10. Mise en œuvre et administration

805. L'élaboration du cadre de mise en œuvre du Pilier 1 est moins avancée que d'autres axes de travail. En effet, le Cadre inclusif a mis l’accent sur la conception et l’élaboration des principales composantes opérationnelles du Pilier 1, et notamment : le champ d'application, les règles de source du chiffre d'affaires, le lien, la base d’imposition, l’élimination de la double imposition et la sécurité juridique en matière fiscale. Les modalités de mise en œuvre dépendront des décisions prises dans ces domaines ; compte tenu des progrès désormais accomplis, la priorité du projet au cours des mois à venir sera de faire en sorte que le Pilier 1 puisse être mis en œuvre de façon rapide, efficace, cohérente et coordonnée.

806. La mise en œuvre du Pilier 1 exigera d’agir à trois niveaux différents : (1) le droit interne ; (ii) le droit public international ; et (iii) des orientations permettant de compléter (i), (ii) ou les deux.

807. Il est entendu que tout accord faisant l’objet d’un consensus sur le Pilier 1 doit comporter un engagement de la part des membres du Cadre inclusif à le mettre en œuvre et à supprimer les mesures actions unilatérales concernées.

808. La mise en œuvre du Montant B est abordée au chapitre 8.

809. Les composantes opérationnelles du Pilier 1 devront être transposées dans le droit interne des juridictions. Bien que les modalités spécifiques de transposition dans le droit interne requises dépendent du cadre juridique et des circonstances propres à chaque juridiction, le droit interne devra répondre aux quatre critères suivants :

  • Créer un droit d’imposition national compatible avec la conception du Montant A. Cela suppose d'établir des règles qui appliquent les éléments essentiels suivants de tout droit d’imposition : identification du contribuable, détermination de l’objet, de la base, de la période et des taux d’imposition (voir (i) ci-dessous) ;

  • Prévoir l’allégement de la double imposition lorsqu’une entité résidente est identifiée en tant que contribuable à la section précédente. La disposition correspondante autorisera l’élimination de la double imposition et précisera la méthode à employer (voir (ii) ci-dessous) ;

  • Intégrer des procédures de gestion du nouveau droit d’imposition et d'allégement de la double imposition pour les entités résidentes identifiées en tant que contribuables soumis au nouveau droit d’imposition, y compris des mesures qui facilitent l'administration centralisée et simplifiée et le processus de sécurité juridique en matière fiscale concernant le Montant A (voir (iii) ci-dessous) ; et

  • Comporter des processus qui améliorent la sécurité juridique en matière fiscale au-delà du Montant A, notamment en prévoyant des mécanismes efficaces de prévention et de règlement des différends (voir (iv) ci-dessous).

810. Une juridiction devra d'abord transposer dans son droit interne les règles adoptées par le Cadre inclusif afin de déterminer dans quelles circonstances un groupe d’EMN est imposable dans cette juridiction sur la base du Montant A. La création d’un droit d'imposition national pour le Montant A est essentielle.

811. Les éléments essentiels d’un nouveau droit d’imposition sont les suivants :

  • L’identification du contribuable et l’objet de l’imposition : le nouveau droit d’imposition grèvera les « entités payeuses » qui sont membres d’un groupe d’EMN qui dépasse le seuil de déclenchement, réalise un chiffre d'affaires couvert à partir de sources nationales et satisfait aux critères du lien (voir les chapitres 2, 3 et 4. Pour l’identification de l’entité payeuse, voir la section 7.2).

  • La base d’imposition, la période d’imposition et les taux d’imposition : une juridiction devra également intégrer dans son droit interne les règles relatives au calcul et à la répartition du Montant A (voir le chapitre 4.5 portant sur le calcul de la base d’imposition, et le chapitre 6 consacré à la répartition des bénéfices). Les règles internes applicables détermineront le choix de la période et des taux d’imposition.

812. Les juridictions devront également inclure dans leur droit interne les règles adoptées en matière d'élimination de la double imposition. L’objectif est que les entités soumises au nouveau droit d’imposition puissent bénéficier des mécanismes d'élimination de la double imposition résultant du Montant A.

