réinvestissent leurs bénéfices et/ou de financements d’autres sources, qui peuvent provenir de banques, du capital-investissement ou de marchés d’actions dont le nombre va grandissant.

L’investissement intérieur privé est difficile à mesurer par la simple observation, car les indicateurs sont souvent mélangés à d’autres catégories. La formation brute de capital fixe moins l’IDE en tant que pourcentage du PIB est l’une des mesures indirectes qui peuvent être utilisées pour estimer la proportion de formation de capital financée par les ressources intérieures. Le Graphique 2.3 montre qu’en dépit des écarts considérables entre les pays en développement, l’investissement intérieur total représente en général une proportion non négligeable du PIB. Le lien entre investissement intérieur et PIB augmente brutalement aux niveaux inférieurs de revenu par habitant et dépasse 20 % du PIB dans de nombreux pays en développement, y compris les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. En comparaison, le financement externe total représente en moyenne moins de 20 % dans les pays à faible revenu, moins de 10 % dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, et moins de 5 % dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure.

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Graphique 2.3. Investissement intérieur privé au regard du PIB par habitant
Formation brute de capital fixe dans le secteur privé moins IDE, % du PIB par habitant, 2014-16
Graphique 2.3. Investissement intérieur privé au regard du PIB par habitant

Note : la courbe du graphique représente les ressources intérieures calculées par la différence entre la formation brute de capital fixe (FBCF) dans le secteur privé et les apports nets d’investissement direct étranger. Les pays pris en compte sont des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure à supérieure pour lesquels on dispose de données relatives à la FBCF dans le secteur privé, à l’IDE et au PIB. Ces pays sont les suivants : Afrique du Sud, Angola, Bangladesh, Bolivie, Botswana, Burundi, Cameroun, Croatie, Égypte, El Salvador, Fédération de Russie, Géorgie, Ghana, Guyana, Honduras, Liban, Madagascar, Malawi, Malaisie, Mauritanie, Maurice, Mexique, Népal, Niger, Ouganda, Ouzbekistan, Pakistan, Panama, Pérou, Philippines, République démocratique du Congo, République du Congo, République islamique d’Iran, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Suriname, Eswatini, Tchad, Thaïlande, Togo et Yémen.

Source : Banque mondiale (2018[15]), World Development Indicators database, http://databank.worldbank.org/data/reports.aspx?source=world-development-indicators.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974104

L’investissement intérieur privé semble être en perte de vitesse. Hors Chine, les fusions-acquisitions nationales ont diminué de plus de 60 % entre 2010 et 2017, chutant de 95 milliards USD à 237 milliards USD. Ce recul est le reflet de la tendance plus générale à la baisse enregistrée par l’investissement étranger, et en particulier les fusions-acquisitions transnationales dans les pays en développement, qui ont régressé de quelque 72 milliards USD, soit 30 %, comme l’illustre la suite du chapitre. À quelques exceptions notables près4, la chute du nombre des fusions-acquisitions nationales est encore plus rapide, ce qui laisse penser que ce sont certains des mêmes facteurs à l’origine du changement de trajectoire de l’investissement étranger, tels que la reprise économique dans les pays développés et les niveaux record d’endettement des entreprises dans les pays en développement, qui sont également à l’oeuvre dans la diminution de l’investissement intérieur dans des fusions-acquisitions.

Pour compenser ces évolutions, des mesures résolues doivent être prises à l’appui de l’investissement intérieur dans les pays en développement, en ciblant les obstacles et les risques auxquels il se heurte. La communauté internationale peut soutenir ces efforts en fournissant une assistance technique et financière afin de rendre l’environnement, y compris les cadres juridiques et réglementaires, plus favorable.

Le développement du secteur financier est un moteur clé de l’investissement intérieur

Lors de la mise en place d’un environnement favorable, le développement du secteur financier est primordial. Un système financier qui fonctionne correctement mobilise l’épargne intérieure, améliore la répartition des ressources et facilite la diversification et la gestion des risques (Levine, 2005[16]). Le développement du secteur financier est un élément catalyseur fondamental du Programme 2030. Il est d’ailleurs inclus en tant que cible dans 8 des 17 ODD. Il s’agit notamment de l’ODD 1 : éliminer la pauvreté ; de l’ODD 2 : éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire et promouvoir l’agriculture durable ; l’ODD 3 : bonne santé et bien-être ; l’ODD 5 : égalité entre les sexes ; l’ODD 8 : promouvoir la croissance économique et l’emploi ; l’ODD 9 : industrie, innovation et infrastructures ; et l’ODD 10 : réduire les inégalités. L’ODD 17 sur le renforcement des moyens de mise en oeuvre mentionne également le rôle implicite que pourrait jouer une meilleure inclusion financière au moyen d’une plus forte mobilisation de l’épargne à l’appui de l’investissement et de la croissance (Fonds d'équipement des Nations Unies, 2018[17]).

La promotion du développement du secteur financier progresse au niveau mondial. L’approfondissement du secteur financier, mesuré par l’ampleur du crédit intérieur produit et sa part dans le PIB, a fortement augmenté, en particulier pour les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (Graphique 2.4). Parallèlement, dans les pays à faible revenu, ce ratio a augmenté de près de 50 % depuis 1990 mais reste malgré tout très faible, ce qui tendrait à démontrer que l’approfondissement devrait être poursuivi. La faiblesse des cadres institutionnels, juridiques et réglementaires et des capacités correspondantes est souvent citée parmi les principaux obstacles à surmonter pour approfondir le système financier (FMI, 2012[18]).

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Graphique 2.4. Crédit intérieur au secteur privé en pourcentage du PIB
% du PIB
Graphique 2.4. Crédit intérieur au secteur privé en pourcentage du PIB

Source : Banque mondiale (2018[15]), World Development Indicators database, http://databank.worldbank.org/data/reports.aspx?source=world-development-indicators.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974123

Outre la profondeur, l’accessibilité, l’efficience et la stabilité du secteur financier sont des éléments importants pour obtenir des résultats au regard du développement (Levine, 2005[16]). Entre 2011 et 2017, la proportion de la population adulte mondiale titulaire d’un compte dans un établissement financier est passée de 51 % à 69 %, soit une augmentation de quelque 1.2 milliard d’individus (Demirgüç-Kunt et al., 2018[19]). Les avancées technologiques ont entrainé un développement des services financiers : les services bancaires mobiles permettent aujourd’hui d’atteindre un grand nombre d’individus privés de services bancaires et d’étendre les services financiers officiels aux populations pauvres, en particulier en Afrique subsaharienne. Au Kenya, 73 % des adultes disposent d’un compte de paiement mobile, une proportion qui s’établit à environ 50 % en Ouganda et au Zimbabwe (Demirgüç-Kunt et al., 2018[19]). De sérieuses inquiétudes subsistent toutefois quant à la sécurité des transactions bancaires mobiles, et les mécanismes réglementaires ne sont pas encore en place (Reaves et al., 2017[20]).

Les banques étrangères dominent les systèmes bancaires de nombre de pays en développement, notamment en Amérique latine et en Afrique subsaharienne. Cette situation est source de concurrence et d’efficience mais risque également de faciliter la transmission de chocs extérieurs. Pour les pays en développement, la part médiane des actifs détenus par des banques étrangères est passée de 8 % en 1995 à 52 % en 2008. Par comparaison, cette part est passée de 5 % à 27 % dans les pays développés au cours de la même période5. Les banques étrangères peuvent être source de concurrence et d’efficience, et avoir une influence stabilisatrice sur les économies intérieures en périodes de crise (Cull et al., 2017[21]). La crise financière mondiale a toutefois mis en évidence qu’elles pouvaient également favoriser la transmission des chocs et des crises extérieurs dans l’économie intérieure en diminuant plus tôt et plus rapidement leurs activités de prêt que les banques nationales, et en rapatriant les fonds dans leur pays d’origine (Anginer et al., 2014[22]).

Depuis la crise, des efforts ont été déployés pour garantir la prise en compte des préoccupations des pays en développement dans le système financier international. À la demande du G20, le Conseil de stabilité financière, en collaboration avec le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, suit les répercussions des réformes réglementaires sur les marchés émergents et les économies en développement, en tenant compte des thèmes présentant un intérêt pour les pays en développement lors de l’élaboration du cadre réglementaire international. Les réformes de la réglementation financière mondiale ayant été récemment menées à terme, les organisations financières internationales se préparent elles aussi à intensifier le renforcement de leurs capacités en vue de la mise en oeuvre des nouvelles normes. Le FMI a ainsi lancé le Fonds pour la stabilité du secteur financier en novembre 2017 afin d’aider les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure à évaluer les risques et les failles du secteur financier, et à y remédier.

En dépit de progrès considérables, des déficiences ou des défaillances du marché peuvent souvent entraver l’accès au financement pour certains segments de la société. Dans les pays à faible revenu, le manque de pratiques de prêt durable aux petites et moyennes entreprises (PME) freine la croissance. La Société financière internationale (2013[23]) estime que le déficit de financement par le crédit des PME du secteur formel dans les pays en développement avoisine les 1 000 milliards USD. Les disparités entre les sexes dans l’accès au financement persiste également. À l’échelle mondiale, 72 % des hommes sont titulaires d’un compte en banque, contre à peine 65 % des femmes, un écart qui est encore plus prononcé – de neuf points de pourcentage – dans les pays en développement (Demirgüç-Kunt et al., 2018[19]).

Les responsables de l’action publique doivent veiller à assurer la durabilité sociale et environnementale du secteur financier. Les initiatives visant instaurer ce que Grameen Capital India appelle un « écosystème de capital-risque social » sont des exemples des initiatives en cours décrites dans le Point de vue « Mettre à contribution les ressources privées pour financer le développement durable ». Il convient d’accorder une attention particulière aux pays à faible revenu, car les inefficiences du secteur financier représentent en général pour eux une charge plus lourde que pour les pays à revenu intermédiaire, du fait qu’ils sont généralement plus vulnérables face aux fluctuations des prix des produits de base et du financement extérieur (Eichengreen, Park and Shin, 2017[24]).

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Encadré 2.3. Point de vue : Mettre à contribution les ressources privées pour financer le développement durable, par Royston Braganza, PDG, Grameen Capital India

GOOOOAAAAAALLLLLL! Telle est la clameur bruyante qui s’élève dans les différentes contrées du monde chaque fois qu’un but est marqué, et traduit la passion universelle que semble susciter le football. Ce sport concerne toutes les générations, brouille les frontières entre les chapelles politiques et transcende les divisions ethniques. Malheureusement, il en va de même pour d’autres phénomènes – la faim, les crises des réfugiés, la pauvreté et le réchauffement climatique, pour n’en citer que quelques-unes. Et pourtant, partout où se tourne mon regard, je vois qu’il existe également de beaux exemples d’espoir, fondé sur les éléments ci-après.

Approche holistique. Les gouvernements, entreprises, marchés financiers, organisations non gouvernementales, etc. se doivent de trouver des solutions intégrées. À ce titre, citons un exemple exceptionnel, celui du potentiel que recèle, en tant que catalyseur, le fait d’utiliser les fonds destinés aux activités philanthropiques et/ou de responsabilité sociale d’entreprise pour atténuer les risques liés aux investissements provenant des marchés financiers. Le secteur financier peut aider les entreprises à envisager un avenir durable à long terme. C’est exactement ce qu’a fait le Growth guarantees programme (programme de garanties de la croissance) de la Fondation Grameen en rassemblant les donneurs, les banques internationales et locales, les institutions de microfinance, et les femmes pauvres et vulnérables qui recourent à l’emprunt.

Financement des résultats. Pendant très longtemps, l’accent a été mis sur le financement des intrants tels que les dons en faveur des programmes de santé, les dotations budgétaires pour une plus grande couverture des services d’éducation ou des objectifs similaires. Cependant, les récentes innovations en matière de financement des résultats ou « prime à la réussite » semblent monter en puissance. Le programme « Éduquer les filles » au Rajasthan (Inde) vise à améliorer les connaissances acquises et la fréquentation scolaire au Rajasthan. Ce programme comporte un formidable potentiel, étant donné que les acteurs des marchés financiers peuvent collaborer avec les organismes de développement pour structurer des instruments de financement innovants qui diminuent les risques encourus par l’investisseur et garantissent que les résultats sont bien définis, réalisés et mesurés, débouchant ainsi sur une « situation où tout le monde gagne ».

Leadership éclairé par des politiques. Les responsables de l’action publique ont un rôle clé à jouer en tant que facilitateurs en vue de la concrétisation du Programme 2030. Certaines politiques adoptées récemment en Inde incitent à l’optimisme – réaménagement de la nomenclature nationale des fonds pour y intégrer les fonds de capital-risque à caractère social ; proposition, par le décret relatif à la Loi sur les sociétés, d’affecter 2 % des bénéfices à la RSE, les réglementations de la Banque centrale concernant les prêts aux secteurs prioritaires et les petites banques commerciales – et font également entrevoir une plus grande sensibilité et une attraction plus forte des investisseurs éthiques. Des initiatives politiques comparables engagées dans les pays en développement pourraient enclencher la nécessaire dynamique initiale pour catalyser le développement du marché. À l’échelle mondiale, des pays comme le Royaume-Uni et les États-Unis ont également mis en place des initiatives de trésorerie pour attirer des capitaux commerciaux vers l’investissement à impact social.

Écosystème. Chaque partie prenante a un rôle à jouer. Cependant, l’effet est bien plus marqué, susceptible d’être amplifié et durable lorsqu’un écosystème propice est créé. Il est encourageant de voir la collaboration, en particulier dans le domaine du développement durable, entre de nombreuses institutions multilatérales, fondations, entreprises et organisations non gouvernementales (ONG). L’OCDE en constitue une brillante illustration, avec le travail de pionnière qu’elle accomplit sur les questions telles que la mesure d’impact et le financement mixte. À Grameen Capital India, nous nous attachons à instaurer un écosystème financier doté de conscience, en favorisant la mise en relation des entreprises au service des pauvres avec les marchés financiers ordinaires. Aujourd’hui, nous y avons ajouté une facilité d’emprunt aux caractéristiques uniques, et nous envisageons la création d’un fonds de capital-risque social et une bourse de valeurs à caractère social afin de démocratiser l’accès aux financements pour les entreprises ayant un fort impact.

Assurément, lorsque surviennent les temps difficiles, nous devons impérativement trouver des mesures inédites, bienveillantes et collaboratives (et parfois désespérées, originales) si nous voulons concrétiser les objectifs inscrits dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Je ne peux qu’imaginer l’euphorie qui gagnera le monde entier lorsque chaque objectif sera atteint. C’est certain, j’applaudirai et je clamerai de ma plus haute voix : « GOOOOAAAAAALLLLLL! ».

copy the linklink copied!Acteurs et apports financiers extérieurs

Les apports extérieurs peuvent avoir une importance déterminante dans le financement des ODD. Ils peuvent contribuer à combler les insuffisances d’une épargne intérieure faible, à financer des investissements productifs et à promouvoir la mise en place d’environnements nationaux favorables. Les apports financiers extérieurs sont définis par le type d’acteur concerné. Les apports financiers émanant des acteurs du secteur public, à savoir les apporteurs bilatéraux et multilatéraux, sont désignés sous le terme d’apports du secteur public, et sont assortis, ou non, de conditions libérales. Les financements fournis par les acteurs privés prennent pour leur part la forme d’investissements commerciaux, d’apports philanthropiques et/ou d’envois de fonds.

Les apports financiers extérieurs ont augmenté tout au long de la période des OMD, mais diminuent depuis 2013

Le volume de financement extérieur disponible pour les pays en développement est considérable, et est passé d’environ 675 milliards en 2000 à 1 700 milliards USD en 20166. La tendance depuis 2013 invite toutefois davantage à la prudence, les financements extérieurs totaux ayant chuté de 12 % (voir le Graphique 2.5).

