copy the linklink copied!Chapitre 2. Utilisation des indicateurs territoriaux pour soutenir le développement régional

Ce chapitre analyse le développement régional dans l’ensemble des régions tunisiennes. Il explique en quoi les indicateurs territoriaux peuvent éclairer et faciliter l’élaboration de politiques de développement régional. Il examine les disparités régionales intérieures en Tunisie et les différences entre les régions tunisiennes et celles de l’OCDE. Il met en exergue les écarts importants en termes de développement socio-économique entre les régions côtières de Tunisie et les régions intérieures plus isolées. Sur la base des données disponibles et des différents indicateurs territoriaux, cette analyse met en lumière quatre facteurs clés d’une croissance géographiquement plus inclusive en Tunisie, à savoir le capital humain, le développement du secteur privé et la création d’emplois, l’urbanisation ainsi que l’accessibilité des régions éloignées.

    

Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.

Dans la plupart des pays de l’OCDE, les politiques de développement régional ont évolué vers des approches fondées sur la complémentarité entre les territoires et la cohérence des secteurs, ainsi que la mobilisation de tous les échelons du gouvernement pour répondre aux attentes des citoyens. Le développement régional qui tient compte de l’organisation décentralisée des compétences mais également des caractéristiques géographiques, économiques et sociales des territoires est un défi à relever par tous les pays membres et non-membres de l’OCDE tels que la Tunisie.

La collecte et l’analyse précises et régulières des données forment une base fondamentale pour l’élaboration de politiques régionales. Les indicateurs territoriaux sont indispensables à la mise en place de politiques régionales dans la mesure où ils permettent une comparaison avec les régions d’autres pays à économie similaire, facilitent l’évaluation de l’efficacité des politiques publiques et permettent d’en suivre la progression au fil du temps. Les indicateurs territoriaux sont surtout nécessaires pour identifier les atouts et défis spécifiques à chaque région. Par conséquent, les indicateurs territoriaux constituent une part importante des politiques de développement régional modernes fondées sur une approche localisée.

En Tunisie, les indicateurs territoriaux révèlent que la géographie économique du pays se caractérise par des écarts importants entre les régions côtières et intérieures. En comparaison des régions côtières plus dynamiques, les régions intérieures de Tunisie sont relativement pauvres et accusent un retard économique. S'il existe une multitude de raisons qui expliquent l’écart économique régional entre les zones côtières et intérieures du pays, les facteurs tels que l’éducation, l’accessibilité ou la structure sectorielle des économies régionales jouent tous un rôle important.

Les régions côtières disposent d’une meilleure infrastructure de transport que les régions intérieures isolées, et donc un meilleur accès aux marchés. Elles abritent et ont tendance à attirer une population active plus qualifiée. L’économie des régions côtières est dominée par les entreprises plus dynamiques de secteurs axés sur l’exportation, les économies des régions intérieures se composent principalement de secteurs non-exportatrice protégés (OCDE, 2018[1]). De ce fait, les divergences régionales en termes de productivité, de chômage ou de niveaux de revenu sont importantes entre les zones côtières et intérieures.

Dans le cadre de son processus de décentralisation, le gouvernement tunisien réexamine également ses politiques régionales. La nouvelle Constitution adoptée en 2014 définit le développement régional comme un objectif gouvernemental primordial. En raison des disparités régionales importantes dans le pays et des conséquences sociales et économiques d’un développement déséquilibré, la nouvelle constitution vise à donner aux autorités locales les moyens de relever les défis du développement infranational.

Ce chapitre présente et analyse les tendances de développement régional en Tunisie. Il compare les régions tunisiennes à celles des pays de l’OCDE, et identifie certains des principaux obstacles à un développement régional durable et équitable en Tunisie. Enfin, ce chapitre met en relief la nécessité d’opter pour une nouvelle approche du développement régional qui tienne compte des différences régionales et des caractéristiques propres à chaque région afin d’opérer une réduction durable des disparités régionales, un objectif inclus dans le Plan national de développement stratégique à l’horizon 2016-2020 (MDICI, 2015) et la nouvelle loi sur les investissements (2016).

copy the linklink copied!La dichotomie intérieure/côtière : disparités régionales en Tunisie.

Les disparités régionales sont un défi politique majeur en Tunisie depuis la révolution du 14 janvier 2011 (OCDE, 2017). Au cours des dernières décennies, le développement économique en Tunisie est resté déséquilibré et n’a fait qu’accentuer les écarts déjà importants entre les zones côtières et l’intérieur du pays. Cette croissance régionale déséquilibrée empêche un développement prospère en Tunisie. En effet, les disparités économiques régionales conséquentes constituent un obstacle à une croissance durable en Tunisie (Banque mondiale, 2014[2]).

Sur l’ensemble du territoire tunisien, les régions côtières sont plus développées que les régions intérieures du sud. La division entre les régions côtières et intérieures de Tunisie ne se limite pas à une question de moyens économiques, mais implique également des différences en termes de bien-être et de démographie. L’Indice de développement régional pluridimensionnel élaboré par le gouvernement tunisien met en relief cette division à l’échelle des gouvernorats (régions TL3) (graphique 2.1)1. Ce score composite comprend quatre piliers : (i) conditions de vie, (ii) capital humain, (iii) indicateurs sociaux et démographiques et (iv) indicateurs du marché du travail2.

Les cinq régions les plus développées sont des zones côtières tandis que les cinq régions les moins développées font partie du territoire intérieur tunisien. L’Indice de développement régional est compris entre zéro et un. Les valeurs supérieures indiquent des niveaux supérieurs de développement économique et socio-économique (cf. encadré 2.2 pour de plus amples explications). Si le score moyen de l’Indice de développement régional en Tunisie est d’environ 0,47, il varie néanmoins entre 0,23 et 0,76. Le score moyen des régions côtières est de 0,6. En revanche, le score moyen des régions intérieures ne s’élève qu’à 0,33, ce qui indique que le niveau de développement des régions intérieures est, selon l’indice, nettement inférieur à celui des régions côtières. Les deux gouvernorats enregistrant le meilleur score de développement, Tunis et Ariana, appartiennent tous deux à la grande région du Grand Tunis (TL2). Selon l’Indice de développement régional, Kasserine et Jendouba sont les régions les moins développées des 24 régions de Tunisie. La classification régionale du territoire tunisien dresse une représentation similaire des disparités régionales. Si l’IDR moyen s’élève à 0,53 dans les régions urbaines, il n’est que d’environ 0,38 dans les régions intermédiaires.

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Graphique 2.1. Indice de développement régional en Tunisie, 2015
Distinction entre les régions côtières et les régions de l’intérieur du pays
Graphique 2.1. Indice de développement régional en Tunisie, 2015

Note : La catégorie côtière comprend tous les gouvernorats côtiers ainsi que le Grand Tunis.

Source : Données fournies par le Ministère tunisien du Développement, de l'investissement et de la coopération internationale (MDICI).

La localisation de l’activité économique en Tunisie correspond au contraste marqué des indices de développement entre les régions côtières et les régions intérieures. Près de 92 % des entreprises industrielles sont situées à moins d’une heure de transport des trois principales grandes villes de Tunisie (Tunis, Sfax et Sousse). Cette concentration d’entreprises est considérablement plus importante que la concentration de population. En effet, cette zone n’abrite que 56 % de la population du pays (ECFR, 2017[3]).

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Encadré 2.2. Mesure du développement régional en Tunisie

L’Indice de développement régional (IDR) (Graphique 2.2), produit par le Ministère tunisien du développement, de l’investissement et de la coopération internationale (MDICI), est une mesure composite du développement régional calculée pour chacun des 24 gouvernorats tunisiens. Il est compris entre 0 et 1. Les valeurs supérieures indiquent des niveaux supérieurs de développement. L’IDR est utilisé par le gouvernement pour la formulation du plan d’investissement du pays et pour répartir le budget auprès des autorités locales. L’IDR est un indice composite qui comprend quatre piliers : i) conditions de vie, ii) capital humain, iii) indicateurs sociaux et démographiques, iv) indicateurs économiques pour le marché du travail.

L’IDR ne rend pas compte des composantes séparément en soulignant la valeur composite. En outre, la méthodologie de construction de l’indice (par exemple, méthode d’agrégation, pondérations, définition des indicateurs) n’est pas publiée et reste donc difficile à reproduire. Le recours à un ensemble d'indicateurs ou à un tableau de bord doit être appuyé par plusieurs institutions du pays (par exemple, le Ministère des finances, l’INS, etc.).

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Graphique 2.2. Indice de développement régional de Tunisie
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Source : Données fournies par le Ministère tunisien du Développement, de l'investissement et de la coopération internationale (MDICI).

Les centres urbains côtiers aux environs de Tunis, Sfax et Sousse sont le moteur économique de la Tunisie et génèrent environ 85 % du PIB tunisien (Banque mondiale, 2014[2]). Cette forte concentration géographique de l’activité économique en Tunisie se reflète dans les divergences spatiales au regard des variables économiques (par exemple les taux de revenu ou de chômage) et socio-économiques (accès aux services).

Niveaux de vie dans les régions tunisiennes : pauvreté et inégalité

En Tunisie, la croissance économique a permis d’élever les niveaux de vie. Une croissance annuelle moyenne du PIB supérieure à 3,5 % a donné lieu à une atténuation conséquente de la pauvreté en Tunisie entre 2000 et 2015. Malgré les améliorations générales des niveaux de vie, la pauvreté et l’inégalité restent source d'inquiétude politique sur l’ensemble du territoire tunisien. Plus particulièrement, les niveaux de vie restent grandement variables d’une région à l’autre.

Les niveaux de vie se sont améliorés dans toutes les grandes régions tunisiennes depuis 2000. Selon les données d’une enquête menée auprès des ménages, entre 2000 et 2015, la part de tunisiens vivant dans la pauvreté a baissé de 40 % (graphique 2.3). En 2000, un tiers de la population tunisienne vivait au-dessous du seuil de pauvreté national. En 2015, l’augmentation des niveaux de vie a eu pour effet de ramener ce taux de pauvreté à 15 % de la population nationale. La baisse la plus importante de la pauvreté a été enregistrée dans les régions Grand Tunis et Nord-Est, où le taux de pauvreté a chuté de 61 % et 51 %, respectivement. La réduction de la pauvreté entre 2000 et 2015 s’est révélée la plus faible dans la région Nord-Ouest, avec une baisse de 14 %. D’autres mesures de la pauvreté, telles que les taux de pauvreté de la Banque mondiale fondés sur l’indice de 1,90 $ (seuil de pauvreté international) ou de 3,20 $ (seuil de pauvreté dans les pays à revenu intermédiaire inférieur) par habitant, confirment la diminution conséquente de la pauvreté en Tunisie depuis 2000. La chute des taux de pauvreté régionale coïncidait avec une vague de croissance économique élevée en Tunisie. Le maintien d’une croissance de seulement 2 % par an depuis 2012 ne permettra probablement pas d’autres réductions considérables des taux de pauvreté. La création d’emplois est le moyen le plus efficace d’atténuer la pauvreté. Dès lors, une croissance économique avec un faible niveau de création d’emplois risque de freiner davantage l’amélioration des niveaux de vie.