813. Il faudra pour cela appliquer les règles ou principes concernant les approches à suivre pour identifier les entités redevables de l’impôt au titre du Montant A (les entités payeuses), ainsi que les méthodes d'élimination de la double imposition résultant du paiement du Montant A pour ces entités (voir le chapitre 7).

814. Il est essentiel de transposer des procédures permettant d'administrer, de lever et de collecter le nouvel impôt au titre du Montant A dans les règles administratives de droit interne.

815. Le processus d'administration simplifié actuellement à l'étude pourrait être basé sur le processus simplifié et centralisé de sécurité juridique en matière fiscale qui est examiné au chapitre 9 et développé en parallèle. Il aurait pour but de centraliser le calcul du Montant A et les activités de conformité afférentes au sein d’une entité unique, éventuellement l’EMU prévue pour la déclaration pays par pays en vertu de l’Action 13 du BEPS. Centraliser le processus d'application du Montant A au sein d’une entité unique devrait entraîner une réduction significative des coûts de conformité. Cela devrait également alléger la charge que ce processus représente pour les administrations fiscales, qui bénéficieraient ainsi d’un seul formulaire de déclaration cohérent relatif au Montant A, d’une documentation normalisée et éventuellement d’un paiement unique du Montant A de chaque groupe d’EMN. Il sera peut-être nécessaire d’ajouter des dispositions à l’instrument multilatéral prévu et/ou au droit interne pour autoriser ce processus plus centralisé (par exemple, pour faire en sorte qu’un paiement d’impôt unique effectué par une entité non résidente située dans une autre juridiction vienne éteindre une dette fiscale nationale).

816. Différents éléments pourraient être envisagés dans le cadre d'un processus d'administration simplifié, en autorisant une entité unique à :

  • Calculer le Montant A pour le compte du groupe et déposer une déclaration fiscale pour le compte des entités payeuses (y compris pour la déclaration de pertes) ;

  • Gérer le processus de sécurité juridique en matière fiscale pour le Montant A pour le compte du groupe, y compris en acceptant tout ajustement proposé ;

  • Payer l’impôt dû au titre du Montant A dans les juridictions du marché pour le compte des entités payeuses (faire office d'agent) ; et

  • Assumer la responsabilité principale pour le respect de tous les aspects du Montant A dans les juridictions de marché, y compris en étant l’entité envers laquelle ces juridictions pourraient former un recours en justice.

817. En matière de prévention et de règlement des différends portant sur le Montant A, le mécanisme administrable et contraignant de prévention des différends sera le gage d’une sécurité juridique à un stade précoce, avant d’opérer les ajustements fiscaux, de manière à prévenir les différends portant sur tous les aspects du Montant A. Le chapitre 9 contient des informations complémentaires sur le processus connexe de sécurité juridique en matière fiscale.

818. Bien que l’approche novatrice soit élaborée dans un cadre multilatéral, les juridictions devront intégrer dans leur droit interne toutes les références nécessaires au nouveau processus de sécurité juridique pour le Montant A, y compris la mise en œuvre de la décision du comité et d'autres aspects procéduraux.

819. L'approche de la sécurité juridique en matière fiscale au-delà du Montant A englobe une série d'étapes, depuis la prévention des différends et la procédure amiable existante jusqu’à un mécanisme obligatoire et contraignant de règlement des différends.

820. Pour bénéficier des améliorations apportées aux outils existants de prévention des différends, qui recouvrent des projets entrepris dans le cadre de l’agenda sur la sécurité juridique du Forum sur l'administration de l'impôt, les juridictions devront s'assurer que leur droit interne autorise leur utilisation.

821. De même, les caractéristiques de la procédure amiable et du nouveau mécanisme de prévention des différends devront peut-être être transposées dans le droit interne. S'agissant du nouveau mécanisme de règlement des différends, le droit interne devrait prévoir la possibilité de soumettre les affaires à un comité d’experts qui rendrait des décisions contraignantes.

822. Les conventions fiscales existantes contiennent des dispositions ayant généralement pour effet d’empêcher l'application du Montant A, même une fois celui-ci transposé dans le droit interne. En outre, il est peu probable qu’elles prévoient des règles relatives à l’allégement de la double imposition qui soient valables pour le Montant A, pas plus qu’elles n’incluent de dispositions régissant l’administration du Montant A, y compris les nouvelles règles de prévention et de règlement des différends.