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Graphique 2.5. Financements transfrontaliers en direction des pays en développement, 2000-16
Milliards USD 2016, prix constants
Graphique 2.5. Financements transfrontaliers en direction des pays en développement, 2000-16

Source : calculs de l’OCDE d’après OCDE (2018[2]), Système de notification des pays créanciers (base de données), https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=crs1 pour les apports bilatéraux et multilatéraux du secteur public ; Banque mondiale (2018[3]), Migration and Remittances Data http://www.worldbank.org/en/topic/migrationremittancesdiasporaissues/brief/ migration-remittances-data pour les envois de fonds ; FMI (2017[4]), Balance of Payments database, http://www.imf.org/external/datamapper/datasets/BOP pour l’IDE, les investissements de portefeuille ainsi que la dette à court et à long terme.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974142

L’évolution des apports extérieurs au fil du temps varie selon les types d’apport :

  • Les taux d’augmentation des apports d’investissements privés ont diminué, diminution qui se maintient dans tous les groupes de revenu.

  • Les apports du secteur public en direction des pays à faible revenu ont reculé récemment, en faveur d’une augmentation plus rapide de ceux alloués aux pays à revenu intermédiaire.

  • La croissance des envois de fonds est restée stable dans les pays à faible revenu, alors que les envois de fonds augmentent plus lentement dans les PRITS.

Différents acteurs ont différents rôles

La communauté internationale fait appel à l’ensemble des acteurs pour contribuer au financement du développement durable, mais les objectifs individuels des uns et des autres compliquent cet objectif.

  • Les apports concessionnels ainsi que les apports philanthropiques ont généralement pour objectif de promouvoir le développement durable.

  • Les investissements commerciaux sont motivés par la recherche de bénéfices.

  • La motivation principale des envois de fonds est de contribuer au bien-être de leurs bénéficiaires individuels au niveau des ménages.

Afin d’évaluer les implications de l’évolution des acteurs transfrontaliers et de leurs ressources, il importe de comprendre leur rôle dans le système de financement du développement durable. Les acteurs du secteur privé peuvent être source de gains de productivité et de création d’emplois, alors que l’avantage comparatif du secteur public réside plutôt dans son ciblage sur la pauvreté et les inégalités entre hommes et femmes. L’affectation sectorielle peut en outre varier selon le type d’acteur. Si le secteur privé investit en général dans des secteurs économiques tels que la fabrication, les apports du secteur public sont bien placés pour cibler les secteurs sociaux tels que la santé et l’éducation (voir le Chapitre 4). Ces rôles peuvent changer selon les niveaux de revenu (voir le Chapitre 6).

La destination des apports varie également selon le type d’acteur. Les pays à faible revenu dépendent en général davantage des apports publics, en particulier des apports concessionnels, tandis que pour les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI), ce sont les envois de fonds qui sont la première source de financement extérieur. Les apports publics non concessionnels ciblent les PRITI et les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS). La plus grande partie des financements privés est allouée aux PRITS, mais ces financements sont également une source importante pour les PRITI (Graphique 2.6).

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Graphique 2.6. Destination des financements extérieurs en 2016
Graphique 2.6. Destination des financements extérieurs en 2016

Source : calculs de l’OCDE d’après OCDE (2018[2]), Système de notification des pays créanciers (base de données), https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=crs1 pour les apports bilatéraux et multilatéraux du secteur public ; Banque mondiale (2018[3]), Migration and Remittances Data pour les envois de fonds ; FMI (2017[4]), Balance of Payments pour l’IDE, les investissements de portefeuille ainsi que la dette à court et à long terme.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974161

À l’heure actuelle, les ressources allouées aux pays en développement s’élèvent déjà à 1 700 milliards USD, mais chaque dollar n’a pas le même impact au regard du développement, comme l’analyse plus en détail le Chapitre 4. Afin de veiller à ce que les ressources soient dépensées de façon à favoriser le développement durable, il convient de mettre à profit la diversité des acteurs et leurs avantages comparatifs distinctifs.

Investisseurs commerciaux

  • L’investissement privé, y compris l’IDE, les investissements de portefeuille et la dette à long terme en direction des économies en développement s’est élevé à quelque 890 milliards USD en 2016.

  • Les apports d’investissement se tarissent les uns après les autres. Ce processus a débuté par les fusions-acquisitions transnationales, qui ont commencé à régresser aux environs de 2012 et avaient diminué de 72 milliards USD en 2017, par rapport au niveau de 2011 qui s’élevait à 234 milliards USD.

  • Les apports d’IDE, qui constituent la première source d’investissement privé, suivent cette tendance à la baisse. Au cours de la période 2015-16, les apports d’IDE en direction des pays en développement ont chuté de 70 milliards USD, soit 11 %, une tendance qui semble s’être poursuivie en 2017.

  • Plus récemment, le financement des projets au cours du premier semestre de 2018 avait baissé de 30 % par rapport à la même période de l’année dernière.

Les investisseurs commerciaux gagnent en importance et en diversité

Au cours des 30 dernières années, les entreprises multinationales ont joué un rôle important pour acheminer l’IDE7 et établir une présence dans les pays en développement. Ces vingt dernières années, en particulier, la nature de leurs apports d’investissement en direction des pays en développement a évolué pour abandonner un ciblage relativement étroit sur les industries extractives, et devenir, aux côtés des échanges, l’un des piliers des chaînes de valeur mondiales (CVM) (Encadré 2.4). De nombreux pays en développement participent aujourd’hui à la production de biens et de services de plus en plus sophistiqués, qui entrent dans les réseaux de production internationaux des entreprises multinationales. Les chaînes de valeur mondiales sont de plus en plus utilisées comme vecteurs du développement durable, essentiellement par le biais de transferts financiers, mais également par les transferts de connaissances, de normes et de compétences.

Les entreprises multinationales réalisent également des investissements de portefeuille, en particulier dans le contexte de partenariats stratégiques avec d’autres entreprises multinationales et des entreprises nationales. Leurs décisions d’investissement reposent sur un vaste éventail de facteurs tels que la taille du marché, les compétences de la main-d’œuvre, la stabilité macroéconomique et institutionnelle, les infrastructures matérielles et les ressources naturelles.

Au nombre des autres acteurs qui réalisent des investissements de portefeuille figurent des investisseurs institutionnels tels que les fonds de pension, les fonds souverains, les fonds communs de placement, les fonds de capital-investissement et les fonds d’arbitrage. Ces investisseurs sont souvent à la recherche d’opportunités dans les pays en développement en vue de réduire les risques de leurs portefeuilles d’investissement en les diversifiant et en recherchant des rendements plus élevés. Les actifs financiers dans les pays en développement n’ayant qu’une faible corrélation avec les rendements dans les économies développées, ils complètent le profil rendement/risque des investisseurs financiers dans les pays développés.

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Encadré 2.4. Les échanges ont été un moteur essentiel du développement, mais ils s’essoufflent

Les échanges ont toujours joué un rôle central dans la coopération et le développement économiques. Le système mondial actuel qui régit les échanges et l’investissement est le résultat des efforts déployés après la Seconde Guerre mondiale pour créer un système fondé sur des règles afin de réglementer les pratiques commerciales et en matière d’investissement, d’établir des normes du travail et de favoriser le développement. L’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) a été l’émanation de ces efforts et a lui-même conduit à la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). À la faveur de réductions successives des droits de douane, le commerce s’est considérablement libéralisé et les échanges mondiaux se sont accrus. Pendant plusieurs décennies, ces échanges ont connu une croissance nettement plus rapide que celle du PIB mondial.

Les chaînes de valeur mondiales (CVM) ont eu une incidence importante sur le développement. Ces réseaux internationaux de production et de distribution ont amélioré les perspectives de croissance des pays en développement et renforcé leur intégration dans les marchés mondiaux. Ainsi, la part qu’ils représentent dans les échanges mondiaux en valeur ajoutée est passée de 20 % en 1990 à 40 % en 2012 (CNUCED, 2013[25]). Les taux de croissance du PIB par habitant dans les économies dont le degré de participation aux CVM augmente le plus rapidement s’établissent à environ deux points de pourcentage au-dessus de la moyenne. Les bénéfices tirés des CVM sont toutefois concentrés dans certaines régions, notamment l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Asie de l’Est ; de nombreux pays en développement sont donc laissés de côté (CNUCED, 2013[25]).

Les entreprises multinationales génèrent environ 80 % des flux commerciaux (CNUCED, 2013[25]), lesquels sont intrinsèquement liés aux décisions en matière d’investissement direct étranger (IDE). Les échanges et l’IDE peuvent être considérés comme deux facettes d’une même activité économique, à savoir le partage international de la production (Forum économique mondial, 2013[26]). La corrélation positive qui existe entre les stocks d’IDE et la participation aux CVM est particulièrement visible dans les pays les plus pauvres, ce qui indique que l’IDE peut constituer un moyen important, pour les pays en développement, d’accéder et de participer davantage aux chaînes de valeur mondiales (CNUCED, 2013[25]).

Certaines activités des CVM régressent, ce qui soulève des questions concernant l’impact futur du commerce sur le développement. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le volume des échanges au niveau mondial s’est accru en moyenne 1.5 fois plus rapidement que le PIB mondial ; dans les années 90, il a même progressé deux fois plus vite. Néanmoins, après la crise financière mondiale, le ratio de la croissance des échanges sur la croissance du PIB est retombé aux alentours de 1:1 et les activités des CVM ont également régressé (Groupe de la Banque mondiale et al., 2017[27]). On ignore encore si cette évolution risque de modifier l’articulation entre investissement, échanges et développement, ou quelle incidence elle aura sur le financement du développement.

Les investissements dans les pays en développement à proprement parler représentent un quart des sorties d’IDE, contre environ 12-13 % avant la crise financière mondiale de 2008-09 (Banque mondiale, 2013[28]). La montée en puissance rapide de la Chine parmi les premières sources mondiales d’IDE, notamment par le biais de ses entreprises publiques, est un phénomène particulièrement important (Encadré 2.5).

La visibilité croissante de ce type d’acteur relativement nouveau – les entreprises publiques – va de pair avec l’importance croissante de l’investissement des pays en développement, qui est souvent acheminé par le canal des entreprises publiques. Même si elles ne sont pas au sens strict du terme des acteurs du secteur privé, les entreprises publiques se comportent souvent comme les entreprises multinationales du secteur privé, ce qui masque dans certains cas une participation importante de l’État. Les données relatives à l’IDE ne permettent pas d’établir de distinction entre les investissements internationaux des entreprises multinationales publiques et privées, mais les données relatives aux fusions-acquisitions transnationales donnent à penser que les entreprises multinationales publiques représentent au minimum 10-20 % des apports mondiaux d’IDE.

Enfin, une multitude d’acteurs privés sont souvent associés au financement de projets, l’une des formes d’investissement les plus importantes au regard du développement, et un mode de financement essentiel des investissements dits de création. Le financement de projets associe généralement des entreprises multinationales et des bailleurs commerciaux, ainsi que nombre des partenaires du secteur public détaillés dans la suite du chapitre, tels que les donneurs bilatéraux et multilatéraux, les banques régionales de développement et les organismes de crédit à l’exportation. Si en termes de volume, le financement de projets est moins élevé que les autres apports privés, il revêt de l’importance au regard des ODD, dans le sens où il soutient souvent directement des ODD spécifiques, tels que l’ODD 7 (développement des sources d’énergies renouvelables) et l’ODD 9 (infrastructure des transports).

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Encadré 2.5. La Chine est devenue la première source d’investissement dans les pays en développement

La Chine est une source d’investissement croissante dans les pays en développement. L’un des principaux moteurs de l’investissement étranger chinois est l’initiative des « Nouvelles routes de la soie », par laquelle transitent des milliards de dollars en direction de projets d’infrastructure dans des pays d’Eurasie et au-delà (OCDE, à paraître).

L’un des indicateurs de l’influence croissante de la Chine est la hausse des investissements au titre des fusions-acquisitions. Les fusions-acquisitions chinoises représentaient 20 % de toutes les fusions-acquisitions transnationales dont ont bénéficié les pays en développement, un pourcentage qui fait de la Chine la première source d’investissement dans ces pays, devant le Japon et les États-Unis. Les investissements chinois dans les pays en développement ont augmenté rapidement au début des années 2010 environ, et ont poursuivi leur hausse même lorsque les autorités chinoises ont entrepris de ralentir les sorties de capitaux de manière plus générale. En tout, les fusions-acquisions effectuées à l’étranger par la Chine ont diminué de 115 milliards USD, soit 53 %, entre 2016 et 2017, mais les fusions-acquisitions en direction des pays en développement ont doublé pour s’établir à 25 milliards USD (Graphique 2.7).8

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Graphique 2.7. L’importance croissante de la Chine en tant que source d’investissement dans les pays en développement
Graphique 2.7. L’importance croissante de la Chine en tant que source d’investissement dans les pays en développement

Source : calculs des auteurs sur la base de données de Dealogic (2018[29]), https://www.dealogic.com/content/.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974180

Cette hausse de l’investissement chinois dans les pays en développement semble indiquer une tendance résolue et soutenue par l’action des pouvoirs publics. Ces investissements sont pour la plupart consentis par des entreprises chinoises détenues à 100 % par l’État, une caractéristique qui n’a pas changé depuis le début de l’essor de l’investissement chinois dans les pays en développement en 2010. Au cours de cette période de huit ans, les entreprises détenues à 100 % par l’État ont représenté 63 % de cet investissement en termes de valeur.9 Ces données sous-estiment vraisemblablement la mesure dans laquelle l’Etat participe aux flux chinois d’investissement étranger, en particulier dans le contexte de l’initiative des « Nouvelles routes de la soie », dans le sens où elles n’incluent pas les activités menées par les entreprises semi-publiques et ne tiennent pas compte du rôle des banques publiques dans le financement des investissements étrangers des entreprises privées.

Les retombées des financements privés peuvent aller au-delà de l’aspect purement financier

Les investisseurs privés sont les premiers apporteurs de financements transfrontaliers des pays en développement. Cela signifie qu’encourager ne serait-ce qu’une proportion relativement faible de ces investissements à s’aligner sur les ODD offre des perspectives considérables. Même lorsque tel n’est pas leur objectif, les investisseurs privés et l’IDE qu’ils génèrent présentent un intérêt particulier au regard des ODD pour diverses raisons, et notamment les suivantes :

  • Ils transmettent de nouvelles technologies

  • Ils offrent un accès aux nouveaux marchés internationaux

  • Ils peuvent combler les manques que les investisseurs nationaux et les autres investisseurs et sources de financement ne peuvent pallier

  • Ils peuvent créer des emplois décents, offrent en général de meilleures rémunérations et respectent davantage les principes de la conduite responsable des entreprises que les entreprises nationales

  • Ils établissent généralement des relations commerciales au sein de l’économie qui viennent soutenir les entreprises nationales

  • Ils génèrent des recettes

Les acteurs du secteur privé peuvent jouer des rôles particulièrement importants dans le financement des Objectifs de développement durable tels que l’ODD 7 (énergie propre et d’un coût abordable) et l’ODD 9 (industrie, innovation et infrastructure). Lorsque les budgets publics sont sous pression, les investisseurs privés peuvent combler les déficits de financement des infrastructures et apporter les compétences nécessaires pour améliorer l’efficience des projets. Le Chapitre 4 analyse plus en détail les contributions spécifiques des investisseurs commerciaux à la concrétisation des ODD.

Ces retombées positives ne sont toutefois pas automatiques, ni même toujours garanties. La logique et les motivations qui guident les investisseurs privés diffèrent de celles des acteurs publics, et les rendements des investissements doivent être transformés en gains de développement. Afin de tirer pleinement parti du potentiel offert par les investisseurs privés en matière de développement durable, il importe de repérer les possibilités de « gagner sur les deux tableaux », à savoir de répondre aux objectifs des acteurs privés, tout en contribuant à la réalisation des ODD. Un défi majeur consiste en outre à ne plus se focaliser sur les quantités et les volumes pour s’intéresser à la qualité des financements et à leur impact sur le développement, comme l’examine plus en détail la Partie II.