Malgré les améliorations générales des niveaux de vie, les taux de pauvreté restent largement variables et vont de 5 % à 30 % (graphique 2.4). Dans la région du Grand Tunis, seulement 5 % de la population est pauvre, selon la définition de l’INS, et représente le taux de pauvreté le plus bas des régions TL2 de Tunisie. Les taux de pauvreté des régions Nord-Ouest (28 %) et Centre-Ouest (31 %) restent environ 6 fois plus élevés que celui de Grand Tunis. Ces taux de pauvreté, calculés par l’INS, reposent sur les besoins individuels élémentaires en termes d’apport énergétique nutritionnel3. En Tunisie, il existe également des statistiques territoriales pour mesurer la pauvreté extrême, qui correspond à un niveau de vie chutant au-dessous d’un niveau de subsistance susceptible de mettre en péril les besoins alimentaires minimum des ménages4.

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Graphique 2.3. Baisse des taux de pauvreté, 2000-15
Graphique 2.3. Baisse des taux de pauvreté, 2000-15

Source : Données fournies par INS et calculs effectués par l’auteur.

La pauvreté extrême est quatre fois plus répandue dans les régions les plus pauvres que dans les régions les plus prospères de Tunisie (graphique 2.4). Les divergences régionales de niveau de vie se démarquent également en comparaison des taux de pauvreté extrême. Dans la région intérieure du Centre-Ouest, le taux de pauvreté extrême est supérieur à 8 %, en contraste marqué avec Grand Tunis où la pauvreté extrême ne touche que 0,3 % de la population. En moyenne, les taux de pauvreté total et de pauvreté extrême sont considérablement plus faibles dans les régions de l’est (côtières) que dans les régions de l’ouest (intérieures). Toutefois, la pauvreté demeure un défi socio-économique important dans diverses parties de Tunisie, comme par exemple dans la région Nord-Ouest où près de 28 % de la population est pauvre.

La réduction généralisée de la pauvreté et les améliorations des niveaux de vie trouvent également un écho en termes d'inégalité, comme le mesure l’indice de Gini de consommation des ménages, dans toutes les régions de Tunisie. Depuis 2000, l’inégalité de consommation en Tunisie a chuté de plus de 20 % (graphique 2.5). La convergence de consommation des ménages la plus importante a été observée dans la région Sud-Ouest, où le niveau d’inégalité a baissé de près de 30 %, ce qui coïncide également avec une réduction de la pauvreté de plus de 54 % dans cette région. En moyenne, les inégalités sont plus marquées dans les régions économiquement avancées telles que le Grand Tunis et le Centre-Est. Dans ces cas, les hauts niveaux d’inégalité sont assortis d’un haut niveau de revenu, comme l’indiquent les hauts niveaux de consommation moyenne. Les régions telles que Tunis enregistrent un niveau d’inégalité supérieur, pas nécessairement en raison du nombre important de ménages pauvres par rapport aux autres régions, mais parce qu’elles concentrent également des ménages à revenu élevé. Par conséquent, cette inégalité peut, par essence, découler d’un développement économique supérieur (comme le suggère la courbe de Kuznets).

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Graphique 2.4. Différences régionales des taux de pauvreté, 2015
Grandes régions (TL2)
Graphique 2.4. Différences régionales des taux de pauvreté, 2015

Note : Taux de pauvreté des ménages par région.

Source : Données fournies par INS.

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Graphique 2.5. Indice de Gini des inégalités de la consommation des ménages dans les régions tunisiennes
Régions TL2, 2000-15
Graphique 2.5. Indice de Gini des inégalités de la consommation des ménages dans les régions tunisiennes

Note : L'indice de Gini est calculé pour les niveaux de consommation des ménages, à l'exclusion des achats de biens durables et des investissements dans les dépenses totales (tels que meubles, réfrigérateurs, maisons et voitures) et des dépenses extraordinaires telles que les mariages et les funérailles.

Source : Données fournies et calculs effectués par INS et OCDE.

L’inégalité de revenu dans les régions tunisiennes varie moins en termes géographiques que dans les régions des pays de l’OCDE (graphique 2.6). Le niveau d’inégalité nationale de la consommation des ménages marqué par un coefficient de Gini de 0,31 signifie que l’inégalité en Tunisie est inférieure de plus de 50 % à celle des pays de l’OCDE. En comparaison d’une grande partie des pays de l’OCDE, la difficulté pour la Tunisie n’est pas d’atténuer les inégalités interpersonnelles, qui sont dans l’ensemble inférieures à la moyenne de l’OCDE, mais de relever le niveau de développement et les niveaux de vie. De plus, la réduction des disparités entre les différentes régions du pays, moyennant un développement renforcé des régions les plus en retard, doit être la priorité des responsables politiques.

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Graphique 2.6. Indice de Gini du revenu disponible dans les régions de l'OCDE et de la Tunisie
Grandes regions (TL2), 2014
Graphique 2.6. Indice de Gini du revenu disponible dans les régions de l'OCDE et de la Tunisie

Note : L'indice de Gini au sein d'une région est une mesure de l'inégalité au sein des régions d'un pays donné. L'indice est un nombre variant de 0 à 1, où 0 signifie l'égalité parfaite.

Source : OCDE (2018[4])Statistiques régionales de l’OCDE (base de données)https://doi.org/10.1787/region-data-fr.

Estimation du produit intérieur brut à l’échelle régionale

Le manque d’informations statistiques concernant la production économique à l’échelle infranationale en Tunisie constitue un obstacle à l’amélioration de l’efficacité des politiques de développement régional. Une mesure systémique et régulière du PIB et du PIB par habitant dans l’ensemble des régions tunisiennes n’a pas encore été réalisée. Récemment, dans le cadre d’un projet de jumelage financé par l’Union européenne en partenariat avec l’ISTAT et l’INSEE, l’INS a réalisé un exercice d’estimation du PIB à l’échelle régionale5. Actuellement, ces données ne sont pas accessibles au public. En l’absence de données concernant le PIB, des méthodes non-conventionnelles et innovantes permettront de surmonter ces limitations afin de se faire une idée de la répartition spatiale de l’activité économique en Tunisie.

Selon des études récentes, il a été observé que l’éclairage nocturne fournit une variable adaptée pour diverses variables économiques telles que l’urbanisation ou la densité de population. Il a surtout été démontré qu’il produisait une bonne estimation du niveau de développement économique ainsi que de la croissance économique au fil du temps (Henderson, Storeygard et Weil, 2012[5]). L’observation de l’éclairage nocturne peut être une autre source de données, en particulier dans la mesure où les gouvernements recueillent des données économiques seulement occasionnellement ou réduisent la collecte de données pour des raisons financières.

Les données d’éclairage nocturne peuvent constituer une solution à court terme pour surmonter le manque de disponibilité des formes classiques de données et des statistiques officielles concernant le PIB fondées sur les systèmes des comptes nationaux (Banque mondiale, 2017[6]). Dans de nombreux pays, les informations portant sur les mesures standard du PIB ne sont pas disponibles, ou le sont de manière occasionnelle, au-delà des moyennes nationales. À l’instar de la Tunisie, les données infranationales concernant les régions ou les villes se font parfois rares. Pourtant, les différences nationales d’activité économique peuvent être considérables. Le fait que les données d’éclairage nocturne soient systématiquement collectées et régulièrement calculées pour le monde entier suggère qu’elles constituent une alternative viable pour mesurer l’activité économique locale.

Étant donné le manque de données infranationales concernant le PIB, ce rapport utilise des données d’éclairage nocturne obtenues par satellite pour estimer les différences d’activité économique entre les différentes régions tunisiennes6. Un certain nombre d’études ont utilisé la variation nationale d’éclairage nocturne pour évaluer les différences de développement économique entre les différentes régions d'un même pays (Michalopoulos et Papaioannou, 2013[7])7. Les données de luminosité sont codées sous forme de nombres entiers compris entre 0 et 63, les nombres entiers les plus élevés indiquant une luminosité annuelle moyenne supérieure.

L’intensité de l’éclairage nocturne en Tunisie dénote une représentation claire de la concentration géographique en Tunisie. L’activité économique nocturne est majoritairement concentrée dans quelques centres de population (graphique 2.7). L’intensité lumineuse est la plus importante aux environs de Tunis, Sfax, Monastir et Gabès. En revanche, peu de sites dans les régions intérieures affichent une intensité lumineuse nocturne notable. Ces différences spatiales fournissent seulement une représentation approximative des différences nationales en matière d’activité économique. Les facteurs tels que la densité de population sont d’importants moteurs d'intensité lumineuse nocturne et peuvent donc expliquer une partie des configurations observées. Néanmoins, ces données d’éclairage nocturne permettent de calculer une estimation des niveaux infranationaux de PIB par habitant.

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Graphique 2.7. La Tunisie de nuit - intensité lumineuse nocturne dans les régions TL3
Graphique 2.7. La Tunisie de nuit - intensité lumineuse nocturne dans les régions TL3

Note : Délimitation de l’OCDE basée sur les données NOAA. Les observations de nuit sont à partir de 2013.

Source : Traitement d'images et de données par le Centre national de données géophysiques de la NOAA. Données DMSP collectées par l'US Air Force Weather Agency.

L’estimation du PIB infranational fondée sur des données satellite suggère que les niveaux de PIB par habitant en 2017 étaient compris entre environ 6 800 dollars US (exprimés en dollars US 2010) à Manouba et moins de 3 300 dollars US à Tozeur (graphique 2.8)8. Venant confirmer l’impression issue des données de luminosité nocturne (graphique 2.7), les écarts interrégionaux apparaissent importants entre les centres économiques et les zones côtières d’un côté, et les régions intérieures de l’autre. À la base de ces différences régionales de PIB par habitant se trouve la concentration spatiale, déjà mentionnée, d’entreprises, d’usines et de personnes dans les zones côtières.