823. La meilleure façon de supprimer les obstacles conventionnels à la mise en œuvre du Pilier 1 et de le faire en garantissant la cohérence et la certitude dans l’application et le fonctionnement du Montant A est d'élaborer une nouvelle convention multilatérale. Cette convention multilatérale supprimerait les obstacles existants dans les conventions fiscales à l’application du Montant A et contiendrait également les quatre éléments évoqués dans la section précédente.

824. Même si une juridiction transpose dans son droit interne les règles qui régiront le Montant A - p. ex. la règle qui accorde à une juridiction du marché le droit d’imposer une fraction des bénéfices d’une EMN en l'absence du critère traditionnel de présence physique - les conventions bilatérales existantes empêcheront probablement l’application de ces règles. En effet, par exemple, la plupart des conventions existantes autorisent une juridiction du marché à imposer les bénéfices d’une entité non résidente uniquement si elle a un établissement stable dans cette juridiction. Il faudra donc modifier les conventions bilatérales pour permettre aux règles relatives au Montant A de s’appliquer sans obstacles conventionnels.

825. La mise en œuvre des règles de calcul du Montant A dans un instrument international de droit public de nature fiscale serait strictement nécessaire uniquement pour les juridictions qui ont de telles conventions fiscales bilatérales restrictives en vigueur ; en l’absence de convention, les règles pourraient, du moins en théorie, être appliquées exclusivement en vertu du droit interne. Toutefois, pour assurer une mise en œuvre cohérente du Montant A entre juridictions, il est recommandé d’inclure dans une convention multilatérale des règles de mise en œuvre régissant tous les aspects du Montant A pour l’ensemble des juridictions, indépendamment des conventions fiscales. En d'autres termes, une convention multilatérale devrait s’appliquer pour limiter le droit d’imposition aux paramètres convenus en matière de champ d'application, de lien, de seuils, etc., y compris les règles de prévention et de règlement des différends portant sur le Montant A, et devrait incarner l’engagement d'alléger la double imposition conformément au cadre convenu.

826. Cependant, la partie de la convention multilatérale qui contiendra les règles de calcul de l’impôt au titre du Montant A resterait pertinente pour ces juridictions, parce qu’elle servirait de référence pour l’application de la partie de la convention concernant la prévention et le règlement des différends portant sur le Montant A.

827. Aussi, il sera nécessaire de mettre en œuvre, via une convention multilatérale, tous les éléments essentiels d’un nouveau droit d’imposition (les règles d’identification du contribuable et de l’objet de l’impôt, et celles relatives à la base d'imposition, à la période d’imposition, aux taux d'imposition, etc.) conformément à la conception du Montant A et au droit interne.

828. Sachant que les conventions bilatérales resteraient en vigueur et continueraient de régir la fiscalité internationale pour les questions non liées au Montant A, la convention multilatérale coexisterait avec le réseau existant de conventions fiscales. Néanmoins, en cas de conflit, ses dispositions remplaceraient généralement les dispositions contenues dans les conventions fiscales bilatérales existantes.

829. À la différence de la Convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (l’Instrument multilatéral BEPS), cette convention multilatérale ne chercherait pas à modifier la formulation des dispositions des conventions existantes (p. ex. la nouvelle règle de lien ne modifierait pas la définition existante de l’établissement stable contenue dans une convention en particulier). De nouvelles dispositions conventionnelles autonomes seraient élaborées pour régir les nouveaux droits d’imposition, et elles prévaudraient pour la taxation des EMN couvertes.

830. Il faudra modifier les règles actuelles en matière d'élimination de la double imposition qui s'appliqueront au Montant A. Les nouvelles règles prévoiront l’allégement de la double imposition lorsqu’une entité résidente est identifiée en tant qu’entité payeuse aux fins du Montant A. Les règles pourraient également préciser la méthode à employer - méthode de l’exemption ou de l’imputation, par exemple.