Une ère de prospérité de l’investissement étranger pour les pays en développement touche à sa fin

L’investissement privé, y compris l’IDE, les investissements de portefeuille et la dette à long terme, dans les économies en développement s’est élevé à quelque 890 milliards USD en 2016. À leur apogée au début des années 2000, les apports d’investissement privé se montaient à plus de 8 % du PIB dans les PFR et les PRITS10.Au cours de la période 2000-16, l’investissement privé en pourcentage du PIB s’élevait en moyenne à 6.2 % pour les PFR, 5.6 % pour les PRITS et 4 % pour les PRITI. Avec des fluctuations d’une année sur l’autre, la part de l’investissement privé dans le PIB a globalement diminué par rapport au début des années 2000 et 2010 (Graphique 2.8).

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Graphique 2.8. Les apports d’investissement privé dans les pays en développement en pourcentage du PIB diminuent
% du PIB
Graphique 2.8. Les apports d’investissement privé dans les pays en développement en pourcentage du PIB diminuent

Source : calculs des auteurs d’après FMI (2017[4]), Balance of Payments database, http://www.imf.org/external/datamapper/datasets/BOP ; FMI (2018[30]), World Economic Outlook database, https://www.imf.org/external/pubs/ft/weo/2018/01/weodata/index.aspx.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974199

L’IDE, qui représente l’essentiel de ces apports, faisait preuve jusqu’à récemment d’une croissance et d’une résilience relativement solides. Les économies en développement ont relativement mieux résisté à la crise financière que les pays développés, et ont enregistré, pendant un an, une chute de l’IDE d’environ 30 %, avec des volumes tombant à quelque 430 milliards USD11 en 2009, par rapport à la chute de 40 % des apports mondiaux d’IDE. Les apports d’IDE se sont fortement redressés en 2010, grâce en grande partie à la hausse de 50 % des apports en direction des économies en développement au cours de cette année. Lors des cinq années qui ont suivi, les apports en direction des pays en développement ont été relativement stables, se hissait quelque 630 milliards USD en 2015.

Cette période de prospérité de l’IDE, comme l’ont appelée certains, a pris fin en 2016, lorsque les apports d’IDE ont inversé leur tendance à l’échelle mondiale. Au cours de la période 2015-16, les apports en direction des pays en développement ont chuté de 70 milliards USD, soit 11 %, une tendance qui a semblé se poursuivre en 2017. Cette baisse est à rapprocher d’un ensemble de facteurs conjoncturels de portée générale et de facteurs plus spécifiques à chaque pays. Au nombre des premiers figurent le resserrement de la politique monétaire dans les économies développées et le ralentissement du « super cycle » des produits de base (OCDE, 2016[31]). Parmi les facteurs spécifiques aux pays figurent diverses sources d’instabilité géopolitique, les inquiétudes liées à la montée du protectionnisme et les niveaux record d’endettement des entreprises dans les marchés émergents (FMI, 2016[6]). Les sorties d’IDE en direction des pays développés ont accusé un retournement de la même ampleur.

Les tendances au niveau des fusions-acquisitions12 dans les pays en développement montrent qu’à l’inverse des entrées d’IDE, les entrées de capitaux au titre des fusions-acquisitions avaient déjà commencé à décroître en 2012 (Graphique 2.9). En tout, les fusions-acquisitions dans les pays en développement représentaient un volume de 162 milliards USD en 2017, en baisse de 72 milliards USD par rapport au niveau record de 234 milliards USD atteint en 2011. Ce sont les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure qui ont enregistré les plus fortes baisses, les apports annuels des fusions-acquisitions en direction de la Chine ayant diminué de 19 milliards USD entre 2011 et 2017, contre 14 milliards USD en direction du Chili, 10 milliards USD en direction de la Turquie et 9 milliards USD en direction du Brésil.

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Graphique 2.9. Entrées de capitaux au titre de fusions-acquisitions : pays à revenu intermédiaire et pays moins avancés
Milliards USD
Graphique 2.9. Entrées de capitaux au titre de fusions-acquisitions : pays à revenu intermédiaire et pays moins avancés

Source : calculs des auteurs d’après des données de Dealogic (2018[29]), https://www.dealogic.com/content/

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974218

La diminution des fusions-acquisitions transnationales ne serait pas en soi une évolution négative si elle avait été compensée par une hausse des fusions-acquisitions nationales, tendance généralement associée au développement économique. Au cours de la dernière décennie, les pays développés ont perçu 29 % de leur investissement au titre de fusions-acquisitions de sources étrangères contre 71 % de source nationale.

À l’opposé, les pays en développement ont reçu 44 % de leur investissement au titre des fusions-acquisitions de sources étrangères, et 56 % de source nationale. Cette différence tient essentiellement aux insuffisances, imperfections et défaillances des marchés intérieurs, telles que la faiblesse du secteur financier intérieur. Ces facteurs peuvent retenir les investisseurs nationaux, mais les investisseurs étrangers ont les moyens de les surmonter étant donné les ressources dont ils disposent. Toutefois, comme indiqué, les fusions-acquisitions nationales dans les pays en développement ont diminué plus rapidement que les apports au titre de fusions-acquisitions transnationales, ce qui tendrait à mettre en évidence un déclin global de l’investissement du secteur privé dans les pays en développement.

Cette tendance à la baisse trouve écho dans les apports consentis au titre du financement de projets. Après avoir fait preuve de résilience face à la tendance globale à la baisse des investissements en 2016 et 2017, les financements de projets ont enregistré en 2018 leur pire semestre en dix ans, avec des volumes en baisse de 30 % par rapport à la même époque de l’année précédente (Graphique 2.5), et ce, dans l’ensemble des régions. Le nombre des nouvelles transactions a diminué de 50 % pour s’établir à 377 au premier semestre 2018, contre 725 au cours de la même période en 2017. En outre, 38 % des financements de projets ont été consentis à des fins de refinancement, en hausse par rapport à 24 % au cours des six premiers mois de 2017. En d’autres termes, alors même que le volume des financements de projets décroît, la proportion de ces financements allouée à de nouveaux projets est en baisse.

Une intervention publique est nécessaire pour contrer le recul de l’investissement étranger

L’investissement privé dans les pays en développement est actuellement comparable à une rivière dont les affluents se tarissent les uns après les autres. Ce processus a débuté par les fusions-acquisitions transnationales, qui ont commencé à fléchir aux environs de 2012. Il s’est poursuivi par des baisses de l’IDE et des fusions-acquisitions nationales en 2016, et, plus récemment, au cours du premier semestre 2018, des financements de projets. Les investissements de portefeuille sont également sous pression dans les pays en développement alors que les taux d’intérêt commencent à remonter dans les économies développées et que les niveaux record d’endettement des entreprises laissent entrevoir le spectre de turbulences financières (OCDE, 2018[32]).

Si l’agravation éventuelle de la situation dépend de plusieurs variables, la tendance actuelle n’est nullement encourageante. Compte tenu des limites de données, il n’est pas possible de chiffrer précisément l’ampleur de la baisse des investissements des entreprises privées dans les pays en développement. Toutefois, l’estimation d’un ordre de grandeur sur la base des baisses cumulées de l’IDE au regard d’une hypothèse fictive de croissance zéro à partir du niveau record précédent de l’IDE de 2011 laisse penser que les pays en développement ont enregistré un manque à gagner d’IDE situé entre 400 et 450 milliards USD sur la période 2012-2016.

Compte tenu de ce scénario, qui marque une évolution faisant passer des milliards aux millions au lieu de faire passer des milliards aux milliers de milliards, un programme d’action urgent et ambitieux s’impose, dont les différents volets pourraient porter sur les défis suivants :

  • Les règles mondiales régissant les échanges et l’investissement doivent être améliorées et leur fonctionnement rendu plus efficace de manière à soutenir une économie mondiale ouverte et fondée sur des règles. L’un des principaux risques pour les pays en développement serait le recours généralisé à des mesures protectionnistes agressives en matière d’échanges et d’investissement susceptibles d’accélérer ce qui n’est à ce jour qu’un retrait sensible, mais mesuré, des pays en développement de la part du secteur privé.

  • Alors que les sources de financement privées alignées sur les ODD et propices à leur réalisation s’amenuisent, les sources publiques sont amenées à gagner relativement en importance et devront jouer un rôle anticyclique, tout en reconnaissant qu’elles ne peuvent combler le manque créé par le secteur privé. L’auteur du Point de vue intitulé « Adapter la finance et le système financier pour « sauver le monde » réclame une utilisation stratégique des ressources publiques afin de mobiliser et d’attirer les capitaux privés. Une telle entreprise sera difficile dans les pays en développement en raison des répercussions négatives de la baisse des investissements des entreprises sur la capacité des gouvernements à maintenir des niveaux adéquats de recettes fiscales, une situation qui pourrait alimenter une spirale négative, avec la diminution des dépenses publiques allouées aux infrastructures essentielles pour les entreprises, qui assombrirait davantage le climat des affaires. Il est impératif que les donneurs coordonnent leur action afin d’optimiser l’impact de l’aide publique au développement et d’autres formes de financement public sur le développement.

  • Les possibilités de mettre en œuvre des programmes de réforme à l’échelon national pour améliorer le climat des affaires et des stratégies visant à promouvoir et faciliter l’investissement demeurent considérables. Bien qu’en baisse, l’investissement privé continue de jouer un rôle fondamental en aidant les pays à développer leurs infrastructures critiques, à créer des emplois et à promouvoir l’innovation. Les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer en contribuant à mieux aligner les intérêts des entreprises sur les ODD, et à produire ainsi un impact plus important à partir d’un investissement moindre. La promotion d’une conduite responsable des entreprises peut également être le moyen de favoriser cet alignement plus étroit.

Les apports privés constituent la première source de financements étrangers en direction des pays en développement. Si l’on porte le regard plus loin, et au-delà de la crise qui menace le développement, notre compréhension des apports privés et l’ensemble des implications de ce mode de financement sur la réalisation des ODD doit encore être grandement améliorée. Le PAAA a suscité des attentes élevées quant à la contribution du secteur privé au développement durable – des attentes qui contrastent avec l’évolution actuelle des apports privés. Cet écart dénote un important déficit de connaissances qu’il conviendra de combler afin d’étayer un programme d’action empirique à l’avenir.

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Encadré 2.6. Point de vue : Adapter la finance et le système financier pour « sauver le monde »

Bertrand Badré, ancien Directeur de la Banque mondiale et PDG, fondateur de Blue like an Orange Sustainable Capital

À n’en pas douter, 2015 a été une année historique. Il y a eu la Conférence internationale d’Addis-Abeba sur le financement du développement. À New York, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté, à l’unanimité, les Objectifs de développement durable. À Paris, un consensus a été trouvé au sujet de l’accord sur le climat, un ensemble d’objectifs et d’engagements véritablement ambitieux, et à peine trois plus tard, des avancées remarquables ont été enregistrées. Cependant, si nous souhaitons prendre réellement au sérieux ces accords et ces engagements, il est impératif que nous adaptions la finance et le système financier. L’un et l’autre doivent être repensés pour être à même de répondre aux attentes que nous avons suscitées. Nous devons œuvrer sans relâche pour réaliser les progrès nécessaires et marquer des points au tableau d’affichage avant que l’apathie ne s’installe.

À titre collectif, nous devons mettre l’accent sur le principe essentiel consistant à passer des « milliards aux milliers de milliards » dont certaines personnes et moi-même nous sommes faits les hérauts dès 2015. Nous devons mobiliser et attirer les capitaux du secteur privé pour financer les investissements dont les économies émergentes et en développement ont tant besoin. L’histoire a montré que ce flux de capitaux ne s’y dirige pas naturellement, du moins pas dans les proportions souhaitées. Des mécanismes doivent être mis en place pour créer ce flux.

C’est à ce niveau que le reste du système a un rôle crucial à jouer. L’intégration d’une telle approche dans le système financier dynamisera le flux des capitaux. Pour ce faire, chaque participant, chaque partie prenante doit revoir sa façon d’envisager la mobilisation des capitaux. À cet égard, les banques multilatérales de développement et les pays donneurs occupent une position éminente, en ce qu’ils possèdent les ressources ainsi que les différents types de capitaux et systèmes susceptibles d’être mis en commun avec les capitaux du secteur privé pour déboucher sur une situation « gagnant-gagnant » devenue un cliché. Le rôle des autorités de régulation est également déterminant, et ces dernières doivent sans cesse évoluer pour être en phase avec les nouveaux paradigmes et contribuer à stimuler l’innovation au sein d’un cadre approprié. Certes, la tâche n’est pas de tout repos, mais il est plus que nécessaire de s’y atteler si nous devons regagner la confiance que la crise financière a érodée. Nous sommes actuellement face à l’urgente nécessité d’engager non pas de simples mesures « cosmétiques », mais de véritables réformes porteuses de profondes transformations – un réel changement pour bon nombre des participants en place.

La coopération est essentielle. Les secteurs public et privé doivent travailler ensemble. Cette collaboration passe nécessairement par un changement de la façon dont l’un considère l’autre et de la façon dont, à la base, chacun est disposé à œuvrer de concert avec l’autre. Cela ne se concrétisera que lorsque toutes les deux parties auront accompli des efforts significatifs en ce sens. Une meilleure coopération entre les acteurs du secteur public s’impose également. En outre, le secteur privé doit procéder à des réévaluations permanentes et envisager les activités qu’il mène dans une perspective à plus long terme. La véritable beauté de tout ce changement réside dans le fait que, vu les différents mécanismes incitatifs, la nouvelle coopération peut revêtir un caractère réellement symbiotique. Les capitaux suivront les changements culturels. Et les changements culturels induiront une modification des flux de capitaux !

Un changement fondamental s’impose. Il faut faire preuve d’endurance et de patience. Si nous pouvons nous unir nos forces et adapter nos manières de voir et d’agir, si nous sommes disposés à payer ce « prix », alors nous nous ouvrirons une possibilité de concrétiser ces ambitieux objectifs, qui le sont à juste titre. Comment ne pas faillir ? Si nous sommes sérieux, si nous ne sommes pas inconséquents – comme la plupart d’entre nous ne le sont pas, je l’espère – nous n’avons pas le choix.

Envois de fonds des émigrés

  • A partir du début des années 2000, les envois de fonds ont connu une forte augmentation au niveau mondial, à la faveur d’avancées technologiques dans les infrastructures financières qui ont considérablement réduit les coûts de transfert des fonds.

  • Le montant des envois de fonds à l’échelle mondiale s’est élevé à 466 milliards USD en 2017, contre 122 milliards USD en 2000, ce qui fait des envois de fonds la deuxième source de financements transfrontaliers en direction des pays en développement.

  • Le coût moyen des envois de fonds est resté stable à 7.1 % – beaucoup plus élevé que l’objectif fixé au titre des ODD (cible 10.c) de moins de 3 %.

Les migrants des pays en développement font office d’apporteurs de financement à l’appui du développement durable

On a assisté ces dernières années à une hausse des migrations internationales. En 2015, 3.3 % de la population mondiale, soit 244 millions de personnes étaient des migrants internationaux. Il s’agit d’une augmentation considérable par rapport aux estimations de 2000 faisant état d’un nombre de migrants de 155 millions, soit 2.8 % de la population mondiale de l’époque. Nombre de ces migrants viennent de pays en développement et envoient des fonds dans leur pays d’origine afin d’aider leur famille.

La décision d’envoyer des fonds est essentiellement, par nature, d’ordre privé et personnel. Elle peut être motivée par l’altruisme, mais ne tient pas forcément ni explicitement compte de considérations liées à la réalisation des ODD dans le pays d’origine. Comme décrit à l’Encadré 2.7, les migrants sont influencés par divers facteurs, au nombre desquels peuvent figurer le souhait d’aider des membres de leur famille et l’intention de préparer leur retour dans leur pays (OCDE, 2006[33]). La volonté d’envoyer des fonds dépend aussi de la durée de la migration (la durée pendant laquelle un migrant entend rester à l’étranger et le caractère temporaire ou permanent de son séjour) ; de la situation familiale (le migrant est-il célibataire ou marié avec enfants ?) ; et des effets de réseau (le migrant s’est-il déplacé seul ou avec des membres de sa famille ? quelle est la force de son attachement aux personnes restées dans son pays d’origine ?) (OCDE, 2006[33]).