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Encadré 2.3. Estimation du PIB à partir de l’éclairage nocturne

Les données du PIB par kilomètre carré concernent l’année 2010. Ces données sont fournies par la Banque mondiale. Le calcul du PIB par habitant 2017 utilise les données nationales du PIB de la Tunisie en 2017 et part du principe que la répartition du PIB dans l’ensemble des régions en 2017 est la même qu’en 2010. Par conséquent, les niveaux de PIB par habitant pour les régions TL3 sont calculés pour 2017.

La région la plus riche de Tunisie enregistre un niveau de PIB par habitant plus de deux fois plus important que celui de la région la plus pauvre de Tunisie. À Manouba et Tunis, le PIB par habitant apparaît plus de 38 % et 18 % supérieur à la moyenne régionale estimée à 4 200 dollars US (graphique 2.8). Selon cette estimation, Monastir, Ariana et Tozeur enregistrent tous des niveaux de PIB par habitant 20 % inférieurs à la moyenne régionale de Tunisie. Au regard de ces estimations du PIB par habitant, les régions les plus riches de Jendouba, Tunis, Manouba, Sfax et Gabès seraient considérées comme des économies à revenu intermédiaire supérieur. Selon la classification des niveaux de développement par la Banque mondiale, les régions les plus pauvres constitueraient des économies à revenu intermédiaire inférieur9. En comparaison des pays de l’OCDE, la proportion de PIB par habitant dans la région TL3 la plus riche et la plus pauvre est relativement faible. Si, dans les pays de l’OCDE, le PIB par habitant de la région la plus prospère équivaut à environ 3,5 fois le PIB par habitant de la région la moins prospère, cette proportion s’élève toutefois à 2,1 en Tunisie (OCDE, 2018[8]). L’estimation du PIB par habitant suggère que le niveau de vie et la prospérité économique varient considérablement sur l’ensemble du territoire tunisien10.

Satisfaction de vivre

Les niveaux de vie mais également la satisfaction de vivre varient largement entre les résidents des grandes villes et ceux des zones rurales de Tunisie. Sur les 23 pays étudiés, dont 13 sont des pays membres de l’OCDE, la Tunisie enregistre l’écart de bonheur le plus important entre les grandes villes et les zones rurales (graphique 2.9). En moyenne, les tunisiens questionnés par Gallup ont classé leur niveau de satisfaction de vivre à 4,3 sur une échelle de 10, selon laquelle les scores supérieurs à 7 indiquent que les personnes s’épanouissent et les scores inférieurs à 4 indiquent que les personnes se trouvent en difficulté. Si le niveau moyen de satisfaction de vivre est considérablement plus faible en Tunisie que dans les 22 autres pays étudiés, il témoigne également d’une importante variation géographique.

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Graphique 2.8. PIB par habitant estimé dans les petites régions (TL3) tunisiennes en 2017
Graphique 2.8. PIB par habitant estimé dans les petites régions (TL3) tunisiennes en 2017

Note : Les données estimées concernent l’année 2017 et sont exprimées en dollars US de 2010. Cf. encadré 2.3 pour obtenir plus de précisions.

Sources : Traitement GIS par la Banque mondiale DECRG, Washington, DC, extrapolation UNEP/GRID-Geneva ; (Banque Mondiale, 2016[9]) ; et calculs de l’auteur.

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Graphique 2.9. Satisfaction à l'égard de la vie selon le degré d'urbanisation, 2016/17
Graphique 2.9. Satisfaction à l'égard de la vie selon le degré d'urbanisation, 2016/17

Note : La figure présente la satisfaction à l'égard de la vie selon le degré d'urbanisation dans 23 pays, dont 13 pays de l'OCDE. La satisfaction à l'égard de la vie varie de 0 à 10, les scores les plus élevés indiquant une plus grande satisfaction à l'égard de la vie. Gallup mesure la satisfaction à l'égard de la vie en demandant aux personnes interrogées de situer l'état de leur vie sur une échelle, où 0 indique la pire vie possible et 10 la meilleure.

Source : (Gallup, 2019[10]).

Les données concernant la Tunisie suggèrent un écart géographique marqué entre les niveaux de satisfaction de vivre des grandes villes, des villes moyennes et des banlieues et celui des zones rurales. Le score moyen de satisfaction de vivre dans les grandes villes est de 4,6, tandis qu’il s’élève à 4,0 dans les villes moyennes et banlieues et n’atteint que 3,69 dans les zones rurales. Cette divergence entre les grandes villes d'un côté et les zones rurales de l’autre, qui correspond à une différence de 28 %, est plus importante que dans tous les autres pays pris en compte dans le graphique 2.9. En moyenne, le niveau de satisfaction de vivre est 6 % plus élevé dans les grandes villes que dans les zones rurales des 23 pays étudiés. Seule la Bulgarie enregistre une différence relative similaire entre les grandes villes et les zones rurales. Dans plusieurs pays, les résidents de zones rurales paraissent davantage satisfaits de leurs conditions de vie que les résidents des grandes villes. Par exemple, le niveau moyen de satisfaction de vivre est plus important dans les zones rurales en Argentine et au Brésil.

Les données relatives aux disparités infranationales, à la fois en termes de facteurs matériels tels que la pauvreté ou les opportunités économiques qu’en termes d’aspects non-matériels sous la forme d’un niveau de satisfaction de vivre, soulignent la nécessité d’une évaluation du développement régional en Tunisie. La section suivante examine en profondeur le développement régional en Tunisie et illustre la façon dont les statistiques territoriales peuvent appuyer et éclairer l’élaboration de politiques de développement régional. Elle aborde et analyse plusieurs domaines politiques particulièrement importants pour faire progresser le développement économique et améliorer la croissance inclusive en Tunisie.

copy the linklink copied!Comment promouvoir le développement économique en Tunisie ?

Le choix et la conception des politiques régionales de promotion de la croissance sont fortement dépendants du contexte. L’efficacité d'une politique donnée varie en fonction des caractéristiques régionales et de l’environnement macro-économique général. Néanmoins, les données provenant des pays de l’OCDE ont engendré un certain nombre de facteurs qui semblent indispensables au développement régional (OCDE, 2016[11] ; OCDE, 2014[12]) : capital humain et innovation, accessibilité et infrastructures, esprit d’entreprise et dynamique commerciale ainsi qu’urbanisation et le supplément de productivité qu’elle entraîne. Les grandes villes tendent à se montrer plus productives en raison des avantages de l’agglomération suscités par, entre autres facteurs, les faibles coûts de transport et les marchés locaux plus importants, les marchés du travail plus consistants qui permettent une plus grande spécialisation et réduisent les coûts de recherche, et les débordements de connaissance (Rosenthal et Strange, 2003[13]), mettant ainsi en avant l’avantage potentiel qui peut être généré par une urbanisation bien gérée en Tunisie.

Dans les pays de l’OCDE, le développement régional est devenu une importante priorité politique. Forts de plusieurs décennies d’expérience, les pays de l’OCDE ont acquis une expérience et une expertise conséquentes en matière de stratégies efficaces pour relever les défis du développement régional. Si la situation tunisienne peut se révéler différente de celle de nombreux pays de l’OCDE, elle peut néanmoins tirer profit de ces éclairages sur la politique de développement régional. La section suivante fournit un aperçu de ces éclairages provenant des pays de l’OCDE. Les sections ultérieures analysent le capital humain, l’accessibilité, l’esprit d’entreprise et l’urbanisation dans les régions tunisiennes, en les comparant à ceux des régions des pays de l’OCDE chaque fois que possible, puis évoquent les actions potentielles pour concrétiser une croissance économique durable dans toutes les régions de Tunisie. Au regard du manque de données et d’informations existantes relatives au rôle économique des grandes villes en Tunisie, l’impact précis des grandes villes sur l’économie tunisienne s’étend au-delà du cadre de ce rapport.

Politiques de développement régional dans l’OCDE

Depuis les prémices de la politique régionale mise en place dans les pays de l’OCDE entre les années 1950 et les années 1990, les politiques de développement régional se composaient principalement d’une aide financière et de subventions sectorielles destinées aux industries en souffrance ou sous-développées dans les régions en phase de ralentissement économique (OCDE, 2010[14]). Si ces politiques pouvaient temporairement atténuer les divergences de niveaux de vie et d’emploi à l’échelle régionale, elles avaient néanmoins tendance à se montrer moins efficaces pour générer un impact pérenne sur la capacité des régions bénéficiaires à produire une croissance économique durable. Par conséquent, les pays de l’OCDE ont largement adopté une approche plus personnalisée des politiques de développement régional qui donne la priorité et mobilise les ressources de chaque région.

Cette nouvelle approche localisée du développement régional vise à améliorer la compétitivité des régions en exploitant leur potentiel sous-utilisé. Ces politiques localisées tiennent compte des principaux facteurs de croissance régionale et mettent en avant l’importance d’une coordination tant horizontale (dans les différents secteurs et domaines politiques) que verticale (à tous les échelons du gouvernement) (OCDE, 2018[15]). Cette coordination permet de garantir l’élaboration de politiques plus efficaces grâce à une meilleure cohérence et complémentarité entre les différents domaines politiques. Dans les pays de l’OCDE, certains des principaux facteurs de croissance économique dans l’ensemble des régions incluent l’éducation et le capital humain, les infrastructures publiques, les avantages de l’agglomération révélés via l’urbanisation, la qualité de la gouvernance locale et l’environnement commercial local (OCDE, 2012[16]).

Pour appliquer des politiques localisées, les données statistiques territoriales s'imposent comme un outil indispensable au développement régional. Elles permettent aux responsables politiques de déterminer les ressources, atouts et faiblesses existants des régions, et ainsi de souligner les priorités politiques. Dans les pays de l’OCDE, les politiques de développement régional ont adopté une approche intégrée et multisectorielle qui exploite les complémentarités entre les divers facteurs de stimulation de la croissance régionale. Les statistiques territoriales permettent de surveiller la progression et d’évaluer l’efficacité, par exemple, des politiques d’éducation ou de marché du travail, ainsi que leur impact sur l’emploi, les salaires, le niveau d’études ou les compétences des travailleurs.

Les autorités locales des municipalités et des régions jouent un rôle important dans le façonnage du développement régional et la promotion de la production de statistiques territoriales dans les pays de l’OCDE. De par leurs compétences et ressources (humaines et financières) dans le domaine de l’éducation, de l’action sociale, de la santé, de l’environnement, de la construction de logements et des infrastructures de transport, etc., elles jouent un rôle décisif dans le développement économique et social de leurs territoires. En Tunisie, la décentralisation confèrera de nouvelles responsabilités aux autorités infranationales. Pour mettre en application ces nouvelles compétences, les autorités infranationales devront disposer des ressources nécessaires, issues du gouvernement central. Pourtant, la création de revenus locaux, par la fiscalité et l’exploitation de services publics impliquant le paiement d’une redevance par les utilisateurs, est également importante et doit être favorisée (Amin-Smith, Phillips et Simpson, 2018[17]).