831. Contrairement aux règles de calcul du Montant A proprement dit, l’intégration de règles d'élimination de la double imposition dans un instrument international de droit public pourrait ne pas être nécessaire car la plupart des juridictions pourraient, en principe, s'appuyer sur leur droit interne (amendé le cas échéant) pour éliminer la double imposition1. Toutefois, les régimes nationaux relatifs aux crédits d’impôts étrangers comportent souvent des limites qui peuvent entraîner une double imposition (par exemple, si le revenu taxé dans la juridiction du marché est considéré comme un revenu d’origine nationale par la juridiction qui accorde l'allégement). Il ne devrait pas exister de divergences entre les règles nationales de source susceptibles d’entraîner une double imposition du Montant A. Il serait donc préférable d'inclure dans une convention multilatérale des règles valables pour toutes les juridictions, indépendamment de l’existence de conventions fiscales bilatérales. De cette manière, l’allégement de la double imposition serait effectif et coordonné entre juridictions. Par ailleurs, la présence d’une telle section dans la convention bilatérale garantirait le bon fonctionnement des processus de prévention et de règlement des différends portant sur le Montant A.

832. Il sera essentiel de mettre en œuvre le nouveau processus administratif simplifié ainsi que les procédures de prévention et de règlement des différends pour le Montant A dans une convention multilatérale afin de garantir cohérence et certitude dans l’application du Montant A.

833. À la différence des sections de la convention multilatérale consacrées au calcul du Montant A et à l’élimination de la double imposition, la section relative aux procédures, à l'administration et au processus de sécurité juridique serait pertinente pour l’ensemble des parties à la convention, qu’elles soient ou non liées entre elles par une convention existante. Les conventions fiscales bilatérales en vigueur n’empêcheraient pas l’application de ces dispositions sur les procédures, l'administration et la sécurité juridique, de sorte que la convention multilatérale ne les remplacerait pas. S'agissant des dispositions afférentes au nouveau mécanisme de règlement des différends non liés au Montant A, il est envisagé de les appliquer uniquement en l'absence de mécanisme obligatoire et contraignant de règlement des différends, ou lorsque les partenaires de convention sont expressément convenus que le nouveau mécanisme doit prévaloir sur tout mécanisme existant.

834. L'application de nouvelles règles de sécurité juridique en matière fiscale au-delà du Montant A au moyen de la convention multilatérale peut contribuer à faire en sorte que les processus mis en place soient cohérents avec ceux qui s’appliquent au Montant A. Une partie dédiée de la convention pourrait y être consacrée, et décrirait en détail les différentes étapes des processus de sécurité juridique au-delà du Montant A, notamment les mécanismes de prévention des différends, la procédure amiable et le mécanisme obligatoire et contraignant de règlement des différends.

835. Il faudra éventuellement se demander comment cette partie de la convention devrait s’appliquer entre les juridictions selon qu’elles sont liées ou non par une convention fiscale bilatérale, ou en l'absence de convention fiscale bilatérale.

836. Pour lever les obstacles conventionnels et mettre en œuvre les quatre éléments évoqués dans la section précédente, la méthode employée doit garantir la coordination, la cohérence et la certitude, et pouvoir être rapidement appliquée. La meilleure façon d'y parvenir serait d'élaborer une nouvelle convention multilatérale.

837. Dans un premier temps, le Cadre inclusif a envisagé d’utiliser ‘l’Instrument multilatéral BEPS2 (ou de créer un autre instrument au fonctionnement similaire pour modifier les conventions fiscales existantes) afin de mettre en œuvre le Pilier 1, mais a décidé en définitive que ce ne serait pas un instrument approprié : il ne serait pas toujours possible d'appliquer des mesures devant faire partie d’un cadre multilatéral (p. ex. des mécanismes multilatéraux de règlement des différends), ou d’introduire des modifications ou des mesures entre des juridictions qui ne sont pas liées par une convention fiscale bilatérale (p. ex. les processus de prévention et de règlement des différends portant sur le Montant A).

838. Étant donné que les conventions bilatérales resteraient en vigueur et continueraient de régir les questions de fiscalité internationale non liées au Montant A, une nouvelle convention multilatérale devrait coexister avec le réseau existant de conventions fiscales et, s'agissant des sections consacrées au calcul du Montant A et à l'élimination de la double imposition, remplacerait et prévaudrait sur ces conventions bilatérales pour l’imposition des EMN couvertes. Par ailleurs, des travaux complémentaires devront porter sur la relation entre la convention multilatérale et les conventions fiscales bilatérales conclues après son entrée en vigueur (voir le paragraphe 852).