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Encadré 2.7. Les motivations qui sous-tendent les transferts de fonds

Un certain nombre de théories ont été avancées pour rendre compte des motivations qui sous-tendent les transferts de fonds : elles vont de l’altruisme pur (par exemple la préoccupation du migrant au sujet de la famille restée dans le pays d’origine) au pur intérêt égoïste (par exemple l’aspiration à hériter de biens ou le désir d’investir dans des actifs financiers ou dans l’immobilier dans le pays d’origine). Entre ces deux extrêmes, il existe une théorie fondée sur un modèle d’assurance qui considère la migration et les transferts d’argent comme une stratégie de gestion des risques par les ménages. Cette stratégie repose sur des accords non formalisés entre le migrant et les membres de la famille restés au pays, aux termes desquels la famille du migrant finance les coûts initiaux du projet de migration que le migrant à lui seul ne peut couvrir. En contrepartie et une fois que le migrant obtient un emploi, gagne des revenus assez élevés et nourrit des attentes positives quant à des revenus plus substantiels, celui-ci envoie des fonds à la famille en vue du financement d’investissements tels que l’éducation en faveur des plus jeunes et/ou pour soutenir la famille lors des situations d’urgence et en cas de besoin (OCDE, 2006[33]).

Des fonds sont également envoyés collectivement via des associations de migrants et de diasporas (associations des villes d’origine ou investissements directs des diasporas), et ciblent souvent explicitement le développement. Des groupes de diasporas se rassemblent en villes d’origine dans le pays de destination afin de soutenir ensemble leur pays d’origine en investissant dans des projets de développement. Les immigrés mexicains aux États-Unis, par exemple, forment ce type d’association afin d’acheminer des fonds en direction des régions rurales les plus pauvres du Mexique qui affichent des niveaux élevés d’émigration. Une autre forme de ce type de financement est l’investissement consenti par les entreprises détenues par les diasporas ou dont la haute direction compte des membres de diasporas dans des activités productives (Rodriguez-Montemayor, 2012[34]).

Le volume des envois de fonds a bondi pour s’établir à la deuxième place des sources de financement extérieur

Le volume des envois de fonds n’a cessé de croître parallèlement aux déplacements des individus. L’expérience montre que ces envois, qui constituent un flux continu de devises, peuvent contribuer à atténuer la pauvreté et à stimuler la croissance économique dans le pays d’origine des migrants (Singer, 2010[35]). La Corée en est un exemple illustratif. Les envois de fonds des travailleurs coréens en Allemagne de l’Ouest et au Moyen-Orient, ainsi que des soldats coréens déployés au Viet Nam ont apporté des devises qui ont contribué déclencher le développement économique rapide des années 60.

A partir du début des années 2000, les envois de fonds ont sensiblement augmenter au niveau mondial, à la faveur d’avancées technologiques dans les infrastructures financières qui ont considérablement réduit les coûts de transfert des fonds13. Le volume des envois de fonds au niveau mondial est passé de 122 milliards USD en 2000 à 466 milliards USD en 2017, ce qui en fait la deuxième source de financements transfrontaliers en direction des pays en développement. Les tendances et les projections de croissance régionale semblent indiquer que les envois de fonds augmenteront dans les pays en développement de manière générale, à la suite d’un déclin en 2015 et 2016 attribué à la faible croissance économique dans les pays émetteurs membres du Conseil de coopération du Golfe et de la Fédération de Russie (ci-après la « Russie ») et aux fluctuations des taux de change.

Les envois de fonds représentent une part non négligeable du PIB, d’environ 4 %, aussi bien dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure que dans les pays à faible revenu (Graphique 2.10). Dans la première de ces catégories, ils sont restés relativement stables du début des années 2000 jusqu’en 2016. Leur part dans le PIB a toutefois fortement augmenté pour les pays à faible revenu puisqu’elle a doublé au cours de cette période. Parmi les premiers pays bénéficiaires en termes de pourcentage des envois de fonds dans le PIB figurent de petites économies telles que le Kirghizistan, Tonga et le Tadjikistan, qui ont perçu chacun près de 30 % ou plus de leur PIB en envois de fonds. Dans neuf des dix premiers pays bénéficiaires, les envois de fonds représentent 20 % ou plus du PIB.

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Graphique 2.10. Envois de fonds en proportion du PIB
% du PIB
Graphique 2.10. Envois de fonds en proportion du PIB

Source : calculs de l’OCDE d’après Banque mondiale (2018[3]), Migration and Remittances database, pour les envois de fonds. FMI (2018[30]), World Economic Outlook database, Edition d’avril 2018, http://www.imf.org/external/pubs/ft/weo/2018/01/weodata/index.aspx, pour les données relatives au PIB.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974237

Les coûts de transaction associés aux envois de fonds en direction des pays en développement dépassent toutefois de beaucoup l’objectif fixé dans les ODD (cible 10.c) de moins de 3 %. Le coût moyen des envois de fonds est resté stable à 7.1 % (Graphique 2.11), le plus faible étant en Asie du Sud (5.2 %) et le plus élevé en Afrique subsaharienne (9.4 %). Le coût des envois de fonds dans de nombreux corridors africains et petites îles du Pacifique reste supérieur à 10 % en raison du faible volume des apports officiels, d’une pénétration médiocre des nouvelles technologies et de l’inexistence d’un environnement de marché soumis à la concurrence (Ratha et al., 2018[36]). Les mesures de politique intérieure susceptibles de remédier à ces faiblesses sont examinées dans le Point de vue intitulé « Comment mobiliser les envois de fonds à l’appui du financement du développement ».

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Graphique 2.11. Le coût des envois de fonds dans l’ensemble des régions est supérieur à l’objectif de 3 % fixé au titre des ODD
Graphique 2.11. Le coût des envois de fonds dans l’ensemble des régions est supérieur à l’objectif de 3 % fixé au titre des ODD

Source : Banque mondiale (2018[37]), Remittance Prices Worldwide database, https://remittanceprices.worldbank.org/en.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974256

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Encadré 2.8. Point de vue : Comment mobiliser les envois de fonds à l’appui du financement du développement, par Dilip Ratha, Chef du Partenariat mondial pour les connaissances sur les migrations et le développement (KNOMAD)

Les envois de fonds peuvent être mis à contribution pour le financement du développement

Pendant très longtemps, on n’a eu que faire des envois de fonds, tant ils étaient considérés comme de la menue monnaie. Pourtant, ces petites sommes envoyées par les migrants à leurs familles restées au pays, notamment dans des pays en développement, finissent par représenter plus du triple du montant total de l’aide publique au développement (APD). En 2017, les envois de fonds se sont chiffrés à 466 milliards USD. Contrairement aux perspectives concernant l’APD – au mieux stables sur le moyen terme – les envois de fonds devraient enregistrer une hausse annuelle de plus de 4 %. Le montant réel des envois de fonds, y compris les transferts passant par des canaux informels, est sensiblement plus élevé.

Quoiqu’il en soit, les envois de fonds sont des ressources privées et ne devraient pas être utilisées (par le truchement de l’impôt) pour les dépenses publiques. Il est également préoccupant de constater que l’essentiel des envois de fonds reçus par les familles pauvres servent à couvrir les besoins de base tels que l’alimentation, l’habillement et le logement, même si nous savons que ces transferts servent également à financer des investissements dans l’éducation ou une activité commerciale. Les flux de transferts de fonds sont plus stables que les flux d’investissement privé. En outre, ces flux ciblent mieux les besoins des ménages bénéficiaires, étant donné que ces transferts sont reçus au moment le plus opportun et font l’objet d’un meilleur suivi que l’aide publique.

Ces apports privés peuvent-ils être utilisés pour des investissements plus productifs et le financement des biens publics ? La réponse est affirmative. La levée des obstacles réglementaires peut réduire le coût des transferts de fonds et déboucher sur des apports annuels supplémentaires chiffrés à 20 milliards USD en faveur des ménages pauvres dans les pays en développement. On peut avoir recours aux transferts de fonds pour rehausser la notation de la dette souveraine et la notation des obligations, ce qui a pour effet de réduire le coût des programmes de financement. Les services de transfert de fonds peuvent être mis à contribution pour mobiliser 50 milliards USD sur l’épargne de la diaspora au moyen d’émissions d’obligations-diaspora.

Abaissement des obstacles réglementaires

De nos jours, alors que le coût des communications transfrontalières est devenu négligeable, le coût de la transaction est de plus de 9 % en moyenne pour un transfert à une famille en Afrique subsaharienne. Hormis dans quelques grands corridors de pays, les transferts de fonds coûtent plus de 5 % en moyenne dans toutes les régions, taux bien plus élevé que la cible de 3 % indiqué dans les ODD (cible 10.c). Une réduction de l’ordre de 3 points de pourcentage sur les transferts de fonds pourrait se traduire par un gain de plus 20 milliards USD au profit des migrants et de leurs familles. Les services de transfert de fonds sont utilisés par les migrants non seulement pour envoyer de l’argent à leurs familles, mais également pour les petits paiements dans le cadre d’échanges commerciaux, d’investissements ou d’activités philanthropiques.

Les coûts de transfert de fonds peuvent être réduits sans délai en ouvrant à de nouveaux prestataires l’accès à un marché jusqu’ici dominé par une poignée d’acteurs majeurs. Une option logique consisterait à mettre fin aux partenariats d’exclusivité entre les services postaux nationaux (en particulier dans les pays de l’OCDE) et les grands opérateurs de transfert d’argent. Une autre option serait de prendre acte de ce que les envois de fonds de faible montant répondent pour l’essentiel à des besoins personnels et présentent de très faibles risques de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. Une telle réduction de coûts permettrait d’ouvrir le marché à de nouveaux acteurs qui utilisent des technologies plus efficientes et moins onéreuses, telles que la téléphonie mobile et le chaînage par blocs.

Les envois de fonds sont la forme la plus stable d’apports transfrontaliers et ont un impact positif sur le développement

Les envois de fonds sont la forme la plus stable d’apports transfrontaliers en direction des pays en développement. Si les apports de capitaux privés augmentent généralement lors des cycles économiques favorables et diminuent en période de crise, les envois de fonds semblent réagir moins violemment et peuvent même parfois augmenter au cours de récessions dans les pays bénéficiaires. Ainsi, les envois de fonds vers les pays en développement ont continué d’augmenter régulièrement en 1998-2001 lorsque les apports de capitaux privés ont fléchi au lendemain de la crise financière en Asie (Ratha, 2005[38]). Si les envois de fonds sont relativement stables aux niveaux agrégés, les apports en direction de chaque pays en développement peuvent être assez instables, et avoir de fait des répercussions sur la stabilité économique (Jackman, 2013[39]).

Les envois de fonds présentent l’avantage de renforcer la solvabilité des pays en développement. Le cadre de viabilité de la dette de la Banque mondiale et du FMI permet aux pays bénéficiaires de gérer un plus haut niveau de dette lorsque la proportion d’envois de fonds est supérieure à 10 % du revenu intérieur et supérieure à 20 % des exportations de biens et de services (FMI, 2017[40]).

Au niveau microéconomique aussi, les envois de fonds peuvent avoir des retombées positives sur le développement et la pauvreté. Il est démontré qu’ils accroissent le revenu des ménages bénéficiaires et réduisent les contraintes financières, en renforçant la capacité des ménages à résister aux chocs extérieurs. Dans certains pays, « les ménages qui reçoivent des fonds sont plus susceptibles de s’engager dans des activités productives telles que la détention d’entreprises, d’immobilier ou d’actifs agricoles » et dépensent en général davantage en faveur de l’éducation (OCDE, 2017[41]). Toutefois, le lien entre les envois de fonds et la hausse de l’investissement n’est pas toujours clair. Dans certains cas, les fonds envoyés sont dépensés dans la consommation quotidienne de biens essentiels et non dans le capital humain et matériel (Adams and Cuecuecha, 2010[42]).

Les politiques dans les pays émetteurs et bénéficiaires des envois de fonds peuvent renforcer l’impact sur le développement

Comment tirer le meilleur parti des envois de fonds au service du développement durable ? Bien qu’ils soient une source importante de financements transfrontaliers, les envois de fonds doivent être dissociés d’autres formes de financement du développement en raison de leur caractère essentiellement personnel. Tous les envois de fonds ne contribuent pas au développement durable et il est difficile de mesurer la part des envois ciblés sur cet objectif (Chapitre 4).

Afin de renforcer l’impact des envois de fonds sur le développement, et de veiller à ce que ces envois soient utilisés de la manière la plus bénéfique pour les migrants et leurs familles, l’action publique doit être axée sur l’instauration d’un environnement favorable qui concourt à l’utilisation des envois de fonds au service d’investissements à long terme (OCDE, 2017[41]). Ainsi, les politiques qui favorisent l’inclusion financière des migrants et des bénéficiaires des envois, et qui encouragent l’éduction financière peuvent contribuer à acheminer les fonds vers l’investissement dans le capital humain et des activités productives.

Dans les pays émetteurs, les politiques nationales qui contribuent à assurer un transfert efficace des fonds au niveau d’intermédiaires non étatiques peuvent également renforcer l’impact des émetteurs des fonds et des communautés de diasporas sur le développement (Chapitre 5). Le Plan d’action d’Addis-Abeba et le Programme 2030 mentionnent l’un et l’autre les coûts de transaction élevés comme un domaine dans lequel une intervention publique pourrait être fructueuse.

Fondations philanthropiques

  • Les dons philanthropiques sont dominés par une poignée d’acteurs importants aux États-Unis et en Europe. Seulement 20 fondations ont fourni 81 % des dons philanthropiques totaux en direction des pays en développement au cours de la période 2013-15. Près des trois-quarts de ce montant provenaient de fondations des États-Unis.

  • Les dons philanthropiques en direction des pays en développement se sont élevés à 23.9 milliards USD au cours de la période 2013-15, soit 7.96 milliards USD par an en moyenne.

  • Les pays à revenu intermédiaire ont reçu 67 % des apports. 37 % ont été alloués à ceux de la tranche inférieure, et 30 % à ceux de la tranche supérieure. Seul un tiers des apports a été affecté aux pays moins avancés et aux autres pays à faible revenu.

Les fondations perpétuent la longue tradition des dons philanthropiques

La philanthropie fait partie de la civilisation humaine depuis des millénaires. Dans la Chine ancienne, des organisations claniques fondées sur le lignage versaient des pensions aux veuves et aux orphelins, distribuaient des céréales aux pauvres et construisaient des écoles pour les enfants (PNUD, 2016[43]) La philanthropie est également profondément ancrée dans la tradition judéo-chrétienne, ainsi qu’en témoigne le principe des anciens Hébreux de donner un dixième de leur revenu aux personnes dans le besoin. Elle est également l’un des piliers de l’islam, avec l’obligation de la « zakat » (Andrews, 1950[44]).

Au XXe siècle, certains des industriels les plus prospères des États-Unis, à l’image de John D. Rockefeller et Andrew Carnegie, ont porté leur action philanthropique à une échelle encore jamais atteinte dans le but de répondre systématiquement aux besoins sociaux de l’époque. Ces philanthropes estimaient qu’il était du devoir des riches de mettre à profit leurs compétences et leur fortune au service de la communauté et des pauvres.

L’essor de la richesse des entreprises au cours des 30 dernières années a donné naissance à une nouvelle catégorie de philanthropes. En appliquant une approche entrepreneuriale à la philanthropie, et en mettant l’accent sur la stratégie, l’innovation et les partenariats, ces acteurs jouent un rôle unique et précurseur dans le système de financement du développement durable.

En termes de volume, les dons philanthropiques en direction des pays en développement sont dominés par une poignée de grands acteurs situés aux États-Unis et en Europe. Une enquête menée dans le cadre du récent rapport de l’OCDE (2018[45]), La philanthropie privée pour le développement, révèle que 20 fondations seulement ont fourni 81 % de la totalité des dons philanthropiques en direction des pays en développement sur la période 2013-15 et que près des trois-quarts de ces dons provenaient de fondations situées aux États-Unis. L’annexe au présent chapitre fournit des détails supplémentaires. La fondation Bill & Melinda Gates, dont le siège est aux États-Unis, représente à elle seule près de la moitié (49 %) de la totalité des dons, ce qui explique dans une large mesure les conclusions relatives à la concentration géographique. Sur les 143 fondations incluses dans l’échantillon de données tirées de l’enquête de l’OCDE, les autres principaux pays d’origine des dons étaient le Royaume-Uni (7 % des dons philanthropiques totaux), les Pays-Bas (5 %), la Suisse (2 %), le Canada (2 %) et les Émirats arabes unis (2 %).