Une décentralisation bien pensée peut générer d’importantes améliorations et gains de rentabilité en matière de fourniture de services publics locaux, et peut également renforcer la gouvernance démocratique (OCDE, 2018[18]). Les données issues des pays de l’OCDE ont permis d’identifier les opportunités clés mais également les difficultés soulevées par les réformes de décentralisation (Encadré 2.1), qui peuvent éclairer le processus de décentralisation en Tunisie.

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Encadré 2.1. Le système de gouvernance du gouvernement infranational dans les pays de l’OCDE

Le paysage institutionnel de l’OCDE s’est métamorphosé au cours des 20 dernières années, en particulier depuis la crise provoquée par les processus de décentralisation et de recentralisation. La décentralisation s’accompagne d’un certain nombre d’avantages, mais doit être correctement conçue et mise en œuvre. Sur les 35 pays de l’OCDE : 9 sont des Etats fédéraux et 26 sont des autorités unitaires telles que la Tunisie. Ils comportaient 137 635 gouvernements infranationaux en 2015-2016 : (i) 133 007 entités municipales, (ii) 4 108 entités intermédiaires et (iii) 520 entités régionales ou d’État.

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Opportunités

Risques

Rentabilité et amélioration des services publics locaux

Plus de capacités pour les politiques localisées

Meilleure qualité de fourniture des services publics locaux

Coûts réduits

Mobilisation des ressources publiques locales

Mesures d’incitation pour les approches de développement local proactives

Mobilisation des avantages comparatifs des entreprises locales

Possibilité d’expérimentation

Des économies d’échelle Doublons/chevauchement de compétences

Manque de capacités humaines/techniques

Territoires sous mandat non financés

Apparition de disparités dans les juridictions

Augmentation de la concurrence

Gouvernance démocratique

Amélioration de la transparence et de la responsabilité

Participation accrue des citoyens

Meilleure représentation des besoins des citoyens

Politique locale et mauvaise gouvernance locale

Corruption

Structure de gouvernance plus complexe

Coûts de coordination plus élevés

Source : Extrait de OCDE (2018[18]), Maintaining the Momentum of Decentralisation in Ukraine, https://dx.doi.org/10.1787/9789264301436-en.

Chômage et éducation : le potentiel inexploité du capital humain

Le capital humain sous forme d’éducation et de compétences est un facteur clé de progrès économique et un facteur déterminant des différences de productivité entre les économies nationales et locales (Gennaioli et al., 2013[19]). Les efforts renforcés pour stimuler le niveau d’études, l’expérience professionnelle des jeunes et la formation professionnelle peuvent aider les travailleurs à acquérir les compétences dont ils ont besoin pour accroître leur productivité. Dans les régions tunisiennes, ces filières sont confrontées à des obstacles, notamment le manque de connexions entre l’enseignement supérieur et les besoins du secteur privé, ce qui donne lieu à un système d’enseignement supérieur non ciblé, et par conséquent à des taux de chômage élevés (cf. Section Éducation).

Chômage

Les niveaux de chômage élevés constituent l’une des principales entraves au développement économique dans les régions tunisiennes. Le chômage est non seulement élevé, mais il varie également considérablement d'un bout à l’autre du territoire tunisien. Tandis que moins de 9 % de la population en âge de travailler (âgée de 15 à 64 ans) dans les gouvernorats de Monastir et Sfax était sans emploi en 2018, le chômage touchait environ 29 % et 32 % de la population en âge de travailler à Gafsa et Tataouine, respectivement (graphique 2.10).

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Graphique 2.10. Taux de chômage dans les régions tunisiennes TL3, 2018
Graphique 2.10. Taux de chômage dans les régions tunisiennes TL3, 2018

Sources : Données fournies par INS et calculs effectués OCDE, 2018.

Seuls deux pays de l’OCDE, l’Italie et l’Espagne, enregistrent des différences de taux de chômage plus prononcées dans les grandes régions (TL2) que la Tunisie (OCDE, 2018[8]). Dans l’ensemble de l’OCDE, les disparités nationales entre le taux de chômage régional le plus élevé et le plus bas s’élèvent en moyenne à 6,4 points de pourcentage. En Tunisie, cet écart interrégional dépasse les 17 points de pourcentage. La région Sud-Ouest a enregistré le taux de chômage le plus élevé, à 26,1 %, ce qui la place parmi les 3 % des régions de l’OCDE les plus touchées par un chômage sévère.

Les niveaux extrêmement faibles d’emploi et d’opportunités d’emploi sont à l’image du manque de développement économique des régions tunisiennes. L’emploi dans les régions tunisiennes est largement inférieur aux niveaux d’emploi des régions de l’OCDE. En moyenne, la proportion de tunisiens actifs est inférieure de 16 points de pourcentage par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE. Si plus de 56 % de la population en âge de travailler dans les pays de l’OCDE est active, seulement 40 % des adultes en âge de travailler dans les régions tunisiennes sont actifs (graphique 2.11). Même dans la région du Grand Nord-Est, la région TL2 avec le taux d’emploi le plus élevé du pays (46 %), les opportunités d’emploi sont rares en comparaison des régions de l’OCDE mais également des régions de pays non-membres de l’OCDE, tels que la Russie, le Pérou, la Bulgarie ou la Croatie.

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Graphique 2.11. Différences régionales du taux d'emploi
Grandes régions (TL2), 2017 ou dernière année disponible
Graphique 2.11. Différences régionales du taux d'emploi

Note : Le taux d'emploi représente la part de la population âgée de 15 ans et plus et occupant un emploi. Données principalement de 2017, les exceptions sont TUN (2018), ISL, AUS, NZL, CAN, USA (tout 2016), RUS, CHL, ZAF, ISR, PER, MEX, KOR, JPN (tout 2014), BRA (2013), et COL (2012).

Sources : Données fournies par INS; OCDE (2018[20]), OECD Regional Statistics (database), https://doi.org/10.1787/region-data-en.

Le niveau élevé de chômage des jeunes compte parmi les difficultés les plus urgentes à résoudre par les régions tunisiennes. À l’échelle nationale, plus de 35 % des personnes âgées de 15 à 24 ans sont sans emploi, ce qui place la Tunisie en comparaison avec les pays de l’OCDE enregistrant les taux de chômage les plus élevés (graphique 2.12). Toutefois, toutes les régions ne sont pas touchées de la même manière. Les différences régionales en termes de chômage des jeunes sont relativement importantes par rapport à la moyenne de l’OCDE. La proportion de jeunes sans emploi varie de 20 % (Centre-Est) à 53 % (Sud-Ouest).

Le manque d’activité économique dans les régions isolées de Tunisie diminue considérablement les opportunités d’emploi dans ces zones du pays. Pourtant, l’emploi, et en particulier l’emploi des jeunes, est élevé dans les grandes villes et les centres urbains qui longent la côte. Par exemple, dans la région du Grand Tunis, les conditions de recherche d’emploi comptent parmi les plus difficiles du pays, avec 48,1 % des personnes âgées de 15 à 24 ans se trouvant sans emploi. En ce qui concerne le gouvernorat de Tunis, le chômage des jeunes est encore plus élevé et avoisine les 63 % chez les 15-19 ans, deuxième taux de chômage du pays sur les 24 gouvernorats.

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Graphique 2.12. Taux de chômage régional des jeunes, 2017 ou dernière année disponible
Grandes régions (TL2) dans les pays de l’OCDE et en Tunisie
Graphique 2.12. Taux de chômage régional des jeunes, 2017 ou dernière année disponible

Note : Cette figure représente les parts régionales du chômage parmi les 15 à 24 ans en Tunisie et dans les pays de l'OCDE.

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

La pénurie d’emploi des jeunes reflète l’insuffisance de développement régional en Tunisie et a des répercussions négatives sur l’employabilité future des jeunes. En effet, le chômage peut entraîner une sous-utilisation des compétences et empêche les jeunes adultes de renforcer leurs aptitudes via un apprentissage professionnel (OCDE, 2019[21]). Plusieurs facteurs empêchent l’élargissement de l’emploi formel dans les régions tunisiennes (OCDE, 2018[1]) : (i) la qualité du système éducatif, (ii) une incompatibilité entre les compétences requises par le marché du travail et les compétences acquises dans le cadre de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur, (iii) l’envergure du secteur informel et (iv) l’insuffisance de croissance et de création d’emplois par les entreprises privées. Le caractère informel de l’emploi, c’est-à-dire le travail en micro-entreprise ou l’absence de cotisation à la sécurité sociale, est plus important en Tunisie que dans les pays de l’OCDE (Banque mondiale, 2014[2]) et est associé à une compression des salaires (Lang et Dickens, 1985[22]). Selon l’enquête menée auprès des entreprises par la Banque mondiale, la qualité des compétences des travailleurs reste une contrainte majeure pour la capacité d’activité des entreprises en Tunisie (Banque mondiale, 2013[23]).

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Tableau 2.1. Chômage et flux migratoires dans les grandes régions (TL2) de Tunisie

Région

Taux de chômage (2015) (%)

Solde migratoire interne (2009-14)

Grand Tunis

16,9

+ 46 300

Nord-Est

8,8

+ 4 700

Centre-Est

9,9

+ 28 900

Sud-Est

26,6

-  200

Nord-Ouest

17,8

- 34 800

Centre-Ouest

18,7

- 39 500

Sud-Ouest

22,3

- 5 800

National

15,4

0

Source : Calcul de l’OCDE reposant sur les données fournies par INS.

Les opportunités économiques inégales poussent les tunisiens à migrer vers des régions économiquement plus prospères. Entre 2009 et 2014, les régions à faible taux de chômage ont attiré d’importants afflux nets positifs de résidents en provenance d’autres régions tunisiennes (tableau 2.1). Face au taux de chômage élevé des régions éloignées, les tunisiens cherchent des opportunités d’emploi dans les centres économiques du pays (graphique 2.13). Les conséquences potentielles pour les régions sont multiples. L’émigration des résidents, principalement jeunes, change la composition démographique de ces régions, où demeurent seuls les résidents plus âgés. En outre, l’émigration des diplômés appauvrit le capital humain des régions. Par conséquent, l’émigration pose de nouvelles difficultés dans les régions de Tunisie en raison du vieillissement de la population, de la perte de capital humain, des changements de viabilité de la fourniture de services et, potentiellement, des ajustements apportés à la structure de l’économie. Parallèlement, la mobilité régionale sous forme de migration interne peut donner lieu à un gain d’efficacité pour l’économie nationale dans son ensemble et peut permettre aux résidents qui se déplacent de jouir de meilleures conditions de vie.