839. Aussi, le fonctionnement de la nouvelle convention multilatérale serait différent de celui de l’Instrument multilatéral BEPS , qui a été utilisé pour modifier directement les dispositions existantes dans les conventions fiscales. La nouvelle convention multilatérale offrirait un cadre multilatéral facilitant la mise en œuvre coordonnée et efficace que présuppose l’existence de multiples juridictions et, s'agissant des sections consacrées au calcul du Montant A et à l'élimination de la double imposition, se substituerait à toutes les conventions fiscales bilatérales en vigueur.

840. Comme mentionné précédemment, en ce qui concerne ces sections, il n’y aurait pas d’obstacle conventionnel à supprimer entre les juridictions qui ne sont pas actuellement liées par une convention, lesquelles pourraient s'appuyer sur leur droit interne pour appliquer et administrer le Montant A. La section de la convention multilatérale qui mettrait en œuvre les caractéristiques du nouveau processus administratif simplifié et les processus relatifs à la sécurité juridique en matière fiscale s’appliquerait à toutes les Parties et comblerait les lacunes en matière de couverture. Cette section renverrait tous les Signataires aux règles qui régissent l'application et le fonctionnement du Montant A.

841. L'élaboration d'une convention multilatérale constitue la solution idéale pour établir une obligation juridique d'appliquer et d'administrer le Montant A de la même manière, et mieux coordonner et accélérer l'application du droit public international. Toutefois, certaines juridictions pourraient devoir examiner l’opportunité, à titre exceptionnel, de procéder à toutes les modifications conventionnelles nécessaires en amendant leurs conventions bilatérales existantes et leur droit interne dans un délai raisonnable. Avec cette approche, une juridiction pourrait s'entendre avec ses partenaires conventionnels en vue d'amender ses conventions existantes au niveau bilatéral afin de supprimer les obstacles au calcul du Montant A et à l'élimination de la double imposition, puis recourir à son droit interne pour appliquer et administrer le Montant A. Toutefois, autoriser une juridiction à se prévaloir d’une approche bilatérale imposerait une charge supplémentaire aux juridictions partenaires qui seraient tenues de mettre en œuvre les nouvelles règles sur une base à la fois bilatérale et multilatérale. Par ailleurs, la possibilité de mettre en œuvre le processus multilatéral de prévention des différends portant sur le Montant A autrement que par une convention multilatérale n’est pas avérée, compte tenu de la nécessité de coordonner les résultats entre de multiples juridictions.

842. Dans le cadre de ces travaux sur les modifications bilatérales possibles des conventions, il serait également possible de considérer l'élaboration d'un instrument distinct qui définirait les caractéristiques du nouveau processus d’administration simplifié et des processus connexes de sécurité juridique en matière fiscale.

843. Il faudra également mettre au point des orientations sur de nombreux aspects du Pilier 1 afin d'appuyer et de compléter le droit interne et les dispositions contenues dans les instruments de droit international public (par exemple, accords multilatéraux entre autorités compétentes, commentaires sur la convention multilatérale, instructions sur le calcul et l’application du Montant A, etc.).

844. Ces orientations, utiles à la fois aux administrations fiscales et aux contribuables, contiendront par exemple des règles détaillées pour le calcul de la base d’imposition au titre du Montant A, en matière de comptabilité financière, de segmentation et de traitement des pertes.

845. Elles pourraient être périodiquement révisées ou mises à jour. Certaines révisions ou mises à jour pourraient intervenir sans modifier le droit interne ou les conventions, alors que d'autres pourraient nécessiter de telles modifications. Ces révisions seraient basées sur les commentaires reçus et sur l’expérience acquise à la faveur de l'application pratique du Montant A.

846. Des travaux supplémentaires devront être menés pour déterminer les aspects qui pourraient être couverts par des instructions, par opposition à la convention multilatérale ou au droit interne.

847. Ainsi que les Contours de l’architecture l’indiquent, il est entendu que les membres du Cadre inclusif devront, aux termes de tout accord reposant sur un consensus, s’engager à mettre en œuvre cet accord et dans le même temps à retirer les mesures unilatérales correspondantes, et à ne pas en adopter de nouvelles à l’avenir3.