Le volume des dons philanthropiques est malgré tout relativement faible

Les dons philanthropiques en direction des pays en développement se sont élevés à 23.9 milliards USD au cours de la période 2013-15, soit 7.96 milliards USD par an en moyenne (OCDE, 2018[45]). Si les dons philanthropiques restent relativement modestes par rapport au financement du développement en général, les fondations sont devenues des partenaires de premier plan dans des certains domaines. Ainsi, dans les secteurs de la santé et de la santé procréative, en 2013-15, le soutien consenti par des fondations philanthropiques a constitué la troisième source de financement pour les pays en développement, derrière le soutien apporté par les États-Unis et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Près des trois-quarts (74 %) des dons versés par les fondations en 2013-15 ont financé des activités dans les infrastructures sociales et des services tels que la santé, l’éducation, les droits de l’homme et la protection sociale (Graphique 2.12). Dans l’ensemble, la santé a été le premier secteur ciblé par les dons philanthropiques – loin devant les autres secteurs – avec 12. 6 milliards USD, soit 53 % du total. La fondation Gates a été le principal intervenant dans ce domaine, et représentait 72 % du total des dons alloués à la santé. Les dons des autres fondations représentaient seulement les 28 % restants, même si l’enquête de l’OCDE montre que la santé et la santé procréative étaient également les priorités de leur financement.

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Graphique 2.12. Dons philanthropiques par secteur, 2013-15
En milliards USD
Graphique 2.12. Dons philanthropiques par secteur, 2013-15

Source : (OCDE, 2018[45]), La philanthropie privée pour le développement, http://www.oecd.org/fr/cad/la-philanthropie-privee-pour-le-developpement-9789264303973-fr.htm

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974275

La philanthropie a par ailleurs essentiellement ciblé les pays à revenu intermédiaire, qui ont perçu au total 67 % des apports. Quelque 37 % ont été alloués à des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et 30 % à des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Seulement un tiers des financements ventilables par pays a été alloué aux pays moins avancés et aux autres pays à faible revenu (OCDE, 2018[45]).

Certaines fondations philanthropiques jouent un rôle clé en innovant et en collaborant avec d’autres acteurs

Les fondations philanthropiques sont des acteurs de plus en plus influents du développement international. Les plus grandes d’entre elles en particulier, et notamment la Fondation Gates, influent fortement sur l’élaboration du programme d’action et les priorités de financement des organisations internationales et des gouvernements de par le volume de leurs dons, leurs réseaux et leurs campagnes de sensibilisation.

Dans certains cas, les fondations philanthropiques peuvent jouer un rôle particulier dans le financement du développepment durable, en raison de leur moindre aversion au risque et de leur propension relativement plus marquée à investir dans des concepts d’activités et des modèles de financement innovants (Marten and Witte, 2008[46]) Le Point de vue intitulé « Libérer l’innovation financière pour accélérer l’innovation en faveur des pauvres » passe en revue les possibilités de collaboration envisageables avec les fondations philanthropiques qui peuvent apporter le capital de départ nécessaire pour trouver des solutions innovantes aux problèmes de développement. Or, la grande majorité des fondations philanthropiques ont recours à des instruments et des canaux de mise en oeuvre traditionnels (OCDE, 2018[45]).

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Encadré 2.9. Point de vue : Libérer l’innovation financière pour accélérer l’innovation en faveur des pauvres, par Mark Suzman, Chef de la stratégie et Président, Fondation Bill et Melinda Gates

Conjuguées aux engagements exprimés par la communauté internationale, la technologie et l’innovation peuvent s’avérer de puissants vecteurs d’amélioration de la santé et de réduction de la pauvreté dans le monde. Pensez au potentiel qui est celui des nouvelles variétés culturales pour réduire la pauvreté extrême en augmentant les rendements des cultures, en renforçant la résilience et en rehaussant la valeur nutritionnelle des denrées alimentaires, ou encore aux potentielles retombées de la mise au point et du déploiement à grande échelle de systèmes d’identification numérique à même d’améliorer l’accès aux services publics et de donner aux populations paupérisées la possibilité d’intégrer l’économie formelle et d’améliorer leurs conditions de vie.

Cependant, pour que ces visions se traduisent dans les faits, il est impératif d’opérer des changements dans le modus operandi de la communauté du développement. Premièrement, les gouvernements et les donneurs doivent œuvrer en étroite collaboration avec les détenteurs d’expertise spécialisée pour aider les pays à adopter les technologies innovantes. A cette fin, le secteur privé et les organisations philanthropiques peuvent, et doivent, apporter leurs contributions. Deuxièmement, pour déployer les innovations à plus grande échelle, il faudra des politiques de financement plus souples et une plus grande appétence au risque de la part des plus importants pourvoyeurs de financements pour le développement, et plus particulièrement, des banques multilatérales de développement, d’autres institutions de financement du développement et des grands investisseurs institutionnels et privés.

Pour ce faire, on pourrait procéder par exemple à la segmentation du financement du développement. Les capitaux provenant des organisations philanthropiques, qui peuvent supporter des risques plus élevés que bon nombre d’autres types de financements destinés au développement, devraient être utilisés pour financer des projets pilotes d’innovation. Les institutions internationales de financement peuvent ensuite, davantage qu’elles ne le font actuellement, déployer les projets pilotes à succès à plus grande échelle. Les pourvoyeurs de financements philanthropiques doivent également veiller à être mieux en phase afin de s’assurer que les idées prometteuses bénéficient du soutien approprié, depuis l’étape de la conception jusqu’à leur mise en œuvre à plus grande échelle.

En mettant l’accent sur les mécanismes appropriés de partage et d’atténuation des risques, les institutions financières internationales et la communauté des donneurs peuvent mieux libérer l’investissement du secteur afin qu’il fasse ce qu’il fait le mieux : financer des investissements commercialement viables et mettre à profit le savoir-faire du secteur et son ouverture à l’innovation. Les modiques ressources publiques et les ressources concessionnelles peuvent être utilisées pour agir sur les priorités où ces ressources sont le plus sollicitées.

Les donneurs doivent également procéder à des analyses coûts-avantages lucides pour déterminer un taux de rentabilité économique corrigé des risques (pas seulement financier) et affecter les ressources à des fins qui aident véritablement les personnes les plus nécessiteuses. La Fondation Bill et Melinda Gates a parfois appris cette leçon à ses dépens. À titre d’exemple, mentionnons un investissement que nous avons consenti pour encourager les banques commerciales à octroyer des prêts aux petits exploitants agricoles. La facilité de partage de risques que nous avions mis en place n’a finalement pas permis un accès accru des petits exploitants aux financements. En outre, une fois la facilité retirée, les coûts supportés par les banques commerciales pour continuer de consentir les prêts étaient prohibitifs, ce qui a abouti à une baisse des financements.

La coopération entre les institutions financières internationales et les donneurs pourrait déboucher sur un succès plus franc. Les fonds d’investissement pour le climat en sont une excellente illustration. Fruit d’un partenariat doté de plusieurs milliards de dollars entre les donneurs et las banques de développement, les fonds offrent des financements concessionnels aux pays à revenu intermédiaire en vue de l’adoption de technologies d’énergie renouvelable. Ce modèle pourrait être appliqué au déploiement à grande échelle d’autres innovations prometteuses.

Autre bon exemple récent d’une telle coopération : la collaboration entre la Fondation Bill & Melinda Gates et la Banque interaméricaine de développement pour éradiquer le paludisme en Amérique centrale. Les ressources octroyées à titre de don par la Fondation sont associées à celles de la banque de façon à fournir aux pays des incitations fortes pour qu’ils mettent en œuvre de programmes efficaces de lutte contre le paludisme.

Les partenariats sont déterminants. À la Fondation Gates, nous sommes disposés à nouer des partenariats avec les gouvernements et la communauté financière internationale au profit des populations les plus pauvres et vulnérables du monde. Ensemble, nous pouvons accélérer l’innovation pro-pauvres en faveur des pays en développement.

La philanthropie peut en outre être utilisée dans le but de dépasser les cloisonnements du système de financement du développement durable, car les fondations apprécient en général les partenariats et forment des coalitions stratégiques avec des gouvernements, des donneurs, des entrepreneurs sociaux et des organisations de la société civile. Nombre des fondations ayant participé à l’Enquête de l’OCDE sur la philanthropie privée à l’appui du développement coopèrent systématiquement avec les gouvernements (67 %) et les donneurs (45 %) lorsqu’elles élaborent ou mettent en oeuvre leurs programmes et projets (OCDE, 2018[45]).

Des données de meilleure qualité et une coordination renforcée peuvent contribuer à exploiter encore plus efficacement leur potentiel

  • Des données plus nombreuses et de meilleure qualité sont nécessaires pour comprendre et orienter la contribution des dons philanthropiques aux objectifs mondiaux. Les fondations philanthropiques sont concentrées dans un petit nombre de pays d’origine et affichent une hétérogénéité considérable, ausi bien pour ce qui est de leur taille que du champ d’application de leurs activités. Comme il ressort de l’analyse détaillée présentée dans le Chapitre 4, la mesure de l’impact global de la philanthropie est fragmentée. La disponibilité limitée et le peu de transparence des données comparables et des normes de mesure sont autant de difficultés supplémentaires pour dresser une cartographie de leurs contributions et de leur impact. Les initiatives récentes déployées par l’OCDE, dont l’Enquête sur la philanthropie privée à l’appui du développement et le lancement du Centre de l’OCDE sur la philanthropie en 2018, offrent des perspectives d’amélioration de la communication de données sur les dons philanthropiques.

  • La coordination avec les autres acteurs du système de financement du développement durable doit être renforcée. Compte tenu de leurs capacités d’innovation et de l’importance qu’elles attachent aux partenariats, les fondations philanthropiques peuvent apporter une contribution précieuse et unique au développement durable. Afin de mieux tirer parti de leur potentiel, des plateformes plus institutionalisées de coordination et de partage des connaissances sont nécessaires pour rassembler les fondations philanthropiques, les apporteurs bilatéraux et multilatéraux de financement du développepment et les gouvernements des pays en développement. Des enceintes dédiées au dialogue sur la philanthropie aux échelons sectoriel, régional et local, parallèlement à des initiatives internationales de communication et de recueil de données (telles que les statistiques du CAD sur le financement du développement et le Centre de l’OCDE sur la philanthropie) peuvent renforcer la transparence et l’alignement entre les acteurs, en veillant à ce que leurs apports se renforcent mutuellement et se complètent, au lieu de faire double emploi (OCDE, 2018[45]).

Apporteurs publics bilatéraux

  • Les apports publics des fournisseurs bilatéraux se sont montés à 210 milliards USD en 2016 et les membres du CAD-OCDE ont versé un total de 167 milliards USD au cours de la même année.

  • Les apports au titre de la coopération Sud-Sud émanant de dix grands pays en dehors du CAD ont été estimés à 6.9 milliards USD en 2015, en hausse par rapport à 5.2 milliards USD en 2011.

  • Entre 2010 et 2016, les apports par habitant en direction de pays parmi les moins avancés et d’autres pays à faible revenu ont reculé de respectivement 38 à 32 USD et de 47 à 37 USD, alors que les apports aux pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure sont passés de 15 à 20 USD.

Les apporteurs bilatéraux peuvent répondre à des besoins de développement urgents

Les apporteurs bilatéraux de financement du développement durable sont des gouvernements et des organismes nationaux de développement qui apportent un financement, assorti ou non de conditions libérales, visant à soutenir le développement économique, environnemental, social et politique des pays en développement14.

On entend parfois que ce sont les intérêts géopolitiques propres des pays donneurs qui motivent le financement public du développement, c’est-à-dire la possibilité de poursuivre des intérêts concrets de politique étrangère (Alesina and Dollar, 2000[47]) ; (Younas, 2008[48]). La coopération pour le développement des apporteurs publics est devenue une activité institutionalisée après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et concomitamment à la compétition engendrée par l’avènement de la Guerre froide. Les apporteurs bilatéraux ont déployé leur aide dans le prolongement de leur politique étrangère, dans l’objectif principal d’exercer une influence indirecte, mais également de contribuer à bâtir une économie internationale dynamique dans l’après-guerre. Toutefois, les objectifs officiels de la coopération pour le développement, qui sont souvent explicitement mentionnés dans les énoncés de mission et les mandats à l’intention des organismes chargés de la mise en oeuvre, sont de promouvoir le développement du pays bénéficiaire. Ainsi, l’un des principaux objectifs de la politique de l’Union européenne en matière d’aide extérieure est la réduction et l’élimination à terme de la pauvreté, conformément au mandat énéoncé dans le Traité de Lisbonne de 2009.

Cette mission officielle des apporteurs bilatéraux – promouvoir le développement – leur impose de cibler explicitement les besoins de développement les plus urgents. Ainsi, compte tenu du rôle qu’ils jouent, ils ne peuvent être facilement remplacés par d’autres apporteurs. En sa qualité de gardien du financement du développement, le Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE appuie les initiatives déployées par ses membres pour remplir cette mission.

Depuis sa création en 1960 en tant qu’organe de l’OCDE, le CAD s’emploie à institutionaliser les normes régissant le comportement des donneurs. Il a instauré une nouvelle terminologie en 1961 en distinguant les apports consentis à des conditions libérales ou l’aide publique au développement (APD) des apports non assortis de conditions libérales ou des autres apports publics (AASP) pour mesurer l’aide au développement, l’application de conditions favorables ayant pour but de répondre aux besoins urgents des pays les moins développés confrontés aux plus graves difficultés économiques ou de service de la dette. Sur la base de cette définition, les membres du CAD se sont engagés à accroître les financements concessionnels sous forme d’APD pour les porter à hauteur de 0.7 % du revenu national brut (RNB) de chaque donneur15.

Pour les donneurs bilatéraux, une autre norme consiste à cibler explicitement les pays et les secteurs les plus vulnérables où l’impact est le plus élevé au regard du développement. En décembre 2014, les membres du CAD sont convenus d’augmenter leur APD allouée à la catégorie des pays et territoires ayant les besoins les plus importants : pays les moins avancés, pays à faible revenu, petits États insulaires en développement (PEID), pays en développement sans littoral, et contextes en situation de fragilité ou de conflit.

Au-delà du groupe des membres du CAD, de nombreux acteurs bilatéraux fournissent une coopération pour le développement, également appelée coopération Sud-Sud. Sa hausse constante transparaît dans l’augmentation considérable du nombre des apporteurs bilatéraux qui communiquent au CAD des données relatives à leur financement du développement, qui est passé de moins de 20 en 1960 à près de 50 en 2016.

Il existe en outre de nombreux autres fournisseurs de coopération pour le développement qui ne communiquent pas de données au CAD sur leur financement. Si nombre de ces pays mènent depuis longtemps des programmes de coopération pour le développement, leur importance dans le financement du système du développement durable s’est considérablement accrue et témoigne de leur importance grandissante en tant que moteurs des échanges, de l’investissement et de la croissance au niveau mondial. Le manque de données transparentes sur leurs activités ne permet que difficilement d’appréhender le système de financement du développement durable dans son intégralité et de coordonner les initiatives entre différents groupes d’acteurs (Chapitre 4).

Comme expliqué dans le présent chapitre, de nombreux apporteurs Sud-Sud fournissent leur aide publique par l’intermédiaire d’entreprises publiques telles que des fonds souverains, qui fonctionnent souvent comme des investisseurs privés. Les activités menées par la Chine au titre de la coopération pour le développement, en particulier, associent souvent ressources concessionnelles et non concessionnelles, ce qui brouille la distinction entre acteurs publics et privés.