Une meilleure mise en œuvre de la stratégie d’emploi nationale s’impose pour garantir un élargissement des opportunités d’emploi, en particulier pour les jeunes, dans les régions tunisiennes. Depuis 2017, le gouvernement a mis en place une nouvelle stratégie d’emploi nationale, qui vise à éliminer les obstacles qui persistent en termes d’emploi formel et qualifié sur l’ensemble du territoire tunisien. Cette stratégie a pour but de réduire les disparités et divergences régionales entre les différents groupes sociaux en stimulant l’esprit d’entreprise local auprès des jeunes moyennant un soutien financier et technique (Banque mondiale, 2014[2]). Pour être efficace, cette stratégie d’emploi doit être davantage centrée sur les régions, adopter une approche localisée et tenir compte des conditions régionales et ressources économiques spécifiques. De surcroît, elle doit être davantage axée sur le marché et renforcer la création d’emplois plus qualifiés.

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Graphique 2.13. Taux de migration interne nette dans les régions TL3 tunisiennes, 2004-14
Graphique 2.13. Taux de migration interne nette dans les régions TL3 tunisiennes, 2004-14

Note : Cette figure représente les taux de migration interne nette, c'est-à-dire les mouvements entre différentes régions de la Tunisie.

Sources : Données fournies par INS et calculs effectués par OCDE, 2018.

Éducation

Les disparités d’opportunités éducatives et de niveaux d’études affaiblissent encore davantage le développement économique des régions tunisiennes à la traîne. Les différences régionales de résultats scolaires sont plus importantes que dans la majorité des pays de l’OCDE (graphique 2.14). En comparaison avec les pays de l’OCDE et d’un certain nombre de pays non-membres, la proportion de main-d’œuvre possédant seulement un niveau d’enseignement primaire est relativement élevée et varie considérablement en fonction des régions tunisiennes. En comparaison des régions côtières, la population active des régions intérieures se compose majoritairement de travailleurs peu qualifiés. Par exemple, l’écart entre la part maximale (Nord-Ouest) et minimale (Nord-Est) de population régionale avec un niveau d’enseignement primaire dépasse les 16 points de pourcentage, par rapport à un écart régional moyen de 12 points de pourcentage dans les pays de l’OCDE.

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Graphique 2.14. Variation régionale du % de la population active n'ayant reçu que l'enseignement primaire, 2017
Population active de 15 ans et plus, grandes régions (TL2)
Graphique 2.14. Variation régionale du % de la population active n'ayant reçu que l'enseignement primaire, 2017

Source : (OCDE, 2018[24]).

L’illettrisme reste très répandu dans de nombreuses régions de Tunisie. Le niveau d’éducation relativement faible et se reflète dans les taux d’illettrisme régionaux (graphique 2.15). À l’échelle nationale, environ 20 % de la population en âge de travailler est illettrée. Ce chiffre varie considérablement sur l’ensemble du territoire. Dans plusieurs gouvernorats (TL3) des régions du Centre-Ouest et du Nord-Ouest, les taux d’illettrisme sont supérieurs à 30 %. En comparaison, l’illettrisme touche environ 10 % des adultes de la région du Grand Tunis. La part importante de travailleurs non qualifiés dans la population active des deux régions précitées est un frein à l’implantation d’entreprises spécialisées et fait obstacle à la croissance économique.

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Graphique 2.15. Taux d'analphabétisme dans les petites régions (TL3), 2014
Graphique 2.15. Taux d'analphabétisme dans les petites régions (TL3), 2014

Note : Régions TL3 regroupées par régions plus grandes (TL2) et classées par taux d'analphabétisme moyen de la région TL2 respective.

Source : Données fournies par l’INS, 2014.

Une forte concentration spatiale de travailleurs qualifiés exacerbe l’insuffisance de capital humain dans les régions intérieures. Les personnes possédant au moins un niveau d’enseignement secondaire constituent une part de la population en âge de travailler considérablement plus élevée dans les régions côtières que dans le sud et le centre isolés de Tunisie. Par exemple, deux-tiers des travailleurs de la région Nord-Est mais moins de la moitié des travailleurs de la région Nord-Ouest possèdent au moins un niveau d’enseignement secondaire (graphique 2.16). Il est indispensable de relever le niveau d’études et de fournir aux travailleurs un ensemble de compétences approprié pour permettre aux régions les plus pauvres de Tunisie de se développer durablement.

Les compétences fournies par le système éducatif ne correspondent pas aux compétences demandées par l’économie. Si le nombre de diplômés universitaires a fortement augmenté, il reste que l’économie se compose en grande partie d’entreprises et de secteurs à faible productivité qui recherchent principalement des types de compétences différents de celles acquises via l’enseignement et la formation professionnelle (EFP). En outre, la Tunisie fait face à une incompatibilité de disciplines dans la mesure où de nombreuses universités délivrent des diplômes spécialisés dans des domaines qui ne sont pas recherchés par le marché du travail. Aussi, on observe une incohérence structurelle qui exacerbe les taux de chômage dans l’ensemble des régions tunisiennes (Banque mondiale, 2014[2]). Un enseignement universitaire isolé ne saurait garantir un développement régional. Afin de contribuer au développement régional, les régions doivent également offrir suffisamment d’opportunités d’emploi aux diplômés universitaires qui leur permettent de mobiliser pleinement leurs compétences.

Le chômage des diplômés universitaires est répandu et plus élevé que dans la plupart des pays de l’OCDE. Les régions tunisiennes sont non seulement confrontées à une proportion relativement importante de travailleurs peu qualifiés, mais également à un phénomène de « surqualification », c’est-à-dire un nombre conséquent de personnes possédant un niveau d’enseignement supérieur qui ne trouvent pas d’emploi ou postulent à des emplois à moindres qualifications (Kupets, 2017[25]). Afin de diminuer ce chômage structurel, les responsables politiques nationaux et régionaux doivent mettre en place les conditions nécessaires à une transformation de l’économie pour sortir du domaine de la manufacture à faible valeur ajoutée, comme par exemple les travaux d’assemblage mécanique ou le textile, et s’orienter vers des secteurs et une activité économique à forte valeur ajoutée qui exigent une main-d’œuvre qualifiée, comme par exemple le développement de produits et les services. Enfin, il est important d’élaborer des politiques publiques qui stimulent l’éducation, encouragent les investissements et incitent à l’innovation.

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Graphique 2.16. Variation régionale du % de la population active ayant au moins un niveau d’enseignement secondaire
Grandes régions (TL2), 2017 ou dernière année disponible
Graphique 2.16. Variation régionale du % de la population active ayant au moins un niveau d’enseignement secondaire

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

Le rôle des entreprises du secteur privé, de l’esprit d’entreprise et de l’investissement dans le développement régional

Le développement du secteur privé est essentiel pour stimuler les économies régionales. La mise en place de conditions propices à l’activité commerciale est indispensable à l’élaboration de politiques de développement régional. En Tunisie, la priorité donnée aux micro-entreprises par le secteur privé et les faibles niveaux d'investissements privés freinent la progression économique des régions intérieures éloignées. Des données récentes provenant des pays de l’OCDE démontrent qu’il est essentiel d’encourager le développement des entreprises existantes et la création de nouvelles entreprises pour créer des emplois et innover à l’échelle locale (OCDE, 2017[26]). De même, une augmentation des investissements dans les régions en souffrance économique peut leur apporter les ressources nécessaires pour accroître leur croissance économique (OCDE, 2014[12]).

Esprit d’entreprise et développement du secteur privé

Dans les régions de l’OCDE, 11 % des entreprises en moyenne ont été créées au cours de l’année passée (OCDE, 2018[8]). La création de nouvelles entreprises et la fermeture d’entreprises existantes sont inévitables et constituent les composantes importantes d'une économie efficace. Les nouvelles entreprises répondent à un certain nombre d’objectifs importants (i) générer l’emploi, en (ii) stimuler la concurrence et (iii) favoriser l’innovation, tandis que le remplacement des entreprises en échec peut contribuer à une répartition plus rentable des ressources. Les nouvelles entreprises contribuent de manière disproportionnée au développement de l’emploi (Neumark, Wall et Zhang, 2011[27]). Les nouvelles idées, les processus de production et les technologies utilisés par les nouvelles entreprises génèrent des débordements d’innovation positifs et intensifient simultanément la pression concurrentielle exercée sur les entreprises existantes en faveur de l’innovation.

Les taux de création d’entreprises en Tunisie sont, en moyenne, relativement faibles en comparaison avec la plupart des pays de l’OCDE (graphique 2.17). En 2015, la part des nouvelles entreprises dans la population régionale d’entreprises était la plus élevée à Mahdia et Kasserine, avec 12 % et 10 %, respectivement. Les régions enregistrant les taux de création d’entreprises les plus bas étaient Tunis et Manouba, où 6 % et 7 % des entreprises ont été créées au cours de l’année passée. Ces différences illustrent les disparités régionales d’activité entrepreneuriale entre les régions. Pourtant, 16 sur 25 des pays de l’OCDE étudiés dénotent des disparités régionales plus importantes qu’en Tunisie, avec un écart interrégional d’environ 6 points de pourcentage.

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Graphique 2.17. Taux de création d'entreprises régionales dans les régions TL3 de l’OCDE, 2015
Graphique 2.17. Taux de création d'entreprises régionales dans les régions TL3 de l’OCDE, 2015

Note : Le taux de création d'entreprises est le ratio d'entreprises créées l'année passée par rapport à toutes les entreprises actives.

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

En Tunisie et dans les pays de l’OCDE, les régions caractérisées par des taux de création d’entreprises supérieurs enregistrent également des taux de fermeture d’entreprises élevés (graphique 2.18). Si les régions des capitales sont particulièrement dynamiques dans la majorité des pays de l’OCDE, à la fois en termes de création et de fermeture d’entreprises, l’inverse s’applique à la Tunisie. La région TL3 de Tunis a enregistré les proportions les plus basses de créations d’entreprises ainsi que de fermetures d’entreprises. Cela peut s’expliquer par deux facteurs : l’importance du secteur informel et le fait que les données de création et de fermeture des entreprises en Tunisie incluent l’emploi indépendant, contrairement aux pays de l’OCDE, où ces taux reposent uniquement sur les entreprises employeuses. L’enregistrement de l’emploi indépendant est souvent moins laborieux en termes de réglementation administrative. Si l’emploi indépendant augmente les taux de naissance des entreprises en Tunisie, les effets positifs réels d’un taux élevé de nouvelles entreprises sont tempérés dès lors que l’emploi généré par ces entreprises est limité. En outre, de nombreuses entreprises ainsi que la majorité des grandes entreprises sont déjà basées à Tunis, ce qui peut réduire mécaniquement la proportion de nouvelles entreprises existantes par rapport aux autres régions tunisiennes.