848. Les prochaines étapes de la mise en œuvre supposeront de travailler sur la convention multilatérale. Il s'agira de réfléchir à l'architecture de la convention et à son fonctionnement juridique. Il faudra également s’attacher à déterminer les éléments fondamentaux des règles de calcul du Montant A et d'élimination de la double imposition qui devront être intégrées dans la convention multilatérale afin d'assurer que tous les obstacles conventionnels seront supprimés.

849. Une fois les éléments fondamentaux des règles identifiés, le Cadre inclusif commencera à travailler sur la conception des dispositions qui seront incorporées dans la convention multilatérale.

850. En outre, une réflexion plus poussée devra être menée sur les différentes difficultés que pourrait poser l’élaboration de la convention multilatérale. Il s'agira notamment de concevoir les dispositions relatives à l’entrée en vigueur et à la prise d’effet pour éviter d’instaurer des règles parallèles et contradictoires sur la taxation des groupes d’EMN couverts et faire en sorte que la convention multilatérale ne commence à prendre effet qu’à partir du moment où une masse critique de juridictions l’aura pleinement mise en œuvre. Il faudra pour cela établir un calendrier de mise en œuvre et préciser la signification d’une « masse critique » de juridictions.

851. Pour garantir la cohérence avec le régime juridique établi par une convention multilatérale et éviter que les conventions fiscales bilatérales qui seront conclues après son entrée en vigueur n’érigent de nouveaux obstacles à l’exercice du nouveau droit d’imposition, il faudra également définir la relation entre la convention multilatérale et ces conventions bilatérales, en tenant compte des cadres juridiques qui pourraient interdire les clauses contraignantes pour les Parlements à l’avenir.

852. Les prochaines étapes qui se rattachent à la suppression des mesures unilatérales consisteront à définir ce qu’est une mesure unilatérale « correspondante » à supprimer, et à établir un cadre transitoire à cette fin. Comme mentionné précédemment, les membres du Cadre inclusif conviennent qu’un accord sur le Pilier 1 devrait comporter l’engagement à supprimer les mesures unilatérales correspondantes et à ne pas en adopter de nouvelles à l’avenir.

853. Enfin, la mise en œuvre du Pilier 1 sur la base d'un régime de protection est une question qui mérite d’être examinée et traitée plus avant par le Cadre inclusif.

Notes

← 1. Les dispositions conventionnelles relatives à l'élimination de la double imposition imposent à l'État de résidence l’obligation d'alléger l’impôt étranger. En général, ces dispositions n’empêcheraient pas une juridiction d’assumer des obligations supplémentaires en matière d'allégement de la double imposition, comme celles qui seraient requises au titre du Montant A.

← 2. Si l’on décide de recourir à l’Instrument multilatéral BEPS , celui-ci devrait être modifié (conformément à son article 33) ou complété par un protocole (conformément à son article 38). Une Partie à l’Instrument multilatéral BEPS ne serait pas automatiquement tenue par un amendement ou par un protocole portant modification de ses conventions fiscales tant qu’elle n’a pas ratifié cet amendement ou ce protocole. Pour mettre en œuvre le Pilier 1 au moyen de l’Instrument multilatéral BEPS , une juridiction qui n’est pas Signataire ou Partie à l’Instrument multilatéral BEPS devrait au préalable le devenir. Le recours à l’Instrument multilatéral BEPS , qui pour l’heure couvre uniquement les conventions qui ont été spécifiquement notifiées (les Conventions fiscales couvertes) par leurs Parties, pourrait également nécessiter de demander aux Parties d'étendre leur liste de conventions couvertes. Amender l’Instrument multilatéral BEPS ou élaborer un protocole générerait un niveau de complexité supplémentaire et supposerait une procédure de mise en correspondance, car les modifications apportées aux conventions fiscales bilatérales n’auraient d’effet que si les juridictions étaient Parties à la fois à l’Instrument multilatéral BEPS et à l'amendement ou au protocole.

← 3. Voir les paragraphes 9 et 89 des Contours de l'architecture. Comme l’explique le paragraphe 90 des Contours de l'architecture, on tiendra également compte des répercussions de la proposition d'établir un régime de protection sur les mesures unilatérales.

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