Une vaste proportion d’apports bilatéraux publics provient des pays de l’OCDE et est assortie de conditions libérales

Les apports publics des apporteurs bilatéraux se sont élevés à 210 milliards USD en 2016, dont 74 % (155 milliards USD) étaient assortis de conditions libérales. En 2016, les membres du CAD-OCDE ont fourni un total de 167 milliards USD, qui étaient majoritairement (71 %) assortis de conditions libérales. Les apports versés au titre de la coopération Sud-Sud par dix grands pays au-delà du CAD étaient estimés à 6.9 milliards USD en 2015, en hausse par rapport à 5.2 milliards USD en 2011. La proportion globale de ces apporteurs dans le total des financements transfrontaliers en direction des pays en développement reste faible par rapport à celle des membres du CAD. Certains apporteurs bilatéraux, au nombre desquels figurent l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, ne s’en sont pas moins classés parmi les dix premiers apporteurs de financements bilatéraux concessionnels en 2015. En outre, les activités de la Chine en matière d’aide au développement, qui prennent la forme de projets de grande ampleur articulés autour de l’initiative des « Nouvelles routes de la soie », sont considérables tant en taille qu’en impact, et se montaient à 3.1 milliards USD en 2015, selon des estimations de l’OCDE16.

Toutefois, en raison des limites des données, il est difficile d’estimer avec précision et d’appréhender pleinement la contribution de la coopération Sud-Sud. Dans le cas de la Chine mentionné plus haut, les estimations des montants des financements concessionnels versés en un an vont de 3 milliards à 7 milliards USD. Dans certains cas, une grande part du financement public est acheminée via des entreprises publiques et s’assimile à des investissements privés. Ainsi, le financement du développement consenti par la Chine s’étend au-delà des concepts traditionnels de l’aide et inclut les crédits acheteurs à l’exportation, les prêts publics aux taux du marché et les lignes de crédit stratégiques fournies aux entreprises chinoises (Lakatos et al., 2016[49]). Ce regroupement rend encore plus difficile la possibilité de saisir dans son intégralité la coopération Sud-Sud.

Les apports bilatéraux peuvent cibler les besoins de développement

Les apporteurs bilatéraux sont bien placés pour cibler des domaines de vulnérabilité économique et sociale, ainsi que le confirme la répartition sectorielle de leurs financements. En raison de la disponibilité limitée des données sur la ventilation sectorielle des apports, l’analyse repose exclusivement sur les apporteurs bilatéraux qui communiquent des données au CAD. Comparés aux apporteurs multilatéraux, ces fournisseurs allouent une part plus importante de leurs financements à des secteurs sociaux tels que « gouvernement et société civile » (11.4 %) et « éducation » (7.7 %). Les valeurs respectives pour les apporteurs multilatéraux s’élèvent à 5.4 % (gouvernement et société civile) et 3.2 % (éducation). En outre, une proportion considérable des financements (13.4 %) est alloué à l’aide humanitaire. Tous ces apports sont assortis de conditions libérales, en effet, les financements bilatéraux non concessionnels ciblent presque exclusivement les secteurs économiques.

Les apporteurs bilatéraux manifestent en outre leur engagement aux côtés des pays qui affichent les besoins les plus importants. Depuis 2000, les financements concessionnels émanant d’acteurs bilatéraux en direction des pays qui en ont le plus besoin – y compris les pays moins avancés, les pays à faible revenu et les pays et territoires fragiles ou touchés par un conflit – ont augmenté plus rapidement que les financements alloués aux autres groupes de pays (Graphique 2.13).

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Graphique 2.13. Évolution des financements concessionnels bilatéraux en direction de certains groupes de pays
Indice : 2000 = 100
Graphique 2.13. Évolution des financements concessionnels bilatéraux en direction de certains groupes de pays

Note : Les valeurs maximales de 2005 et 2006 pour les PRITS et les États et contextes fragiles ou touchés par un conflit sont dues à des niveaux élevés d’allègement de la dette.

Source : OCDE (2018[2]), Système de notification des pays créanciers (base de données), https://stats.oecd.org/index.aspx?DataSetCode=CRS1.

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974294

Toutefois, plus récemment, ces tendances ne semblent pas se poursuivre dans les mêmes proportions. Le Graphique 2.14 montre que si les apports par habitant en direction des contextes fragiles ou touchés par un conflit ont augmenté entre 2010 et 2016, les apports en direction des pays moins avancés et des autres pays à faible revenu ont diminué, passant respectivement de 38 à 32 USD par habitant et de 47 à 37 USD. Cela donne à penser que l’augmentation des financements n’a pas suivi la croissance démographique dans ces pays et contextes. Parallèlement, les apports par habitant, concessionnels ou non, en direction des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure sont passés de 15 à 20 USD.

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Graphique 2.14. Financements concessionnels et non concessionnels par habitant (divers groupes)
Graphique 2.14. Financements concessionnels et non concessionnels par habitant (divers groupes)

Note : les chiffres incluent les financements concessionnels et non concessionnels consentis par les membres du CAD-OCDE.

Source : OCDE (2018[2]), Système de notification des pays créanciers (base de données), https://stats.oecd.org/index.aspx?DataSetCode=CRS1

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974313

S’il est difficile de se livrer à des appréciations quantitatives quant à la destination et aux caractéristiques de la coopération Sud-Sud, la valeur ajoutée des apporteurs non membres du CAD réside souvent dans leurs approches innovantes. La coopération Sud-Sud offre des perspectives de transfert de technologie et de partage des connaissances induisant peu de frais généraux et met à profit la propre expérience de développement des apporteurs. L’accord portant sur le transfert de techniques agricoles entre PEID est un exemple de cette coopération. Des experts cubains ont présenté la technique de l’irrigation goutte à goutte en vue de son adoption par les exploitants agricoles locaux dans d’autres PEID. Cette technique s’est avérée rentable et adaptée aux conditions en vigueur dans les petites îles où l’eau à usage d’irrigation est particulièrement rare (PNUD, 2016[50]). Il est fondamental de renforcer le dialogue avec ces acteurs de manière à intégrer leur voix, leurs opinions et les enseignements qu’ils ont dégagés de leur expérience de développement dans les politiques et pratiques du CAD et de ses membres.

Les acteurs bilatéraux peuvent atteindre de meilleurs résultats en se coordonnant et en collaborant avec les autres

  • L’univers du financement bilatéral pour les apporteurs de développement durable se diversifie de plus en plus, et les apporteurs non membres du CAD définissent parfois d’autres références pour l’aide au développement (Esteves and Assunção, 2014[51]). Cette évolution multiplie les choix pour les pays en développement. Toutefois, la diversité des apporteurs suscite également des craintes quant au risque de fragmentation induit par le manque de coordination. Si les décisions d’affectation des ressources publiques relèvent de décisions souveraines motivées par la réduction de la pauvreté, les liens historiques, les intérêts économiques et/ou d’autres facteurs, le manque de coordination dans l’affectation des ressources peut entraîner des disparités si les apporteurs décident de cibler le même groupe de pays ou de secteurs (OCDE, 2013[52]).

  • Pour les apporteurs de développement, le financement bilatéral présente l’avantage de pouvoir cibler les besoins sociaux et les pays vulnérables, ce qui relève d’un engagement clairement affiché. Les évolutions récentes donnent toutefois à penser que le financement en direction des pays à faible revenu et des pays parmi les moins avancés, par exemple, augmente moins rapidement que celui qui est alloué aux autres pays en développement, et ne suit pas la croissance démographique. La dépendance relativement élevée de ces pays à l’égard des financements transfrontaliers peut indiquer qu’une diminution du niveau des apports du secteur public par habitant en direction de ces pays risque de les affecter plus durement que les autres pays.

  • Les apports publics peuvent être utilisés pour étayer la mobilisation d’autres ressources à l’appui du financement du développement, telles que les recettes intérieures ou les financements du secteur privé. La coopération pour le développement peut mobiliser des recettes fiscales au service des pays en développement et apporter le soutien nécessaire aux systèmes de gestion des finances publiques. Compte tenu du reflux récent des apports d’investissements privés, décrit plus haut, les apports publics peuvent également jouer un rôle en mobilisant les ressources privées. Le soutien ciblé à l’instauration d’environnements favorables peut garantir que des ressources aussi bien nationales qu’internationales sont acheminées vers les secteurs où les besoins sont les plus grands et où l’impact est le plus élevé, et qu’elles sont utilisées de façon à favoriser un développement durable. Toutefois, la nécessité de mobiliser les ressources du secteur privé pourrait être en conflit avec l’engagement de cibler les pays dont les besoins sont les plus importants, ces derniers revêtant souvent moins d’intérêt pour les investisseurs privés. Il convient de concilier ces deux impératifs, comme le fait valoir le Point de vue intitulé « Porter le financement à plus grande échelle », mais en s’appuyant sur des critères clairement définis permettant de guider l’affectation des fonds lorsque les priorités sont antagonistes.

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Encadré 2.10. Point de vue : Porter le financement à plus grande échelle, Charlotte Petri Gornitzka, ancienne Présidente du CAD

Depuis l’adoption des Objectifs de développement durable (ODD) et du Programme d’action d’Addis-Abeba, de nouveaux défis se sont fait jour. La demande de fonds destinés à financer l’aide humanitaire ou des programmes de prise en charge des réfugiés et de gestion des migrations s’est accrue. Conjuguée aux priorités nationales, cette évolution accroît la pression qui pèse sur les ressources publiques disponibles pour financer le développement international. Dans pareil contexte, les acteurs du secteur public et en particulier les 30 membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE devraient concentrer leurs ressources, comme l’aide publique au développement (APD), de manière à garantir un impact maximum là où les besoins sont les plus grands.

Lorsqu’ils déterminent la répartition de leur APD, les pays devraient continuer à privilégier les personnes et les groupes qui risquent d’être laissés de côté. Les projections établies à partir des données de la Banque mondiale et des Nations Unies indiquent qu’à l’horizon 2030, jusqu’à 85 % des pauvres de la planète seront concentrés dans un seul groupe de pays. Or, nombre de ces pays se trouvent être également en proie à des conflits ou en situation de post-conflit. Il est donc nécessaire d’accroître les investissements en faveur de la prévention des conflits violents.

La pression qui pèse sur des ressources publiques déjà limitées risque d’inciter les pays à se concentrer sur l’essentiel et à s’abstenir d’utiliser l’APD comme levier pour mobiliser d’autres ressources financières. Ce serait là la mauvaise chose à faire. Il est encore plus important aujourd’hui qu’il y a quelques années de mettre à profit le financement du secteur public pour mobiliser des fonds privés à l’appui du développement. Il apparaît, et les exemples positifs abondent, que l’association de financements publics et privés se traduit par une augmentation du volume total de ressources.

Il s’agit là d’un équilibre délicat : il faut en effet maintenir l’aide au développement pour les pays qui en ont besoin et, simultanément, faire preuve d’innovation et avoir un effet catalyseur pour porter le financement à plus grande échelle en mobilisant d’autres sources de financement et veiller à offrir des incitations aux pays partenaires en pleine croissance afin qu’ils renforcent eux aussi la mobilisation de leurs ressources intérieures.

Un nombre croissant de pays, ainsi qu’un groupe de plus en plus large de parties prenantes, s’investissent dans le financement à l’appui du développement durable. J’en veux pour preuve l’accroissement des activités de coopération pour le développement des économies émergentes, Chine en tête, avec également de nombreux pays arabes qui affichent un engagement en faveur du développement international. Le fait que les fondations privées jouent un rôle de plus en plus important dans le financement de la santé dans les pays en développement en est un autre exemple, de même que la tendance des investisseurs institutionnels à s’appuyer de plus en plus sur le cadre des ODD pour définir leurs stratégies d’investissement et leur dialogue avec les sociétés de portefeuille.

Si nous voulons optimiser l’impact de cette communauté diversifiée, trouver le juste équilibre et combler les déficits de financement, nous devons établir un partenariat solide, de portée mondiale, qui permette aux pays et aux autres acteurs de coordonner leurs activités. Les pays de l’OCDE et les autres donneurs émergents ont besoin de données de qualité, d’analyses approfondies et de recommandations d’action claires pour pouvoir avancer. En étoffant les enseignements tirés des bonnes pratiques et en mettant l’accent sur les analyses de l’impact sur le développement des modèles de financement classiques ou novateurs, nous pourrons constituer un socle de données probantes sur lequel les décideurs pourront s’appuyer pour opérer des choix avisés. L’OCDE est bien placée pour s’acquitter d’une telle mission, aujourd’hui comme demain.

Apporteurs multilatéraux

  • En 2016, les financements multilatéraux concessionnels et non concessionnels tels que notifiés au CAD se sont élevés à respectivement 33 milliards USD et 68 milliards USD.

  • 37.2 % du total des apports multilatéraux étaient concentrés sur les infrastructures.

  • Le financement par habitant émanant des institutions multilatérales en direction des États et des contextes fragiles ou touchés par un conflit est passé de 14 USD en 2010 à 17 USD en 2016.

Les acteurs multilatéraux sont des acteurs essentiels du système de financement du développement durable

Les acteurs multilatéraux sont des organismes, organisations ou fonds internationaux qui financent le développement durable. Les membres de ces institutions sont des gouvernements qui sont représentés au plus haut niveau décisionnaire par des personnes ayant une fonction officielle et n’agissant pas en leur nom propre. Les institutions multilatérales sont un pilier essentiel du cadre du financement du développement international mis en place autour des deux institutions de Bretton Woods, la Banque mondiale et le FMI. La création de l’Association internationale de développement (IDA) en 1960 a été une autre étape majeure de l’évolution de ce cadre et a témoigné du sentiment général qu’une approche multilatérale était nécessaire pour surmonter les problèmes de coordination que posait le nombre élevé des programmes de coopération pour le développement. Les années 60 ont également été celles de la création d’une strate supplémentaire de banques multilatérales de développement, dont les modalités de gouvernance tenaient davantage compte de l’avènement de puissances régionales. Depuis les années 90, les fonds verticaux17 et les fonds d’affectation spéciale18 ont fait leur apparition et augmentent en nombre et en importance. D’un périmètre circonscrit à des objectifs spécifiques en termes de régions, de pays ou de thématiques, ils ont contribué à la spécialisation, mais également à la multiplication, des canaux multilatéraux du système de financement du développement durable (Graphique 2.15).

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Graphique 2.15. La multiplication des apporteurs multilatéraux
Graphique 2.15. La multiplication des apporteurs multilatéraux

Source : auteurs, d’après (Faure, Prizzon and Rogerson, 2015[53]) Multilateral development banks: A short guide, https://www.odi.org/sites/odi.org.uk/files/resource-documents/10650.pdf

Comme l’illustre le présent chapitre, les acteurs multilatéraux peuvent entrer dans les catégories des banques multilatérales de développement (BMD), telles que le Groupe de la Banque mondiale et les banques régionales de développement ; du système des Nations Unies19 ; du FMI ; ou d’autres organisations comme des fonds verticaux. Leurs fonctions et leurs relations sont exposées à l’Encadré 2.11. Ces institutions multilatérales sont à la fois des apporteurs de financement du développement à part entière et servent de canaux intermédiaires ou d’agents en aidant leurs États membres à mettre en œuvre leurs politiques de développement durable.

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Encadré 2.11. Les fournisseurs multilatéraux de financement à l’appui du développement durable

Les banques multilatérales de développement (BMD) apportent une aide financière ou une assistance technique à l’appui du développement dans les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire. Outre le Groupe de la Banque mondiale, figurent parmi celles-ci des banques régionales de développement : la Banque africaine de développement (BAfD), la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), la Banque asiatique de développement (BAsD), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque islamique de développement (ISDB) et la Banque interaméricaine de développement (BID).

Les BMD possèdent deux principaux canaux de financement ; par le biais du premier, elles consentent des financements à des conditions non concessionnelles et à travers le deuxième, elles octroient des financements concessionnels (l’exception étant la BERD, qui n’accorde que des financements non concessionnels). Les financements non concessionnels sont consentis aux gouvernements des pays à revenu intermédiaire, à certains gouvernements solvables des pays à faible revenu, et, dans certains cas, à des entreprises privées. Les guichets concessionnels octroient des dons et des prêts à des conditions très favorables aux pays les plus pauvres. La plupart des prêts sont (ou presque) sans intérêts et assortis d’une échéance de 25 à 40 ans.