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Graphique 2.18. Taux de fermeture d'entreprises régionales dans les régions TL3 de l'OCDE, 2015
Graphique 2.18. Taux de fermeture d'entreprises régionales dans les régions TL3 de l'OCDE, 2015

Note : Le taux de fermeture d’entreprises est le rapport entre le nombre d’entreprises fermées au cours de la dernière année et le nombre total d’entreprises actives.

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

La prédominance de micro-entreprises constitue un défi pour le développement de l’emploi dans les régions tunisiennes. La grande majorité des entreprises de Tunisie (88 %) se compose d’entreprises non-employeuses, c’est-à-dire des entreprises sans employés. La proportion d’entreprises employeuses est considérablement inférieure à la moyenne de 40 % de l’OCDE (graphique 2.19). En effet, la Tunisie enregistre la proportion d’entreprises non-employeuses la plus élevée de tous les pays étudiés. La dépendance aux micro-entreprises diminue également la productivité dans la mesure où les entreprises sont en moyenne moins productives (OCDE, 2017[28]).

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Graphique 2.19. La part des entreprises employeuses en Tunisie et dans les pays de l'OCDE, 2015
Graphique 2.19. La part des entreprises employeuses en Tunisie et dans les pays de l'OCDE, 2015

Note : Les entreprises employeuses dénombrent au moins un employé. 2015 ou dernière année disponible.

Source : OCDE (2018[4])Statistiques régionales de l’OCDE (base de données)https://doi.org/10.1787/region-data-fr.

Les entreprises employeuses sont géographiquement fortement concentrées dans une poignée de régions de Tunisie. Les régions du Grand Tunis et Centre-Est représentent plus de 70 % de toutes les entreprises employeuses du pays (graphique 2.20). Dans ces deux régions, la proportion d’entreprises employeuses est démesurément élevée et supérieure à la part des régions dans l’ensemble de la population d’entreprises du pays. D’un autre côté, les régions intérieures éloignées du Nord-Ouest et Sud-Ouest concentrent les parts les plus importantes d’entreprises non-employeuses. La mise en place de conditions propices au développement de ces entreprises en entreprises employeuses peut non seulement créer de nouveaux emplois dans les régions défavorisées, mais également accroître leur productivité et donc les niveaux de vie régionaux.

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Graphique 2.20. Répartition des entreprises employeuses dans les macro-régions tunisiennes, 2015
Grandes régions (TL2)
Graphique 2.20. Répartition des entreprises employeuses dans les macro-régions tunisiennes, 2015

Note : Les entreprises employeuses dénombrent au moins un employé.

Sources : Données fournies par l’INS .

Flux d'investissement et investissement direct étranger

Malgré les mesures d'incitation du gouvernement pour propager les investissements privés à toutes les régions (cf. encadré 2.4), les flux d’investissement restent concentrés dans quelques zones de Tunisie. Les trois principaux bénéficiaires des investissements parmi les régions TL3, Tunis, Ariana et Ben Arous, concentraient plus de 60 % des investissements en Tunisie en 2015 (tableau 2.2). Plus de 45 % des investissements étaient capitalisés à Tunis uniquement. La moitié inférieure des gouvernorats en termes d’investissements atteignait au total moins de 5 % de l’ensemble des investissements en Tunisie. Les investissements directs étrangers présentent un degré similaire de concentration régionale. Pour attirer les investissements directs étrangers dans toutes régions de Tunisie, il serait judicieux de créer les conditions requises pour encourager et ouvrir les opportunités d'investissement dans des secteurs autres que ceux qui mobilisent les ressources naturelles. Un point de départ consisterait à sensibiliser les investisseurs à l’attractivité des grandes villes au-delà des trois principales régions bénéficiaires des investissements (Tunis, Ariana et Ben Arous).

En comparaison avec les pays de l’OCDE et la plupart des économies émergentes, l’investissement en Tunisie est faible, en partie à cause d’une réglementation commerciale ardue. (OCDE, 2018[1]). Le taux d'investissement en Tunisie est en déclin depuis le début des années 2000, en raison d’une diminution des investissements privés (OCDE, 2018[1]). Comme l’indiquent plusieurs études précédentes et le met en lumière l’indicateur de réglementation du marché des produits de l’OCDE/la Banque mondiale, les licences, autorisations préalables ou l’enregistrement des entreprises impliquent une procédure administrative lourde qui réprime les investissements commerciaux. La Tunisie se classe 80e sur 190 économies en termes de réglementation favorable au commerce, selon le rapport de la Banque mondiale sur la Facilité de faire des affaires (Banque mondiale, 2019[29]).

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Tableau 2.2. Total des investissements et investissements directs étrangers (IDE) dans les régions tunisiennes, 2015
Petites régions (TL3)

Gouvernorat

Nombre

Investissements

(en millions de TND)

IDE

(en millions de TND)

Investissements nationaux

(% IDE)

Investissements

régionaux

(% IDE)

Emploi créés

Total IDE (hors énergie)

3353

34 014

20 054

100 

354 396

Tunis

449

15 524

6 260

31.216

40

38 943

Ariana

222

2 855

2 531

12.621

89

16 778

Ben Arous

346

3 084

2 290

11.419

74

42 595

Sousse

462

2 263

1 793

8.939

81

39 546

Zaghouan

165

1 265

1 090

5.437

85

22 398

Nabeul

496

1 785

1 027

5.121

59

51 428

Bizerte

226

1 044

814

4.062

80

36 606

Kairouan

50

1 015

637

3.174

67

6 275

Gabes

22

891

835

4.163

94

2 161

Monastir

434

1 133

824

4.111

75

43 710

Médenine

49

758

480

2.396

65

4 033

Sfax

115

704

265

1.320

37

9 630

Kasserine

6

263

234

1.168

89

784

Beja

45

296

206

1.025

70

8 835

Jendouba

31

264

150

0.75

62

4 268

Mahdia

51

302

192

0.96

62

6 267

Manouba

104

219

166

0.83

76

8 908

Sidi Bouzid

10

78

74

0.37

96

1 533

Siliana

21

74

63

0.32

89

4 971

Gafsa

12

77

56

0.28

85

1 860

Tozeur

19

69

35

0.18

54

1 400

Kebili

8

35

21

0.11

63

330

Kef

8

11

7

0.04

72

1 116

Tataouine

2

5

2

0.01

33

21

Note : Les investissements et les investissements directs étrangers sont mesurés en millions de dinars tunisiens.

Source : Données fournies par FIPA (Agence de Promotion de l’Investissement Extérieur).

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Encadré 2.4. Nouveau code d’investissement

Le gouvernement tunisien a adopté une nouvelle loi sur les investissements qui a pris effet le 1er avril 2017. Cette nouvelle législation propose un certain nombre de mesures d’incitation financière et fiscale pour encourager les investissements :

  • Réduction du taux d’imposition sur le revenu à 10 % pour les entreprises qui exportent

  • Subventions d’investissement pour les secteurs et chaînes de valeur prioritaires

  • Exonération totale de TVA et taxes douanières sur les entrées de produits à réexporter

Ce nouveau code d’investissement encourage activement les investissements dans les régions économiquement défavorisées du sud et du centre de la Tunisie, via divers moyens :

  • Exonération fiscale totale de cotisations sociales pendant 10 ans maximum pour les entreprises basées dans des zones de développement régional

  • Subventions d'investissement spécifiques dans les zones de développement régional couvrant jusqu’à 30 % du coût d’investissement plafonné à 3 millions de dinars

  • Couverture des cotisations patronales par l’État pendant 5 à 10 ans

Source : République tunisienne (2016[30])Loi de l’investissement, http://www.tunisieindustrie.nat.tn/fr/download/cfga/LOI71-2016_fr.pdf.

Les investissements directs étrangers sont principalement implantés dans les régions côtières de Tunisie. Les régions du Grand Tunis et Nord-Est représentent à elles seules 75 % de tous les investissements directs étrangers en Tunisie (graphique 2.21). À l’inverse, les régions Centre-Ouest et Sud-Ouest ont bénéficié uniquement d’infimes proportions d’IDE. La création de conditions propices à rendre les régions tunisiennes, en particulier les régions économiquement défavorisées, plus attractives pour les investissements directs étrangers pourrait stimuler leur croissance économique. Depuis 2017, le gouvernement tunisien encourage directement les investissements dans les régions intérieures du pays par l’intermédiaire du nouveau code d’investissement (cf. encadré 2.4 ci-dessus). Il octroie des exonérations fiscales aux entreprises qui investissent dans les zones de développement régional du centre et de l’est du pays. De plus, il propose des subventions d'investissements qui peuvent couvrir jusqu’à 30 % des coûts d'investissement engagés pour les projets d’investissement dans ces régions. Attirer ce type d'investissements peut contribuer à l’effort fourni par les régions isolées pour rattraper leur retard par rapport aux régions côtières du pays. Pour ce faire ces investissements doivent s’accompagnent d’un engagement pérenne susceptible de générer un impact positif durable. Pour parvenir à un tel afflux durable d’investissements, les responsables politiques ne doivent pas se contenter de recourir à des mesures d’incitation à l’investissement sous la forme d’abattements fiscaux mais, de manière plus générale, doivent réunir les conditions propices à rendre un lieu plus attractif pour les investissements, comme par exemple en limitant les restrictions applicables au financement des investissements ou en simplifiant la réglementation du marché des produits (OCDE, 2018[1]).

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Graphique 2.21. Répartition des flux d'IDE en Tunisie, TL2 2015
Graphique 2.21. Répartition des flux d'IDE en Tunisie, TL2 2015

Source : Données fournies par IFAP (Agence de Promotion de l’Investissement Extérieur).

Exploitation des avantages de l’urbanisation

La mobilisation du potentiel de l’urbanisation grandissante peut stimuler la productivité et les niveaux de vie dans les régions tunisiennes. La productivité de la main-d’œuvre se révèle plus élevée dans les grandes villes qu’ailleurs. Si les caractéristiques de la main-d’œuvre et une structure sectorielle différente expliquent en partie l’avantage de productivité des grandes villes, il reste que ce niveau élevé de productivité s’explique également par les avantages de productivité, dits « avantages de l’agglomération », propres aux villes plus importantes ou plus densément peuplées (OCDE, 2015[31] ; Ahrend et al., 2017[32]). Les économies des grands villes sont davantage centrées sur les secteurs des services avancés et leur main-d’œuvre comporte une plus grande proportion de personnes qualifiées et de formation supérieure, qui se montrent plus productives.