En ce qui concerne le Groupe de la Banque mondiale, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) et l’Association internationale pour le développement (IDA) font respectivement office de guichet de prêts non concessionnels et de guichet de prêts concessionnels. Les BMD peuvent avoir des filiales spécialisées qui investissent exclusivement dans des projets du secteur privé dans les pays en développement par le biais de prêts, de prises de participation et de facilités de financement du commerce. La Société financière internationale (SFI) remplit cette fonction pour le compte du Groupe de la Banque mondiale.

Les BMD sont appelées à amplifier leur fonction de catalyseurs du financement afin de mobiliser des ressources financières additionnelles à l’appui du développement durable, en particulier auprès du secteur privé. Des discussions sont en cours au sein du G20 en vue d’augmenter le capital des BMD pour répondre aux défis auxquels le système financier international est confronté et mieux assurer les biens publics mondiaux.

Le système de développement des Nations Unies est composé de 34 entités (fonds, programmes et agences) qui ont reçu des fonds en vue de l’exécution d’activités opérationnelles à l’appui du développement. Parmi ces entités figurent les organisations affiliées telles que le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et la Programme alimentaire mondial (PAM), ainsi que les agences spécialisées comme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le Fonds international de développement agricole (FIDA), le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH) et le Secrétariat des Nations Unies font également partie du système de développement des Nations Unies. Ces entités ont des mandats très variés, allant de la prestation de services à la fixation de normes en passant par l’élaboration de politiques.

Les fonds alloués à l’exécution des activités opérationnelles à l’appui du développement se sont établis à 26.7 milliards USD en 2015, dont 77 % destinés à des projets et entités spécifiques. Environ 80 % du total des contributions en 2015 ont été versées par les gouvernements. La Commission européenne, les organisations non gouvernementales, les partenariats public-privé et d’autres institutions multilatérales telles que les fonds mondiaux ont fourni le reliquat.

Au sein du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), des discussions sont en cours pour réformer le système de développement des Nations Unies et recentrer ses fonctions afin de mieux les cadrer avec la mise en œuvre du Programme 2030. En janvier 2018, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a présenté des propositions de réformes qui anticipent une meilleure présence de l’ONU dans les pays en rationalisant et allégeant les équipes pays et en renforçant le pouvoir décisionnel des Coordonnateurs résidents (ONU, 2017[54]). Le recentrage des fonctions des Nations Unies a des répercussions sur son modèle de financement et souligne en particulier la nécessaire mise en place de mécanismes renforcés de financement à l’échelle du système. Compte tenu de la forte utilisation des fonds préaffectés, les réformes visent à améliorer la prévisibilité des ressources en augmentant la proportion du financement du budget central accordé à chacune des agences et la proportion des fonds de financement commun au niveau des pays (ONU, 2017[54]).

Le Fonds monétaire international (FMI) accorde un concours financier aux pays membres faisant face à des crises de balance de paiement, à la demande du pays concerné. Contrairement aux banques de développement, le FMI n’octroie pas de prêts en faveur de projets spécifiques, et la plupart de ses prêts sont consentis aux conditions du marché. Dans la plupart des cas, l’engagement du pays à mettre en œuvre les politiques recommandées par le FMI, connu sous le nom de conditionnalité, doit être obtenu avant la mise à disposition du prêt.

Le FMI accorde également une aide financière concessionnelle, dont les taux d’intérêt sont actuellement nuls, par l’intermédiaire du Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (PRGT), qui possède trois guichets de financement et une capacité cible de financement annuel se chiffrant à 1.25 milliard DTS (2 milliards USD) (FMI, s.d.[55]):

  • Facilité élargie de crédit (FEC): engagement de moyen à long terme en faveur de pays qui connaissent des difficultés prolongées de balance des paiements ;

  • Facilité de crédit de confirmation (FCC): financement visant à répondre à un besoin de balance des paiements immédiat ou potentiel ainsi qu’à des besoins d’ajustement structurel.

  • Facilité de crédit rapide (FCR): aide financière rapide fournie sous forme de décaissements directs pour répondre à des besoins urgents de balance des paiements.

En plus de ses activités de prêt, le FMI fournit une assistance technique et des formations dans divers domaines, par exemple l’activité des banques centrales, la politique monétaire et de change, la politique et l’administration fiscales et les statistiques officielles.

Une forte proportion des ressources multilatérales est non concessionnelle et cible des pays à revenu intermédiaire

Les apports de financement des fournisseurs multilatéraux peuvent, en fonction du type d’organisation, être assortis ou non de conditions libérales. Les financements alloués par la plupart des entités des Nations Unies sont concessionnels et consistent en dons alloués à des projets dans des pays en développement. Les BMD ont des guichets de financement concessionnels et non concessionnels. Les financements non concessionnels consistent en général en des prêts octroyés aux gouvernements de pays à revenu intermédiaire, aux gouvernements de certains pays à faible revenu solvables et, dans certains cas, à des entreprises privées. Les guichets concessionnels des BMD consentent des dons et des prêts hautements concessionnels aux gouvernements de pays à faible revenu.

En 2016, les financements concessionnels et non concessionnels fournis par les acteurs multilatéraux communiquant des données au CAD se sont élevés à respectivement 33 milliards USD et 68 milliards USD20. Si les apports non concessionnels sont près de deux fois plus élevés que les apports assortis de conditions libérales, ils sont fournis exclusivement par des banques multilatérales de développement (59.6 milliards USD) et le FMI (7.8 milliards USD). Les apports multilatéraux ciblent en général les pays à revenu intermédiaire, du fait que les financements non concessionnels, qui représentent une part plus importante du total des financements alloués, ciblent souvent les pays capables de rembourser les financements aux conditions du marché. S’agissant des apports non concessionnels (hors prêts du FMI), 41 % ont été alloués à des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, et 52 % à des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. Les pays à faible revenu ont reçu 30 % des apports concessionnels, et les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure 50 % du total.

Les apporteurs multilatéraux disposent de plusieurs avantages comparatifs

Les apporteurs multilatéraux possèdent plusieurs avantages comparatifs qui leur confèrent une place spéciale au sein du système de financement du développement durable. Du fait de leur puissance fédératrice, ils peuvent offrir un soutien unique à l’action internationale collective afin de produire les biens publics mondiaux nécessaires pour s’attaquer à des problèmes qui dépassent les frontières nationales tels que le changement climatique ou les crises humanitaires et sanitaires mondiales (OCDE, 2016[56]). En mettant en commun les ressources de multiples fournisseurs bilatéraux, les apporteurs multilatéraux peuvent contribuer à réduire la fragmentation des initiatives de développement et à renforcer la cohérence des politiques.

Les apporteurs multilatéraux ont souvent un savoir-faire spécialisé en matière de réformes et/ou de secteurs spécifiques, comme le secteur des infrastructures qui concentre 37.2 % de l’ensemble des apports multilatéraux. Les organisations multilatérales sont souvent très présentes sur le terrain et disposent d’amples connaissances du contexte politique, en particulier dans les contextes fragiles. Entre 2010 et 2016, le financement par habitant alloué par les institutions multilatérales aux États fragiles ou en proie à un conflit est passé de 14 USD en 2010 à 17 USD en 2016, ce qui laisse supposer un ciblage renforcé sur les contextes fragiles.

Les apporteurs multilatéraux, et les BMD en particulier, sont bien équipés pour mobiliser des ressources de sources privées afin de soutenir le passage des milliards aux milliers de milliards à l’appui du financement des ODD. Du fait qu’elles ne financent en général qu’une partie d’un projet, les BMD interviennent, de par leur conception, dans la mobilisation de nouveaux investisseurs en mettant en place des structures de financement en commun et en fournissant des conseils et une atténuation des risques (Banque mondiale, 2015[57]). En plus de participer au financement des projets, les BMD étudient également les autres moyens de mobiliser les ressources du secteur privé, dont certains sont examinés au Chapitre 3. L’Asset Management Company (AMC) de la SFI en offre une illustration. Filiale contrôlée à 100 % par la SFI sous la forme d’une société de capital-investissement, elle gère des fonds d’investisseurs privés et les investit dans des entreprises et des projets dans des pays en développement. Depuis sa création en 2009, elle a levé 10 milliards USD via 13 fonds (Société financière internationale, 2018[58]).

Les partenariats sont essentiels pour garantir l’adéquation du système multilatéral aux objectifs poursuivis

Le système multilatéral est en expansion et devient de plus en plus complexe. L’entrée en scène de nouveaux acteurs tels que la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (AIIB) et la Nouvelle banque de développement (NDB) témoigne de l’évolution de la dynamique du système de financement du développement. L’arrivée de nouveaux organismes internationaux peut avoir des effets positifs et négatifs. La proportion des contributions bilatérales acheminées par le biais des organismes multilatéraux est restée stable, mais la multiplication des acteurs, dont les domaines de compétence se chevauchent parfois, risque toutefois d’entraîner une fragmentation de l’aide.

Pour les apporteurs multilatéraux, la meilleure façon de maintenir leur crédibilité dans cet environnement est d’améliorer la coordination de leurs initiatives et la répartition des tâches. Des initiatives visant à encourager et renforcer cette collaboration sont en cours afin d’exploiter pleinement les avantages comparatifs de chacun. Ainsi le cadre de partenariat Nations-Unies/Banque mondiale, destiné à renforcer la résilience et rechercher la paix dans les zones de conflit, mis en place en 2008 et mis à jour en 2017, constitue une plateforme permettant de développer des analyses et des outils conjoints pour des solutions plus efficaces, de coordonner le soutien face à des crises prolongées, ou encore d’accroître l’impact en optimisant les financements (ONU-Banque mondiale, 2017[59]).

Afin de conserver leur pertinence dans un système de financement du développement durable de plus en plus diversifié, les apporteurs multilatéraux nouent également des partenariats plus inclusifs avec divers acteurs du financement du développement, dont le secteur privé, la société civile et les pays qui participent à la coopération Sud-Sud (Kharas, 2010[60]). Les BMD, en particulier, doivent mettre à profit leur capacité à catalyser les financements du secteur privé. Le rapport de l’OCDE qui paraîtra prochainement, intitulé Multilateral Development Finance 2018, traite en particulier des initiatives mises en œuvre par les BMD pour mobiliser les financements privés (OCDE, à paraître[61]).

Apporteurs infranationaux

  • Les fonds acheminés via la coopération décentralisée pour le développement (CDD) sont relativement faibles, leur volume s’est élevé à 1.9 milliard USD en 2015.

  • La ventilation sectorielle de la CDD est la suivante : 12 % à la santé ; 10 % à l’agriculture, 8 % à l’éducation et 6 % à l’eau.

Les acteurs infranationaux participent au financement du développement durable à différents niveaux

Les acteurs infranationaux contribuent au financement du développement durable par le biais d’activités regroupées sous l’intitulé collectif de coopération décentralisée pour le développement (CDD). Le concept de coopération décentralisée pour le développement est né dans les années 80, dans le contexte d’un désengagement des administrations centrales en faveur d’un rôle accru des administrations locales et régionales pour promouvoir les partenariats public-privé. Toutefois, même plus tôt, en 1971, l’Assemblée générale des Nations Unies avait reconnu, dans une résolution, la pratique du jumelage municipal comme outil de la coopération internationale. Au fil du temps, ces partenariats entre villes ont évolué pour associer d’autres autorités publiques infranationales telles que des organismes publics, dans le domaine de l’eau, par exemple, comme en France et aux Pays-Bas. Les activités menées au titre de la CDD se sont ainsi développées, non seulement en termes de ciblage sectoriel, mais également pour ce qui est des niveaux d’administration participants. Le Programme d’action d’Addis-Abeba a réaffirmé la tendance croissante à la décentralisation des dépenses publiques en direction des acteurs locaux et régionaux, aussi bien dans les pays en développement que dans les pays développés (paragraphe 34).

Les acteurs impliqués dans la CDD appartiennent ou non à la sphère publique, et relèvent des échelons local à régional et provincial. Le rapport de l’OCDE publié récemment, intitulé Reshaping Decentralised Development Co-operation, tente de définir quatre catégories pour ce qui est des rôles et responsabilités des divers acteurs, selon qu’ils jouent un rôle dans la promotion, la mise en place de conditions favorables, la facilitation ou la mise en œuvre (Graphique 2.16). La présente section, consacrée aux apporteurs infranationaux, s’inspire largement de l’analyse contenue dans ce rapport.

Les administrations infranationales, dont les régions, les provinces et les municipalités, sont en général les principaux promoteurs de la coopération décentralisée, aux côtés des organismes publics de l’administration centrale ou des ministères sectoriels. Au-delà des administrations centrales et infranationales, les activités menées au titre de la coopération décentralisée incluent divers partenariats avec un large éventail d’acteurs. Les universités et les centres de recherche jouent souvent un rôle actif en assurant la mise en place de conditions favorables, la facilitation et la mise en œuvre. Ils peuvent concourir au renforcement du socle de données et de l’évaluation des projets décentralisés, entraînant ainsi un renforcement des capacités techniques au niveau local. Les ONG, les organisations de la société civile et les jeunes bénévoles jouent de plus en plus un rôle important dans les projets de coopération décentralisée, en particulier en termes de mise en œuvre.

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Graphique 2.16. Les différents rôles de la coopération décentralisée pour le développement
Graphique 2.16. Les différents rôles de la coopération décentralisée pour le développement

Source : OCDE (2018[62]) Reshaping Decentralised Development Co-operation: The Key Role of Cities and Regions for the 2030 Agenda, https://doi.org/10.1787/9789264302914-en

La coopération décentralisée pour le développement contribue à inscrire le financement du développement durable dans un contexte local

Le volume des fonds acheminés par le biais de la CDD, qui s’élevait à 1.9 milliard USD en 2015, est relativement faible. Les écarts de volume entre les pays et selon les années sont plutôt élevés – bien plus importants que ceux de l’APD allouée par le administrations centrales. Au cours de la période 2005-15, la coopération décentralisée pour le développement a augmenté pour l’Autriche (+ 360 %), la Suisse (+ 44 %), l’Italie (+ 39 %) et la Belgique (+ 16 %). Elle a au contraire diminué pour la Grèce (- 100 %), le Portugal (- 97 %), l’Espagne (- 56 %), le Japon (- 46 %) et l’Allemagne (- 4 %).

La coopération décentralisée doit son avantage comparatif à son ancrage sur les compétences et le savoir-faire locaux via les administrations locales. Le rapport de l’OCDE Reshaping Decentralised Development Co-operation fait valoir que cette forme de coopération pour le développement contribue à l’amélioration de la qualité des services des administrations locales et élargit leur couverture, renforçant par là même la satisfaction à l’égard de l’administration locale et la confiance dont elle bénéficie, et fournissant un accès plus vaste au financement du développement durable.

Des défis spécifiques tels que la fourniture des services publics aux habitats urbains informels, l’action menée par les administrations locales pour faire face au changement climatique ou les migrations vers les zones urbaines sont des domaines clés dans lesquels les acteurs infranationaux peuvent grandement contribuer à renforcer le développement. L’automisation des administrations locales devrait permettre de développer les compétences à l’appui de la mobilisation des recettes à l’échelon local et fournir un accès à des dispositifs de financement du développement durable de long terme.

Conformément à ces priorités, la coopération décentralisée cible essentiellement la santé, l’éducation, l’agriculture et l’eau (Graphique 2.17). En 2015, la CDD ciblait principalement des activités multisectorielles, qui représentaient 21 % du total des ressources ventilables par secteur. Au nombre des secteurs inclus figuraient l’éducation/la formation, la recherche scientifique, le développement rural et les coûts des réfugiés dans les pays donneurs. Les secteurs de la santé et de l’agriculture représentent respectivement 12 % et 10 % de la CDD ; l’éducation s’élevait à 8 % et le secteur de l’eau à 6 % du total de la CDD ventilable par secteur. Ces chiffres doivent toutefois inviter à la prudence, car la communication de données sur la CDD ventilable par secteur est limitée en raison des difficultés auxquelles font face plusieurs membres du CAD dans ce domaine.

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Graphique 2.17. Dotations sectorielles au titre de la coopération décentralisée pour le développement en 2015
Graphique 2.17. Dotations sectorielles au titre de la coopération décentralisée pour le développement en 2015

Source : OCDE (2018[62]), Reshaping Decentralised Development Co-operation: The Key Role of Cities and Regions for the 2030 Agenda, https://doi.org/10.1787/9789264302914-en

 StatLink https://doi.org/10.1787/888933974332

Un recueil de données et une coordination systématiques peuvent apporter un soutien aux acteurs infranationaux

  • Bien que faible en valeur absolue, le financement du développement par les acteurs infranationaux contribue à inscrire les ODD dans un contexte local. Les activités dans ce domaine reposent sur un esprit de volontarisme et un engagement à s’ancrer dans les communautés et les mécanismes locaux afin de rapprocher les programmes d’action internationaux de l’échelon local. Un engagement plus prononcé via des activités de coopération décentralisée peut appuyer et renforcer la gouvernance locale dans les pays en développement tout en renforçant l’autonomie des communautés locales et en favorisant la collaboration entre les autorités locales et la société civile.

  • Les défis auxquels est confrontée la coopération décentralisée résident essentiellement dans les coûts de transaction élevés associés à l’ampleur limitée des projets. Les administrations nationales, les réseaux ou plateformes mondiaux, ainsi que les associations nationales d’administrations locales et régionales peuvent jouer un rôle important en facilitant la coordination des activités de coopération décentralisée. Améliorer la communication de données sur ces activités peut permettre de dresser plus facilement un état des lieux et d’améliorer le recueil de données, deux conditions indispensables à une coordination de meilleure qualité et plus systématique des initiatives entre les niveaux d’administration et les secteurs.

copy the linklink copied!Vers un financement durable du développement

Les différents acteurs examinés dans ce chapitre apportent des contributions distinctes – de par leur volume aussi bien que de par leur nature – au financement du développement durable. Les différentes types de financement extérieur restent essentiels, tandis que les ressources intérieures sont la forme de financement dominante. S’ils suivent une trajectoire de développement durable, les pays verront grossir leurs ressources intérieures, publiques et privées, tout en conservant l’interdépendance avec le système économique mondial.

La suite du présent rapport fait valoir que, s’il est nécessaire de mobiliser un volume plus important de financement, une évolution encore plus fondamentale s’impose – à savoir la réorientation des milliers de milliards de financements intérieurs et extérieurs déjà disponibles vers la réalisation des ODD.

À cette fin, il importe de mettre à profit la diversité du paysage du financement et de ses acteurs en créant un véritable système de financement du développement durable. Cela nécessite une compréhension approfondie du rôle des différents acteurs, des instruments qu’ils utilisent et de leurs interactions. La mise en place d’un cadre de mesure, d’un cadre stratégique et d’un cadre opérationnel est tout aussi importante, afin d’exploiter au mieux chaque acteur et chaque source de financement. Toutefois, rassembler cet ensemble hétérogène d’acteurs aux motivations diverses constitue un défi colossal. Des contraintes fondamentales existent, auxquelles il convient de remédier afin de passer d’un simple financement du développement à un financement du développement durable. Par exemple :

  • Compte tenu du manque de données disponibles, il est difficile d’établir une cartographie des contributions des différents acteurs. Si les données anecdotiques sont nombreuses à indiquer que de nouveaux acteurs des pays en développement fournissent une part plus importante des financements transfrontaliers, le manque de données consolidées (au-delà de l’APD versée par les membres du CAD) ne facilite pas la prise en considération de leur rôle. Ainsi, les estimations des montants des financements concessionnels alloués par la Chine en un an varient de 3 milliards à 7 milliards USD. Il convient de redoubler d’efforts pour promouvoir la transparence et une communication plus systématique de données plus comparables sur les contributions, et notamment la mesure du soutien public total au développement durable (TOSDD ou SPTDD), comme énoncé dans le PAAA au paragraphe 55.

  • Différents acteurs ont divers niveaux d’obligation à l’égard des ODD. Les investissements transfrontaliers et les envois de fonds relèvent de décisions par nature privées, et non d’une motivation à atteindre les ODD. L’action publique, aussi bien dans les pays en développement que dans les pays qui la mènent, peut influer sur ces actions privées. Promouvoir l’inclusion financière peut ainsi contribuer à acheminer les envois de fonds là où l’impact sur le développement est le plus élevé.

Ces contraintes sont examinées dans la Partie II de ce rapport, qui présente les domaines d’action permettant de relever les défis liés à la mesure (Chapitre 4), à la cohérence et aux les lacunes des politiques publiques (Chapitre 5), et aux choix opérationnels (Chapitre 6).

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[65] McKenzie, D. (2014), “Almost 80 percent of the growth in remittances to developing countries over the past 20 years is an illusion”, World Bank Development Impact blog, http://blogs.worldbank.org/impactevaluations/almost-80-percent-growth-remittances-developing-countries-over-past-20-years-illusion.

[12] OCDE (2018), Base de données mondiale des statistiques des recettes publiques, http://www.oecd.org/fr/fiscalite/politiques-fiscales/base-de-donnees-mondiale-des-statistiques-des-recettes-publiques.htm.

[45] OCDE (2018), La philanthropie privée pour le développement, Objectif développement, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264303973-fr.

[32] OCDE (2018), Perspectives économiques de l’OCDE, Volume 2018 Numéro 1, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/eco_outlook-v2018-1-fr.

[62] OCDE (2018), Reshaping Decentralised Development Co-operation : The Key Role of Cities and Regions for the 2030 Agenda, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264302914-en.

[2] OCDE (2018), Système de notification des pays créanciers (base de données), OCDE, Paris, https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=crs1.

[41] OCDE (2017), Interactions entre politiques publiques, migrations et développement, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264274136-fr.

[56] OCDE (2016), L’aide multilatérale 2015 : De meilleurs partenariats pour le monde de l’après-2015, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264257528-fr.

[31] OCDE (2016), OECD Business and Finance Outlook 2016, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264257573-en.

[52] OCDE (2013), Identification and Monitoring of Potentially Under-aided Countries, Éditions OCDE, Paris, https://www.oecd.org/dac/aid-architecture/Identification%20and%20Monitoring%20of%20Potentially%20Under-Aided%20Countries.pdf.

[7] OCDE (2008), Croissance et inégalités : Distribution des revenus et pauvreté dans les pays de l’OCDE, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264044210-fr.

[33] OCDE (2006), Perspectives des migrations internationales 2006, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/migr_outlook-2006-fr.

[61] OCDE (à paraître), Multilateral Development Finance Report 2018.

[54] ONU (2017), Repositionnement du système des Nations Unies pour le développement en vue de de la mise en œuvre du Programme 2030 : notre promesse d’une vie dans la dignité, la prospérité et la paix sur une planète en bonne santé, Organisation des Nations Unies, New York.

[59] ONU-Banque mondiale (2017), “Joint statement on signing of new UN-World Bank framework to build resilience and sustain peace in conflict areas”, United Nations Secretary-General website, https://www.un.org/sg/en/content/sg/note-correspondents/2017-04-22/joint-statement-signing-new-un-world-bank-framework-build.

[50] PNUD (2016), Scaling-Up South-South Cooperation for Sustainable Development, PNUD, New York, http://www.undp.org/content/undp/en/home/librarypage/development-impact/Scaling-Up_SSC_for_Sustainable_Development.html.

[43] PNUD (2016), “Unleashing the potential philanthropy in China”, http://www.cn.undp.org/content/china/en/home/presscenter/pressreleases/2016/05/30/unleashing-the-potential-of-philanthropy-in-china-.html.

[38] Ratha, D. (2005), “Workers’ remittances: An important and stable source of external development finance”, Economics Seminar Series, No. 9, https://repository.stcloudstate.edu/econ_seminars/9/.

[36] Ratha, D. et al. (2018), “Transit Migration”, Migration and Development Brief, No. 29, Groupe de la Banque mondiale, Washington, D.C., https://www.knomad.org/publication/migration-and-development-brief-29.

[20] Reaves, B. et al. (2017), “Mo(bile) money, mo(bile) problems: Analysis of branchless banking applications in the developing world”, ACM Transactions on Privacy and Security, Vol. 20/3, https://doi.org/10.1145/3092368.

[34] Rodriguez-Montemayor, E. (2012), “Diaspora direct investment Policy options for development”, Policy Brief, No. IDB-PB-183, Banque interaméricaine de développement, https://publications.iadb.org/bitstream/handle/11319/1444/Diaspora%20Direct%20Investment%20Policy%20Options%20for%20Development.pdf?sequence=1&isAllowed=y.

[23] SFI (2013), “Access to credit among micro, small, and medium enterprises”, IFC Advisory Services, Société financière internationale, Washington, D.C., https://www.ifc.org/wps/wcm/connect/1f2c968041689903950bb79e78015671/AccessCreditMSME-Brochure-Final.pdf?MOD=AJPERES.

[35] Singer, D. (2010), “Migrant remittances and exchange rate regimes in the developing world”, American Political Science Review, Vol. 104/2, https://doi.org/10.1017/S0003055410000110.

[58] Société financière internationale (2018), “IFC Asset Management Company: Funds (site Internet)”, https://www.ifcamc.org/funds (accessed on 18 June 2018).

[64] Tamarappoo, R. et al. (2016), Analysis of the Linkage between Domestic Revenue Mobilization and Social Sector Spending, USAID, Washington, D.C., https://sidw.org/sites/default/files/DRM%20and%20Social%20Sector%20Spending%20-%20Pooja%27s%20Doc.pdf.

[48] Younas, J. (2008), “Motivation for bilateral aid allocation Altruism or trade benefits”, European Journal of Political Economy, Vol. 24/3, pp. 661-674.

Notes

← 1. Dans une étude récente menée pour USAID, Tamarappoo et al. (2016[64]) estiment qu’une hausse de 10 % de la fiscalité conduit à une augmentation de 17 % des dépenses publiques de santé dans les pays à faible revenu, contre respectivement 4 % et 3 % dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et de la tranche supérieure. Voir https://sidw.org/sites/default/files/DRM%20and%20Social%20Sector%20Spending%20-%20Pooja%27s%20Doc.pdf.

← 2. L’indice d’effort fiscal ajusté de la vulnérabilité, élaboré par la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi), évalue l’effort fiscal des pays moins avancés. Il révèle qu’une « vulnérabilité économique » accrue diminue les recettes fiscales potentielles, alors que des « actifs humains » plus élevés les améliorent. Voir www.ferdi.fr/en/indicator/vulnerability-adjusted-tax-effort-index-vatei.

← 3. Cette moyenne prend en compte les cotisations de sécurité sociale.

← 4. La Chine, où l’investissement intérieur des entreprises compense la baisse de l’investissement étranger, est l’une de ces exceptions notables. En Chine, l’explosion des fusions-acquisitions nationales compense plus de de dix fois le recul des fusions-acquisitions transnationales et des entrées de ressources qui leur sont liées. Entre 2011 et 2017, les fusions-acquisitions nationales en Chine ont atteint en moyenne 322 milliards USD, contre 37 milliards USD pour les fusions-acquisitions transnationales au cours de la même période.

← 5. Ces estimations reposent sur un échantillon de 91 pays étudiés par Cull et al. (2017[21]). Voir www.imf.org/en/Publications/WP/Issues/2017/03/22/Bank-Ownership-Trends-and-Implications-44753.

← 6. Ces chiffres, qui proviennent des statistiques du CAD de l’OCDE, englobent les apports concessionnels et non concessionnels du secteur public, les apports privés et les envois de fonds en provenance de pays membres et non membres de l’OCDE.

← 7. L’IDE est généralement défini comme une prise de participation d’au moins 10 % dans une entreprise, qui permet en général d’exercer une certaine influence sur les décisions qui y sont prises. Les investissements de portefeuilles sont définis comme une prise de participation inférieure à 10 %.

← 8. La valeur des fusions-acquisitions transnationales est généralement l’une des composantes les plus importantes des apports d’IDE. Le présent rapport utilise des données sur les fusions-acquisitions transnationales pour apprécier l’importance de la Chine en tant qu’investisseur dans les pays en développement, du fait que les données sur l’IDE bilatéral n’offrent pas une couverture suffisante.

← 9. À titre de comparaison, les entreprises détenues à 100 % par l’État ne représentaient que 38 % de la totalité des fusions-acquisitions effectuées à l’étranger par la Chine au cours de cette période.

← 10. En 2001 et 2006, l’investissement privé s’est élevé à plus de 8 % du PIB dans les PRITS. Pour les PRITI, cette proportion était supérieure à 8 % en 2001-03.

← 11. Ces chiffres reposent sur les données de Balance des paiements du FMI, après correction à l’aide des déflateurs du PIB du FMI et des taux de change de l’édition d’avril 2018 des Perspectives de l’économie mondiale, et en prenant 2016 comme année de référence.

← 12. Les fusions-acquisitions sont l’un des principaux instruments utilisés par les entreprises multinationales pour investir sur les marchés étrangers, et elles comportent une composante importante d’IDE. Les données sur les fusions-acquisitions englobent un éventail de transactions financières pouvant aller de la fusion complète de deux entreprises auparavant indépendantes à la prise d’une participation minoritaire dans un partenaire stratégique.

← 13. Dans un post sur un blog de la Banque mondiale, McKenzie (2014[65]) attribue la hausse des envois de fonds enregistrée au fil du temps à des changements de la façon dont ils sont mesurés. Voir http://blogs.worldbank.org/impactevaluations/almost-80-percent-growth-remittances-developing-countries-over-past-20-years-illusion.

← 14. Les données relatives aux financements non concessionnels alloués par les acteurs bilatéraux portent également sur les crédits à l’exportation qui ne poursuivent pas d’objectif de développement.

← 15. Si les membres du CAD acceptent en général l’objectif, du moins sur le long terme, de 0.7 % fixé pour l’APD, il existe des exceptions notables. La Suisse, par exemple, n’a pas adopté cet objectif, et les États-Unis ont affirmé qu’ils n’adhéraient à aucun objectif ou calendrier spécifique, même s’ils se rallient aux objectifs de portée plus générale énoncée dans la Résolution. Voir http://www.oecd.org/dac/stats/the07odagnitarget-ahistory.htm.

← 16. Ce chiffre risque d’être sous-estimé. China AidData a employé une méthodologie ‘open source’ pour retracer l’évolution des données sur l’investissement chinois communiquées par les médias chinois, et a estimé le volume de l’investissement entre 2000 et 2014 à 350 milliards USD (USD de 2014 corrigés de l’inflation), dont 37 milliards USD investis au cours de la seule année 2014. Sur ces totaux estimés, 80 milliards USD au cours de l’ensemble de la période et 7 milliards USD en 2014 étaient comparables à de l’APD. Voir https://china.aiddata.org/.

← 17. Les fonds verticaux sont des mécanismes de financement multilatéraux qui regroupent des ressources émanant de sources aussi bien publiques que privées afin de cibler les besoins dans des domaines de développement uniques tels que la santé (ex. : Gavi, l’Alliance du vaccin) ou le financement climatique (ex. : Fonds vert pour le climat).

← 18. Les fonds d’affectation spéciale sont des mécanismes de financement gérés par des organismes multilatéraux pour le compte d’un ou de plusieurs donneurs bilatéraux, afin de soutenir des objectifs de développement prédéfinis (ex. : soutien à des pays, régions ou thèmes spécifiques).

← 19. Le système des Nations Unies regroupe les Nations Unies et les nombreux programmes, fonds et organismes spécialisés qui leur sont affiliés, et leur composition tout comme leur budget leur sont propres. Les programmes et les fonds sont financés par des contributions volontaires et non statutaires. Les organismes spécialisés sont des organisations internationales indépendantes financées par des contributions volontaires et statutaires.

← 20. Ce chiffre ne tient pas compte des financements concessionnels d’un montant de 18.6 milliards USD versés en 2016 par l’Union européenne, qui agit comme un apporteur plutôt bilatéral que multilatéral.

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Chapitre 2. Un système de financement du développement durable en expansion, caractérisé par la multiplication des acteurs et des ressources