Les avantages de l’agglomération représentent près de la moitié de l’avantage de productivité des grandes villes. Ils sont générés par le travail dans des zones plus importantes et densément peuplées en raison (i) des débordements d’apprentissages et de connaissances, (ii) de la spécialisation et (iii) des marchés du travail (Duranton et Puga, 2004[33]). Si l’on tient compte des caractéristiques de la main-d’œuvre, doubler la taille de la ville engendre un avantage de productivité de 2 à 5 % (Combes, Duranton et Gobillon, 2011[34]).

L’ensemble des territoires peuvent tirer profit d'une connexion avec des métropoles et leurs économies. Si les métropoles sont d'importantes sources de développement économique, elles sont également fortement connectées à d’autres lieux situés dans les mêmes régions mais plus éloignés, via un grand ensemble de connexions. Chaque lieu possédant ses propres ressources, on observe souvent des complémentarités à l’origine de ces connexions et sources d’avantages pour tous les types de régions. Par conséquent, faire en sorte que le potentiel des connexions spatiales soit pleinement mobilisé est une manière d’améliorer la productivité et de réduire les disparités spatiales.

Dans l’ensemble de l’OCDE, les régions proches des métropoles, et en particulier des grandes métropoles, se sont développées plus rapidement en termes de population et de PIB par habitant que les régions plus éloignées (OCDE, 2015[31] ; Veneri et Ruiz, 2016[35]). Cependant, les économies d’agglomération ne se limitent pas exclusivement aux grandes villes et à leurs environs mais produisent un effet positif sur les régions plus éloignées des grandes villes (OCDE, 2015[31] ; Ahrend et Schumann, 2014[36]). Si les débordements positifs diminuent avec la distance, ils restent néanmoins mesurables jusqu’à 200 à 300 kilomètres des grandes villes.

En Tunisie, les villes moyennes, banlieues et zones rurales proches d'une grande ville ont enregistré le niveau de croissance démographique le plus haut entre 1990 et 2015. À l’instar des pays de l’OCDE, les grandes villes tunisiennes semblent donner lieu à une agglomération, qui peut compter parmi les nombreux facteurs d’une importante croissance démographique dans les villes moyennes, banlieues et zones rurales avoisinantes (graphique 2.22). Plus les municipalités tunisiennes sont éloignées des grandes villes, plus leur croissance démographique s’affaiblit de manière significative entre 1990 et 2015. Tandis que le nombre de municipalités situées à une distance inférieure à la distance médiane par rapport à une grande ville a augmenté de plus de 50 % pendant cette période, le nombre de municipalités situées à une distance supérieure à la distance médiane n’a augmenté que de 29 %.

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Graphique 2.22. Distance par rapport à la grande ville la plus proche et croissance démographique, 1990-2015
Municipalités tunisiennes non classées dans la catégorie des « grandes villes »
Graphique 2.22. Distance par rapport à la grande ville la plus proche et croissance démographique, 1990-2015

Note : Cet exemple inclut les municipalités tunisiennes non définies comme « grandes villes » en fonction du niveau d’urbanisation. Cette figure exclut les cas aberrants extrêmes avec une croissance démographique supérieure à 250 %.

Sources: Données fournies par (Schiavina, Freire et MacManus, 2019[37]) et calculs effectués par OCDE, 2019.

La proximité avec les grandes villes facilite « l’emprunt » d’économies d’agglomération auprès des grandes villes. Elle simplifie l’exploitation des grands marchés et la fourniture de services généralement proposés dans les grandes villes. Par exemple, les régions rurales proches des grandes villes en Europe se sont développées très rapidement ces dernières années (OCDE, 2016[38])11. Entre 2000 et 2015, elles ont connu une croissance annuelle de 1,1 %, et sont même allées jusqu’à dépasser les régions urbaines de 0,4 points de pourcentage (graphique 2.23, (OCDE, 2018[8])). La représentation de la croissance démographique des municipalités tunisiennes illustrée dans le graphique 2.22 suggère un schéma similaire en Tunisie, malgré l’absence de données détaillées concernant le PIB national pour estimer le niveau exact de croissance économique.

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Graphique 2.23. Croissance de la productivité dans les régions principalement rurales par rapport aux régions principalement urbaines
Graphique 2.23. Croissance de la productivité dans les régions principalement rurales par rapport aux régions principalement urbaines

Note : Régions européennes TL3.

Source :OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

L’urbanisation grandissante en Tunisie peut être un catalyseur de croissance économique et de productivité dans les régions intérieures éloignées du pays dès lors que l’urbanisation coïncide avec la baisse de croissance démographique qui relâche la pression exercée sur les ressources publiques et domestiques. La proportion de population de Tunisie vivant dans des régions principalement urbaines a augmenté de 6 % au cours des 20 dernières années (graphique 2.24). Dans l’ensemble, la population des régions urbaines est passée de 5 millions en 1993 à 7 millions d’habitants en 2015. Le développement des économies urbaines crée des opportunités de marché plus importantes, élargit le champ de spécialisation des industries spécifiques et favorise la diffusion des connaissances. Par conséquent, soutenir la croissance et investir dans les agglomérations existantes des régions tunisiennes peut renforcer le développement et la cohésion régionale.

L'adoption d’une définition économique des grandes villes en fonction de leur envergure économique et l’élaboration d'indicateurs à cette échelle peuvent permettre de hiérarchiser les priorités d’investissement pour renforcer le système urbain en Tunisie et sa capacité à générer des externalités positives vers les autres régions. La réalité fonctionnelle des grandes villes s’écarte de leurs frontières administratives. Dans l’ensemble des pays de l’OCDE, les zones fonctionnelles urbaines sont identifiées par l’entremise des connexions économiques (échange de biens, services et flux de population) entre les grandes villes et leurs zones environnantes. Les indicateurs de zones urbaines fonctionnelles permettent de hiérarchiser les priorités en termes de politiques publiques pour accroître la prospérité dans les grandes villes ainsi que dans les régions voisines (encadré 2.5 et graphique 2.25).

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Graphique 2.24. Part de population TL3 de Tunisie par type de région, 1993-2015
Graphique 2.24. Part de population TL3 de Tunisie par type de région, 1993-2015

Source : OCDE (2018[20]), OECD Regional Statistics (database), https://doi.org/10.1787/region-data-en.

Améliorer l’accessibilité des régions tunisiennes

Une insuffisance d’accès aux services publics fait obstacle au développement régional et à la convergence économique en Tunisie. Les régions côtières bénéficient d'un meilleur accès à la plupart des services publics, tels que les soins de santé ou l’éducation, que les régions intérieures. Le manque d'infrastructures de transport adéquates dans les régions intérieures freine le commerce et un impact négatif sur le développement régional.

La distance entre les régions éloignées et les zones urbaines ou aux centres économiques côtiers du pays reste une difficulté qui peut être atténuée par une amélioration des infrastructures de transport. Actuellement, les régions sud et ouest de Tunisie souffrent d’un déficit en réseaux routiers et autoroutiers de qualité. Une amélioration des réseaux routiers peut favoriser la connectivité des régions éloignées (OCDE, 2018[39]). Ainsi, les infrastructures publiques peuvent faciliter le déplacement des marchandises et la mobilité des travailleurs. Une meilleure connectivité pourrait également permettre aux régions éloignées « emprunter » les économies d’agglomération des grandes villes. Par exemple, des données issues de villes de taille moyenne en Allemagne démontrent qu’elles ont tiré profit de leur intégration à l’itinéraire d’une ligne de trains à grande vitesse qui relie deux grandes villes (Cologne et Francfort), ce qui a donné lieu à une hausse du PIB d’environ 8,5 % et a également augmenté la productivité de la main-d’œuvre de 3,8 % en l’espace de 6 ans (Ahlfeldt et Feddersen, 2018[40]).

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Encadré 2.5. Zones fonctionnelles urbaines

L’OCDE et la Commission européenne ont élaboré un concept de grandes villes qui tient compte de leur réalité économique plutôt que de leurs frontières administratives. Les Zones fonctionnelles urbaines (ZFU) englobent généralement un ensemble de municipalités contiguës qui inclut un centre urbain à forte densité de population et une aire de migration alternante à connexion fonctionnelle (OCDE, 2012[41]).

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Graphique 2.25. Définition des zones fonctionnelles urbaines (ZFU)
Graphique 2.25. Définition des zones fonctionnelles urbaines (ZFU)

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

Le développement d’infrastructures numériques pourrait constituer une alternative efficace pour améliorer la connectivité des régions éloignées. La fourniture d’infrastructures numériques est faible dans la plupart des régions de Tunisie et se caractérise par d’importantes différences régionales. En comparaison avec les pays de l’OCDE, les divergences régionales en termes d’accès au haut débit sont particulièrement importantes en Tunisie (graphique 2.26). En moyenne, 28,7 % des ménages tunisiens ont accès au haut débit. Dans la région Nord-Est, la part des ménages ayant accès au haut débit atteint les 37 %. À l’inverse, seulement 26 % des ménages disposent d'un accès au haut débit dans la région Centre-Ouest. Une meilleure couverture et une augmentation de la vitesse des connexions en haut débit peuvent stimuler le développement économique dans toutes les régions et favoriser la diffusion des connaissances en surmontant la distance physique.

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Graphique 2.26. Variation régionale du % des ménages disposant d’une connexion haut débit, 2017
Grandes régions (TL2) des pays de l’OCDE et de Tunisie
Graphique 2.26. Variation régionale du % des ménages disposant d’une connexion haut débit, 2017

Note : 2017 ou dernière année disponible.

Source : OCDE (2018[8]), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

copy the linklink copied!Conséquences pour le système des statistiques territoriales

Les statistiques territoriales constituent un outil puissant pour évaluer la croissance économique et la prospérité dans l’ensemble des régions tunisiennes. Elles indiquent qu’une insuffisance d’opportunités économiques, d’éducation et d’accessibilité dans les régions ralentit le développement économique en Tunisie et limite ainsi la croissance économique nationale. De manière générale, on observe une importante divergence entre les zones côtières et les régions intérieures ou occidentales de Tunisie, qui sont considérablement moins développées en termes de facteurs économiques ainsi que de bien-être des résidents.

Le renforcement des statistiques territoriales permettra de comparer les régions, à l’échelle nationale et internationale, ce qui offre la possibilité d’identifier les difficultés existantes et de définir des priorités de politiques publiques. En outre, les statistiques territoriales permettent de suivre les développements au fil du temps, une condition préalable au l’évaluation de l’efficacité et de l’impact des politiques mises en œuvre. Les statistiques territoriales peuvent surtout contribuer au développement régional de la Tunisie en favorisant une approche localisée qui adapte les politiques aux besoins, ressources, atouts et faiblesses propres à chaque région.

La mise en place de statistiques territoriales solides et comparables à l’échelle internationale, au sein d’un système statistique bien géré, est indispensable pour garantir l’utilité de ces statistiques et contribuer à la concrétisation d’un développement régional plus inclusif.

Références

[40] Ahlfeldt, G. et A. Feddersen (2018), « From periphery to core: Measuring agglomeration effects using high-speed rail », Journal of Economic Geography, vol. 18/2, pp. 355-390, https://doi.org/10.1093/jeg/lbx005.

[32] Ahrend, R. et al. (2017), « What Makes Cities More Productive?: Agglomeration economies and the role of urban governance: Evidence from 5 OECD Countries », OECD Productivity Working Papers, n° 6, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/2ce4b893-en.

[36] Ahrend, R. et A. Schumann (2014), « Does Regional Economic Growth Depend on Proximity to Urban Centres? », OECD Regional Development Working Papers, n° 2014/7, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/5jz0t7fxh7wc-en.

[17] Amin-Smith, N., D. Phillips et P. Simpson (2018), « Local government revenue decentralisation and funding divergence: An English case study », dans Fiscal Decentralisation and Inclusive Growth, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264302488-9-en.

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[29] Banque mondiale (2019), Doing Business 2019 - Training for Reform, Banque mondiale, Washington, DC.

[6] Banque mondiale (2017), South Asia Economic Focus: Growth Out of the Blue, Banque mondiale, Washington, DC, https://doi.org/10.1596/978-1-4648-1213-2.

[2] Banque mondiale (2014), The Unfinished Revolution: Bringing Opportunity, Good jobs and Greater Wealth to all Tunisians, Banque mondiale, Washington, DC.

[23] Banque mondiale (2013), Enterprise Surveys - Tunisia (2013), Banque mondiale, Washington, DC.

[34] Combes, P., G. Duranton et L. Gobillon (2011), « The identification of agglomeration economies », Journal of Economic Geography, vol. 11/2, pp. 253-266, https://doi.org/10.1093/jeg/lbq038.

[33] Duranton, G. et D. Puga (2004), « Micro-foundations of urban agglomeration economies », dans Henderson, J. et J. Thisse (dir. pub.), Handbook of Regional and Urban Economics, https://doi.org/10.1016/S1574-0080(04)80005-1.

[3] ECFR (2017), Peripheral Vision: How Europe can help preserve Tunisia’s fragile democracy, European Council for Foreign Affairs, https://www.ecfr.eu/publications/C440.

[10] Gallup (2019), Gallup World Poll, 2014-2016 / all countries dataset.

[19] Gennaioli, N. et al. (2013), « Human capital and regional development », The Quarterly Journal of Economics, vol. 128/1, pp. 105-164.

[5] Henderson, V., A. Storeygard et D. Weil (2012), « Measuring economic growth from outer space », American Economic Review, vol. 102/2, pp. 994-1028.

[43] Johnson, S. et al. (2009), « Is Newer Better? Penn World Table Revisions and Their Impact on Growth Estimates. », NBER Working Paper 15455.

[25] Kupets, O. (2017), The Labour Market Impact of Skills Mismatch, Institute for the Study of Labor (IZA).

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[7] Michalopoulos, S. et E. Papaioannou (2013), « Pre-colonial ethnic institutions and contemporary African development », Econometrica, vol. 81/1, pp. 113-152, https://doi.org/10.3982/ECTA9613.

[27] Neumark, D., B. Wall et J. Zhang (2011), « Do small businesses create more jobs? New evidence for the United States from the National Establishment Time Series », Review of Economics and Statistics, vol. 93/1, pp. 16-29, https://doi.org/10.1162/REST_a_00060.

[21] OCDE (2019), OECD Skills Outlook 2019 : Thriving in a Digital World, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/df80bc12-en.

[18] OCDE (2018), Maintaining the Momentum of Decentralisation in Ukraine, OECD Multi-level Governance Studies, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264301436-en.

[1] OCDE (2018), OECD Economic Surveys: Tunisia 2018: Economic Assessment, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/eco_surveys-tun-2018-en.

[24] OCDE (2018), OECD Regional Database.

[20] OCDE (2018), OECD Regional Statistics (database), OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/region-data-en.

[8] OCDE (2018), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

[39] OCDE (2018), Productivity and Jobs in a Globalised World: (How) Can All Regions Benefit?, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264293137-en.

[15] OCDE (2018), Rethinking Regional Development Policy-making, OECD Multi-level Governance Studies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264293014-en.

[28] OCDE (2017), Small, Medium, Strong. Trends in SME Performance and Business Conditions, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264275683-en.

[26] OCDE (2017), The Geography of Firm Dynamics: Measuring Business Demography for Regional Development, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264286764-en.

[11] OCDE (2016), OECD Regional Outlook 2016: Productive Regions for Inclusive Societies, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264260245-en.

[38] OCDE (2016), OECD Regional Outlook 2016: Productive Regions for Inclusive Societies, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264260245-en.

[31] OCDE (2015), The Metropolitan Century: Understanding Urbanisation and its Consequences, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264228733-en.

[12] OCDE (2014), OECD Regional Outlook 2014: Regions and Cities: Where Policies and People Meet, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264201415-en.

[16] OCDE (2012), Promoting Growth in All Regions, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264174634-en.

[41] OCDE (2012), Redefining « Urban »: A New Way to Measure Metropolitan Areas, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264174108-en.

[14] OCDE (2010), « Regional Development Policy Trends in OECD Member Countries », dans Regional Development Policies in OECD Countries, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264087255-2-en.

[42] OECD (2018), OECD Regions and Cities at a Glance 2018, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/reg_cit_glance-2018-en.

[4] OECD (2018), Statistiques régionales de l’OCDE (base de données), OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/region-data-fr.

[30] République tunisienne (2016), Loi de l’investissement, http://www.tunisieindustrie.nat.tn/fr/download/cfga/LOI71-2016_fr.pdf.

[13] Rosenthal, S. et W. Strange (2003), « Geography, industrial organization, and agglomeration », The Review of Economics and Statistics, vol. 85/2, pp. 377-393, https://www.mitpressjournals.org/doi/pdf/10.1162/003465303765299882 (consulté le 17 septembre 2018).

[37] Schiavina, M., S. Freire et K. MacManus (2019), GHS population grid multitemporal (1975, 1990, 2000, 2015), DOI: 10.2905/42E8BE89-54FF-464E-BE7B-BF9E64DA5218PID: http://data.europa.eu/89.

[35] Veneri, P. et V. Ruiz (2016), « Urban-to-rural population growth linkages: Evidence from OECD TL3 regions », Journal of Regional Science, vol. 56/1, pp. 3-24.

Notes

← 1. L’ITCEQ produit l’indicateur de développement régional. La méthodologie et les résultats sont disponibles sur son site Internet : www.itceq.tn.

← 2. Le Ministère des finances utilise l’indice de développement régional comme un des trois indicateurs de répartition budgétaire des communes tunisiennes. Les deux autres indicateurs correspondent au nombre d’habitants et au volume moyen de ressources disponibles par habitant à l’échelle locale.

← 3. Ces données proviennent de l’enquête nationale menée auprès des ménages tous les 5 ans. Pour calculer les taux de pauvreté, l’INS examine le coût d’un panier alimentaire qui garantit l’apport calorique nécessaire et indispensable à l’activité des personnes. Les niveaux d’apport reposent sur les directives de la FAO et de l’OMS.

← 4.  Des définitions précises sont fournies dans cette note : http://www.ins.nat.tn/sites/default/files/methode/pdf/Mesure_de_pauvrete_en_Tunisie.pdf.

← 5.  Cf. le lien suivant pour obtenir plus de précisions : http://eeas.europa.eu/archives/delegations/tunisia/documents/press_corner/cp_modernisation_appareil_statistiques_fr.pdf.

← 6. Les autres avantages des données d’éclairage nocturne sont les suivants : les erreurs de mesure peuvent être moins importantes que l’imprécision des estimations infranationales du PIB (Johnson et al., 2009[43]), elles offrent une fréquence temporelle plus élevée, elles assurent une couverture au kilomètre carré qui permet une analyse spatiale étayée et elles permettent une agrégation éventuelle au niveau d’une entité géographique, comme par exemple une métropole. Cf. (Henderson, Storeygard et Weil, 2012[5]) pour consulter une analyse détaillée.

← 7. Malgré ces avantages, quelques questions subsistent à propos de l’adéquation des données d’éclairage nocturne pour mesurer l’activité économique. Les comparaisons des chiffres bruts au fil du temps peuvent se révéler problématiques. Dans les zones à forte densité de population et avec une très importante activité économique, les données de luminosité peuvent être plafonnées, ce qui signifie qu’à de très hauts niveaux de luminosité, cette approche risque de ne pas faire la différence entre les zones enregistrant des luminosités nocturnes différentes.

← 8. L’estimation présentée dans le graphique 2.8 utilise la grille de PIB de la Banque mondiale, extrapolée par l’UNEP/GRID-Geneva. Cet ensemble de données se compose de données infranationales concernant le PIB de 2010. En partant d’une répartition régionale constante, l’OCDE a alors calculé les niveaux régionaux de PIB en Tunisie en 2017 sur la base des données nationales de PIB fournies par la Banque mondiale. Associées aux données démographiques régionales, ces informations génèrent une estimation des niveaux de PIB par habitant dans les régions tunisiennes en 2017.

← 9. Depuis le 1er juillet 2016, la Banque mondiale définit les économies à faible revenu comme celles dont le RNB par habitant est compris entre 1 026 $ et 4 035 $ et les économies à revenu intermédiaire supérieur comme celles dont le RNB par habitant est compris entre 4 036 $ et 12 475 $ : https://blogs.worldbank.org/opendata/new-country-classifications-2016.

← 10. Cette comparaison et les résultats pour la Tunisie doivent être considérés avec précaution étant donné que les chiffres ne correspondent pas aux statistiques officielles.

← 11. Cf. graphique 1.2 pour consulter une explication de la classification des petites régions en régions principalement rurales, urbaines et intermédiaires.

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